La construction d'un office. Le sénéchalat des comtés de Provence et Forcalquier entre 1246 et 1343
Texte intégral
Introduction
1Les sénéchaux ont depuis longtemps attiré l’attention d’érudits, juristes et spécialistes des institutions provençales1. On les conçut comme manifestation typique de l’intégration de la Provence à l’orbite française, cette charge s’implantant à compter de l’époque angevine. Elle fut à tel point considérée, qu’on finit par employer le terme de « sénéchal » pour désigner tout lieutenant du prince, et ce dès le XIIe siècle. Ainsi affubla-t-on Romée de Villeneuve, le conseiller de Raymond Bérenger V, du titre de « grand sénéchal », dans les traités d’histoire institutionnelle de l’époque moderne. Mais la population de ces officiers n’a jamais fait l’objet en tant que telle d’une étude d’ensemble, pourtant possible à partir des catalogues précocement dressés par Lorenzo Bertano dès 1899 puis Fernand Cortez en 19212. D’inestimables jalons sont désormais posés grâce aux recherches de Jean-Luc Bonnaud, sur les officiers locaux et sur les gages des grands officiers, à celles de Riccardo Rao et de Paolo Grillo, qui éclairent d’un jour nouveau les carrières des officiers de Piémont et de Lombardie et l’étroitesse de leurs relations avec leurs homologues de Provence3. Le chantier demeure intimidant, et nous nous restreindrons ici à la période initiale de la dynastie angevine (1246-1343), en nous cantonnant aux temps qui précèdent la crise de légitimité du règne de Jeanne, quand le sénéchalat cristallise nombre de conflits politiques au milieu du XIVe siècle, et qui ouvrent en cela un nouveau chapitre de l’histoire de cet office4. La période envisagée correspond à une phase de remarquable élaboration institutionnelle. Loin de sortir tout chaud du moule capétien, le sénéchalat s’est progressivement construit en Provence, à partir d’expériences antérieures, de nécessités administratives et de crises politiques, principalement entre 1246 et 12975.
2Ce moment voit l’émergence d’un gouvernement central doté d’une certaine autonomie et garant de la continuité de l’État, par sa capacité non seulement à relayer les ordres du souverain, mais aussi à gérer les affaires courantes en l’absence physique de ce dernier. Cela fut grandement facilité par un climat de paix civile relative et de fidélité sans faille de la Provence à la dynastie. Le sénéchalat ne représente alors nul enjeu politique pour les Provençaux. De surcroît, cette époque connaît une codification réglementaire de l’activité du sénéchal et de ses méthodes administratives, par la régulation de ses attributions juridictionnelles en tant que dépositaire du ban royal, de la potestas gladii et du merum imperium comme le rappellent ses lettres de commission, tandis que son gouvernement s’étoffe et que son conseil se professionnalise, avec les grands officiers ses collègues et des professeurs de droit civil au XIVe siècle. Il reste cependant à isoler les réseaux de pouvoir qui structurent l’autorité du sénéchal, tant le milieu favorisant l’ascension de ces grands officiers, que leur entourage, qui assurent légitimité et autorité à cet homme du roi par excellence.
De la lieutenance…
3L’institution du sénéchalat s’efforce de résoudre un problème tant administratif que politique. Comment assurer le gouvernement d’une principauté en l’absence du prince ? Une double réponse y est apportée, personnelle, par le recours à des hommes de confiance, institutionnelle, par l’établissement d’une forme de vice-royauté, qui suscite à son tour un effet de continuité de l’État. À compter de 1113, la Provence n’a cessé de se trouver confrontée à pareille nécessité, sous ses princes catalans puis angevins, à l’exception du règne si particulier de Raymond Bérenger V (1216-1245).
4Dans un premier temps, c’est sa parenté que le prince mobilise afin de pallier ses absences. Le mode de gouvernement privilégié par la dynastie catalane consiste à attribuer la responsabilité de la Provence aux cadets, avec le titre de comte ou marquis, le comte de Barcelone puis roi d’Aragon prenant directement en main les affaires lors de sa présence en Provence ou durant les périodes d’instabilité6. Ainsi voit-on gouverner Bérenger Raymond (1131-1144), le frère du comte de Barcelone, puis celui-ci, Raymond Bérenger (1144-1162), le fils du premier, Raymond Bérenger III (1161-1166), Sancho, comte de Roussillon et Cerdagne (1181-1185), frère d’Alphonse Ier d’Aragon, et enfin Alphonse II (1196-1209) frère du roi Pierre II. Mais face aux crises politiques et militaires qui suivent, lorsque les règnes de Raymond Bérenger III et de Raymond Bérenger IV (1168-1181) s’achèvent prématurément, ou quand est révoqué Sancho, c’est Alphonse Ier qui administre le pays, en y associant désormais son fils Alphonse. De même, après la disparition d’Alphonse II en 1209, c’est Pierre II († 1213) qui exerce son autorité sur la Provence. À sa mort et durant la minorité de son fils Jacques, son oncle Sancho († 1225) et le fils de ce dernier, Nuño Sanchez († 1241), gouvernent les pays provençaux jusqu’en 1215. Entre 1210 et 1218, Sancho et son fils agissent comme « comte et marquis de Provence »7, puis « comte de Provence par la grâce de Dieu et procureur du royaume d’Aragon et de Catalogne »8.
5Mais ce pragmatisme mêlé de coutumes lignagères s’accompagne d’une évolution institutionnelle. À partir du règne d’Alphonse Ier, les comtes catalans établissent une charge de représentant du roi, dénommé procurator ou bajulus Provincie. Elle ne peut cependant alors s’assimiler à un office, puisque participant encore du système précédent et fondée sur une délégation informelle. Elle est confiée à de grands personnages de la noblesse, à des lignages d’origine ministériale ou de la parenté royale9. Ainsi de Guilhem de Bell-Loc en 1172, puis de Pere de Redorta, évêque de Vic (1147-1185), en 1173, aux côtés de Raymond Bérenger IV, ou bien en 1177-1178 de Gui Guerrejat, frère de Guilhem VII de Montpellier (1149-1177) qui fut lui-même curator et procurator en 1166, ou encore du comte Roger Bernard de Foix (1149-1188), le propre cousin du roi, qui assiste son jeune fils Alphonse en 1185-118810. Peu à peu cependant, des signes d’évolution se manifestent, qui confèrent à cette fonction les contours d’une mission d’officier délégué, plutôt que d’une procuration. Un noble provençal accède ainsi à cette haute fonction, Barral vicomte de Marseille, en 1189-1192. Puis on y repère des individus de moindre extraction, tels Lope Eximinio en 1193, procurator comitis d'Alphonse Ier, un miles aragonais devenu par la suite un proche de Pierre II11. Enfin, durant le règne d’Alphonse II, dont la présence en Provence est quasi permanente, un groupe de conseillers, des chevaliers d’origine catalane, assiste le prince dans son gouvernement, préfigurant un conseil plutôt qu’une délégation, au sein duquel se détachent Justas et Johan de Artasona12. C’est cette configuration-là qui perdure sous Raymond Bérenger V.
6Durant son règne, la sédentarité du prince bloque toute évolution des pratiques administratives de procuration générale13. Auprès du comte, c’est un conseil qui gouverne, mais ses membres disposent aussi d’attributions et de délégations locales, avec des responsabilités territoriales. Ils portent le titre de baile du comte ou de bailes d’un ressort défini. Justas, conseiller sous Alphonse II et actif auprès de son fils jusqu’en 1226, est dès 1218 baile du comté de Forcalquier, la base de la reconquête politique de la Provence par Raymond Bérenger et sa mère Gersende de Sabran. Guillaume de Cotignac et Albeta de Tarascon exercent des commandements militaires et s’impliquent dans la soumission des gouvernements urbains. On peut leur adjoindre quelques nobles de moindre envergure, mais bien implantés en ville, tels Ricau de Tarascon, Anselme Fer à Marseille, Guillaume de Signes à Marseille et Toulon. Au sein de ce milieu dirigeant, s’affirme Romée de Villeneuve à partir de 1234, qui doit sa place éminente à sa fonction de juge et sans doute aussi à l’étroitesse de ses liens avec l’entourage de la comtesse Béatrice de Savoie. Il reçoit également des compétences territoriales, en Provence orientale, puis le titre de bajulus ou vicarius Provincie en 1238 et 1241. Ses attributions touchent aussi le domaine militaire et diplomatique. En 1241, il est chargé non seulement de la guerre contre Gênes, mais aussi de la participation des prélats de Provence au concile général décidé par Grégoire IX. S’il centralise nombre de fonctions de lieutenance, ses diverses prérogatives ne sont pas formalisées. Aussi demeurons-nous encore en deçà d’une véritable institutionnalisation, avant l’irruption des Angevins sur les rives de la Méditerranée.
… au sénéchalat
7Ces derniers, notons-le, n’abandonnent pas le recours à la parenté dans le cadre de lieutenances en Provence. Les périodes concernées et les méthodes alors déployées sont l’objet d’un travail en soi que nous ne saurions aborder ici14. Le fils du roi y apprend l’art de gouverner et y constitue des réseaux appelés à le servir une fois parvenu au trône. Cette pratique joue un rôle essentiel dans la fluidité des phases de succession. Ce sont Charles de Salerno, en 1278-1282, Robert, dans le cadre d’un vicariat en 1305-1306, manière d’asseoir sa légitimité de « fils aîné », Charles de Calabre enfin, une fois Robert revenu à Naples et avant son investissement en Toscane, entre 1324 et 1326. Charles constitue alors un véritable réseau de fidèles qui prennent les rênes de l’administration et du conseil en Provence, en particulier les grands offices de juge mage, maître rational et sénéchal15.
8Mais c’est aussi sous la première maison d’Anjou que la lieutenance prend un tour nouveau, conjuguant héritages locaux, apports capétiens et contingences politiques, dès lors que le prince se trouve accaparé par bien d’autres théâtres que la Provence, dès la croisade de 1248-1250, et plus encore après l’investiture royale de 1265. Le sénéchalat s’est alors progressivement constitué comme office concentrant de hautes prérogatives. Je n’insisterai pas sur l’origine de la charge de Siniskalk depuis le haut Moyen Âge, puis sous les Capétiens et les Plantagenets, pour laquelle les travaux de la génération positiviste demeurent fort précieux16. D’abord officier de la maison du roi aux attributions militaires, il se voit doté de compétences territoriales, ce qui lui confère la dimension d’un représentant durable de la personne royale en un lieu et un espace donnés. Dès l’époque Plantagenet, l’Anjou a vu s’épanouir un sénéchalat puissant et autonome, se caractérisant par l’hérédité, une grande autonomie financière et de fortes prérogatives militaires17. Lors de l’acquisition de l’Anjou par Philippe Auguste, cette forme subsiste, en particulier en la personne de Guillaume des Roches et de son gendre, qui maintiennent une forte emprise sur les baillis locaux18. Mais cette autorité s’étiole après leur mort, notamment à compter de 1225 et de la donation de l’Anjou par Louis VIII à son fils Charles. Bien que ce dernier n’en soit investi qu’à l’Ascension 1246, alors que le premier sénéchal de Provence paraît dès février, il est possible que sa suite soit porteuse de traditions administratives angevines, au sens topographique du terme.
9Le sénéchalat, tel qu’il paraît en Provence la même année 1246, serait donc tributaire d’une matrice angevine, et par là davantage marqué par un héritage administratif Plantagenet que capétien. En outre, le Languedoc connaissait déjà cette institution, mais la délégation princière y était dispersée entre plusieurs officiers, et non pas concentrée entre les mains d’un lieutenant unique. Il semble que Simon de Montfort († 1218) ait appliqué dans ses récentes possessions une pratique administrative en vigueur dans les terres toulousaines et ses marges depuis la fin du XIIe siècle19, et qu’Alphonse de Poitiers († 1270) reprit à son compte20. La provenance de pareil modèle institutionnel demeure incertaine. Quoi qu’il en soit, la Guyenne n’en paraît pas un témoin précoce. Le sénéchal y semble d’institution bien plus récente que ses homologues d’Anjou, le premier titulaire étant Jean de Grailly (1266-1268)21. Les liens du Languedoc avec la Provence angevine sont beaucoup plus évidents. Le premier sénéchal installé à Beaucaire fut Lambert de Thury, alias de Limoux, signalé dès juillet 1215, et agissant pour le compte de Simon de Montfort, tandis que le premier agent du roi de France, Guillaume de Benne, alias de Beynes, est attesté en 1247. Sous Alphonse de Poitiers, on croise la route de plusieurs officiers appelés à jouer un rôle en Provence. Ainsi de Jean d’Arcis, sénéchal de Rouergue en 1250-1253 puis de Venaissin, de 1253 à sa mort en 1267. Pierre de Voisins est sénéchal de Toulouse et Albi jusqu’au 14 février 1254, et il est remplacé par Hugues d’Arcis jusqu’en 1256, sans compter Raymond Gaucelme de Lunel, sénéchal de Venaissin en 1249-125322.
10Dans un premier temps, il semble que le sénéchal de Provence soit avant tout un chef de guerre, garant d’un ordre encore précaire, instrument d’une action politique en quête de légitimité, et représentant de son maître à la tête d’une hiérarchie féodale23. Les détenteurs de cette charge proviennent d’une aristocratie internationale, conquérante et très mobile, issue du creuset idéologique de la croisade albigeoise. Le sénéchal est à coup sûr un haut fonctionnaire, gagé en 1249 à hauteur de 730 livres de tournois provençaux, ou encore de 1000 livres de réforciats en 1307. Les premiers sénéchaux ne portent qu’une titulature renvoyant au seul comté de Provence et en droit ils n’agissent qu’au nom du couple comtal et non pas du seul comte Charles d'Anjou. Amaury de Turrio est ainsi senescallus in Provincia, ses successeurs sont senescallus Provincie jusqu’à Gautier d’Aulnay (1258-1262), du vivant de la comtesse Béatrice de Provence († 1267), et alors que la comtesse douairière sa mère, Béatrice de Savoie († 1265), contrôle encore le comté de Forcalquier jusqu’en 1256. Le premier senescallus comitatuum Provincie et Forcalquerii est Guillaume Estandart en 1267, avant que la titulature ne se fige en celle de « sénéchal des comtés de Provence et Forcalquier » sous Isnard d’Entrevennes (1284-1285) au plus tard. Enfin, on notera l’association sporadique du titre provençal avec ceux des grands officiers du Piémont et de la Lombardie angevines. Ainsi Gautier d’Aulnay porte-t-il également le titre de sénéchal de Lombardie, le 8 avril 1276.
Les premiers sénéchaux
11L’office est peuplé de chevaliers au profil comparable, un véritable milieu, très cohérent, sous les premiers sénéchaux qui gouvernèrent la Provence. Jusqu’au début des années 1280, domine largement une génération d’hommes de guerre issus du domaine royal capétien, principalement de la baronnie de Montfort, à l’ouest, et secondairement des plaines de France et de Valois, au nord-est. Imprégnés sans doute par l’idéal de la militia Christi promue par leurs affidés cisterciens, leurs lignages ont fait leurs premières armes lors de la croisade méridionale de 1209-1218, aux côtés du comte Simon de Montfort dont ils demeurent très proches, et ont obtenu de nombreuses possessions en Languedoc, dans la sénéchaussée de Carcassonne ou dans celle de Toulouse et Albi, à la faveur de la dépossession des seigneurs méridionaux24. Déjà particulièrement liés aux cisterciens de Sainte-Marie des Vaux-de-Cernay, ils adoptent les usages et dévotions de Simon en Languedoc : sur son modèle, on les retrouve comme principaux donateurs du monastère de Prouille, tels Lambert de Thury et Pierre de Voisins25. Ils recouvrent leurs terres à l’occasion de la croisade royale de 1228-1229. On en retrouve certains aux côtés d’Alphonse de Poitiers devenu comte de Toulouse et marquis de Venaissin (1249-1271). Ils combinent une expérience militaire, le goût de la conquête et de la violence, une fidélité sans faille à leurs seigneurs, à qui ils doivent une rapide ascension, et des talents d’administrateurs. Ils savent tenir un pays insoumis dans lesquels ils sont minoritaires, à partir de ses pôles fortifiés et d’un réseau structuré de fidélité nobiliaire. Ce sont des migrants, des conquérants, depuis l’Île-de-France jusqu’en Sicile, de croisade en croisade, de Toulouse à Tunis en passant par Tagliacozzo. Leur rôle de chef de guerre se note en Provence lors des périodes troublées de 1252-1262, mais plus nettement encore dans le royaume de Sicile, lorsque certains d’entre eux, ou leurs parents, mènent à la bataille les corps de troupes du roi de Sicile, tels Guillaume Estandart et Gui de Montfort en 1265, à la poursuite de Manfred, puis lors de la dure soumission de la Sicile.
12Voici d’abord Amaury de Turrio26, en poste dès février 1246 et sans doute parmi les premiers venus en Provence avec Charles de France, dès la fin de l’année précédente. Nous y voyons un membre du lignage de Thury27, aux marges du domaine royal, entre comté de Valois, comté de Clermont-en-Beauvaisis et comté de Beaumont. Lambert de Thury († av. 1224) s’est illustré aux côtés de Simon de Montfort à Béziers, Carcassonne, Termes, Puivert, Beaucaire, Toulouse, entre 1209 et 1218, et il finit prisonnier du comte de Foix. Simon de Montfort lui inféode Limoux et Lombers, puis Puivert en 1213. En 1215, il est le premier sénéchal de Beaucaire du nouveau comte de Toulouse. Ses alliances révèlent un dense réseau où plusieurs familles de nos sénéchaux paraissent, et qui atteste un enracinement méridional. Lambert épouse en secondes noces Briande Adhémar de Monteil, qui elle-même se remarie en juillet 1224 avec Gui de Montfort († 1228), seigneur de Gometz et Castres. Leur fille Mahaut de Thury épouse Pierre de Voisins, mais ils ont également deux fils, Lambert et Simon de Thury, signalés en 1256, et qui portent en 1268 les titres de seigneurs de Saissac et Puichéric. Ce Lambert est attesté à la fin du siècle comme sénéchal de Carcassonne28. Il semble avoir eu deux enfants, Amaury et Béatrice de Thury, laquelle épouse Eustache de Lévis. Le sénéchal de Provence Amaury de Thury nous paraît provenir de ce lignage, et sans doute est-il un fils du premier Lambert de Thury.
13La famille du second sénéchal, à l’office fort bref, semble procéder de la même zone. Pierre d’Escantillis, qui disparaît le 22 août 1249 après quelques mois d’exercice, est sans doute un membre des Escantilly, possessionnés à Trumilly et Drucy29. On peut vraisemblablement l’assimiler à ce Pierre d’Escantilly, bailli royal d’Orléans, Sens et Gien, entre 1240 et 1246, et bailli d’Aumale avant juin 124830. On notera du reste que cette dernière charge le rapproche sans doute du milieu entourant Blanche de Castille, alors que le comté de Ponthieu voisin était entre les mains de Jeanne de Dammartin († 1279), épouse de Ferdinand III de Castille, le frère de la reine de France, alors régente pour ses fils partis en croisade. Aussi bien semble-t-elle avoir joué un rôle dans la désignation de son successeur au sénéchalat, Jean de Cornillonis31, qui se fit attendre jusqu’au 2 novembre 124932. Il nous paraît procéder de la seigneurie de Cornouiller, près de Beynes33, dans la baronnie de Montfort, et par là serait proche de Guillaume Estandart. C’est probablement aussi le cas d’Hugues d’Arsicio ou Arsiciaco34. Comme les Thury, les Arcis ou Arcy sont des acteurs de la croisade aux côtés de Simon de Montfort. Ils en reçoivent Cailhavel, qu’ils récupèrent après 1229, outre Rocreuse et Saint-Martin-le-Vieil, près d’Aizonne. Le roi leur inféode aussi Cessenon en 124935. Nous avons cité Jean d’Arcis, sénéchal de Rouergue (1251-1253) et de Venaissin (1253-1266). Nous voyons le sénéchal de Provence en Hugues d’Arcis, sénéchal de Carcassonne (1243-1246), puis d’Agenais-Quercy (1253-1255) et de Toulouse (1254-1256) pour le compte d’Alphonse de Poitiers36. C’est probablement sa fille, Molina, qui se marie avec Folquet de Compiègne. Quant aux origines de son successeur Eudes de Fontanis37, ou encore de Girard de Saciaco, qui semble aussi possessionné en Anjou38, elles nous paraissent plus obscures.
14Les sénéchaux suivants s’inscrivent dans ce milieu, qui allie origines, intérêts, projets et compétences similaires, doublés d’alliances matrimoniales. Mais désormais, leur participation à la conquête du royaume de Sicile donne à leurs lignages et à leurs stratégies d’implantation une toute autre envergure39. En outre, ils se caractérisent par une plus grande stabilité dans l’office. Leurs liens sont patents avec les chefs de l’armée angevine, Philippe de Montfort († 1270), seigneur de Castres, Saïda et Tyr, vicaire général en 1266-1267, et son fils Jean († 1283), comte de Squillace, avec leur cousin Gui de Montfort († c. 1291-1292), fils de Simon de Leicester, avec Pierre de Beaumont († 1273), grand camérier et comte de Montescaglioso, neveu de Jean, chambellan de Louis IX40. Gautier d’Aulnay (de Alneto) porte vraisemblablement le nom d’un lieu-dit de la baronnie de Montfort41. Ce lignage est bien représenté parmi les donateurs des cisterciens des Vaux-de-Cernay42. Notre sénéchal serait apparenté à Gauthier d’Aulnay († c. 1240), seigneur de Moussy-Le-Neuf, du Mesnil et du Grand Moulin, qui fut sénéchal de Dammartin (1221-1240) et vassal du fils du roi, Philippe Hurepel († 1234), comte de Clermont-en-Beauvaisis et de Boulogne43. Son lignage sert Charles de Valois († 1325). De fait, Gautier d’Aulnay s’implique particulièrement dans la conquête du royaume de Sicile et s’y implante durablement44. Les Aulnay sont en outre apparentés à Pierre de Beaumont Montescaglioso († 1273)45, époux en secondes noces de Felipa, fille du comte Ruggiero di Ceccano. Leur fille Marguerite de Beaumont († 1307) épouse Jean de Monfort († c. 1300) seigneur de Castres, comte de Squillace et Montescaglioso46. Le prédécesseur de Gautier d’Aulnay au sénéchalat, Guillaume de Gonesse, nous semble pour sa part lié à Alain de Luzarches, évêque de Sisteron et homme fort de la Provence jusqu’à sa mort en 127747. Le lignage de Guillaume de Gonesse s’inscrit aussi dans les réseaux des moines cisterciens des Vaux-de-Cernay48. Guillaume est en outre issu d’un groupe de familiers qui sert Alphonse de Toulouse dans le Poitou et le Toulousain, parmi lesquels son clerc Pierre de Gonesse, et son conseiller Raoul de Gonesse, trésorier de Saint-Hilaire de Poitiers et sous-diacre de Saint-Martin de Tours49. Davantage orientés vers les possessions alphonsines, les Gonesse ne semblent pas avoir bénéficié aussi largement que les Aulnay de la conquête du royaume de Sicile.
15Proches des Aulnay, des Montfort et des Thury, et sans doute aussi de Jean du Cornouiller, les Estandart (Estandardus) donnent aussi un sénéchal à Charles d'Anjou. Ce sont les premiers à s’allier avec des familles provençales, il est vrai possessionnées dans le Regno, et ceux qui poussent le plus en avant leur intégration dans la grande noblesse angevine. Guillaume Estandart a été assimilé à un membre de la maison de Baux, sous prétexte qu’il aurait été originaire de Berre, et à l’appui d’une alliance matrimoniale avec ce lignage provençal50. Mais Lestandart est bien attesté comme toponyme dans le territoire de Beynes, dans la baronnie de Montfort51. Un Guillaume Estandart alias le Vieux († déb. 1271)52, allié à la famille de Brie-Comte-Robert, était par son père, Robert de Beynes, le petit-fils de Gui de Montfort53 et de Briande Adhémar de Monteil, alias de Beynes, respectivement frère de Simon de Montfort et veuve de Lambert de Thury. C’est lui qui exerce la fonction de maréchal de Sicile en 1268-127154, lui que l’on retrouve sénéchal de Provence en 1262 puis 1266-126855, et enfin vicaire général du royaume en août 126956. Il se marie avec Mabille de Montmorency57. Nous l’assimilerions volontiers aussi au premier sénéchal royal de Beaucaire en 1247, Guillaume de Benne, ou plutôt de Beynes. Guillaume Estandart († av. 1293), alias de Beynes, est sans doute leur fils, alias le Jeune, maréchal et connétable de Charles II58. Il épouse Pétronille, sœur d’Eustache et d’Hugues du Mesnil-Renard, membres de l’hôtel de Charles d'Anjou59. Leur fille Eustachie s’allie à Raymond de Baux Meyrargues en 1272, et leur petite-fille, Élise de Baux, à Ermengaud de Sabran, comte d’Ariano60. Guillaume le Jeune convole en secondes noces avec Isabella d’Aquino, des comtes d’Aversa61. Leur fille Isabella Stendardo est promise à Jean de Gonesse, gouverneur de Calabre, vers les années 1280, puis se remarie avec un Robert d’Aulnay. Enfin, un Guillaume Estandart ou Standardo († 1308), également maréchal puis connétable de Sicile, est signalé jusqu’en 130662.
16Enfin, Pierre de Voisins (de Vicinis) est sans doute aussi originaire de la baronnie de Montfort63. Son premier sénéchalat s’étend au moins jusqu’au 30 septembre 126564. En décembre 1266, est évoqué le gage que Pierre de Voisins, à l’époque de ce sénéchalat, avait promis, en échange d’un prêt destiné aux dépenses liées à sa fonction. Les revenus qu’il avait alors concédés à une famille originaire de Piémont, les de Brayda, étaient assis sur Saint-Aubin, Le Cornouiller, Beynes et Montfort, tous situés dans les environs de Montfort65. Un homonyme, vraisemblablement son grand-père, avait suivi Simon de Montfort en Languedoc. En 1210, il s’empare des terres au sud de Carcassonne, qu’il reçoit en fief en 1215 (le Chercob, le Haut Razès, Couffoulens, Arques, Alet), puis exerce comme sénéchal du nouveau comte de Toulouse. Il rejoint la croisade royale de 1228-122966, et obtient Limoux et Puivert en 1231, auparavant confiés à Lambert de Thury67. Époux de Mahaut de Thury, Pierre décède en 1233. Son fils homonyme disparaît vers 1256, après avoir exercé les charges de sénéchal, à Toulouse pour Alphonse de Poitiers en 1251-1254, puis à Carcassonne et Béziers pour le roi en 1254-125568. Il s’est allié à Jeanne de Voisins, et leurs trois fils, Guillaume, Jean et Gilles († 1320), restent possessionnés dans le Razès69. Le sénéchal, qualifié de seigneur de Limoux en 1264, procède de ce lignage de croisés et d’officiers implanté en Languedoc, tout comme Hugues de Voisins, sans doute son fils70.
17Nous adjoindrons à ce groupe particulièrement cohérent Jean de Burlats, dont nous avons ailleurs retracé la carrière71 : proche de Philippe de Montfort-Tyr, officier en Languedoc, il est sénéchal entre 1278 et 1283. Avec lui, une nouvelle ère semble s’inaugurer. Désormais seul maître à bord, avec la mort de l’évêque Alain de Luzarches en 1277, il accomplit une œuvre dépassant très largement les seules attributions militaires et judiciaires. Ainsi met-il en ordre l’archivium regium et en constitue-t-il le premier cartulaire en 1278-1279, tout en ordonnant une enquête générale sur les droits royaux dans la baillie de Castellane en 1278.
Les contours de l’office
18En effet, durant la majeure partie de cette première période d’élaboration institutionnelle, le sénéchal ne gouverne pas seul la Provence. Sitôt Charles d'Anjou rentré de croisade, et sans doute dès avant son départ, le comte met en place un système duel à la tête de la haute administration provençale. Entre 1249 et 1277, le sénéchal se trouve ainsi flanqué d’un personnage tout aussi éminent, un prélat, issu du proche entourage royal. Ce fut tout d’abord Philippe, civiliste formé à l’école d’Orléans, et qui siège comme archevêque d’Aix en 1249-1257. Il œuvre auprès de Jean de Cornillonis et Eudes de Fontanis, en particulier durant la vacance suivant le décès de Pierre de Scantillis. On le voit administrer les revenus comtaux, expédier les affaires courantes, gérer les dépenses, recouvrer les dettes, entretenir le domaine et les forteresses, assurer les gages des officiers, mener une activité diplomatique auprès de la cour de France et de la curie romaine sous Innocent IV. Du moins, avant que d’autres tâches, en partie pastorale, ne l’accaparent72. À sa mort, c’est l’évêque de Sisteron Alain de Luzarches († 1277) qui prend le relais. Il siège au conseil, il régit et contrôle les officiers royaux. Sans doute concourt-il à promouvoir au sénéchalat de probables affidés, tel Guillaume de Gonesse. Rien là de comparable à un simple rôle de membre du conseil royal. Il s’agit bien d’une forme de délégation des prérogatives princières, concentrée entre les mains de deux hauts personnages issus de la maison comtale. À cette époque, le gouvernement central de la Provence ne semble pas totalement structuré, et il repose sur ce couple complémentaire, et quelque peu archaïque, du guerrier et du prêtre.
19Pourtant, dans le même temps, sont posés les jalons d’une institutionnalisation et d’une codification du sénéchalat. Le premier statut royal déterminant son rôle est daté de 126673. Le sénéchal supervise l’action des officiers, avec l’assistance d’un conseil, il les nomme, il les surveille, et pour ce faire il doit tenir des parlements annuels à Digne, Aix, Forcalquier et Draguignan, où il reçoit les plaintes et examine l’administration des agents royaux. Il doit par-là tenir le territoire par ses présence et circulation périodiques. Il administre l’instrument de réforme, au service d’une re-légitimation du prince. Il articule sédentarité et itinérance qui se déploient peu à peu en deux déclinaisons de l’institution administrative, les rouages centraux de la cour d’Aix et l’enquête générale de reformatio curialium.
20De même, les premières lettres de commission de sénéchal émise par le prince confirment tant l’étendue considérable de ses attributions que leur formalisation. Nous n’avons conservé que quelques-uns de ces documents, qui ne nous permettent guère de reconstituer les étapes de celle-ci. La lettre du sénéchal de Provence Gautier d’Aulnay, du 9 mars 1276, est la plus ancienne qui nous soit parvenue74, suivie par celles du 20 avril 1278, en faveur de Jean de Burlats, seuls cas sous Charles d’Anjou, puis du 8 février 1298 pour Rinaldo di Letto et du 4 février 1302 pour Riccardo di Gambatesa, sous Charles II. Leur propos est déjà figé. Elles articulent deux éléments : le constat de la fin de l’exercice précédent (revocatus), et la délégation de pouvoir, une véritable lieutenance royale ou vicariat, avec concession de l’exercice du merum et mixtum imperium et de la gladii potestatem. Par là même, l’officier est tout entier soumis à la volonté du roi. Il ne dispose pas de durée d’exercice fixe, elle dépend du « bon vouloir » du prince et de la confiance qu’il lui accorde. Du reste, le sénéchal est sans équivalent : s’il délègue momentanément ses prérogatives à un lieutenant (tenens locum senescalli, gerens vices senescalli), pour indisposition ou absence ponctuelles, il s’agit d’une procuration et non pas d’un office en second75. Ceux qui l’occupent sont soit ses collègues grands officiers, surtout le juge mage, moins souvent un maître rational ou des conseillers juristes, plus rarement le trésorier, soit des nobles siégeant au conseil, et dans de très rares cas de futurs sénéchaux (Rinaldo di Letto en 1297). Toutefois, la lieutenance de Bertrand de Marseille, au vrai une charge pleine, entre 1313-1315 et en période de forte instabilité des titulaires du sénéchalat, revêt un tour particulier76.
21C’est seulement sous Charles II que le sénéchalat prend ses contours définitifs. En premier lieu, son ressort territorial se stabilise, en dépit de deux tentatives de redéfinition, liées sans doute à la reconstitution d’un Piémont angevin. Ainsi voit-on une certaine mais passagère porosité entre sénéchalat de Provence-Forcalquier, et sénéchalat de Piémont-Lombardie, soit que certains titulaires passent de l’un à l’autre, soit qu’ils cumulent momentanément les deux fonctions, en particulier sous Rinaldo di Letto et Riccardo di Gambatesa77. Il est vrai que la Provence angevine administre désormais directement les terres piémontaises du Val di Stura. Ainsi assiste-t-on à une éphémère réorganisation administrative motivée par l’étendue des territoires provençaux. En janvier 1307, Charles II établit ainsi un sénéchal de Forcalquier, avec juridiction sur la rive droite de la Durance, y compris Avignon ainsi qu’Arles, Tarascon, Digne, Réauville et le Val d’Oule, outre le Val di Stura, ainsi que fort probablement un dédoublement des charges des autres grands officiers78. Ce sénéchalat est confié à Gerardo di Sant’Elpidio, qui porte le titre de « sénéchal de Forcalquier et de la rivière du Rhône (Riperia Rodani) »79. Quant au sénéchalat de Provence, il échoie à Francesco di Letto, pour le reste des circonscriptions. Mais ce système dual est supprimé entre janvier et mars 1308. Le 2 mars, Riccardo di Gambatesa se trouve seul sénéchal des comtés de Provence et Forcalquier80. Ces expériences confirment cependant l’éminence du rôle diplomatique du sénéchal de Provence, ce qu’accentue l’installation de la papauté en Avignon dès 1309 et ce qui culmine lors de la vacance pontificale de 1314-1316. Désormais, on ne compte plus ses activités diplomatiques aux côtés du procureur in Romana curia81. La nomination de Raymond de Baux le 31 janvier 1315, suivie de celles de plusieurs autres grands officiers, dont juge mage et maître rational, est directement liée aux négociations à mener avec le Sacré Collège82. Giovanni d’Acquabianca décède d’ailleurs au cours de l’une de ces missions, à Avignon en 133083.
22Le contenu des attributions du sénéchal se précise. Dès les années 1270, il revêt un rôle pivot dans la transmission et la conservation de la parole royale. Il assure la transcription des mandements, et en 1294 débute l’enregistrement proprement dit. Une chaîne de commandement achève de se structurer, depuis la réception des ordres royaux, jusqu’au dépôt dans les archives et l’expédition aux officiers des ressorts, qui assurent eux-mêmes les criées locales et reçoivent un pouvoir d’exécution84. Lorsque l’institution des comptes se formalise, avec l’ordonnance du 31 juillet 1297, on dispose d’une description complète des devoirs administratifs du sénéchal85. Il doit ainsi tenir trois registres, le premier conservant les acta, la liste des affaires à traiter, notamment judiciaires, les recollecta, avec les recettes et les détails de leur origine, de leur montant et des soldes éventuels, les mandata, recueillant les ordres par lui reçus et exécutés et les lettres royales. À la fin de sa charge, il dresse un état des affaires pendantes selon l’organisation qui précède, qu’il scelle et dont il remet une copie à son successeur, comme le soulignait dès 1276 la lettre de commission de Gautier d’Aulnay. Le nouveau sénéchal doit débuter son exercice par le règlement de ces affaires pendantes, et doit dresser un rapport trimestriel de ses activités au rational, afin que celui-ci tienne à jour ses comptes. Ce rythme devient semestriel quelques années plus tard. En cela, son rôle auprès de la mémoire administrative et des archives, inaugurée par Jean de Burlats, ne cesse de s’affirmer. En 1379, d’après l’enquête du maître rational Véran d’Esclapon dans la viguerie d’Aix, le sénéchal est aussi l’un des gardiens des clés donnant accès aux chartes de la Tour du trésor du palais d’Aix86.
23Dans le même temps, s’affine la fonction d’instance suprême et de recours gracieux du sénéchal, émanation de la dignité royale87. Ce dernier a la haute main sur le contrôle des officiers royaux. Il reçoit toute plainte visant leur gestion, selon les statuts de 1266 et de 1296. En 1266, puis à nouveau en 1289, les édits royaux définissent une méthode administrative qui participe de l’itinérance de l’enquête générale88. Le sénéchal tient son parlement une fois par trimestre dans quatre zones successives : la Provence rhodanienne, la région d’Aix jusqu’au littoral toulonnais, le comté de Forcalquier, Digne et la vallée de l’Ubaye, Draguignan et les Alpes, jusqu’à Nice. Il est en outre le commanditaire de toute information et enquête délimitant le domaine et les juridictions royales, qu’elles soient particulières ou générales, comme en 129789. Il se doit aussi de mettre à jour les inventaires des droits royaux. Avec le juge mage, il constitue l’instance compétente pour tous les contentieux fiscaux, administratifs et domaniaux90. Il connaît toute affaire de déni de justice. Les statuts du 25 mai 1310 lui confèrent une juridiction d’appel supérieure. Si un seul appel est possible, porté devant le juge des premiers appels, pour toutes les condamnations pécuniaires et les litiges sur les biens mobiliers, plusieurs sont autorisés pour les peines afflictives, les causes féodales, celles qui touchent aux biens immobiliers, aux questions territoriales et de champs de juridictions. C’est le sénéchal qui les reçoit, en usant de la procédure sommaire, avec l’aide du procureur fiscal, et en sus celle d’un prélat nommé par le roi pour toute affaire fiscale et domaniale. Si le sénéchal a bien la connaissance de ces affaires, il ne juge pas lui-même mais commet les juges compétents sur le fond des affaires. Certes, avec le statut de 1310, et sans doute pour des raisons d’efficacité, ce sont à nouveau les juges ordinaires qui connaissent des litiges concernant les officiers locaux. De même, vers la fin du règne de Robert, un autre statut renvoie à la grande cour de Naples les litiges touchant aux problèmes de juridiction des grands et des prélats.
24Raoul Busquet voyait dans ces dispositifs des moyens successifs d’amoindrir le pouvoir du sénéchal91. Nous pensons plutôt qu’il s’agit d’un processus d’institutionnalisation de ses compétences judiciaires, désormais confiées à des services ou à un personnel subalterne spécialisés. Pour le roi et jusqu’au milieu du XIVe siècle, le sénéchal ne constitue jamais un contre-pouvoir qu’il conviendrait de contrecarrer. On est surtout frappé par la sérénité des relations entre ces hauts personnages et le souverain, et ce malgré quelques affaires montées en épingle, comme la procédure contre Guillaume de Gonesse en 1274, ou bien le procès de Jean Baudi en 1319. En définitive, pareil ensemble réglementaire finit d’inscrire le sénéchal dans une machine administrative aux rouages spécialisés, tandis que juge mage et procureur fiscal voient leurs rôles affirmés à ses côtés. Le chef de guerre est devenu un haut fonctionnaire, mais il n’est pas encore l’émanation des oligarchies nobiliaires et urbaines de la Provence.
L’exercice de l’office
25Durant l’ensemble de la période considérée, l’exercice du sénéchalat demeure de brève durée, quoique plus longue que celle des officiers locaux, annuels ou bisannuels. Le plus souvent, les titulaires restent en poste de deux à quatre ans d’affilée, tels Hugues de Voisins, Rinaldo di Letto, Riccardo di Gambatesa. Mais on notera les cas de Guillaume de Gonesse (1269-1275) et Jean de Burlats (1278-1283), qui manifestent le co-gouvernement avec Alain de Luzarches dans un cas, et signalent un refondateur de l’office dans l’autre. De même la grande stabilité de Rinaldo di Scaletta (1321-1329), désigné lors du séjour de Robert en Provence, et de Filippo di Sangineto (1330-1343), un homme de Charles de Calabre, qui doivent gouverner en période de graves crises politiques extérieures (Louis IV de Bavière) ou intérieures (la mort de Charles de Calabre). Il est vrai que l’office peut être exercé plusieurs fois. Si Riccardo di Gambatesa a bénéficié de quatre mandats, le plus souvent il s’agit de deux, comme l’illustrent Gautier d’Aulnay (1258-1262 et 1276-1277), Pierre de Voisins (1263-1265 et 1268), Guillaume Estandart (1266 et 1267-1268), Bérenger Gantelmi (1283 et 1289), Rinaldo di Letto (1298-1302 et 1309-1310, au moment du changement de règne), et Filippo di Sangineto, qui se caractérise par sa permanence (1330-1343 et 1346-1348). Au rebours, les années 1310 s’illustrent par une succession rapide de titulaires, certains n’exerçant que quelques mois : quatre sénéchaux se succèdent entre 1312 et 1316, et la stabilité n’est recouvrée qu’à la suite d’une délégation exceptionnelle : c’est l’archevêque de Capoue Enguerrand de Stella que le roi charge de désigner le sénéchal en 1317. Cette période chaotique est vraisemblablement liée aux hésitations angevines lors des négociations avec les cardinaux, en période de longue vacance pontificale92.
26La population des sénéchaux est réduite : 31 individus différents pour 41 sénéchalats, entre 1246 et 1348. Elle procède du milieu de la chevalerie et de la moyenne ou grande noblesse. Treize sénéchaux ont exercé sous Charles d'Anjou, huit sous Charles II (un tous les trois ans en moyenne dans ces deux cas) et huit autres sous Robert (un tous les quatre ans et trois mois en moyenne). On ne repère aucun péninsulaire sous Charles d'Anjou. Ces grands officiers procèdent alors du domaine royal capétien, soit de l’Île-de-France, soit du Languedoc. Ne paraissent que quelques rares Provençaux, de bonne noblesse, et tardivement, dans les années 1280 à la fin du règne, alors que la Provence est bien ancrée dans l’orbite angevine, mais que la dynastie entre en crise. Isnard d’Agoult Entrevennes Sault, vient de la grande noblesse de haute Provence centrale, liée par l’hommage au roi93. Bérenger Gantelmi de Graveson est issu d’un lignage de la chevalerie urbaine qui joue un rôle déterminant auprès du roi depuis 126594. C’est seulement sous Charles II qu’un relatif équilibre dans le recrutement rassemble des régnicoles et des Provençaux, avec la disparition totale du recrutement capétien. Mais nous mettons de côté Jean Scoti († 1294), dont nous ignorons l’origine95. La dynastie angevine génère désormais ses propres cadres. Au tournant du siècle, voici Rinaldo di Letto, le premier sénéchal italien, en poste dès 129896, puis Riccardo di Gambatesa97 et Francesco di Letto. Si pour les Provençaux se maintient la place de Bérenger Gantelmi, on trouve à ses côtés un membre d’un rameau des vicomtes de Marseille implanté à Aix, Alfant de Solliès98. S’y ajoute un sénéchal provenant de haute Provence, Philippe de Laveno, à la famille d’obscure bas-alpine. Elle doit son ascension à l’administration angevine et à ses compétences juridiques, un profil encore fort rare chez les sénéchaux99, mais qui fait la part belle à certaines pépinières de cadres administratifs, ici Sisteron, ailleurs Draguignan (Jean Baudi), où se trouvaient vraisemblablement des écoles juridiques locales.
27La place des péninsulaires ne cesse de s’accroître sous Robert. Tous les sénéchaux procèdent alors de la péninsule, sauf un seul. Le Regno donne Niccolò Caracciolo100 de Capoue, chambellan, maître de la maréchalerie, peut-être lié à l’archevêque Enguerrand de Stella, Tommaso di Marzano, comte de Squillace101, Raymond de Baux et son fils Hugues, comtes d’Avellino102 et Filippo di Sangineto, allié aux Sanseverino et proche de Charles de Calabre103. Le seul gradué, en droits, est Giovanni d’Acquabianca104. On peut leur adjoindre le Calabrais Leone di Reggio105 et le Sicilien Rinaldo di Scaletta106. Un seul provençal, Jean Baudi († c. 1323)107. Il est issu de l’entourage de l’archevêque Enguerrand de Stella qui le nomme sénéchal en 1317, sur commission royale. Sa carrière, débutée dans l’office local, est caractéristique d’un profil inauguré par Philippe de Laveno : notaire, clavaire de Digne, Jean Baudi est ensuite rational. Il partage avec Giovanni d’Acquabianca, qui fut maître rational, et Leone di Reggio, maître des comptes, la rare qualité d’ancien personnel de la Chambre des comptes. Ces carrières passant par ce type d’offices s’avèrent exceptionnelles. Pour les fonctions locales, on leur rapprochera celles de Guillaume de Gonesse, viguier de Marseille en 1268, de Philippe de Laveno, baile de Digne en 1269 et 1272, d’Alfant de Solliès, viguier de Tarascon en 1284 puis de Marseille en 1290. Ce sont là des circonscriptions notables où l’on gère d’importants revenus royaux (le sel à Tarascon), la grande étendue du ressort (Digne) ou des équilibres politiques délicats (Marseille). Plusieurs régnicoles d’origine ou d’adoption sont passés par le justicérat : Jean Scoti, Francesco et Rinaldo di Letto, Riccardo di Gambatesa et Filippo di Sangineto, outre les sénéchaux capétiens Jean de Burlats, Hugues d’Arcis, Pierre de Voisins, Guillaume Estandart. En règle générale, le sénéchalat n’est nullement le couronnement d’un cursus de juriste ou de spécialiste des comptes, plutôt d’officier local, mais secondairement et surtout entre les années 1260 et 1290.
28Au vrai, les sénéchaux proviennent principalement de l’hôtel du roi, où certains retournent et finissent. Ils y exercent tout d’abord les fonctions de maréchal, tels Hugues de Voisins en 1291, le fils de Guillaume Estandart en 1293, Jean Scoti, également sénéchal du royaume de Sicile en 1294, Niccolò Caracciolo, Tommaso di Marzano. D’autres furent maître huissier (magister ostiarius), comme Rinaldo di Letto en 1305 et Riccardo di Gambatesa en 1310, ou encore chambellan, comme Jean Baudi, Niccolò Caracciolo et Riccardo di Gambatesa. Hugues de Arsicio est membre de l’hôtel dès 1269, tandis qu’Eudes de Fontanis porte le titre de conseiller du roi. En outre, au début du XIVe siècle, les liens du sénéchalat de Provence-Forcalquier avec le sénéchalat de Piémont ou de Lombardie sont significatifs d’une circulation des hommes et des modèles longtemps sous-estimée. Rinaldo di Letto est procureur du roi en Piémont et Lombardie en 1309, Guillaume Estandart y paraît dès 1261. Philippe de Gonesse, le frère de Guillaume, est sénéchal en Lombardie, de même Raymond de Baux Avellino en Piémont. Giovanni d’Acquabianca est viguier de Brescia en 1319, où il conduit la pacification.
29Dans certains cas, l’accession au sénéchalat marque un processus d’affirmation lignagère, sous la protection du prince, et conforte une stratégie familiale. Mais jamais elle ne paraît autonome et contradictoire au regard des intérêts de la cour, du moins entre 1246 et le milieu du XIVe siècle. Soit qu’il s’agisse de sénéchaux issus des domaines capétiens et implantés dans les terres angevines, avec Guillaume de Gonesse, allié aux Baux Courthézon et aux Sanseverino, ou encore Guillaume Estandart, dont la descendance s’allie aux Baux de Meyrargues puis avec le petit-fils de Bartolomeo di Capua. Sur plusieurs générations, la famille constitue un notable patrimoine, composé de biens dans la Terra di Labor et le comté de Molise, de la seigneurie d’Arpino à la fin du XIVe siècle et du comté d’Alife au début du suivant. Soit qu’il s’agisse de régnicoles établis en Provence, comme Riccardo di Gambatesa, implanté par mariage dans la région d’Avignon où il décède. Pour Philippe de Laveno et Jean Baudi, ainsi qu’Alfant de Solliès, leur carrière administrative couronnée par le sénéchalat consolide leurs positions en Provence et, pour les familles des deux premiers, concourt à leur anoblissement par la grâce du prince. La collaboration avec ce dernier se solde par de nombreuses concessions, les Laveno à Serres et au castrum de Gaudissard, les Baudi qui accumulent de nombreux biens et revenus à Draguignan, et Alfant de Solliès avec l’inféodation de la bastida de la Clue de Moustiers. Il s’agit là certes de formes de rémunérations ou de compensation des risques et dépenses occasionnées par l’exercice d’une lourde charge dont la dimension militaire ne se dément jamais, comme en témoigne le prêt contracté par Pierre de Voisins en 1266.
30Jusqu’aux années 1310, les grands de Provence ou les familles régnicoles de rang comtal sont exclus de l’office. À la notable exception d’Isnard d’Agoult Entrevennes (1284-1285), en une période d’incertitude dynastique il est vrai, pendant laquelle les élites provençales se mobilisent en faveur de la libération du nouveau roi et expérimentent les premières formes de conseils préfigurant les états108. Puis, après les fort brefs sénéchalats d’un chevalier capouan, au second semestre 1312, et d’un comte de Squillace, attesté seulement en juin 1313, vient le tour du comte d’Avellino en 1315109, alors que sa parenté se rapproche étroitement de la famille royale110. Mais aucun ne paraît avoir réellement exercé la charge, entre les mains du lieutenant du sénéchal Bertrand de Marseille, lui-même sénéchal de fait jusqu’en janvier 1315111. Pour le puissant lignage des comtes d’Avellino cependant, les deux sénéchalats de Raymond et d’Hugues de Baux marquent une indéniable ascension politique caractérisée par un réinvestissement en Provence, qui débouche sur une profonde crise après 1348.
Conclusion
31Le sénéchal, ce chef de guerre, maître des officiers locaux, instance suprême en Provence en l’absence du roi, cumule de considérables prérogatives. En période de troubles, de menaces extérieures et de successions dynastiques, de vacance pontificale, ce personnel est le garant de la fidélité des pays qu’il administre, et de la légitimité dynastique. Il est surtout l’interlocuteur privilégié des oligarchies locales, qu’elles émanent de la ville, du clergé ou de la noblesse. Le chef d’une équipe de spécialistes du gouvernement et de la diplomatie, de la négociation et du rapport de forces, avec laquelle le prince héritier fait à plusieurs reprises ses premières armes. Mais il n’est point l’image du souverain, sa lieutenance ne saurait en cela se confondre avec le vicariat quelquefois délégué par le roi à son fils aîné. Il n’en sera jamais le parent, sinon le glaive, le bras. Les grands offices, et particulièrement celui de sénéchalat, participent de la dépersonnalisation et de l’institutionnalisation des attributs de la fonction monarchique. Leur étude est essentielle à la compréhension de la genèse de ce qui favorise les processus de continuité, de circulation et conservation de l’information administrative, de spécialisation et professionnalisation des prérogatives royales. Reste à mettre en évidence plus finement les réseaux qui favorisent l’accession au pouvoir de certains individus ou groupes familiaux, tout comme la circulation des hommes et des méthodes administratives à l’échelle des diverses possessions angevines, ce à quoi nous aidera la base de données Europange.
Notes de bas de page
1 On doit la première histoire et liste des sénéchaux à Honoré Bouche (1598-1671), dans sa Chorographie ou Description de Provence, et l'histoire chronologique du même pays, 2, Aix, 1664, p. 1042-1053. Celle de l’oratorien Jean-Pierre Papon (1734-1803), cité ci-dessous, n’y apporte pas grand’ chose, ajoutant même de la confusion en nommant sénéchaux et gouverneurs les représentants du comte dès le XIIe siècle. Le précieux travail de B. de Clapiers-Collongues, Chronologie des officiers des cours souveraines de Provence, Aix-en-Provence, 1909, ne débute qu’avec le XVIe siècle. Les titres de gouverneur et de grand sénéchal sont d’institution tardive, postérieure à 1400 : R. Busquet, La juridiction du Grand Sénéchal, gouverneur de Provence, après l'édit de Joinville, dans Mémoires de l’Institut historique de Provence, 7, 1930, p. 36-45 ; Id., Un gouverneur de Provence oublié : le marquis de Saluces, dans Mémoires de l'Académie des Sciences, Lettres et Beaux-Arts de Marseille, 1928, p. 143-149 ; Id., Un autre gouverneur de Provence oublié : Charles de Poitiers, seigneur de St-Vallier, 1437-1439, dans Mémoires de l'Académie des Sciences, Lettres et Beaux-Arts de Marseille, 1937-1939, p. 415-420. Il conviendrait de relancer l’impulsion donnée jadis par une génération d’historiens, suggérant de donner plus d’ampleur à l’étude des biographies d’officiers, socle d’une histoire sociale de l’État, témoin, à la suite de Charles-Victor Langlois, R.-H. Bautier, Guillaume de Mussy, bailli, enquêteur royal, panetier de France sous Philippe le Bel, dans Bibliothèque de l'École des chartes, 105, 1944, p. 64-98.
2 Le Piémontais Lorenzo Bertano († 1904), bibliothécaire en 1858 puis vice-secrétaire de la commune de Cuneo, en est aussi l’historien et publie ses Serie dei Siniscalchi della Provenza dal 1259 al 1388, dans Bolletino storico-bibliografico subalpino, 4, 1899, p. 56-68. Il se fondait sur des sources de seconde main issues des érudits provençaux et italiens (en particulier, J.-P. Papon, Histoire générale de la Provence, 3, Paris, 1784, p. 412-422). Le vicomte Henry de Gérin-Ricard (1864-1944), membre de l’Académie des sciences, lettres et Beaux-Arts de Marseille et conservateur du musée Borély, proposa une brève Notice sur les sénéchaussées de Provence suivie de la liste des sénéchaux et de celles des lieutenants généraux et particuliers, Avignon, 1889. Fernand Cortez (1844-1923), érudit originaire de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume (Var), sans grade universitaire particulier, a constitué des listes de grands officiers pour la première fois précisément documentées et par là d’une fort grande utilité. Neveu de Louis Rostan, historien de la basilique Sainte-Marie-Madeleine, il exerça lui-même comme juge de paix dans cette localité, fut membre de la Société d’études provençales, et sa science lui valut la fonction de correspondant du Ministère de l’Instruction publique. À une liste des grands officiers dûment référencée, il a joint quelques développements d’histoire institutionnelle ou généalogique. Son travail est l’œuvre d’une vie d’érudition et ne parut qu’à la fin de son existence. Des notes complémentaires ne furent jamais retrouvées après son décès, et, sous l’égide de la Société d’études, plusieurs archivistes confectionnèrent des additions à son ouvrage, qui lui furent annexées, afin de rectifier ou de compléter son œuvre (Raoul Busquet, Maurice Raimbault, Jérôme de La Calade). F. Cortez, Les grands officiers royaux de Provence au Moyen Âge. Listes chronologiques du haut personnel administratif, judiciaire et financier, Aix-en-Provence, 1921 [désormais Cortez], p. 29-123 pour les sénéchaux, et p. 333-369 pour les additions. À partir de cette ample recherche, Raoul Busquet put proposer la première réflexion institutionnelle sur le sénéchalat et ce qui le précéda à l’époque catalane : V.-L. Bourrilly et R. Busquet, La Provence au Moyen Âge. Histoire politique, l’Église, les institutions, Marseille, 1924, p. 243-246, 274-276, 292-295, 306-307 et 313-321. Depuis, fort peu de travaux ont pris cet office comme objet, sinon pour se concentrer sur certains titulaires : É.-G. Léonard, Un ami de Pétrarque, sénéchal de Provence : Giovanni Barrili, dans Études italiennes, 1927, p. 109-142 ; Id., La lettre autobiographique du grand-sénéchal Nicola Acciaiuoli, 1364, dans Formen der Selbstdarstellung, festgabe für Fritz Neubert, Berlin, 1956, p. 229-239 ; P. Méchineau, Louis de Beauvau, sénéchal d'Anjou, 1409-1462, Maulévrier, 1984. Citons également, sous l’angle de l’écrit pragmatique : Ph. Quinlan, Mutation de l’administration angevine : analyse de deux registres d’enregistrement du sénéchal de Provence sous Charles II d’Anjou, mémoire de maîtrise d’histoire, université du Québec à Montréal, 1998 (dactylographié), à propos du registre AD 13, B 1370 et B 1371 (119 folios) du sénéchal Riccardo di Gambatesa pour 1302-1303.
3 J.-L. Bonnaud, La “fonction publique” locale en Provence au XIVe siècle selon l’informatio de gagiis, dans Memini. Travaux et documents publiés par la société des études médiévales du Québec, 1, 1997, p. 43-71 ; Id., Un État en Provence. Les officiers locaux du comte de Provence au XIVe siècle (1309-1382), Rennes, 2007 ; R. Rao, La circolazione degli ufficiali nei comuni dell’Italia nord-occidentale durante le dominazioni angioine del Trecento, dans R. Comba (éd.), Gli Angiò nell’Italia nord-occidentale (1259-1382), Milan, 2006, p. 229-290 ; P. Grillo, Un dominio multiforme. I comuni dell’Italia nord-occidentale soggetti a Carlo I d’Angiò, ibidem, p. 31-101.
4 Sur la guerre dite des sénéchaux (1348-1351), voir en dernier lieu François Otchakovsky-Laurens, S'assembler, tenir conseil, enregistrer : la construction de l'autorité municipale à Marseille à la faveur des crises du XIVe siècle (1348-1385), doctorat d’histoire du Moyen Âge, Université d’Aix-Marseille, 2014 (dactylographié), p. 157-164 et 645-669.
5 Sur le sénéchalat chez les Capétiens, comme charge locale, voir l’étude classique : O. Tixier, Essai sur les baillis et sénéchaux royaux, Thèse de la Faculté de droit et des sciences économiques de l’Université de Paris, Orléans, 1898. Plus que l’office, les approches privilégient alors la géographie administrative et la circonscription où il s’exerce : A. Molinier, La sénéchaussée de Rouergue en 1341, dans Bibliothèque de l'École des chartes, 44, 1883, p. 452-488.
6 Ces processus sont connus précisément, à l’appui de la trame reconstituée dans V.-L. Bourrilly et R. Busquet, La Provence au Moyen Âge. Histoire politique, l’Église, les institutions, Marseille, 1924, p. 14-32 et 228-232, et des fines analyses de R. Busquet, Les institutions comtales de la Provence au XIIe siècle (1112-1209), dans Répertoire des travaux de la Société de Statistique de Marseille, 48, 1920, p. 5-42 ; S. Sanpere y Miguel, Minoría de Jaime I, dans Congrés d'història de la Corona d'Aragó, 1-2, 1913, p. 580-694 ; Id., Minoría de Jaime I. Vindicación del procurador conde Sacho, años 1213-1219, Barcelone, 1910, p. 31-78 ; M. Aurell, La vielle et l’épée, Troubadours et politique en Provence au XIIIe siècle, Paris, 1989, p. 59-64 ; Id., L’expansion catalane en Provence au XIIe siècle, dans Estudi general, 5-6, 1985-86, La formació i l’expansió del feudalisme català, Gérone, 1985, p. 175-197 ; Id., Les noces du comte, mariage et pouvoir en Catalogne (785-1213), Paris, 1995, p. 397-403 ; D. J. Smith, Innocent III and the Crown of Aragon. The Limits of Papal Authority, Aldershot, 2004, p. 143-172 ; Er. E. Jenkins, The Mediterranean World of Alfonso II and Peter II of Aragon (1162-1213), New York, 2012, p. 19-35.
7 F. Benoît (éd.), Recueil des actes des comtes de Provence (1196-1245), Monaco-Paris, 1925 [désormais RACP], n. 5, en 1210.
8 RACP, n. 21, en 1216.
9 R. Busquet, Les institutions comtales de la Provence... cit. ; V.-L. Bourrilly et R. Busquet, La Provence au Moyen Âge, p. 24-29, 228-232. Guilhem de Bell-Loc est procurator regis, bajulus Provincie, Pere de Redorta porte avec Raymond Bérenger IV le titre de vicem regis Aragonie gerentes in Provinciam, Gui Guerrejat est procurator Provincie, Roger Bernard de Foix bajulus Provincie. À cette époque, le titre de baile recoupe toutefois un large champ d’acceptions, en renvoyant toujours à la délégation : L. Ripart, Les bayles de Provence : genèse d’une institution princière, dans Ol. Mattéoni, G. Castelnuovo (dir.), « De part et d’autre des Alpes ». Les châtelains à la fin du Moyen Âge, Actes de la table ronde de Chambéry, 11-12 octobre 2001, Paris, 2006, p. 59-91.
10 M. Aurell, Els fonaments socials de la dominacio catalana a Provença sota Alfons el Cast (1166-1196), dans Acta Historica et Archaeologica Mediaevalia, 5-6, 1984-1985, p. 83-110 ; Id., Le personnel politique catalan et aragonais d’Alphonse Ier en Provence (1166-1196), dans Annales du Midi, 93, 1989, p. 121-139 ; Id., Les noces du comte, mariage et pouvoir en Catalogne (785-1213), Paris, 1995, p. 411-412. Sur l’évêque de Vic, qui semble avoir eu des compétences juridiques, qui promeut dans son Église une puissante seigneurie épiscopale et met en œuvre des efforts administratifs : P. H. Freedman, The Diocese of Vic : Tradition and Regeneration in medieval Catalonia, New Brunswick, 1983, p. 68-114.
11 V.-L. Bourrilly et R. Busquet, La Provence au Moyen Âge, p. 230-232 ; R. Busquet, Catalans et Provençaux. Légende et histoire, dans Mélanges Brunel, 5, 1955, p. 227-234 ; M. Aurell, « Le personnel politique catalan et aragonais ». Sur le vicomte Barral, époux de Marie de Montpellier : Fl. Mazel, La noblesse et l'Église en Provence, fin Xe-début XIVe siècle, Paris, 2002.
12 Sur ce milieu : V.-L. Bourrilly et R. Busquet, La Provence au Moyen Âge, p. 232 et M. Aurell, Le personnel politique catalan... cit. ; Justas, seigneur de Peipin et d’Aubignosc, est actif entre 1199 et 1232. Son fils Rodrigue porte aussi le titre de baile du comte (Th. Pécout, Ph. Bernardi, J.-L. Bonnaud, M. Cassioli, A. Mailloux, J. Stephan, V. Theis (éd.), L’enquête de Leopardo da Foligno dans le Comté de Forcalquier (juin - août 1332), Paris, 2016, fig. 16 et l’introduction générale).
13 V.-L. Bourrilly et R. Busquet, La Provence au Moyen Âge, p. 240-246. R. Busquet, Le personnel de la haute administration comtale sous Raimond-Bérenger V, Guillaume de Revenga, dans Études sur l'ancienne Provence, 4, Paris, 1930, p. 24-27. A. Venturini, Pages de l’histoire de Vence et du pays vençois au Moyen Âge, Vence, 1991, p. 21-22. A. Venturini, Romée de Villeneuve et le pays vençois. Quelques précisions, dans Romée de Villeneuve (c. 1200-1260). Colloque historique du 5 novembre 1994, Cagnes-sur-Mer, 1995, p. 42-49. Th. Pécout, Raymond Bérenger V (1209-1245). L’invention de la Provence, Paris, 2004.
14 Pour le gouvernement de Charles de Salerno : A. Kiesewetter, Die Anfänge der Regierung König Karls II. von Anjou (1278-1295). Das Königreich Neapel, die Grafschaft Provence und der Mittelmeeraum zu Ausgang des 13. Jahrhunderts, Husum, 1999, p. 50-75 ; pour son séjour en Provence, entrecoupé de voyages à Paris, en Anjou et à Bordeaux, notamment, entre septembre 1278 et août 1282 : Id., Das Itinerar König Karls II. von Anjou (1271-1309), dans Archiv für Diplomatik, 43, 1997, p. 85-284. Au sujet de Robert, comme vicaire général pour le royaume et les comtés de Provence et Forcalquier en 1305-1306 : Th. Pécout, Les deux séjours du roi Robert en Provence (1309-1310 et 1319-1324), dans N. Coulet et Th. Pécout (dir.), Provence historique, 64, 2014, Hommage à Jean-Paul Boyer, p. 277-311, et ici p. 277-278 et n. 1. Pour Charles de Calabre en 1324-1326, nous renvoyons à une publication à paraître, Des lieutenances en Provence, 1278-1328, dans les Mélanges en l’honneur d’Enrico Cuozzo. On pourra aussi considérer le gouvernement du neveu de Charles d'Anjou, Robert d’Artois († 1302), dans le Regno entre 1285 et 1289, avec le titre de bajulus (voir notamment X. Hélary, Robert II, comte d’Artois. Qu’est-ce qu’un chef de guerre à la fin du XIIIe siècle ?, dans Rivista di storia militare, 1, 2012, p. 71-84).
15 Sur ce réseau : Th. Pécout, Le personnel des enquêteurs en Provence angevine : hommes et réseaux, 1251-1365, dans Th. Pécout (dir.), Quand gouverner, c’est enquêter. Les pratiques politiques de l’enquête princière, Occident, XIIIe-XIVe siècles, Actes du colloque d’Aix-en-Provence et Marseille, 19-21 mars 2009, Paris, 2010, p. 329-355.
16 Ch. Petit-Dutaillis, La monarchie féodale en France et en Angleterre (Xe-XIIIe siècle) (1re éd. 1933), Paris, 1971, p. 127-137, 229-235, 238-241 et 283-287. L. Delisle, Chronologie des baillis et sénéchaux royaux depuis les origines jusqu’à l’avènement de Philippe de Valois, dans Recueil des Historiens des Gaules et de la France, 24, Recueil des enquêtes administratives de Saint Louis, Paris, 1904, p. 15-385, et p. 227-245 pour Nîmes-Beaucaire et le Venaissin.
17 J. Baldwin, Philippe Auguste et son gouvernement. Les fondations du pouvoir royal en France au Moyen Âge, trad., Paris, 1991, p. 301-307.
18 Les officiers locaux demeurent placés sous la dépendance pleine et directe du sénéchal et portent le titre de baillivus domini regis et senescalli Andegavensis. G. Dubois, Recherches sur la vie de Guillaume des Roches, sénéchal d’Anjou, du Maine et de Touraine, dans Bibliothèque de l’École des chartes, 30, 1869, p. 377-424 ; 32, 1871, p. 88-145 ; 34, 1873, p. 502-541 ; A. J. Lyons, The Capetian Conquest of Anjou, thèse d’histoire, Johns Hopkins University, 1976, p. 112-131.
19 Le sénéchal de Beaucaire, principalement issu de la chevalerie d’Île-de-France, dispose de prérogatives militaires, fiscales, administratives et judiciaires très étendues, mais en voie de codification à compter des années 1250. R. Michel, L’administration royale dans la sénéchaussée de Beaucaire au temps de Saint Louis, Paris, 1910, p. 23-51. Un sénéchal paraît en Albigeois, Toulousain, Agenais, Rouergue et Quercy, entre les années 1160 et 1200.
20 E. Boutaric, Saint-Louis et Alphonse de Poitiers : étude sur la réunion des provinces du Midi et de l'Ouest à la couronne et sur les origines de la centralisation administrative, d'après des documents inédits, Paris, 1870, p. 129-154.
21 J.-P. Trabut-Cussac, L’administration anglaise en Gascogne sous Henri III et Édouard Ier de 1254 à 1307, Paris-Genève, 1972 ; Fr. Bériac et Ph. Challet, Les sénéchaux de Gascogne : des hommes de guerre ? (1248-1453), dans Les serviteurs de l’État au Moyen Âge, Congrès de la Société des historiens médiévistes de l’enseignement supérieur public, Pau 1998, Paris, 1999, p. 207-227.
22 E. Boutaric, Saint-Louis et Alphonse de Poitiers, p. 167-170 et P.-F. Fournier et P. Guébin, Enquêtes administratives d’Alphonse de Poitiers, arrêts de son parlement tenu à Toulouse et textes annexes, 1249-1271, Paris, 1959, p. XC-XCIV. Sur le Venaissin d’Alphonse, entre 1249 et 1271 : V. Theis, Le gouvernement pontifical du Comtat Venaissin (vers 1270 – vers 1350), Rome-Paris, 2012, p. 122-123.
23 Aussi le sénéchal reçoit-il les hommages des nobles et des communautés, et le serment des prélats, au nom du comte (Guillaume de Gonesse en février 1271, pour la viguerie de Draguignan, AD 13, B 370). Aussi est-ce également au nom du roi, qu’il doit jurer d’observer les chapitres de paix de Marseille (première attestation, semble-t-il, en mars 1315 : AM Marseille, AA71). Sur les premiers sénéchaux et leur action jusqu’en 1265 : R. Sternfeld, Karl von Anjou als Graf der Provence (1245-1265), Berlin, 1888, avec une liste p. 27, n. 4. La présentation qu’offre Laure Verdon, La voix des dominés. Communautés et seigneurie en Provence au bas Moyen Âge, Rennes, 2012, p. 90-99, néglige le rôle militaire éminent du sénéchal pour l’époque considérée, au profit d’une mission de représentation idéologique qui correspondrait davantage aux générations suivantes.
24 Chr. Woehl, Volo vincere cum meis vel occumbere cum eisdem. Studien zu Simon von Montfort und seinen nordfranzösischen Gefolgsleuten während des Albigenserkreuzzugs (1209 bis 1218), Francfort-sur-le-Main, 2001. J.-L. Biget, La dépossession des seigneurs méridionaux. Modalités, limites, portée, dans La croisade albigeoise, colloque de Carcassonne, octobre 2002, Balma, 2004, p. 261-299. Chr. Keck, L’entourage de Simon de Montfort pendant la croisade albigeoise et l’établissement territorial des crucesignati, dans La croisade albigeoise, colloque de Carcassonne, octobre 2002, Balma, 2004, p. 235-243.
25 L’abbaye, fondée par les seigneurs de Neauphle, est intimement liée aux divers lignages gravitant autour de ces derniers, ainsi que des Beaumont et des Montfort. Parmi ses donateurs, on rencontre dès les années 1160 Gautier d’Aulnay, dès 1208 Pierre de Voisins et sa parenté, et dans les années 1260 les Gonesse et les Arsiciaco (L. Merlet et A. Moutié éd., Cartulaire de l'abbaye de Notre-Dame des Vaux-de-Cernay, de l'ordre de Cîteaux, au diocèse de Paris, Paris, 1857-1858, n. 24, 36, 154, 169, 254, 261, 689, 666, 669). A. Charansonnet, Les grands laïcs lèguent-ils leur spiritualité à leurs enfants ? Le cas des Montfort au XIIIe siècle, dans D. Rigaux, D. Russo, C. Vincent (dir.), Expériences religieuses et chemins de perfection dans l'Occident médiéval. Études offertes à André Vauchez par ses élèves, colloque de la Fondation Simone et Cino Del Duca, 30 novembre – 2 décembre 2009, Paris, 2012, p. 355-374. Pour Prouille : J.-L. Biget, La dépossession des seigneurs méridionaux... cit.
26 Cortez, p. 31-32.
27 Thury-en-Valois, Oise, cant. Betz, ou bien Thury-sous-Clermont, Oise, cant. Mouy.
28 Chr. Woehl, Volo vincere cum meis vel occumbere cum eisdem... cit., p. 165-187 et 312-313 (l’auteur identifie Thury avec une localité bourguignonne). Chr. Keck, L’entourage de Simon de Montfort... cit.
29 Oise, cant. Crépy-en-Valois. Cortez, p. 32-33.
30 J. de Laborde (éd.), Layettes du Trésor des chartes, 3, Paris, 1875, p. 33, n. 3675, le 1er juin 1248.
31 Il nous semble fort improbable que cette localité renvoie à un castrum de Provence, soit Cornillon-Confoux ou Cornillon de l’Oule. Cortez, p. 33.
32 AD 13, B 1500, fol. 29v-30. R. Sternfeld, Karl von Anjou... cit., p. 65. Charles d’Anjou est en croisade entre le 25 août 1248 et octobre 1250.
33 Beynes, Yvelines, cant. Montfort-l’Amaury. On notera que la zone est aussi un lieu d’implantation des moines des Vaux-de-Cernay : L. Merlet et A. Moutié (éd.), Cartulaire de l'abbaye de Notre-Dame des Vaux-de-Cernay... cit., n. 25 et 27, dès les années 1160.
34 Cortez, p. 33-34. Si la première graphie peut renvoyer à Arcis-sur-Aube, Aube, ch.-l. cant. (on confère habituellement à ce sénéchal des origines champenoises), la seconde, qui nous paraît plus vraisemblable, se rencontre parmi les donateurs de Sainte-Marie des Vaux-de-Cernay : le miles Jean de Arsiciaco paraît en cette qualité en 1266, et le miles Hugues de Arsiciis est signalé comme confront à Plaisir (Yvelines, ch.-l. cant.), en 1310 : L. Merlet et A. Moutié (éd.), Cartulaire de l'abbaye de Notre-Dame des Vaux-de-Cernay... cit., n. 666 et 669 ; ibidem, 2, p. 41.
35 Chr. Woehl, Volo vincere cum meis vel occumbere cum eisdem... cit., p. 151 et 269-270, pour Raoul d’Arcy (l’auteur assimile Arcy à une localité de Sainte-et-Marne).
36 L. Delisle, Chronologie des baillis et sénéchaux royaux... cit., p. 248. Pour Jean et Hugues d’Arcis en Languedoc : A. Molinier, Correspondance administrative d'Alfonse de Poitiers, Paris, 1900, n. 391, 1699, 351, 401, 960, 2087, 2092.
37 Cortez, p. 34-35. Fontanis est un patronyme ou toponyme fort fréquent. S’agit-il de Beaulieu-les-Fontaines, Oise, cant. Lassigny, ce qui le rapprocherait des Thury et Escantilly ? Ou plutôt de Fontaines, Yonne, cant. Toucy ? Un Fontanillis (variante du patronyme d’Eudes) se rencontre aussi près de Marly-le-Roy (L. Merlet et A. Moutié (éd.), Cartulaire de l'abbaye de Notre-Dame des Vaux-de-Cernay... cit., p. 805). On notera qu’un Eudes de Fontanis paraît sans titre le 10 octobre 1277, au sujet de la garde d’un bois nommé Longo Alneto (A. de Boüard, Actes et lettres de Charles Ier roi de Sicile concernant la France (1257-1284), Paris, 1926 [désormais Boüard], n. 1066). Un Gautier de Fontanis était chapelain du cardinal Simon de Brie en 1264-1272, puis du même devenu pape Martin IV en 1282 (L Urbain IV, n. 1584-1585 ; L Grégoire X, n. 98 ; L Martin IV, n. 271-274). Ce sénéchal proviendrait dans le second cas des confins du comté de Nevers et du duché de Bourgogne, dont les maîtres Hervé IV de Donzy et Eudes III de Bourgogne furent aussi à la tête de la croisade méridionale.
38 Peut-être Sacy, Yonne, cant. Vermenton, au sud-ouest de Tonnerre. Cortez, p. 35-36. On apprend en 1270 que Girard de Sacy possède un bois patrimonial dans le ressort du bailli d’Angers (Boüard, n. 234). Son sénéchalat en Provence est rappelé en 1270, 1272 et 1278 (Boüard, n. 264, 595, 1085). Un possible parent, Jean de Saciaco, miles, paraît en novembre 1276 (Boüard, n. 991).
39 P. Durrieu, Études sur la dynastie angevine de Naples. Le Liber donationum Caroli Primi, dans Mélanges d'archéologie et d'histoire, 6, 1886. p. 189-228. S. Pollastri, Le Liber donationum et la conquête angevine du royaume de Sicile, dans MEFRM, 116-2, 2004, p. 657-727. Ainsi, le fief d’Argento échoie par exemple alors à Guillaume Estandart en 1268 et 1270.
40 S. Pollastri, Le lignage et le fief. L’affirmation du milieu comtal et la construction des États féodaux sous les Angevins de Naples (1265-1435), Paris, 2011, p. 116. Sur les Montfort, à partir de l’illustre destinée de Simon, comte de Leicester († 1265) : J. R. Maddicott, Simon de Montfort, Cambridge, 1994.
41 Cortez, p. 36-37 et 41. Aulnay ou Launay, com. Orgerus, Yvelines, cant. Houdan, plutôt qu’Aulnay-les-Bondy, dans les châtellenies de Luzarches et de Dammartin (auj. Aulnay-sous-Bois, Seine-Saint-Denis, ch.-l. cant.). Gautier est peut-être apparenté à cet homonyme qui obtient une prébende et un décanat à Saint-Laud d’Angers en 1283 (Boüard, n. 707, 16 août 1273). Le miles Jean d’Aulnay exerce dans le Regno comme vice-maître des justices et maréchalerie en 1275 (Boüard, n. 825 ; il paraît dès 1271, ibidem, n. 335).
42 Des Alneto sont attestés dès les années 1160 puis vers 1200. Au milieu du XIIIe siècle, feu Simon de Alneto, écuyer, époux de Pétronille et vivant encore en 1231, et feu son frère Amaury de Alneto, mari de Felippa qui se remarie à Geoffroi de Hunières avant 1266, et leurs neveux et fils Jean de Villenes (Yvelines, cant. Poissy) et Milon, paraissent comme donateurs des cisterciens des Vaux-de-Cernay (L. Merlet et A. Moutié, éd., Cartulaire de l'abbaye de Notre-Dame des Vaux-de-Cernay... cit., n. 24, 36, 114, 319, 504, 512, 529).
43 Ce Gautier d’Aulnay épouse Isabelle, avec laquelle il a Pierre, sénéchal de Dammartin en 1239, Gautier, chanoine de Beauvais en 1251, et Philippe († av. 1294), seigneur de Moussy et comte du Plessis de Placy, dans le comté de Valois.
44 On compte plusieurs Aulnay à l’hôtel du roi de Sicile, dont Jean maître de la maréchalerie et vice-maître justicier attesté en 1268-1278, ou son fils homonyme, maréchal de Calabre en 1283 : P. Durrieu, Les archives angevines de Naples. Étude sur les registres du roi Charles Ier (1265-1285), 2, Paris, 1886, p. 276.
45 Cette parenté provient de leur alliance à la fin du XIIe siècle avec les Mauvoisin, seigneurs de Rosny.
46 Jean de Montfort est le petit-fils de Philippe, seigneur de Castres, Tyr et Saïda († 1270). Une Isabella d’Aulnay est mentionnée dans le Regno en 1304. S. Morelli, Per conservare la pace. I giustizieri del regno di Sicilia da Carlo I a Carlo II d’Angiò, Napoli, 2012, p. 107, n. 120.
47 Cortez, p. 39-41. Gonesse, Val d’Oise, ch.-l. cant., dans le domaine royal, à 18 km au sud de Luzarches. Luzarches relève du comté de Clermont, aux mains en partie des Beaumont au milieu du XIIIe siècle, dont plusieurs sont de grands collaborateurs de Charles d'Anjou, tels les frères Guillaume, amiral de Sicile, Pierre, comte de Montescaglioso et Alba, chambrier de Sicile, Dreu, maréchal de Sicile et vicaire en Achaïe en 1272. Sur l’évêque Alain de Luzarches : Th. Pécout, Le personnel des enquêteurs en Provence angevine... cit., p. 345-346. On identifie un petit lignage de Gonesse dans la première moitié du siècle : L. Delisle, Fragments de l'histoire de Gonesse, principalement tirés des archives hospitalières de cette commune, dans Bibliothèque de l'École des chartes, 20, 1859, p. 113-152 et 247-277. On notera que Gonesse comporte depuis la fin des années 1250 de nombreux biens des moniales de Notre-Dame de Maubuisson, fondation de Blanche de Castille. Philippe de Gonesse, sénéchal de Lombardie en 1273, est maréchal de Sicile en 1279-1284 et son frère Jean, vicaire en Achaïe en 1280 puis bouteiller en 1282, lui succède à sa mort (P. Durrieu, Les archives angevines... cit., p. 198, 326-327). Un chanoine de Cambrai, Henri de Gonesse, paraît en 1302 (L Boniface VIII, n. 4603). Sur le lignage dans le royaume de Sicile sous Charles d'Anjou : S. Pollastri, Le lignage et le fief... cit., p. 121. Sur le procès dont Guillaume de Gonesse est l’objet à partir de 1274 pour négligence, dans les derniers temps de son sénéchalat : L. Verdon, La voix des dominés. Communautés et seigneurie en Provence au bas Moyen Âge, Rennes, 2012, p. 90-99.
48 Mentionnée en 1268, la veuve Héloïse de Gonesse, mère de Pierre, n’est autre que la sœur de maître Raoul de Gonesse († av. 1268), clerc, official de l’archidiacre de Paris, archiprêtre de Saint-Séverin et trésorier de Saint-Hilaire de Poitiers, qui sert fidèlement Alphonse de Poitiers. L. Merlet et A. Moutié (éd.), Cartulaire de l'abbaye de Notre-Dame des Vaux-de-Cernay… cit., n. 689 et p. 545-568 avec la n. 2 p. 568. Voir aussi n. ci-dessous.
49 A. Molinier, Correspondance administrative d'Alfonse de Poitiers… cit., n. 821, 1212, 1347 pour Pierre de Gonnessia, clerc du comte et familier (26 mars et 7 octobre 1269) ; n. 1840, 1846, 1851, 1853, 1856, 1862-1863, 1876, 1976-1977, 1993, 1995, 1998 et 1925, pour maître Raoul de Gonnessia, chanoine de Chartres, sous-diacre de Saint-Martin de Tours et trésorier de Saint-Hilaire de Poitiers, entre 1261 et juin 1263. En 1261, il conduit avec le dominicain Jacques de Castello, une enquête générale en Poitou et Saintonge. G. Chenard, Les enquêtes administratives dans les domaines d’Alphonse de Poitiers, dans Th. Pécout (dir.), Quand gouverner, c’est enquêter... cit., p. 160.
50 Cortez, p. 37-38. La confusion provient de l’unique passage où l’on trouve Guillelmus Extandardi de Bena seneschalli Provincie et Forcalquerii militem, que l’on a lu de Berra, à la suite d’une très probable erreur de transcription du cartulaire B 2, composé vers 1331. Il s’agit assurément de Beynes, dans les Yvelines. AD 13, B 143, fol. 34-38 et B 2, fol. 23v-26v, 28 juillet 1262. On notera que Guillaume Estandart promulgue le 21 août 1267 un important statut sur les monnaies.
51 Beynes, Yvelines, cant. Chevreuse. B. Dufay, Le château de Beynes (Yvelines) du XIIe au XVIe siècle. Des barons féodaux aux favorites royales, du bourg castral au bourg vigneron : la longue vie d'un château-fort dans un village d'Île-de-France, dans Revue archéologique du Centre de la France, 40, 2001, p. 243-285.
52 Boüard, n. 8, 16 mars 1271, qui mentionne un Guillaume Estandart, décédé.
53 Gui de Montfort († 1228), seigneur de Rabastens et de Castres, du fait de sa participation à la croisade, épouse en premières noces Héloïse d’Ibelin, possessionnée dans le comté de Saïda.
54 P. Durrieu, Les archives angevines de Naples. Étude sur les registres du roi Charles Ier (1265-1285), 2, Paris, 1886, p. 198 et 317 ; É.-G. Léonard, La jeunesse de Jeanne Ire, reine de Naples et comtesse de Provence, 1, Monaco-Paris, 1932, p. 27-28. Il est également amiral de Sicile : voir la contribution de Rosanna Lamboglia dans le présent volume.
55 Cortez, p. 37-38 ; Boüard, n. 8, 12, 63, 68 (22 juin et 27 octobre 1266 ; 27 mars 1267 ; 20 mars 1268) ; L Clément IV app., n. 1394, 16 ou 17 juillet 1268) ; P. Durrieu, Les archives angevines... cit., p. 317 (10 octobre 1268). Guillaume est mentionné comme maréchal en août 1270 (Boüard, n. 275), puis son fils et homonyme comme miles en septembre et octobre 1278 (LCu Nicolas III, n. 308 et LS Nicolas III, n. 720). Guillaume le Vieux se voit aussi confier des missions diplomatiques, comme en 1269 auprès de l’émir de Tunis (S. Morelli, Per conservare la pace... cit., p. 215 n. 91).
56 Sur son rôle dans la conquête de 1266 : S. Pollastri, Le lignage et le fief... cit., p. 116-120.
57 De ce mariage, est issu notamment Robert de Beynes Estandardus.
58 P. Durrieu, Les archives angevines... cit., p. 317. Il avait deux frères, Simone et Galeazzo, membres de l’hôtel en 1284. S. Morelli, Per conservare la pace... cit., p. 282 n. 116 (Galeazzo, en 1268).
59 Eustache et Hugues du Mesnil-Renard (auj. Bonnières-sur-Seine, Yvelines, cant. Mantes-la-Jolie) sont les frères de Pétronille, première épouse de Guillaume Estandart. Eustache et Hugues sont des milites chargés de la surveillance et de l’éducation des enfants du roi en 1266-1271 (magistri liberorum, custodes liberorum domini regis, Boüard, n. 8, 123, 129, 329). Hugues de Mesnil-Renard paraît ensuite comme châtelain d’Angers en novembre 1274 (Boüard, n. 807), et le miles Guillaume de Mesnil-Renard comme viguier d’Avignon pour 1270-1271 (nomination du 28 juin 1270, Boüard, n. 253).
60 L. Barthélemy, Inventaire chronologique et analytique des chartes de la maison de Baux, Marseille, 1882, n. 563 et 553 (2 novembre 1269 et 22 janvier 1272), n. 728 (9 septembre 1293). Ce sont les frères de Pétronille de Mesnil-Renard qui contractent un prêt auprès de Raymond de Baux, en vue du mariage de leur nièce Eustachie. Guillaume Estandart avait également une autre fille, Marie, moniale à Notre-Dame-de-Nazareth en 1302, où l’on retrouve à la même date sa nièce Gabilosa et ses cousines Tassiette et Alasacie de Baux (L. Barthélemy, Inventaire chronologique, n. 848, p. 247, le 4 juillet 1302).
61 S. Morelli, Per conservare la pace... cit., p. 174.
62 L. Barthélemy, Inventaire chronologique... cit., n. 728 (9 septembre 1293). À cette date, il refuse d’honorer la dette contractée auprès des Baux par la famille de sa mère Pétronille, en faveur du mariage de sa sœur Eustachie, et que réclament la fille de cette dernière, Élise de Baux, et son mari Ermengaud de Sabran. C’est Charles II qui la rembourse à ce dernier. Le 4 juillet 1302, puis à nouveau le 17 décembre 1306, le roi confirme à son connétable Guillaume les donations effectuées par Charles d'Anjou, ainsi qu’une rente assise sur le péage de Tarascon, que Guillaume fait transférer à ses parentes moniales à Notre-Dame-de-Nazareth (Marie sa sœur, Gabilosa sa fille, Alasacie et Tassiette de Baux ses nièces) : L. Barthélemy, Inventaire chronologique... cit., n. 848.
63 Cortez, p. 37, 39. Chr. Woehl, Volo vincere cum meis vel occumbere cum eisdem... cit., p. 141-143 et 313, qui choisit la localité qui suit. À Voisins-le-Bretonneux, Yvelines, cant. Chevreuse, nous préférons l.-d. Voisins, com. Louveciennes, Yvelines, cant. Marly-le-Roy. Parmi les bienfaiteurs des cisterciens, on y rencontre entre 1208 et 1225 le lignage de Guillaume de Voisins et Marguerite, avec leurs fils Pierre, époux de Mathilde, Guillaume, Simon, un clerc, et Cécile, mariée à Hugues de Bordes-les-Neauphle. L. Merlet et A. Moutié (éd.), Cartulaire de l'abbaye de Notre-Dame des Vaux-de-Cernay... cit., n. 154, 169, 254, 261.
64 Boüard, n. 3.
65 Boüard, n. 25, 11 décembre 1266. Yvelines, com. Neauple-le-Vieux, cant. Montfort-L’Amaury ; com. Andelu et Boinville-en-Mantois, cant. Guerville).
66 Le sénéchal royal de Carcassonne le récompense par des rentes tirées de la région de Limoux (Razés, Bugarach).
67 Chr. Keck, L’entourage de Simon de Montfort pendant la croisade albigeoise et l’établissement territorial des crucesignati... cit., p. 235-243.
68 L. Delisle, Chronologie des baillis et sénéchaux royaux... cit., p. 250. A. Molinier, Correspondance administrative d'Alfonse de Poitiers... cit., n. 313, 809, 1255, 1952, 1954.
69 En 1265, le lignage achète Bram et Pexiora ; Guiraud de Voisins acquiert de nombreux droits en Termenès en 1303 et 1307. En 1304, Pierre de Voisins est seigneur de Rennes-les-Bains et Gilles de Voisins seigneur d’Arques, aux côtés de leur frère Guillaume de Voisins. Gillia, fille de Pierre de Voisins, épouse Robert de Sens, prévôt de Carcassonne en 1262-1263 (A. Friedlander, Les agents du roi face aux crises de l’hérésie en Languedoc, vers 1250 – vers 1350, dans Cahiers de Fanjeaux, 20, Effacement du catharisme (XIIIe-XIVe s.) ?, Toulouse, 1985, p. 199-220). La veuve de Guillaume de Voisins se remarie avec Étienne Dardez.
70 Cortez, p. 48-50 ; L Boniface VIII, n. 2188, avec Guillaume Ebrardi, envoyés de Charles II auprès du pape pour négocier le traité avec le roi d’Aragon, le 18 décembre 1296.
71 Delisle, p. 254. Th. Pécout, Mémoire de l’État, gestion de la mémoire. À propos de deux cartulaires de la chambre des comptes de Provence (1278 - c. 1332), dans Memini. Travaux et documents, Société des études médiévales du Québec, 8, 2004, p. 29-58. Jean de Burlats son fils est châtelain à Canossa en 1274. Jean de Burlats le père fut aussi envoyé à Tunis en 1273 en mission diplomatique. Il exerce le justicérat Citra en 1271-1272, et un homonyme possède le castrum de Collesano, et à sa suite Pierre son fils (S. Morelli, Per conservare la pace... cit., p. 209 n. 72, p. 218, p. 224 et n. 122, p. 244, p. 282). S. Pollastri, Le lignage et le fief... cit., p. 119 et n. 323.
72 Sur son activité, et celle d’Alain de Luzarches : M. Dejoux, Les enquêtes de Saint Louis. Gouverner et sauver son âme, Paris, 2014, p. 122-123 ; Th. Pécout, Aux origines d’une culture administrative : le clergé des cathédrales et la genèse d’une comptabilité princière en Provence à la fin du XIIIe siècle, dans Th. Pécout (dir.), De l’autel à l’écritoire. Aux origines des comptabilités princières en Occident (XIIe-XIVe siècle), Actes du colloque international d’Aix-en-Provence, 13-14 juin 2013, Paris, 2015, p. 49-67.
73 AD 13, B 206. J.-P. Boyer, Construire l'État en Provence. Les "enquêtes administratives" (mi XIIIe - mi XIVe siècle), dans B. Demotz (dir.), Des principautés aux régions dans l'espace européen, Université Jean Moulin – Lyon 3, Lyon, 1994, p. 1-26. Le royaume de Naples produit sa propre législation, mais concernant le sénéchal de l’hôtel, ainsi un mémorandum sous les règnes de Charles II et de Robert : BnF, ms latin, 4625A, fol. 119, Hec sunt illa que spectant ad officium senescallie secundum diversa tempora obtenta ; RCA, 31, n. 119, p. 170-175.
74 Boüard, n. 916. La lettre est adressée concomitamment aux grands, prélats et officiers des comtés provençaux, ainsi qu’à son prédécesseur, Guillaume de Gonesse, qui doit lui remettre ses acta et mandata pendants. Le roi lui accorde la grâce de retenir sur ses gages 50 livres tournois pour lui-même. Il touche aussi 60 livres annuelles pour son usage personnel et celui de sa familia. Gautier est attesté comme sénéchal jusqu’au 2 mai 1277 (Boüard, n. 929, 939-940, 942, 949-951, 966, 979, 993, 997, 1004, 1015, 1038).
75 Voir la liste des lieutenants de sénéchaux dans Cortez, p. 109-123. On doit exclure de cette liste l’archevêque d’Aix Philippe, ce qui fait de 1258 la première attestation d’un lieutenant de sénéchal. Mais en 1315, le juge mage Jean de Cabassole parle désormais d’un officium pour désigner cette lieutenance (AD 13, B 144, fol. 168v).
76 Sur le noble Bertrand de Marseille († c. 1322), des Signes Évenos : Th. Pécout (dir.), J.-L. Bonnaud, S. Burri, J. Drendel, É. Sauze (éd.), L’enquête générale de Leopardo da Foligno en basse Provence (mars-mai 1332), Paris, 2014, p. 435 n. 276 et fig. 37 p. 61-65. Lorsque Raymond de Baux est nommé sénéchal, le 31 janvier 1315, il succède dans le gouvernement de la Provence à Bertrand de Marseille, et non pas au sénéchal en titre jusqu’en 1314, Tommaso di Marzano (Ch. Perrat, Actes du roi Robert d’Anjou relatifs à la Provence, extraits des registres détruits des archives de Naples (1314-1316), dans Bulletin philologique et historique du Comité des travaux historiques et scientifiques, 1946-1947, Paris, 1950, p. 119-195, n. 53).
77 Raymond de Baux fut aussi sénéchal de Piémont, sans compter Philippe de Laveno, actif diplomatiquement dans la zone à la suite de son père Robert. Je renvoie à la communication de Riccardo Rao dans le présent volume. G. M. Monti, La dominazione angioina in Piemonte, Turin, 1930, p. 261-264. R. Rao, La circolazione degli ufficiali... cit. ; P. Grillo, Un dominio multiforme... cit.
78 AD 13, B 267, fol. 104-104v, 26 janvier 1307. H. Bouche, Chorographie ou Description de Provence, et l'histoire chronologique du même pays, 2, Aix, 1664, p. 1043 ; V.-L. Bourrilly et R. Busquet, La Provence au Moyen Âge, p. 306-307. Un juge mage et un trésorier du comté de Forcalquier sont signalés en octobre 1307 et avril 1308 : AD 13, B 415 et B 435, et ibidem p. 306 n. 5. Bonfils de Garda, juge mage et des premiers appels du comté de Forcalquier en 1307, et dans le même temps juge des seconds appels de Provence, devient juge mage et des premiers appels de Provence en 1309 (AD 13, B 2, fol. 241v).
79 Sant’Elpidio a Mare, prov. Ascoli Piceno, Marches, diocèse de Fermo, juste à la limite du Regno, mais dans les territoires pontificaux. Gerardo di Sant’Elpidio est attesté comme sénéchal du comté de Forcalquier le 24 janvier 1308 : AD 13, B 1372, fol. 61-70 (mai-juin 1307) et 100v. On le retrouve justicier et capitaine de Naples en 1309 (R. Caggese, Roberto d’Angiò e i suoi tempi, Florence, 1922-1930, I, p. 340), puis viguier du roi à Lucques en 1313 (ibidem, p. 199). Il est sans doute apparenté à Giacomo di Sant’Elpidio, qui fait une carrière d’officier subalterne en Provence, comme notaire de cour à Nice (mai 1324, Th. Pécout [dir.], L’enquête de Leopardo da Foligno dans le Comté de Forcalquier... cit.) et à Digne (octobre 1332 et décembre 1333, Fl. Varitille, La ville de Digne à la fin du Moyen Âge. Politique et société, mémoire de Master 2, Université de Paris I, 2012 (dactylographié), Édition du cartulaire, n. 42 ; Th. Pécout (dir.), G. et G. Giordanengo (éd.), L’enquête générale de Leopardo da Foligno dans la baillie de Digne (septembre - octobre 1332), Paris, 2012, p. 110 et Th. Pécout (dir.), Ch. Beck, G. Butaud, M. Hébert, D. L. Smail, A. Venturini (éd.), L’enquête générale de Leopardo da Foligno en Provence (1332-1334) : réformation et vérifications, Paris, 2015, p. 453-454 notamment). Sont-ils de la même famille que le dominicain Alessandro di Sant’Elpidio, évêque de Zara en 1312 puis de Crète en 1314 ? Ou de son homonyme, le prieur général des Ermites de Saint Augustin (1312-1326) puis évêque de Melfi (1326-1328) ? Ce dernier est un théologien formé au studium de Paris et qui gravite dans le proche entourage de Jean XXII, pour la défense duquel il rédige son De ecclesiastica potestate vers 1322-1323. C. Casagrande, s. v. Fassitelli, DBI, 45, Rome, 1995, p. 288-291 ; J. Miethke, De potestate papae. Die päpstliche Amtskompetenz im Widerstreit der politischen Theorie von Thomas von Aquin bis Wilhelm von Ockham, Tübingen, 2000 ; R. Lambertini, Alessandro di Sant’Elpidio teorico del potere papale : un primato « romano », dans M. Allegrini Teodorini (éd.), Santità e società civile nel medioevo. Esperienze storiche della santità agostiniana, Tolentino, 2005, p. 69-76 ; D. Lett, Un procès de canonisation au Moyen Âge. Essai d’histoire sociale. Nicolas de Tolentino, 1325, Paris, 2008.
80 Riccardo di Gambatesa est sénéchal des comtés au moins à compter du 2 mars 1308 (AD 13, B 437 ; Cortez, p. 53).
81 Th. Pécout, Diplômes, diplomates et diplomatie : le registre du maître rational Jean de Revest, procureur de la reine Jeanne in Romana Curia, 1343-1347, dans Z. Kordé et I. Petrovics (dir.), La diplomatie des États angevins aux XIIIe et XIVe siècles, Actes du colloque international de Szeged, Visegràd et Budapest, 13-16 septembre 2007, Rome-Szeged, 2010, p. 251-287.
82 Ch. Perrat, Actes du roi Robert d’Anjou... cit., n. 53-62. Voir infra n. 102.
83 Cortez, p. 61.
84 J.-L. Bonnaud, La transmission de l’information administrative en Provence au XIVe siècle : l’exemple de la viguerie de Forcalquier, dans Provence historique, 46, 1996, p. 211-228 ; M. Hébert, L’ordonnance de Brignoles, les affaires pendantes et l’information administrative en Provence sous les premiers Angevins, dans C. K. Boudreau, C. Fianu, C. Gauvard et M. Hébert (dir.), Information et société en Occident à la fin du Moyen Âge, Paris, 2004, p. 41-56.
85 M. Hébert, L’ordonnance de Brignoles... cit..
86 N. Coulet, Aix, capitale de la Provence angevine, dans L’État angevin. Pouvoir, culture et société entre XIIIe et XIVe siècle, Actes du colloque international (Rome-Naples, novembre 1995), Paris-Rome, 1998, p. 317-338 ; Id., L’enquête de 1379 dans la viguerie d’Aix, dans Th. Pécout (éd.), Quand gouverner c’est enquêter... cit., p. 443-458.
87 V.-L. Bourrilly et R. Busquet, La Provence au Moyen Âge, p. 313-315 ; J.-P. Boyer, Construire l'État en Provence... cit. G. Giordanengo, Qualitas illata per principatum tenentem. Droit nobiliaire en Provence angevine (XIIIe-XVe siècle), dans N. Coulet et J.-M. Matz (dir.), La noblesse dans les territoires angevins à la fin du Moyen Âge, Actes du colloque international d’Angers-Saumur, 3-6 juin 1998, Paris-Rome, 2000, p. 261-301.
88 Th. Pécout, La déambulation comme mode de gouvernement. L’enquête princière générale en Provence angevine, XIIIe-XIVe siècle, dans Des sociétés en mouvement. Migrations et mobilité au Moyen Âge, XLe Congrès de la Société des historiens médiévistes de l’enseignement supérieur public, Nice, 4-7 juin 2009, Paris, 2010, p. 295-314. Sur le détail de ces statuts réglant la circulation du sénéchal dans les terres provençales : Th. Pécout (dir.), L’enquête générale de Leopardo da Foligno en Provence... cit., p. 187-189.
89 M. Hébert, Les ordonnances de 1289-1294 et les origines de l'enquête domaniale de Charles II, dans Provence historique, 36, 1986, 143, p. 45-57. Th. Pécout, Indagatio diligens et solers inquisitio. L’enquête princière, domaniale et de réformation : France actuelle, Provence angevine, XIIIe-XIVe s., dans A. Aguiar Andrade, J. L. Inglês Fontes (dir.), Inquirir na Idade Média : espaços, protagonistas e poderes (séculos XIII-XIV). Tributo a Luís Krus, Lisbonne, 2015, p. 47-78.
90 V.-L. Bourrilly et R. Busquet, La Provence au Moyen Âge... cit., p. 313-315, pour ces divers statuts. Sur le juge mage, voir la contribution de Jean-Luc Bonnaud dans ce volume.
91 V.-L. Bourrilly et R. Busquet, La Provence au Moyen Âge... cit., p. 306 et 313-318. M. Hébert, Les ordonnances de 1289-1294... cit. G. Giordanengo, Qualitas illata per principatum tenentem. Droit nobiliaire... cit.
92 Je renvoie à deux communications sur ce moment : Th. Pécout, Entre Provence et royaume de Naples (XIIIe-XIVe siècles) : des carrières ecclésiastiques angevines ?, dans J.-P. Boyer (dir.), Identités angevines. Entre Provence et Naples (XIIIe-XVe siècle), Aix-en-Provence, 2016, p. 17-42 ; Id., Robert d’Anjou et la Provence en 1314, dans X. Hélary, O. Canteaut, J. Théry (dir.), 1314, une Europe en crise ? La conjoncture politique européenne à la mort de Philippe le Bel, Colloque de Paris Sorbonne, 2-4 octobre 2014, à paraître.
93 Cortez, p. 43 ; Th. Pécout, Le personnel des enquêteurs en Provence angevine... cit., p. 345.
94 Bérenger Gantelmi († 1304), seigneur de Graveson et Albaron, fils de Jacques Gantelmi († 1288), proche collaborateur et chef de guerre de Charles d'Anjou lors de la conquête de 1265-1268, qui fut aussi sénéchal de Lombardie en 1260 et vicaire à Rome en 1263 et qui dispose de nombreux fiefs dans le Regno. Le frère de Bérenger, Rostaing († 1310), est lui-même officier et mène plusieurs missions diplomatiques. Attesté dans le royaume dès 1269, écuyer de la Terra di Labor en 1283, il est chargé du contrôle du marquisat de Montferrat en 1292, après son sénéchalat en Provence. Raymond Gantelmi, fils de Bérenger et petit-fils de Jacques, est coseigneur de Graveson et châtelain d’Albaron en 1304, lieutenant du sénéchal Filippo di Sangineto en 1336-1338, viguier de Nice (en 1326, 1334 et 1338) et de Marseille (1324). Il épouse Giraude de Sabran et décède vers 1345-1348. Cortez, p. 42-43 et 45-47 ; M. Hayez, s. v. Cantelmo, dans DBI, 18, Rome, 1975, p. 266 et 274-275 ; J.-L. Bonnaud, Un État en Provence... cit., n. 499 et 501 ; É.-G. Léonard, La jeunesse de Jeanne Ire... cit., I, p. 26-27.
95 Il paraît dans l’historiographie sous les noms de Giovanni Scotto ou Jean Lescot. Serait-il originaire de Piacenza, où les Scotti sont de puissants marchands guelfes ? Cela paraît improbable, compte tenu du profil nobiliaire de Jean Scoti. On lui donne aussi des racines « françaises », sans plus de preuves. Ce miles de l’hôtel de Charles d'Anjou porte également le titre de conseiller. Il est implanté dans le Regno où il se marie avec une Filippa. Justicier des Abruzzes en 1277-1279, il est envoyé comme capitaine en Albanie et dans le duché de Durazzo en 1279-1281. Son sénéchalat en Provence en 1288 correspond à une période de reprise en main de ses possessions par Charles II, de retour de captivité. C’est donc non seulement un chef de guerre, mais un homme à la fidélité éprouvée. Jean porte ensuite le titre de maréchal en 1292, puis de sénéchal de l’hôtel en 1294. Il disparaît avant le 8 mai 1294. Cortez, p. 45 ; P. Durrieu, Les archives angevines de Naples... cit., 2, p. 338 ; S. Morelli, Per conservare la pace... cit., p. 104 n. 110, p. 112, 114, 220 et n. 109, 221, et pour ses biens en Pouilles, ibidem, p. 277 n. 101, p. 281 n. 113, p. 288. A. Kiesewetter, Die Anfänge der Regierung... cit., p. 451-454 et p. 579-583 pour les statuts royaux qu’il a promulgués en 1288.
96 Cortez, p. 50-51 et 53-54 ; Th. Pécout, Les deux séjours du roi Robert... cit., p. 283 n. 21. Rinaldo di Letto († c. 1318) est vraisemblablement le frère de Francesco di Letto, justicier du Principat en 1309. Leur lignage provient de Sulmona (prov. L’Aquila) dans les Abruzzes. Rinaldo di Letto est attesté comme maréchal de la curie romaine en 1294, et maître d’hôtel, conseiller et familier du roi de Sicile. Il est justicier de la Terre de Bari en 1304 puis sénéchal et capitaine général de Piémont (1304-1308). Rinaldo paraît encore en 1317 comme vicaire de Robert à Rome. A. Cutolo, Il regno di Sicilia negli ultimi anni di vita di Carlo II. d’Angiò, Milan-Rome-Naples, 1924, n. 44, 96 et 99 ; G.M. Monti, La dominazione angioina in Piemonte... cit., p. 76 ; M.T. Caciorgna, L'influenza angioina in Italia : gli ufficiali nominati a Roma e nel Lazio, dans Mélanges de l'École française de Rome. Moyen Âge, Temps modernes, 107-1, 1995, p. 173-206 ; A. Jamme, Formes dissociées ou polyvalence de l’office curial ? La cité du pape et le maréchal du siège apostolique (XIIIe-XVe siècle), dans A. Jamme et O. Poncet (dir.), Offices, écrit et papauté (XIIIe-XVIIe siècle), Paris, 2007, p. 313-392, ici p. 367 ; R. Rao, La circolazione degli ufficiali... cit.
97 Riccardo di Gambatesa († ap. 1326), originaire du Molise, est justicier d’Abruzzo Ulteriore, maître d’hôtel et familier du roi, sénéchal de Piémont (1309-1310). Un mariage lui permet de s’implanter en Provence. Il porte le titre de chambellan, après ses sénéchalats, puis de capitaine général en Piémont en 1319-1320, de viguier et capitaine ad guerram à Gênes (1319-1322). C. Minieri Riccio, Genealogia di Carlo II d'Angiò, dans Archivio Storico per le Province Napolitane, 7, 1882, p. 476 et 481-484 ; Cortez, p. 53-56 ; G. M. Monti, La dominazione angioina... cit., p. 117, 124 ; F. Delle Donne, s. v. Gambatesa, Riccardo, dans DBI, 52, Rome, 1999, p. 87-89 ; R. Rao, La circolazione degli ufficiali... cit., p. 243 n. 53, p. 245 ; Ph. Quinlan, Mutation de l’administration angevine, p. 126. Th. Pécout, Les deux séjours du roi Robert... cit., p. 283-284 n. 21.
98 Cortez, p. 47-48. Les Solliès sont possessionnés à l’origine dans la région de Toulon et Hyères. Alfant de Solliès († ap. 1296), dont la famille est aussi attestée dans le chapitre cathédral Saint-Sauveur, est qualifié de miles d’Aix. Il reçoit en viager de Charles II La Clue (com. Moustiers-Sainte-Marie, Alpes-de-Haute-Provence), qualifiée de « bastida de Clusa juxtam villam de Mosteriis », le 23 février 1294, pour un revenu annuel de 26 livres coronats, sauf le majus dominium et le merum imperium (AD 13, B 263, fol. 21 et RCA, 49, n. 177, p. 99). N. Coulet, Aix-en-Provence. Espace et relations d’une capitale, Thèse d’État, Université d’Aix-en-Provence, 1979 (dactylographié), 4, p. 30-31.
99 Philippe de Laveno († c. 1302) provient d’une famille anoblie de Sisteron. En 1278, il hérite de la situation confortable bâtie par son père Robert, professeur de droit civil, conseiller du prince, époux de Sofia di Ceva, et premier viguier de Marseille en 1257. Robert a été comblé de concessions par la comtesse Béatrice de Savoie, dont il est juge, puis par Charles d'Anjou (Valernes, Dromon, Thèze et Vaumeilh, puis Orpierres, L’Étoile, Lagrand, Sainte-Colombe, Serres, Sigoyer, dans la région sisteronaise), outre des droits dans les régions de Mondovì et de Ceva perdus vers 1276. On le trouve en février 1267 aux côtés de Philippe de Montfort et de l’archevêque de Salerno, pour une ambassade auprès de Clément IV (L Clément IV app., n. 1174) et il œuvre à la soumission du Piémont (traité du 29 mai 1270 avec l’évêque d’Asti, conclu par Robert : AD 13, B 368). Philippe de Laveno est membre de l’hôtel du roi, puis baile de Digne (1269-1272), souvent dans l’entourage d’Alain de Luzarches et de Guillaume de Gonesse, et enfin justicier de la Terra di Labour et du comté de Molise (1279-1280) puis vicaire du roi à Rome (1281-1283). Son sénéchalat lui est confié lors de la captivité de Charles II, et on le retrouve comme otage du roi d’Aragon en 1295. En 1291-1292, il mène une importante enquête domaniale par ordre du roi, sur les droits de l’archevêque d’Embrun dans la vallée de l’Ubaye (AD 06, Ni Mazzo 13/2, Barcelonnette, n. 2, fol. 1-6v). De proches conseillers du roi sont ses exécuteurs testamentaires en 1292, tel le Prêcheur et évêque de Sisteron Pierre de Lamanon (AD 13, B 394). Cortez, p. 43-45 ; P. Peyrache, Une famille provençale au XIIIe siècle, les Laveno, DES d’Histoire, faculté des Lettres d’Aix-en-Provence, 1962 (dactylographié). Sur Robert de Laveno : R. Busquet, L’histoire d’une consultation du XIIIe siècle sur le merum imperium et l’origine des cas royaux en Provence, dans Études sur l’ancienne Provence. Institutions et points d’histoire, Paris, 1930, p. 51-68.
100 Cortez, p. 54-55 ; R. Caggese, Roberto d’Angiò... cit., I, p. 51 n. 4 et 120 n. 1. D’une grande famille napolitaine, Niccolò Caracciolo, sénéchal de l’Hôtel du duc de Calabre au début de 1309, devient viguier du roi Robert en Romagne en 1310-1312, et n’exerce comme sénéchal de Provence que dans le second semestre 1312.
101 Possessionné en Terra di Lavoro et Terra di Otranto, Tommaso Marzano († c. 1339) est maréchal avant 1309, puis capitaine de Naples en 1310, comte de Squillace et grand amiral en 1313. Il semble avoir été nommé sénéchal de Provence et Forcalquier pour des motifs militaires : l’essentiel de son office consiste à assister Hugues de Baux, sénéchal de Piémont et vicaire en Lombardie, dès septembre 1313, face aux Visconti et à leurs alliés. Il participe aux opérations de Sicile et au siège de Trapani en 1314. En avril 1318, il opère à Benevento, aux côtés de Bertrand de Baux, comte de Montescaglioso. Son épouse Giovanna est la fille du logothète Bartolomeo di Capua. Cortez, p. 55 ; É.-G. Léonard, La jeunesse... cit., 1, p. 24 et 77 ; D. Santoro, s. v. Marzano, Tommaso, dans DBI, 71, Rome, 2008, p. 450-452.
102 Raymond de Baux, fils de Bertrand de Baux († 1305) comte d’Avellino, épouse d’abord Jeanne, fille de Jean Britaud de Nangis († 1278), grand panetier de Philippe III et connétable de Charles d'Anjou. Il se remarie avec Stéphanie de Baux Puyricard. Raymond est attesté en 1277 comme familier et valet, puis combat en Albanie et en Sicile. Capitaine général de la guerre en 1294, membre du conseil de Charles Martel en 1295, il réside davantage en Provence à partir de 1304. Son lignage s’allie aux Savoie-Achaïe. Il est nommé sénéchal de Piémont en 1308. Après son sénéchalat de Provence, il gravite dans l’entourage de Charles de Calabre, avec qui il combat en Calabre à partir de 1320, et où il décède l’année suivante. Le fils de Raymond, Hugues de Baux († 1350), joue dans les premières années du règne de Jeanne un rôle politique notable. Cortez, p. 56 et 64-65 ; É.-G. Léonard, La jeunesse, 1, p. 28-30 et ad indicem ; J.-Fr. Guiraud, s. v. Del Balzo, Raimondo, dans DBI, 36, 1988, p. 317-320.
103 Filippo di Sangineto procède d’une famille parmesane implantée dans l’administration angevine dans les années 1290 et solidement établie dans le Val de Crati. Fils de Ruggiero di Sangineto, comte d’Arena et de Carigliano († 1309), et peut-être de Giacoma di Lauria, il devient comte d’Altomonte (province de Cosenza) en 1342 et marie une Sanseverino. Il exerce comme justicier du Val di Crati e Terra Giordana et comme grand justicier du royaume. Il accompagne le duc de Calabre en Toscane comme capitaine et vicaire général (1327-1328). À la mort de Robert, il doit se retirer, mais le soutien de Clément vi et du légat Aimery de Chalus lui permet de recevoir d’abord le justicérat de la Terre de Labour (1344-1345), puis de recouvrer le sénéchalat de Provence, moyennant une alliance avec Louis de Tarente. Il est inhumé dans le chœur de Santa Maria della Consolazione d’Altomonte. L. Bertano, Serie dei siniscalchi della Provenza... cit., p. 62-63 ; Cortez, p. 62-64 et p. 65-67 ; R. Caggese, Roberto d’Angiò... cit., II, p. 110-111 ; É.-G. Léonard, La jeunesse... cit., 1, p. 214-216, 370, 443, 556-557 et n. 2, et ibidem, 2, p. 63-64 et 73-74 ; S. Pollastri, Une famille de l’aristocratie napolitaine sous les souverains angevins : les Sanseverino (1270-1420), dans MEFRM, 103-1, 1991, p. 253-254 et 260 ; L. De Angelis (éd.), I consigli della Repubblica fiorentina. Libri Fabarum XIII e XIV (1326-1331), Rome, 2000, p. xxv-xxvi, 164, 220, 239 et 263. Pour les proches du duc de Calabre, on peut consulter la liste des chevaliers, barons et clercs de son hôtel qu’a éditée Sylvie Pollastri, La noblesse napolitaine sous la dynastie angevine : l’aristocratie des comtes (1265-1435), doctorat de l’université Paris X-Nanterre, 1994 (dactylographié), Annexes, p. 903-904.
104 Giovanni d’Acquabianca († 1334) paraît de rang nobiliaire secondaire et doit sa carrière à sa formation intellectuelle. Simple miles, il est issu du studium de Naples où il enseigne le droit civil en 1316. Devenu maître rational de la grande cour, il conduit plusieurs missions pour le compte du roi, notamment pour négocier le mariage de Charles de Calabre avec Catherine d’Autriche. Envoyé en Lombardie, il est viguier de Brescia en 1319 et attache à son profil de juriste une carrière d’homme d’arme. En 1318, il paraît comme jurisconsulte et conseiller du roi, aux côtés de Matteo Filomarino (C. Minieri Riccio, Genealogia di Carlo II d'Angiò... cit., p. 469-472). Seul dans ce cas, il a d’abord été maître rational de Provence en 1322-1329, avant d’accéder au sénéchalat. En 1325, il épouse Sancia di Magdalone, dame d’honneur de l’hôtel de la reine Sancha puis de la princesse Jeanne (LSCu France, Jean XXII, n. 3924, 3959, 4027, 4034, 4087, 4161, 4215 et 4218, entre août 1329 et juin 1330 ; Cortez, p. 61 et 216 ; R. Caggese, Roberto d’Angiò... cit., I, p. 679, n. 1, et 2, p. 310 n. 1 ; É.-G. Léonard, La jeunesse... cit., 1, p. 159 n. 5 ; M. Del Treppo, s. v. Acquabianca, Giovanni d’, dans DBI, 1, Rome, 1960, p. 159-160 ; R. Rao, La circolazione degli ufficiali... cit., p. 281).
105 Cortez, p. 56-59. Le miles calabrais Leone di Reggio († c. 1336) est nommé sénéchal le 20 janvier 1320 (AM Marseille, BB 12, fol. 39-39v). Il paraît comme notaire en 1296, lors d’une mission diplomatique auprès des Byzantins. Nous pensons qu’il provient de la cour ducale de Robert. Il est maître des comptes en 1309, maître rational de l’hôtel du roi (1314-1320), huissier et grand sénéchal du royaume (1321-1326) et collabore étroitement avec Charles de Calabre en vue de la reconquête de la Sicile. Il lie sa famille aux Ruffo, comtes de Catanzaro. Cortez, p. 59 et 213 ; R. Caggese, Roberto d’Angiò... cit., I, p. 406 n. 1, p. 655 n. 4 et 2, p. 198, 213 et 220 ; A. Kiesewetter, Die Anfänge... cit., p. 358 n. 5 ; G. Yver, Le commerce et les marchands dans l'Italie méridionale au XIIIe et au XIVe siècle, Paris, 1903, p. 260 ; A. Kiesewetter, La cancelleria angioina, dans L’État angevin... cit., p. 407 ; M.T. Caciorgna, L'influenza angioina... cit. ; Th. Pécout, Les deux séjours du roi Robert... cit., p. 298 n. 105.
106 Rinaldo di Scaletta provient de la noblesse sicilienne de Milazzo (Scaletta Zanclea, prov. Messine), qui a opté pour le parti des Angevins. Il est peut-être lié à Leone di Reggio, et partage du moins avec lui de mêmes intérêts en faveur des opérations siciliennes préparées par le duc de Calabre. Le successeur de Rinaldo au sénéchalat est nommé le 31 janvier 1329. Un Rinaldo di Scaletta, seigneur de Columbarii, est attesté dans l’entourage de Jeanne en mars 1363 (LSCu France, Urbain V, n. 303) (LSCu France, Jean XXII, n. 3734, 3746, en décembre 1328) Cortez, p. 59-60 ; R. Caggese, Roberto d’Angiò... cit., I, p. 127 ; C. Minieri Riccio, Genealogia di Carlo II d'Angiò... cit., p. 469-472 ; H. Bresc, La « mala signoria » ou l’hypothèque sicilienne, dans L’État angevin... cit., p. 594). Th. Pécout, Les deux séjours du roi Robert... cit., p. 298 n. 105.
107 Maître Jean Baude († av. 1323) procède de Fréjus, mais il s’implante à Draguignan (Var) où il accumule de nombreux biens. Ce notaire attesté dès 1298 accède à l’office de clavaire de Draguignan (1304 et 1308), avant de devenir rational de la Chambre des comptes d’Aix (1310-1315), puis châtelain de Barjols (1317). Il doit son accession au sénéchalat en 1317 à la nomination de l’archevêque de Capoue, Enguerrand de Stella, dont il est visiblement un protégé. La fin de son office est marquée par un procès et sa révocation. Cortez, p. 56-59 ; J.-L. Bonnaud, Un État en Provence... cit., n. 185. Voir en dernier lieu les remarques de Michel Hébert : Th. Pécout (dir.), M. Hébert (éd.), L’enquête générale de Leopardo da Foligno dans la viguerie de Draguignan (janvier – mars 1333), Paris, 2013, p. 50-52, 84-85, 175-176 ; Th. Pécout (dir.), L’enquête générale de Leopardo da Foligno en Provence... cit., p. 225-226 ; J.-L. Bonnaud, Les officiers comptables des comtés de Provence et Forcalquier et leurs comptes (XIVe-XVe siècle), dans Th. Pécout (dir.), De l’autel à l’écritoire... cit., p. 269-287 ; Th. Pécout, Les maîtres rationaux de Provence au XIVe siècle, dans A. Jamme (dir.), Le pouvoir de compter et décompter. Structure et contrôle des comptabilités des XIIIe-XVe siècles, à paraître. Sur l’affaire de sa destitution : M. Hébert, L’enquête de 1319-1320 sur la cavalcade en Provence, dans Th. Pécout (dir.), Quand gouverner c’est enquêter... cit., p. 364-365 ; J.-P. Boyer, Construire l'État en Provence... cit.). Un Rostaing Baude est chanoine de Saint-Michel de Frigolet en 1328-1329 (LC Jean XXII, n. 43242 et 44996).
108 M. Hébert, Aux origines des états de Provence : la cavalcade générale, dans Actes du 110e Congrès national des Sociétés savantes (Montpellier, 1985), Histoire médiévale, 3, Paris, 1986, p. 53-68. M. Hébert, Une identité mise en scène. Les premières assemblées représentatives dans les comtés de Provence et de Forcalquier (XIIIe-début XIVe siècle), dans J.-P. Boyer (dir.), Identités angevines. Entre Provence et Naples (XIIIe-XVe siècle), Aix-en-Provence 2016, p. 183-194.
109 Raymond de Baux est bien nommé sénéchal le 31 janvier 1315, et il est cité comme tel en avril (Ch. Perrat, Actes du roi Robert d’Anjou... cit., n. 53 et 71bis), puis jusqu’à la fin juillet. Il semble qu’il ait été nommé en vue des négociations à poursuivre auprès des cardinaux dispersés depuis l’échec du conclave de Carpentras en 1314. Une première commission avait été dépêchée auprès d’eux à l’été 1314. Quand le conseil de ville de Marseille sollicite Raymond, le 9 mars 1315, afin qu’il prête serment de respecter ses chapitres de paix, le comte d’Avellino lui signifie le 11 juin qu’il n’a consenti à exercer sa charge que pour les questions diplomatiques regardant la Curie, et que le reste de ses prérogatives échoie à son lieutenant (AM Marseille, AA 71).
110 Le rameau des Baux de Berre est allié depuis 1308 à la famille royale. Les Baux adoptent en outre les dévotions dynastiques et préférences spirituelles des Angevins : Fl. Mazel, Piété nobiliaire et piété princière en Provence sous la première maison d’Anjou (vers 1260-vers 1340), dans N. Coulet et J.-M. Matz (dir)., La noblesse dans les territoires angevins... cit., p. 527-551.
111 Cortez, p. 54-56 et 112-115, qui ignore le sénéchalat de Bertrand de Marseille. Dès octobre 1313 et jusqu’en juillet 1314, Bertrand de Marseille est lieutenant et semble agir seul, le sénéchal Tommaso Marzano n’étant plus cité après juin 1313. Le 15 avril 1315, c’est le juge mage Jean de Cabassole qui officie comme lieutenant, après avoir remplacé Bertrand en cette fonction. Ce dernier semble sénéchal jusqu’au 31 janvier 1315, quand Robert nomme à sa succession Raymond de Baux (C. Minieri Riccio, Genealogia di Carlo II d'Angiò... cit., p. 240 et Ch. Perrat, Actes du roi Robert d’Anjou... cit., n. 53, qui citent le même Registre angevin 203, fol. 193, parlant tous les deux de succession, quand le seul Charles Perrat qualifie Bertrand de « lieutenant » ; nous supposons que ce terme désignait son titre officiel, que le sénéchalat était vacant et que Bertrand exerçait la fonction de fait depuis plusieurs mois).
Auteur
Université Jean Monnet, Saint-Étienne, UMR LEM-CERCOR - thierry.pecout@univ-st-etienne.fr
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