Annexe II. Les titres du Digeste D., 4, 9 (navtae cavpones stabvlarii vt recepta restitvant) et D., 47, 5 (fvrti adversvs navtas cavpones stabvlarios)
p. 421-427
Texte intégral
1Le texte est celui de Mommsen – Krüger 196317 ; la traduction des termes de navigation s’appuie sur Rougé 1966. L’ambiguïté du terme nauta dans ces titres, où il désigne tantôt l’armateur, tantôt le matelot, est conservée à dessein par la traduction de « marin ». Exercitor, quand il est employé en référence au seul transport maritime, est rendu par la traduction d’« armateur » ; quand il est étendu à caupona et stabulum ou employé dans son sens générique, par celle d’« exploitant ».
Digeste, 4, 9 Nautae caupones stabularii ut recepta restituant
1. Vlpianus libro quarto decimo ad edictum | 1. Ulpien, livre 14 sur l’édit |
Ait praetor : « nautae caupones stabularii quod cuiusque saluum fore receperint nisi restituent, in eos iudicium dabo. » | Le préteur dit : « Les marins, les aubergistes et les exploitants d’écuries, s’ils ne restituent pas ce dont ils se sont engagés auprès de son propriétaire à assurer la conservation, je donnerai contre eux un recours. » 1. L’utilité de cet édit est très grande, parce qu’il est généralement nécessaire de s’en remettre à leur bonne foi et de confier des biens à leur garde. Que personne ne pense que cela a été institué pour les accabler : il est en effet laissé à leur discrétion de refuser de recevoir une personne et si l’on n’avait pas pris cette mesure, on leur aurait donné matière à s’associer avec des voleurs au détriment de ceux qu’ils reçoivent, dans la mesure où même à présent ils ne s’abstiennent pas de ce genre de tromperies. 2. Il nous faut voir qui sont donc ceux qui sont tenus responsables. Le préteur dit : « les marins ». Nous devons entendre par marin celui qui arme le navire ; même si l’on appelle marins tous ceux qui sont sur le navire en vue de la navigation. Le préteur entend seulement l’armateur. |
2. Gaius libro quinto ad edictum prouinciale | 2. Gaius, livre 5 sur l’édit provincial |
Sicut et caupo uiatorum. | Tout comme l’aubergiste de celui des voyageurs. |
3. Vlpianus libro quarto decimo ad edictum | 3. Ulpien, libre 14 sur l’édit |
Et ita de facto uectorum etiam Pomponius libro trigensimo quarto scribit. Idem ait, etiamsi nondum sint res in nauem receptae, sed in litore perierint, quas semel recepit, periculum ad eum pertinere. 1. Ait praetor : « nisi restituent, in eos iudicium dabo ». Ex hoc edicto in factum actio proficiscitur. Sed an sit necessaria, uidendum, quia agi ciuili actione ex hac causa poterit : si quidem merces interuenerit, ex locato uel conducto ; sed si tota nauis locata sit, qui conduxit ex conducto etiam de rebus quae desunt agere potest ; si uero res perferendas nauta conduxit, ex locato conuenietur ; sed si gratis res susceptae sint, ait | C’est ainsi également que Pomponius évoque au livre 34 le fait des passagers. Il dit la même chose, même dans le cas où les biens n’auraient pas encore été reçus sur le navire mais auraient été détruits sur le rivage, à savoir que du moment que quelqu’un garantit des biens, le risque lui incombe. 1. Le préteur dit : « s’ils ne restituent pas, je donnerai contre eux un recours ». De cet édit découle une action in factum. Mais il faut voir si cette action est nécessaire, parce qu’on pourra avoir recours à une action civile pour cette cause : si un paiement est survenu, en vertu de l’action de locatio ou de conductio ; si en revanche c’est le navire tout entier qui a été mis en location, le locataire peut agir ex conducto |
4. Paulus libro tertio decimo ad edictum | 4. Paul, livre 13 sur l’édit |
Sed et ipsi nautae furti actio competit, cuius sit periculo, nisi si ipse subripiat et postea ab eo subripiatur, aut alio subripiente ipse nauta soluendo non sit. 1. Si nauta nautae, stabularius stabularii, caupo cauponis receperit, aeque tenebitur. | L’action de vol appartient plutôt au marin même qui s’est chargé du risque, à moins que lui-même ne vole et ne soit ensuite volé, ou que, si c’est un tiers qui a commis le vol, ce même marin ne soit pas solvable. 1. Si le marin s’est engagé vis-à-vis du marin, l’exploitant d’écurie vis-à-vis de l’exploitant d’écurie ou l’aubergiste vis-à-vis de l’aubergiste, il sera tenu responsable de la même manière. 2. Vivianus a aussi dit que l’édit s’étend à ces biens qui sont embarqués après les marchandises chargées dans le navire pour lesquelles on a payé le passage, même si l’on ne doit pas s’acquitter d’un paiement pour leur transport, comme les vêtements, les provisions quotidiennes, parce qu’ils viennent s’ajouter au contrat de louage qui couvre le reste des biens. |
5. Gaius libro quinto ad edictum prouinciale | 5. Gaius, livre 5 sur l’édit provincial |
Nauta et caupo et stabularius mercedem accipiunt non pro custodia, sed nauta ut traiciat uectores, caupo ut uiatores manere in caupona patiatur, stabularius ut permittat iumenta apud eum stabulari ; et tamen custodiae nomine tenentur. Nam et fullo et sarcinator non pro custodia, sed pro arte mercedem accipiunt, et tamen custodiae nomine ex locato tenentur. | Le marin, l’aubergiste et le palefrenier reçoivent une rétribution non pour assurer une garde, mais le marin, pour transporter des passagers, l’aubergiste, du fait de laisser les voyageurs séjourner dans son auberge, et le palefrenier, du fait de fournir une écurie aux montures ; et pourtant, ils sont tenus responsables en vertu d’une obligation de garde. De même le foulon, le tailleur ne reçoivent pas de rétribution pour assurer une garde mais pour leur industrie, et pourtant ils sont tenus responsables ex locato en vertu d’une obligation de garde. 1. Tout ce que nous avons dit du vol, doit être entendu à l’identique au sujet du dommage : il ne faut pas douter de ce que celui qui s’est engagé à assurer la conservation d’un bien est considéré s’engager non seulement vis-à-vis du vol mais aussi du dommage. |
6. Paulus libro uicensimo secundo ad edictum | 6. Paul, livre 22 sur l’édit |
Licet gratis nauigaueris uel in caupona gratis deuerteris, non tamen in factum actiones tibi denegabuntur, si damnum iniuria passus es. 1. Si seruo meo in naue uel in caupona utaris et damnum mihi det uel furtum faciat, quamquam et furti actio et damni iniuria mecum sit, haec tamen actio, quia in factum est, etiam serui mei nomine aduersus te competit. | Que tu navigues gratuitement ou que tu séjournes gratuitement à l’auberge, ce n’est pas pour autant que les actions in factum te seront refusées si l’on a causé un dommage à tes biens. 1. Si tu te sers de mon esclave dans le navire ou l’auberge et qu’il me cause un dommage ou commette un vol, bien que ce soit moi qui sois visé par l’action de vol et de dommage, cependant cette action, parce qu’elle est in factum, vaut également contre toi au nom de mon esclave. On se prononcera de la même manière, si c’est un esclave en commun : cependant toi, pour ce que tu m’auras porté garant en son nom, tu engageras ma responsabilité soit en vertu de la division de la communauté, soit en vertu d’une action pro socio ou, si tu as pris en location une partie ou la totalité de cet esclave, ex conducto. 2. Mais si un dommage lui est causé par un tiers qui se trouve dans le même navire ou dans la même auberge, dont le préteur est habituellement chargé d’évaluer le fait, Pomponius ne pense pas que cette action soit utile au nom de l’esclave. 3. L’aubergiste est tenu par l’action in factum du fait de ceux qui sont dans l’auberge pour y habiter : cela ne concerne pas celui qui est reçu en vertu d’un accueil soudain, à l’instar du voyageur. |
7. Vlpianus libro octauo decimo ad edictum | 7. Ulpien, livre 18 sur l’édit |
Debet exercitor omnium nautarum suorum, siue liberi sint siue serui, factum praestare ; nec immerito factum eorum praestat, cum ipse eos suo periculo adhibuerit. Sed non alias praestat, quam si in ipsa naue damnum datum sit ; ceterum si extra nauem licet a nautis, non praestabit. Item si praedixerit, ut unusquisque uectorum res suas seruet neque damnum se praestaturum, et consenserint uectores praedictioni, non conuenitur. 1. Haec actio in factum in duplum est. 2. Sed si quid nautae inter se damni dederint, hoc ad exercitorem non pertinet. Sed si quis sit nauta et mercator, debebit illi dari ; quod si quis quos uolgo ναυτεπιβάτας dicunt, et huic tenebitur, sed huius factum praestat, cum sit et nauta. 3. Si seruus nautae damnum dederit, licet seruus nauta non sit, aequissimum erit in exercitorem actionem utilem dare. 4. Hac autem actione suo nomine exercitor tenetur, culpae scilicet suae qui tales adhibuit : et ideo et si decesserint, non releuabitur. Seruorum autem suorum nomine noxali dumtaxat tenetur : nam cum alienos adhibet, explorare eum oportet, cuius fidei, cuius innocentiae sint ; in suis uenia dignus est, si qualesquales ad instruendam nauem adhibuerit. 5. Si plures nauem exerceant, unusquisque pro parte, qua nauem exercet, conuenitur. 6. Haec iudicia quamuis honoraria sunt, tamen perpetua sunt : in heredem autem non dabuntur. Proinde et si seruus nauem exercuit et mortuus est, de peculio non dabitur actio in dominum nec intra annum. Sed cum uoluntate patris uel domini seruus uel filius exercent nauem uel cauponam uel stabulum, puto etiam hanc actionem in solidum eos pati debere, quasi omnia, quae ibi contingunt, in solidum receperint. | L’armateur doit répondre du fait de ses matelots, qu’ils soient libres ou esclaves ; et ce n’est pas injuste qu’il réponde de leur fait, puisque c’est lui-même qui a pris sur lui le risque de les employer. Mais il n’en répond que lorsque le dommage est survenu sur le navire même ; autrement, si le dommage survient en dehors du navire du fait des matelots, il ne sera pas responsable. De même, s’il a déclaré au préalable que chaque passager doit surveiller ses biens et que lui-même ne répondra pas en cas de dommage et si les passagers ont consenti à cette déclaration préalable, il n’est pas poursuivi. 1. Cette action in factum est au double. 2. Mais si les marins se sont causé quelque dommage entre eux, cela n’incombera pas à l’armateur. Mais si quelqu’un est marin et marchand, cette action devra être donnée contre l’armateur ; et s’il s’agit d’un de ceux que l’on appelle communément les ναυτεπιβάτας (« rameurs occasionnels »), il sera également tenu responsable envers ce dernier mais répondra du fait de ce dernier, dans la mesure où il est également marin. |
Digeste, 47, 5 Furti aduersus nautas caupones stabularios
1. Vlpianus libro trigensimo octauo ad edictum | 1. Ulpien, livre 38 sur l’édit |
In eos, qui naues cauponas stabula exercebunt, si quid a quoquo eorum quosue ibi habebunt furtum factum esse dicetur, iudicium datur, siue furtum ope consilio exercitoris factum sit, siue eorum cuius, qui in ea naui nauigandi causa esset. 1. | Contre ceux qui exploitent des navires, des auberges ou des écuries, si l’on dit qu’un vol a été commis par l’un d’entre eux ou de ceux qu’ils ont dans leur exploitation, on donnera un recours, que le vol ait été commis soit avec l’assistance ou le conseil de l’exploitant soit de celui qui se trouve sur le navire en vue de la navigation. 1. Par en vue de la navigation, nous devons comprendre ceux qui sont employés à ce que le navire navigue, c’est-à-dire les marins. 2. Et cette action est au double. 3. Donc quand le bien a été détruit dans l’auberge ou sur le navire, en vertu de l’édit du préteur, l’armateur du navire ou l’aubergiste voient leur responsabilité engagée, de sorte qu’il est du ressort de celui à qui le bien a été subtilisé de voir s’il préfère agir contre l’exploitant en vertu du droit honoraire ou contre le voleur en vertu du droit civil. 4. Si l’aubergiste ou le marin se sont engagés à assurer la conservation d’un bien, ce n’est pas le propriétaire du bien qui a l’action de vol mais eux-mêmes, parce qu’en s’engageant ils assument le risque de la garde. 5. En revanche, l’exploitant se décharge de sa responsabilité au nom de son esclave par l’abandon noxal. Mais alors, pourquoi l’armateur qui a admis un si mauvais esclave dans le navire n’est-il pas condamné ? Et pourquoi est-il tenu responsable en totalité au nom d’un homme libre mais pas au nom d’un esclave ? Peut-être pour cette raison qu’avant d’employer un homme libre, il doit juger de sa qualité mais qu’il faut pardonner ce qui touche à son esclave au même titre qu’à un mal domestique, s’il est prêt à en faire l’abandon noxal. |
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