Chapitre premier. Les villes
p. 29-86
Texte intégral
Introduction
1L’historiographie archéologique albanaise réserve une place insignifiante à l’étude de la ville romaine. Pour ce courant historiographique, il était plus important de retracer le processus de la genèse de la ville et de l’intégrer dans l’étude générale de la civilisation illyrienne que de suivre les développements et les transformations urbaines successives, y compris à la période romaine. En effet, on note l’absence de conception d’ensemble de l’occupation des sites antiques. Les recherches archéologiques ont été limitées à la fouille de monuments spécifiques, ce qui conduit à une approche très restreinte qui ne permettait pas de connaître les changements de l’ensemble de la ville ni surtout de comprendre l’impact de Rome sur les villes, qu’elles soient illyriennes ou d’origine grecque. De surcroît, l’étude de ces monuments a souffert de la confusion entre les phases romaines et les niveaux hellénistiques, puisque l’impact urbanistique de Rome, dans la majorité des cas, s’intègre dans les zones urbaines édifiées durant la période préromaine. C’est ainsi que les monuments principaux comme les théâtres, les villae et les domus urbaines connaissent seulement des reconstructions et des restaurations durant l’époque romaine. Dans ce contexte, les méthodes de fouille appliquées par l’archéologie albanaise n’étaient pas les plus appropriées pour comprendre l’évolution du bâti1.
2Notre but est de caractériser l’héritage urbain dont les Romains auraient pu bénéficier dans les territoires de l’Illyrie du Sud et de la Chaônie et surtout d’évaluer l’apport de leur domination sur l’urbanisme local.
L’urbanisation préromaine
3Il est important de souligner que le processus d’urbanisation des régions de l’Illyrie est bien antérieur à l’arrivée des Romains. Dès le VIIe siècle avant notre ère ces territoires ont connu la colonisation grecque, en deux endroits stratégiques du littoral : à Dyrrachion (627 avant notre ère) et à Apollonia (vers 600 avant notre ère). Il s’agissait de fondations mixtes corcyro-corinthiennes2. Les causes qui conduisirent à la fondation de ces colonies furent plutôt économiques, commerciales, et visaient à l’exploitation des ressources naturelles de la région, comme par exemple le bois et les minérais3 ainsi que le bitume4, ces matières premières étant sans doute plus rentables à exploiter dans ces régions qu’en Grèce et dans d’autres régions balkaniques.
4L’attitude des Illyriens après la fondation de ces colonies demeure inconnue. Mais, pendant le Ve et le IVe siècles, on voit que les tribus des Taulantii et des Parthinii avaient une certaine influence dans les affaires des colonies, situation qui laisse penser que les deux communautés avaient de multiples relations5.
5Comme conséquence de ces relations entre colons et Illyriens, ainsi que par l’évolution politique et sociale des populations indigènes, on perçoit les premiers signes d’une urbanisation en Illyrie du sud, mais seulement un siècle et demi après les fondations grecques. Les sites émergeant sont tous situés sur des hauteurs, près des voies naturelles de communications, bien protégés par des remparts qui s’adaptaient au terrain et dominaient les alentours.
6La période allant du IVe au IIe siècle connaît le plus grand développement urbanistique dans ces régions (fig. 3).
7Parmi les centres principaux de l’intérieur du pays qui sont sur la voie de l’urbanisation, on note Phoinikè, Klos, Amantia et plus tard Byllis, Lissus, Antigonea, qui possèdent une position de contrôle sur le territoire qui les entoure. Malgré des lacunes considérables à propos de leur morphologie en raison de fouilles insuffisantes, ces centres présentaient manifestement un niveau beaucoup plus modeste de développement qu’Apollonia ou Dyrrachion. Les constructions les plus remarquables, comme les stades, les théâtres et les temples, remontent à la période hellénistique.
8Malgré l’importance de l’influence grecque en ce qui concerne les techniques de construction, la plupart de ces centres manquent de la monumentalité caractéristique des poleis grecques. La position géographique de ces sites explique leur participation limitée aux réseaux d’échanges. Leur importance ne dépassait pas le cadre régional.
9Ces particularités montrent que la naissance de la ville chez les Illyriens et les Épirotes constitue un processus très original, entièrement différent de celui des poleis grecques. Certains aspects de l’organisation sociale et économique des Illyriens et des Épirotes n’ont pas connu de changements malgré la diffusion du modèle urbain. P. Cabanes, sur la base des données littéraires et épigraphiques6, considère que la population de ces centres n’était pas entièrement urbaine et que la plupart des habitants résidaient sur le territoire7. Cela expliquerait l’existence d’autres agglomérations plus petites sises autour des grandes cités. En effet, quand le Pseudo-Scylax indique qu’au IVe siècle les Épirotes vivaient dans des villages8, il faisait probablement référence à ce mode de vie particulier, entre ville et campagne.
10Un stimulus moins important dans le développement urbain de ces régions a également été apporté par l’activité fondatrice de monarques hellénistiques, qui suivaient, dans leurs fondations, la tradition d’Alexandre le Grand. En Épire, Antigonea a été fondée par le roi d’Épire, Pyrrhos, qui l’a nommée d’après le nom de son épouse, ce qui permet de dater la fondation en 295 avant notre ère9. La ville se situe à 700 m d’altitude et contrôle ainsi la vallée du Drino. Son mur d’enceinte en blocs polygonaux, de 4000 m de long, entourait une surface de 47 ha10. L’autre ville, Antipatrea, a été fondée par le roi de Macédoine, Cassandre, et porte le nom de son père, Antipater11. Cependant, à la différence de la Macédoine où les rois s’étaient montrés aptes à fonder des villes et à unifier des territoires, le royaume illyrien ne semble pas avoir joué un rôle important dans la dynamique d’urbanisation12. Ce contexte a ralenti la naissance de la ville dans ces régions. Ainsi, les Romains ont trouvé en Illyrie un territoire très fragmenté, et, en ce qui concerne le niveau d’urbanisation, inégalement développé.
L’urbanisation à la période républicaine
11La présence romaine a laissé très peu de vestiges urbanistiques pendant l’époque républicaine. Apollonia et Dyrrachium ont maintenu leur statut de villes principales dans ce territoire, concentrant la présence romaine. Pour les autres villes de l’arrière-pays, c’était une période de décadence ; la plupart d’entre elles ont perdu leur importance économique. De plus, certaines villes souffrirent de destructions menées par les commandants romains qui cherchaient la gloire militaire personnelle et les butins de guerre. L’exemple le plus connu est celui de Paul-Émile, qui détruisit 70 villes en Épire13. Cette opération représente la réduction en esclavage la plus massive de l’histoire de l’Antiquité : 150 000 personnes se trouvèrent déportées par décision du Sénat. Les raisons de ce dépeuplement massif de la région ont uniquement un caractère économique14.
12L’absence de grande construction d’époque républicaine nous permet d’affirmer que les Romains n’ont, à cette époque, pas modifié le caractère de la vie urbaine en Illyrie. Les matériaux de construction et les techniques ont conservé leur caractère local. Évidemment, le rôle principal des villes au cours de cette période était de fournir un cadre administratif aux nouvelles régions conquises.
13Dans ce contexte, les villes les plus importantes restaient celles qui avaient établi une relation avec Rome dès le début et qui avaient un passé historique d’une certaine importance, comme Apollonia, Dyrrachium, Orikos, Bouthrôtos, Phoinikè, Scodra, Lissus, Byllis, et Amantia. L’administration du territoire par Rome, fondée sur ces villes, était ainsi plus facile parce qu’elle s’inscrivait dans une tradition ancienne. L’exemple le plus significatif des relations individualisées que Rome entretenait avec les cités d’Illyrie est l’ambassade dépêchée auprès du Sénat par les Apolloniates au lendemain de l’installation des Romains à Brundisium15. Ces relations connaissent un nouvel essor durant les guerres civiles. Apollonia, Byllis, Amantia et les autres villes de l’Épire se rallient à César et seule Dyrrachium opte pour Pompée16. Pour cette raison, Dyrrachium et Bouthrôtos, qui ne semblent pas avoir payé de taxes à César, furent punies et transformées en colonies. En revanche, Apollonia et les Amantins reçurent des privilèges. Dans ce contexte, l’aristocratie des peuples soumis prenait de l’importance face à Rome. Cette aristocratie des tribus représentait l’élément idéal pour que Rome puisse fonder une domination durable. Tout un système de patronage et de clientèle, où les relations individuelles jouent un rôle d’extrême importance, fut construit. Cette remarque n’implique pas l’idée que la romanisation fut un phénomène élitiste, mais que l’élite était le milieu social privilégié pour véhiculer la romanisation dans ces régions.
14La reconstruction des enceintes de certaines villes eut lieu pendant la période républicaine. L’exemple le plus clair est celui de la ville de Lissus. Deux inscriptions mises au jour dans cette ville, portant presque le même texte, montrent que L. Gaviarius et Meges, magistrats de Lissus, sont à l’origine de la reconstruction de l’enceinte de la ville17. Outre les raisons militaires, la reconstruction du mur d’enceinte correspond également au statut du municipe, limitant et marquant ainsi le territoire romain dans la province.
15Ainsi, les intérêts militaires et économiques des Romains en Illyrie et en Épire ont stimulé également les constructions publiques de caractère militaire pendant la période républicaine, dans des villes d’importance majeure pour Rome. Très vite ces villes deviendront les bases de l’expansion romaine. En revanche, dans les autres centres, dès le IIe siècle avant notre ère, les enceintes sont en désuétude. Par exemple, à Irmaj, l’enceinte commence dès cette période à être utilisée comme mur d’un bâtiment18.
16Un autre domaine connaît des grands investissements de la part de Rome : la création d’un réseau de communication dans la province (fig. 4). L’élaboration d’un tel réseau stratégique était importante pour contrôler les peuples conquis. La création de la province de Macédoine représente aussi le début d’un processus qui allait réunir ces territoires à tout l’Empire grâce à un réseau routier.
17La Via Egnatia était la première grande voie construite en dehors de l’Italie et la première qui reliait l’Europe à l’Asie19. Il s’agit d’une amélioration de la route transbalkanique qui a fonctionné dès la colonisation corinthienne entre Épidamne-Dyrrachion et Potidée (600 av. notre ère). La route prit le nom du proconsul romain de la province de Macédoine, Gnaeus Egnatius, qui, autour de 140 avant notre ère, avait commencé à construire des ponts et à réparer la route qui mène de l’Illyrie du Sud jusqu’en Macédoine. Strabon est le premier à nous donner des informations sur cette voie20. Il nous dit aussi que parallèlement à la route qui partait de Dyrrachium, une autre branche de la Via Egnatia commençait à Apollonia. Ces deux villes étaient à l’Ouest les deux ports de départ de la route. Les deux voies se rejoignent près de Peqin, fait attesté par les résultats de prospections archéologiques. La voie, qui contribue à faciliter les relations entre l’Italie et les provinces orientales, a été conçue pour satisfaire les impératifs militaires et économiques ainsi que le fonctionnement régulier de l’administration. De Dyrrachium et d’Apollonia, elle passait à travers les montagnes de la Macédoine, par Lychnides, Héracléa de Lyncestide, Édesse et Pella, jusqu’à Thessalonique. Ensuite elle continuait par la Chalcidique, Amphipolis et Philippes jusqu’au port de Néapolis, pour rejoindre Byzance et l’Hellespont. Au regard du nombre important des régions qu’elle reliait, la Via Egnatia est considérée comme un moteur de la romanisation, vecteur de transmission des ordres et des informations dans l’Empire, axe de transport des hommes et des produits, essentiel pour l’intégration politique et culturelle des provinces21.
18Pendant toute la période républicaine, la voie conserve son caractère militaire. En revanche, pendant les deux premiers siècles de l’Empire, les Romains ne se préoccupent pas de la Via Egnatia jusqu’à ce que Trajan, préparant la guerre parthique, ne refasse la voie. D’autres réparations ont été faites pendant le IIIe siècle, comme on le comprend grâce à la découverte de milliaires.
19La particularité du tracé de la Via Egnatia est de privilégier la ligne droite, ce qui entraîne des pentes fortes. Cette caractéristique rendait cette route peu utilisable pour des transports de matières pondéreuses mais elle pouvait convenir pour des courriers impériaux chargés de transmettre du courrier de Rome par exemple.
20Néanmoins, la Via Egnatia n’était pas la seule route construite par les Romains en Illyrie. On apprend par les itinéraires et les catalogues des voies romaines, composés vers la fin de l’Empire, l’existence d’une route qui traversait la côte dalmate et arrivait à Scodra. Cette route continuait ensuite jusqu’à Nicopolis, en traversant toutes les principales villes de l’Illyrie et de l’Épire chaône : Lissus, Dyrrachium, Apollonia, Aulona, Phoinikè et Bouthrôtos. D’Apollonia part une autre branche de cette voie qui passe par Amantia et Hadrianopolis et conduit jusqu’à Dodone. Une autre route partant de Lissus, passait par Ad Picaria (Vig), Pakoue (Pukë), Creveni (Vau Spas) et Theranda (Suhareka ?) pour arriver jusqu’à Naissus. Outre ces axes principaux, on connaît également la construction de routes secondaires, comme c’est le cas près de Byllis d’une via et de ses ponts financés par un chevalier romain, appelé M. Valerius Lollianus22.
21Ce dense réseau routier joue un rôle de première importance dans l’urbanisation et la romanisation de l’Illyrie du Sud et de l’Épire. Il stimule le processus de migration des populations des anciens oppida vers les plaines, à proximité des routes. Les antiques passages naturels étaient désormais abandonnés et plusieurs centres anciens étaient détruits par la guerre23. Parmi les 134 centres illyriens connus avant l’arrivée des Romains, seuls 64 connaissent une certaine continuité durant la période républicaine24. Vers la fin du Ier siècle avant notre ère, une période de paix commence dans l’Empire. Vivre sur les hauteurs devient alors inutile (fig. 5).
22Toutefois, pendant l’époque républicaine, on voit que les premières interventions urbanistiques romaines ont eu lieu dans les villes dont la position géographique est favorable, près de la mer ou des voies de communications. Cette première phase de l’urbanisation romaine est ainsi étroitement liée aux nécessités stratégiques. En revanche, la plupart des sites de hauteur n’étaient qu’officiellement sous la domination romaine. Cependant la conquête romaine de l’Illyrie n’a pas apporté de changements immédiats dans les formes architecturales utilisées. La république romaine manque à cette époque d’une forme architecturale suffisamment affirmée pour être appliquée dans les territoires qu’elle domine.
La période impériale
23La période impériale montre d’importantes transformations urbanistiques dans les villes de l’Illyrie et de la Chaônie. Pendant les trois premiers siècles de notre ère, ces villes jouent un rôle primordial dans la vie sociale et politique. Elles deviennent le vecteur principal de la civilisation et de la romanisation.
24C’est le processus de la colonisation qui marque plus profondément cette nouvelle époque de transformations urbaines. La fondation de colonies est commencée par César et continuée par Auguste. À cette époque les Romains connaissaient bien la géographie des territoires illyriens et épirotes grâce aux combats menés dans ces régions et au réseau de communications qu’ils avaient commencé à construire. L’œuvre d’Appien illustre très bien cette perception25.
25La fondation de ces colonies a stimulé des transformations de nature politique, économique, territoriale mais aussi sociale. Toutes ces colonies s’établirent dans les endroits les plus stratégiques de ce territoire et elles devinrent des centres de liaison entre Rome et l’Illyrie, la Grèce, la Macédoine et l’Asie Mineure. Les villes où les Romains fondent leurs colonies sont Bouthrôtos, Dyrrachium, Byllis et Scodra. Elles sont toutes situées près des routes principales, pourvues d’un port et riches en terres fertiles. Elles disposaient de tous les éléments nécessaires à Rome pour une expansion militaire et économique26.
26De manière générale, les Romains et les Italiens venus en Illyrie et en Épire comme colons ont trouvé un environnement favorable. Leur fusion avec les indigènes a généré une évolution urbaine renouvelée et a introduit une vie cosmopolite ouverte aux nouvelles conditions de l’Empire. Le rôle des vétérans dans cette œuvre de romanisation fut secondaire, leur majorité étant d’origine provinciale.
27La colonisation avait pour but non seulement d’établir des vétérans sur des terres qui leur étaient dues mais aussi de concentrer le pouvoir provincial dans ces villes chargées de stimuler le développement régional. Leur importance administrative et les connections avec Rome rendaient possible un meilleur contrôle du territoire et des habitants27.
Scodra
28La colonie de Scodra est la moins connue parmi les quatre fondations romaines de l’Illyrie du Sud. Administrativement, cette colonie appartenait à la province de Dalmatie. Sa déduction complète, d’une certaine façon, la chaîne des colonies de la côte adriatique se trouvant entre Doclea au nord et Dyrrachium au sud (fig. 6).
29Scodra constituait le centre du pouvoir du roi illyrien Genthios et le lieu où se sont déroulées les dernières actions de la conquête romaine de l’Illyrie28. Genthios avait choisi Scodra pour siège parce que la ville était bien protégée et difficilement prenable. De plus la ville était entourée des fleuves Kiri, Buna et Drin et aussi du lac Labeat. L’importance stratégique de la ville est remarquable aussi dans le pacte de Brundisium, dans lequel elle apparait comme une ville frontalière entre les territoires partagés par Octavien et Marc Antoine29.
30Jusqu’à tout récemment, seule une inscription trouvée à Doclea rapportait la création de cette colonie30. Quant aux sources littéraires, seul Pline la mentionne31. En 2011, grâce aux nouvelles fouilles entreprises dans la ville, une autre inscription latine mentionne la COLONIA SCOIDRINORVM32. L’inscription était remployée dans l’une des citernes vénitiennes de la forteresse de la ville et servait de pilier pour soutenir le plafond. Le texte était une dédicace à un personnage manifestement très connu, C. Memmio Iulio, ancien soldat et patron de la colonie de Scodra.
31Très peu de données archéologiques viennent renforcer ces données historiques peu nombreuses. Par conséquent, nos remarques et hypothèses seront fondées sur de maigres données. On ne connaît pas l’extension de la ville antique33. Toutefois, il semble qu’il y a de grandes similarités topographiques avec Lissus, ce qui implique une organisation urbaine en deux parties, ville haute et ville basse.
32Les fouilles effectuées dans la ville basse ont établi une séquence chronologique commençant au IIe siècle avant notre ère et s’achevant au VIe siècle34. Malheureusement, à cause du haut niveau de l’eau, on n’a pas pu découvrir un matériel stratifié plus ancien. En ce qui concerne la période romaine, les vestiges d’un grand bâtiment luxueux du IIe siècle de notre ère ont été trouvés tout près du mur d’enceinte de l’Antiquité tardive. Ce qui peut laisser penser que le mur construit au IVe siècle dans la ville basse, à l’ouest de la forteresse, limitait à cette époque une grande partie de la ville romaine. De plus, les fouilles récentes ont révélé dans la ville basse de grands travaux de terrassement qui datent du milieu du Ier siècle de notre ère, ce qui signifie qu’après la fondation de la colonie, les Romains entreprennent vraisemblablement un vaste projet d’urbanisation35.
33D’autres constructions de la période romaine tardive ont été trouvées au sud de la forteresse, au bord du fleuve Drin. Il s’agit très probablement d’une maison, qui était pourvue d’une mosaïque36. La construction date du IIIe siècle de notre ère et témoigne encore une fois de la vraisemblable extension de la ville romaine bien au-delà du tracé de l’enceinte hellénistique.
34Une villa découverte à Scodra37, datée au IIe siècle de notre ère, pourrait être considérée comme un mince indice servant à déterminer les limites du territoire urbain de la colonie et le commencement du territoire rural. Par ailleurs, des colonnes appartenant à des édifices de la période romaine ont été trouvées près du fleuve Buna et peuvent être une autre donnée importante pour évaluer l’extension urbaine38. Nous pensons que le territoire de Scodra, riche en plaines fertiles, irrigué par trois rivières et pourvu d’un lac, a conditionné le développement urbain de la ville en la rendant très étendue et fractionnée. Il est fort probable que la ville ancienne se situait dans le secteur limité par les fleuves Drin et Buna, et que l’espace occupé par la ville moderne actuelle appartenait dans l’Antiquité au territoire rural de la colonie.
35Au IVe siècle, Scodra devient la capitale de la province Prévalitane, ce qui atteste que pendant le Haut-Empire la ville avait connu un certain développement et joué un rôle important pour la région.
Lissus
36Le site de Lissus se situe au nord de Dyrrachium et au sud de la colonie romaine de Scodra et appartenait à cette série de centres importants du sud de la province dalmate (fig. 7). Fondées sur le texte de Diodore, qui considère Lissus comme une colonie de Denys de Syracuse39, les premières études ont considéré la ville comme une colonie grecque40.
37Les fouilles effectuées dans la ville, concentrées principalement sur les fortifications, ont démenti cette assertion de Diodore. Par ailleurs l’étude de l’activité de Denys dans le haut Adriatique ne justifie pas une fondation coloniale à Lissus41. Après la première guerre de Rome en Illyrie, Lissus est mentionnée comme la limite maritime sud du royaume illyrien42.
38Le développement de Lissus a eu lieu sur deux collines, Acrolissus et Lissus. Acrolissus constituait la colline la plus haute sur laquelle ont été trouvés des restes de fortifications du début de la période du fer43. C’est cette forteresse, située sur la montagne de Shelbum, qui devient la cible de Philippe de Macédoine. En 213 avant notre ère, il attaque la ville et c’est seulement grâce à la ruse qu’il réussit à conquérir Acrolissus, point haut bien protégé topographiquement44.
39Dans le passage de Polybe, on apprend que les deux entités urbaines ont existé parallèlement et se trouvaient équipées d’enceintes séparées. Les fouilles ont montré que parallèlement aux grands travaux de fortification de Lissus, à Acrolissus l’on construisit aussi une enceinte, sans qu’elle ne devienne un vrai centre urbain, se limitant à des fonctions militaires.
40Les murs sont l’unique monument connu de la Lissus hellénistique. Leur plan montre un système de rues reliant les différentes portes de la ville. Ces dernières étaient flanquées de bâtiments45. Jusqu’à la fin de la période républicaine, les Romains installés à Lissus ont habité dans la ville intra muros. Leur rôle semble important non seulement dans les relations commerciales avec l’Italie, comme le montre la grande quantité de céramique italique récoltée, mais aussi le réaménagement du plan urbanistique de la ville. Au Ier siècle avant notre ère, quand le nombre des Italiens augmente et que la ville devient un municipe romain, on voit de grands travaux de terrassement se déployer surtout dans la ville basse46.
41Très peu de bâtiments appartenant à la ville romaine ont été retrouvés à Lissus47. Mais on sait que pendant la période impériale la ville s’étendait en dehors de l’enceinte. Ce fait est aussi attesté par la nécropole romaine située au sud-ouest de la colline de la ville hellénistique. Parmi les tombes mises au jour, dont le nombre reste inconnu, quatre sont monumentales48.
42La prospérité de l’époque impériale était aussi stimulée par le port de la ville. Même s’il ne comptait pas parmi les plus connus, il constituait une porte primordiale ouvrant sur l’une des plus grandes routes de l’Empire romain, Lissus-Naissus, reliant le haut Adriatique avec les provinces danubiennes.
Dyrrachium
43Une légende, transmise par Appien, explique qu’un roi barbare du nom d’Épidamnos fonda une cité et la nomma d’après son nom. Après lui, Dyrrachos, le fils de sa fille et de Poséidon ajouta à la cité un port et l’appela Dyrrachion49. Dion Cassius décrit Dyrrachium comme une ville située dans la province de Macédoine et qui, avant l’arrivée des colons grecs, appartenait à la tribu illyrienne de Parthinii. Il nous raconte aussi qu’auparavant la ville s’appelait Épidamne et que les Romains changèrent son nom à cause de la ressemblance avec le mot latin damnum, qui veut dire maudit50. Pausanias distingue aussi Épidamne de Dyrrachium quand il écrit que le lieu qu’on appelle Épidamne était à son époque totalement abandonné et que les deux sites n’étaient pas très éloignés l’un de l’autre51. Ces sources nous obligent à nous demander s’il s’agit d’une unique ville portant deux noms ou de deux villes distinctes52 ! Toutefois au cours de la période romaine il existait un seul site appelé Dyrrachium.
44Le site était le plus important et le plus prospère de la région. La ville avait établi des relations avec Rome dès la première guerre illyro-romaine. Pendant les guerres civiles elle était devenue la base principale des troupes de Pompée53. Elle est souvent mentionnée dans les sources anciennes. Cicéron la considère comme une ville libre et fidèle54, alors que Catulle l’appelle la taverne de l’Adriatique55. Sa position géographique, son port, le plus important de l’Adriatique, le territoire large et fertile qui l’entoure, sa situation par rapport à la Via Egnatia, conduisirent les Romains à fonder là une colonie.
45La colonie remonte à la période d’Auguste et s’appelait Colonia Iulia Augusta Dyrrachinorum. On considère que sa déduction eut lieu en 30 avant notre ère, immédiatement après la bataille d’Actium56.
46Nous disposons de très peu de données pour reconstruire le modèle urbain de cette colonie (fig. 8). L’élévation du niveau de la mer et le développement urbain moderne rendent difficile l’étude de la ville romaine, et on ne connaît presque rien des premières interventions urbanistiques des colons dans la ville. On suppose seulement qu’une des phases du mur d’enceinte, construit entièrement en briques, appartient à cette période de la fondation de la colonie57. Les autres constructions connues sont toutes postérieures à cette date.
47Les nombreuses inscriptions latines découvertes permettent de se faire une idée des monuments les plus marquants de la ville. Une des inscriptions cite la construction de l’aqueduc par l’empereur Hadrien et sa reconstruction par Alexandre Sévère58. La source de cet aqueduc se situait près du fleuve Erzen (ancien Ululeus) ; la conduite passait par la colline d’Arapaj, où la plaque avec l’inscription a été trouvée et arrivait jusqu’à la ville de Dyrrachium à travers un système d’arches et de tunnels. De presque 15 km de long, il représente un des plus grands ouvrages d’art en Illyrie. Une grande partie des fondations de cet aqueduc est actuellement conservée, ce qui permet de suivre son parcours. Plusieurs collecteurs ont été trouvés, portant un timbre donnant les noms des ateliers et des magistrats de la ville qui s’occupaient des constructions publiques. Le fait que ce monument ait été construit sous le règne d’Hadrien (117-138) suggère que pendant la déduction de la colonie, les habitants firent usage des sources naturelles de la ville. En revanche, au IIe siècle, il se peut que la ville ait vu sa population augmenter, rendant indispensable la construction d’un aqueduc.
48Des thermes ont été mis au jour lors de travaux de construction des bâtiments modernes de la ville, et pour cette raison, les informations sont lacunaires et incomplètes59. Les plus importants sont les thermes publics situés tout près de l’amphithéâtre. Les constructions thermales de la ville appartiennent aux deux premiers siècles de l’Empire. Il paraît logique de mettre en rapport ces bâtiments avec la construction de l’aqueduc et l’extension de la ville.
49À la fin du règne de Trajan, un chevalier romain, L.Flavius Telluri Gaetulicus, duumvir quinquennalis, patron de la colonie, finança la construction d’une bibliothèque et offrit pour son inauguration un munus au cours duquel combattirent douze couples de gladiateurs60.
50La mention des gladiateurs renvoie à l’existence d’un amphithéâtre, bien connu archéologiquement (fig.9). Cependant seule une moitié de cet amphithéâtre a été dégagée61.
51Le monument a été construit avec la technique de l’opus incertum, illustrant l’utilisation à grande échelle de la brique. Sa capacité était de 20 000 personnes. La vie de ce gigantesque monument continue jusqu’à la fin du IVe siècle de notre ère, époque à laquelle Dyrrachium fut secouée par un tremblement de terre, faisant perdre à l’amphithéâtre toutes ses fonctions62. La construction de l’amphithéâtre témoigne de l’importance que les jeux de gladiateurs avaient pour la colonie. En effet une autre inscription documente un magister ludi qui probablement s’occupait de l’organisation de ces jeux63.
52Plusieurs nécropoles fouillées autour de la ville peuvent contribuer à délimiter la partie urbaine de Dyrrachium. Cependant, les chronologies relatives à ces nécropoles sont différentes. La première, hellénistique et républicaine, se situe au nord de la ville64. Deux autres sont de l’époque impériale ; l’une d’elle se situe probablement entre Dyrrachium et Porto Romano puisque de ce territoire proviennent la plupart des épitaphes de la ville65. L’autre se trouve au sud-ouest de la ville où des tombes très riches en matériel archéologique ont été découvertes, mais elles sont dépourvues d’inscription66. Une autre nécropole du IIIe siècle s’étend près de la zone appelée Stani67.
53La période de Trajan et d’Hadrien semble être la plus prospère pour la colonie de Dyrrachium. Cette prospérité continuerait jusqu’au milieu du IVe siècle de notre ère quand la ville devient la capitale de la nouvelle province d’Epirus Nova en 328 de notre ère. Mais il faut noter que la connaissance de la physionomie de la ville et de son développement urbain reste très lacunaire et qu’il serait aventureux de tirer des conclusions précises68.
Apollonia
54Située dans l’Antiquité à l’embouchure du fleuve Aous (ou Aôos, la Vjosë moderne), la ville représente le site le plus prospère d’Illyrie du Sud, grâce à la fertilité de son territoire et aux denses relations économiques et culturelles qu’elle entretient avec les sites de l’intérieur, de la Grèce et de la Grande Grèce (fig. 10).
55Pour les Romains, Apollonia, comme Dyrrachium, était devenue une possession permanente depuis les opérations de la première guerre illyro-romaine remontant à 229 avant notre ère, et constituait une base ferme de Rome dans la conquête des Balkans. Polybe montre comment la ville accueillit avec joie l’arrivée des armées romaines en 229 avant notre ère69.
56Pendant la période républicaine, la ville semble avoir conservé l’ancien caractère démocratique de son gouvernement, malgré l’installation de l’armée romaine70. La réputation culturelle de cette ville se laisse voir aussi dans le choix d’Octave, héritier de César, qui choisit Apollonia pour parachever son éducation71. Il se peut que César l’ait influencé dans ce choix, puisqu’il avait trouvé en Apollonia sa principale alliée dans la guerre civile menée contre Pompée. La ville offrait alors toutes les garanties de sécurité72. Quand Auguste devint empereur de Rome, il attribua à la ville le statut de civitas libera et immunis en signe de sa gratitude pour les mois passés à Apollonia et pour l’éducation qu’il y avait reçue.
57Les fouilles conduites récemment ont identifié l’existence de plusieurs réseaux d’organisation urbaine de la ville, parmi lesquels ceux de la ville haute remontent assurément à la période archaïque, tandis que celui de la ville basse est daté provisoirement des périodes hellénistique et romaine73.
58La ville grecque se développa plutôt intra muros, et l’enceinte est aussi le plus important monument de la ville grecque conservé jusqu’à nos jours74. Outre le mur de fortification, on connaît aussi trois stoai, ainsi qu’un temple extra muros, peut-être consacré à Artémis75, qui pourrait faire partie d’une série de temples construits autour de la ville après la fondation de la colonie grecque. Ces monuments étaient encore probablement utilisés jusqu’à la période républicaine. Leur beauté convainquit Cicéron d’appeler la ville magna urbs et gravis.
59Pendant l’époque impériale, on voit des interventions dans la zone monumentale de la ville. Le théâtre fut l’un des premiers à subir des reconstructions. Au Ier siècle la scène, l’orchestra et l’entrée sud du monument furent remaniés76. Le théâtre avait une capacité de sept mille spectateurs. Son proskénion atteignait 3 m de hauteur, décoré de bucranes, de patères et d’un canthare77. De nos jours il reste peu de vestiges de ce théâtre78. Les fouilles effectuées récemment au théâtre ont montré que l’orchestra a été aménagée aussi comme une arène pour les jeux de gladiateurs79. On comprend alors où se déroulèrent les combats des vingt-cinq couples de gladiateurs organisés pour l’inauguration du monument des Agonothètes. De tels combats avaient habituellement lieu à l’amphithéâtre ou au stade, bâtiments qui demeurent encore inconnus à Apollonia. Toutefois, les Apolloniates semblent avoir apprécié les jeux, contrairement aux goûts traditionnels de l’aristocratie grecque.
60On observe à cette époque à Apollonia la mise en œuvre d’un programme édilitaire visant à la création d’un nouveau centre monumental. L’édification d’un bouleutérion, d’un odéon et d’un temple, auxquels vient s’ajouter, vers le IIIe siècle, un arc de triomphe, contribue à transférer le centre de la vie publique au-delà de l’ancienne agora hellénistique80. Le prytane, agonothète, grand prêtre à vie du culte impérial, Q. Villius Crispinus Furius Proculus, fit construire au IIe siècle le « monument des agonothètes » (fig. 11)81.
61Cette appellation vient de l’inscription en grec sur l’architrave de façade qui indique que le prytane érigea ce monument pour honorer son frère mort82. Sa façade impressionnante est composée de six colonnes de style corinthien. À l’intérieur on trouve cinq gradins en forme de petit théâtre, constituant la salle où les réunions avaient lieu. Sa capacité d’accueil est évaluée à environ cent soixante personnes ce qui indique l’identification de ce monument avec un bouleterion. Ce fait laisse supposer que le conseil de la cité, selon la tradition grecque, était encore en fonction, même si c’était alors uniquement de manière honorifique. Sa construction dans la zone monumentale de la ville remplace probablement la curia, toujours située sur le forum. Tout près du bouleutérion se trouve un temple de style ionique. La découverte dans les ruines de ce monument d’un fragment de sculpture appartenant à Diane fait qu’on attribue traditionnellement le temple a cette divinité. La présence dans le centre ville du monument en l’honneur de la déesse romaine montre que même si les traditions grecques étaient fortes, l’influence romaine dans la vie religieuse avait fait son chemin83.
62L’odéon, qui fait également partie de ce nouveau centre monumental, est de dimensions modestes, équipé de seize gradins avec une capacité maximale de trois cents personnes (fig.12). Il s’agit d’une construction contemporaine du bouleutérion, c’est-à-dire remontant au IIe siècle de notre ère. Même si la ville comptait un théâtre et un bouleutérion, les Apolloniates firent construire un bâtiment consacré exclusivement aux spectacles musicaux.
63Le dernier monument construit dans le centre monumental est l’arc de triomphe. Il occupe un emplacement important dans la zone principale de la ville. L’arc fut probablement érigé par l’élite en l’honneur d’un empereur au IIIe siècle de notre ère. Actuellement, le monument est très partiellement conservé, puisque seules ses quatre piles subsistent sur une hauteur de presque un mètre. Il est situé près du bouleutérion et les deux monuments ne semblent pas tenir compte l’un de l’autre.
64Ainsi, on note que dès le début du Ier siècle et d’une manière plus intensive pendant tout le IIe siècle, le centre de la ville connaît une activité édilitaire de grande échelle. Ces constructions ont modifié en profondeur l’aspect physique de la ville qui prend toutes les caractéristiques d’une ville romaine provinciale.
65En ce qui concerne l’architecture domestique à Apollonia, des maisons construites pendant la période hellénistique sont utilisées jusqu’à la fin de l’époque impériale84. Elles appartiennent au type de maison à péristyle, qui est également le plus répandu en Épire, comme à Phoinikè, Bouthrôtos et Antigonea, mais aussi Byllis85. À Apollonia, une ville particulièrement aristocratique, on voit les meilleurs exemples des maisons urbaines de type méditerranéen. Plusieurs éléments de sculptures trouvés pendant les fouilles décoraient ces maisons, signe du niveau de vie raffiné de leurs propriétaires. D’ailleurs, toutes les maisons découvertes jusqu’à présent se situent près de la zone monumentale de la ville. Il faut noter qu’à Apollonia, comme dans les autres villes, les maisons suivent dans leur conception un modèle conservant le péristyle ou l’atrium.
66Apollonia n’est pas équipée d’un aqueduc comme c’est le cas de Bouthrôtos et de Dyrrachium. Il se peut que les moyens techniques aient été insuffisants pour mener à bien une telle construction, à moins que la ville n’ait été richement dotée en sources naturelles d’eau. Plusieurs puits et citernes sont connus dans la ville, et constituent apparemment la solution des habitants pour se fournir en eau86. Presque tous les puits étaient construits avec des blocs du mur d’enceinte, devenu inutile au début de la période impériale. L’absence de carrière de pierre près de la ville a favorisé la réutilisation du matériel de constructions antérieures. Toutefois, le plus grand bâtiment à caractère hydraulique d’Apollonia est la fontaine monumentale87. Il a sans doute été construit au IVe siècle avant notre ère. L’existence de ce monument présuppose un grand investissement de moyens, une très bonne connaissance du terrain, une population nombreuse et les capacités techniques pour maintenir un système hydraulique si complexe. L’auteur de la fouille situe la fin de l’utilisation de cette fontaine vers le début du Ier siècle avant notre ère en raison d’un tremblement de terre mais il est très probable que le monument ait été reconstruit durant la période romaine, puisque des traces de cette intervention sont particulièrement visibles dans son portique.
67Toutefois, même s’il est vrai que la forme générale de la ville n’est pas encore parfaitement claire, on observe des modifications urbaines importantes pendant l’époque impériale. Les fouilles des dernières années effectuées sur l’agora de la ville hellénistique ont mis en valeur la phase de destruction du portique de l’agora pendant l’époque impériale. Tout d’abord on ne trouve que très peu de fragments de céramique romaine datée après le Ier siècle de notre ère ; de surcroît une tombe appartenant au IIe ou au IIIe siècle de notre ère a été trouvée sur la fondation du mur de fond du portique88. Ce fait est important parce qu’il montre non seulement que le portique de l’agora hellénistique était hors d’usage à l’époque impériale, que l’agora elle-même avait été remplacée par un nouveau centre au IIe siècle, mais aussi que ce secteur de la ville était complètement abandonné à cette époque. Alors qu’aux époques archaïque et hellénistique cette zone située entre les deux collines de la ville haute était la plus importante, à la période romaine elle semble perdre toute importance. À cette époque la ville se développe en effet vers l’ouest, où se déploient des quartiers et des thermes.
68Le tremblement de terre de 345 de notre ère à Apollonia détruisit plusieurs bâtiments importants de la ville. De plus, vers le VIIe siècle, les fleuves Seman et Vjosa, vitaux pour Apollonia, changèrent de direction et la ville perdit définitivement son importance89.
Byllis
69La ville était placée au milieu de terres très fertiles, caractéristique qui constitue probablement la raison principale de la déduction des colonies romaines, même si elle avait soutenu Rome contre Genthios et César pendant les guerres civiles. La fondation de la colonie est mentionnée par Pline dans sa Naturalis Historia90, mais elle est aussi confirmée par la grande inscription rupestre gravée sur une des falaises de la ville91.
70La ville a été construite à 524 m d’altitude et son mur de 2550 m long protège une surface de 30 ha. L’organisation administrative de la ville compte parmi les mieux connues grâce à la découverte de nombreuses inscriptions, qui permettent d’avoir une idée claire sur la vie du koinon des Bylliones92.
71La ville a connu un degré considérable d’urbanisation, surtout au cours des IIIe-IIe siècles avant notre ère. Elle fut organisée d’après un système orthogonal per strigas. Les deux stoai et le stade comptent parmi les monuments les plus importants de l’agora de la période hellénistique. Leur construction représente une solution idéalement adaptée au terrain. Les gradins sont ainsi construits sur un seul côté. Ces monuments forment un complexe monumental, reconstruit pendant la période romaine, en même temps que le théâtre de la ville (fig. 14)93. Il semble que l’intervention romaine au théâtre touche la scène, laquelle fut enrichie d’une frise décorée de rosettes et de guirlandes. La date précise de ces interventions n’a pas été établie mais elles sont considérées comme étant liées à la fondation de la colonie94.
72Ainsi, avec la fondation de la colonie, il y eut en premier lieu des reconstructions et des adaptations de monuments précédents suivant les nouveaux plans urbains romains. Le mur d’enceinte de la ville fut reconstruit par Auguste comme vient l’attester une inscription en latin placée à l’entrée d’une des portes de la ville. La reconstruction avait probablement pour but la conservation du mur de la ville en signe de monumentalité, parce qu’à cette période il n’était plus nécessaire de se protéger. La reconstruction de ce mur a joué un rôle important dans la réorganisation des espaces à l’intérieur de la ville. Il marque d’une certaine façon le territoire initial de la colonie, ou plus exactement la zone monumentale, puisque pendant l’Empire l’extension des villes dans les plaines devenaient un phénomène habituel. Ce mur était pourvu de plusieurs portes en dehors desquelles étaient organisées les nécropoles.
73En ce qui concerne les bâtiments d’habitations, seuls deux d’entre eux ont été entièrement fouillés. Toutes les constructions ont été organisées dans des insulae et chaque insula était composée de huit maisons95. Elles sont dotées d’un péristyle et furent en usage pendant l’époque romaine, période à laquelle appartiennent des mosaïques et des fragments de sculpture. Leur architecture appartenant à la période romaine ne change pas beaucoup, en dehors de l’ajout de quelques nouvelles pièces qui servaient au stockage des produits agricoles. La continuité de la vie dans ces maisons et le maintien des formes architecturales laissent à penser que dans le domaine de l’architecture domestique, les formes préexistantes ont été maintenues, probablement pour conserver le même mode de vie.
74D’autres informations sur les constructions de la période post-coloniale nous sont parvenues à travers les inscriptions latines découvertes pendant les fouilles de la ville96. Certaines mentionnent les constructions des thermes, des temples et des monuments publics qui ont transformé l’urbanisme de Byllis. Les rues de la ville hellénistique sont conservées et le système per strigas est respecté.
75On considère que la ville s’est étendue pendant la période coloniale dans les plaines autour de la colline de la ville hellénistique. De telles terres fertiles ne pouvaient pas être laissées inutilisées par les colons romains et par l’élite de la ville, qui fondaient leur richesse sur l’exploitation agricole. Même si l’archéologie nous transmet très peu de données, les carrières de la ville font penser que des programmes importants de constructions se déroulèrent pendant le haut empire puisque on y note une dense utilisation de la pierre pendant la période impériale97.
Orikos
76Les ruines d’Orikos se situent dans la partie méridionale de la baie de Vlora, au pied des montagnes acrocérauniennes. La ville constituait dans l’Antiquité la limite entre les provinces de Macédoine et d’Épire. Polybe dit qu’Orikos est la première cité qu’on rencontre à droite de l’entrée dans l’Adriatique98. La ville est souvent mentionnée pendant les guerres civiles puisqu’elle constituait la position choisie par César comme point de départ de la guerre contre Pompée. La ville était alors tenue par Pompée, qui avait laissé comme commandant de la garnison composée de Parthinii, Lucius Torquatus. Ce dernier, sous la pression de la population de la ville, avait ouvert les portes et s’était soumis à César99. Orikos devint ainsi la base navale principale de César, et pour cette raison il y fit stationner une garnison100.
77On ne connaît que peu de choses des origines de son urbanisation. On ne sait pas non plus si elle fut à l’origine une colonie eubéenne. Le plus ancien témoignage de l’urbanisation de la ville est le mur d’enceinte, construit au IVe siècle avant notre ère. Ce mur, ainsi que quelques fragments d’autels de temples de la période hellénistique, montrent qu’à Orikos, comme dans les autres centres de l’Épire et de l’Illyrie méridionale, la période qui va du IVe au IIe siècle avant notre ère est caractérisée par un essor urbanistique important. Cette période de développement urbain est aussi documentée par les nombreuses maisons et les voies taillées dans la roche de la colline, encore visibles aujourd’hui sur le site.
78Le supposé « théâtre » est le monument le plus surprenant de la ville d’Orikos (fig. 15). Il est de construction très originale et pose plusieurs questions. Il a la forme d’une exèdre et est construit en pierres, dont la majorité était des blocs de remploi portant des inscriptions du IIe siècle avant notre ère101. D’après l’auteur des fouilles, les blocs appartenaient à un théâtre plus ancien, de la période hellénistique, dont on a retrouvé quelques traces dans la partie sud-est de l’édifice actuel. Dh. Budina le classe parmi ceux qui suivent le modèle architectural des théâtres dits transitoires, datés de la période hellénistique à la période romaine.
79L’élément le plus caractéristique de cette construction est le podium qui se trouve à une hauteur de 1,57 m. Les fouilles récentes effectuées sur ce monument par une mission albano-helvétique ont permis de découvrir un caniveau important situé au centre de la place, en face de l’exèdre. De plus, l’absence de cavea, de parados et d’un mur de scène nous pousserait à reconnaître dans cet édifice plutôt un nymphée qu’un théâtre102.
80En réalité, on sait peu de choses sur la ville de la période romaine. Même les dernières fouilles effectuées dans la ville ont montré que la céramique de la période romaine est quasi absente103. La ville a manifestement connu une décadence pendant l’époque impériale et c’est très probablement la petite agglomération portuaire d’Aulona qui prend à cette période plus d’importance. Cette hypothèse se fonde aussi sur les sources historiques. D’abord, une notice sur Orikos de Flavius Philostratus mentionne la restauration de la ville par Hérode Atticus, alors qu’elle connaissait une époque de décadence104. De plus, on ne voit pas apparaître le nom de la ville dans la Tabula Peutingeriana, alors que la ville d’Aulona est mentionnée. Ces deux faits suggèrent que la ville d’Orikos connaît un déclin à l’époque romaine.
Amantia
81Amantia est située sur une colline dont le sommet culmine à 613 m d’altitude et son organisation urbaine se développe en terrasses s’étageant le long des versants, de façon très semblable à ce qui a été utilisé pour élaborer le système urbain de Phoinikè (fig. 16).
82La ville s’était rangée aux côtés de Rome contre les royaumes illyrien et macédonien et, pendant la guerre civile, la ville avait rejoint César contre Pompée. Amantia échappa aux graves déprédations commises lors de ces guerres et, à la fin de la période républicaine, elle avait conservé l’autonomie de son administration interne. Sa population est mentionnée comme Amantini liberi105. L’autonomie a rendu possible la continuation de la vie urbaine pendant l’époque impériale, bien que l’activité de construction semble pour cette période fort limitée106.
83Les vestiges archéologiques appartiennent plutôt à des monuments hellénistiques réutilisés pendant la période romaine. C’est le cas du stade et d’un temple. Le stade est le monument le plus représentatif de la ville (fig. 17).
84Il a été construit au IIIe siècle avant notre ère sur un terrain choisi avec soin. Son plan est régulier, comme celui de plusieurs autres stades de l’époque hellénistique. Le stade fonctionnait encore pendant la période romaine mais sans profiter de grandes interventions de restauration. Seuls quelques remplacements de blocs des gradins ont été notés. Une inscription des premiers siècles de notre ère mentionne des jeux organisés dans ce stade107.
85Le seul monument connu construit par les Romains est un grenier à grain, datant du IIe siècle de notre ère. La construction de ce monument est documentée par une inscription bilingue trouvée sur le site108.
86Le fonctionnement de certains monuments à l’époque romaine ainsi que la trouvaille de plusieurs monnaies d’époque impériale témoignent de la continuité des activités humaines à Amantia pendant la période romaine. La ville romaine s’étendait probablement vers les champs ou dans des zones nouvellement habitées comme le montrent les structures trouvées sur le flanc oriental de la colline109.
Hadrianopolis
87Hadrianopolis est une ville construite ex novo par les Romains sur le territoire de l’Épire. La ville est située dans la vallée du Drino et occupe à peu près une surface de 30 ha. Le site semble avoir été rapidement intégré dans le système routier de la région, puisqu’il se trouve à côté de la route allant d’Apollonia à Nicopolis. Le site reste encore à fouiller, seuls le théâtre et les thermes ayant été découverts jusqu’à présent dans le secteur qui correspond probablement à la zone du forum110 (fig. 18). De plus, les sources historiques romaines ne mentionnent jamais cette ville qui n’est citée que très tardivement111.
88Les raisons de cette fondation ne sont pas très claires. Le but était probablement le développement et la promotion de la vie urbaine dans la province d’Épire créée par Trajan, prédécesseur d’Hadrien. La fondation de cette ville coïncide avec une période d’agrandissement de la surface des villes voisines de Phoinikè et de Bouthrôtos et avec l’augmentation respective de leur population. Cependant, avant l’installation de la ville romaine, la région était déjà peuplée, comme cela a été montré par la découverte de sépultures de la période hellénistique dans la vallée112. Les fouilles récentes ont montré que dès l’époque flavienne, le site possédait un nucleus d’habitations113. Ces nouvelles données laissent supposer que lorsqu’Hadrien décida de fonder une nouvelle ville, il choisit une zone déjà peuplée durant les périodes précédentes, très probablement entourée de petits sites ruraux. Dans ce cas, il est vraisemblable, que la fondation de la ville ait eu pour but de concentrer en un même lieu les productions et les taxes des sites ruraux de la région. Sous Hadrien, ce genre de politique était devenu commun et l’administration du territoire et des revenus qu’il générait était de première importance pour Rome114.
89Toutefois, la construction d’Hadrianopolis montre l’intérêt qu’Hadrien, et avant lui Trajan, ont eu pour le développement de la vie urbaine des provinces. Les deux empereurs étaient connus pour leur philhellénisme, qui se manifeste dans le nom des villes qu’ils ont fondées. Ils ont continué de cette manière la tradition hellénistique, déjà suivie par César et Auguste à la fin de la République. Hadrien est aussi connu pour avoir encouragé l’administration locale et pour avoir financé la monumentalisation des villes de l’Empire romain, surtout dans sa partie orientale115. Il envoya des curatores avec la mission de résoudre les problèmes concernant aussi bien les provinces que les villes116. Ce contrôle a permis aux empereurs romains une gestion plus directe des villes.
90La fondation d’une cité par Hadrien en Épire fait partie des actes d’évergétisme de cet empereur dans la région. Ainsi, les monuments importants de la ville et la cadastration datent probablement de son règne. La construction ex novo d’Hadrianopolis a rendu possible dès l’origine une planification urbaine claire, ce qui de plus a permis la conservation de traces des anciennes divisions agraires, selon un modèle typique de vingt actus117.
Phoinikè
91Phoinikè avait acquis son plus grand niveau de développement urbain pendant les IVe-IIIe siècles avant notre ère. Cette période prospère avait fait de la ville la cible de la reine illyrienne Teuta, laquelle réussit à la contrôler pendant une brève période118. Vingt ans après, la ville est mentionnée comme le lieu où a été élaborée La paix de Phoinikè, qui mit fin à la première guerre de Macédoine119. Son passé, sa position géographique et le fait que pendant les guerres contre Rome la ville ne subit aucune destruction expliquent la continuité de la vie de la cité pendant la période romaine. La présence d’un axe routier élaboré partant d’Aulona et passant par Phoinikè, Bouthrôtos et Nicopolis a également joué un grand rôle dans le développement de Phoinikè.
92Il est difficile d’avoir une idée précise des conséquences de la présence romaine dans l’urbanisation de la ville de Phoinikè puisque les données archéologiques sont encore trop maigres pour permettre d’en reconstituer le cadre complet (fig. 19). Mais il est clair qu’à Phoinikè aussi, pendant la période républicaine, il n’y eut pas de grandes interventions constructives. On se contenta plutôt de reconstruire les bâtiments de l’époque précédente120.
93Parallèlement au développement de la partie supérieure du site sur la colline, une deuxième zone, celle de la plaine, est aménagée et construite pendant la période romaine. Il semble qu’elle prit le pas sur la partie haute de la ville121. Cette extension a créé de nouveaux centres de vie publique pour les citoyens de la ville et pour les populations qui vivaient aux alentours. Dans cette partie de la ville, on a réussi à repérer les vestiges d’une centuriation romaine comme à Bouthrôtos122. Cette expansion semble s’être effectuée pendant les deux premiers siècles de notre ère (fig.20). Apparemment, à Phoinikè, cette centuriation fut précédée par la bonification de la plaine, travaux révolutionnaires du point de vue du remaniement de l’environnement.
94Parmi les monuments les plus représentatifs de la ville on peut mentionner le théâtre construit sur le flanc de la colline, et qui domine ainsi toutes les plaines alentour123. Il s’agit à l’origine d’une construction hellénistique mais elle fut reconstruite par les Romains.
95Pendant la période impériale on voit l’installation dans la ville de trois grandes citernes124 mais il n’est pas certain qu’elles suffisaient à fournir en eau la Phoinikè romaine125.
96L’intervention romaine est également documentée dans les vestiges domestiques de Phoinikè. La maison aux deux péristyles, située près d’une des voies principales de la ville continue son activité pendant l’époque romaine126. La maison a conservé son caractère agricole, ce dont témoignent les pièces attribuées au stockage des récoltes.
Bouthrôtos
97Bouthrôtos a toujours subi une forte influence de la part de Corcyre, justifiée par sa position géographique, sans pourtant constituer une de ses colonies. Virgile est une source importante pour le site car dans son Énéide il signale le passage du héros de Troie, Énée, avant son arrivée en Italie. Il nous décrit également plusieurs monuments de la ville qui lui rappellent beaucoup ceux d’une Troie mythique127. Une histoire très semblable nous est aussi rapportée par Denys d’Halicarnasse128.
98Les données épigraphiques et les sources littéraires nous informent de la présence de negotiatores italiens à une période antérieure à la fondation de la colonie129. L’activité de ces commerçants dans l’Adriatique est en particulier relevée par Polybe130. Il est possible qu’après la guerre de Macédoine leur nombre ait pu augmenter. Comme l’expose également Varron dans son De Re Rustica, il y avait beaucoup d’Italiens en Épire qui avaient acheté des terres et des animaux131. En conséquence, la fondation de la colonie se serait heurtée aux intérêts de cette classe bien établie dans la région.
99En premier lieu, la déduction de cette colonie a été décidée par un décret de César en 44 avant notre ère. La décision, ne prenant pas en compte les intérêts des grands propriétaires fonciers d’origine italique, a provoqué leur contrariété. Parmi eux, Titus Pomponius Atticus était l’opposant le plus connu à l’installation des vétérans, comme le montre sa très dense correspondance avec son ami Cicéron132.
100Apparemment, leur protestation et l’intervention de Cicéron dans les plus hauts cercles de la société romaine ont fait changer d’avis César, qui a décidé de changer la destination des colons et les adresser vers une autre ville133. Mais la mort de César fait que cette décision ne fut jamais appliquée. De surcroît, il existait naturellement un groupe en faveur de cette fondation pour faire face aux détracteurs de la déduction. Il s’agissait des vétérans, dont le mécontentement pouvait causer des troubles à Rome134. Par conséquent cette colonie semble avoir été créée après la mort de César135.
101Malgré ces faits, la colonie s’établit parce qu’elle possédait une position géographique stratégique : elle était équipée d’un port s’ouvrant vers la mer par un canal, et, de l’autre côté, elle était reliée aux terres par une route majeure qui menait à Cassopè et à Nicopolis. Deux types de monnaies frappées par la ville nous informent sur les débuts de l’histoire coloniale. L’une porte la légende C(olonia) I(ulia) BVT(hrotum) et l’autre C(olonia) A(ugusta) BVT(hrotum). La seconde colonie a été probablement fondée dans la période qui suit la bataille d’Actium. Cette fondation mit fin au Koinon des Prasaiboi qui connut son apogée au cours de la fin du IIe siècle avant notre ère.
102On sait peu de choses sur les constructions de la fin de la République et du début de l’Empire (fig.21). Cette période a laissé très peu de traces dans l’architecture et le bâti136.
103Le monument le plus remarquable lié à la fondation de la colonie est l’aqueduc (fig. 22)137.
104Avant l’arrivée des Romains, la ville utilisait l’eau des sources naturelles ; de nombreux puits et citernes ont en effet été découverts dans la ville. L’aqueduc était long de 3 km, construit avec la technique de l’opus reticulatum et composé de 65 arches. Au-delà de son utilité pratique, il semble que le monument ait été un motif de fierté puisqu’il est représenté sur les monnaies138. La construction de plusieurs thermes dans la ville a immédiatement suivi celle de ce monument139. Leur présence en grand nombre dans cette ville, autour de la zone monumentale, près du canal de Vivari et dans la plaine de Vrina, offre l’image d’une ville destinée à satisfaire le plaisir des plus riches (fig.23).
105Les autres monuments publics de la période coloniale sont probablement construits autour du théâtre, qui lui-même subit des changements pendant cette période140. La cavea s’agrandit et les premiers rangs de gradins prennent un aspect plus monumental que les autres pour que l’élite romanisée de la ville soit distinguée des autres couches de la société (fig. 24).
106Ces constructions ont commencé à changer la face de la ville ; de surcroît, des monuments de la période précédente ont été modifiés selon le nouveau modèle romain, comme c’est le cas du temple traditionnellement attribué à Asclépios. De plus, une maison à péristyle, équipée de thermes et d’un nymphée141, a été construite dans cette partie monumentale de la ville. Par ailleurs, dans la zone monumentale, des statues d’Auguste, d’Agrippa et de Livie sont exposées pour montrer au public le lien de la ville avec la famille impériale qui avait fondé la colonie142.
107À Bouthrôtos, le forum semble être inséré dans des structures plus anciennes, puisqu’il occupe probablement la place de l’agora hellénistique143. Il est probable que les Romains ont choisi cette partie de la ville parce que dans ce secteur étaient également établis les monuments les plus imposants de la Bouthrôtos hellénistique, comme le théâtre et le sanctuaire d’Asclépios (fig. 25). La seule partie du forum que l’on peut commenter pour le moment est un monument composé de trois chambres qui peut représenter le capitolium de la ville144.
108Dans ce complexe de bâtiments se concentre toute la monumentalité de la dignité municipale. Il devient ainsi un centre administratif et religieux de la colonie. Un autre bâtiment important complète le forum, le « gymnase ». La fonction de l’édifice n’est pas très claire mais on lui a attribué les fonctions de gymnase. Le monument remonte au IIe siècle de notre ère. La construction a été réalisée en briques et les sols sont décorés de mosaïques.
109Parallèlement à ces changements, une nouvelle partie de la ville s’est développée. Les fouilles récentes de la plaine de Vrina, située de l’autre côté du canal de Vivari, ont révélé les premières habitations de cette partie de la ville, datées vers la fin du Ier siècle de notre ère (fig. 26).
110Contrairement au reste de la surface urbaine déjà bâtie à l’époque précédente, dans cette nouvelle zone l’aménagement du terrain a d’abord fait l’objet d’interventions hydrauliques. La longue durée de ce type de travaux doit être l’une des causes pour lesquelles l’extension de la ville vers les nouvelles terres s’effectua presque un siècle après l’arrivée des colons. Il y eut apparemment par la suite un deuxième aménagement cadastral145. De plus, une inscription latine mention le magister des vici, ce qui témoigne d’une organisation du territoire de la colonie146.
111Parmi les monuments les plus représentatifs découverts à Vrina, un bâtiment de forme rectangulaire a été construit avec de grands blocs de pierres bien taillés, parmi lesquels on compte une colonne147. Un autre temple italique ainsi que deux ensembles de thermes d’une époque plus tardive (IIIe siècle de notre ère) ont été découverts dans le même secteur de la ville148.
112Il apparaît qu’une partie de la nécropole romaine se soit étendue dans cette zone de la ville. Ce qu’on voit aujourd’hui de cette nécropole sont les restes de quelques tombeaux monumentaux. Nous ne savons pas si ces tombes se situent près d’une des routes qui menait à Bouthrôtos. De l’autre côté, une autre partie de la nécropole romaine, composée de tombeaux monumentaux, s’est développée au bord du canal de Vivari, de manière à être visible des gens qui entraient en ville par bateaux.
Anchiasmos
113Anchiasmos est la seule parmi les petites agglomérations à devenir un centre urbain pendant la période romaine (fig. 27).
114Située au bord de la mer, Anchiasmos entretenait des relations étroites avec les villes les plus importantes de l’intérieur, comme Phoinikè et Hadrianopolis, et leur servait d’accès à la mer. Ce rôle d’Anchiasmos est attesté par Strabon et Denys d’Halicarnasse qui la décrivent comme le petit port des Chaônes149. Les fouilles archéologiques effectuées dans la ville ont montré que pendant la période impériale le site prit l’ampleur et les attributs d’une ville150. La position privilégiée de ce port et ses liens avec les villes de l’intérieur ont probablement encouragé une présence permanente des élites commerciales. Plusieurs bâtiments d’Anchiasmos, pavés de mosaïque151, doivent probablement être attribués à des résidences de cette élite. Notons que ces bâtiments à mosaïques étaient situés près de la mer, ce qui permet de les interpréter comme des villae maritimes. De plus, la découverte de sculptures, de citernes et d’une nécropole, montre qu’Anchiasmos avait acquis la physionomie d’un centre urbain, grâce à son développement considérable initié à partir de la fin du Ier siècle de notre ère. On estime que l’activité de ces villas maritimes a joué un rôle important dans la dynamique du paysage du littoral épirote, comme cela a été montré sur la côte italienne152. Vu l’importance qu’Anchiasmos acquiert pendant le Haut Empire, elle devait être munie d’une enceinte au IVe siècle. On signale également dans cette ville la présence d’une petite communauté juive organisée autour d’une synagogue construite au IVe siècle153.
115On peut dire la même chose au sujet d’Aulôn/Aulona qui se situe dans la zone limitrophe des provinces d’Épire et de Macédoine. Cependant, nos connaissances archéologiques sont moins importantes que dans le cas d’Anchiasmos à cause de la superposition des villes moderne et antique. Il semble qu’Aulona ait atteint son plus haut niveau de développement pendant la période romaine, provoquant l’affaiblissement de sites plus anciens comme Kanina, Triport et peut être même Orikos. En face d’Aulona se trouve l’île de Sazan, mentionnée par Pline comme un repaire des pirates154.
Conclusions
116Les Romains ont trouvé en Illyrie du sud et dans le nord de l’Épire des villes dont le développement urbanistique et politique était marqué par des singularités régionales. Une organisation du territoire existait en outre, exprimé à travers de grands sites fortifiés. Les habitants avaient commencé à investir ces centres, initialement de très simples maisons à pastas, auxquelles succèdent des maisons à péristyles.
117La conquête romaine et la période républicaine semblent de ne pas avoir modifié cette réalité puisque l’intervention dans les villes est minime et on remarque une continuité de la physionomie urbaine. La vie se poursuit dans les villes qui étaient pourvues de voies de communications. Les interventions les plus importantes appartiennent au domaine militaire, comme les fortifications, mais concernent aussi les infrastructures, comme la Via Egnatia. Ces constructions ont pour but principal le contrôle du territoire et son expansion.
118La fondation de colonies constitue le moment le plus important de l’infiltration romaine dans le territoire illyrien. Leur rôle était de maintenir l’hégémonie romaine dans les territoires conquis et de promouvoir l’assimilation des communautés illyriennes. La fondation des colonies eut lieu dans des villes préexistantes qui occupaient un territoire riche en terres fertiles et qui étaient pourvues d’un port. Il semble que l’arrivée de certains colons entraîna des réactions locales, comme à Bouthrôtos, et s’accompagna d’expropriations. Cependant, durant la phase initiale, on ne note pas une grande activité de construction de la part des Romains dans les colonies, mais seulement la restauration de structures déjà existantes.
119Les villes où l’activité se maintient pendant la période romaine ont profité de la proximité des grandes routes de communication, de leurs anciens liens politiques et économiques avec Rome. Aussi, le rôle des élites locales dans la manière de s’adapter à la nouvelle société impériale était d’une importance essentielle.
120La période impériale se caractérise par une dynamique urbanistique qui paraît mieux définie. Principalement, la monumentalisation est une dimension de l’architecture qui s’impose dans presque toutes les villes pendant l’époque romaine. Toutefois, il semble que le plus grand développement urbain eut lieu au IIe siècle de notre ère. Après les destructions causées par les guerres et le mauvais gouvernement des magistrats romains, on voit à partir du Ier siècle, mais surtout dans la première moitié du IIe siècle de notre ère, que les villes sont équipées des monuments romains typiques. Cependant, et malgré une certaine planification, on n’observe pas l’application d’un plan d’urbanisme unique ; chaque ville possède ainsi une physionomie propre. L’évergétisme a également joué un rôle majeur dans la romanisation architecturale des villes de l’Illyrie du sud et de l’Épire. Grâce aux investissements qu’il mobilise, les villes changèrent complètement de visage par rapport à la période républicaine.
121L’agrandissement des villes pendant la période romaine et l’application de la centuriation romaine doivent être mises en corrélation avec l’augmentation considérable de la population urbaine. La redéfinition juridique des espaces, à travers les opérations de centuriation, le marquage des limites ou la définition des nouveaux statuts de l’habitat indigène, comptent parmi les traits essentiels de la nouvelle forme d’occupation du territoire introduite par les Romains. La centuriation a aussi le mérite d’avoir permis la standardisation des espaces et une meilleure mise en valeur des ressources naturelles.
122Mêmes si les données archéologiques sont limitées, il est possible de déceler une hiérarchie parmi les villes romaines en Illyrie et en Épire. Dans ce contexte le rôle le plus important a été joué par les colonies qui représentaient directement Rome dans les provinces. En deuxième lieu on trouve des villes où l’on note une forte présence d’Italiens, dont l’activité économique stimula le développement urbain. En dernier lieu, un rôle mineur fut joué par certaines villes indigènes qui continuèrent leur existence pendant la période romaine grâce à leur élite en voie de romanisation et aux alliances qu’elles contractèrent avec Rome. Le principal apport de la romanisation de ces régions demeure l’unification du développement social et urbain des Illyriens et des Épirotes.
Notes de bas de page
1 Voir S. Shpuza, Cités et territoires. L’Illyrie méridionale à l’époque romaine, dans MEFRA, 121, 2, 2009, p. 481-502.
2 Sur la fondation d’Epidamne voir Thucydide, La guerre du Péleponnèse, I, 24-26 ; Skymnos, 435-439. Sur la fondation d’Apollonia voir Plutarque, Sur les délais de la justice divine, 552 E ; Skymnos 439-440 ; Strabon, VII, 5, 8 c316 ; Pausanias, V, 22, 4 ; Thucydide, La guerre du Péleponnèse, I, 26 ; Dion Cassius, XLI, 45 ; Etienne de Byzance, s.v. Pour le commentaire des sources voir CIGIME 1,1, p. 23-30.
3 J.Boardman, Les Grecs outre-mer : colonisation et commerce archaïques (traduit en français par M. Bats), Naples, 1995, p. 274.
4 S. Morris, Illyrica Pix : The Exploitation of Bitumen in Ancient Albania, dans L. Bejko et R. Hodges (éd.), New Directions in Albanian Archaeology, Tirana, 2006 (International Centre for Albanian Archaeology, Monograph Series, 1), p. 95.
5 S. Anamali, Qytetet Dyrrah dhe Apolloni dhe marrëdhëniet e tyre me Ilirët, dans SH, 2, 1971, p. 125-135.
6 Polybe, Histoires, II, 6, 6.
7 P. Cabanes, L’Épire de la mort de Pyrrhos à la conquête romaine... cit., p. 483-484.
8 Pseudo Scylax, Périple, 28, 30, 31, 32.
9 Même si la ville est connue pour être une fondation de Pyrrhos, il se peut qu’elle ait été habitée auparavant. Les fouilles archéologiques, conduites sur le site, ont montré que l’urbanisation de la ville commence vers le début du IIIe siècle avant notre ère.
10 Sur Antigonea voir Dh. Budina, Antigonea, dans Iliria, 2, 1972, p. 245-349 ; Id., Antigonea e Epirit, dans Iliria, 4, 1974, p. 327-346 ; Id., Le lieu et le rôle d’Antigonea dans la vallée du Drinos, dans P. Cabanes (éd.), L’Illyrie méridionale et l’Épire dans l’Antiquité, Clermont-Ferrand, 1987, p. 159-166.
11 A. H. M. Jones, The Greek City. From Alexander to Justinian, Oxford, 1940, p. 10.
12 Le pouvoir politique et militaire d’Agron le rendait capable de telles entreprises, mais sa mort a probablement rompu ce processus. Ce n’est que sous le dernier roi illyrien, Genthios, que la ville de Scodra gagne de l’importance comme résidence du roi.
13 Tite-Live, Histoire Romaine, XLV, 34 : il se peut qu’elles ne correspondent pas à des villes proprement dites. En effet Tite-Live emploie le terme d’oppida pour désigner ces 70 sites. Leur nombre a pu être exagéré par les auteurs anciens pour augmenter la valeur de l’armée romaine. Ces oppida ne sont pas situés en territoire albanais, mais concernaient surtout la Molossie, la Cassopie et la Thesprôtie.
14 Sur les raisons économiques de cette exploitation, voir A. Zilkowski, The Plundering of Epirus in 167 BC. Economic Considerations, dans PBSR, LIV, 1986, p. 69-80. En Épire, comme cela a été montré par P. Cabanes (voir L’Épire de la mort de Pyrrhos... cit., p. 399-415), l’esclavage jouait un rôle important avant même l’arrivée des Romains, ainsi cette déportation pourrait être liée à la tradition de la région concernant l’esclavage. Les conséquences de ces événements perdurent longtemps ; même un siècle plus tard, quand Auguste fait construire la ville de Nicopolis pour célébrer la victoire d’Actium contre Marc Antoine, il réunit les habitants de Cassopè, de l’Acarnanie et d’Ambracie, pour peupler la ville nouvelle.
15 Valère Maxime, Faits et dits mémorables, VI, 6, 5.
16 César, Bellum civile, III, 12.
17 F. Prendi, Dy mbishkrime ndërtimi nga qyteti ilir i Lisit, dans Iliria, 2, 1981, p. 153-163 (cf. CIL III 1704 ; CIA no 23, 24) : I. L(ucius) Gaviarius L(ucii) f (ilius) T(iti) n (epos) aug (ur) C(aius) [Iuliu]s / Caesaris l (ibertus) Meges (duum) viri qu (in) que (nnales) por[tam] / et turrim ex d (ecreto) d (ecurionum) d(e) p (ecunia) p (ublica) reficiu[ndas] / coeraverunt eidemque pr[o]/baverunt constat (sestertium trium milium quingentorum) ; II. L(ucius) Gaviarius L(ucii) f (ilius) T(iti) n (epos) / aug (ur) C(aius) Iulius Caes/aris l (ibertus) Meges (duum) vir (i) quinque (nnales) / murum ex d (ecreto) d (ecurionum) reficiundum c (oeraverunt) / i(s) demque probaverunt c (onstat) (sestertium quattuor milium ducentorum).
18 F. Prendi, Dh. Budina, Kalaja e Irmajt, dans BUSHT, 4, 1963, p. 29.
19 Sur la Via Egnatia voir : P. Collart, Une réfection de la « Via Egnatia » sous Trajan, dans BCH, 59, 1935, p. 415 ; J. Adami, Historia e rrugëve të Shqipërisë, I. Rrugët e Shqipërisë në kohën antike, dans BSHSH, 1, 1953, p. 36-65 ; H. Ceka, L. Papajani, Rruga në luginën e Shkumbinit në kohën antike, dans Monumentet, 1, 1971, p. 43-54 ; F. O’Sullivan, The Egnatian Way, Harrisburg, 1972 ; N. G. L. Hammond, The Western Part of the Via Egnatia, dans JRS, LXIV, 1974, p. 185-194 ; V. Shtylla, S. Vinçiç, Traseja e Via Egnatias nëpër Shqipëri dhe Maqedoni, dans Monumentet, 1992- 1999, p. 51-85 ; É. Deniaux, Découverte d’un nouveau milliaire de la Via Egnatia, dans MEFRA, 111, 1, 1999, p. 167-189 ; M. Fasolo, La Via Egnatia. Da Apollonia e Dyrrachium ad Herakleia Lynkestidos I, Rome, 2003 ; Récemment une équipe de l’Institut Archéologique de Tirana a commencé une prospection de la Via Egnatia dans le territoire de l’Albanie. Voir Amore et al., The Via Egnatia (Albania) Project and the Bridge at Topçias, dans JRA, 14, 2001, p. 381-390 ; Id. Via Egnatia (Albania) Project : Results of Fieldwork 2002, dans JRA, 18, 2005, p. 336-360.
20 Strabon, Géographie, VII, 7, 4, 322-323 (éd. R. Baladié) : « D’Apollonia part vers l’Est en direction de la Macédoine la voie Égnatienne. Elle est mesurée en milles et pourvue de bornes jusqu’à Kypsela et le cours de l’Hèbre. Le total fait 535 milles ».
21 Voir É.Deniaux, La via Egnatia et la romanisation des Balkans, dans J.-L.Lamboley (éd.), Points de vue sur les Balkans de l’antiquité à nos jours, Grenoble, 2001, p. 65-80.
22 CIL III, 600 ; CIA no 178.
23 César, Bellum civile, III. 42.5. Comme César le reconnaît lui-même, il avait pillé les mêmes villes que Pompée.
24 A. Baçe, Struktura urbane në Iliri 168 p.e.s.-212 e.s., dans Iliria, 1, 1986, p. 216.
25 Appien, Histoire Romaine, IV, I, 1 (éd. D. Gaillard) : « Les Grecs appellent Illyriens ces peuples qui habitent au-dessous de la Macédoine et de la Thrace depuis la Chaônie et la Thesprotie jusqu’au fleuve Istros. C’est la longueur du territoire tandis que sa largeur va depuis les montagnes de Macédoine et de Thrace jusqu’à la Pannonie et le golfe Ionien et le piémont des Alpes ».
26 S. Shpuza, The Roman Colonies of South Illyria : a Review, dans L. Bejko, R. Hodges (éd.), New Directions in Albanian Archaeology… cit., p. 126-130.
27 C. Lepelley, Universalité et permanence du modèle de la cité dans le monde romain, dans J.Arce et P. Le Roux (éd.), Cité et communauté civique, Madrid, 1993, p. 13-23.
28 Tite-Live, Histoire Romaine, XLIII, 20, 2 ; XLIV, 30, 15 ; XLV, 26, 1 ; Appien, Histoire Romaine, V, 65.
29 Appien, Histoire Romaine, V, 65 ; J. J. Wilkes, Les provinces danubiennes, dans Cl. Lepelley (éd.), Rome et l’intégration de l’Empire, tome 2, Paris, 1997, p. 236 ; M. Šašel Kos, Appian and Illyricum, Lubiana, 2005, p. 555.
30 S. Anamali, Scodra koloni romake, dans Shkodra në shekuj I (Shkodra 22-23 Juin 1992), 1994, p. 19 : M(arco) Flavio T(iti) f (ilio) Quir (ina) /Frontoni sacerd (oti) in coloniis Naron (a) et Epidauro, (duum) viro I(ure) d (icundo) Iulio Risinio (duum) viro / quinq (uennali) pontif (ici) in col (onia) Scodra... L’inscription mentionne également le nom de la personne qui était duumvir quinquennalis et pontifex. Apparemment, Marcus Flavius était en charge aussi d’autres responsabilités dans d’autres colonies voisines de la province de Dalmatie, comme Epidaure et Narona.
31 Pline, Histoire Naturelle, III, 22.
32 Les fouilles ont commençé grâce à une collaboration entre l’Institut Archéologique de Tirana et l’Université de Varsovie. A. Lajtar, S. Shpuza, J.Zelazowski, New inscriptions from Ancient Shkodra (Albania) found during Polish-Albanian Excavations, dans Novensia, 25, 2015, p. 127-143.
33 Voir V. Kamsi, Shtrirja e qytetit të Shkodrës në kohën e lashtë dhe në mesjetën e hershme, dans Monumentet, 11, 1976, p. 112-125 qui essaie d’établir la zone du développement de la ville antique et médiévale de Scodra. D’après lui, dans la partie sud se trouve la ville illyro-romaine, correspondant à une plaine limitée par les fleuves de Buna et Kiri. Quant à la ville médiévale, il considère qu’elle se développe près de la colline de la forteresse.
34 G. Hoxha, Shkodra dhe Prevalis në Antikitetin e vonë, Shkodra, 2003.
35 Rapport des fouilles de Scodra 2001 déposé aux Archives de l’Institut archéologique d’Albanie à Tirana.
36 S. Anamali, H. Spahiu, Rapport sur les fouilles effectué à Shkodra en 1978- 1979. Le rapport est conservé aux archives de l’Institut archéologique d’Albanie à Tirana.
37 Le bâtiment a été identifié pendant les travaux de construction du nouveau stade, voir Z. Tafilica, Gërmimet arkeologjike të vitit 1990, Shkodër, dans Iliria, 2, 1990, p. 263-264.
38 Th. Ippen, Skutari und die nordalbanische Küstenebene… cit., p. 111.
39 Diodore, Bibliothèque historique, XV, 13, 4.
40 Th. Ippen, Die Gebirge des nordwestlichen Albaniens, Vienne, 1908, p. 55 (traduit en albanais par Gj. Karaiskaj et A. Klosi) ; K. Praschniker, A. Schöber, Archäologische Forschungen in Albanien und Montenegro, Vienne, 1919, p. 14 ; R. L. Beaumont, Greek Influence in the Adriatic Sea Before the Fourth Century B.C., dans JHS, LVI, 1936, p. 202.
41 F. Prendi, K. Zheku, Qyteti ilir i Lisit, dans Iliria, 2, 1972, p. 215-244.
42 Polybe, Histoires, II, 12, 3.
43 F. Prendi, K. Zheku, Qyteti ilir i Lisit... cit., p. 216.
44 Polybe, Histoires, VIII, 13, 1 (éd. R. Weil, CUF, Paris, Les Belles Lettres, 1982) : « Il y avait longtemps que Philippe pensait à Lissos et à l’Acrolissos, et il tentait de se rendre maître de ces positions ; il partit donc avec son armée, marcha deux jours, passa les défilés et s’arrêta au bord de l’Ardaxanos, non loin de la ville. Comme il constatait que, pour ce qui était de l’enceinte de Lissos, la nature et des travaux lui avaient donné une solidité exceptionnelle tant du côté de la mer que vers l’intérieur, et que pour l’Acrolissos, qui se trouve à côté, sa hauteur et en général sa force lui donnaient une allure propre à décourager n’importe qui de le prendre d’assaut, il renonça totalement à l’Acrolissos, mais ne désespéra pas tout à fait de prendre la ville. Ayant constaté aussi que l’intervalle entre Lissos et le pied de l’Acrolissos convenait à une attaque contre la ville, il projeta d’engager par là une escarmouche pour employer un stratagème approprié à la situation… il dissimula la plupart de ses meilleures troupes légères, il s’avança de l’autre côté de la mer. Il contourna la ville et atteignit l’endroit en question, donnant l’impression qu’il allait effectuer par là sa montée vers la ville… C’est pourquoi, à l’approche des Macédoniens, les défenseurs de la ville se répandirent aussitôt en dehors comptant sur leur supériorité numérique et sur la force de leurs positions… tandis que la garnison de l’Acrolissos, constatant que Philippe repliait ses unités l’une après l’autre pied à pied et s’imaginant qu’il renonçait complètement, se laissa attirer au dehors sans s’en rendre compte, tant elle se fiait à la nature de la position ; puis abandonnant l’Acrolissos par petits groupes, les hommes se répandirent par de mauvais sentiers jusqu’en terrain plat… mais à ce moment-là, les hommes qui étaient embusqués à l’écart du côté de l’intérieur, surgissant sans avoir été vus, lancèrent une attaque vigoureuse… Le résultat fut d’abord cette chose inattendue, la prise immédiate de l’Acrolissos… ».
45 K. Zheku, Lisi në shekuj, Tirana, 1988, p. 60.
46 Cette activité de réorganisation de l’espace urbain hellénistique a été mise en évidence par les dernières fouilles albanaises et allemandes. Les informations m’ont été communiquées par B. Lahi.
47 L’évolution très rapide de l’urbanisme moderne du site a rendu presque impossible les fouilles archéologiques. Une autre raison de l’absence de monuments antiques est l’inondation de la ville basse par le fleuve Drin.
48 C. Praschniker, A. Schöber, Archäologische Forschungen in Albanien und Montenegro… . cit., p. 21.
49 Appien, Histoire Romaine, II, 39.
50 Dion Cassius, Histoire Romaine, XLI, 49 (éd. M.-L. Freyburger-Galliand, F. Hinard, P. Cordier, CUF, Paris, Les Belles Lettres, 2002) : « Dyrrachion est située sur une terre autrefois appartenant à des Illyriens, les Parthins, mais maintenant et déjà en ce temps-là regardée comme une partie de la Macédoine ; et elle bénéficie d’un très bon emplacement, qu’elle soit l’Épidamne des Corcyréens ou de quelque autre cité. Ceux qui ont écrit sur ce sujet rapportent sa fondation et son nom au héros Dyrrachios ; mais d’autres ont déclaré que la place était renommée par les Romains avec référence aux difficultés de la côte rocheuse, parce que le terme Epidamnus a en latin le sens ‘’de mauvais augure’’ et ainsi semblait peu favorable pour les voyageurs ».
51 Pausanias, Description de la Grèce, VI, 11, 8.
52 Voir la synthèse de P. Cabanes dans CIGIME 1, 1, p. 19-47.
53 César, Bellum civile, III, 5, 2 ; 11, 2 ; 13, 1 ; 58, 1 ; 77, 1 ; Tite-Live, Histoire Romaine, XXIX, 12, 3 ; XLV, 43, 10 ; Appien, Histoire Romaine, II, 39 ; 54-56 ; 60 ; 65.
54 Cicéron, Fam., XIV, 1, 7.
55 Catulle, Poésies, XXXVI, 15 : « Dyrrachium Hadriae tabernam ».
56 M. Grant pensait que la première colonie romaine à Dyrrachium a été établie par M. Antoine en 42-41 avant notre ère, parce que la ville, pendant la guerre civile, avait soutenu Pompée. Comme revendication, il fait installer dans la ville des vétérans de guerre. Cette première colonie a été nommée Colonia Iulia Veneria et Vénus est en effet représentée sur les monnaies commémorant cette colonie. À l’époque M. Grant se fondait sur des monnaies considérées aujourd’hui par les auteurs du RPC comme des frappes de Dium en Macédoine et non Dyrrachium. Voir M. Grant, From Imperium to Auctoritas, Cambridge, 1946, p. 275-279.
57 A. Gutteridge, A. Hoti, The Walled Town of Dyrrachium (Durrës) : New Light on the Early Defence, dans JRA, 16, 2003, p. 378.
58 L. Heuzey, H. Daumet, Mission archéologique de Macédoine, Paris, 1876, p. 387 : Imp (erator) Caes (ar) / M(arcus) Aurelius Sever[us] / Alexander Pius / Felix Aug (ustus) aquae / ductum divi / Hadriani parentis / sui liberalitate Dyr/rachinis factum et / vetustate pluribus / in locis vexatum resti/tuit set et viam a co/lonia per mil[l]ia passum / quattuor voraginibus / [interceptam refecit]. Cette plaque se trouve actuellement au Musée du Louvre ; CIL III, 709 ; CIA no 142. Sur l’aqueduc de Dyrrachium voir F. Miraj, H. Myrto, Ujësjellësi i Dyrrahut, dans Iliria, 11982, p. 131-156.
59 L. Miraj, Termat e Dyrrahut, dans Iliria, 1-2, 1994, p. 207-224.
60 CIL III, 607 ; CIA no 35 : À Lucius Flavius Tellus Gaeticulus, de la tribu Aemilia, honoré d’un cheval aux frais de l’État par l’empereur César Trajan Auguste, préfet de la deuxième cohorte des Espagnols munie de cavalerie en Germanie supérieure, duumvir quinquennal, pontife, patron de la colonie, qui, dans l’acquisition d’un terrain pour la construction d’une bibliothèque, a contribué pour la somme de 170 000 sesterces et a déchargé la collectivité de cette dépense, et pour l’inauguration de celle-ci, a offert des jeux avec douze paires de gladiateurs.
61 V.Toçi, Amfiteatri i Dyrrahut, dans Monunentet, 2, 1971, p. 37-42. Sur les fouilles récentes de l’amphithéâtre, voir S.Santoro, A.Hoti, B.Sassi (éd.), Dyrrachium I.L’anfiteatro romano di Durazzo studi e scavi 2004-2005, dans Annuario della Scuola Archeologica di Atene e delle Missioni Italiane in Oriente, LXXXIII, III, 5, II, 2005 (2008), p. 717-806.
62 Pendant l’Antiquité tardive, deux chapelles sont intégrées dans les galeries du monument, transformant sa fonction en lieu de sépulture.
63 CIA no 123 ; L. Miraj, Mbishkrime për ndërtimet e Dyrrahut, dans Iliria, 1-2, 1991, p. 253.
64 Dh. Budina, Gërmime në nekropolin e Durrësit (materiale të vitit 1957), dans BUSHT, 2, 1960, p. 222-235.
65 P. C. Sestieri, Nënshkrime latine të Shqipnis. Studime e tekste, Arkeologjike I., Rome, 1943 (Iscrizioni latine d’Albania. Studi e testi, I).
66 F. Tartari, Rezultatet e gërmimeve të vitit 1971 në skajin verilindor të qytetit të Durrësit, dans BA, 3, 1971, p. 103-119.
67 F. Tartari, Një grup varresh të shek. II-IV të e.sonë në zonën kodrinore të nekropolit të Dyrrahut, dans Iliria, 1, 1987, p. 153-165.
68 Pour une vue générale de l’urbanisme de Dyrrachium pendant l’Antiquité voir S. Santoro, Lo stato degli studi sull’urbanistica di Epidamnos-Dyrrachium, dans M. Buora, S. Santoro (éd.), Progetto Durrës. L’indagine sui beni culturali albanesi dell’antichità et del medioevo Tradizioni di studio a confronto, Trieste, 2003, p. 186-190 ; A. Muller, F. Tartari, Des figurines aux collines. Contribution à la topographie d’Épidamne-Dyrrachion, dans J.-L. Lamboley, M. P. Castiglioni (éd.), L’Illyrie méridionale et l’Épire dans l’Antiquité V, vol. 1, Paris, 2010, p. 289-297.
69 Polybe, Histoires, II, 11, 8.
70 Tite-Live, Histoire Romaine, XLII 18, 2-3 ; 27, 3-8 ; 36, 8-9 ; 49, 10 ; 53, 2.
71 Velleius Paterculus, Histoire Romaine, II, 59, 4 ; Suétone, Vie des douze Césars, II, 8.
72 César, Bellum civile, III, 11, 3.
73 Voir O.Delouis et al., La ville haute d’Apollonia d’Illyrie : étapes d’une recherche en cours, dans D.Berranger-Auserve (éd.), Épire, Illyrie, Macédoine… Mélanges offerts au Professeur Pierre Cabanes, Clermont-Ferrand, 2007, p. 37-53 ; S.Verger, F.Quantin, J.-L.Lamboley, P. Lenhardt, S.Shpuza, A.Skënderaj, V.Bereti, Apollonia d’Illyrie (Albanie) : poursuite des sondages topographiques et stratigraphiques dans la ville haute, dans Chronique des activités de l’École française de Rome, MEFRA, 120, 1, 2008, p. 190-195.
74 H. Ceka, Muri rrethues i Apollonisë, dans BUSHT, 3, 1963, p. 117-168.
75 F. Quantin, Le sanctuaire de Shtyllas à Apollonia d’Illyrie, dans P. Cabanes (éd.), L’Illyrie Méridionale et l’Épire dans l’Antiquité III, Paris, 1999, p. 229-239.
76 A. Mano, B. Dautaj, Teatri antik i Apollonisë, dans Iliria, 7-8, 1977-1978, p. 279.
77 P. R. Franke, Albanien Städte in Alterum, dans Antike Welt, 14, 1983, p. 57 ; voir aussi E. Bouley, Jeux romains dans les provinces balkano danubiennes du IIe siècle av. J.-C. à la fin du IIIe siècle après J.-C., Paris, 2001, p. 86-87 : A. Mano pense que le décor du proskénion remonte à l’origine de la construction du théâtre ; en revanche P. R. Franke pense que ce décor incarnerait une interprétation romaine des modèles pergaméniens. Les frises de bucranes, de guirlandes, de patères et de canthares, fleurissent en Italie au Ier siècle avant notre ère et au théâtre d’Apollonia la frise pourrait donc remonter à la période d’Auguste.
78 A. Meksi, Probleme dhe aspekte të restaurimit të kishave bizantine në Shqipëri, dans Monumentet, 12, 1976, p. 233. Un grand nombre de ses blocs a été réemployé dans la construction du monastère médiéval d’Apollonia.
79 M. Fiedler et alii, Neue Forschungen zum hellenistich-römischen Theater von Apollonia (Albania), dans Mitteilungen des Deutchen Archäologischen Instituts, Römische abteilung, 117, 2011, p. 74.
80 V.Dimo, J.-L.Lamboley, Ph.Lenhardt et F.Quantin, Le centre monumental, dans V. Dimo, Ph. Lenhardt et F. Quantin (éd.), Apollonia d’Illyrie. 1. Atlas archéologique et historique, Rome, 2007, p. 186-217.
81 Le monument a été fouillé par Léon Rey et reconstruit par Koço Zheku. Voir K. Zheku Monumenti i Agonotetëve : rikonstruksion i pamjes kryesore, dans Monumentet, 4, 1972, p. 7-29.
82 CIGIME 1.2 no. 187 : « À la mémoire et en l’honneur de… Villius Valentinus Furius Proculus son frère, préfet de la cohorte N en Syrie, tribun de la légion NGemina en Pannonie, agonothète désigné, Quintus Villius Crispinus Furius Proculus, prytane, agonothète, grande prêtre à vie a élevé (ce monument). Pour la consécration de (l’édifice), vingt-cinq couples de gladiateurs ont été donnés ».
83 Les monnaies romaines frappées dans la ville font également apparaître deux autres temples, non identifiés jusqu’à présent, dont un datant du IIe siècle et dédié à Héraclès et l’autre à Asclépios.
84 Sur les maisons d’Apollonia voir F. Prendi, A. Skënderaj, Les domus d’Apollonia, dans V. Dimo, Ph. Lenhardt et F. Quantin (éd.), Apollonia d’Illyrie. 1... cit., p. 290-300.
85 Sur la typologie des maisons antiques en Albanie voir V. Bushati, Banesa pastas në vendin tonë, dans Monumentet, 1, 1984, p. 51-58.
86 Voir V. Dimo, Puse dhe stera në Apolloni, dans Iliria, 7-8, 1977-1978, p. 319.
87 Voir H. Ceka, Fontana e Apollonisë, dans KIISA, Tirana, 1970, p. 503-514.
88 F. Quantin, S. Shpuza, S. Verger, Programme d’exploration de la ville haute : les îlots, l’agora et le grand portique, dans J.-L. Lamboley et alii, Apollonia d’Illyrie (Albanie), dans MEFRA, 123-1, 2011, p. 242-262.
89 Voir É. Fouache et al., 6000 ans d’évolution de la ligne de rivage sur le territoire d’Apollonia (Albanie), dans P. Cabanes, J. -L. Lamboley (éd.), L’Illyrie méridionale et l’Épire dans l’Antiquité IV, Paris, 2004, p. 241-261.
90 Pline, Histoire Naturelle, IV, 35.
91 M(arcus) Valerius M(arci) f (ilius) Quir (ina) Lollianus prae/fectus cohor (tis) I Apamenorum sag[ittariorum] / equit (atae) trib (unus) milit (um) leg (ionis) VII Gem (inae) fel (icis) praef (ectus) eq (uitum) alae Fla (vi) ae / praepositus in Mesopotamia vexillationibus eq (uitum) electorum alarum / praetoriae Augustae Syriacae, Agrippianae, Herculianae / singularium item cohortium I Lucensium II Ulpiae equi[t (atae)/c (ivium)] R(omanorum) I Fl (aviae) c (ivium) R(omanorum) I Thracum III Ulpiae Paflagonum, II equitum I / Ascalitarum, fel (icis) V Chalcidenorum V Petreorum IIII / Lucensium I Ulpiae Petreorum II Ulpiae Paflagonum I Ulpiae / sagittariorum III Dacorum I Syngambrum / viam pub (licam) quae a col (onia) Byllid (ensium) / per Astacias ducit, angustam fragosam [pe]riculosamq (ue) / ita munit ut vehiculis commeetur item [pon] tes / in Argya [f]lumine et rivis d(e) s (uo) p (osuit) / et inscr[ip]sit d (ecreto) d (ecurionum). Nous donnons la transcription de CIA no 178 ; voir également CIL III, 600.
92 N. Ceka, Le Koinon des Bylliones, dans P. Cabanes (éd.), L’Illyrie méridionale et l’Épire dans l’Antiquité, Clermont-Ferrand, 1987, p. 135-149.
93 N. Ceka, Urbanistika dhe banesat në Byllis, dans Iliria, 1-2, 1992, p. 74.
94 La majorité des blocs de la cavea du théâtre a été utilisée au VIe siècle de notre ère pour construire un mur de fortification qui coupe la ville en deux, pour se protéger contre les invasions barbares de cette période.
95 N. Ceka, Urbanistika dhe banesat... cit., p. 78.
96 Sur les inscriptions de Byllis voir N. Ceka, Mbishkrime byline, dans Iliria, 2, 1987, p. 49-121 et CIA, p. 139-165.
97 Byllis compte parmi les rares villes qui sont pourvues d’une carrière sur leur territoire. La carrière est devenue récemment l’objet de fouilles et d’études de l’équipe franco-albanaise. Voir P. Chevalier et al. Byllis, Travaux de l’École française d’Athènes en 2003-2004, dans BCH, 128-129, 2004-2005, p. 1218-1223.
98 Polybe, Histoires, VII, 14. Sur Orikos voir V. Bllavatski, S. Islami, Gërmimet në Apolloni e Orik 1958, dans BUSHT, 1, 1960, p. 51-91 ; V. Bereti, G. Consagra, J.-P.Descœudres, S.Shpuza, Ch.Zindel, Orikos – première colonie grecque en Adriatique ?… cit, p. 419-430.
99 César, Bellum civile, III, 11, 4.
100 César, Bellum civile, II, 14, 15 ; III, 7, 8 ; Appien, Histoire Romaine, II, 54.
101 Dh. Budina, Oricum à la lumière des données archéologiques, dans Jadranska obala u protohistoriji. Kulturni Etnički problemi. Simpozij održan u Dubrovniku od 19 do 23.X.1972, Zagreb, 1976, p. 258.
102 S. Shpuza, Orikos 2013. Rapport préliminaire de la campagne de fouille, Rapport déposé dans les archives de l’Institut archéologique de Tirana.
103 V. Bereti, G. Consagra, J.-P. Descœudres, S. Shpuza, Ch. Zindel, Orikos. Excavations of the years 2007-2009, dans Mediterranean Archaeology, 26, 2014, p. 95-186.
104 Flavius Philostratus, Lives of the Sophists, 555, 562.
105 Pline, Histoire Naturelle, IV.
106 S. Anamali, Amantia, dans Iliria II, 1972, p. 67-149. Il faut cependant ajouter que la ville n’a pas été fouillée de façon systématique, les connaissances de son plan urbain restant encore très limitées.
107 Ibid., p. 89. Malheureusement l’inscription est perdue.
108 CIA, no 218.
109 A. Baçe, Struktura urbane në Iliri... cit., p. 218.
110 Sur le théâtre de Hadrianopolis voir A. Baçe, Gërmime arkeologjike të vitit 1983-Sofratikë, dans Iliria, 2, 1983, p. 255-256. Le monument est bien conservé et sa technique de construction est similaire à celle du théâtre de Bouthrôtos. Sa capacité pouvait atteindre quatre mille personnes, mais seulement trois à cinq gradins de la cavea ont été conservés in situ. Ce théâtre est construit dans la plaine contrairement aux autres édifices d’origine hellénistique qui ont utilisé les opportunités offertes par le terrain.
111 À la fin du Ve et au début du VIe siècle, Procope de Césarée, De Aedificis, IV, 1, 36, parle d’Hadrianopolis comme d’une ville située en Vieille Épire, que l’empereur byzantin Justinien reconstruit avant de changer son nom en celui de Justinianapolis. Hiéroclès, Synecdemus, XII, 651, 8, mentionne également la ville d’Hadrianopolis. Il a vécu lui aussi au VIe siècle, sous le règne de Justinien, et son œuvre fait office de guide de toutes les provinces et villes de l’Empire.
112 Dh. Budina, Harta arkeologjike e luginës së Drinosit, dans Iliria, 3, 1975, p. 364 ; A. Baçe, Gërmime arkeologjike të vitit 1983-Sofratikë... cit., p. 256 ; A. Baçe, Vështrim mbi qendrat e banuara antike dhe mesjetare në luginën e Drinos/Gjirokastër, dans Monumentet, 4, 1972, p. 103-141. À ce sujet voir aussi R. Perna, Dh. Çondi (éd.), Hadrianopolis II. Risultati delle indagini archeologiche 2005-2010, Bari, 2012.
113 Sur les fouilles récentes sur le site voir A. Baçe, G. Paci, R. Perna (éd.), Hadrianopolis 1. Il progetto TAU, Macerata, 2007 ; R.Perna, Dh.Çondi (éd.), Hadrianopolis II… cit., p. 111-120.
114 M. Corbier, City, Territory and Taxation, dans J. Rich, A. Wallace-Hadrill (éd.), City and Country in the Ancient World, Londres, 1991, p. 219.
115 M. T. Boatwright, Hadrian and the Cities of the Roman Empire, Princeton, 2000.
116 IG, X, II, 181. On trouve Apollonia parmi les villes où l’intervention des curatores publicae s’appliqua directement. On y voit Titus Aelius Geminius Macedo au début du IIIe siècle occuper des fonctions importantes. Dans la province d’Achaïe, Pline, Histoire Naturelle, VIII, 24, 2 nous donne un autre exemple : Trajan envoie Sextus Quintilius Valerius Maximus pour contrôler la situation des cités libres de la province.
117 E. Giorgi, Analisi preliminare sull’appoderamento agrario di due centri Romani dell’Epiro : Phoinike e Adrianopoli, dans Agri Centuriati. An International Journal of Landscape, 1, Pise-Rome, 2004, p. 191-192. Avant l’application de cette cadastration, il semble que des travaux de nivellage ont été effectués, voir A. Marziali et alii., Nascita e sviluppo della città da Adriano al VI sec. D.C., dans R. Perna, Dh. Çondi (éds), Hadrianopolis II. Risultati delle indagini archeologiche 2005-2010, Bari, 2012, p. 114.
118 Polybe, Histoires, II, 5-6.
119 Tite-Live, Histoire Romaine, XXIX, 12, 11.
120 Voir J. Bogdani, Note su Phoinike in éta Romana, dans S. De Maria et Sh. Gjongecaj (éd.), Phoinike II, Bologne, 2003, p. 122 ; S. Shpuza, Aspetti della romanizzazione a Phoinike, dans S. De Maria, Sh. Gjongecaj (éd.), Phoinike III, Bologne, 2005, p. 221.
121 S. De Maria, E. Giorgi, Note sull’urbanistica di Phoinike, dans S. De Maria, Sh. Gjongecaj (éd.), Phoinike I, Florence, 2002, p. 107.
122 Ibid., p. 105-109.
123 Sur le théâtre de Phoinikè voir R. Villicich, Il teatro di Phoinike. La fase di età ellenistica, dans S. De Maria, Sh. Gjongecaj (éd.), Phoinike III… cit., p. 69-75 ; J. Bogdani, La ricostruzione di éta romana imperiale : nuovi dati, dans S. De Maria Sh. Gjongecaj (éd.), Phoinike III… cit., p. 76-82.
124 L. M. Ugolini, L’Acropoli di Phoinike, Rome, 1932, p. 93-116.
125 Outre ces grandes réserves d’eau pour la ville, il se peut qu’un aqueduc ait également existé. Cette hypothèse se fonde sur l’existence d’un grand mur situé à l’est de la colline de Phoinikè. Il s’agit pour le moment d’une simple hypothèse qui demanderait à être vérifiée par des prospections dans le territoire de la ville.
126 Sur la Maison aux deux péristyles voir E. Giorgi, M. Podini, Conclusione degli scavi nella Casa dei due peristili, dans S. De Maria, Sh. Gjongecaj (éd.), Phoinike II, Bologne, 2003, p. 21-27.
127 Virgile, Énéide, III, 290, 350 (éd. H. Goelzer, A. Bellesort, CUF, Paris, Les Belles Lettres, 1934) : « Nous longeons les côtes de l’Épire et, entrés dans le port de Chaônie, nous nous dirigeons vers la haute ville de Buthrote […]. Sur nos chemin je retrouve une petite Troie, une Pergame qui reproduit la grande, un ruisseau desséché qui porte le nom de Xanthe ; et je baise le seuil de la porte Scée. Comme moi, les Troyens jouissent de cette ville amie. Ils étaient reçus par le roi sous d’amples portiques ; dans la cour intérieure ils faisaient des libations de vin, devant les mets servis sur des plats d’or, la coupe à la main ».
128 Denys d’Halicarnasse, Antiquité Romaines, II, 51.
129 P. Lévêque, Pyrrhos, Paris, 1957, p. 643 : dès l’époque de Pyrrhos, on peut déceler une certaine influence italienne sur la vie artistique de l’Épire, qui montre un lien culturel entre les deux rives.
130 Polybe, Histoires, II, 8. La présence des Italiens à Bouthrôtos se laisse voir également par les noms des propriétaires italiques qui affranchissent des esclaves dans les inscriptions de l’analemma du théâtre de la ville, comme Aulos, Marcos ou Maarcos et Leucios, ou bien Cassianus. Voir CIGIME 2.2, no 37 ; no 21 ; no 29 ; no 22 ; no 182 et 183.
131 Varron, Économie rurale, II.
132 Sur cette correspondance voir Cicéron, Ad. Atticus I, 13, 1 ; I, 16 ; II, 1 ; II, 20, 2 ; III, 7 ; III, 23 ; XVI ; É. Deniaux, Un exemple d’intervention politique : Cicéron et le dossier de Buthrote en 44 av. J.-C., dans Bulletin de l’Association G. Budé, 2, 1975, p. 283-296 ; Ead., Atticus et l’Épire, dans P. Cabanes (éd.), L’Illyrie méridionale et l’Épire dans l’Antiquité, Clermont-Ferrand, 1987, p. 245-254 ; Cicéron était aussi le patron de Dyrrachium et avait protégé les intérêts de cette ville. Il veut faire la même chose à Bouthrôtos pour aider son ami Atticus, voir É. Deniaux, Cicéron et la protection des cités de l’Illyrie du Sud et de l’Épire, dans Iliria, 2, 1988, p. 156-164.
133 Par Cicéron on apprend aussi qu’Atticus paie à César une grosse somme d’argent, les taxes non payées par la ville pendant les années de la guerre civile. On ne connaît rien sur le caractère de ces taxes.
134 Appien, Histoire Romaine, II, 17, 120 ; É. Deniaux, Cicéron et la protection des cités... cit., p. 251 ; G. Pollo, Fillimet e kolonisë romake në Butrint, dans Butroti, Tirana, 1988, p. 168.
135 Il semble que cela ait fait réagir les indigènes, qui ont expulsé tous les colons de la ville. Ces faits nous sont connus encore une fois grâce à Cicéron (Ad Atticus, XV, 29, 4 ; XVI, 1, 4,), sous la forme de rumeurs répandues à Rome sur ces événements. D’après ces rumeurs, il semble que L. Plotius Plancus ait survécu et soit rentré à Rome dans une situation pénible. Mais d’autres bruits le montrent comme corrompu par les habitants de la ville de Bouthrôtos, laissant les colons seuls. On ne possède pas d’autres détails sur cette histoire ; même Cicéron demande à Atticus de lui expliquer mieux les événements. Voir É. Deniaux, Clientèles et pouvoir à l’époque de Cicéron, Rome, 1993, p. 366.
136 D’après Gj. Karaiskaj, des réparations ont eu lieu pendant cette période sur le mur de l’acropole, et des bâtiments de caractère militaire ont été construits. Néanmoins leurs traces ne sont pas aujourd’hui visibles et ses conclusions restent douteuses. Voir Gj. Karaiskaj, Butrinti dhe fortifikimet e tij, Tirana, 1984, p. 60.
137 Dh. Budina, Ujësjellësi i Butrintit, dans SH, 2, 1967, p. 145-149.
138 L. M. Ugolini, Butrinto : il mito d’Enea. Gli Scavi, Rome, 1937, p. 46 ; voir aussi G. Pollo, Quelques aspects de la numismatique coloniale de Buthrote, dans P. Cabanes (éd.), L’Illyrie méridionale et l’Épire dans l’Antiquité II, Paris, 1990, p. 257-261. Cette monnaie présente la tête de l’empereur Auguste avec la légende BVTHR AVGVSTVS, et trois arches de cet aqueduc entouré de la légende P. POMPONI. C. IYLI II. VIR. Q.
139 A. Baçe, Banjat e shekujve të parë të erës sonë, dans Monumentet, 19, 1980, p. 57-76.
140 Voir O. Gilkes (éd.), The Theatre at Butrint, Londres, 2003.
141 Même si la maison date de la période romaine, elle garde un modèle traditionnel grec en conservant le péristyle. Mais par ailleurs la présence de l’impluvium exprime la volonté du propriétaire de participer à la romanité.
142 L. M. Ugolini, L’Acropoli di Butrinto, Rome, 1942, p. 169-178 ; J. Bergemann, Die römische Kolonie von Butrint und die Romanisierung Griechenlands, Munich, 1998, p. 125-161.
143 Voir D. R. Hernandez, Dh. Çondi, The Roman Forum at Butrint and the Development of the Ancient Urban Center, dans J.-L. Lamboley, M. P. Castiglioni (éd.), L’Illyrie méridionale et l’Épire dans l’Antiquité V, Paris, 2010, p. 243-257.
144 Cette opinion est fondée sur le plan du monument où trois pièces peuvent être attribuées à Jupiter, Junon et Minerve ; une dédicace en latin honore la déesse romaine Minerve. La construction d’un tel complexe sacré d’origine étrusco-italique illustre l’exportation et l’application des goûts et des idées architecturaux romains dans la ville.
145 D. Bescoby, Geoarchaeological Investigation at Roman Butrint, dans I. L.Hansen, R.Hodges (éd.), Roman Butrint. An Assessment, Oxford, 2007, p. 95-118 ; A. Crowson, O. Gilkes, The Archaeology of the Vrina Plain : An Assessment, dans I. L. Hansen, R. Hodges (éd.), Roman Butrint... cit., p. 119-164. Jusqu’à maintenant, les deux systèmes de centuriation dans la plaine de Vrina sont hypothétiques.
146 É. Deniaux, Buthrote colonie Romaine. Recherche sur les institutions municipales, dans G. Paci (éd.), Epigrafia Romana in area Adriatica, Macerata, 1998, p. 47.
147 Voir R. Ricciardi, Two Roman Monuments : Proposals for Function and Context, dans I. L. Hansen, R. Hodges (éd.), Roman Butrint... cit., p. 165-174.
148 D’autres bâtiments de l’Antiquité tardive sont aussi présents, le plus remarquable étant une basilique à trois nefs du VIe siècle, construite sur une villa romaine.
149 Strabon, Géographie, VII, 7, 5 ; Denys d’Halicarnasse, Antiquités Romaines, II, 51, 1. Le second auteur nous apprend entre-autre qu’Énée avait construit à Anchiasmos un temple dédié à Aphrodite.
150 K Lako, Dinamika e zhvillimit të Onhezmit (shek. IV p. e. sonë -shek. IV të e. sonë), dans Iliria, 1, 1986, p. 273 - 281.
151 Dh. Budina, B. Korkuti, Mosaïques venues au jour à Onchesme, dans SA, 2, 1971, p. 53-68.
152 Voir X. Lafon, Villa Maritima. Recherches sur les villas littorales de l’Italie romaine (IIIe siècle av. J.-C./ IIIe siècle ap. J.-C.), Rome, 2001.
153 Sur ce monument voir G. Forster, K. Lako, E. Nallbani, E. Netzer, Sinagoga e Sarandës (Anchiasmos) në antikitetin e vonë, dans Candavia 1, 2004, p. 173-188.
154 Pline, Histoire Naturelle, III, 151.
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La Romanisation de l’Illyrie méridionale et de la Chaônie
Ce livre est cité par
- Forsén, Björn. (2021) The Destruction of Cities in the Ancient Greek World. DOI: 10.1017/9781108850292.011
- Shpuza, Saimir. Nallbani, Etleva. (2022) Le sud de la Dalmatie entre Antiquité et haut Moyen Âge. Mélanges de l'École française de Rome. Antiquité. DOI: 10.4000/mefra.12851
La Romanisation de l’Illyrie méridionale et de la Chaônie
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