Chapitre I. Patrons, big men, gentilshommes : un pouvoir relationnel
p. 33-66
Texte intégral
1Au cours d’une ultime tentative visant à séduire Sofonisba, une jeune femme fille d’un boucher, le gentilhomme Francesco Del Bene, caporione du Trastevere, a recours à un dernier argument qui devait lui paraitre très efficace : la recommandation.
S’il s’agit de quelque chose dont vous avez besoin dans ce rione, dites-le moi, parce que je suis caporione […] si je le peux, je vous aiderais ; si je n’y parviens pas, ce sont mes amis et mes patrons, qui vous aideront1.
2En tant que caporione, comme il le souligne lui-même, Francesco est capable de rendre accessibles certaines ressources du quartier – dans ce cas précis, entrer dans un monastère. Et si la ressource se trouve ailleurs et qu’il ne parvient pas à la rendre accessible, le caporione peut compter sur son réseau d’« amis et patrons », qui lui garantit la possibilité d’agir en tant que distributeur de ressources. L’exemple de Francesco Del Bene montre l’étroite association qu’il existe entre l’autorité d’un individu et le pouvoir officiel, et l’inefficacité d’un pouvoir officiel qui n’est pas accompagné d’une autorité informelle. Afin de devenir officier, c’est à dire un détenteur du pouvoir politique officiel, le gentilhomme doit disposer de quelque chose de plus que la charge obtenue, à savoir, une autorité réelle, effective, reconnue sur un territoire par la population qui y vit.
3À partir de Marshall Sahlins, les anthropologues ont souvent utilisé le modèle du big man pour décrire l’homme central dans une communauté (center-man) ; bien que dépourvu de charges officielles, celui-ci gère et distribue des ressources différentes aux membres de sa clientèle2. Il s’agit donc d’un entrepreneur actif dans des situations de pouvoir informel, ce pouvoir étant acquis et gardé grâce à son rôle d’intermédiaire3. L’absence d’un pouvoir officiel constitue la caractéristique principale de la figure du big man. Comme on l’a vu, à Rome, l’attribution des offices locaux s’effectue sur la base de la notoriété personnelle. En effet, pour pouvoir être candidat au Capitole, il faut impérativement être un homme connu, quelqu’un dont l’autorité est reconnue de tous avant même l’acquisition d’un pouvoir officiel. Au cours de ce chapitre, on se demandera sur quels éléments repose cette autorité, et on constatera qu’elle se manifeste principalement en agissant comme un broker, c’est-à-dire comme un intermédiaire dans l’accès aux ressources. Cela est vrai pour toute la noblesse et constitue l’un des aspects fondamentaux pour la conquête et la sauvegarde d’une véritable autorité, prémisse et condition nécessaire pour l’obtention du pouvoir officiel et des charges. On utilisera ainsi le modèle du big man mais aussi celui de la relation patron/client qui sera légèrement réadapté. Cette relation spécifique a souvent été pensée en termes de patron/broker/client, mais il est souvent difficile de distinguer nettement les deux premiers rôles : un gentilhomme romain peut agir en tant qu’intermédiaire lorsqu’il recommande une personne auprès d’une autre, mais il est aussi patron lorsqu’il gère l’accès aux ressources – par exemple, celles du quartier où il est élu. On laissera donc de côté la division entre patron et broker pour se centrer sur l’exercice du pouvoir personnel en tant que médiation entre les couches populaires et les ressources4.
4Avoir recours à la médiation d’un puissant (local ou non) implique toujours un rapport personnel entre celui qui demande et celui qui donne, même lorsque cette relation existe grâce à la présence d’un tiers, le broker. La vie politique moderne est fortement marquée par les relations personnelles, à tous les degrés de la hiérarchie. Cela a été particulièrement mis en évidence dans le cas des cours des villes européennes. En ce qui concerne Rome, le regard s’est surtout porté sur la cour pontificale, dont les mécanismes ont été étudiés sous l’angle du patronage. Toutefois, la personnalisation de la politique ne s’arrête pas à l’espace curial, et le recours à l’intervention d’un puissant est une pratique normale – et prévue – pour toute la population de Rome, sans distinction de classe.
5Les études sociologiques menées autour du concept de patronage ont souligné la fonction de protection exercée par le patron vis-à-vis de ses clients. Dans la Rome moderne, cette attitude prend souvent la forme d’une recommandation : celle-ci est requise essentiellement en cas de problème avec la justice, mais elle peut l’être également pour l’accès à un emploi particulièrement recherché ou pour d’autres enjeux. Avoir recours au soutien d’un noble représente un avantage considérable ; il peut apporter son aide dans différentes situations telles que la recherche d’un travail, l’entrée dans un couvent ou la location d’un terrain. Ce faisant, les gentilshommes agissent comme des distributeurs de ressources et des médiateurs locaux, tout en construisant leur autorité sur le terrain politique.
6Mais l’affirmation d’une autorité individuelle dans un quartier n’est pas toujours une opération linéaire, sans obstacle, surtout pour ceux qui ne font pas partie des grandes familles – soit les individus dont l’autorité acquise n’est pas liée à leur appartenance directe à une maisonnée célèbre. Les conflits de juridictions sont fréquents et éclatent surtout autour de l’ordre public, dont la gestion dans le quartier est revendiquée par différents acteurs. L’utilisation de la violence sera donc analysée comme un moyen d’affirmation de l’autorité personnelle – un indice de la forte compétition politique locale.
Des « personnes distinguées » : les gentilshommes
7Les gentilshommes sont des membres de la noblesse non-titrée, désignés également comme nobiles viri ou patrizi d’un quartier. Ce groupe, bien que très diversifié, a comme élément fédérateur le rôle remarquable qu’il joue au Capitole, occupant souvent des charges politiques importantes (surtout celles de conservatori, de caporioni et de maîtres de rues). Bien que les familles romaines constituent le groupe le plus nombreux, plus de la moitié des membres du patriciat est formée par des non Romains (53 % sur un total de 317 familles)5. Les lieux d’origine les plus représentés sont l’État pontifical (22 %), Florence et la Toscane (12 %), suivis de la Lombardie (5 %). L’analyse des provenances géographiques est une confirmation du fort degré d’ouverture de l’élite municipale, qui pousse les familles de la noblesse capitoline à donner une importance considérable à leur désignation : de la forte concurrence et de la mobilité interne à l’élite découle un effort constant de « distinction »6.
8Bien qu’ayant une place moins prééminente que les membres de la noblesse titrée, les gentilshommes attribuaient de l’importance à leur désignation au Capitole. Interrogé par Monseigneur le Gouverneur de Rome en 1596, le noble romain Domenico de feu cavalier Geronimo Attavanti déclare qu’il n’a pas d’autre occupation que celle de gérer sa maison et son palais « en tant que gentilhomme romain »7. Domenico est accusé d’avoir agressé à coups de bâton Vincenzo Cassino, après avoir essayé de se rendre méconnaissable en se déguisant en Zanni, un personnage de la commedia dell’arte. Le détail vestimentaire a son importance. Lorsqu’ils sont impliqués dans un cas de violence sur autrui, les gentilshommes sont souvent décrits, par les victimes, comme s’étant déguisés en paysans ou en personnes de condition modeste. Appelé à témoigner dans un procès criminel où des gentilshommes sont mis en cause, Giovanni Sanno déclare en avoir reconnu un, Benedetto Buttafava, bien que déguisé en paysan : selon Giovanni, l’agression a été commise par « quelqu’un qui portait un ferraiolo, déguisé en paysan, mais je l’ai reconnu, c’était Benedetto Buttafava du Trastevere, je ne sais pas où il habite, mais je le connais bien et je connais son nom »8. Malgré les faux-semblants, Benedetto est un gentilhomme qui, lorsqu’il donne des coups de bâton à la victime, la met en garde : « Je te fais cela pour que tu apprennes à te conduire comme il se doit avec des gentilshommes ». Le déguisement sert donc à l’individu pour se dissimuler, pour rendre moins évident son statut, car un gentilhomme est reconnaissable par ses vêtements. Dans le même procès, un autre témoin, le boulanger Domenico de Lancisa, affirme que les autres agresseurs semblaient être « tous des gentilshommes, car ils étaient bien habillés ».
9Si, lorsqu’ils commettent des violences, les gentilshommes tentent de ne pas faire remarquer leur statut, lors d’un procès, au contraire, ils le revendiquent en comptant sur la respectabilité implicite associée à leur qualité. La respectabilité concerne tout d’abord les activités pratiquées : l’exercice d’un métier mécanique n’est pas convenable pour un gentilhomme. Comme nous l’avons vu dans le discours de Domenico Attavanti, dans la Rome des XVIe et XVIIe siècles un gentilhomme est quelqu’un qui n’est pas obligé de travailler pour vivre, et qui se tient éloigné du travail manuel, mécanique, mais aussi du commerce. Le gentilhomme peut vivre sans travailler, grâce aux revenus de ses biens. Dans sa proposition de classification de la population de la Rome baroque, Renata Ago souligne qu’un statut économique et social élevé est généralement associé à la possibilité de vivre de ses affaires et de ses propriétés9. Le fait de ne dépendre d’aucun patron constitue aussi une condition pour le gentilhomme de la Rome moderne : les gentilshommes sont donc des propriétaires, domini, comme on le verra par la suite.
10On peut mieux comprendre quelle place les habitants de Rome attribuent aux gentilshommes en s’intéressant à l’usage du mot à cette époque, dans une source comme les procès. Pour Domenico Attavanti, être gentilhomme est la garantie du bon comportement qui doit susciter le respect et la soumission d’autrui. Se présenter comme gentilhomme sert donc, au moins dans les intentions, à éloigner les suspicions de délit : la qualification « gentilhuomo » indique un statut mais aussi des supposées qualités morales. Dans un procès datant de 1563, déjà mentionné, le caporione de Trastevere Francesco Del Bene, est accusé d’avoir violé Sofonisba, fille d’un boucher génois qui réside dans le même quartier. En essayant de prouver sa respectabilité, Francesco affirme être un gentilhomme et ne fréquenter que ses pairs : « Je me suis toujours efforcé à ne fréquenter que des gentilshommes et des personnes honorables et des gens bien ». Le gentilhomme est en théorie quelqu’un de correct, une « personne qualifiée »« comme il faut ». Selon Francesco, le fait de se présenter comme gentilhomme aurait donc dû rassurer la jeune femme lorsqu’il cherchait à forcer la porte et à entrer chez elle. Dans son témoignage, Sofonisba décrit la conduite de Francesco : « Il me dit qu’il ne s’en irait pas, même s’il devait attendre jusqu’au matin, qu’il serait resté tant qu’il n’aurait pas ce qu’il voulait, et il me dit ‘Vous ne me connaissez pas, je suis Caporione, je suis gentilhomme’ ». Elle répond : « S’il était gentilhomme comme il disait, qu’il fît ce qui convient à un gentilhomme, et qu’il me laissât tranquille ».
11Un gentilhomme est donc quelqu’un que les gens se doivent de respecter. C’est ce qu’affirme Giovanni Domenico Tomeo, romain, agressé par un groupe de « gentilhuomini », dont le plus remarquable est Bernardino Velli du rione Trastevere : « Nous nous sommes donné plein des coups, mais je ne voulais pas exagérer, parce que j’aurais pu le tuer, mais je le tenais en respect en tant que gentilhomme, donc je me contentais de me défendre ». C’est précisément grâce à sa qualité de personne « distinguée » que l’intervention d’un gentilhomme se révèle un atout dans plusieurs situations : en premier lieu, lorsqu’on a affaire à la justice.
Recommander, protéger et garantir
12Sous l’Ancien Régime, en Italie, la recommandation fait partie d’un langage politique qui ne concerne pas seulement les élites, mais également les couches populaires de la société. Plusieurs études ont été consacrées au clientélisme et au langage de l’amitié et du patronage, analysés notamment à partir des correspondances de nobles, de cardinaux et d’officiers de l’État10. Le caractère rhétorique de ce langage ainsi que l’existence de règles qui lui sont attachées – non dites, mais tout aussi contraignantes – a été mis en évidence dans le choix des formules à employer.
13Dans la société moderne, la pratique de la recommandation ne fait l’objet ni d’un jugement moral, ni d’un mépris social ; en effet, elle ne contredit pas l’égalité de principe des citoyens garantie par l’État. Les concepts de public et de privé à l’époque moderne ne sont pas les mêmes qu’aujourd’hui, et les liens personnels ont une place reconnue dans la politique d’Ancien Régime. C’est pourquoi le clientélisme et la recommandation ont été définis non seulement comme des pratiques normales et acceptées, mais comme la façon même dont les institutions fonctionnaient11. Il est donc difficile d’imaginer que ces règles soient limitées aux élites de la société parce qu’elles seraient les plus impliquées dans la sphère politique12. En effet, bien que nous ne disposions pas de témoignages comparables aux correspondances nobiliaires, les couches populaires partagent avec l’ensemble de la société une familiarité avec la culture du clientélisme et de la recommandation. Elles aussi ont recours aux liens personnels : leur usage est courant, non seulement en ce qui concerne la « haute » politique, au sommet de la cour pontificale, mais aussi dans des situations où les relations et les besoins sont tout à fait quotidiens. Cela peut notamment se produire dans le cas où les individus sont mis en cause devant la justice.
14Pour étudier les dynamiques de la recommandation, on utilisera les suppliques adressées au pape qui font partie du fond du Tribunal criminel du Gouverneur de Rome – actes divers de chancellerie (1594-1624)13. Ces lettres, émises par des sujets de condition variée, sont adressées au pape et représentent le dernier espoir d’obtenir une faveur, la grâce, une aide dans des contextes très divers14. Cette source est particulièrement utile pour mettre en lumière l’existence de mécanismes de recommandation et leur diffusion dans toutes les couches de la population de Rome. En effet, on rencontre de nombreuses traces de ces usages dans les suppliques : dans plusieurs lettres, on trouve l’indication « recommandé par », ou d’autres formules spécifiant l’implication de protecteurs, qui sont souvent des cardinaux ou des représentants de familles féodales.
15L’intervention d’un noble ou d’un autre puissant peut être plus ou moins directe. Parfois, les suppliques mentionnent directement qui est le protecteur du postulant, en notant sur le verso de la page « Recommandé par » (« Raccomandato da »), suivi du nom du patron. Dans ce cas, il s’agit d’un signe certain de l’implication du noble, et de son engagement pour la bonne résolution du cas. Évidemment, cet engagement suppose qu’un lien personnel existe entre le protégé et son protecteur. Le cas est assez commun chez des nobles qui interviennent pour aider leurs serviteurs, les membres de leur familia, dont les problèmes judiciaires ne conviennent pas à une politique de prestige. En voici un exemple : en 1598, Fenizia Arcioni, « gentille dame romaine », membre d’une famille de la noblesse municipale, adresse une supplique au pape pour que son fils Curzio ne soit pas puni d’avoir blessé Vincenzo Buongiorno. Pour consolider sa requête, Fenizia obtient la recommandation du cardinal Montalto15. Voici encore le cas de Giovanni Scala, cocher de monseigneur Grimaldi ; détenteur d’un couteau, une arme interdite, il est arrêté par la police mais « garanti » par le prélat16. Le cardinal Sforza, pour protéger le domestique de son majordome, ne se limite pas à recommander le postulant ; il écrit directement au pape en lui demandant de libérer Marcantonio Barozzi, arrêté lui aussi pour avoir porté une épée illégalement17.
16Dans d’autres cas, l’intervention du patron n’est pas directe : dans la supplique, son nom est simplement évoqué par le postulant, sans aucune « autorisation », et dans l’espoir que l’association entre les deux noms produise l’effet attendu. Il faut donc se présenter au mieux en tant que personne ayant des liens avec quelqu’un de bien placé dans la hiérarchie des pouvoirs et dans l’échelle sociale. Ainsi, Vittoria se définit comme « pauvre veuve de Claudio, jardinier du pape Sixte V », lorsqu’elle demande une aide financière servant à payer les frais engagés pour soigner sa fille, blessée par le fils de Bartolomeo de Castel Durante18. En suppliant le pape, Giovanni Tommaso Nobilione, lui, met en évidence, ses liens personnels avec le cardinal Spinello, dont il se dit être le serviteur ; c’est grâce à ses bons soins qu’il affirme n’être pas mort de faim pendant sa vie misérable19.
17Être au service d’un noble ou d’un cardinal est une condition souvent temporaire, comme on le verra par la suite. Néanmoins, à l’occasion d’une supplique, les postulants se définissent comme serviteurs de tel ou tel autre puissant, comme si celle-ci représentait la caractéristique principale de leur statut. Dans la plupart des cas, ils ont été au service de la personne indiquée pendant des courtes périodes, souvent n’excédant pas quelques mois ; et pourtant Achille Iacobello, septuagénaire, se définit uniquement « domestique du feu cardinal Orsini »20 ; Ferdinando Buontempi se présente en tant qu’ancien fermier d’Onofrio Santacroce21 et Pompilia, « pauvre vieille, et veuve », demande la recommandation de Costanza Barberini, en lui rappelant qu’elle « a été nourrice de monsieur le Prince Aldobrandini, et aussi à votre service »22. Elle demande à Costanza Barberini de l’aider à obtenir la grâce pour son fils condamné à mort, en la suppliant de « s’interposer avec son autorité » (« interporsi con la sua authorità »).
18Ancien domestique ou personne ayant rendu des services, le postulant peut faire jouer cette qualification dans la supplique adressée à un cardinal ou même au pape. Tous types de liens avec le « haut » peuvent être mobilisés. C’est ce que fait en 1622 une veuve romaine, Cassandra Bonazzina, qui demande à pouvoir couvrir un escalier de sa maison : celui-ci étant contigu aux prisons de Corte Savella, à chaque passage, elle et les autres habitants de la maison sont exposés aux regards et aux insultes des détenus. Pour obtenir l’autorisation de couvrir l’escalier, Cassandra fait peser dans sa supplique les liens de son feu mari, en soulignant qu’« il a servi pendant tout le pontificat du pape Paul V, prédécesseur de Votre Béatitude, en tant que mesureur, sans jamais être payé pour cela »23. On retrouve la même rhétorique chez Domenico Gioacchini da Monterotondo qui raconte ses péripéties24 : il demande à être libéré de prison « puisqu’il25 a servi longtemps le Saint-Siège, comme on peut le vérifier grâce aux passeports et aux lettres de références »26.
19Parfois les suppliques ne sont pas adressées au pape mais aux membres de familles féodales, dont le postulant est, ou se présente comme étant, le vassal. Il s’agit donc de personnes qui habitent dans les domaines des familles nobles et pour lesquelles le seigneur féodal représente un point de référence incontournable. Ainsi, Laura Balzarano, « pauvre veuve avec deux fils », s’adresse directement à Luca Massimi27, dont elle se définit vassale28. A ce propos, la supplique d’Antonio Del Mercante, habitant de Vicovaro, fief des Orsini depuis le XIIIe siècle, mérite d’être mentionnée. Antonio s’adresse à Giovan Battista Orsini, « maître et seigneur », dont il se dit le « serviteur et vassal ». Il lui écrit parce qu’il a été « dérangé » par le gouverneur de Rome lors de son passage à Vicovaro ; à cette occasion, il portait son poignard avec lui29. En s’appuyant sur les conflits de juridictions qui caractérisent souvent l’action des différentes autorités de l’État pontifical, Antonio fait appel à son « maître et seigneur » pour résoudre un problème avec la justice de Rome. Il est donc conscient que le fief est un domaine de la famille Orsini : celle-ci ne manquera pas de faire valoir ses droits juridictionnels.
20Serviteurs et « vassaux » ne sont pas les seuls à jouir de la protection des nobles et des cardinaux, ni à utiliser leurs noms comme références. Les artisans aussi font appel à quelques-uns des seigneurs pour qui ils ont travaillé. Bien que les artisans ne fassent pas partie de la familia, on peut raisonnablement supposer que des relations préférentielles existent entre le noble et les boutiques et les commerces dont il est client – proche du palais ou non. Au cours d’un procès daté de 1628, on trouve un témoignage explicite à ce propos. Lors de l’interrogatoire mené par le gouverneur de Rome, l’épicier30 Bartolomeo Fregotto, accusé d’avoir agressé l’un de ses collègues, explique avoir reçu une convocation le sommant de se présenter au tribunal. Il dit en avoir discuté tout de suite avec don Silvio, majordome d’un noble romain. Pourquoi Bartolomeo est-il lié à ce noble ? Il affirme tout simplement qu’il est l’un des clients de sa boutique – « parce que je suis fournisseur de la maison de Son Excellence pour l’huile et d’autres produits de mon épicerie » ; ainsi, grâce à son rôle de fournisseur de la maison, l’épicier s’adresse au noble (et en particulier à son majordome)31 pour faire en sorte qu’il agisse en tant que médiateur vis-à-vis du Gouverneur. Et en effet, Bartolomeo obtient le résultat souhaité : don Silvio se rend au Tribunal du Gouverneur pour s’enquérir de la demande ; la semaine suivante, il convoque l’accusateur et obtient la paix, donc la rémission des accusations32.
21Craignant un procès, Bartolomeo s’adresse à un protecteur qui détient un pouvoir alternatif par rapport à celui du gouverneur, un pouvoir pour ainsi dire informel, dont il dispose grâce aux liens personnels qu’il a établis. Et ces liens ont été tissés grâce à son métier. On trouve des cas semblables d’autres suppliques Giovanni Battista Antifassi, qui se définit « garçon du boucher d’Olimpia Aldobrandini », ne sollicite pas la puissante femme, mais se contente de s’adresser au cavaliere Giannotto Ceparelli, pour qu’il « daigne par charité le tenir pour recommandé et lui accorder la grâce de le favoriser avec Monseigneur Révérend Gouverneur »33. Et Filomena Gordina, déclarant avoir été bâtonnée par un policier, se présente au pape en tant que « collarara [fabricante de colliers] de la famille du Prince cardinal de Savoie »34.
22L’intervention des nobles et des cardinaux dans les voies de la justice peut aussi fonctionner dans le sens contraire : si elle peut faire libérer de prison, elle peut aussi faire incarcérer ou commuter une peine. Antonio de Montecompatri35, coupable d’avoir violé une femme et blessé par les frères de la victime, « fut mené en prison à Rome par le cardinal Sant’Eusebio, agent du duc Altemps. Il resta à Rome quatre mois, et ensuite, fut enfin condamné aux galères par volonté du susdit duc son maître »36. Il s’agit ici d’un délit qui s’est produit dans un fief : il n’est donc pas étonnant que le duc Altemps puisse intervenir par voie de justice afin de décider du destin d’un de ses vassaux.
23Néanmoins, cet usage est répandu même lorsqu’il ne s’agit pas de juridictions féodales mais de justice romaine « normale ». Parfois les arrêts, ainsi que les libérations de prisonniers, se font ad instantiam, selon la volonté de quelqu’un. Ainsi, Mario Mattei en 1609, donne son consentement afin qu’Ottavio et Pietro soient libérés de prison ; il précise que les deux hommes sont en prison « de ma volonté et initiative suite à des insultes et à des dommages faits dans mon jardin »37. Et le cardinal San Clemente, en 1555, écrit au gouverneur pour lui demander de libérer sous caution Pietro Buzzari de Benevento, emprisonné pour une gifle38. Dans d’autres cas, l’intervention du protecteur consiste à représenter la personne accusée au tribunal. Un autre représentant de la famille Mattei, Ciriaco, en 1603, promet au gouverneur de représenter Lucia, domestique de sa fille Erminia, dans un procès concernant Onofrio Santacroce39. Souvent, il s’agit de membres de la familia : en 1562 Alberico Cybo Malaspina intervient, devant le tribunal du gouverneur, comme représentant de son maître d’étable Gaspare et de son cocher Pietro40.
24En 1566, lors d’un procès, Ascanio Caffarelli décrit de façon claire les différents passages de la recommandation d’un prisonnier41.
Je ne connais pas ce jeune [le prisonnier] et je ne sais pas qui c’est. Il y a quelque temps, par l’intermédiaire du cavaliere Annibale Caro42 j’ai recommandé un prisonnier, dont me parla un prêtre que j’avais connu chez le cardinal Farnese. Il faisait le bouffon et il était pédant, et lorsqu’on s’est croisé au Pellegrino43, je lui demandai pourquoi le jeune était en prison ; il me répondit qu’il y était pour vol. (…). J’en parlais alors au susdit cavaliere Caro, qui ne voulut même pas en discuter. Le prêtre me dérangea deux ou trois fois encore en me demandant, au nom de Dieu, de le recommander. Une fois je rencontrai le susdit cavaliere à Santa Fiora ; je lui en parlai, afin qu’il se renseigne auprès de Vostra Signoria [le gouverneur de Rome] sur le délit commis par le jeune homme ; lui me répondit qu’il le ferait très volontiers. Ensuite, deux jours après, je rencontrai encore le cavaliere et il me dit qu’il avait parlé à Vostra Signoria et que vous lui aviez dit que le jeune était en prison pour sodomie.
25Dans ce cas, le noble romain est impliqué dans un mécanisme assez complexe ; dans un premier temps il a affaire au prisonnier, puis, après être passé par plusieurs intermédiaires, il rencontre enfin « Vostra Signoria », le gouverneur de Rome. Cela requiert ainsi l’intervention de plusieurs personnes : un prêtre, le cardinal Farnese, le cavaliere Caro et Ascanio Caffarelli. Ce mécanisme de recommandation, qui s’effectue en plusieurs étapes, montre que la distinction entre patrons et brokers n’est pas pertinente, car les rôles changent suivant la situation44.
26Disposer de l’aide d’un puissant est un avantage signalé dans certaines suppliques. Ainsi, en 1598, Giovanni Battista Regolo s’adresse au pape pour se plaindre de l’iniquité qu’il a subie. Il raconte avoir été agressé par trois membres de la familia de Luca Massimi – le majordome, le cocher et le solliciteur –, qui ont essayé de le tuer en le frappant à la tête. Des trois agresseurs, un seul (Marco) a été conduit en prison.
Et maintenant le postulant entend que les susdits Alessandro et Lione [les deux autres agresseurs] vont s’en sortir en négociant, sans se préoccuper de moi ; et Marco a déjà été remis en liberté, bien qu’il ait été condamné aux galères. Et cela parce qu’ils bénéficient, eux, de forts appuis et de puissantes faveurs, alors que le pauvre postulant n’a rien de son côté, excepté Dieu et Votre Seigneurie45.
27Lorsqu’on ne dispose pas de « faveurs puissantes », il n’existe plus qu’une solution : avoir recours au pape, soit pour obtenir sa grâce, soit pour faire connaître les injustices subies. La référence à l’intervention de protecteurs qui ont altéré la balance de la justice résonne aussi, presque avec les mêmes mots, dans la supplique de Fulvio Tonio de Cerreto46. Son frère a été tué par Lellante Arducci, qui, pour ce crime, a été condamné à mort. Mais ensuite,
Grâce à de puissantes faveurs, la peine a été commuée de la mort aux galères perpétuelles. Il y a deux ans environ, il a été mené à Civitavecchia, et là-bas, il n’a jamais ramé, mais cela n’est pas tout. En fait, grâce à ses appuis, il fut traité comme un Gentilhomme par les ministres, en restant tout simplement enchaîné, avec tous les conforts, et fut transféré d’une galère à l’autre, en restant dans le port lors de la navigation.
28Si ce type d’intervention est perçue comme une injustice, il l’est seulement parce que le postulant affirme ne pas recevoir, de son côté, le soutien d’un protecteur. Le rôle de l’intermédiaire, qui recommande ou qui décide directement la peine à attribuer, n’est pas seulement pleinement accepté en tant qu’usage commun ; il est aussi prévu par les pratiques de la justice quotidienne. On a pu le constater précédemment avec l’histoire de Bartolomeo Fregotto qui fournit son protecteur en huile : pour régler un litige, l’arbitrage et la parole d’un médiateur reconnu sont indispensables.
29Dans un litige, l’intervention d’un personnage illustre en tant qu’arbitre est un usage commun qui permet de garantir à l’offensé que l’accusé ne lui nuira plus et d’obtenir ainsi son pardon. Cette absolution est la condition nécessaire pour une rémission des accusations de la part des autorités judiciaires qui ont entamé les poursuites47. Il s’agit d’une procédure normale, « qui convient à tout chrétien », selon la définition de Francesco Baldrati de Ravenne48. Coupable d’avoir provoqué une bagarre, il a été exilé par le gouverneur de Rome ; pour pouvoir rentrer chez lui, il affirme avoir toujours cherché, en vain, le pardon de l’autre partie et un consensus de paix. Mais il ne l’a jamais obtenu, « bien que gentilshommes, prélats et autres religieux soient intervenus, comme il convient pour tout chrétien »49.
30Pour obtenir le pardon de l’offensé, la médiation du noble consiste à produire une certification, appelée « fede di non offendere » (« promesse/garantie de ne pas offenser »)50. Il s’agit de lettres adressées au gouverneur de Rome dans lesquelles le noble – souvent un membre de l’élite municipale – se porte garant pour l’accusé, et donne sa parole pour que l’accusé ne porte plus jamais préjudice à celui qui avait déposé une plainte. Dans ces lettres, le noble déclare que telle personne ne nuira plus à telle autre, et, se portant garant, il prend à sa charge la responsabilité de la bonne conduite de l’individu impliqué dans la querelle. Si la personne dont il est le garant dérangeait encore la partie offensée, le noble se déclarait prêt à adopter des mesures nécessaires pour la sauvegarde de son honneur. En voici un exemple. En 1595, le noble Andrea Velli, du rione Campitelli, se porte garant pour un arquebusier en conflit avec une femme, donna Isabella, de la ville de Ferrare51.
Par la présente lettre, je soussigné, promets, donne ma parole et garantis à Monseigneur Illustrissimo, le Gouverneur de Rome, que Giovanni Matteo Bartolotti, arquebusier, n’offensera ni ne fera offenser, ni par ses mots ni par ses gestes, madame Isabella ferraraise, résidente à Rome, puisqu’il me l’a promis et m’en a donné sa parole. Dans le cas où il ferait le contraire, il serait nommé infâme et traître, et moi, pour faire justice, je prendrais les mesures qui conviennent à qui je suis […].
31« À qui je suis », c’est-à-dire à un gentilhomme dont la parole ne saurait être remise en question par la mauvaise conduite d’un protégé. Pour le noble, il s’agit de défendre son honneur personnel, une sorte de capital mis en jeu : la parole donnée par le gentilhomme est associée à l’honneur que son statut social lui attribue. Dans les lettres de garantie dont on dispose, pour rappeler qu’ils sont à même de garantir quelqu’un vis-à-vis de la justice du gouverneur, les nobles font référence soit à leur condition de gentilshommes, soit à leur honneur. Le protégé, s’il manque à sa parole, menacera donc directement l’honneur du noble ; pour la maintenir, ce dernier devra prendre des distances avec l’action commise, en punissant le coupable. Comme on l’a déjà fait observer précédemment, les documents de ce type sont conservés dans les fonds de nombreuses familles, ce qui témoigne de la diffusion de cette pratique. Si dans les suppliques adressées au pape le protecteur ou l’intermédiaire sont, de préférence, un cardinal ou un seigneur féodal, les lettres de garantie sont le plus souvent écrites par des membres de la grande noblesse municipale – Cenci, Massimi, Mattei, Velli, etc.
32Qui sont les personnes pour lesquelles ces nobles se portent garants ? Il s’agit, tout d’abord, des membres de leur entourage proche, tels les domestiques ou les locataires. Dans ce cas, la parole du noble est encore plus fiable car le garant connaît bien celui qu’il protège. Ainsi Gaspare Cenci, en 1598, peut promettre que Mauro da Pignano, son fermier dans le casale Falcognano, « n’abusera pas de l’arquebuse dans la campagne, et nous le promettons pour 50 écus »52. Ascanio Del Bufalo se porte garant pour deux de ses locataires d’un casale, en affirmant : « je les connais et je les considère comme étant des hommes honnêtes et je n’ai jamais entendu rien de mal venant d’eux »53.
33Le noble fait le choix de se porter garant et de donner sa parole notamment en faveur des couches les moins élevées ; l’intervention du puissant résout souvent des conflits entre artisans ou commerçants. Sur ce point, on trouve de nombreux exemples dans le dossier de la famille Massimi54. En 1597, Luca Massimi se porte garant pour Gaspare Furlano face au ciambellaro (pâtissier, spécialisé en beignets) Marcantonio, provençal originaire de Nice55 ; deux ans plus tard, Pompeo Massimi procède de la même façon pour Francesco Palmero, pour qu’il soit pardonné par Antonio aubergiste56. Et en 1605, le noble Massimo Massimi, s’engage dans un conflit qui oppose deux porteurs compatriotes originaires de la Valteline, en prenant parti pour l’un eux.
Je soussigné, promets et donne ma parole à monsignor le Gouverneur, que Lorenzo de Tugnardei, porteur de la Valteline, n’offensera ni par ses gestes ni par ses mots Bartolomeo de Boni de la Valteline ; Lorenzo Ferola, Giovanni del Cane et Antonio alias il Moretto, sont tous porteurs de la Valteline. S’il fait le contraire, je promets de prendre les mesures qui conviennent au chevalier d’honneur que je suis57.
34Un dernier exemple est celui de la garantie qu’offre Andrea Velli, en 1598, à Domenico Matteuccio, débardeur du port de Ripa, qui promet de ne plus offenser un cordonnier nommé Giuseppe58. Il s’agit donc de milieux sociaux assez éloignés de la noblesse municipale : aubergistes, porteurs, ouvriers du port, et ainsi de suite. Toutefois, les couches populaires ne sont pas les seules à demander à un noble de se porter garant. Des membres de l’aristocratie, peuvent, eux aussi, avoir besoin de l’intervention d’un de leurs pairs dans le but de résoudre un problème judiciaire. Andrea Velli « promet sa foi » au gouverneur de Rome en 1561 en faveur du cavaliere Andrea Bartolacci Ridolfi de Todi, ville située dans l’Ombrie : il affirme qu’il ne nuira plus à son compatriote Mambrino Carraci. Andrea Velli déclare connaître le cavaliere et le qualifie de « bon gentilhomme », qu’il punira s’il ne tient pas parole.
35On voit donc que le recours à l’arbitrage d’un protecteur n’est pas propre à une classe sociale : il s’agit plutôt d’une pratique commune pour laquelle les promesses faites par l’offenseur de ne plus réitérer ses méfaits doivent être impérativement renforcées et « validées » par une personne réputée digne de foi. Si l’appartenance de classe semble ne pas compter pour celui qui demande la protection, elle est en revanche essentielle pour le garant ; en effet, pour être considéré a priori digne de foi, respectable et homme d’honneur, il est indispensable de faire partie de la noblesse. Cela n’est pas seulement dû aux valeurs et aux représentations se rapportant au concept d’aristocratie en tant qu’élite, mais également au fait que le noble représente effectivement un pouvoir alternatif. Un pouvoir capable de gérer la résolution du conflit grâce aux liens qu’il entretient avec l’offenseur : pour celui qui demande une protection, l’argument dissuasif n’est pas seulement la crainte d’être « nommé infâme et traître », comme l’écrit Andrea Velli, mais aussi, et surtout, celle de perdre l’appui de son protecteur59. En cela, le système juridique officiel vise à s’appuyer sur les pratiques sociales : loin d’être une déformation ou une « maladie » du système, le patronage s’inscrit au cœur du fonctionnement des institutions.
Distribuer les ressources
36L’intervention du médiateur ne se limite pas à la protection en cas de problèmes avec la justice. Elle se révèle aussi extrêmement précieuse pour l’accès aux ressources urbaines. Bien que ce concept soit très large, on se centrera, dans cette section, sur la recherche d’un travail, la location de biens immobiliers et l’admission dans les hôpitaux et les couvents. Les rares études qui se sont intéressées aux relations patron-client entre noblesse et habitants des quartiers à l’époque moderne se sont limitées à considérer l’accès et la distribution d’une seule ressource, à savoir les exemptions fiscales60. Mais, si l’on réfléchit bien, ce type de relation semble être bien plus puissant et efficace : le besoin d’un protecteur et de son appui est loin de se limiter aux problèmes fiscaux.
37Le rôle de médiateur est essentiel dans la recherche d’un travail car l’activation d’un lien personnel est un moyen utile pour y accéder. Le lien créé avec un noble s’avère précieux pour deux types de travail en particulier : les emplois les plus prestigieux – les charges d’officiers publics, par exemple – ou ceux qui concernent directement la vie aristocratique – les domestiques et les autres membres de la familia. En ce qui concerne la recherche d’emplois prestigieux, l’exemple de Gaspare Alfano peut être donné. En 1598, ce dernier supplie le pape de le recommander auprès du gouverneur de Rome afin qu’il obtienne un poste de notaire adjoint dans le tribunal criminel. Il déclare avoir déjà « servi » ce tribunal, comme le gentilhomme Bartoletto peut le confirmer61. Dans sa requête, Gaspare mentionne donc une sorte de référence professionnelle : si besoin, le gentilhomme Bartoletto pourra appuyer sa demande, ce qui augmentera ses chances d’obtenir le poste. De la même façon, Francesco Saoli, qui en 1624 aspire au poste de fiscale62 adjoint, supplie le pape de considérer sa candidature ; il met en avant ses compétences et sa « bonne relation »63. Et, surtout, la recommandation de monseigneur le datario64, notée au verso de la page.
38Le rôle de médiateur des nobles s’exerce aussi dans un secteur bien moins prestigieux, celui du service domestique. La fréquentation du milieu aristocratique permet aux serviteurs d’obtenir des informations sur les postes à pourvoir, ce qui facilite le passage d’un palais à un autre. Ce sont parfois les gentilshommes eux-mêmes qui s’impliquent dans la recherche de ces serviteurs pour pourvoir des postes. Lors d’un procès en 1566, le noble Ascanio Caffarelli nie avoir trouvé un emploi à quelqu’un au cours des huit derniers mois. Il affirme : « Je ne me souviens pas, dans les huit derniers mois, qu’aucun jeune ne m’ait demandé de le faire embaucher chez un gentilhomme, ni d’avoir demandé à quelqu’un s’il voulait aller au service de quelque gentilhomme ». En se défendant d’avoir agi comme intermédiaire au cours des derniers mois, Caffarelli laisse à penser que le fait de mettre au service d’un gentilhomme ceux qui recherchent un travail était une pratique répandue dans la sphère nobiliaire. Il précise en effet ne l’avoir pas fait récemment, mais ne prétend pas ne l’avoir jamais fait. Il en parle, au contraire, comme d’un procédé connu et établi qu’il ne croit pas devoir justifier ou expliquer.
39Faire partie de l’entourage d’un noble peut aussi se révéler être un atout pour accéder au marché des locations. Dans ce cas, l’implication d’un noble peut prendre la forme d’une « sicurtà », une sorte d’assurance utilisée dans plusieurs types de transaction, notamment celles où des paiements sont prévus. Pour une location, celui qui donne la « sicurtà » se porte, une fois encore, garant ; il engage sa responsabilité au nom du locataire devant le propriétaire du bien loué. Le gentilhomme constitue un excellent donneur de « sicurtà », pour les raisons déjà mentionnées. Bien que tout le monde ne dispose pas de ce type de recommandation et que les liens mobilisés pour accéder aux ressources varient d’un individu à l’autre, toutefois, en général, les points de contact entre la noblesse et les couches populaires sont nombreux : l’intervention d’un protecteur n’est pas un atout réservé à quelques privilégiés. Dans le cas des employés des nobles, les réseaux sociaux comptent souvent au moins un gentilhomme (ou, mieux encore, un cardinal), ce qui facilite la vie de façon remarquable. Ainsi, pour louer des vignes près de Ponte Milvio, le vigneron Cecco de Sinalunga65, qui réside avec sa femme dans la Villa Ruffina appartenant au cardinal de Verceil66, rend visite à ce dernier, à Rome, pour obtenir de lui une « sicurtà »67.
40La noblesse de Rome semble aider souvent ceux qui la sollicitent ainsi : même ceux qui résident dans la ville depuis peu de temps réussissent à obtenir une recommandation. On peut le vérifier grâce aux registres des personnes admises dans l’hôpital des pauvres de San Sisto68. Pour avoir accès à l’institution caritative, les candidats doivent être sélectionnés ; le choix se fait après un interrogatoire portant notamment sur les activités pratiquées, les lieux de résidence et la date d’arrivée à Rome. Les informations enregistrées changent suivant la personne qui les recueille ; pendant une courte période, comprise entre septembre 1653 et juin 1654, on trouve de façon régulière l’indication de la personne qui recommande le candidat. L’usage de la recommandation étant tellement courant, on peut penser que les autres candidats sont aussi recommandés mais que l’information n’a pas été enregistrée69. Le tableau 1 dénombre les personnes recommandées, indique le nom de leurs protecteurs et le métier qu’ils exercent.
Tableau 1 – Recommandations pour être admis à l’hôpital de San Sisto (1653-1654).
Nom | Métier | Recommandé par |
Cesare Bonfiglioli | Cocher | Olimpia Pamphili |
Giovanni Caputo | Jardinier et vigneron | Cardinal Fiorenzola |
Giovanni Cioppoli | - | Francesco Fabi |
Santi Francescone | Paysan | Monsignor Scotti majordome du pape |
Giorgio Bonetto | Cordonnier | Nicolà Degli Oddi et un page du prince Ludovisi |
Pietro Toffone | Cordonnier et domestique | Père Girolamo Bernabeo prieur de la Chiesa Nuova |
Bruna Barbati | - | Marquis Crescenzi |
Doralice Bianca | Domestique | Francesco Butelli |
Orazio de Urbino | Vendeur d’eau de vie | Cardinal Omodei |
Barbara Foina | Mendiante | Elena Santacroce |
Pietro da Nocera di Puglia | Poissonnier et aubergiste | Cavaliere Loreto et la corporation des Aubergistes70 |
Agnese Fanti | - | Ambassadeur de Venise |
Lorenzo Nobilini | Tonnelier | Famille Cenci et Francesco Fabi |
Laura Bordetti | - | Princesse de Palestrina et Clarice |
Giovanni Diamante | - | Princesse Ludovisi |
Orazio Costantini | Boucher | Cardinal Sacchetti |
Giovanni Butta | Paysan | Père Antonio, capuchin |
Antonia Ravacca | - | Nicolà Degli Oddi |
41On retrouve ici les membres de l’élite municipale – De Fabi, Cenci, Santacroce –, aux côtés de princesses, de cardinaux et de prêtres. En ce qui concerne les candidats, il s’agit de non-Romains (sauf Lorenzo Nobilini, tonnelier), et, très souvent, d’immigrés résidants à Rome71 depuis au moins dix ans. Ainsi, même ceux qui sont arrivés récemment en ville, réussissent aussi à trouver un protecteur, dont la recommandation permet, ou favorise, leur admission à l’hospice. Par exemple, Santi Francescone de Castelgandolfo72, paysan âgé de 79 ans, immigré à Rome « pour rentrer dans cet hospice », est arrivé depuis seulement vingt jours. Pourtant, une personne importante le recommande : monseigneur Scotti, majordome du pape. Ainsi, Giovanni Cioppoli de Anticoli73, est admis à San Sisto le 9 juin 1654 ; il est arrivé à Rome deux mois plus tôt, pendant la semaine sainte (début avril 1654) et est recommandé par le noble Francesco Fabi (il habite à côté du palais du cardinal Ludovisi). Barbara Foina, vient de beaucoup plus loin : elle est originaire de Venise et réside à Rome depuis huit mois. À l’âge de 42 ans, elle a quitté sa ville « pour venir habiter avec mon frère […] et à Rome [j’ai] été mendiante ». C’est la noble dame Elena Santacroce qui est intervenue pour elle74. Si on observe aisément que la recommandation est aussi accessible aux nouveaux arrivants, il est plus complexe de décrire la formation du lien entre protecteur et protégé – ce qui fera l’objet des prochains chapitres. Pour l’instant, on se contente de voir que, parmi les personnes recommandées, certains habitent chez leur protecteur ; tel est le cas du cocher Cesare Bonfiglioli, originaire des Marches, qui habite dans le palais d’Olimpia Aldobrandini75, ou encore du boucher Orazio Costantini de Accumoli76, qui habite chez son protecteur, le cardinal Sacchetti77. En revanche, une femme, Agnese Fanti, est recommandée par l’ambassadeur de Venise parce qu’elle est originaire de cette ville.
42Angela Groppi, dans son étude sur les institutions caritatives où les femmes de Rome étaient enfermées pour préserver leur vertu (conservatori della virtù), montre le rôle essentiel joué par les recommandations et les faveurs dans le processus d’admission des candidates78. En raison du déséquilibre croissant entre places disponibles et nombre de candidates, le nom du protecteur devint de plus en plus important, jusqu’à devenir le seul critère de sélection. Mais comme Groppi le souligne, et comme on l’a vu dans les pages précédentes, « plutôt que d’une dégénérescence, il s’agit d’une dynamique propre au fonctionnement même des instituts »79. L’historienne met en évidence l’importance des bienfaiteurs : nobles, religieux, institutions ; grâce aux aumônes, ceux-ci soutiennent l’institut et consolident leurs politiques de prestige ainsi que leurs clientèles. Des circuits d’accès privilégiés se constituent, spécifiques à chaque institut, et incontournables puisque les bienfaiteurs détiennent un large pouvoir dans le processus de sélection des candidates80.
43Ainsi, une lettre écrite par Livia Vipereschi81 en 1674, fait état de l’intervention de la noble dame en faveur de Francesca Borgognona, « pauvre fille à marier, orpheline ». La dame s’adresse au cardinal Marcello Santacroce afin que la fille reçoive 12 giuli par mois pour être admise dans un conservatorio (comme on le sait, pour rentrer dans les institutions caritatives, une « dot » destinée au maintien de la fille était nécessaire)82. Et sœur Maria Maddalena, du monastère de la Santissima Annunziata, écrit à un protecteur anonyme pour lui demander de recommander une fille de sa connaissance, afin que celle-ci puisse rentrer dans un monastère le plus rapidement possible83. Il s’agit de tracer une voie préférentielle à ces filles, comme le déclare sœur Anna Maria Gagliani dans une lettre où elle recommande un jeune homme ; elle demande au destinataire de réduire les démarches à suivre pour son admission dans un monastère84.
44L’institution caritative semble ainsi faire partie des ressources locales que les gentilshommes distribuent. La distribution se fait non seulement à travers la recommandation, mais aussi grâce à la pratique de la charité qui joue un rôle clé pour l’exercice de l’autorité et de l’affirmation dans le contexte local. Elle se pratique sous la forme d’aumônes, de donations lors d’un testament ou d’une participation aux activités des structures caritatives telles les hôpitaux et les confréries. En pratiquant l’aumône, les nobles (ou les plus riches en général) ont la possibilité d’affirmer leur statut de personnes aisées et magnanimes. En effet, bien que la notion de pauvreté se modifie profondément avec le processus d’appauvrissement qui marque le début de l’âge moderne, l’exercice de la charité continue d’être l’un des fondements de l’autorité et du prestige pour les élites85. Aumônes et donations testamentaires aux pauvres sont très répandues parmi la noblesse romaine du XVIe et XVIIe siècle, et sont destinées à plusieurs types de nécessiteux. Par exemple, en 1605, le noble Marcello Melchiorri qui souhaite que ses fils continuent d’habiter dans la maison familiale, offre 25 écus pour chacun des groupes suivants : les orphelins de Rome, les « pazzarelli » (petits fous), les pauvres du Latran et les pauvres filles à marier86.
45La pratique de la charité, de la part des élites, se concrétise surtout par l’adhésion aux structures d’assistance telles que les confréries et les hôpitaux gérés par des compagnies de religieux où par des confréries laïques. Ce type de membership s’avère être un atout dans le processus d’affirmation d’un statut et de consolidation d’un pouvoir local, familial ou personnel. En premier lieu, les compagnies et les structures associatives religieuses mettent souvent en contact des couches différentes de la population d’une ville, ce qui favorise l’échange social et permet aux nobles de se distinguer en tant qu’élites locales. Le cas de l’hôpital et de la compagnie de Santa Maria della Consolazione, dont l’église se situe à proximité du Capitole, est particulièrement intéressant comme exemple de confrérie « mixte ». Depuis sa fondation qui date du début du XVIe siècle, la confrérie réunit concomitamment quelques-unes des familles les plus importantes de la ville avec de « simples » artisans et des commerçants87. Dès l’origine, la liste des membres présents aux assemblées comprend plusieurs artisans et commerçants : en 1562-157588, les membres de la compagnie qui ne sont pas gentilshommes exercent des métiers tels que charpentier, poissonnier, tailleur, boulanger, marchand, porteur, orfèvre, lainier, tanneur89, pellimantellario90, arte bianca91, cimatore92. Il s’agit de métiers variés, tant du point de vue du statut (de l’orfèvre au porteur) que des secteurs qu’ils représentent (services, manufacture, commerce, artisanat). À côté de cette portion d’artisans et de commerçants, les registres de la compagnie recensent plusieurs membres de l’élite capitoline. Entre 1444 (date du premier statut) et 1502, plus de 700 nouveaux membres s’inscrivent à la compagnie ; parmi eux, on trouve plusieurs représentants de maisonnées patriciennes, tels que les Frangipane, les Colonna, les Boccamazza, les Savelli, les Santacroce et les Mattei. Leur présence demeure conséquente tout au long des XVIe et XVIIe siècles et semble même s’intensifier au fil des ans93. Pour la noblesse municipale romaine, faire partie della Consolazione – un cercle social non exclusif – est un moyen d’exercer la charité mais aussi de garder contact avec les milieux du commerce et de l’artisanat94. L’attachement du patriciat à la compagnie est confirmé par les legs testamentaires : en effet, la compagnie reçoit parfois des donations conséquentes. Tel est le cas de Francesco Cenci, qui dans son testament daté du 7 octobre 1599, lègue à l’hôpital de la Consolazione la somme considérable de 3000 écus95. En 1633, un autre membre illustre, Orazio Manili96, dans son testament, donne plusieurs maisons au même hôpital97 ; quant au poissonnier Girolamo Colapeci, il est l’un des premiers à faire des donations testamentaires à la Consolazione : en 1502, il lui avait laissé la moitié d’une maison et la moitié d’une pierre où le poisson était vendu.
46Les legs testamentaires des bienfaiteurs sont parfois utilisés pour la création de fonds dotaux destinés aux jeunes filles pauvres. L’établissement de subsides dotaux est une forme de charité très répandue dans la Rome moderne, chez les particuliers comme au sein des associations98. Cette diffusion révèle que la constitution d’une dot adéquate est devenue un problème pour une grande partie de la société romaine, la conséquence pouvant être que la femme serait ensuite dans l’impossibilité de se marier ou d’entrer dans un couvent99. La création d’un fonds dotal est un « investissement social » important pour le bienfaiteur, car celui-ci décide qui, après sa mort, aura le droit de nommer les filles bénéficiaires – souvent un membre de la famille qui reçoit ainsi une « héritage immatériel »100 considérable, mais aussi une institution caritative. Par exemple, le noble Francesco Cenci, en plus d’offrir 3000 écus à la Consolazione, verse 400 écus annuels aux prêtres de San Silvestro in Montecavallo, afin que chaque année ils constituent les dots pour quatre filles choisies selon leurs critères101. De fait, les donations des individus sont confiées à des associations qui les gèrent et choisissent les filles à marier. L’attribution des dots s’effectue selon les volontés des bienfaiteurs qui déterminent les conditions d’éligibilité de la fille (âge, lieu de résidence, provenance des parents, etc.) ou qui nomment ceux qui ont le droit de choisir les bénéficiaires102.
47À travers l’analyse des critères d’éligibilité, on peut saisir comment l’action caritative s’insère dans le processus de construction de l’autorité locale. À cette fin, le cas d’Antonio Tesauro est particulièrement intéressant. La famille Tesauro habite sur l’Isola Tiberina – près de l’église de San Bartolomeo103, entre les rioni Ripa et Trastevere –, à proximité du fleuve, dans une zone très marquée par la présence d’activités commerciales et artisanales. Les Tesauro sont des marchands qui ont réussi à franchir la ligne et à accroître progressivement leur influence. Ils sont considérés, dans le quartier, comme des hommes importants, et, ainsi, ont pu être élus plusieurs fois au Capitole, dans les rioni Trastevere et Ripa104. Antonio Tesauro, candidat pour le poste de conseiller de Ripa pour la Consolazione en 1603 et 1615, ne sera jamais élu, à la différence d’autres membres de sa famille. Il est pourtant actif sur plusieurs fronts : s’il n’arrive pas à faire partie de l’élite de la Consolazione, il occupe une position privilégiée et indiscutable dans une autre confrérie, celle de Santa Maria dell’Orto, une association réunissant une dizaine de corporations du secteur alimentaire. Si, au Capitole et à la Consolazione, les marchands constituent, pour ainsi dire, une élite de second rang, à Santa Maria dell’Orto, ils représentent la couche la plus aisée. Il n’est donc pas surprenant qu’Antonio Tesauro, dans ses dernières volontés, pense à la Sainte Vierge de l’Orto plutôt qu’à celle de la Consolazione, et demande que les fonds de son héritage soient utilisés pour l’établissement de subsides dotaux qui seront attribués chaque année à des filles pauvres à marier105. Dans son testament (1619), la volonté du marchand apparaît claire et précise au sujet des deux jeunes filles qui, chaque année, pourront bénéficier des subsides : elles devront résider dans les rioni Trastevere ou Ripa, zone de résidence mais aussi d’influence politique de la famille Tesauro.
48Il est intéressant de noter que, parmi les neuf bienfaiteurs qui laissent des subsides dotaux à Santa Maria dell’Orto, seulement Antonio Tesauro et un autre exigent que les jeunes filles résident dans le quartier. En effet, Antonio Tesauro est le seul à appartenir à une famille qui obtient des offices municipaux locaux. Les filles dotées grâce aux legs d’Antonio Tesauro doivent être issues des quartiers où le marchand et sa famille ont marqué leur présence politique. Les candidates sont les filles d’individus qui appartiennent à la couche populaire et qui exercent des métiers liés aux activités économiques des rioni des Tesauro. Tel est le cas d’Angela, fille du tonnelier Maurizio, de Cecilia fille du marchand de fruits Andrea, de Lucrezia fille du jardinier Angelo Minori – habitant « en face de Nicolò Imperiacci », caporione et conseiller de Trastevere –, de Violante fille du boucher Innocenzo, des sœurs Lucia et Maddalena filles du tonnelier Pasquino, de Caterina, fille orpheline de Manfredi – habitant « ai Mattei » –, et ainsi de suite. L’exercice de la charité contribue ainsi à renforcer la prééminence sociale dans le quartier, et offre aux membres de l’élite capitoline des moyens de se présenter comme des distributeurs de ressources. Un rôle qui, comme on le verra à présent de plus près, implique que l’officier capitolin soit un médiateur local. Pour ce faire, on ne quittera pas les hôpitaux et les monastères. On suivra encore une fois le gentilhomme Francesco Del Bene, dans quelques-uns des procès où il est impliqué en tant qu’accusé principal.
Le caporione, un médiateur local
49Le jour de Noël de l’an 1563, Domenico Massimi, « sur requête et prière » de Francesco Del Bene, écrit au gouverneur de Rome une « fede di non offendere », selon le modèle décrit dans les pages précédentes. Il donne sa parole pour que le gentilhomme n’offense plus le noble Stefano Velli, Sofonisba, la fille du boucher Tomasino, ainsi qu’un couple, Francesco maçon et sa femme Margherita. Le caporione a donc nui à plusieurs personnes et a recours à la protection d’un de ses pairs pour tenter d’apaiser la situation.
50L’année 1563 a été particulièrement difficile pour Francesco Del Bene : caporione de Trastevere, rione où il développe l’intégralité de sa carrière politique106, il est accusé de trois délits différents, tous liés à l’exercice et à l’affirmation de son pouvoir local. Commençons par les accusations de Sofonisba107. Comme on l’a vu, la jeune femme accuse Francesco Del Bene de l’avoir violée ; il serait rentré dans sa maison en se faisant passer pour le noble Stefano Velli, avec qui la femme est en relation. Les témoignages de Sofonisba et de Francesco Del Bene démontrent que le pouvoir du caporione s’exerce en grande partie en tant qu’intermédiaire entre les habitants du quartier et les ressources locales. Se charger des affaires de quelqu’un est perçu comme un signe de pouvoir, la preuve d’avoir rejoint le niveau d’un patron. Sofonisba précise avoir ouvert la porte en pensant qu’il s’agissait de Stefano Velli ; une fois qu’elle comprend l’imposture, elle cherche en vain à faire sortir Francesco et son compagnon.
Je lui ai dit que ce n’était pas à eux que j’avais ouvert la porte, mais à Stefano de Velli, car je l’attendais. Il commença à me demander ce que je voulais faire avec Stefano de Velli ; je lui répondis que je désirais lui parler, afin de l’impliquer dans une de mes besognes. Et lui me dit : « Et pourquoi pas nous ? N’en serions-nous pas capables ? Que vouliez-vous de Stefano Velli ? » Et moi, je lui répondis que je souhaitais qu’il s’engageât dans une affaire me concernant ; il me demanda : « Quelle affaire ? Tu veux que je tue quelqu’un ? Si tu le désires, moi j’irais tout de suite le tuer ». Et, enfin, je lui répondis que je ne voulais pas qu’il [Stefano Velli] tue quelqu’un, mais que j’avais besoin des ses faveurs pour entrer dans un monastère.
51Ce que Sofonisba désire, c’est pouvoir entrer dans un monastère ; pour que cela s’accomplisse, elle sait qu’elle a besoin d’obtenir les « faveurs » de Stefano Velli, l’un de nobles les plus reconnus du rione Trastevere. Le témoignage de l’accusé confirme, à peu de chose près, les mots de la jeune fille :
Et moi, avec gentillesse, je lui répondis : « Ne me jetez pas dehors, mais laissez-moi bénéficier de la même grâce et courtoisie que vous auriez accordées à Stefano Velli ». Et j’ajoutai : « Bien sûr, Stefano est un gentilhomme, et il est mon ami ; donc si vous avez une relation avec lui, dites-le-moi, et je partirai. » Mais elle nia, et affirma qu’elle voulait une faveur de lui […] ; alors, je lui dis : « S’il s’agit de quelque chose dont vous avez besoin dans ce rione, dites-le moi, parce que je suis caporione ». Elle me répondit qu’elle voulait entrer dans un monastère ; je répliquai : « Dites-moi quel monastère, parce que, si je le peux, je vous aiderais ; si je n’y parviens pas, ce sont mes amis et mes patrons, qui vous aideront. »
52Francesco revendique donc son pouvoir de caporione, se montrant capable d’agir sur les ressources locales, au point qu’il semble vexé que Sofonisba ne l’ait pas choisi comme un possible intermédiaire (« Et pourquoi pas nous ? Ne serions-nous pas capables ? »). Et sentant qu’il ne parviendra pas à ses fins parce que la ressource est en dehors de son domaine politique et d’influence, Francesco affirme avoir des « amis et patrons », prêts à l’aider et assez puissants pour répondre à sa demande. Grâce à plusieurs recommandations, selon la dynamique décrite par Ascanio Caffarelli à propos du prisonnier, Sofonisba obtiendra l’admission au monastère, grâce à l’intervention du caporione.
53D’autres sources nous livrent des indices supplémentaires, ce qui permet d’observer avec précision la figure du caporione en tant que médiateur dans le contexte local. Il effectue des médiations soit entre les habitants et les ressources du quartier, soit entre les habitants et les autres autorités de la ville. En effet, le statut de Rome établit que le caporione joue un rôle de régulation générale dans les affaires du rione et qu’il est le responsable de l’ordre public dans le quartier108. Pour remplir sa tâche, il doit apaiser les conflits, empêcher le port d’armes non autorisées et, bien que dépourvu d’un tribunal propre, juger les cas mineurs qui se produisent dans son quartier, à l’aide des notaires (notai dei caporioni). Pour garder l’ordre public dans le quartier, le caporione est aussi responsable de la milice urbaine du quartier, formée par les capotori et encadrée par le contestabile, qui est désigné par le caporione109. En plus de cela, cet officier joue un rôle plus général de régulation, qui dépasse la seule répression de la violence. En effet, le caporione doit aider les couples désirant se marier, résoudre les litiges, exhorter les habitants du quartier à l’exercice d’une activité, favoriser ceux qui souhaitent entamer des travaux sur des bâtiments, et expulser les gens inactifs (« otiosis [...] nihil agentibus »)110.
54Le caporione est donc un homme reconnu dans le quartier, dont la fonction politique vise à contrôler la vie d’une partie de la ville (un rione) grâce à son influence personnelle. Il est donc prévu que les habitants s’adressent à lui pour résoudre certains problèmes : l’une de ses prérogatives principales est de s’en charger à travers une activité de médiation. Dans une lettre datant de 1588, Ascanio Del Bufalo, caporione de Colonna, s’adresse aux conservateurs de Rome, pour qu’ils dispensent Aurelio, un aubergiste du rione, de l’interdiction d’acheter certains types de viande. Comme le noble le précise, l’aubergiste est venu se recommander à lui parce qu’il est caporione.
Un ordre a été émis que les aubergistes ne puissent pas acheter ni viande de veau, ni poulet. Aurelio, aubergiste dans mon111 rione de Colonna avec cinq ou six personnes malades chez lui, est venu se recommander auprès de moi pour que, en tant que caporione, je fasse en sorte qu’avec son argent il puisse acheter les susdites viandes. Et moi, je le recommande vivement afin qu’il lui soit permis d’acheter, non pour son auberge, mais pour aider les susdites personnes malades112.
55« Mon » rione Colonna, laisse échapper Ascanio Del Bufalo : si l’on considère la liste des charges municipales qu’il a obtenues, on lui donne raison. C’est en effet dans le rione Colonna que la famille Del Bufalo obtient le plus grand nombre de charges, et sa présence politique se concentre presque exclusivement dans ce quartier (88 % des offices obtenus entre 1550 et 1617).
56Pendant 40 ans, entre 1561 et 1603, la carrière d’Ascanio Del Bufalo s’est entièrement déroulée dans « son » rione Colonna113. Et en tant que caporione, il a souvent dû régler les affaires des habitants du quartier : lorsque l’épicier114 Francesco se fait voler tous les produits de sa boutique sur la piazza Camigliani, une nuit d’octobre 1581, c’est à Ascanio qu’il s’adresse en premier, et c’est à lui qu’il donne la liste des biens volés115. Le lapsus d’Ascanio Del Bufalo, bien que « justifié » dans les faits, est aussi la marque d’une volonté de faire valoir son autorité au sein du quartier, ce qui relève d’une sorte de compétition politique déjà mentionnée plus haut, qui découle, entre autres, de la pluralité des pouvoirs politiques et de la fréquente superposition des juridictions.
La difficile affirmation de l’autorité personnelle
57En effet, le caporione est constamment confronté à d’autres autorités compétentes non seulement dans le quartier mais dans toute la ville, dont les juridictions peuvent se superposer à celle de son office. Si l’on revient à l’histoire de Francesco Del Bene, plusieurs témoignages, entendus lors des trois procès qui le concernent en 1563, mettent en évidence l’affirmation difficile de son autorité au sein du rione.
58En mai 1563, le gentilhomme est attaqué en justice par Francesco, maçon de Lugano, qui habite dans le rione Trastevere avec sa femme Margherita116. Le 30 mai, le caporione va rendre visite à la famille des maçons pour demander la clef d’une maison avoisinante dont ils sont propriétaires, dans le but d’y passer du temps avec une femme. Les propriétaires ne veulent pas la lui donner. Les témoins, un ouvrier et un domestique du maçon Francesco, ainsi que sa femme, affirment ne pas connaître le gentilhomme ; il a en effet été élu caporione de Trastevere pour la première fois en 1563. C’est probablement pour cette raison qu’il semble affirmer son autorité de façon abrupte, lorsque le maçon refuse de lui confier la clef. Dans un premier temps, Francesco Del Bene s’adresse à lui de façon aimable, utilisant le langage de la clientèle : « s’il vous plaît, faites-moi cette faveur, et moi je vous en ferai une à mon tour ». Mais il en vient rapidement aux insultes et à la violence physique, en tentant d’affirmer son autorité par des menaces. Lorsque l’ouvrier-maçon Giovanni Ghetti, obéissant à son maître Francesco, refuse de donner la clef, le caporione l’intimide : « […] je suis à même de vous faire brûler, et d’incendier votre maison ». Une même revendication de pouvoir ressort du témoignage d’une autre habitante du Trastevere : il s’agit d’une veuve, Ludovica de Civitavecchia117, qui déclare bien connaître le caporione avec lequel elle dit avoir, elle aussi, rencontré des problèmes. Elle déclare : « Cela fait plus de 12 ans que je connais Francesco Del Bene, parce que j’ai vécu environ 22 ans à Trastevere à San Pietro in Montorio. [Francesco a été parrain de l’une de ses filles quatre ans auparavant. Il fréquentait sa maison et voulait avoir une relation avec l’autre fille de Ludovica, Hortensia : il les menaçait dans ce but.] Il disait qu’il était caporione, qu’il aurait pu nous faire du mal, et que les policiers auraient enlevé le chapeau devant lui ».
59En realité, contrairement à ce que Francesco dit à Ludovica, les policiers du barigello pontifical118 ne sont, en aucun cas, soumis aux caporioni ; ils ont pleine autorité dans les quartiers, ce qui rend fréquents les conflits de juridiction. Ainsi, une nuit de mai 1563, le susdit Francesco Del Bene est arrêté par les policiers et accusé de porter des armes sans permission. Il se justifie en faisant référence à son rôle de caporione : « Oui, je portais une épée et un poignard parce que je suis caporione de Trastevere, et jamais les caporioni n’ont eu l’interdiction de porter des armes […] » Lorsque le barigello Gasparino tente de l’arrêter, le gentilhomme lui répond qu’il est certain de pouvoir porter des armes, et lui conseille de ne pas lui faire pareil affront. Les policiers n’enlèvent pas leurs chapeaux comme l’affirme le caporione, mais le poussent jusqu’à le faire tomber par terre : il blasphème alors au nom du Peuple Romain – ce dont il sera aussi accusé.
60La gestion de l’ordre dans le quartier est un sujet de dispute constant entre les caporioni et la police du pape. Chaque camp prétend disposer d’une autorité exclusive et supérieure à l’autre. Si Francesco Del Bene ne réussit pas à s’opposer à l’action de la police dans son quartier, l’autorité du caporione et la présence de son entourage armé semblent exercer un certain effet dans d’autres circonstances. Le témoignage d’un policier du barigello – Antonio Cupella – entendu lors d’un procès en 1605, décrit un cas typique de conflit de juridiction119. Le policier, avec tous ses collègues et son chef (le barigello), arrête huit personnes via dei Condotti, dans le rione Campo Marzio ; il s’agit de gens armés qui se battent. Les policiers les conduisent à Tor di Nona, l’une des prisons de Rome, mais sur le chemin, arrivés devant le palais du cardinal Borghese, ils croisent le caporione de Campo Marzio – le capitaine Francesco Tomassoni – avec ses frères et tout son entourage, qui revendique ses droits sur les prisonniers. Comme le policier le précise, ils sont armés jusqu’aux dents : épées, poignards, pistolets, arquebuses et hallebardes.
Le capitaine Francesco m’a demandé : « De quels prisonniers s’agit-il ? » Et j’ai répondu que c’étaient des gens qui s’étaient disputés à piazza della Trinità, et qu’il y avait eu des blessés et peut-être des morts. Et il a intimé l’ordre de m’arrêter, parce qu’il voulait les prisonniers : je devais les lui remettre, car je les avais pris dans son rione ; il voulait savoir de quoi il s’agissait parce que c’était à lui d’en rendre compte. [Le policier essaye alors de résister, en disant de le laisser passer, de le laisser conduire les gens en prison et d’aller ensuite parler au gouverneur pour résoudre la question.] Et le caporione m’a répondu : « Enfin, j’exige que vous les laissiez ! », et il a porté sa main au pistolet, et ses frères ont fait de même, en disant « Laissez les prisonniers ici. »
61La dispute se résout par une solution de compromis : les prisonniers sont temporairement installés dans un appartement au rez-de-chaussée du palais du cardinal Borghèse, sous la garde des policiers et « des gens du caporione ».
62Le haut degré de violence qui ressort de ces témoignages est le signe de la forte compétition qui règne dans le territoire : l’enjeu est l’affirmation de l’autorité personnelle et, par conséquence, la possibilité d’entamer ou de poursuivre des carrières politiques municipales, nécessaires pour renforcer ou atteindre une position sociale de prééminence dans le quartier. Mais pourquoi la compétition politique au sein du rione est-elle si marquée ?
Notes de bas de page
1 ASR, Tribunale criminale del Governatore, Processi, 1563, vol. 88.
2 Sahlins 1963. Sur le modèle du big man voir Van Bakel – Hagesteijn – Van de Velde 1986.
3 Barth 1963.
4 À ce sujet, il n’est pas inutile d’insister sur le fait que le recours à cette médiation constitue l’une des possibilités d’action des habitants de Rome. En effet, on ne peut pas donner à voir un cadre où les élites sont toutes-puissantes et indispensables aux couches populaires : il s’agit plutôt de considérer la médiation comme une modalité qui coexiste avec d’autres. Dans certaines circonstances, la médiation s’avère presque nécessaire, comme dans un cas de justice ; mais en ce qui concerne la recherche d’un travail, ce choix peut être précieux sans pour autant être indispensable. Il faut toujours avoir à l’esprit le fait que les individus sont insérés dans des réseaux sociaux larges et variés : ils ont ainsi la capacité de choisir ou de s’adresser, en cas de besoin et selon les besoins, à un autre individu (un noble peut facilement faire une recommandation mais peut difficilement ouvrir les portes d’une corporation ; un voisin peut être un témoin fiable mais n’aidera pas en cas de difficultés économiques, etc.)
5 En ce qui concerne la composition de ce groupe, Richard J. Ferraro recense 317 noms pendant la période 1560-1699, sans prendre toutefois en compte ceux qui ont des charges municipales mais qui, selon lui, n’appartiennent pas à la noblesse. Il les décrit comme « des individus qui ont entamé des parcours d’ascension sociale et qui, grâce à des fortunes personnelles et à des patrons bien placés, entrent dans un cercle normalement réservé aux couches supérieures » (Ferraro 1994). Cette perspective est envisageable si, comme chez Ferraro, l’objet de la recherche est la noblesse romaine dans son ensemble. Notre recherche, quant à elle, porte sur les élites municipales, non pas sur la noblesse seulement. Les personnes exclues par Ferraro sont donc inclues, le critère étant celui de l’accès au pouvoir municipal, non le statut et le titre.
6 Bourdieu 1979.
7 ASR, Tribunale Criminale del Governatore, Processi, 1596, vol. 299.
8 Ibidem, 1594, vol. 272.
9 Ago 1998.
10 Sur les clientèles à Rome voir Ago 1990 ; Fosi 1997 ; Reinhard 2001. Sur le langage utilisé dans les relations de patronage voir Bazzano 2001 ; Boutier 2009 ; McLean 1998.
11 Molho 1988 ; Nussdorfer 2000.
12 L’étude des Kent, qui porte sur Florence à la Renaissance, met en évidence l’existence d’un lien de patronage entre les élites et la population. Elle se limite toutefois à considérer cette relation sous le prisme de la fiscalité et des impôts, le patron étant à même de procurer des exemptions fiscales à ses clients (Kent – Kent 1982). Au cours de ce chapitre, on démontrera que la relation patron-client entre membres des élites et couches « inférieures » se développent dans bien d’autres champs de la vie quotidienne.
13 Archivio di Stato di Roma (dorénavant : ASR), Tribunale criminale del Governatore, Atti vari di cancelleria.
14 Sur la justice du pape voir Fosi 2007. Sur les suppliques voir Belloni – Nubola 2006 ; Nubola – Würgler 2004.
15 ASR, Tribunale criminale del Governatore, Atti vari di cancelleria, vol. 90, 1598. Dans notre analyse, la noblesse municipale mais aussi les cardinaux ont été inclus. Bien que des différences existent entre ces deux groupes, on a souvent observé qu’au moins un membre des familles de la noblesse romaine entame une carrière ecclésiastique, en milieu curial.
16 Ibidem, vol. 96, 1622.
17 Ibidem, vol. 90, 1598.
18 Petite ville proche d’Urbino, dans les Marches.
19 Ibidem, vol. 92, 1605.
20 Ibidem, vol. 90, 1599.
21 Ibidem, vol. 92, 1605.
22 Ibidem, vol. 96, 1624.
23 Idem, 1622.
24 Domenico s’était enfui de Rome neuf ans plus tôt, après avoir blessé quelqu’un avec une arquebuse. À Avignon, il avait été soldat du pape. Entre temps, sa mère cherchait à le faire rentrer, en lui procurant un garant pour obtenir la paix et la rémission des accusations. Une fois arrivé à Rome, en chemin pour rejoindre la compagnie de San Lorenzo in Lucina qui avait accepté de le protéger, il est arrêté et conduit en prison.
25 Dans les suppliques, l’usage est de parler de soi à la troisième personne.
26 L’expression utilisée dans le texte est « lettere di benservito ». La lettre de benservito était un document attestant des qualités d’un employé, délivré par l’employeur à la fin du service.
27 La famille Massimi acquiert son patrimoine féodal au cours de la seconde moitié du XVIe siècle. Il comprend des villages tels qu’Arsoli, Roccasecca, Pisterzo et Prossedi, dont la postulante est originaire.
28 ASR, Tribunale criminale del Governatore, Atti vari di cancelleria, vol. 90, 1597.
29 Ibidem, vol. 92, 1602.
30 Il s’agit d’un pizzicagnolo. Dans la boutique du pizzicagnolo, on trouvait des produits alimentaires assez variés, tels que le fromage, les œufs, de la charcuterie et du poisson séché, des olives et du beurre. À ne pas confondre avec le speziale, l’apothicaire.
31 Parfois le postulant est recommandé non par un noble, mais par son majordome, qui évidemment jouit du prestige et de l’influence de son seigneur. Ainsi, en 1605, Vittorio, garçon du maréchal-ferrant du pape, est recommandé par le maître d’étable pour répondre à une accusation d’agression. ASR, Tribunale criminale del Governatore, Atti vari di cancelleria, vol. 90, 1605.
32 ASR, Tribunale criminale del Governatore, Processi, 1629, vol. 238.
33 ASR, Tribunale criminale del Governatore, Atti vari di cancelleria, vol. 92, 1603.
34 Ibidem, vol. 96, 1624.
35 Les Altemps achètent le château de Montecompatri de la famille Colonna en 1574 ; en 1613 le fief est vendu au cardinal Scipione Borghese.
36 ASR, Tribunale criminale del Governatore, Atti vari di cancelleria, vol. 92, 1604.
37 ASR, Miscellanea famiglie, vol. 108, Mattei.
38 Ibidem, vol. 50, San Clemente.
39 Ibidem, vol. 108, Mattei.
40 Ibidem, vol. 50, Cybo.
41 ASR, Tribunale criminale del Governatore, Processi, 1566, vol. 111.
42 Annibal Caro est le secrétaire de Pier Luigi Farnese de 1543 à 1547, puis d’Alessandro Farnese de 1548 à 1563. En 1555, grâce à la médiation des cardinaux Ranuccio et Alessandro Farnese, il devient cavaliere de San Giovanni di Gerusalemme.
43 Via del Pellegrino, entre les rioni Regola et Parione.
44 Boissevain 1966.
45 ASR, Tribunale criminale del Governatore, Atti vari di cancelleria, vol. 90, 1598.
46 Ibidem, vol. 96, 1620. Plusieurs Cerreto existent en Italie ; il est donc impossible, sans autres éléments d’information, d’identifier précisément ce village.
47 Sur les usages liés au pardon voir Niccoli 2007.
48 « […] come conviene ad ogni christiano », ASR, Tribunale criminale del Governatore, Atti vari di cancelleria, vol. 96, 1618.
49 Idem.
50 Ces documents sont conservés dans les volumes qui constituent la Miscellanea famiglie, un fonds d’archive composé d’une documentation variée concernant de nombreuses familles romaines. Suivant l’importance de la famille et le nombre de sources qui s’y rapporte, certaines maisonnées sont « titulaires » d’un volume entier, alors que d’autres se partagent un même volume. Dans ces volumes, on trouve des documents très divers : des comptes, des actes judiciaires, des lettres de tout type, des testaments, des listes de créditeurs, des inventaires, etc. Et aussi des lettres de garantie.
51 ASR, Miscellanea famiglie, vol. 178, Velli.
52 ASR, Miscellanea famiglie, vol. 43, Cenci, 24 mars 1598.
53 Ibidem, vol. 66, Del Bufalo, 12 novembre 1581.
54 ASR, Miscellanea famiglie, vol. 107, Massimi.
55 Ibidem, 23 janvier 1597.
56 Ibidem, 15 mai 1599.
57 Ibidem, 25 mai 1605.
58 Ibidem, 23 octobre 1598.
59 Il serait intéressant de savoir quel est le degré d’intervention du noble pour les actes de punition de ce type. La source analysée ici ne permet malheureusement pas de répondre à cette question.
60 Kent – Kent 1982.
61 ASR, Tribunale criminale del Governatore, Atti vari di cancelleria, vol. 90, 1598.
62 Le sostituto fiscale du pape s’occupe, avec le fiscal général, des affaires fiscales traitées dans les tribunaux romains, et des procès criminels instruits dans la congrégation des évêques et du clergé régulier.
63 ASR, Tribunale criminale del Governatore, Atti vari di cancelleria, vol. 96, 1624. En utilisant l’expression « buona relazione », Francesco Saoli pense probablement aux relations nouées avec des protecteurs.
64 Le Datario est le président de la Dataria, bureau de la Curie pontificale dont la compétence porte sur les bénéfices, les dispenses et les octrois.
65 Sinalunga : commune actuelle de la province de Sienne, en Toscane.
66 Verceil : ville située dans le Piémont.
67 ASR, Tribunale criminale del Governatore, Processi, 1582, vol. 177.
68 L’hospice de San Sisto, destiné à héberger les pauvres de la ville, est fondé en 1596 par Sixte V, par la promulgation de la bulle Quamvis infirma. Au début du XVIIIe siècle, Clément XI (pape en 1700-1721) réunit les pauvres du Latran et de San Sisto dans le nouveau complexe de San Michele (fondé autour de 1686 pour les enfants pauvres). C’est pour cette raison que les registres des pauvres de San Sisto font partie du fonds Ospizio Apostolico di San Michele, conservé à l’Archivio di Stato di Roma.
69 L’augmentation exceptionnelle de candidats pendant ces dix mois constitue une autre hypothèse possible, ce qui s’expliquerait par la vague d’appauvrissement constatée au cours de cette période. San Sisto n’est pas un hôpital de malades, mais plutôt un asile, un hospice pour les pauvres : ce n’est pas en raison de la diffusion d’une maladie que le nombre de candidats augmenterait directement (mais de façon indirecte, en raison de la mort des proches, par exemple).
70 Les corps de métier peuvent, eux aussi, agir en tant que protecteurs. Ils peuvent tout d’abord recommander, comme on a déjà pu l’observer. De plus, ils disposent du privilège de libérer un prisonnier chaque année, évènement qui se déroule souvent le jour où la compagnie fête son saint patron.
71 Ou déclarent l’être.
72 Castelgandolfo : commune actuelle de la province de Rome, dans la région du Latium. Elle est la résidence d’été des papes depuis Urbain VIII (1623 – 1644).
73 Anticoli Corrado se trouve dans le Latium, dans la province de Rome.
74 Les Santacroce sont une ancienne famille de la noblesse municipale qui obtient de nombreuses charges, notamment dans le rione Regola. On reviendra sur le cas de cette famille au cours du chapitre IV.
75 ASR, Ospizio Apostolico di San Michele, partie II, Esami dei poveri, vol. 200, 8 septembre 1653.
76 Accumoli : commune actuelle de la province de Rieti, dans la région du Latium.
77 ASR, Ospizio Apostolico di San Michele, partie II, Esami dei poveri, vol. 200, 11 juin 1654.
78 Groppi 1994. Pour une application du concept de patronage à l’histoire des femmes, voir aussi Ferrante – Palazzi – Pomata 1988.
79 Groppi 1994, p. 78, traduction personnelle.
80 Sur ce point, Groppi conclut que « Protection et argent sont, tout compte fait, les éléments qui règlent les accès à un canal caritatif, qui devient très vite un moyen de secours aux couches privilégiées de la population de la ville, insérées dans des réseaux de clientèle plus ou moins structurés », Ibidem, p. 87, ma traduction.
81 Entre 1592 et 1609, les Vipereschi sont élus 15 fois caporioni et deux fois conservatori, surtout dans le rione Campitelli.
82 ASR, Santacroce, vol. 1163, 6 juillet 1674.
83 ASR, Massimi, vol. 60, 8 mars 1647.
84 Ibidem, 30 mars 1655.
85 La philanthropie médiévale s’adresse aux pauvres qui sont, de quelque façon que ce soit, insérés dans la structure sociale de la ville ; bien qu’indigents, ils y trouvent leur place. Bronisław Geremek rappelle à ce sujet que, selon Antonino de Florence (1389-1459), les corps de métiers avaient le devoir de porter secours à leurs membres nécessiteux. Comme les corporations, les autres corps de la ville doivent également aider les membres en difficultés, en finançant notamment les structures caritatives. Au début de l’époque moderne, ce modèle se révèle inadéquat : les paysans affamés qui arrivent en ville, en quête d’aide et d’assistance, ne sont pas reconnus comme membres de la communauté urbaine ; celle-ci manqe d’ailleurs de moyens pour faire face à une telle vague d’appauvrissement. À la notion valorisée de pauper christi, se substitue alors la représentation du pauvre considéré comme un élément potentiellement dangereux et nuisible pour la société : face au nombre croissant d’indigents et de mendiants et devant la nécessité de répartir les ressources d’assistance à un très grand nombre de personnes, se dessine l’opposition entre pauvres méritants et non-méritants. Si les premiers bénéficient de l’assistance des confréries, les seconds sont l’objet de la politique répressive des autorités municipales qui les chassent des villes, les mettent en prison et les enferment dans les hôpitaux et les hospices de pauvres construits à partir de la seconde moitié du XVIe siècle. Geremek 1973. Sur les corps de métier et l’assistance voir Grendi 1966. Sur la fermeture des communautés urbaines italiennes vis-à-vis des éléments externes et potentiellement dangereux voir Pullan 1978.
86 ASR, Collegio dei Notai Capitolini, vol. 869, 13 mai 1605.
87 En 1505, de l’union de trois confréries et hôpitaux – de Santa Maria della Consolazione, de Santa Maria delle Grazie, et de Santa Maria in Portico - naissait la compagnie de Santa Maria de vita aeterna. Le nom officiel fut bientôt abandonné en faveur de l’appellation « Santa Maria della Consolazione », ou simplement « della Consolazione » : c’est donc sous ce nom qu’on la désignera dans les pages suivantes. Il s’agit d’une association de laïcs qui s’occupe de l’assistance et du secours des pauvres : sa fonction principale est la gestion de l’hôpital qui porte le même nom. Elle n’est pas affiliée à un ordre religieux et demeure assez autonome vis-à-vis du clergé : en raison de ces éléments et de son organisation faiblement structurée, on retient plus d’elle sa valeur associative que son caractère dévotionnel (Esposito 1980).
88 La liste des membres de la compagnie de la Consolazione relative à la période 1559-1642 a été dressée à partir de la consultation des volumes suivants : ASR, Ospedale de la Consolazione - Congregazioni e decreti, vol. 1 (1559-1590), vol. 3 (1581-1593), vol. 4 (1593-1618), vol. 5 (1619-1635), vol. 6 (1635-1640), vol. 7 (1642).
89 Vaccinaro, tanneur de peaux de vache.
90 On peut supposer que l’origine de ce mot se trouve dans la fabrication de capes (mantelle) en peaux (pelli).
91 Exercer l’arte bianca consiste à travailler dans les secteurs de la boulangerie et de la pâtisserie.
92 Le cimatore est celui qui coupe les poils des draps en laine.
93 ASR, Ospedale della Consolazione, Congregazioni e decreti, 1619-35, vol. 5.
94 L’adhésion des élites aux confréries peut aussi s’expliquer par le fait qu’elle leur permet d’obtenir d’autres charges locales. Nous reviendrons sur cette seconde raison dans le chapitre II.
95 ASR, Miscellanea famiglie, vol. 43, Cenci.
96 Voir chapitre IV.
97 ASR, SS. Annunziata, vol. 57. Les livres de comptes et les autres documents de la famille Manili sont conservés dans le fonds de la compagnie de la Santissima Annunziata, car Orazio l’a désigné « héritière universelle ».
98 À Rome, au cours de la seconde moitié du XVIIe siècle, on peut compter 1700 donateurs, surtout des corps et des communautés mais aussi des bienfaiteurs individuels. À partir de la fin du XIVe siècle, ces derniers versent de l’argent pour les filles à marier. Ces donations perdent progressivement leur caractère occasionnel pour devenir une forme de « charité perpétuelle », grâce à l’investissement des sommes initiales afin de constituer des « fonds » dotaux. Dans la Rome moderne, il existe une confrérie spécialisée dans ce type d’assistance : la Santissima Annunziata (D’Amelia 1988).
99 Vivre sans tutelle masculine ou tutelle institutionnelle n’est pas chose évidente, surtout pour les couches populaires. Le risque est celui de compromettre sa réputation et sa moralité, en se mettant dans une situation de « danger » (d’où le nom des « conservatori » de la vertu). En revanche, une étude menée sur le patriciat florentin au XVIe siècle indique que, dans les milieux plus aisés, les femmes peuvent rester célibataires, sans pour autant devoir entrer dans un couvent. En effet, à la différence des filles issues des catégories plus populaires, elles peuvent compter sur une tutelle familiale prolongée dans le temps (Corsini 1976). La somme qui constitue la dot est proportionnelle au train de vie de la famille et à son statut ; toutefois, à partir du XVe siècle, elle est surtout perçue comme une charge difficilement soutenable. Les autorités communales essayent de remédier à cette situation, en créant les monti di doti, une forme d’investissement destiné aux pères des filles à marier. Ceux-ci peuvent y déposer de l’argent pour constituer leur dot. À Florence, le monte di doti est établi en 1425, et au cours du siècle suivant, plusieurs monti sont créés aux Abruzzes, dans le Molise et la Basilicate. Voir Carboni 1999 ; Chabot – Fornasari 1997.
100 On fait référence à l’ouvrage bien connu de Levi 1989.
101 ASR, Miscellanea famiglie, vol. 43, Cenci.
102 Les qualités invariablement requises sont l’honnêteté et la bonne réputation de la jeune fille. C’est pour cette raison que, lorsqu’une confrérie reçoit des legs, elle désigne certains de ces membres pour visiter les candidates et vérifier qu’elles répondent à ces critères. Par exemple, la confrérie de la Santissima Annunziata vérifie les fréquentations des jeunes filles et les formes de cohabitations dans lesquelles elles sont insérées. Ne sont considérés comme « honnêtes » que les cohabitations avec des parents (jusqu’au troisième degré), avec la marraine de baptême ou, en cas de filles orphelines, avec le tuteur (D’Amelia 1988).
103 Archivio storico del vicariato di Roma (dorénavant : ASVR), Parrocchia di San Bartolomeo, Stati d’anime, 1596-1628 ; Archivio di Santa Maria dell’Orto (dorénavant : ASMO), Mercanti e sensali di Ripa, vol. 682 ; ASMO, Catalogo dei fratelli, 1540-1575, vol. 54.
104 Les charges obtenues par les Tesauro dans le Trastevere sont les suivantes : Francesco, caporione en 1598, conseiller en 1601 ; Ottaviano, membre du conseil en 1584 ; Giacomo, membre du conseil en 1569 ; Giovanni Battista, caporione en 1596. À Ripa, Giovanni Battista est membre du conseil en 1569.
105 La compagnie de Santa Maria dell’Orto, destinataire de plusieurs donations de ce type (neuf au total), administre ainsi un patrimoine de dots à assigner, ce qui contribue à maintenir le lien entre la confrérie et ses assistés. ASMO, Statuto organico dell’Opera pia doti amministrata dall’arciconfraternita di Santa Maria dell’Orto in Roma, 1887.
106 Les offices municipaux obtenus par Francesco Del Bene à Trastevere sont les suivants : caporione en 1563, 1569, 1575, 1579 ; conseiller en 1568, 1572, 1574 ; en 1573 il est candidat à l’office de maître justicier, et en 1569, 1581 et 1584 il participe au conseil municipal.
107 ASR, Tribunale criminale del Governatore, Processi, 1563, vol. 88.
108 Statuta Almae Urbis Romae, 1580, livre I, chapitre XVIII – De Officio Capitum Regionum.
109 Statuta Almae Urbis Romae, 1580, livre III, chapitre VIII – De Aliis Constitution Officium Capitum Regionum Concernentis. Il s’agit d’un corps où les membres sont recrutés parmi les artisans, appelé compagnie des contestabili et capotori, composé de 300 membres répartis en bandes de 20 ou 30 artisans pour chaque quartier. Les rioni Monti, Colonna, Ponte et Trastevere doivent fournir 30 membres, tandis que les autres participent avec un contingent de 20. La compagnie a ses propres statuts et exerce quelques-unes des activités typiques des associations, telles que la distribution de dots aux jeunes filles pauvres - Archivio Storico Capitolino (dorénavant ASC), Camera capitolina, credenzone (dorénavant cred.) XI, t. 19 et 20 ; cred. XXII, t. 109, 112 et 115 ; cred. XXV, t. 4. Chaque bande a pour chef un contestabile qui doit être nommé par le caporione parmi les habitants de son quartier. Si un artisan est choisi, il faut qu’il soit maître (capita apothecarum) : les garçons et les ouvriers (famuli aut operari) sont exclus de la sélection. À leur tour, les contestabili élisent les capotori qui sont les membres de la milice. Toutefois, selon Nussdorfer, le processus de sélection décrit ci-dessus est plus théorique que réel. En effet, les membres de la compagnie prennent graduellement le contrôle de la formation de la milice : ils conservent leur fonction dans la compagnie bien au-delà de la durée de la charge, en la gardant parfois pendant toute leur vie.
110 Les caporioni ont aussi des fonctions liées à la gestion du gouvernement capitolin. Ils prennent part, tout d’abord, aux conseils municipaux auxquels ils sont obligés d’assister. En outre, ils jouent un rôle important – on l’a vu – dans l’élection des officiers, puisqu’ils rédigent les listes des noms de nobles à partir desquelles le choix est fait. Le caporione convoque également la réunion au cours de laquelle a lieu l’élection de l’imbussolatore (électeur) et élit trois conseillers pour chaque quartier et désigne les gentilshommes qui ont le droit d’assister au conseil public. Enfin, tous les trois mois, les caporioni sont chargés d’élire leur prieur qui occupe la fonction de guide. Dans la pratique, il s’occupe des paiements des caporioni et des contestabili (les chefs de la milice urbaine des quartiers). Au cours du XVIIe siècle, l’élection du prieur passe entre les mains du neveu du pape, le cardinal Francesco Barberini. Statuta Almae Urbis Romae, 1580, livre III, chapitre VIII – De Aliis Constitution Officium Capitum Regionum Concernentis.
111 Le mot « mon » est barré dans la source.
112 ASR, Miscellanea famiglie, vol. 66, Del Bufalo.
113 À Colonna, il est élu trois fois caporione (1562, 1569, 1585), une fois imbussolatore (1577), 25 fois conseiller (entre 1563 et 1603) et une fois maréchal (1561) ; de plus, il obtient trois fois l’office de conservateur (1575, 1583, 1594).
114 Pizzicagnolo.
115 ASR, Miscellanea famiglie, vol. 66, Del Bufalo.
116 ASR, Tribunale criminale del Governatore, Processi, 1563, vol. 88.
117 Ville actuelle de la province de Rome, dans le Latium.
118 Le barigello est le capitaine de la police pontificale.
119 ASR, Tribunale criminale del Governatore, Processi, 1605, vol. 46.
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