Les adaptations de l’armée romaine aux modes de combat des peuples des steppes (fin IVe-début VIe siècle apr. J.-C.)
Texte intégral
1Au Ve siècle apr. J.-C., les Huns, puis les peuples proto-turcs (Bulgares et Sabirs), ont posé aux armées romaines des problèmes militaires sans commune mesure avec les difficultés qu’avaient pu susciter les peuples des steppes précédemment rencontrés par l’Empire. Leur armement, mais surtout leurs capacités opérationnelles et organisationnelles rendent compte de cette situation. Or, la spécificité en ces domaines des Huns et des peuples proto-turcs n’a pas été toujours correctement appréciée, une lacune que je me propose de corriger dans cette contribution, tout en présentant une étude détaillée des solutions techniques et tactiques mises en place par l’outil militaire romain pour faire face à ces nouvelles menaces.
Le cadre historique
2Les Huns forment une coalition de peuples dont l’origine est à rechercher entre l’Altaï et le Lac Baïkal. Leur histoire demeure toutefois difficile à retracer avant le dernier quart du IVe siècle apr. J.-C1. Vers 360 au plus tard, les Huns, alors vraisemblablement dominés par un groupe de mongoloïdes turcophones, se déplacent des Steppes kazakhes et de l’est de la Volga aux territoires des Alains du Don puis des Greuthunges d’Ukraine, qu’ils soumettent. Ils razzient la Valachie en 376 et, à partir de 378, sont responsables de nombreuses incursions dans l’Empire romain2. Contre ce dernier, leurs premières campagnes d’envergure affectent, entre 395 et 398, la Thrace et simultanément les diocèses du Pont et d’Orient3. Depuis le Danube inférieur, ils dévastent ensuite le nord des diocèses de Mésie et de Thrace en 404-405 et 408-4094. Après s’être solidement installés dans la Plaine hongroise, sur la Tisza, ils menacent encore deux fois la Thrace en 422 et 434 afin d’obtenir de l’empereur Théodose II qu’il achète auprès d’eux la stabilité de ses frontières danubiennes5. Ce sont cependant les campagnes menées par Bleda et son frère Attila, puis par ce dernier seul à partir de 444-445, qui, en raison de leur ampleur, ont impressionné l’historiographie passée et moderne. Entre 441 et 447, les démonstrations de force que constituent les invasions en règle des diocèses de Mésie et de Thrace permettent aux deux rois de réaffirmer une autorité, voulue incontestable, sur l’Europe danubienne et ses marges septentrionales et orientales. De l’Empire d’Orient défait, ils obtiennent aussi les subsides nécessaires au maintien immédiat de leur pouvoir sur la vaste confédération de peuples que les potentats huns successifs avaient rassemblée autour d’eux depuis au moins une génération. Forts et cités fortifiés sont pris et quelquefois détruits, par deux fois l’armée régulière romaine est défaite en bataille rangée6. À partir de 450, Attila tourne ses ambitions vers l’Empire d’Occident, avec la volonté d’exercer sur ce dernier, et peut-être même en son sein, une autorité pérenne. Ses premiers objectifs de campagnes paraissent avoir été les principales régions de cantonnement et d’approvisionnement des grandes concentrations militaires occidentales. En 451, après avoir remonté les vallées du Danube et du Rhin, il franchit ce dernier fleuve probablement à la hauteur de Mayence, envahit la Germanie I et les Belgiques avant d’infléchir le cours de sa marche vers la Lyonnaise et Orléans. Repoussé puis défait lors de son repli, entre Troyes et Châlons-en-Champagne, il envahit l’Italie par les Alpes Juliennes à l’été 452 et dévaste le nord de l’Italie annonaire7. Après sa mort et la dislocation de son « empire », de rares incursions des Huns dans la partie orientale de l’Empire sont encore attestées entre 466 et le début du règne de Zénon8. De 395 au début de la décennie 450, la chronique militaire des Huns semble ainsi ponctuée d’une longue suite d’opérations militaires remarquables par leur rayon d’action, la diversité des armées affrontées et la récurrence des victoires hunniques.
3Les Huns ne formaient cependant que les premiers des nombreux peuples proto-turcs avec lesquels l’Empire d’Orient dut apprendre à composer. Au début de la décennie 460, les Sabirs de la moyenne Volga migrent vers le nord du Caucase, sous la pression des Avars. Solidement installés au nord-est du Kouban, ils razzient les diocèses du Pont et d’Orient au début du VIe siècle9. Leur précédent déplacement depuis le sud de la Sibérie occidentale avait surtout chassé les Oghurs – un rameau du grand ensemble des T’ie-Lö – des Steppes kazakhes, qu’ils occupaient depuis les migrations des Huns, vers les régions pontiques. Différents groupes, Kutrighurs, Utrighurs, s’installent entre Don et Dniepr, tandis que d’autres se mêlent aux Huns subsistants pour former plus à l’ouest les Bulgares. Ces derniers montent de profondes expéditions de dévastation de la Thrace entre 493 et 502. Au cours des deux premières, ils l’emportent sur les armées des maîtres des milices dépêchées pour les arrêter, poussant l’empereur Anastase à (re)construire les Longs Murs10.
Les modes de combat des Huns
4Comme leurs prédécesseurs originaires des steppes, les Huns faisaient reposer une large part de leur supériorité militaire sur leurs tactiques. Sur le champ de bataille, ils menaient contre leurs adversaires des assauts répétés et coordonnés d’archers montés, que venaient parachever les charges décisives de leur cavalerie « lourde » quand l’objectif initial de désorganiser la ligne adverse était atteint. Cette complémentarité entre les armes laissait cependant un rôle essentiel aux archers montés dans l’obtention des victoires hunniques : il était difficile de s’opposer efficacement à leur technique d’assaut et de repli rapides ; il l’était tout autant d’anticiper les directions de leurs attaques, à plus forte raison quand une partie d’entre eux avait dissimulé sa présence sur le champ de bataille ; vitesse et surprise faisaient enfin courir à ceux qui les affrontaient le risque de l’encerclement. Cependant, à la fin du IVe siècle, les armées romaines disposaient d’une solide expérience en matière d’affrontement avec les archers montés des steppes, forgée au moins depuis les premières rencontres avec les cavaliers parthes six siècles auparavant. Il convient donc d’attribuer à d’autres raisons que la supériorité tactique les succès des Huns en bataille rangée, en proposant un réexamen attentif du petit nombre de sources latines et grecques à nous faire connaître leurs modes de combats11.
5Dans la présentation générale qu’il donne des Huns, Ammien Marcellin, un contemporain de leurs premières opérations contre l’Empire, décrit de la façon suivante leurs pratiques militaires12 :
utque ad pernicitatem sunt leues et repentini, ita subito de industria dispersi uigescunt, et inconposita acie cum caede uasta discurrunt, nec inuadentes vallum nec castra inimica pilantes prae nimia rapiditate cernuntur
Et si, à fin de rapidité, ils sont peu équipés et imprévisibles, ils tirent en revanche leur force de s’être soudainement et délibérément séparés et, en ordre de bataille dispersé, ils se déplacent en faisant un grand carnage ; du fait aussi de leur trop grande rapidité, on ne les voit pas se jeter sur le retranchement ni piller le camp adverse.
6Précédemment, Ammien avait émis un jugement sur les spécificités tactiques des Huns qui, même poussés à la bataille, maintenaient une forme d’organisation (cuneatim, cit. n. 11). Cette proximité dans le texte a laissé penser aux traducteurs et aux commentateurs que la phrase à peine citée et traduite constituait elle-aussi une appréciation des qualités tactiques des Huns. Il n’en est rien. Ammien cherche à expliquer le contraste entre l’équipement léger et l’absence apparente d’ordre des cavaliers hunniques, qu’il attribue à juste titre à la recherche de la rapidité de mouvement, et les succès militaires des Huns : ils tirent précisément leur force (uigescunt) de leur capacité à couvrir de vastes espaces (discurrunt), en groupes dispersés (de industria dispersi, inconposita acie), afin de frapper des adversaires qui ne s’y attendent pas (cum caede uasta, nec […] cernuntur). Ammien considère que la supériorité militaire des Huns se situe au niveau opérationnel : au cours de leurs campagnes, ils auraient été capables de déplacer sur de grandes distances des forces que leur dissimulation rendait susceptibles de fondre sur leurs objectifs par surprise13. La victoire qu’ils remportent contre les Tervinges en 375 sert d’illustration parfaite à l’appréciation d’Ammien. Alors qu’ils viennent de défaire les Greuthunges d’Ukraine, dont ils ont attaqué les territoires à l’improviste (repentino impetu, ui subitae procellae), les Huns se trouvent confrontés à l’armée du tervinge Athanaric, campée à l’ouest du Dniestr. Tournant les forces de reconnaissance envoyées contre eux, ils franchissent de nuit la distance de plus de trente kilomètres qui les sépare du camp des Tervinges et, après avoir passé le fleuve à gué, ils l’attaquent par surprise sans même attendre le point du jour (ictu ueloci)14. Ammien attribue cet exploit à leurs capacités d’analyse du terrain et des situations militaires dans lesquels ils se trouvent placés (sunt in coniectura sagaces). Il faut lire ici surtout l’efficacité de leur propre système de reconnaissance, qui leur a permis de localiser les différents groupes adverses à éviter et à atteindre, puis de parcourir secrètement une telle distance de nuit, assorti du franchissement d’un fleuve. La stupeur que provoque chez les Tervinges cette manœuvre exceptionnelle (res noua, Ammien XXXI, 3, 7) montre bien les différences que les contemporains eux-mêmes percevaient entre les Huns et les autres peuples des steppes, les Tervinges connaissant bien les modes de combat des Sarmates et des Alains.
7Trois autres évènements militaires auxquels les Huns ont participé, comme adversaires ou alliés des Romains, pourraient confirmer leur pratique de la surprise au niveau opérationnel. En août 378, au début de la bataille d’Andrinople, l’arrivée et la charge inopinées de la cavalerie ostrogothique et alanique empêchent les cavaliers romains de protéger le flanc droit de leur infanterie, désormais exposé, et jouent ainsi un rôle important dans le délitement final et la défaite de la ligne impériale15. Or, les commentateurs peinent à expliquer l’échec des troupes d’éclairage romaines à reconnaître la position de la cavalerie ostrogothique et à prévenir son arrivée soudaine et dévastatrice16. L’une des explications pourrait être la distance à laquelle cette cavalerie a commencé son mouvement offensif vers le champ de bataille. Dans le récit d’Ammien, les Goths Tervinges semblent attendre avec anxiété son arrivée, pourtant prévue mais rendue incertaine par l’éloignement : procul agens et accita, nondum uenerat, XXXI, 12, 12 et ut […] equites sui redirent, quos adfore iam sperabant, XXXI, 12, 13. Ils avaient précédemment tenté de regrouper l’ensemble de leurs troupes dans l’éventualité d’un affrontement massif, mais manifestement les Ostrogoths n’avaient pu obéir immédiatement à l’injonction de rallier les autres Goths, étant donné leur position écartée. En effet, fin juillet, les Alains qui agissent avec ces derniers sont signalés aux Castra Martis, à environ dix jours de chevauchée au nord-ouest d’Andrinople17. Les Alains, qui avaient déjà eu tout le loisir d’imiter les modes de combat des Huns dont ils avaient subi la domination in Barbarico, opéraient de surcroît dans l’Empire accompagnés de mercenaires Huns18. Ils ont donc pu suggérer aux Ostrogoths d’adopter l’une des spécificités militaires de ces derniers, de ne pas rejoindre immédiatement le gros des forces hostiles à l’Empire mais, tout en restant en contact avec les autres groupes goths, de prévoir de terminer leur long et dissimulé mouvement offensif directement sur le champ de bataille, avec l’effet que l’on sait.
8Les principaux récits sur l’affrontement qui opposa, en 406, les troupes romaines de Stilichon et les Goths de Radagaise divergent. Un élément militaire apparaît cependant commun à l’Histoire nouvelle de Zosime et à l’anonyme Chronique gauloise de 452 : le rôle de la surprise et de l’encerclement dans la destruction de tout ou partie des envahisseurs. Or, le chroniqueur attribue spécifiquement l’exécution de cette manœuvre aux alliés huns de Stilichon, dont la présence est attestée dans toutes les sources19. L’encerclement a pu être réalisé de multiples façons, débordement, enveloppement, embuscade, mais il n’est pas interdit de penser que les Huns ont pu en l’occurrence agir par surprise au niveau opérationnel, comme ils l’avaient fait une génération auparavant.
9Une hypothèse que vient encore conforter le troisième et dernier épisode. En juin 451, une nuit précédant l’affrontement entre forces impériales et hunniques au Campus Mauriacus, un corps de Gépides, dont Attila appréciait la fidélité, tombe sur un groupe de Francs de la coalition romaine. Les pertes mutuelles auraient été importantes, selon l’historien Jordanès, mais les deux forces sont tout de même présentes dans leurs camps respectifs le jour du choc décisif20. L’épisode est souvent interprété comme la tentative par les troupes d’Attila de s’opposer à l’arrivée tardive des Francs proromains sur le champ de bataille, mais le retard des Francs à rejoindre la coalition impériale n’est attesté dans aucune source et leurs forces semblent au contraire avoir précocement rallié Aetius dans sa campagne21. Les pratiques militaires dont les Huns ont laissé le témoignage à partir de 375 permettent d’avancer une autre interprétation : Attila a probablement cherché à faire contourner nuitamment la coalition impériale par ses alliés Gépides de façon à produire, au moment de la bataille attendue, l’effet de surprise opérationnel caractéristique des armées hunniques. Trois quarts de siècle après leur première rencontre avec ces dernières, les troupes impériales étaient cependant au fait des pratiques des Huns : les Francs devaient avoir été placés en éveil et employés à patrouiller sur de longues distances afin d’éviter la dissimulation et la survenue inopinée des Gépides. L’échec de l’emploi d’une technique classique et éprouvée explique probablement, en plus des conditions de son repli hors des Gaules, « l’abattement » d’Attila, malignement rapporté par Jordanès, et rend compte surtout des multiples erreurs de commandement du souverain danubien, laissant le choix et la maîtrise du terrain à ses adversaires, comme nous le verrons22.
10L’explication technique générale apportée par Ammien Marcellin aux succès des Huns semble corroborée par quatre récits de bataille, survenues dans des contextes géographiques très éloignés, du Dniestr à la Champagne, sur un arc chronologique de plus de soixante-quinze ans. Les deux premiers récits ont été transmis par Ammien lui-même, mais les deux suivants l’ont été par trois chroniqueurs et historiens différents, écrivant indépendamment à près d’un siècle de distance. La principale particularité militaire des Huns paraît donc s’être exprimée au niveau opérationnel de la guerre, dans leur capacité à déplacer et à dissimuler loin derrière leurs adversaires des forces susceptibles de créer la surprise au moment de la bataille. Une telle capacité, mise en œuvre sur des terrains peu ou pas connus par les Huns, suppose chez ces derniers un système de remonte, d’éclairage et de communication particulièrement remarquable23. Elle contraste surtout avec les techniques de guerre inspirées des cultures des steppes que les armées romaines avaient dû jusque-là affronter. Rien dans la chronique des combats entre Romains et Sarmates ou Alains, avant le IVe siècle, ne peut être rapproché de la surprise opérationnelle pratiquée par les Huns. Les Parthes semblent en revanche l’avoir utilisée pour s’emparer du dépôt de machines de guerre d’Antoine lors de la campagne de ce dernier en Médie Atropatène en 36 av. J.-C., mais c’est un unicum dans l’histoire des relations militaires romano-parthes, qui plus est mis en œuvre au sein même du territoire arsacide24. Les Sassanides peuvent l’avoir employée en deux occurrences : en 232 apr. J.-C., l’un des corps d’invasion que Sévère Alexandre avait envoyé descendre l’Euphrate est surpris, encerclé et détruit par une armée perse, déplacée discrètement et rapidement depuis la Médie Atropatène ; en 359 apr. J.-C., pour brouiller la direction réelle de son opération et obtenir des informations sur les mesures de défense romaine, Sapor II dépêche en Mésopotamie une avant-garde très mobile, qui perturbe l’action du magister peditum Ursicin, le surprend par deux fois à Nisibe et à Amida, bloquant même une partie des forces romaines dans cette dernière place25. Les méthodes opérationnelles des Huns semblent donc plutôt annoncer les pratiques militaires des nomades des steppes ayant déferlé sur l’Europe après eux26.
11La supériorité démontrée par les Huns au niveau opérationnel de la guerre s’appuyait aussi sur une supériorité technique dans le domaine de l’archerie montée. Leurs guerriers utilisaient un arc composite précontraint pourvu à l’extrémité de ses deux branches de longues extensions en os (fig. 1a). Ce type d’arme particulièrement redoutable, y compris contre des troupes cuirassées, était déjà employé par les forces romaines et par certains de ses adversaires, Arsacides et Sassanides par exemple, dès avant la fin du IVe siècle, mais le modèle introduit par les Huns a marqué les contemporains par son efficacité. Celle-là devait reposer sur une meilleure répartition des masses et de l’élasticité le long de l’arme ainsi que sur une taille plus élevée : aucun exemplaire d’arc fonctionnel retrouvé dans des contextes associés aux Huns ne fait, tendu, moins de 140 cm de long, une dimension qui ne trouve pas d’équivalent dans l’histoire de l’archerie des steppes (fig. 1b). Facteur de puissance en elle-même, cette taille élevée s’explique tout particulièrement par la longueur exceptionnelle des extensions en os fixées aux extrémités des branches (17 à 39 cm). Par rapport aux modèles utilisés jusque-là, l’effet de levier de ces extensions se trouvait donc renforcé lorsque l’archer bandait l’arme. L’allonge plus grande de la corde ainsi obtenue permettait d’accumuler plus rapidement, et en plus grande quantité, l’énergie transférée ensuite à la flèche à la décoche. Lorsqu’après la décoche, l’arc commençait à reprendre sa forme initiale, le poids de ces extensions risquait de faire vibrer inutilement les branches qui les portaient et de perturber la trajectoire et la vitesse de la flèche. Les branches de l’arc devait donc être alourdie pour équilibrer l’arme – par exemple en renforçant la poignée par des plaques en os – ce qui rendait nécessaire pour l’archer un entraînement plus poussé au maniement d’un arc pesant.
12Les arcs hunniques possédaient une capacité vulnérante et une portée sans commune mesure avec les armes qu’employaient les archers montés précédemment rencontrés par les forces romaines. Pour celles-ci, sur le champ de bataille, la distance à partir de laquelle les traits des Huns pouvaient représenter un danger réel se trouvait allongée par rapport aux expériences passées d’affrontement avec des cavaliers-archers. Cela réduisait la supériorité dont les archers à pied romains avaient jusque-là bénéficié sur leurs adversaires montés, qu’ils maintenaient à distance respectable de leurs lignes grâce à leurs arcs plus longs et puissants. Les archers hunniques pouvaient presque rivaliser en puissance et en portée avec les archers à pied romains, tout en les surclassant par leur mobilité de cavaliers. Ajoutons que l’arc hunnique était asymétrique, la branche inférieure étant plus courte que la branche supérieure, ce qui facilitait grandement son maniement à cheval27. L’emploi de l’arc était rendu encore plus efficace grâce à la stabilité qu’assurait aux archers montés un harnachement particulier. Les cavaliers hunniques utilisaient en effet une selle dure, dont la structure était en bois et renforcée par de hautes arcades dissymétriques (fig. 2). Cette forme, définitivement mise au point dans le dernier quart du IVe siècle ap. J.-C., fournissait une bien meilleure assise au cavalier que les selles connues jusqu’alors dans le bassin Méditerranéen et rendait le tir à cheval plus précis28. Un dernier élément assurait la supériorité des cavaliers hunniques : leurs montures, dont les qualités de résistance et de docilité ont forcé l’admiration des contemporains (fig. 3).29
13Si les archers légers constituaient tactiquement l’arme principale des Huns, ils agissaient aussi conjointement avec une cavalerie « lourde ». Elle accomplissait l’acte décisif sur le champ de bataille, une fois l’adversaire désorganisé par le harcèlement des archers montés. Dans les sources littéraires, les mentions d’équipements défensifs corporels liés d’ordinaire à ce type de cavalerie sont en petit nombre pour les Huns. La rareté de ces mentions ne peut être corrigée par les trouvailles de matériels archéologiques, elles aussi très peu nombreuses : la pratique de ne pas enterrer avec les défunts de couteuses et réutilisables protections corporelles devait être courante. Toutefois, deux contextes funéraires attribués aux Huns ont livré des pointes de contus, une arme réservée à la cavalerie de choc (fig. 4)30. Il n’était cependant pas nécessaire pour les Huns d’équiper et d’entretenir en propre une cavalerie « lourde », quand leurs dépendants sarmates et alains étaient largement en mesure de leur fournir ce type d’arme (fig. 5)31.
14En effet, après la surprise opérationnelle et la supériorité de leurs archers montés, le dernier élément à pouvoir expliquer le danger qu’ont représenté les Huns pour l’Empire romain est leur capacité à agréger à leurs armées des compétences martiales variées et complémentaires.
15Avant même leur arrivée sur le Don, les groupes hunniques en mouvement depuis le Baïkal avait soumis et intégré à leur ensemble politico-militaire d’autres nomades iranophones ou turcophones, qui avaient ainsi renforcé l’archerie montée des Huns tout en fournissant les premiers éléments d’une cavalerie « lourde »32. Dès le dernier quart du IVe siècle, l’incorporation des Alains du Caucase avait renforcé chez les Huns cette dernière arme avant que leur progression régulière vers la Plaine hongroise ne leur permette d’assujettir les populations du Barbaricum est-européen et leurs troupes à pied33. Dès le premier quart du Ve siècle, les Huns étaient donc en mesure d’opposer à l’Empire des armées alignant fantassins, cavaliers lourds et légers, un dispositif militaire qu’au même moment, parmi les adversaires de Rome, seuls les Sassanides pouvaient déployer. L’incorporation à leurs forces des peuples nord-caucasiens et nord-danubiens offraient aux Huns une meilleure connaissance des conditions locales – en particulier topographiques – dans lesquelles ils pouvaient être amenés à combattre et, surtout, élargissaient leurs possibilités militaires. Une infanterie nombreuse, couplée à des capacités financières et logistiques non négligeables, permit ainsi aux Huns d’exploiter au mieux les savoir-faire acquis aux contacts des Perses ou des Romains en matière de poliorcétique : les campagnes de 441 à 452 montrent que les armées hunniques utilisaient systématiquement, et avec succès, les sièges pour atteindre leurs objectifs militaires, une particularité qui ne laissa pas de stupéfaire les historiens antiques habitués à la défiance des « barbares » à l’égard de ce type de guerre34. L’élargissement de la palette militaire des Huns ne signifiait pas pour autant l’abandon complet des formes d’opération ou de combat qui avaient fait leur succès. Au mitan du Ve siècle, ils n’avaient pas entièrement converti leurs armées à l’infanterie comme croyait l’avoir démontré R. P. Lindner il y a plus de trente ans35. L’argument principal de l’auteur était l’incapacité de l’Alföld à nourrir suffisamment de chevaux pour permettre aux Huns de poursuivre un mode de vie strictement nomade. Outre que la Plaine hongroise n’est pas le seul territoire de pâture que les Huns contrôlaient, les calculs de R. Lindner sous-évaluent le nombre théorique de montures qu’elle pouvait supporter et surévaluent les besoins en remonte des cavaliers. Denis Sinor estimait que les Mongols pouvaient entretenir sur l’Alföld environ 200 000 chevaux, pour une cavalerie de plus de 60 000 hommes à raison de trois montures par cavalier36. La mobilisation de la moitié de ces effectifs aurait suffi aux Huns pour s’assurer une supériorité militaire incontestable sur l’Empire romain d’Orient. En outre, il est possible que pour nourrir leurs troupeaux les Huns aient utilisé, en plus de la pâture, une partie des céréales qu’ils prélevaient sur les populations sédentaires sous leur domination37.
16La diversification de leur organisation militaire imposait toutefois aux armées hunniques de nouvelles contraintes et bouleversait leurs pratiques opérationnelles et tactiques. Nous avons déjà vu supra l’échec de l’armée d’Attila dans l’emploi de la surprise opérationnelle avant la bataille du Campus Mauriacus en 451. Rien de ce que nous pouvons connaître de cette même bataille ne correspond aux modes de combat habituels des peuples des steppes : après avoir laissé à leurs adversaires le choix du terrain, en pente et peu propice aux mouvements de cavalerie, les Huns ne semblent pas déployer contre eux leur technique de harcèlement par l’archerie légère montée. Défaits, ils ne prennent pas la fuite mais s’enferment dans leur camp38. En sus de révéler la capacité de l’Empire romain à désormais s’adapter aux méthodes de guerre des Huns, la campagne de 451 montre surtout chez ces derniers une perte de mobilité opérationnelle et tactique consécutive à l’emploi d’une infanterie en nombre substantiel, tant pour investir les places, appuyer leur cavalerie qu’élargir la gamme de leur possibilités tactiques. Au cours des opérations, l’effet de surprise pouvait plus difficilement être atteint avec des colonnes ralenties par les fantassins et l’équipement de siège ; tactiquement, le harcèlement coordonné des cavaliers légers devait désormais prendre en compte la présence sur le champ de bataille d’une infanterie moins mobile et éventuellement vulnérable. Une infanterie plus nombreuse augmentait aussi les difficultés logistiques rencontrées par les Huns dans leurs expéditions, un phénomène particulièrement sensible dès la décennie 440 : elles sont probablement responsables du repli d’Attila hors de Gaule en 451, en plus de l’échec de ses objectifs militaires. La faillite de la campagne de 452 en Italie du Nord est, quant à elle, expressément rapportée aux difficultés d’approvisionnement qui affectaient alors les Huns, tout comme les troupes impériales par ailleurs (Hydace, Chronique, 146 Burgess). De la même façon, le coût que représentaient désormais des opérations militaires plus longues et plus complexes pour un appareil logistique probablement embryonnaire, explique l’insuccès des campagnes balkaniques de 441-442 et 447 : malgré l’ampleur des destructions sur le dispositif militaire danubien et ses pénétrantes, dès 443 l’Empire d’Orient cesse ses subsides aux Huns de même que la livraison des transfuges ; près de deux ans de négociation suivent la campagne de 447, à l’issue desquels Attila n’obtient qu’une faible part de ses exigences en termes de versement monétaire, tandis qu’il abandonne ses revendications de livraison des transfuges et d’annexion d’une partie des provinces romaines du Danube moyen et inférieur. Les demandes des Huns ne peuvent réellement aboutir faute d’une pression militaire réitérée annuellement sur l’Empire d’Orient : une politique qu’Attila ne peut mettre en place en raison du coût que représente désormais chacune de ses opérations. L’étude des campagnes balkaniques de 441-442 et 447 montre aussi la réorientation des objectifs militaires des Huns : en plus des raids à long rayon d’action destinés à pousser l’Empire à composer, ils cherchent de façon plus classique à entamer le potentiel militaire et les moyens d’action de leur adversaire afin de l’amener à résipiscence. Cette réorientation explique l’ampleur des destructions de forts et de cités fortes dans les diocèses de Thrace et de Mésie : sont ainsi atteints des garnisons terrestres et fluviales mais surtout des lieux indispensables à la circulation et à la logistique des troupes romaines et dont la perte gêne considérablement la reprise du territoire. Cette réorientation des visées militaires des Huns se lit aussi dans les campagnes de 451 et 452 en Gaule et en Italie : les armées d’Attila semblent vouloir frapper, en Germanie I et en Belgique d’abord puis en Vénétie et en Emilie l’année suivante, les lieux de cantonnement des dernières grandes concentrations militaires d’Occident.
17Dès la décennie 440, contraints d’assurer la cohérence d’un empire naissant, les souverains hunniques ont monté des campagnes supposées leur valoir des rétributions matérielles et symboliques, en termes de victoire militaire, sans commune mesure avec ce que leurs prédécesseurs avaient pu obtenir de Rome39. Leurs nouvelles attentes les amenèrent à adapter, non sans difficulté parfois, leurs objectifs et leurs méthodes de guerre traditionnels au nouvel outil militaire dont ils disposaient.
Conclusion partielle et mise en perspective
18L’étude des Huns montre bien qu’il n’est pas possible d’envisager les techniques de guerre des peuples des steppes comme un ensemble uniforme. Si l’archerie montée, apprise précocement, est également prédominante parmi ces peuples, les formes des équipements et leur emploi, l’équilibre entre les différentes composantes de la cavalerie peuvent varier d’un groupe à l’autre. Surtout, entre ceux-là, le principal élément de discrimination demeure l’organisation militaire au sens large, de la discipline à la logistique40.
19Au moment de leurs premiers contacts avec l’Empire romain, les Huns semblent avoir connus des structures politiques assez lâches et une division en plusieurs hordes, inégales entre elles et parfois rivales, dominées chacune par leurs primates. Toutefois, les transferts financiers croissants depuis l’Empire romain et l’extension rapide du territoire contrôlé par les Huns au Nord du Danube, favorisèrent la concentration du pouvoir au profit de quelques clans privilégiés41. Sur les groupes hunniques coalisés et leurs dépendants, cette concentration aboutit à l’établissement d’une monarchie, parfois dédoublée, dont l’autorité était géographiquement étendue mais politiquement fragile à ses débuts. Toutefois, dès la décennie 420, les structures de la société et du gouvernement collectif des Huns révèlent une forte hiérarchisation et un renforcement du pouvoir royal, particulièrement sensible pour le règne d’Attila : le souverain semble vouloir exercer une domination sans appel sur les peuplades et les territoires qui relèvent de son « Empire » ; son contrôle s’étend jusqu’aux individus mêmes comme le montrent l’insistance des potentats huns, depuis Ruga, à réclamer à Rome la livraison des transfuges de tout rang et les punitions infligées à ces derniers42. Les rapports d’autorité sont strictement codifiés comme en témoignent, entre autre, les rangs distincts occupés par les différents membres de la suite d’Attila lors des banquets que ce dernier leur offrait43. En plus de leurs parents plus ou moins proches et d’une chancellerie, les souverains hunniques semblent avoir disposé, pour diriger leur « Empire », d’une première forme de personnel de gouvernement, pourvu par ceux que l’historien grec Priscus appelle les logades. Élites de la société hunnique, les logades conseillaient le souverain, effectuaient les tâches diplomatiques et de commandements militaires qu’il leur confiait, tout en assurant, à côté des rois alliés, le contrôle du territoire44. En temps de guerre, cette organisation sociale et politique permettait une mobilisation accrue des forces et garantissait une chaîne de commandement claire et efficace, appuyée par une rigoureuse discipline45. Couplée à des possibilités financières croissantes et à un élargissement des capacités tactiques et opérationnelles, elle rend compte de l’ampleur et des succès des campagnes menées lors de la dernière décennie de l’« Empire » hunnique. Toutefois, avant même l’établissement de celui-là, les armées hunniques avaient montré une remarquable capacité à coordonner leurs actions, résultat probable d’une première harmonisation de leurs structures militaires, peut-être sur le modèle décimal attesté plus tard pour les peuples turcs et mongols46. Surtout, la spécificité opérationnelle qui explique, comme je l’ai montré supra, les succès militaires des Huns, pouvait s’accommoder d’une organisation politique lâche, facilement mise en place dans le cadre de coalitions plus ou moins permanentes. Elle reposait fondamentalement sur trois pratiques cynégétiques et guerrières conçues et éprouvée lors des déplacements des Huns depuis l’Asie centrale : une remonte substantielle pour pouvoir tourner rapidement et par surprise, même sur de longues distances, leurs adversaires47 ; un éclairage efficace qui renseignait les armées hunniques sur la topographie et les forces qu’elles devaient rencontrer dans leur progression ; des liaisons rapides et sûres entre les éclaireurs et les différentes colonnes en mouvement, et entre ces dernières mêmes, afin de coordonner les déplacements de l’armée en marche. Ces éléments expliquent les victoires remportées par les Huns sur d’autres peuples dont les techniques de guerre provenaient pourtant elles-aussi des steppes d’Asie centrale (Alains, Sarmates, Perses).
Les réponses romaines : imitations et influences des Huns
20Quelques années à peine après les premiers contacts militaires avec les Huns, l’Empire romain procéda à un véritable « transfert de technologie » en employant massivement les compétences des nouveaux venus. Des cavaliers hunniques, servant au titre d’accords ponctuels avec l’État romain, fédérés ou bien intégrés aux structures régulières de l’armée romaine, sont attestés dans l’Empire dès 384. Théodose en recrute contre Maxime et ils prennent une part certainement décisive à la victoire sur l’usurpateur à Siscia en 388. Nous avons vu précédemment leur rôle dans le succès de Stilichon sur Radagaise en 406. Honorius obtient en 409 l’appui de dix mille Huns contre Alaric tandis qu’au même moment cantonne en Cyrénaïque une unité de fédérés portant le nom d’Hunnigarde, qui fait l’admiration de l’évêque Synésios48. L’usage de troupes hunniques par l’Empire atteint son point culminant en Occident avec le magister militum Aetius. Elles lui permettent d’asseoir fermement sa position dans l’État en 425 et 433 et il les emploie aussi à réaffirmer l’autorité romaine sur les fédérés germaniques de Gaule et de Germanie (Burgondes et Wisigoths)49. Après l’effondrement de l’« Empire » d’Attila, des groupes Huns installés sur le sol romain ou demeurés au-delà du Danube continuent à mettre leurs forces au service des deux partes imperii50. De même, l’Empire d’Orient utilise des combattants bulgares dès le début de la décennie 480 et ils figurent en bonne place dans les armées romaines du début du VIe siècle51. L’emploi de troupes hunniques ou bulgares permit aux Romains de disposer des compétences techniques, tactiques et opérationnelles spécifiques de ces cavaliers, qu’ils mobilisèrent avec succès contre leurs adversaires comme nous venons de le voir. Un succès qui doit être relativisé toutefois lorsque ces adversaires appartenaient eux-mêmes au grand ensemble des nomades proto-turcs52. Surtout, les troupes hunniques stipendiées par l’Empire diffusèrent dans la cavalerie romaine les éléments caractéristiques de leur archerie montée : leur sellerie, la configuration particulière de leurs arcs composites et les savoirs nécessaires à l’emploi de l’une et de l’autre. Ce sont à de tels transferts de compétence que les souverains hunniques ont voulu mettre fin en réclamant instamment le retour de leurs sujets passés en territoire romain, d’abord à l’Empire d’Orient à partir de Ruga puis aux deux partes imperii sous le règne d’Attila53. Une dizaine d’année à peine après les premiers contacts avec les Huns et leurs premiers recrutements, Végèce constate que, sous leur influence, l’équipement de la cavalerie impériale s’est amélioré54. Dès le premier tiers du VIe siècle, l’archerie montée est l’un des domaines de la guerre le mieux maîtrisé par la cavalerie protobyzantine55.
21En plus d’être à l’origine de l’adoption de nouveaux matériels, il n’est pas exclu que les contacts avec les Huns aient pu modifier aussi les techniques de guerre de la cavalerie romaine. Au VIe siècle, l’une des déclinaisons du combat de cavalerie consiste en l’action coordonnée de koursores et de defensores. Les premiers donnent l’assaut afin d’obtenir la décision sur le champ de bataille et les seconds protègent le repli éventuel des précédents. Dans les unités, un tiers des cavaliers – les koursores – se place aux deux extrémités des flancs, en ordre lâche ou serré, les deux tiers restant – les defensores – sont disposés au centre, en ordre serré. Selon le dispositif tactique adopté ou le type d’adversaire affronté, koursores et defensores peuvent employer la lance ou l’arc, toujours en décalque inversé. Les koursores engagent les premiers l’assaut avec pour objectif d’amener l’ennemi à abandonner son ordonnancement, qu’il fuit ou qu’il charge. Victorieux, ils poursuivent ; bousculés, ils se replient vers les defensores qui les ont suivis à quelque distance. Les deux composantes de l’unité se défendent mutuellement. La division entre koursores et defensores est fréquemment employée pour les poursuites ou les actions de harcèlement en début de combat, mais elle peut être aussi établie à l’échelle d’une ligne entière de bataille. Son intérêt est d’assurer une meilleure coordination entre les cavaleries lourdes et légères. Au lieu de combattre successivement dans des formations séparées, elles sont intégrées organiquement et peuvent agir simultanément, sous une même chaîne de commandement, une composante protégeant l’autre. C’est à mon sens un effet possible de l’obligation d’affronter les cavaleries nomades proto-turques, en même temps qu’une adaptation aux structures impériales des modes de combat coordonnés de celles-ci56.
22En outre, dans les conceptions générales que les Romain se faisaient de la guerre, la rencontre avec les Huns accélère les évolutions entamées dès le IIIe siècle. La fréquence des affrontements militaires, menés sur des théâtres d’opération éloignés les uns des autres, et le coût élevé de l’entretien de l’armée avaient amené le commandement romain à ne risquer la bataille rangée qu’avec la plus grande prudence. Cette prudence apparaît particulièrement dans les prescriptions des traités tactiques de la période tardive. Végèce lui consacre ainsi un chapitre entier du livre III de son Epitoma rei militaris : les généraux de son temps sont priés de ne tenter le combat qu’assurés d’une supériorité absolue et de lui préférer d’ordinaire les embuscades et la surprise57. Végèce donne une expression théorique au renversement complet des valeurs martiales qui caractérise l’adaptation de l’armée romaine aux nouvelles conditions de la guerre imposées par ses adversaires. La fréquente infériorité militaire des troupes romaines jointe à l’obligation de mettre un terme rapide, et de préférence favorable, à leur mobilisation explique le primat accordé à l’embuscade et à la surprise : un primat que vint renforcer, à partir de la fin du IVe siècle, la nécessité de combattre les Huns et l’intérêt plus général de reproduire l’efficacité de leurs techniques de guerre. Les préventions à l’égard de la bataille rangée, nées des défaites récurrentes subies par les Romains depuis le premier tiers du IIIe siècle, sont confortées chez Végèce par le traumatisme récent du désastre d’Andrinople, dans lequel, comme nous l’avons vu, des forces alano-hunniques ont joué certainement un grand rôle58. Au cours de la période protobyzantine, la réticence des tacticiens face au combat en ligne ne va pas en s’atténuant : Syrianus Magister (XXXIII, 12-13, 26-27), dans la seconde moitié du VIe siècle, recommande de n’engager la bataille qu’avec une troupe placée dans d’excellentes conditions de combat et, à défaut, d’attendre une situation d’infériorité de l’adversaire tandis que le Strategikon (VIII, 2, 86) de l’empereur Maurice montre un souci similaire, tout particulièrement contre des adversaires encore mal connus (VIIA, 11), ce qui témoigne des conditions fluctuantes de l’ethnogenèse sur les fronts balkanique et caucasien et de la préoccupation des généraux byzantins à toujours jauger leurs adversaires à l’aune d’archétypes ethniques clairement identifiés et théorisés59.
23Toutefois, jusqu’au traité de l’empereur Maurice, les tacticiens d’époque tardive consacrent peu d’espace à l’usage des embuscades sur le champ de bataille, Végèce omettant même de mentionner celles-ci. S’ils insistent longuement sur la pratique des attaques par surprise d’adversaires impréparés, en marche ou au repos, l’application de telles méthodes lors des batailles rangées ne semble pas pouvoir faire l’objet d’une théorisation, probablement en raison, encore au milieu du VIe siècle, d’une distinction trop tranchée entre deux champs d’action considérés comme radicalement différents : les opérations de « grande guérilla » d’une part60, l’affrontement en ligne de l’autre. Ces réticences conceptuelles paraissent s’être évanouies à la fin du VIe siècle, sous l’effet probable de la rencontre croissante avec les nomades proto-turcs qui suivirent les Huns puis avec les Avars. La place des partis d’embuscade est même prévue par Maurice dans l’établissement de ses lignes régulières de cavalerie (Strat., II, 5; III, 16).
24Si les généraux romains n’avaient pas attendu l’accession du traquenard tactique à la dignité de savoir théorique pour appliquer celui-ci sur le terrain, ils semblent surtout, à partir du début du Ve siècle, avoir considéré la surprise opérationnelle comme une forme particulièrement légitime d’emploi des forces. Le premier exemple d’une telle pratique régulière dans l’armée romaine nous est fourni par une bataille livrée à proximité de Dara en Mésopotamie, en 422. Alors que les forces impériales sont aux prises avec le corps sassanide des Immortels, dont une partie se tient en embuscade, une division romaine conduite par le comes Procopius surgit de derrière une colline et prend à revers la ligne principale des Perses. Une fois celle-ci bousculée, les troupes romaines réunies se défont du parti d’embuscade adverse. Un demi-siècle plus tard, en 479, à l’ouest du lac de Lychnidus en Macédoine, une voie détournée de montagne est utilisée par le magister militum per Illyricum Sabinianus pour acheminer secrètement des fantassins à proximité du convoi de bagages des Ostrogoths de Théodoric. Les Ostrogoths, qui circulent sur la Via Egnatia en direction d’Epidamne, sont d’abord attaqués sur leurs arrières par la cavalerie romaine, avant de subir, depuis les hauteurs qui les entourent, l’assaut des fantassins : 2000 chariots auraient été alors capturés61. Nous retrouvons dans ces deux batailles, intégrés aux techniques de guerre romaines, les éléments qui avaient fait le succès de la surprise opérationnelle pratiquée par les Huns : la connaissance et l’emploi efficaces du terrain par les corps destinés à provoquer la confusion par leur arrivée imprévue sur le champ de bataille ; la rapidité d’exécution de celle-ci ; la rigoureuse coordination entre l’attaque de la ligne principale et l’assaut des troupes dont le mouvement avait été dissimulé.
25Un art de la guerre où la surprise au niveau opérationnel jouait un rôle si important supposait une attention encore plus soutenue que par le passé à l’obtention des informations nécessaires à la planification des opérations militaires. Les traités tactiques tardifs insistent ainsi, avec une force sans parallèle connu pour les époques antérieures, sur le rôle essentiel de la recherche la plus précise possible du renseignement : la localisation exacte des troupes adverses, la détermination de leur importance numérique et de leur composition, mais surtout de leurs intentions et de leurs mouvements, la connaissance de leurs capacités logistique et de leur moral, devaient permettre au commandant d’effectuer de façon anticipée les choix opérationnels et tactiques les plus appropriés aux circonstances62. En ce domaine encore, les affrontements avec les Huns ont conforté une évolution des pratiques militaires entamée, certes, dès le IIIe siècle mais qui pouvait prouver pleinement son efficacité face à des forces capables de se déplacer rapidement et furtivement sur de longues distances, habituées aussi à tendre des embuscades de multiples façons63.
26Enfin de fournir d’indispensables points d’appui à partir desquels puissent rayonner des patrouilles de reconnaissance en contexte tactique et opérationnelle, l’État romain prenait soin d’entretenir et de développer ses installations in solo barbarico – fortins, tours de guet, débarcadères – ainsi que l’important « réseau » de tours de surveillance installées en terres proprement romaines64. Il veillait aussi à maintenir, sur son dispositif frontalier le plus susceptible de faire l’objet d’intrusions, des corps spécifiques d’éclaireurs. Les seuls à nous être connus pour le Ve siècle se trouvent précisément sur le long segment danubien menacé par la présence des Huns. Outre leur proximité immédiate avec le barbaricum, leurs garnisons bénéficiaient de situations privilégiées : quatre se trouvent dans les Portes de fer depuis Constantin au moins. Cela laisserait supposer leur affectation à la surveillance et à la protection du trafic sur une section du fleuve dont le contrôle était crucial pour le maintien des lignes de communication et d’approvisionnement entre les garnisons romaines frontalières65.
27Ces garnisons étaient appuyées dans leurs missions par des patrouilles fluviales, dont nous connaissons l’activité au Ve siècle par une constitution réorganisant précisément leur fonctionnement dans deux districts militaires directement soumis aux incursions des Huns : la Scythie et la Mésie seconde66. Dès la dernière décennie du IVe siècle, Végèce admirait déjà l’efficacité des flottilles de lusoriae danubiennes qui surveillaient les avant-postes romains à l’aide de patrouilles quotidiennes67. Dans sa constitution de 412, l’empereur Théodose II, qui tient manifestement à l’entretien régulier de la flottille, prévoit la construction, la réfection et l’armement d’un nombre précis de vedettes par an. Le texte nous apprend que la flotte se répartissait entre lusoriae iudicariae (40%) et agrarienses (60%), les premières peut-être affectées aux tâches logistiques et administratives, les secondes aux patrouilles et à la protection des garnisons, un sens pris par le substantif agrariae à l’époque tardive. Les dernières lignes de la constitution précisent les différentes missions confiées aux lusoriae : le transport des approvisionnements (transuectioni speciei annonariae), la préparation de raids (discursus opportunitatem deligentibus) et, au cours des opérations, la recherche de renseignements à partir de points fortifiés sur la rive (in conflictus specula munitissimam stationem […] delegentibus)68. Enfin, en campagne, patrouilles et dispositifs fixes de surveillance étaient complétés par des escadrons d’exploratores. Ils étaient formés par le rassemblement ad hoc des éclaireurs des différentes unités composant le corps expéditionnaire, selon un modèle probablement très proche des pratiques attestées entre le Ier et le IIIe siècle de n. è.69
Les réponses romaines : les solutions tactiques et techniques
28En plus du choix d’un terrain défavorable aux évolutions d’adversaires montés, l’armée romaine tardive disposait d’un expédient tactique, lui aussi classique, afin de maintenir à distance de ses lignes les cavaleries adverses : l’emploi sur le champ de bataille d’obstacles artificiels tels que les tranchées ou les chevaux de frise.
29S’adressant à ses troupes avant l’affrontement du Campus Mauriacus en 451, Attila compte au nombre des raisons qui devraient les convaincre de mépriser leurs adversaires le fait que ceux-là ont installé des munitiones dans la plaine qui sépare les deux lignes de bataille70. Aucun des parallèles liviens souvent cités pour commenter le discours d’Attila ne s’applique à l’utilisation de munitiones. Le terme technique peut désigner une palissade ou des chevaux de frise que la coalition romaine, maîtresse du terrain, aurait établis, probablement au centre de son dispositif devant ses auxiliaires alaniques, afin d’interdire aux Huns la mise en place de leur méthode traditionnelle de combat. Dans son récit, Jordanès ne mentionne aucun évènement survenu au centre de l’ordre de bataille hunnique, avant que la charge des Wisigoths de l’aile droite romaine n’emporte la décision sur l’armée d’Attila. L’établissement de cette barrière de chevaux de frise aurait ainsi maintenu les Huns à distance du centre romain et les aurait contraints à ne compter que sur la longue portée de leur archerie. Tandis qu’aux deux ailes romaines Aetius et ses alliés passaient à l’assaut des lignes adverses, le centre du dispositif hunnique était neutralisé jusqu’à la charge des Wisigoths71.
30Sous le règne d’Anastase, un certain Urbicius propose dans son Epitedeuma de généraliser l’utilisation d’obstacles défensifs artificiels contre les cavaleries adverses, un conseil qui prend tout son sens rapporté aux contextes des opérations contre les Perses (502-506) mais surtout, comme nous l’avons vu, les Bulgares (493-517). La recommandation consiste à faire transporter aux fantassins des pieux cloutés à leur base, à raison de trois par dekania (groupe de dix soldats). Sur le champ de bataille, ces pieux doivent permettre de dresser une barrière hermétique tout autour du carré d’infanterie. La palissade est établie suffisamment loin des soldats pour que ceux-ci ne soient pas atteints par les tirs adverses. Elle a pour effet de casser l’approche des cavaliers ennemis tout en les maintenant sous le feu des archers romains. Elle n’est démontée qu’une fois l’adversaire repoussé, avant d’entamer la poursuite72. La présence dans les armées d’Anastase de nombreuses recrues imparfaitement formées aux nouvelles tactiques conçues par les Romains contre les cavaliers-archers transdanubiens rend compte du projet d’Urbicius73. Toutefois, l’auteur associe naïvement réduction des pertes et limitation absolue des contacts entre lignes opposées et son projet ne fut probablement jamais appliqué : à l’encombrement et à la difficulté d’installer, en présence de l’ennemi, les pieux cloutés, s’ajoutait la réduction des lignes romaines à l’immobilité. Cette immobilité était un danger en raison des pertes humaines et de l’affaiblissement du moral qu’elle pouvait entraîner. Elle privait surtout les troupes impériales de l’usage des armes à courte portée, sans lequel une victoire complète n’était pas envisageable74.
31La coordination entre la mobilité et la « puissance de feu » d’archers montés et la force de percussion d’une cavalerie lourde, semi-cuirassée, constituait certainement l’une des plus graves menaces que devaient affronter les armées romano-byzantines sur le champ de bataille. La solution consistait pour les troupes impériales à privilégier l’emploi de formations denses mais offensives, tant de cavalerie que d’infanterie, afin de réduire le temps d’exposition aux volées et de n’offrir aucune occasion d’agir aux cavaliers lourds ennemis, comme par exemple une distance suffisante pour rendre leur charge efficace ou une désorganisation des lignes75. En revanche, l’adoption par l’infanterie romaine d’un dispositif purement défensif et statique représentait une erreur tactique, dont la dangerosité avait déjà été démontrée par le désastre de Carrhes76, mais qui a été répétée parfois jusqu’au VIe siècle : la concentration et l’immobilité des fantassins romains facilitent l’action des archers montés ennemis qui peuvent, sans être menacés par une riposte, descendre bien en deçà de leur portée maximale de tir et venir se placer à proximité des lignes romaines. L’effet dévastateur des volées réitérées finit, malgré la protection qu’offre aux Romains leur mur de boucliers, par multiplier les blessés et surtout par démoraliser l’infanterie impériale, menacée en outre par la présence des escadrons de cavaliers lourds ennemis. C’est dans une formation défensive que sont défaits en 502 à Tell Beshme les fantassins limitanei d’Arménie et d’Osrhoène opposés à un parti composite de Perses, d’Arabes et de Huns : abandonnés par leur cavalerie, ils adoptent une formation dense et défensive, mais le harcèlement de leurs nombreux adversaires provoque la rupture de leur ordre, leur fuite, leur massacre ou leur capture77.
32Les charges en ordre dense de fantassins ou de cavaliers ne pouvaient cependant suffire pour vaincre les Huns et les peuples proto-turcs sur le champ de bataille. Face à ces derniers, les formations imaginées dans l’armée romaine dès le IIe siècle contre les cavaleries lourdes des peuples iraniens, et progressivement généralisées au cours du IIIe siècle, montraient leurs limites78. Dans l’infanterie, sous l’effet d’une meilleure maîtrise de ces formations paraphalangiques et d’opérations plus fréquentes de « grande guérilla », la tendance au cours du IVe siècle avait été à l’allègement de l’équipement défensif79. Dans le même temps, le succès et la diffusion, même auprès des adversaires de Rome, des formations paraphalangiques avaient abouti à un usage presque universel de ces dernières. Le processus s’était effectué au détriment relatif de l’éventail des choix tactiques offerts aux fantassins les plus lourds et plutôt au profit d’une spécialisation de ceux-ci, certes efficiente mais désormais guère innovante, dans le rôle de « forteresse mobile ». Ainsi, à la fin du IVe siècle, face aux nomades des steppes, les fantassins lourds romains n’étaient ni assez protégés ni assez mobiles, tandis que leur archerie à pied se révélait incapable de tenir éloignés des adversaires qui surclassaient encore les cavaleries impériales.
33Cependant, au fur et à mesure que les armées romaines étaient confrontées à de nouveaux adversaires montés, ces mêmes cavaleries se voyaient plus fréquemment chargées d’obtenir la décision sur le champ de bataille : elles étaient mieux à même de le faire en raison d’équipements défensifs et offensifs améliorés et d’une doctrine d’emploi renouvelée au contact des armées hunniques et proto-turques comme nous l’avons vu. Commence ainsi à s’imposer, dès le début du Ve siècle, une nouvelle répartition des tâches tactiques entre les diverses armes, qui modifie leur disposition respective sur les champs de bataille et dont les effets sont particulièrement visibles dès le premier tiers du VIe siècle80. À partir de ce moment, dans les combats qui impliquent forces montées et fantassins, la cavalerie semble le plus fréquemment se déployer sur une ou deux lignes, devant une ligne d’infanterie dont les premiers rangs portent l’équipement défensif le plus complet. La ou les lignes de cavaliers, réparties en koursores et defensores, opèrent les actes de destruction et de décision – s’épaulant mutuellement si elles sont deux. Repoussées par leurs adversaires, elles peuvent venir chercher refuge derrière l’infanterie, laquelle sert aussi de couvert à une archerie à pied toujours puissante81. L’illustration la plus parfaite de cette collaboration est fournie par la bataille de la rivière Hippis en Lazique en 549 : la cavalerie alliée laze y remplit la fonction de parti de reconnaissance armée, suivie d’une ligne formée des forces montées romaines, elles-mêmes accompagnées à quelque distance de l’infanterie romano-laze. Tournant bride devant mille éclaireurs perses, les cavaliers lazes trouvent refuge parmi leurs homologues romains. S’ensuit une série de charges et contre-charges non conclusive entre les deux troupes, à laquelle met fin l’arrivée du gros de la cavalerie iranienne : les forces montées romano-lazes, inquiètes de leur infériorité numérique, se replient vers le couvert offert par infanterie, qui s’était entretemps rapprochée. Elles vont même jusqu’à démonter pour se joindre à l’ordre dense adopté par les fantassins82.
34L’adoption de ce nouveau dispositif tactique doit être mise en rapport avec les premiers contacts entre l’armée romaine et les Huns. Il repose sur des modifications introduites dans l’équipement et les doctrines d’emploi de la cavalerie impériale, sous l’effet de l’obligation d’affronter les nomades proto-turques et à l’imitation de leur technique de guerre. Il s’avère particulièrement efficace face aux modes de combat de ces mêmes nomades, au point que dans le Strategikon, l’empereur Maurice en recommande expressément l’emploi contre eux pour les armées impériales comportant de l’infanterie83. Le rôle actif d’une cavalerie mieux équipée et agissant de façon plus coordonnée neutralise les effets de l’archerie montée adverse ; entre deux charges ou en cas d’insuccès, l’infanterie offre à la cavalerie un couvert puissant et mobile. Surtout, les premiers témoignages de son emploi remontent au milieu du Ve siècle, alors que l’armée romaine cherchait depuis deux générations à améliorer les méthodes de guerre qu’elle utilisait contre les Huns. Dans le récit par le Ps. Fauste de Byzance de la bataille de Bagawan, dans le royaume d’Arménie, vers 371, les cuirassés romains et arméniens, pressés par les cataphractaires perses, trouvent refuge au sein du mur de boucliers de leurs infanteries respectives84. Au cours de la même campagne romaine en Arménie, un procédé identique est décrit par Moïse de Khorène pour la bataille entre forces impériales et perses survenue à Tzirav, dans la province d’Ararat, près du Mont Niphat (Histoire de l’Arménie III, 37). Si ces deux sources attribuent l’emploi de ce dispositif à des armées romaines de la fin du IVe siècle, il paraît cependant plus prudent de supposer qu’elles ont projeté sur les modes de combat de cette époque les habitudes tactiques des troupes en activité à leur propre période, le troisième quart du Ve siècle. Surtout, le récit de la bataille du Campus Mauriacus dans le texte bien informé de Jordanès montre que les premiers témoignages du nouveau mode de combat romain doivent être encore remontés au milieu du Ve siècle et interprétés dans le cadre des affrontements contre les Huns85. Lors de la bataille, ce sont les cavaleries de la coalition romaine qui sont chargées, aux deux ailes, de l’acte décisif : elles s’emparent à l’aile gauche du sommet d’une éminence, ce qui leur permet de tourner les lignes d’Attila ; depuis l’aile droite, une charge de la cavalerie fédérée wisigothique semble avoir rompu l’ensemble du dispositif hunnique. L’infanterie impériale, en ordre dense, paraît n’avoir joué qu’un rôle de soutien actif86.
35Enfin, il n’est pas impossible que, sur le plan de l’équipement, l’affrontement avec les nomades proto-turcs ait accéléré dans les armées impériales l’usage systématique des casques désignés sous le nom générique de Spangenhelme. Attestés dans l’équipement militaire romain bien avant le IVe siècle, leur emploi ne devient pourtant général qu’à partir du milieu du Ve siècle sous diverses formes : les types « Deir-el Medina/Sinj », « Kertch/Mezöband » puis « Batajnica »87. Conservant le caractère composite qui avait fait le succès des casques à arrête centrale employés jusqu’alors, ils se distinguent pourtant de ceux-là sur de nombreux points : les plaques de métal qui composent leur calotte sont solidement tenues les unes aux autres à la fois par une rondelle sommitale et un bandeau frontal sur lesquels elles sont rivetées ; les plaques de la calotte sont en outre reliées entre elles par des équerres métalliques plus ou moins larges, auxquelles elles sont là encore rivetées deux à deux. La technique d’assemblage de la calotte révèle le souci d’assurer à la structure d’ensemble de l’arme une forte cohésion. D’autre part, la surface du crâne qui n’était protégée que par une seule plaque métallique se voyait réduite par la présence du bandeau frontal et des équerres : leur adjonction doublait l’épaisseur de la protection sur une zone étendue du casque. Ces deux qualités expliquent très probablement l’adoption généralisée des Spangenhelme à partir du milieu Ve siècle : les tirs essentiellement paraboliques de la puissante archerie nomade menaçaient en effet en premier lieu le chef des combattants qui les subissaient et qui ont souhaité certainement mieux s’en protéger en tirant bénéfice des spécificités adéquates des Spangenhelme.
Conclusion générale
36Les Huns et les nomades proto-turcs disposaient d’une organisation militaire qui leur permettait de coordonner les mouvements de leurs forces sur de longues distances puis de les concentrer rapidement en un point. Ils ajoutaient ainsi à la qualité de leur équipement et de leur tactique, l’usage de la surprise. Dès le début de la décennie 380, quelques années à peine après les premiers affrontements entre Romains et Huns, l’institution militaire impériale employait abondamment des supplétifs hunniques et procédait ainsi, au bénéfice de sa cavalerie, au transfert des techniques de combat des steppes qui pouvaient le mieux s’adapter à ses propres traditions martiales. Moins de deux générations plus tard, l’amélioration substantielle des équipements et des doctrines d’emploi des forces montées, sous l’influence des Huns et de l’obligation de les affronter, aboutit à une importante modification du rôle respectif de la cavalerie et de l’infanterie sur les champs de bataille. Cet élargissement des modes de combat susceptibles d’être déployées contre les cavaliers des steppes accompagnait et précipitait une évolution de l’infanterie vers une spécialisation tactique, certes restrictive, mais performante88. Dans le même temps, les affrontements avec les Huns avaient conforté et accéléré la transformation des conceptions de la guerre, entamée dès le IIIe siècle de n. è, qui voyait progressivement tomber les barrières conceptuelles mises à l’emploi d’opérations et de tactiques indirectes. L’ensemble des mutations que nous avons analysées doit cependant être replacé dans le contexte des guerres menées par l’Empire entre la fin du IVe et le début du VIe siècle : l’institution militaire n’a jamais cherché à réorienter ses pratiques en fonction d’un seul adversaire – qui pouvait en outre connaître lui-même d’importantes altérations de ses modes de combat – mais plutôt à adopter des solutions applicables dans des circonstances tactiques différentes. De fait, les choix effectués ont pu montrer au VIe siècle leur efficacité sur les théâtres d’opération orientaux, contre les Sassanides, mais aussi occidentaux contre les Vandales, les Goths ou les Francs. La rapidité et l’ampleur des mutations survenues dans l’outil militaire, aux niveaux technique, tactique, opérationnel ou doctrinal, révèlent en outre les qualités d’un encadrement capable d’analyser les difficultés dans lesquelles l’arrivée des Huns le plongeait, d’y apporter des solutions et de les éprouver, avant d’en donner une expression théorique transférable et reproductible89. Les lacunes de la documentation ne nous permettent pas de saisir dans leurs détails les procédures de circulation de l’innovation le long de la chaîne de commandement romaine ou d’une région à l’autre de l’Empire. Il semble néanmoins que la vitesse des transformations aille d’à peine une décennie pour l’adoption des techniques les plus immédiatement nécessaires à la cavalerie, à près de deux générations pour les modifications tactiques d’ampleur. Enfin, les réponses romaines aux défis que représentait l’arrivée des Huns au contact de l’Empire ne sauraient se résumer aux seuls aspects militaires, sur lesquels l’étude s’est concentrée à dessein, mais ces derniers doivent être replacés dans le cadre plus général des méthodes par lesquelles Rome s’assurait de relations satisfaisantes pour elle avec ses voisins90.
Bibliographie
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Altheim 1959 = F. Altheim (éd.), Geschichte der Hunnen. Erster Band : Von den Anfängen bis zum Einbruch in Europa, Berlin, 1959.
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Notes de bas de page
1 Altheim 1959, ch. 1, Maenchen-Helfen 1973, ch. 8-10, Sinor 1990, p. 177-179, 201-204, Golden 1992, p. 85-89, Anke 1998, p. 10-13, Bóna 2002, p. 25-27, de la Vaissière 2005, Heather 2005, p. 147-150, Kazanski 2006, p. 105-108, Escher - Lebedynsky 2007, p. 18, Anke 2008, p. 12-14, Tomka 2008, Heather 2010, p. 209-213, Jin Kim 2013, p. 26-39.
2 Amm. Marc. XXXI, 16, 3 (378 p. C.), Epit. de Caes. XLVII, 3 et XLVIII, 5, Zos. IV, 34, 6 (381 p. C.), Claud., Cons. Stil. I, v. 109-111, Claud., In Ruf. I, v. 308-331 (392 p. C.). Cf. Thompson 1948, p. 21-26, Altheim 1959, ch. 14, Maenchen-Helfen 1973, p. 18-40, 46-48, Sinor 1990, p. 179-181, Heather 1995, p. 5-8, Bóna 2002, p. 15-19, Kazanski 2006, p. 108-113, Escher - Lebedynsky 2007, p. 19-20, Stickler 2009, p. 49-55, Heather 2010, p 162-164.
3 Claud., In Ruf. II, v. 22-36, 45-53, Claud., In Eutr. I, v. 242-251, II, v. 564-575, Socr., H.E. VI, 1, 6-7, Soz., H.E. VIII, 1, 2, Philost., H.E. XI, 8. Cf. Thompson 1948, p. 26-28, Maenchen-Helfen 1973, p. 51-59, Sinor 1990, p. 182-184, Heather 1995, p. 8-9, Kazanski 2006, p. 115-116, Stickler 2009, p. 55-57.
4 Soz., H.E. VIII, 25, 1, IX, 5, Cod. Theod. 5, 6, 3. Cf. Thompson 1948, p. 28-30, Maenchen-Helfen 1973, p. 62-67, Sinor 1990, p. 184-185, Bóna 2002, p. 20-22, Stickler 2009, p. 57-60.
5 Marcellinus comes, Chron. a. 422 (3), Socr., H.E. VII, 42-43, Theod., H.E. V, 37, 4, Priscus, fr. 2 Blockley. Cf. Thompson 1948, p. 70-75, Maenchen-Helfen 1973, p. 76, 90-94, Sinor 1990, p. 186-188, Blockley 1992, p. 59-60, Bóna 2002, p. 38-39, Heather 2005, p. 202-205, Escher - Lebedynsky 2007, p. 41-42, Stickler 2009, p. 62-63, 66-69.
6 Chronique gauloise de 452, 130, 132, Priscus, fr. 6, 9.1, 9.3, 9.4 Blockley, Marcellinus comes, Chron. a. 441, 442 (2), 447. Cf. Thompson 1948, p. 78-86, 90-94, Maenchen-Helfen 1973, p. 108-125, Sinor 1990, p. 189-190, Blockley 1992, p. 62-67, Bóna 2002, p. 39-41, 51-52, Heather 2005, p. 300-304, 306-312, Escher - Lebedynsky 2007, p. 43-45, 47-50, 138-140, Stickler 2009, p. 71-78, Kazanski 2013, p. 92-94, Jin Kim 2013, p. 71-72, 84 (qui ne voit pas les limites à l’action militaire des Huns révélées par ces campagnes – analysées infra – et en surévalue les effets sur l’Empire d’Orient).
7 Chronique gauloise de 452, 139, 141, Hyd., Chron. 142, 145-146 Burgess, Priscus, fr. 17, 20-23 Blockley, Prosp., Chron. 1364-1367, Jord., Get. XXXVI, 184-XLII, 224, Greg. Tur., Hist. Franc. II, 7. Cf. Thompson 1948, p. 130-148, Maenchen-Helfen 1973, p. 129-143, Zecchini 1983, ch. XI, Sinor 1990, p. 192-197, Blockley 1992, p. 67-68, Bóna 2002, p. 53-58, Heather 2005, p. 334-342, Escher - Lebedynsky 2007, p. 51-56, 140-159, Stickler 2009, p. 89-99, Jin Kim 2013, p. 78-80, 83-84 (qui, à tort, fait des deux campagnes des succès pour les Huns).
8 Priscus, fr. 48-49 Blockley, Jord., Get. LIII, 272-273, Marcellinus comes, Chron. a. 469. Cf. Thompson 1948, p. 154-158, Maenchen-Helfen 1973, p. 165-168, Sinor 1990, p. 198-199, Blockley 1992, p. 73, Bóna 2002, p. 76-77, Escher - Lebedynsky 2007, p. 173-174, Stickler 2009, 103-105.
9 Marcellinus comes, Chron. a. 515 (5), Io. Mal., Chron. XVI (p. 406 Dindorf), Evagr., H.E. III, 43, Golden 1992, p. 104-106, Golden 2011, p. 146-147.
10 Priscus, fr. 40 Blockley, Marcellinus comes, Chron. a. 493 (2), 499 (1), 502 (1), Zon. XIV, 3, 26 et 4, 8-10. Cf. Golden 1990, p. 256-260, Golden 1992, p. 92-104, Blockley 1992, p. 86-87, Haarer 2006, p. 104-109, Ziemann 2007, p. 24-103, Meier 2010, p. 137-148, Golden 2011, p. 29, 31-33, 70-71, 136-144, Jin Kim 2013, p. 131-133, 137-142. Les incursions des Bulgares et des Kutrighurs dans l’Empire d’Orient se poursuivent jusque dans le deuxième tiers du VIe siècle.
11 Généralités sur les techniques de guerre des Huns : Thompson 1948, p. 50-54, Maenchen-Helfen 1973, p. 201-203, Sinor 1990, p. 204, Anke 1998, p. 138, Bóna 2002, p. 18-19, Luttwak 2009, p. 20-22, Nikonorov 2010, p. 273-274, 279-281. Cf., pour les aspects tactiques, Amm. Marc. XXXI, 2, 8, et pugnant non numquam lacessiti sed ineuntes proelia cuneatim (« et ils combattent parfois après avoir été provoqués, mais ils engagent les batailles en formation de combat ») et 9, Claud., In Ruf. I, v. 330-331, acerrima nullo/ ordine mobilitas insperatique recursus (« mobilité aiguë/ sans ordre et retours sans qu’on s’y attende », trad. Charlet), Zos. IV, 20, 4 ; pour les Bulgares : Procop. Gaz., Pan. 7. Sur les modes de combat communs aux cavaliers des steppes : Sinor 1981, Di Cosmo 2002, May 2006, Golden 2011, p. 89-113.
12 Amm. Marc. XXXI, 2, 8. Sur la description qu’Ammien Marcellin fait des Huns, se reporter, de façon générale, à Richter 1974 et Matthews 1989, p. 332-342.
13 Pour une définition du niveau opérationnel de la guerre, distinct de la technique, de la tactique et de la stratégie, cf. Luttwak 2002, p. 165-167, part. p. 165-166 : « C’est à ce niveau que les méthodes d’ensemble pour la conduite de la guerre sont mises en œuvre […]. C’est au niveau opérationnel que le commandement de l’ensemble des forces impliquées se déploie et, plus encore, c’est à ce niveau que l’on peut appréhender l’affrontement dans sa totalité, avec toutes ses péripéties et ses retournements de situation. »
14 Amm. Marc. XXXI, 3. Part. 3, 6 : Huni enim, ut sunt in coniectura sagaces, multitudinem esse longius aliquam suspicati, praetermissis quos uiderant, in quietem, tamquam nullo obstante, conpositis, rumpente noctis tenebras luna, uado fluminis penetrato, id quod erat potissimum elegerunt, et ueriti ne praecursorius index procul agentes absterreat, Athanaricum ipsum ictu petiuere ueloci. Pour le contexte des affrontements entre Huns et Tervinges, se reporter à Thompson 1948, p. 21-24, Heather 1996, p. 98-104, Stickler 2009, p. 51-53.
15 Amm. Marc. XXXI, 12, 17. Sur les conséquences de cette charge sur la presse de l’infanterie impériale, après que l’aile gauche de cavalerie romaine a elle aussi été bousculée : Amm. Marc. XXXI, 13, 2-3. Sur l’épisode, avec des vues différentes : Burns 1973, p. 342-344, Nicasie 1998, p. 250-251, Santosuosso 2001, p. 203-205, Syvänne 2004, p. 461-462, Rocco 2012, p. 498.
16 En contradiction avec la pratique de maintenir les exploratores en éveil sur le champ de bataille afin d’être continument informé des mouvements adverses, cf. e.g. Arr., Alan. 11.
17 Amm. Marc. XXXI, 11, 6. L’identification des Alains attestés aux Castra Martis avec ceux qui combattent peu après à Andrinople est acceptée par Wolfram 1988, p. 125 mais contra Heather 1991, p. 145 et Burns 1994, p. 34.
18 Amm. Marc. XXXI, 8, 4 et 16, 3.
19 Chronique gauloise de 452, 52 : Multis ante uastatis urbibus Radagaisus occubuit ; cuius in tres partes per diuersos principes diuisus exercitus aliquam repugnandi Romanis aperuit facultatem. Insigni triumpho exercitum terciae partis hostium circumactis Chunorum auxiliaribus Stillico usque ad internicionem deleuit, Zos. V, 26, 5, καὶ τοῖς βαρβάροις ἀπροσδοκήτοις ἐπιπεσὼν ἅπαν τὸ πολέμιον πανωλεθρίᾳ διέφθειρεν, ὥστε μηδένα σχεδὸν ἐκ τούτων περισωθῆναι, πλὴν ἐλαχίστους ὅσους αὐτὸς τῇ Ῥωμαίων προσέθηκεν συμμαχίᾳ. Emploi des Huns par Stilichon : Orosius VII, 37, 12, Zos. V, 26, 4, Marcellinus comes, Chron. a. 406 (3). Sur l’invasion de Radagaise, se reporter à Burns 1994, p. 197-199.
20 Jord., Get. XLI, 217 : exceptis quindecim milibus Gepidarum et Francorum, qui ante congressionem publicam noctu sibi occurrentes mutuis concidere vulneribus, Francis pro Romanorum, Gepidas pro Hunnorum parte pugnantibus. Sur la présence des Francs et des Gépides au Campus Mauriacus : Jord., Get. XXXVIII, 197-199, Greg. Tur., Hist. Franc. II, 7. Fidélité des Gépides à Attila : Jord., Get. XXXVIII, 199.
21 Arrivée tardive des Francs : e.g. Zecchini 1983, p. 269. Ralliement précoce d’une partie des Francs à Aetius et ses raisons : Jord., Get. XXXVI, 191, Priscus, fr. 20.3 Blockley.
22 Abattement et erreurs d’Attila : Jord., Get. XXXVII, 195, XXXVIII, 201.
23 Supériorité des Huns au niveau opérationnel de la guerre : Luttwak 2009, p. 28-36, mais qui ne mentionne ni n’analyse aucune des quatre batailles que nous venons de rappeler. Pour Nikonorov 2010, p. 273, les succès des Huns s’expliquent surtout par l’emploi de la surprise au niveau stratégique, qui autorisait une pénétration en profondeur des territoires visés et était rendue possible par la qualité de leurs montures et de leur système de renseignement.
24 Plut., Ant. 38, Dio Cass. XLIX, 25. Au cours de cette même campagne, les Parthes ont systématiquement recouru à l’encerclement des colonnes romaines battant en retraite hors de leur territoire, un procédé courant qui ne peut être assimilé à la surprise opérationnelle des Huns (Plut., Ant. 41, 45-50, Dio Cass., XLIX, 28).
25 232 : Hdn. VI, 5, 5-10, mais l’auteur est le seul à fournir ces détails sur l’issue incertaine de la campagne romaine de 232 ; 359 : Amm. Marc. XVIII, 6, 8-17, XVIII, 8 et 9.
26 Voir e.g. pour les Mongols, May 2007, ch. 5 : après une exploration en profondeur du territoire à envahir, la progression s’effectue en plusieurs colonnes ; celles-là demeurent constamment en communication les unes avec les autres afin de pouvoir à tout moment se concentrer et détruire les forces principales de l’adversaire à l’improviste.
27 Eloges antiques des archers huns : Amm. Marc. XXXI, 2, 9, Olymp., fr. 19 Blockley, Sidoine Apollinaire, Panégyrique d’Anthemius, v. 266-269, Jord., Get. XXIV, 128, XLIX, 255 et L, 261. Généralités sur l’archerie hunnique et témoignages archéologiques : Werner 1956, p. 46-50, Maenchen-Helfen 1973, p. 222-228, Anke 1998, p. 55-73, Bóna 2002, p. 117-121, 196-198, Nikonorov 2010, p. 266-267, Reisinger 2010. Réévaluation pertinente de la supériorité de l’arc hunnique : Bivar 1972, p. 283-284, Coulston 1985, p. 242-244, Heather 2005, p. 155-158, Luttwak 2009, p. 22-28. Mécanique de l’arc et les conséquences qui peuvent en être tirées sur le fonctionnement et la construction de l’arme des Huns : Kooi 1991, 1993, 1996, Kooi - Bergman 1997.
28 Werner 1956, p. 50-53, Maenchen-Helfen 1973, p. 209-210, Anke 1998, p. 115-121 et vol. II, taf. 83, Bóna 2002, p. 126-129, 205-206. Sur les appliques en métal typiques de ces selles, cf. e.g. les exemplaires retrouvés à Mundolsheim en Alsace et étudiés en dernier lieu par M. Kazanski et I. Akhmedov (Kazanski - Akhmedov 2007).
29 Végèce, Traité d’hippiatrie III, 6, 2 et 5 ; Maenchen-Helfen 1973, p. 203-207, Nikonorov 2010, p. 271.
30 Mentions littéraires de casques et de cuirasses pour les Huns : Nikonorov 2010, p. 268-270 (ajouter Panégyriques latins XII (2), 33, 4) ; voir aussi Maenchen-Helfen 1973, p. 243. Trouvailles archéologiques : Bóna 2002, p. 125, Kazanski 2012, p. 195. À titre de comparaison, une cavalerie cuirassée est attestée chez les Oghurs et les premiers Turcs, cf. Gorelik 2002, p. 128-131.
31 Présence de lanciers montés cuirassés parmi les groupes sarmato-alains : Simonenko 2001, p. 248-281, 295-305, Lebedynsky 2002, p. 162-176, Kouznetsov - Lebedynsky 2005, p. 72-80, 130-134, Simonenko 2009, p. 79-90, 107-150, 235-254 (résumé en anglais : p. 288-290, 293-295, 299-304).
32 La cavalerie cuirassée est bien attestée chez les nomades centrasiatiques de l’Antiquité, grâce aux artefacts, aux textes et aux représentations figurées. L’une des plus riches représentations se trouve être une scène de bataille gravée sur une plaque de ceinture trouvée dans le Kourgane 2 d’Orlat (Ouzbékistan). Les propositions de datation oscillent majoritairement entre le Ier et le IVe siècle ap. J.-C. et l’ensemble funéraire pourrait être attribué aux cultures sace, tokharienne ou chionite ; cf., dans une bibliographie abondante, Mode 2008, préférant une datation basse à la suite des hypothèses de B. Marshak et B. Brentjes.
33 Sidoine Apollinaire, Panégyrique d’Avitus, v. 319-325, Priscus, fr. 2 et 11, l. 240-259 Blockley, Jord., Get. XXIV, 126, XXXVIII, 198-200, L, 259-261 ; Kazanski 1992, p. 205-207, Stickler 2002, p. 96-102, Heather 2005, p. 329-333, Escher - Lebedynsky 2007, p. 79-88, 94-102, 132-137, Stickler 2009, p. 79-87, Nikonorov 2010, p. 274-275, Heather 2010, p. 221-223, Kazanski 2013, p. 92-94. Pour les traces archéologiques laissées, entre le Nord du Caucase et la Moravie, par l’élite militaire « non hunnique » sous contrôle des Huns, cf., dans une bibliographie abondante, Kazanski 1996, Kazanski 1999, Tejral 2007, Kazanski 2013, p. 95-96.
34 Priscus, fr. 6.2 Blockley, Jord., Get. XLII, 220-221, Greg. Tur., Hist. Franc. II, 7.
35 Lindner 1981.
36 Sinor 1972.
37 Pour une critique récente et détaillés des arguments de R. Lindner, cf. Nikonorov 2010, p. 275-279. Pour les prélèvements en céréales des Huns sur leurs dépendants : Priscus, fr. 49 Blockley, Kazanski 2013, p. 94-95.
38 Jord., Get. XXXVII, 195-196 (hésitation d’Attila à offrir la bataille) ; XXXVIII, 197, 200, XXXIX, 204 (choix du terrain) ; XL, 207 et 210 (corps-à-corps immédiat avec assaut sur les forces d’Attila) ; XL, 210-213 (refuge des Huns dans leur camp de chariots) ; cf. Sinor 1990, p. 194, Nikonorov 2010, p. 274-275, 278-279 ; Jin Kim 2013, p. 73-78, propose une analyse de la bataille qui révèle une méconnaissance profonde des conditions de la guerre dans l’Antiquité ainsi qu’une incompréhension des positions des belligérants et des phases de leur affrontement, tel qu’il est décrit par Jordanès, dont le latin ne semble pas non plus toujours bien saisi (e. g. pour XL, 213).
39 Cf. aussi Thompson 1948, p. 177-181, Sinor 1990, p. 197-198.
40 Cf. Di Cosmo 2002, Mai 2006.
41 Thompson 1948, p. 43-46, 56-63, 161-163, 169-177, 208-209, Heather 2005, p. 325-329, Escher - Lebedynsky 2007, p. 79-83, Stickler 2009, p. 79-83, Heather 2010, p. 215-217. Jin Kim 2013, p. 43-45, 54-69, employant une méthode essentiellement comparatiste et des concepts anachroniques empruntés à la féodalité médiévale, estime que les Huns disposaient d’un État fortement organisé avant même le règne d’Attila, ce qui va à l’encontre de toute la documentation.
42 Autorité des souverains sur les composantes, hunniques ou non, de leur « Empire » : e.g. Priscus, fr. 2, l. 1-14 Blockley, 11.2, l. 241-259, 547-551, 586-595 ; Jord., Get. XXXIV, 178, XXXV, 181, XXXVIII, 198-201. Restitution et sort des transfuges : e.g. Priscus, fr. 9.1, 9.3, l. 1-10, 10, l. 1-4, 11.1, l. 5-9, 11.2, l. 188-195, 14, l. 58-61.
43 Priscus, fr. 13.1 Blockley ; cf. Altheim 1962, p. 298-299, Bóna 2002, p. 48-49. Voir aussi, dans le même sens, la hiérarchie établie entre les souverains dépendants d’Attila (Jord., Get. XXXVIII, 199-200).
44 Thompson 1948, p. 163-167, Altheim 1962, p. 280-286 (qui plaque cependant sur « l’Empire » hunnique le vocabulaire de la féodalité occidentale), Escher - Lebedynsky 2007, p. 92-102, Stickler 2009, p. 82-83. Pour les témoignages archéologiques laissés par l’aristocratie hunnique, les inhumations privilégiées et les dépôts qui leur étaient liés, voir Werner 1956, p. 82-89, Kazanski 1996, Anke 1998, p. 138, Kazanski 1999, Bóna 2002, 129-135, 138-148, Kazanski 2006, p. 123.
45 Voir, à titre de comparaison, l’organisation et la discipline régnant dans les armées des Empires turcs et avars (Maur., Strat. XI, 2).
46 Pour l’organisation des unités selon un système décimal chez les Mongols, voir May 2007, p. 31. Nikonorov 2010, p. 280-281 en avance déjà l’existence chez les Huns et les Bulgares.
47 Importance de la remonte dans les armées nomades rencontrées par l’Empire d’Orient après les Huns : Maur., Strat. XI, 2. Pour les Mongols, les estimations varient, mais le nombre de chevaux devait être de trois à cinq par cavalier en campagne, cf. Sinor 1972 et May 2007, p. 54-56.
48 Emploi de Huns dans l’Empire dès 384 : Ambr., Ep. 24, 8 (campagne victorieuse du magister militum Bauto contre les Iuthunges) ; campagne de 388 : Panégyriques latins, XII (2), 32, 4-5 ; campagne de 406 : supra note 19 ; envoi de troupes à Honorius : Zos. V, 50, 1 ; Hunnigardes en Cyrénaïque : Synésios de Cyrène, Catastases I, 2, II, 2 et Lettres 78. Au tournant des IVe et Ve siècles, de hauts dignitaires de l’État semblent avoir aussi disposé d'une garde personnelle composée de Huns : le préfet du prétoire Rufin (Chronique gauloise de 452, 34), le magister militum Stilichon (Zos. V, 34, 1), le maître des offices Olympius (Zos. V, 45, 6). Voir Thompson 1948, p. 31-35, Sinor 1990, p. 181, 185, 187-189, Stickler 2009, p. 54-55, 58-60, Nikonorov 2010, p. 284-286.
49 Philost., H.E. XII, 14, Prosp., Chron. 1288 (a. 425), 1310 (a. 432), 1322, 1326, 1335 (a. 435-439), Hyd., Chron. 108 Burgess, Salv., Gub. VII, 9, 39 et 10, 40, Sidoine Apollinaire, Panégyrique d’Avitus, v. 248-256, 303-306 ; Thompson 1948, p. 63-68, Bóna 2002, p. 34-38, Stickler 2002, p. 87-91, Escher - Lebedynsky 2007, p. 120, Stickler 2009, p. 63-65, 67-69.
50 Voir, e.g., Sidoine Apollinaire, Panégyrique de Majorien, 471-479, Jord., Get. L, 265-266 ; Altheim 1962, p. 338-340, Sinor 1990, p. 198-199, Bóna 2002, p. 75-77, Stickler 2009, p. 102-103.
51 Io. Ant., fr. 303 (p. 516, l. 72-75 Roberto), Ennod., Pan. Theod., v. 63-68, Evagr., H.E. III, 43, Io. Mal., Chron. XVI (p. 402-405 Dindorf). L’emploi de cavaliers des steppes eurasiatiques par l’Empire protobyzantin se poursuit tout au long du VIe siècle (e.g. les « Huns Massagètes » des armées de Justinien telles que nous les font connaître l’historien Procope).
52 Pour les traces archéologiques laissées par le service des Huns dans l’Empire romain, voir, dans une bibliographie abondante : Kazanski 1989, p. 61-66, Id. 1991, Id. 1993, p. 177-178, Id. 1996, Id. 1997, p. 287-291, Id. 1999, Tejral 1997, p. 137-144, Bóna 2002, p. 152-157, Vida 2011.
53 Priscus, fr. 2, 6.1, 9.1, 9.3, l. 1-10, 33-38, 10, 11.1, l. 5-9, 11.2, l. 12-13, 53-61, 76-78, 178-201, 15.4, l. 5-10 Blockley. En récupérant les transfuges, les souverains hunniques réaffirmaient aussi leur autorité sur leurs dépendants et pouvaient supprimer d’éventuels compétiteurs au pouvoir suprême, passés pour leur sauvegarde en territoire romain.
54 Végèce, Abrégé de l’art de la guerre, I, 20, 2 : nam licet exemplo Gothorum et Alanorum Hunnorumque equitum arma profecerint. Les forts danubiens de Carnuntum, Intercisa, Iatrus ont livré des éléments d’arcs composites précontraints associés à des artefacts attribués aux cultures hunniques (Anke 1998, p. 61). Datés de la période 375-450, et manifestement produits sur place, ils pourraient constituer le témoignage de l’association de supplétifs huns à des garnisons « régulières ».
55 Procop., Pers., I, 1, 6-17, I, 18, 34, Goth. I, 27, 27 ; voir Breccia 2004.
56 Sur la division entre koursores et defensores : Maur., Strat., I, 3, 26-30, II, 3, III, 5, 37-50 et 6. Le dispositif régulier, dit italien, admet des variantes appelées alanique, africaine et illyrienne (Strat., II, 3, VI, 2-4). Cf. Syvänne 2004, p. 118-122, 146-149, 151-152, 159-160. Il n’est pas impossible non plus que l’on doive à l’influence hunnique la pratique plus fréquente du combat de cavalerie en petits groupes dispersés mais coordonnés, tant dans les batailles en ligne dans les phases de contre-attaque que dans les opérations « irrégulières », cf. Rance 2005a. Toutefois, comme pour la division entre koursores et defensores, cette plus grande fréquence à agir droungisti n’est documentée que pour le dernier quart du VIe siècle, ce qui rend, dans les deux cas, difficile d’en attribuer avec certitude l’influence plutôt aux Huns qu’aux nomades proto-turcs qui les suivirent (Kutrighurs, Utrighurs, Bulgares…) voire aux Avars.
57 Végèce, Abrégé de l’art de la guerre, III, 9, 19-20, et si multis rebus superior inuenitur oportunum sibi non differat inire conflictum. Si uero adversarium intellegit potiorem, certamen publicum uitet ; nam pauciores numero et inferiores uiribus superuentus et insidias facientes sub bonis ducibus reportauerunt saepe uictoriam, Déjà III, 9, 3, Boni enim duces non aperto Marte proelium, in quo est commune periculum, sed ex occulto semper adtemptant, ut integris suis quantum possunt hostes interimant uel certe terreant. Le chapitre des « préceptes généraux sur les guerres » (III, 26) contient de nombreux aphorismes qui vont dans le même sens, cf. III, 26, 4, 14, 31.
58 Sur le traumatisme qui suivit la mort de Valens et la perte des deux tiers des soldats engagés à Andrinople, cf. Lenski 1997, p. 137-152, 160-163. La nécessaire reconstitution des effectifs qui s’en est suivie eut pour contrecoup de renforcer la crainte des autorités romaines de mener sur le champ de bataille des armées imparfaitement formées.
59 Parmi ses gnomika, Maurice recommande tout particulièrement de préférer la ruse aux batailles rangées (VIII, 2, 4 et surtout VIIA pr., 45-53 : une comparaison entre les artifices des chasseurs et la guerre). Pour le refus des risques de la bataille durant la période byzantine, cf. e.g. Procope, Pers., II, 19, 10, Goth. II, 30, 18 et Haldon 1999, p. 36-37, 199-200.
60 Dans la « grande guérilla » les moyens militaires mobilisés sont comparables à ceux qu’emploie la guerre classique, mais leur utilisation relève des procédés de la « guérilla » (mobilité, surprise…).
61 422 : Socr., H.E. VII, 20, 3-11. Les forces du corps expéditionnaire romain en Mésopotamie semblent avoir aussi creusé une tranchée pour se protéger de la cavalerie lourde perse et cette défense pourrait avoir joué un rôle dans l’ultime défaite subie par l’armée sassanide au cours de la guerre de 421-422. La colline mentionnée dans le récit pourrait correspondre à un même élément de relief, dans le voisinage immédiat de Dara, signalé par Procope (Aed. II, 1, 26-27). 479 : Malchus, fr. 20 Blockley. Il n’est pas impossible que l’arrivée tardive et soudaine des forces romaines devant Orléans assiégée par Attila en 451 – les Huns se partagent déjà les captifs – soit le résultat non pas d’un retard des troupes impériales à se concentrer, mais de la volonté d’Aetius de surprendre un adversaire distrait par les opérations devant la ville : Vie de Saint Aignan 10, Greg. Tur., Hist. Franc. II, 7 (Jord., Get. XXXVII, 195, insiste surtout sur la surprise d’Attila devant la vitesse de réaction romaine et la défiance consécutive du souverain dans les qualités de ses troupes). Quelle que soit l’origine de cette arrivée romano-gothique impromptue, Attila refuse le combat et entame son repli hors de Gaule.
62 Végèce, Abrégé de l’art de la guerre III, 6, 3-12 (sur la reconnaissance des routes) et 31, III, 9, 8, 11-12, Syrian. Mag., Strat. XXXIII, 3-13 (sur l’estimation des forces de l’adversaire, de leur armement et de leur qualité), Maur., Strat. IX, 5, 51-52, 61-63, 80-82 (sur la localisation et le mouvement des troupes adverses), VII B, 13, 18-21 et VIII, 2, 40 (sur les possibilités d’anticipation offertes par la reconnaissance tactique). Les traités antérieurs à la période tardive consacrent peu d’espace à ces questions (cf. e.g. Onas., Strat. VI, 7-8).
63 Pour la nécessité aussi de tenir les éclaireurs en éveil sur le champ de bataille en cas d’affrontement avec des armées de type « hunnique », voir Maur., Strat. XI, 2. Ce souci d’obtenir le plus de renseignement possible s’exprime en premier lieu au niveau « stratégique » : en territoire hunnique, Priscus est témoin de la capture et de la mise à mort d’un transfuge qui y espionnait pour le compte des Romains (Priscus, fr. 14, l. 58-61 Blockley).
64 Pour l’utilité des tours de guet dans la défense du territoire, voir e.g. Syrian. Mag., Strat. VI, 3-5 et VII.
65 Eclaireurs : l’auxilium frontalier des uigiles de Valeria situé contra Acinco in Barbarico (Notice des Dignités occidentale XXXIII, 48) ; en Mésie première, les exploratores de Taliata (Notice des Dignités orientale XLI, 35 et 27) et de Novae (ibid. 34 et 23), ces derniers placés sur un important point de passage sur le Danube, doté d’une installation portuaire et d’un avant-poste in Barbarico ; en Dacie ripuaire, les exploratores de Transdierna, qui contrôlaient l’embouchure de la Černa avec la garnison voisine de Dierna (Notice des Dignités orientale XLII, 29 et 37). Pour ces sites, cf. Cermanović-Kuzmanović 1982-1983, p. 342-343, Kondić 1984, p. 151-153, Vasić - Kondić 1986, p. 551-554, Petrović 1996, p. 20-22, 191, Bondoc 2009, p. 47-49, 53-56. Les forts où sont attestés des exploratores dans la Notice des Dignités font l’objet d’importantes réfections à l’époque justinienne (Procop., Aed. IV, 6, 1-5), signe de leur utilité dans le contrôle de ce secteur danubien, cf. Vasić - Kondić 1986, p. 557-558, Petrović 1996, p. 23 (Novae, Taliata).
66 Cod. Theod. VII, 17 (au maître des milices pour les Thraces, 412 apr. J.-C.). Cf. aussi Novelles de Théodose, XXXIV, 1, § 1 (à Nomus, maître des offices, 443 apr. J.-C.) : Castrorum quin etiam ipsis [les ducs] lusoriarumque pro antiqua disposatione curam refectionemque mandamus et § 5.
67 Végèce, Abrégé de l’art de la guerre IV, 46, 9, De lusoriis, quae in Danubio agrarias cottidianis tutantur excubiis, reticendum puto, quia artis amplius in his frequentior usus inuenit quam uetus doctrina monstrauerat. Le dispositif est très certainement une création constantinienne (Reddé 1986, p. 632-635), mais le texte de Végèce – frequentior usus – montre que les conditions nouvelles sur le Danube dans la dernière décennie du IVe siècle en avaient rendu l’usage encore plus nécessaire.
68 Sur les quinze flottilles attestées sur le cours du Danube, de la Drave et de la Save dans la Notice des Dignités, six relevant de l’Orient et neuf de l’Occident, cf. Reddé 1986, p. 299, 302-303, 305-306, 318 (carte), 363, 631-635, 650-651, Höckmann 1986, p. 383-385 (carte et tableau des unités), 410-413, Mitova-Džonova 1986 (stationes du Bas-Danube, de Ratiaria à Transmarisca), Bounegru – Zahariade 1996 , p. 22-28, 33-35 (Mésies, Dacie Ripuaire, Scythie), Bondoc 2009, p. 125-127 (Mésies, Dacie Ripuaire, Scythie).
69 Végèce prévoit que toutes les recrues puisse être affectées aux tâches d’exploratio (Abrégé de l’art de la guerre I, 9, 4-5, Sed et cursu praecipue adsuefaciendi sunt iuniores […] ut ad explorandum alacriter pergant, alacrius redeant). Cf. aussi Syrian. Mag., Strat. XX, 36-38.
70 Jord., Get. 204, et sera paenitudine in campos munitiones efflagitant [Romani]. Une information qui n’est jamais relevée dans les discussions modernes de la bataille.
71 Jord., Get. 209-211. Sur la bataille, voir en général Altheim 1962, p. 321-323, Zecchini 1983, p. 269-272, Stickler 2002, p. 140-142.
72 Urbicius, Epitedeuma 2, 4-11, se reporter désormais à l’édition de G. Greatrex, R. Burgess, H. Elton (citée Greatrex 2005).
73 Urb., Epit. 2. L’intense politique de recrutement sous Anastase est mentionnée par Procop. Gaz., Pan. 7 et Priscien de Césarée, Panégyrique d’Anastase, v. 204-205. Cf. aussi Greatrex 2005, p. 69-70.
74 Pour la poursuite au VIe siècle de l’utilisation de défenses artificielles, mais cette fois dans un contexte d’embuscades tactiques, voir Maur., Strat. IV, 3, 1-20 et 35-72.
75 Charge de cavalerie en ordre dense contre les armées des peuples « hunniques » : Maur., Strat. XI, 2 ; charge d’infanterie en ordre dense contre des cavaliers lourds et des archers montés perses : Amm. Marc. XXIV, 6, 8-13 (bataille de Ctésiphon, juin 363).
76 Sur la bataille et ses conséquences sur les modes de combat romain, cf. Lammert 1931, p. 12-18, Brizzi 2002, p. 156-179, Traina 2010, p. 73-81.
77 Pseudo Josué, Chronique 51. Sur les circonstances de la bataille, cf. Greatrex 1998, p. 87-88.
78 Sur ces formations que j’ai choisi d’appeler paraphalangiques, cf. Janniard 2008, p. 28-30, 33-34.
79 C’est, à mon sens, la façon dont il faut interpréter les déplorations de Végèce sur l’abandon de l’équipement défensif dans l’infanterie de son temps (Abrégé de l’art de la guerre I, 20, 2-10).
80 Les ultimes difficultés de la phase d’adaptation aux nouveaux modes de combat se lisent peut-être dans l’Epitedeuma d’Urbicius, qui, comme nous l’avons vu supra, propose au tournant des Ve et VIe siècles de protéger l’infanterie romaine de l’archerie de ses adversaires derrière une barrière complète de chevaux de frise, révélant ainsi une certaine défiance à l’égard des capacités des cavaleries impériales.
81 Pour la spécialisation de l’infanterie : cf. e.g. Procop., Vand. I, 19, 11-12, Vand. II 3, 3-6, Goth. I, 28, 21-29, Maur., Strat. XIIA, 3, XIIA, 7, 42-49, XIIB, 13, 13-28 ; 23, 19-27. Sur la puissance des arcs romains : Procop., Pers. I, 18, 32-34. Pour la place nouvelle de la cavalerie au VIe siècle, en particulier des archers montés et des escadrons polyvalents (lanciers et archers) : Procop., Pers. I, 1, 8-16, Goth. I, 27, 27-28, Maur., Strat. I, 2, 10-21, II, 8, III, 5, 26-36, VIIB, 17, 11-13 ; Darkó 1935, p. 468-469, Haldon 1999, p. 191-197, Ravegnani 2004, p. 150-153, Rance 2005b, p. 427-428, Rance 2007, p. 355-358, Petitjean 2014.
82 Procop., Goth. IV, 8, 14-20, 29-39. Cf. aussi Procop., Pers. I, 18, 42-48 (dernière phase de la bataille de Callinicum), Vand. II, 3, 3-6 (Tricamarum), Goth. I, 28-29 (affrontements simultanés de la Porta Salaria et de la Plaine de Néron, devant Rome, en 537).
83 Maur., Strat. XI, 2, 85-89. L’auteur préconise l’usage d’une formation mixte de fantassins et de cavaliers appelée l’epikampios opisthia, qu’il décrit en XIIA, 7. Sur cette dernière, voir Janniard 2008, p. 34-35.
84 Récits épiques (Ps. Fauste de Byzance) V, 5. La bataille, connue aussi par Ammien Marcellin sous le nom de Vagabanta (XXIX, 1, 3), est une conséquence du souhait de l’empereur Valens, en 371, de voir rétabli son candidat sur le trône d’Arménie, cf. en dernier lieu Lenski 2002, p. 174-175.
85 Sur les sources utilisées par Jordanès pour la narration de la bataille, en particulier le récit de Priscus, voir en dernier lieu Christensen 2002, p. 321-343.
86 Jord., Get. XXXVIIII, 197, 201, 204 (combat à l’aile gauche romaine), XXXVIII, 197 et XL, 210 (position des Wisigoths à la droite du dispositif impérial et leur charge décisive). L’ordre dense de l’infanterie impériale se déduit de la description par Attila des fantassins romains rangés « en tortue » (dum in ordine coeunt et acies testudinesque conectunt, XXXIX, 204) et de la mort du roi wisigoth Théodoric, écrasé par l’avancée des troupes à pied après qu’il a été désarçonné (XL, 209).
87 Voir la mise au point bien informée de D. Glad (Glad 2009, part. p. 46-51, 147-148).
88 Le nouvel art de la guerre romain fait l’objet d’importants débats dans les milieux savants tout au long du VIe siècle, cf. Greatrex 2005, p. 72-73, Petitjean 2014.
89 L’État antique tardif prête une attention plus soutenue à la connaissance des populations extérieures, cf. Austin - Rankov 1995, p. 226-230, Graham 2006, ch. 4-5 et, plus particulièrement pour les Huns, Traina 1993.
90 E.g. les alliances de revers (Soz., H.E. IX, 5, Priscus, fr. 2 et 11.2, l. 241-259 Blockley) ; les tentatives d’assassinat (Priscus, fr. 11.1 Blockley).
Auteur
Université François Rabelais, Tours - sylvain.janniard@univ-tours.fr
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