Chapitre 9. Le second « incastellamento »
Frontière, défense et peuplement (milieu du xiie siècle – début du xive siècle)
p. 305-375
Texte intégral
1A l’inverse de ce qui se produit généralement, les informations documentaires se font plus rares à partir du xiie siècle et surtout plus hétérogènes1. L’expansion normande dans les Abruzzes et dans les Marses conféra pourtant une importance nouvelle et stratégique à la région située désormais au cœur du système frontalier entre le royaume de Sicile, l’État de l’Église et l’Empire. L’enquête réalisée sur le terrain fournit à ce sujet quelques informations de première main qui, pour limitées qu’elles soient, permettent de pallier, au moins en partie, l’indigence de la documentation écrite locale. Outre les questions relatives à l’organisation du peuplement et aux structures matérielles qui constituent la matière principale en archéologie, la recherche laisse entrevoir en effet les répercussions que la nouvelle situation politique engendra dans la moyenne vallée du Turano. Le rythme des évolutions et des involutions qui affectèrent les sites étudiés suit dès lors, et de près, les grandes scansions de l’histoire politique des relations entre papes, empereurs et rois de Sicile.
I–LA CONSTITUTION DE LA FRONTIÈRE TERRESTRE DU ROYAUME DE SICILE ET SES RÉPERCUSSIONS LOCALES
A) La conquête normande et la formation de la frontière du royaume de Sicile : généralités
2L’émergence et la consolidation du royaume normand de Sicile, ses rapports avec la papauté et l’Empire sont trop connus pour qu’il soit besoin d’en évoquer ici les étapes principales2. On se contentera uniquement d’un rappel rapide des événements qui conduisirent à la formation de la frontière terrestre du royaume, laquelle traverse la petite région objet de notre enquête, et des conséquences qui en résultèrent notamment dans les rapports avec l’Empire. Entreprise dans les années 1070, la conquête des Abruzzes marque le pas dans la dernière décennie du xie siècle3. L’expansion normande reprit dans les années 1140. Commencée par les fils de Roger II en 1140, la conquête des Marses et d’une partie du comté de Rieti, terres d’Empire, est achevée en 1143-1144 quand les Normands s’avancent jusqu’aux environs immédiats de Rieti4. Une trêve est alors conclue entre Roger II et le pape Lucius II puis son successeur Eugène
3III. La frontière du royaume de Sicile est désormais fixée de manière à peu près définitive. En 1149, Roger II fait encore prendre Rieti, révoltée contre le pape Eugène III, sans que la ville, incendiée par le chancelier Robert, soit annexée au royaume5. En 1156, l’accord conclu à Bénévent entre Guillaume Ier et le pape Adrien IV reconnut notamment au royaume normand vassal de l’Église l’appartenance des terres in Marsia et alia que ultra Marsiam conquises jusqu’en 11446. La reconnaissance par la papauté du royaume de Sicile, sous sa suzeraineté, dont la frontière incorpora des terres dépendant du royaume d’Italie, furent les bases d’une alliance dirigée contre Frédéric Barberousse. L’empereur n’admit jamais la validité de l’accord de Bénévent et ne reconnut pas, en particulier, le tracé de la frontière englobant dans le royaume la Marsia et alia que ultra Marsiam, c’est-à-dire pour la région qui nous intéresse la province des Marses et une partie du comté de Rieti, qu’il continua de revendiquer et tenta de reconquérir7. Il s’ensuivit des années de conflit entre l’empereur et les rois de Sicile qui culminèrent au mois de mars 1176 lorsque l’archevêque Christian de Mayence assiégea le castrum de Celle (actuelle Carsoli) et défit l’armée du roi de Sicile conduite par les comtes Tancrède de Lecce et Roger d’Andria dans la plaine de Carsoli8. Ce succès ponctuel ne pouvait toutefois renforcer la position impériale, alors menacée de toutes parts. En 1177, le traité de Venise instaura notamment une trêve de quinze années entre l’empereur et le roi de Sicile. Six ans plus tard, la paix de Constance (1183) donna à l’empereur les marges de manœuvre politique qui permirent en particulier au nouveau climat de concorde entre Frédéric Ier et Guillaume II de se conclure par le mariage, célébré à Milan au mois de janvier 1186, du fils de l’empereur, Henri, avec Constance de Hauteville, fille de Roger II, qui avait été confiée aux envoyés de Henri à Rieti9. Les rapports entre l’Empire et le royaume normand furent enfin réglés par le couronnement de Henri VI roi de Sicile en 119410.
4Les sources pour l’étude de la nouvelle frontière, qui traverse en particulier les vallées du Salto et du Turano, et celle des régions frontalières sont très inégalement réparties : dans le royaume, le Catalogus baronum, dont ce n’est toutefois pas l’objet, permet notamment de suivre avec précision le tracé de la frontière et l’organisation défensive à l’échelon local ; de l’autre côté du confin en revanche, les sources centrales et locales manquent cruellement pour examiner les répercussions dans la région d’une histoire qui, tout en la dépassant largement, la concerne au premier chef.
B) Dans le royaume : le Catalogus baronum
5La conquête normande des Marses et alia que ultra Marsiam conduisit à la redéfinition territoriale de l’ancien comté des Marses et de la partie du comté de Rieti incluse dans le royaume de Sicile. Désormais intégrée dans le Principatus Capuae, la région fut divisée en deux ensembles, le comté d’Alba et celui de Celano, tandis que les terres in Marsi, in Garzoli, in Valle Petra et in Cicoli, qui bordaient la frontière, ne furent pas regroupées à l’intérieur d’une nouvelle circonscription territoriale. Situées entre les vallées du Salto et du Turano qui mettent en communication le Réatin et les Marses, ces dernières furent contrôlées étroitement par le roi en raison de leur importance stratégique. Leur inféodation directe par le souverain à plusieurs lignages avait notamment pour but d’interdire l’émergence de pouvoirs locaux trop puissants dans une région située à la périphérie du royaume dont Frédéric Barberousse revendiqua toujours l’appartenance à l’Empire11. Le Catalogus baronum, ou quaternus magne expeditionis, compilé en 1150 et révisé en 1167 et en 1168, enregistre les forces potentielles dont disposait le roi de Sicile en cas de péril extraordinaire nécessitant une levée générale : sont ainsi précisés les services dus en nombre d’hommes par tous les comtes et les barons du Ducatus Apulie et du Principatus Capuae12.
6Dans la région qui nous intéresse ici, le Catalogue des barons énumère les fiefs concédés aux descendants des comtes de Rieti et des comtes des Marses ainsi qu’aux représentants de la petite noblesse locale qui s’étaient soumis aux Normands. Le document permet de la sorte de suivre avec précision le tracé de la frontière terrestre du royaume de Sicile13. A l’exception de légères modifications apportées en 1156 par l’accord de Bénévent, en particulier dans les alentours immédiats de Rieti d’où le confin s’éloigna de quelques kilomètres vers l’est, la frontière demeura en substance inchangée pendant sept siècles, en dépit des controverses continuelles qui durèrent autant que la frontière elle-même14. Depuis le confluent du Salto et du Velino, la frontière remontait le Salto qu’elle abandonnait en aval de Girgenti, premier château situé sur la rive gauche de la rivière que mentionne le Catalogue des barons dans cette partie du royaume15. Elle se dirigeait ensuite vers le sud à travers les monts séparant les vallées du Salto et du Turano. A la hauteur des monts Partilebbre (1132 m), Collalto (1143 m) et Piano (1118 m), elle suivait l’actuelle séparation entre les régions du Latium et des Abruzzes, incluant dans le royaume Tufo, Pietrasecca, Poggio Cinolfo, Carsoli, Oricola et Rocca di Botte et laissant Ricetto, Nespolo, Montagliano, Collalto Sabino (où un castrum n’existait pas encore), Petescia (actuelle Turania), Vivaro, Vallinfreda, Riofreddo et Arsoli dans les terres de l’Église (carte 11, p. 336-337).
7Les châteaux situés dans les deux vallées du Salto et du Turano et sur les monts qui les séparent furent concédés en trois ensembles principaux auxquels s’ajoutent quelques petits feudataires possesseurs d’un ou deux châteaux. Les filii Oderisii, descendants probables du comte des Marses Oderisio II, tenaient séparément une vingtaine de castella dans la région de Carsoli et dans les Marses, situés depuis Oricola à l’ouest jusqu’à Scurcola à l’est. Répartis entre cinq feudataires, leurs fiefs in capite et in servitio ne constituaient pas un ensemble topographique cohérent16. En effet, six châteaux situés dans la plaine de Carsoli et dans ses alentours immédiats avaient été concédés par le roi à Oddo de Montaniola (de Montanea ?), à Pandolfo et Berardo de Colle et à Todinus de Celle, lequel tenait Celle – le noyau de l’actuelle Carsoli – et Poggio Cinolfo dont c’est la première mention17. Plus au nord et jusqu’à l’actuel lac du Salto, le dernier comte de Rieti, Gentilis Vetulus, tenait in capite Pescorocchiano, où il résidait18, Varri, Macchiatimone, Castellione, Rocca Melito, Castelmenardo, Collefegato, Poggio San Giovanni, Roccarandisi et Petrella ; il tenait également in servitio Pietrasecca, Tufo, Roccaberardi et cinq autres châteaux qu’il avait concédés à son tour à cinq feudataires19. Interrompant enfin la contiguïté des fiefs de Gentile Vetulus, Raynaldus Senebaldus tenait du roi huit châteaux dans le Cicolano : Mareri, Vallebona, Gamagna, Rocca Alberici, Radicaro, Sambuco, Poggio Viano et Girgenti20. Descendant le Salto, Capradosso était enfin tenu par Benegnata f. Garsedonii et San Martino par Ospinellus de Sancto Martino21.
8La plupart des châteaux donnés en fief par Roger II sont cités pour la première fois dans le Catalogus baronum ; il est possible qu’ils furent alors érigés pour la défense de la frontière d’un royaume dont Roger II voulut contrôler étroitement toutes les voies d’accès22. Jusqu’alors en effet, le peuplement dans la vallée du Salto était caractérisé principalement par des formes d’habitat dispersé ou groupé dans des villages ouverts23.
C) La Sabine et le Réatin entre papes et empereurs
9L’édification de l’État pontifical et la constitution du royaume de Sicile dont le concordat de Bénévent établissait les rapports respectifs sanctionnaient le déclin de la présence impériale dans la région que Frédéric Barberousse allait s’efforcer de rétablir24. L’indigence des sources ne voile pas totalement les principaux aspects de la politique frédéricienne visant à restaurer l’autorité impériale sur des terres qui dépendaient de l’Empire, à contenir l’influence croissante de la papauté et à bloquer l’expansion normande.
10L’empereur chercha en premier lieu à restaurer son autorité sur l’abbaye de Farfa passée sous influence pontificale depuis le concordat de Worms et l’abbatiat d’Adinolfo (1125-1144)25. Le pape Eugène III (1145-1153) pouvait ainsi affirmer que le monastère ad ius et defensionem beati Petri et sancte Romane pertinet ecclesie26. En 1155, Frédéric Barberousse investit l’abbé Rusticus (1154-1163) de tous les droits anciens et modernes de l’abbaye, enjoignant à tous les moines, barons et milites de l’abbaye de jurer fidélité au nouvel abbé et ordonnant la restitution de toutes les terres aliénées à quelque titre que ce soit depuis la mort d’Adinolfo en 1144 par les abbés Rainald, Roland et Bérard V qu’il déposa27. L’élection de l’abbé Godefroid (1163-1168) renforça la restauration difficile du pouvoir impérial sur l’abbaye. Le 13 juin 1163, Frédéric Barberousse chargea en particulier le nouvel abbé d’exécuter les injonctions que lui transmettrait son chapelain Héribert28. En 1185 enfin, Barberousse concéda à Farfa et à son abbé Pandolf un diplôme plaçant l’abbaye sous la protection impériale et confirmant toutes ses possessions dont la liste détaillée n’est pas donnée mais seulement leur localisation géopolitique : le diplôme cite en particulier les comtés de Rieti, d’Amiterno, de Valva, des Marses, de Chieti et d’Ascoli, désormais inclus en totalité ou en partie seulement dans le royaume de Sicile, auquel le document ne fait aucune allusion d’une manière ou d’une autre en dépit de l’entente qui régnait alors entre l’empereur et Guillaume II, confirmant au contraire à l’abbaye la possession de tous ses biens ubicumque in Romano imperio29. La tentative de Frédéric Barberousse ne lui survécut pas. Retournée dans l’obédience pontificale dès le pontificat de Célestin III, l’abbaye de Farfa vit l’autorité apostolique réaffirmée de manière solennelle en 1198 par Innocent III qui confirma également l’ensemble des possessions abbatiales30.
11On ignore quelle fut la politique frédéricienne à San Salvatore Maggiore, près de Concerviano, mais il est vraisemblable que l’empereur tenta également de rétablir l’autorité impériale sur le monastère qui jouxtait la frontière du royaume normand31.
12Frédéric Barberousse chercha en outre à attirer dans l’orbite impériale l’évêché de Rieti. Au lendemain de la conquête des Marses et d’une partie du Réatin, les évêques de Rieti Dodon et Benoît, soucieux d’affirmer de manière solennelle les droits de leur église sur l’ensemble du diocèse désormais divisé en deux par la frontière du royaume, n’obtinrent pas moins de quatre privilèges pontificaux en trente ans prenant sous la protection apostolique l’Église réatine et confirmant ses biens dans le territoire diocésain dont les limites furent décrites avec précision sans qu’il soit fait aucune allusion à la frontière du royaume32. Les bons rapports qu’entretenaient les évêques avec les feudataires du roi normand dans la partie du diocèse incorporée au royaume permettaient en outre d’y assurer le maintien des droits de l’évêché33. Au lendemain de la paix de Venise, Frédéric Barberousse ne continua pas moins de renforcer sa présence dans la région et prit le 31 décembre 1177 l’évêché de Rieti sous la protection impériale, confirmant ses possessions et le déclarant exempt de toute imposition autre que celles dues à l’empereur34. La restauration du pouvoir impérial sur la région s’accompagna en effet de la levée du fodrum et de tailles auxquels l’abbaye de Farfa ni l’évêché de Rieti n’échappèrent35.
13Un autre aspect de la politique frédéricienne dans la région, mis en lumière récemment par Tersilio Leggio, fut de favoriser l’installation de lignages qui lui étaient fidèles et que l’empereur aurait fait venir de Romagne36. A partir du milieu du xiie siècle, la famille romagnole des comtes de Cunio s’implanta en Sabine et dans le Réatin où elle prit possession du castrum Plagiarum, situé dans la basse vallée du Turano, et fonda peut-être Roccaranieri dans la vallée du Salto, qui occupa une position stratégique dans la région frontalière. Au xive siècle encore, la famille affirmait avoir reçu de l’empereur le perpetuum placitum liberi dominii de leurs biens37. A la même époque s’implantèrent également dans la région les de Romania, probablement d’origine romagnole eux aussi, qui possédaient en particulier des biens dans la vallée du Turano in Plagis où étaient installés les comtes de Cunio38.
14Peut-être est-ce enfin à la politique que conduisit Frédéric Barberousse pour restaurer son autorité dans la région qu’il convient d’attribuer l’affirmation de la juridiction impériale sur des secteurs situés dans la zone frontalière, notamment dans les monts de l’interfluve Salto-Turano que traversait le confin du royaume de Sicile. A partir de la seconde moitié du xiiie siècle, l’appartenance de la région à l’Empire fut réaffirmée jusqu’aux actes de la pratique notariale. Nous ignorons tout sur l’origine de cette juridiction qui n’est pas documentée à notre connaissance avant les derniers siècles du Moyen Âge. Elle peut également remonter à la politique de Frédéric II, lequel chercha à renforcer la défense de l’espace frontalier en favorisant notamment l’implantation de familles philo-impériales comme les Collalto, les Mareri et les Castiglione39. On y reviendra.
15En dépit de leurs lacunes, les sources laissent entrevoir les grandes lignes de la politique mise en œuvre par Frédéric Barberousse pour restaurer l’autorité impériale dans la région qui ne manqua pas de comporter un volet militaire dont le siège de Celle et la victoire de Carsoli sur les Normands en 1176 furent le point culminant. La documentation disponible ne fournit pourtant aucune information directe sur les manifestations que la politique impériale a pu prendre dans la portion de la vallée du Turano qui nous intéresse ici. On ne voit pas par exemple que Frédéric Barberousse ait entrepris une œuvre de fortification particulière de la région, à l’égal des efforts déployés en ce sens par les souverains normands qui ont défendu la frontière terrestre du royaume par un réseau de châteaux. Peut-être fait exception toutefois Roccaranieri, fondé par l’intermédiaire des comtes de Cunio.
16Rome se trouvait dans une situation différente vis-à-vis du royaume de Sicile, vassal de l’Église, qui lui versait pour cette raison un cens de 600 scyphats pour la Pouille et la Calabre et de 400 scyphats pour la Marsia40. Toutefois, quels que fussent les rapports complexes entre le Saint-Siège et les rois normands, ils prenaient leur place dans la formation contemporaine des deux états. Comme on sait, le contrôle territorial de l’État pontifical naissant fut assuré au moyen d’un outil privilégié, les castra specialia immediate subiecta Sanctae Romanae Ecclesiae, dont le réseau fut constitué progressivement à partir du milieu du xie siècle, d’abord aux frontières du Patrimoine puis pour quadriller tout l’État41. Nombreux en Sabine, aucun n’était situé dans la région précise qui nous occupe ici. En 1159 toutefois, Rainaldo di Sinibaldo de Donodei, qui appartenait à la lignée des comtes de Sabine, donna au pape Adrien IV différents biens en Sabine et dans le Réatin : parmi eux figurait une villa cum hominibus dans le territoire du castellum Ugonis, qu’il faut peut-être identifier au castellum de Hugo situé près de Monteleone Sabino, donné à Farfa en 1086 et sorti du patrimoine abbatial dès la dernière décennie du xie siècle42.
17De manière plus générale, la politique impériale répondait point par point à celle mise en œuvre par la papauté dans un but opposé pour consolider sa présence en Sabine et étendre son pouvoir dans le Réatin : asseoir l’autorité apostolique sur les abbayes de Farfa et de San Salvatore Maggiore, resserrer les liens avec les évêques de Rieti, auxquels l’intégrité du diocèse fut confirmée à quatre reprises entre 1153 et 1182, furent deux préoccupations constantes des pontifes, d’Eugène III à Innocent III43.
18Après la paix de Constance, le rapprochement puis l’alliance entre le royaume de Sicile et l’Empire scellée par le mariage de Henri VI et de Constance de Hauteville furent sans doute la cause de l’avancée remarquable que connut l’expansion pontificale dans la région. En 1188, deux ans après la célébration du mariage qui allait modifier de façon radicale la carte politique et au moment même où se déroulaient les tractations pour le couronnement impérial de Henri VI et de Constance44, la commune de Rieti jura fidélité au pape et à l’Église romaine et versa dès lors un cens annuel à l’Église45. Privilèges pontificaux et diplômes impériaux révèlent la compétition à laquelle se livrèrent les deux puissances pour le contrôle de la région46. Au lendemain du couronnement impérial, le pape Célestin III prit le monastère San Salvatore sous la protection apostolique et confirma ses possessions47. Quatre mois après, affaibli pourtant par l’échec de l’expédition dans le royaume de Sicile, Henri VI n’abandonna pas le terrain dans le Réatin et renouvela la protection impériale accordée par son père à l’Église réatine quinze ans auparavant48. L’expansion régionale de la papauté semble toutefois l’emporter. Elle transparaît en particulier d’un bref passage du Liber censuum relatif au monastère San Salvatore Maggiore. Reprenant en 1192 les collections d’Albinus et de Deusdedit avant lui, le camérier Cencius explique la dépendance de Subiaco, de Farfa et de San Salvatore Maggiore de la manière suivante : juris beati Petri sunt, quoniam in ejus patrimonio et territorio... sita sunt49. Si la précision ne fait pas problème pour Subiaco et Farfa, compris dans le Patrimonium tel qu’il fut délimité en 781, elle est plus intéressante pour San Salvatore Maggiore qui était situé dans le territorium Reatinum et, partant, dans le Regnum Italiae50. Dès la deuxième moitié du xie siècle comme à la fin du xiie siècle, il ne fait donc pas de doute pour la Curie romaine que le Réatin, ancienne terre d’Empire, relève du Patrimonium beati Petri.
19L’intérêt régional des papes ne s’arrêtait pas à la frontière du royaume de Sicile. Le monastère SS. Quirico e Giulitta, situé dans la vallée du Velino en amont d’Antrodoco, était compris à l’intérieur des limites du diocèse de Rieti tout en étant inclus dans le royaume de Sicile depuis le milieu du xiie siècle : il bénéficia alors de l’attention particulière des papes, d’Innocent II jusqu’à Célestin III, qui lui accordèrent trois privilèges le mettant sous leur protection et confirmant ses possessions avant la fin du siècle51.
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20Le rappel, rapide et schématique sans doute, des relations opposant ou unissant selon les cas papes, empereurs et rois de Sicile a permis de brosser à grands traits les conditions du cadre régional auquel appartenait la moyenne vallée du Turano dont le rôle stratégique s’est alors accrû. L’enquête archéologique, mal étayée par une documentation locale devenue indigente, permet d’apprécier au moins dans leurs grandes lignes les modifications qui ont affecté l’organisation du peuplement dans la zone frontalière et qu’il convient maintenant d’examiner. Il restera ensuite à établir la relation qu’elles entretiennent avec la situation géopolitique née au milieu du xiie siècle.
II – CHÂTEAUX ET VILLAGES DU MILIEU DU xiie SIÈCLE AU MILIEU DU xiiie SIÈCLE : LA CONJUGAISON DIFFICILE DES SOURCES ÉCRITES ET ARCHÉOLOGIQUES
21Privés du cadre que fournissaient les cartulaires de l’abbaye de Farfa jusqu’au début du xiie siècle et en l’absence de source nouvelle qui viendrait les remplacer, nous sommes désormais confrontés à de trop rares vestiges documentaires sur l’histoire du territoire retenu pour notre enquête. Faute d’en connaître le contexte, la présence d’un texte, à telle ou telle date, concernant tel site ou tel autre, pose dès lors plus de problèmes qu’elle ne permet d’en résoudre. De son côté, la recherche que nous avons conduite sur le terrain présente également des caractères fragmentaires très marqués, qui viennent difficilement combler les lacunes des sources écrites. En outre, la datation des phénomènes observés repose pour l’essentiel sur une connaissance encore approximative du mobilier céramique et de l’évolution chronologique de ses formes qui n’est pas à l’abri de modifications peut-être importantes. La présence de quelques monnaies dans les strates à partir de la fin du xiie siècle52, la datation par le radiocarbone, à laquelle il faudra recourir plus souvent que nous ne l’avons fait jusqu’à présent, permettent quand même de fixer quelques jalons, plus ou moins solides, à l’intérieur des scansions chronologiques établies en fonction de l’état actuel des recherches sur le mobilier céramique. Les limites de la méthode que nous avons appliquée sont évidentes, dès lors que le terrain n’est plus soutenu par un dossier documentaire étoffé, sans doute insuffisant à lui seul mais indispensable pour identifier les phénomènes observés et les interpréter. Davantage encore que pour la période précédente, la conjugaison d’éléments provenant de deux ordres d’information aussi lacunaires, que nous nous sommes efforcés de confronter sans chercher à les concilier à tout prix, fait intervenir une part d’hypothèse peut-être excessive. Dans l’état de la recherche, les bribes de l’histoire de la vallée du Turano que nous proposons au lecteur doivent donc être reçues comme telles.
22La réorganisation du peuplement commencée depuis le xie siècle se poursuivit tout au long du xiie siècle. Les enquêtes réalisées sur le terrain mettent en évidence autant la vigueur qu’a connue le processus à partir du milieu du siècle que son caractère parfois inachevé : en effet, les deux phénomènes de concentration et de fortification des habitats ne sont pas nécessairement représentés sur tous les sites connus de la vallée ; certains, du reste, ont été alors éliminés de manière temporaire ou définitive.
A) Destruction et abandon : Castiglione et Offiano vers le milieu du xiie siècle
23Le château de Castiglione a été abandonné de manière définitive à la suite d’une ultime destruction, intentionnelle ou fortuite, qui n’est sans doute pas postérieure au milieu du xiie siècle. Les datations au radiocarbone effectuées sur des échantillons de charbons de bois prélevés dans la dernière couche de destruction du château proposent en effet de dater l’incendie qui en fut la cause autour des années 1110 ou bien des années 1150 quand se situent deux des probabilités maximales53. La documentation écrite n’est d’aucun secours, qui ne mentionne plus le site directement ou indirectement après 109454. En l’état de la recherche, les sources archéologiques ne permettent guère d’opter pour l’une ou l’autre de ces deux dates. Aussi ne pouvons-nous guère formuler d’hypothèse sur le contexte dans lequel est intervenue la destruction du château de Castiglione : troubles liées au schisme abbatial des années 1119-1125 dont on sait qu’ils n’ont pas épargné la vallée du Turano55 ; démolition liée à la conquête normande dans les années 1140, qui s’est arrêtée précisément aux limites du territoire de Montagliano duquel relevait le château de Castiglione, et à l’établissement définitif de la frontière du royaume de Sicile en 1156 ; démantèlement intentionnel provoqué par tout autre événement que l’état de la documentation ne permet pas de connaître ou tout simplement incendie accidentel d’un petit château déjà endommagé par des destructions précedentes56. Quoi qu’il en soit, le château de Castiglione ne s’est pas relevé de ses cendres. Sans doute doit-on expliquer l’abandon définitif qui suivit l’incendie du début ou du milieu du xiie siècle par le délabrement d’un château déjà détruit à plusieurs reprises au cours de son histoire et par le fait qu’il n’avait jamais regroupé autour de lui un village et son finage.
24Il faut peut-être mettre en rapport la destruction de Castiglione et celle d’Offiano, seulement temporaire et mal documentée par un texte unique. La proximité des deux sites de part et d’autre de la voie qui longe le Turano, leur état respectif invitent à la comparaison. Le lecteur se souviendra peut-être qu’Offiano, attesté depuis le début du xie siècle, connaissait depuis les dernières décennies du siècle un déclin dont témoigne l’appellation de castellum ou de castrum vetus qu’on lui donnait alors. Tout vétuste qu’il ait été, Offiano n’était pas abandonné pour autant, au moins jusqu’en 1121 quand il fut soumis par l’abbé Bérard IV57. Rappelons qu’aucun vestige, en place ou résiduel, du site antérieur au milieu du xiie siècle n’a été identifié. Une convention entre l’abbé de Farfa et l’important lignage des Camponeschi, qu’on peut dater des années centrales du xiie siècle et que nous examinerons en détail dans le paragraphe suivant, stipule en particulier la reconstruction du castrum et la restitution de leurs tenures à ses anciens habitants58 : il en résulte par conséquent qu’Offiano, qui se présentait comme un habitat groupé et fortifié, avait été détruit peu avant l’établissement de cet acte vers le milieu du xiie siècle. Le document laisse à penser que les Camponeschi étaient les auteurs des déprédations causées au castrum et à ses habitants qu’ils avaient commis peut-être en s’emparant d’Offiano par la force : selon les termes du pacte passé avec l’abbé de Farfa, ils étaient déjà en possession du castrum qu’ils devaient reconstruire et restituer à l’abbaye. L’absence de vestiges contemporains interdit d’apprécier la réalité matérielle des rares informations que fournit un document trop allusif sur ce point.
25A quoi attribuer et comment interpréter les deux destructions du château de Castiglione et du village fortifié d’Offiano qui diffèrent dès leur mode de documentation ? L’une, définitive, n’est connue que par l’archéologie ; l’autre, temporaire, par un texte unique. La nature des deux sites détruits n’est pas identique : dans un cas, un petit château qui a pu occuper une fonction stratégique ou simplement résidentielle ; dans l’autre, un petit centre de peuplement dont quelques indices textuels témoignent de la fragilité à la fin du xie et au début du xiie siècle. La datation de leur destruction respective n’est pas établie avec certitude pas davantage que leur simultanéité. Tout au plus peut-on penser qu’elles sont intervenues toutes deux dans la première moitié du xiie siècle, quelques indices permettant peut-être de les dater plus précisément vers le milieu du siècle. Si tel était le cas, il conviendrait de relier les deux événements dont les causes restent assez floues : la guerre a pu en être responsable mais nous ignorons dans quelle mesure59 ; rien ne permet d’apprécier par ailleurs l’importance éventuelle de la mortalitas signalée à Rieti en 114260. Quelles qu’aient été les raisons qui conduisirent à la destruction d’Offiano et de Castiglione, on ne peut cependant y ranger un déclin général de la vallée à cette époque. Bien au contraire, ces événements s’inscrivent dans une phase d’accélération du processus d’« incastellamento ».
B) Castrum et villa : fortification et concentration de l’habitat
1) La construction du second mur d’enceinte et l’agrandissement du castrum de Montagliano
26L’enquête archéologique a montré que la grande enceinte qui délimite au nord et à l’ouest le castrum de Montagliano avait été édifiée vers le milieu ou dans la seconde moitié du xiie siècle. La tranchée de fondation du nouveau rempart, mise en évidence dans le deuxième sondage fouillé sur le site, entaille en effet des niveaux riches en céramique qu’on peut dater entre le milieu du xie siècle et celui du siècle suivant. En revanche, le mobilier livré par les niveaux les plus anciens qui se sont appuyés contre le nouveau mur d’enceinte est postérieur au milieu du xiie siècle. La maçonnerie du mur d’enceinte présente en outre une tentative de régularisation des plans de pose des moellons qui caractérise une deuxième étape de l’évolution des techniques de construction61.
27Si la datation que propose l’archéologie est exacte, le mur d’enceinte du castrum fut par conséquent agrandi au moment même où les Normands occupèrent les Marses et une partie du comté de Rieti, s’arrêtant toutefois aux limites du territoire de Montagliano qui marquèrent le confin du royaume de Sicile dans cette région62. Ainsi n’est-il pas exclu qu’il faille considérer la nouvelle et puissante fortification du village qui était alors le site principal de la vallée comme un élément de la défense de la région frontalière. Pour avoir la confirmation de la mise en œuvre d’un tel dessein, il conviendrait toutefois d’effectuer une série de prospection sur les villages situés le long de la frontière entre les deux états63.
28Ouvrage imposant de fortification, l’édification du nouveau mur d’enceinte traduit aussi, ou surtout, l’expansion importante du village qu’elle matérialise dans les structures de l’habitat. La construction du nouveau rempart porta en effet la superficie de Montagliano à 15 000 m2 environ, multipliant par trois les 4 500 ou 5 000 m2 entourés par le mur érigé dans la seconde moitié du xie siècle64 (fig. 5, p. 57). L’agrandissement du village a sans doute été entrepris dans la double perspective de fortifier un habitat au tissu lâche qui s’était concentré peu à peu au pied et à l’ouest du castrum primitif – dont l’enquête archéologique, fort limitée au demeurant sur le site, n’a pas permis cependant de montrer l’existence –, et dans celle d’attirer à l’intérieur des nouveaux murs une population encore largement dispersée dans son territoire. Les événements successifs pourraient le laisser à penser65. Dans tous les cas, il fallut attendre encore deux siècles pour que le nouveau périmètre fût entièrement bâti66. Sans anticiper sur la suite, on retiendra pour l’instant que le village avait connu un essor tel qu’on dut l’agrandir et le fortifier de manière considérable moins d’un siècle après sa première fortification.
29Faute de pouvoir dater avec une précision plus grande en l’état des recherches l’édification de la deuxième enceinte de Montagliano, il est difficile d’émettre des hypothèses sur le contexte et sur les motivations qui ont présidé à la réalisation des travaux. Le dossier documentaire ne livre aucune indication qui permette d’identifier les promoteurs de cet ouvrage imposant. Nous ignorons en effet qui tenait le castrum de Montagliano durant cette période importante de son histoire. Rétrocédé par les comtes des Marses à Farfa en 1074-1075, Montagliano est ensuite mentionné régulièrement dans les confirmations pontificales et impériales des possessions de l’abbaye de 1084 à 126267. On ne peut exclure toutefois que le castrum ait été aliéné vers le milieu du xiie siècle, comme d’autres possessions de l’abbaye dont Frédéric Barberousse ordonna la restitution à Farfa en 115568. Dans tous les cas, la réalisation des travaux d’agrandissement et de défense de Montagliano est contemporaine de la reconstruction du castrum d’Offiano qui lui était étroitement lié.
2) La reconstruction du castrum d’Offiano
30L’enquête archéologique a montré que les constructions les plus anciennes du castrum d’Offiano mises au jour par la fouille étaient contemporaines ou postérieures au milieu du xiie siècle, selon les datations que suggère l’étude du mobilier céramique. Dans un premier temps furent édifiées l’enceinte sommitale puis, peut-être au début du xiiie siècle seulement, la tour qui la dominait à l’est. Avec sa tour et son mur d’enceinte, le noyau fortifié construit au sommet de la butte couvrait une superficie de 650 m2 environ. Hors de cette enceinte, la prospection et les sondages fouillés n’ont pu mettre en évidence les traces d’un habitat contemporain concentré au sommet de la colline ou sur ses pentes. Si l’absence d’un village bâti de maisons en pierres paraît donc établie, on ne saurait pour autant affirmer celle d’un habitat léger regroupé en ordre lâche à l’entour du château qui aurait échappé à l’enquête limitée conduite sur le site69. Vers le milieu du xiie siècle, si l’on en croit la datation que propose l’enquête archéologique, Offiano fut donc reconstruit à l’emplacement même de l’ancien castellum, gommant alors tout vestige antérieur, ou bien dans son voisinage immédiat.
31Outre les confirmations impériales et pontificales des possessions de l’abbaye de Farfa qui mentionnent Offiano avec régularité de 1084 à 126270, le maigre dossier documentaire contient une pièce plus intéressante à laquelle nous avons déjà fait allusion. Un document non daté, copié au xiie siècle dans un espace blanc d’un feuillet du Régeste de Farfa71, livre le contexte dans lequel prend place la reconstruction du castrum d’Offiano dont témoigne l’enquête archéologique. Il s’agit d’une convention passée entre un abbé de Farfa désigné par la seule initiale de son nom personnel, « R », et le lignage des Camponeschi qui forme l’un des rares contrats féodo-vassaliques qui nous soient parvenus pour la région et la période considérées. Pierre Toubert a déjà analysé les dispositions principales que comporte le document et sur lesquelles il n’est pas utile de revenir : obligations militaires, service d’ost complet ou plus restreint selon que les opérations sont conduites dans les terres de la seigneurie ou à l’extérieur, service de gîte, etc. De son côté, l’abbé de Farfa promet l’aide réciproque de l’abbaye72. En gage du respect de la convention, les Camponeschi donnent à Farfa l’arx Tance, qui sera tenue conjointement par un de leurs fidèles et par un représentant de l’abbaye tant que les deux parties respecteront leurs engagements bilatéraux. En rémunération de leurs services, l’abbé de Farfa redonne en fief aux Camponeschi le castrum d’Offiano, comme l’avait tenu auparavant Gentile di Rainaldo. Le paragraphe suivant de la convention ajoute des précisions sur le site, qui nous intéressent ici. Deux personnages, dont seules les initiales sont indiquées, jurent hommage et fidélité à l’abbé et au monastère, lui restituent le castrum quod dicitur Ophanu, s’engagent à le reconstruire et à rendre leurs tenures à ses anciens habitants, lesquels devront également prêter hommage au monastère. Les Camponeschi promettent en outre de se faire enterrer à Farfa tandis que leurs hommes continueront de se faire enterrer à San Giovanni, comme ce fut le coutume au temps de l’abbé Bérard73.
32En l’absence d’éléments chronologiques, les éditeurs du Regesto di Farfa, Ignazio Giorgi et Ugo Balzani, avaient proposé de dater ce document des années du gouvernement des deux abbés de Farfa du xiie siècle dont le nom commence par un « R », Roland (1147-1152) et Rusticus (1154-1163)74. Le cardinal Schuster, qui publia également des extraits du document en appendice à son histoire de l’abbaye de Farfa, le donne pour sa part des années de l’abbatiat de Roland qu’il date entre 1146 et 1152 et résout en ce sens l’initiale du nom de l’abbé75. Tâchons de préciser les choses.
33Outre Roland et Rusticus, deux ou trois autres abbés de Farfa portèrent à la fin du xie siècle et au xiie siècle un nom dont l’initiale était également un « R ». Il convient certainement d’éliminer l’abbé Rainaldo qu’une partie des moines élurent à l’encontre des règles canoniques dès la mort de Bérard Ier survenue dans la nuit du 1er novembre 1089 et qui gouverna l’abbaye jusqu’au début du mois de juin 109076. Comme on le verra dans un instant, le document fait allusion à des faits qu’il convient sans doute d’attribuer au successeur de Rainaldo, l’abbé Bérard II (1090-1099). Ajoutons également que la convention, qui stipule la donation de l’arx Tance à Farfa par les Camponeschi, doit être postérieure au diplôme confirmant les biens de Farfa délivré par l’empereur Henri V à l’abbé Bérard III en 1118. En effet le diplôme impérial ne mentionne que les parts de la rocca Tancie qui avaient été données à l’abbaye par Cencius fq Taibrandi en 1085 et par Guillelmus fq Leonis en 1096-1097, quand les Camponeschi en possédaient encore d’autres parts77. A la mort de l’abbé Bérard III en 1119, on l’a vu, l’élection abbatiale divisa la communauté des moines. Le premier élu avait pour nom Rainaldo mais ne put gouverner l’abbaye qu’il dut fuir et abandonner aux mains du candidat du parti populaire, Guido III. Deux ans plus tard, un accord intervint entre Rainaldo et l’abbé Bérard IV, imposé par l’empereur, aux termes duquel le premier renonça à ses droits au gouvernement abbatial tant que Bérard aurait dirigé l’abbaye et qu’il aurait respecté ses engagements. Rainaldo reçut alors pour sa subsistance le monastère San Giovanni et d’autres biens situés dans les alentours. Un troisième Rainaldo, en qui certains ont voulu reconnaître le premier élu de 1119, gouverna enfin l’abbaye après la mort d’Adinolfo en 1144 et fut déposé, comme Roland et Bérard V, par Frédéric Barberousse78.
34Aux noms de Roland et de Rusticus, il convient donc d’ajouter celui de Rainaldo, ce qui élargit donc l’arc chronologique à l’intérieur duquel a été passée la convention – entre 1144 et 1163 – plutôt que de le réduire. La documentation à notre disposition ne permet guère de choisir le protagoniste de l’acte parmi les trois abbés retenus : il peut s’agir tout aussi bien de Rainaldo, dont les liens avec le monastère San Giovanni et les terres à l’entour sont documentés, de Roland ou de Rusticus. La convention, qui stipule en particulier la concession en fief du castrum d’Offiano, pourrait pendre place parmi les aliénations de biens accordées par les abbés Rainaldo, Roland et Bérard V, dont Frédéric Barberousse ordonna la restitution lorsqu’il investit l’abbé Rusticus en 1155 ; à moins encore qu’il ne faille y voir un effet de cette injonction, l’abbaye obtenant la restitution du castrum et le concédant à nouveau en fief, affirmant de la sorte un certain contrôle sur le bien.
35Quoi qu’il en soit de sa datation précise au cours des deux décennies centrales du xiie siècle, la convention apporte quelques indications allusives sur le passé plus ou moins récent d’Offiano. Le castrum avait été tenu auparavant par un certain Gentile di Rainaldo : peut-être faut-il reconnaître dans ce personnage un fils du recteur de Sabine Rainaldo di Sinibaldo, dont les possessions jouxtaient celles des Camponeschi et à qui l’abbé Bérard II (1090-1099) abandonna plusieurs castella dans la région et en particulier les châteaux voisins donnés par les Guidoneschi à l’abbaye en 109279. Le serment de fidélité que les anciens habitants du castrum devaient jurer à l’abbé de Farfa selon les termes de la convention trouve pour sa part son correspondant exact dans une concession de biens situés dans le territoire du castellum vetulum de Ophiano délivrée en 1094 par l’abbé Bérard II qui fait état de la fidelitas liant les bénéficiaires à l’abbaye ; cet acte ne fait pourtant pas allusion aux droits de sépulture mentionnés dans la convention du milieu du xiie siècle, laquelle précise toutefois qu’elle remonte au temps de l’abbé Bérard80. En conséquence, on peut considérer avec quelques raisons que l’abbatiat de Bérard II a marqué dans la dernière décennie du xie siècle une période déterminante pour la vie du castrum, déjà qualifié de vetus.
36Ce vieux castrum avait été détruit, on l’a vu, et ses anciens habitants dépouillés de leurs tenures à une époque et dans des circonstances qui nous échappent. Si le document reste assez vague sur ce propos, il comporte cependant la promesse de la reconstruction du castrum quod vocatur Ophanu et de son repeuplement par ses détenteurs, qui restituent le castrum à l’abbaye et en obtiennent en retour la concession en fief81. Si nous sommes dans l’incapacité de préciser les circonstances de la destruction d’Offiano, les sources écrites et archéologiques s’accordent pour dater sa reconstruction vers le milieu du xiie siècle au moment même où Montagliano était agrandi de manière considérable et puissamment fortifié, tandis que le château détruit de Castiglione était abandonné de manière définitive. Si les datations concordent et ne sont sans doute pas le résultat d’une coïncidence, les travaux diffèrent considérablement par leurs caractères. Les vestiges mis au jour à Offiano font sans doute du site un poste de défense et de surveillance avec sa petite enceinte, entourant une superficie de 650 m2, dominée ensuite par une tour, plutôt qu’un village véritable. Avec la reconstruction d’Offiano, dont les seigneurs et les habitants devaient jurer hommage et fidélité à l’abbaye, Farfa renforçait son pouvoir dans la vallée. On ne peut exclure totalement que les travaux d’ampleur différente réalisés à Montagliano et à Offiano vers le milieu du xiie siècle aient eu également pour but de contrôler un axe essentiel de la circulation entre les Marses et la Sabine au voisinage immédiat de la frontière du royaume de Sicile.
3) La formation de la villa de Sant’Agnese dans la seconde moitié du xiie siècle
37La documentation sur Malamorte et le site de Sant’Agnese devient des plus indigentes à partir de la seconde moitié du xie siècle pour se limiter à peu de choses près aux confirmations pontificales et impériales des biens de l’abbaye de Farfa. Elle n’en laisse pas moins transparaître un changement dans les structures de l’habitat qui intervint entre la fin du xie siècle et celle du siècle suivant. Confirmant les biens de l’abbaye de Farfa, le diplôme de l’empereur Henri IV mentionne ainsi en 1084 l’ecclesia Sancte Agnetis cum omni sua integritate82, celui de Henri V l’ecclesia Sancte Agne(tis) in integrum en 111883 tandis que le privilège d’Innocent III cite en 1198 l’ecclesia Sancte Agnetis cum villa et aliis ecclesiis et pertinentiis suis, comme celui d’Urbain IV en 126284. L’apparition du terme nouveau de villa doit être mis au compte d’un changement des structures de l’habitat qui se produisit à Sant’Agnese avant la fin du xiie siècle et dont le privilège d’Innocent III est le premier indice textuel.
38L’enquête archéologique réalisée dans le territoire de Sant’Agnese a montré que le troisième site repéré formait une agglomération de maisons localisée non loin mais à l’écart du château (fig. 12, p. 78). Les sondages qui y ont été fouillés n’ont pas mis en évidence une occupation du secteur avant la seconde moitié du xiie siècle environ quand se répandit la céramique à « vetrina sparsa » de type B. La datation proposée par l’archéologie est ainsi en parfaite concordance avec la documentation écrite qui placerait la formation de la villa entre le diplôme de Henri V de 1118 et le privilège d’Innocent III de 1198. Pour autant que l’exiguïté de la superficie fouillée permette de l’affirmer, il n’apparaît pas que la concentration de l’habitat se soit effectuée autour d’un des casalia mentionnés dans la première moitié du xie siècle. Rappelons que les trois secteurs n’ont pas livré de céramique antérieure à la céramique à « vetrina sparsa » de type A, qu’on ne peut guère dater à Sant’Agnese avant le xiie siècle ; celle-ci, en outre, est peu abondante (15 % environ de l’ensemble de la céramique à « vetrina sparsa ») et trouvée en général dans des niveaux de remblai85. Autre résultat de l’enquête archéologique, les sondages fouillés à la périphérie du groupement de maisons ont montré l’absence d’une forme quelconque d’enceinte ou de fortification de terre. En ce sens, l’agglomération du site 3 est bien un habitat ouvert, que les textes désignent par conséquent à juste titre du mot de villa.
39L’enquête, limitée à ce stade, n’a guère pu documenter les différentes phases de la vie de cet habitat ni les caractéristiques de ses structures matérielles. Habitat ouvert, habitat certainement mineur, mais pas habitat précaire pour autant. Les maisons paysannes étaient en effet construites en matériaux durables, murs maçonnés au mortier de chaux et tuiles pour la couverture, matériaux trouvés en abondance dans le sondage III, tandis que l’absence significative de trous de poteau dans les sondages ouverts conduit à limiter l’usage du bois même dans les constructions les plus anciennes86.
40Les deux autres composantes du site qui étaient en place depuis la fin du xe siècle et le début du xie siècle devaient également subir des remaniements importants au cours de cette nouvelle période. Dans le secteur de l’église, les travaux sont caractérisés, on l’a vu, par la construction du grand mur méridional (M3) et par les aménagements des structures MM4-6. Les techniques de construction et l’emploi de matériaux différenciés dans un but ornemental permettent d’établir une correspondance avec un usage similaire rencontré notamment dans la nouvelle église de Farfa vers le milieu du xiie siècle dont le modèle aurait été appliqué ensuite dans l’église de Sant’Agnese qui fut entièrement reconstruite à cette époque87. La céramique présente dans les niveaux de l’occupation contemporaine (UU.SS. 1015 et 1012) permet de dater ces travaux à la pleine période de diffusion de la céramique à « vetrina sparsa » (28 tessons sur un total de 73 pour ces deux unités stratigraphiques) dont on ne retrouve plus d’exemplaire par la suite88. La présence d’un denier provinois du sénat romain dans l’U.S. 1015 permet de préciser cette datation en fixant le terminus a quo à l’année 1184, date de la première émission de la nouvelle monnaie sénatoriale89. Ajoutons également que ces niveaux n’ont pas livré de matériel plus récent. Il en résulte que les travaux doivent être datés entre la fin du xiie siècle et le milieu du xiiie siècle, compte tenu des datations proposées pour cette classe céramique dans la région et de la présence du denier provinois du sénat. Selon toute vraisemblance, l’édification du mur M3 permet de supposer une reconstruction générale de l’église Sant’Agnese, désormais trop petite ou trop vétuste, au moment même où la formation de la villa atteste le dynamisme de l’ancien territoire de Malamorte devenu finage villageois. Les alentours de l’église furent également réaménagés à la même époque : des structures en bois ont été érigées notamment au sud de la nouvelle église pour l’installation de piliers dont une base a été trouvée à 2,5 m environ au sud du mur M3. L’enquête archéologique, trop limitée, n’a pas permis d’obtenir des résultats décisifs sur la nature des travaux ni sur la fonction des nouveaux aménagements. La présence du pilier permet de supposer toutefois que cet espace fut couvert par un auvent90.
41On ignore tout du château durant cette phase, si ce n’est que la présence résiduelle de céramique à « vetrina sparsa » de type B dans les niveaux postérieurs atteste son occupation à cette époque. Au même moment en effet fut sans doute construit le mur M23 caractérisé notamment par la présence de deux assises de moellons quadrangulaires de calcaire coquillier. Absent des constructions antérieures, un matériau lithique similaire a été utilisé tant dans le secteur de l’église que dans les maisons du village et pourrait caractériser de la sorte la construction contemporaine de la formation de la villa91.
42La reconstruction de l’église Sant’Agnese, les travaux de restauration et d’aménagement du petit château fondé vers le début du xie siècle et la concentration de la population paysanne auparavant dispersée dans plusieurs casalia et désormais regroupée dans un village ouvert qui s’est formé à quelques dizaines de mètres de la fortification furent probablement réalisés directement sous l’égide de l’abbaye de Farfa. C’est en tout cas ce que laisse à penser la qualité des travaux entrepris dans l’église dont témoignent les rares vestiges mis au jour par la fouille. La transformation du site attesterait ainsi l’intérêt porté par l’abbaye à des possessions, sans doute mineures et excentrées, auxquelles la situation politique donnait toutefois une importance nouvelle.
C) Organisation territoriale et réseau du peuplement (milieu du xiie siècle – milieu du xiiie siècle)
43Bien évidemment, les transformations que connurent les quatre sites retenus pour notre enquête ne leur furent pas propres. Après la vague initiale des constructions de châteaux vers l’an mil suivie par la formation des premiers villages dans le courant du xie siècle, le processus de réorganisation de l’habitat dans la vallée subit une accélération nouvelle à partir du xiie siècle. Outre les sites fondés au cours de la période précédente dont l’essor se traduit par l’extension de la surface bâtie ou bien par la concentration de la population dans des villages ouverts, des habitats nouveaux apparaissent qui révèlent autant la densité du peuplement que la réalité de la croissance démographique dans la vallée.
44Les quelques documents disponibles sont loin de remplacer le corpus incomparable que formaient jusqu’alors les cartulaires de Farfa ; ils n’en fournissent pas moins des informations, de nature différente sans doute mais de premier ordre tout de même, dont l’intérêt principal réside dans leur série. Les sources les plus importantes pour notre objet sont formées alors par trois listes des églises du diocèse de Rieti dont les limites sont décrites avec précision en 1182. C’est par elles qu’il faut commencer.
1) Le remodelage des confins diocésains : les deux rives du Turano, un problème de compétence territoriale
45La formation de la frontière terrestre du royaume de Sicile fut certainement le phénomène majeur qui conditionna l’histoire de la région à partir du milieu du xiie siècle et pour les siècles à venir. Ce ne fut pas la seule modification que connut alors l’organisation territoriale de la vallée. La frontière, qui suivit plus au sud le tracé des confins entre le diocèse des Marses et celui de Tivoli, traversa de part en part le diocèse de Rieti dont la partie orientale fut incorporée au royaume de Sicile. Pour autant, la nouvelle carte politique n’entraîna pas le remodelage des circonscriptions ecclésiastiques, sinon peut-être pour un détail, certainement minime mais significatif pour notre objet. La juridiction de l’évêque de Rieti s’étendit dès lors de part et d’autre du confin dans un diocèse dont les limites demeuraient inchangées. Pas tout-à-fait pourtant, ou du moins pas exactement dans celles qui avaient été les siennes au xe et au xie siècle.
46En 1182, à l’exemple de ses prédécesseurs Pascal II, Adrien IV et Alexandre III, le pape Lucius III plaça sous la protection apostolique l’Église réatine à la demande de son évêque Benoît, consacra l’inviolabilité des limites de sa paroisse et confirma la possession des églises plébanes qui sont énumérées92. Le privilège de Lucius III est le premier que nous possédions qui décrit les confins du diocèse de Rieti. Les trois pancartes précédentes auxquelles il est fait allusion dans l’acte pontifical ne sont connues en effet que par la mention qui s’y trouve tandis que celle d’Anastase IV (1153), dont la structure est légèrement différente, n’y est pas citée. L’extension du diocèse correspondait peut-être à celle que définissait déjà le privilège perdu de Pascal II à l’extrême fin du xie ou au début du xiie siècle, mais ce n’est pas certain. Dans tous les cas, elle ne recouvrait pas exactement les limites qui résultent de la définition des deux diocèses mitoyens de Sabine, donnée par le pape Marin II en 944, et des Marses, délivrée par le pape Pascal II en 111493.
47Comprise dans le diocèse de Sabine au xe siècle et dans le comté de Rieti dès l’an mil, la rive gauche du Turano, depuis Rocca Salice au nord jusqu’à Vallebona et Canemorto (Orvinio) à l’ouest, et jusqu’à Portica et Vallinfreda au sud, avait été incorporée au diocèse de Rieti dès le xie siècle peut-être, dans le courant du xiie siècle sûrement94. Au xiie siècle par conséquent, le diocèse de Sabine ne s’étendait plus jusqu’à la vallée du Turano, partagée désormais entre le diocèse de Rieti et celui des Marses dont le confin a peut-être subi un réajustement entre 1114 et 1153. Il n’est pas exclu en effet que le territoire de Montagliano ait été compris dans le diocèse éphémère de Carsoli, réuni en 1057 au diocèse des Marses dont les limites ont été définies avec précision par le pape Pascal II en 111495. Or le Catalogus baronum et le tracé de la frontière du royaume de Sicile, sanctionnée par les accords de Bénévent en 1156, montrent que la conquête normande s’était arrêtée, pour des raisons qui nous échappent, aux confins de Montagliano, très exactement au fosso Sant’Angelo, sur la rive droite du Turano, et, sur la rive gauche, au fosso Carcarone96. On ne peut manquer d’observer que les papes Anastase IV (1153-1154) et Adrien IV (1154-1159) ne délivrèrent pas moins de cinq privilèges aux évêques de Sabine, des Marses et de Rieti, à deux reprises pour les deux derniers, qui définissaient en particulier les confins de leur diocèse respectif. Seule la teneur du privilège adressé par Anastase IV à l’évêque Dodon de Rieti le 24 août 1153 est connue ; c’est aussi le seul qui ne détermine pas expressément l’étendue du diocèse : la mention de l’église plébane Santa Lucia in Colle Alto qu’il contient prouve toutefois que le diocèse comprenait désormais le territoire de Montagliano et s’étendait jusqu’à ce fosso Sant’Angelo qui marqua la limite de l’expansion normande dans la région97. En 1182, le pape Lucius III ne précisa pas davantage le tracé des confins du diocèse de Rieti entre Vallinfreda et Tufo mais les listes des églises qu’il contient, celles que nous avons pour les Marses aux xiiie et xive siècles montrent sans l’ombre d’un doute que, depuis le mont Partilebre (1132 m) entre Ricetto et Tufo, la limite du diocèse des Marses rejoignait le fosso Sant’Angelo, entre Collalto et Poggio Cinolfo, remontait le Turano sur 1500 m environ, longeait le fosso Carcarone pour passer ensuite entre Oricola et Arsoli : sans doute légèrement réajustée avant 1153, elle correspondait très exactement à la frontière du royaume de Sicile dont le tracé local est conservé dans la géographie administrative actuelle98.
48Autre résultat des réaménagements de détail réalisés dans la géographie diocésaine jusqu’au milieu du xiie siècle, le diocèse de Rieti se superposait désormais au territoire compris dans le comitatus Reatinus au xie siècle, mais pour peu de temps. En effet, la rive gauche de la vallée du Turano devait retourner dans le diocèse de Sabine dès le début du xiiie siècle. Si les causes et les circonstances de ce nouvel ajustement nous échappent, on en connaît quelques résultats.
49Le contrôle de la voie de communication que forme la vallée du Turano et la présence de Santa Maria del Piano étaient les deux raisons essentielles, on l’a vu, pour lesquelles la petite région que commandait le monastère fut l’objet de controverses territoriales entre Rieti et la Sabine, au début du xiesiècle notamment99. Certainement incluse dans les limites du diocèse de Rieti en 1182, l’abbaye n’est pas mentionnée dans le privilège de Lucius III, pas davantage que les églises des villages qui dépendaient d’elle, en raison de l’exemption totale dont elle bénéficiait alors100. L’immunité dont jouissait Santa Maria del Piano tant qu’elle était formellement rattachée au diocèse de Rieti fut réduite à néant, ou à peu près, après son rattachement au diocèse de Sabine au tournant des xiie et xiiie siècles. Il est probable que le changement de juridiction fut à l’origine du litige qui opposa l’abbé de Santa Maria del Piano à l’évêque de Sabine, Pietro Collivaccinus (1217-1219/20)101. Engagé dans une politique vigoureuse de récupération des droits épiscopaux sur les églises de son diocèse qui dépendaient de monastères exempts102, l’évêque voulut l’étendre aussitôt aux villages de Santa Maria del Piano, en l’occurrence Pozzaglia, Montorio, Rocca Salice, Pietra Balda et Petescia. Confronté à la résistance de l’abbé et des coseigneurs laïcs des cinq villages, Gentile de Pietraforte, Giovanni de Pozzaglia et Andrea de Canemorto, dont le frère Pandolfo, sous-diacre et notaire apostolique, fut légat du pape dans la Marche d’Ancône quelques années plus tard, l’évêque porta le différend devant le pape. Honorius III confia l’affaire au cardinal-prêtre de Santa Croce in Gerusalemme, peut-être pour sa connaissance intime de la région puisqu’il s’agissait de Leone Brancaleoni dont la famille était implantée dans la vallée du Turano depuis la seconde moitié du siècle précédent103. Le 6 mars 1218, Honorius III confirma solennellement la composition amiable à laquelle avait abouti la médiation du cardinal au profit de l’évêque. L’abbé ne conserva aucune de ses prérogatives juridictionnelles, si ce n’est la seule institution dans les églises villageoises de clercs idoines qui devaient se présenter dans les vingt jours suivants pour jurer obédience à l’évêque et obtenir leur confirmation ; en contrepartie, l’abbé conservait l’essentiel des dîmes et des mortuaria dont il devait cependant verser une part à l’ordinaire104.
50Le confin entre les diocèses de Sabine et de Rieti établi au début du xiiie siècle ne reproduisait pas exactement celui du milieu du xe siècle, qui suivait le Turano jusqu’à l’antique Carsioli. La juridiction de l’évêque de Rieti s’étendait encore sur la partie de la rive gauche de la rivière qui correspondait au versant oriental du mont Faito. Une liste des églises dépendant de l’église réatine au milieu du xiiie siècle en témoigne.
51Auparavant membre de la curie où il était corrector des lettres pontificales, l’évêque Tommaso (1252-1262/65) tint un synode à son entrée en charge et, soucieux de connaître les forces de son église, fit dresser un état de son diocèse. Le document original ne nous est pas parvenu mais l’énumération a été recopiée à plusieurs reprises, avec quelques modifications et ajouts probables, à la suite des statuts synodaux que promulguèrent les évêques Giovanni Papazzuri (1302-1335/36), en 1303 puis en 1315, et Biagio da Leonessa (1347-1378). Les constitutions des synodes réatins, au reste mêlées de façon inextricable, et la liste des redditus et proventus episcopi Reatini qui les clôt nous sont connues par la copie qui en a été faite à la fin du xive ou au début du xve siècle dans un manuscrit conservé à la Bibliothèque nationale de Paris105. Nous reviendrons plus loin sur ce document. Pour le propos qui est ici le nôtre, contentons-nous de relever maintenant la juridiction qu’exerçait l’évêque de Rieti au milieu du xiiie siècle sur les églises de Bulgaretta et de Pietraforte106. Les deux villages, situés sur la rive gauche du Turano, n’avaient donc pas été incorporés au diocèse de Sabine dont la compétence territoriale s’arrêtait aux villages de Rocca Salice, Pozzaglia et Montorio107. L’histoire de l’instabilité séculaire de la rive gauche du Turano n’était pas achevée au milieu du xiiie siècle puisque Pozzaglia, Canemorto, Petescia et Montorio in Valle furent séparés du diocèse de Sabine pour être incorporés au diocèse de Tivoli en 1841108.
52La définition des confins diocésains et le problème, connexe, de la récupération des droits épiscopaux sur les églises monastiques furent la source d’un autre litige, qui opposa en 1253-1254 l’évêque Tommaso de Rieti à l’abbé de San Salvatore Maggiore, près de Concerviano, à propos de l’autre versant de la vallée. Célestin III en 1191 et Honorius III en 1221 avaient confirmé à deux reprises la protection apostolique dont jouissait le monastère ainsi que ses possessions situées en particulier entre le Salto et le Turano109. Comme Santa Maria del Piano et quelques mois après elle, San Salvatore Maggiore avait dû, pour ses églises situées dans le diocèse de Sabine, céder à la politique engagée par l’évêque pour restaurer les droits de l’ordinaire110. Trente ans après, l’évêque de Rieti s’opposa à l’abbé de San Salvatore pour les mêmes raisons. Les actes de la controverse, conservés aux archives capitulaires de la cathédrale de Rieti, ont été étudiés récemment par Robert Brentano111. Une des pièces contient la déposition que fit l’évêque pour démontrer l’appartenance du monastère et celle de ses églises au diocèse dont il définit l’extension géographique, et les réponses que donna l’abbé de San Salvatore point par point ; trois semaines plus tard, les prêtres de six églises de San Salvatore témoignèrent à leur tour. L’évêque Tommaso soutint en particulier que le diocèse s’étendait dans la vallée du Turano jusqu’à Roccasinibalda, Posta (Posticciola), Castelvecchio (Castel di Tora), Antuni, Paganico, Collalto et Ricetto ; si l’abbé refusa tout crédit aux allégations de l’évêque, l’un des prêtres accepta d’admettre toutefois l’extension du diocèse jusqu’à Posticciola, Ricetto et Marcetelli112. L’évêque de Rieti rencontra moins de succès dans son entreprise que son confrère dans le diocèse de Sabine puisqu’au début du xive siècle Clément V confirma la juridiction de San Salvatore Maggiore sur ses terres et l’exemption du monastère ad Romanam Ecclesiam nullo medio pertinentis113.
53L’ajustement des confins diocésains, les efforts conjoints déployés par les évêques dans la première moitié du xiiie siècle pour étendre les droits de l’ordinaire sur les églises qui échappaient jusque là à leur juridiction, couronnés de succès relatif à moyen terme, témoignent aussi, et surtout pour la question qui nous occupe, de la croissance de la population et de la redistribution des cadres du peuplement114.
2) Géographie ecclésiastique et réseau du peuplement : densité et consistance
54Du milieu du xiie à celui du xiiie siècle, les listes des églises réatines sont à peu près les seuls documents dont nous disposions qui permettent de suivre dans ses grandes lignes le resserrement de la trame de l’habitat concentré. Les nécessités de l’encadrement pastoral d’une population rurale en pleine croissance, l’affirmation des prérogatives épiscopales en la matière sont deux des motivations principales qui ont présidé à la compilation de ces listes. On n’abordera pas de front ici ces questions, qui dépassent largement le cadre de notre enquête115. Pour le sujet qui est le nôtre, leur intérêt premier réside dans le témoignage qu’elles fournissent sur l’apparition d’églises et de sites nouveaux entre ces deux dates.
55Le système pléban, toujours formellement en place au xiie siècle, tentait d’accompagner au mieux les mutations contemporaines de la géographie du peuplement116. Affirmant de manière solennelle la pérennité des structures de l’encadrement religieux, le privilège adressé à l’évêque de Rieti Dodone par le pape Anastase IV en 1153 énumère cinquante-cinq plebes, vingt-cinq oratoria quae monasteria dicuntur in eisdem plebibus ainsi qu’une trentaine d’églises pour la ville et son suburbium117. Pour autant qu’on puisse en juger sur la foi du toponyme qui accompagne le nom des églises, la création de nouvelles « pievi » avait resserré la trame du réseau ecclésiastique avant le milieu du xiie siècle, témoignant de la sorte de l’effort d’adaptation du système pastoral, dont la structure demeurait inchangée, aux modifications de la géographie du peuplement. On observe toutefois que la localisation et la distribution des églises plébanes, dont certaines étaient sans doute de fondation récente au xiie siècle118, ne reflétaient pourtant pas la réalité du peuplement contemporain. La remarque vaut en particulier pour la région de la vallée du Turano qui nous retient, où les trois plebes de Sant’Angelo in Cervia, de Sant’Andrea in Lecepto (Ricetto) et de Santa Lucia in Colle Alto étaient localisées dans des sites difficiles alors occupés par des habitats mineurs voire encore en grande partie dispersés. C’est le cas, on l’a vu, pour la villa du Cervia attestée depuis la deuxième moitié du siècle précédent et desservie par l’église plébane de Sant’Angelo. Comme d’autres toponymes, Ricetto et Collalto sont cités pour la première fois dans le document. Si on ignore tout de l’origine de Ricetto, le second a fait l’objet de recherches documentaires et de fouilles archéologiques récentes à l’occasion de la restauration du château qui domine le village (980 m ; pl. XLIVb)119. Les traces d’occupation les plus anciennes mises au jour par le fouilleur sont caractérisées par les trous de poteau de constructions en bois qui remontent peut-être à la fin du XIe ou au début du xiie siècle selon les datations que suggère la céramique résiduelle. Attestée à partir du milieu du xiie siècle, la plebs de Santa Lucia de Collalto, qui correspond à l’église du cimetière du village (869 m), devait desservir un habitat encore en partie dispersé le long des pentes du mont dont le sommet était également occupé120. A Collalto, la phase précastrale de l’occupation se prolongea jusqu’à la première moitié du xiiie siècle quand les constructions en bois furent enlevées pour laisser la place à l’édification d’une tour et d’un mur d’enceinte au sommet du site.
56Par définition, le privilège d’Anastase IV, comme celui de Lucius III, ne cite que les églises soumises à l’exercice de la juridiction épiscopale. Il ne livre donc qu’une image partielle de la géographie ecclésiastique et du réseau de peuplement. Aussi l’absence du village principal de la vallée, Montagliano, qui commandait un territoire parsemé de noyaux de peuplement plus ou moins concentrés, et de l’église qui y assurait les fonctions religieuses essentielles ne saurait surprendre car il dépendait de la juridiction de l’abbaye de Farfa121.
57Trente ans après celui d’Anastase IV, le privilège du pape Lucius III pour l’église de Rieti atteste le resserrement du quadrillage ecclésiastique réalisé depuis le milieu du siècle. Il cite désormais quelque quatre-vingt plebes comprises dans les confins du diocèse encore appelé parrochia, ajoute une allusion, brève et générale, aux chapelles ou églises qui dépendaient d’elles, que le texte du privilège d’Anastase IV ne contenait pas, et énumère près de soixante-dix oratoria quae monasteria dicuntur in plebatibus earundem plebium122. Aucune église nouvelle n’est attestée nommément dans la moyenne vallée du Turano, qui semble rester à l’écart de la multiplication des cadres ecclésiastiques, alors deux fois plus nombreux dans le diocèse qu’au milieu du siècle. La stagnation n’est pourtant qu’apparente.
58Les enquêtes réalisées sur le terrain et les sources écrites de la première moitié du xiiie siècle s’accordent en effet pour montrer l’accélération que connaît alors le processus de recomposition du peuplement dans la vallée. Les modifications survenues à Montagliano, à Offiano ou à Sant’Agnese, l’apparition d’un habitat d’abord dispersé puis concentré et fortifié à Collalto ne sont que les témoignages d’un mouvement général. Certains sites, comme Montorio et Petescia (Turania) dont le toponyme est signalé depuis le xie siècle sans dévoiler pour autant leur morphologie, sont désignés par le mot castrum au début du xiiie siècle tandis que d’autres, comme Pietraforte dont le seigneur, nobilis vir Gentile est attesté en 1218, font alors leur apparition dans la documentation123 (pl. XLVb-XLVIIIa). Le recensement des églises ordonné par l’évêque Tommaso au milieu du xiiie siècle, dans lequel le mot plebs n’apparaît plus, énumère les églises et les chapelles au nombre de plusieurs centaines124. Il fournit de la sorte un état des lieux, que l’on peut considérer comme à peu près exhaustif puisqu’il mentionne également les églises des ordres religieux125, de la géographie ecclésiastique du diocèse et, en particulier pour nous, du réseau de peuplement dans la moyenne vallée du Turano. Depuis la fin du xiie siècle, les cadres pastoraux avaient évolué pour s’adapter aux caractères nouveaux de la géographie du peuplement que la formation de villages fortifiés et ouverts avait enrichie et diversifiée au xiie et au xiiie siècle, conduisant de la sorte à la dissolution de l’ancien système pléban. Un nouveau tissu ecclésiastique se mit en place au rythme de l’apparition des centres habités et selon leur importance. Les trois églises plébanes qui assuraient la cura animarum sur la rive droite du Turano à la fin du xiie siècle encore perdirent leur place éminente au profit des églises fondées à l’intérieur du périmètre castral ou d’églises situées à l’écart de l’habitat. L’ancienne « pieve » de Sant’Andrea de Licepto était devenue une chapelle dépendant de l’église San Gregorio de Collalto, bâtie dans le village, qui avait remplacé la « pieve » de Santa Lucia, restée à l’extérieur des murs et désormais desservie par des moniales. Dès lors, plusieurs villages, de fondation plus ou moins récente, ont acquis une position dominante comme Collalto, Paganico et, dans une moindre mesure, Pietraforte ; d’autres sont documentés pour la première fois, qui sont placés dans des situations secondaires, comme Ascrea, Collegiove et Nespolo, mais qui comptent parfois deux églises126. Faute de documentation appropriée et en l’absence d’enquête archéologique spécifique, il est difficile d’établir l’époque de la fondation des églises documentées hors de l’habitat. S’il est vraisemblable qu’elles ont précédé parfois l’« incastellamento » stricto sensu ou la concentration contemporaine de la population dans des villages ouverts, rien n’autorise cependant à faire remonter à une très haute époque leur fondation qui a dû bien souvent accompagner la colonisation agraire des viiie et ixe siècles voire la dissolution de la curtis de Corneto au xe siècle. Les sources manquent pour suivre dans la vallée les étapes du démembrement de certaines « pievi » et celles, concomitantes, de l’appropriation par les églises villageoises des fonctions paroissiales primordiales127. Quoi qu’il en soit, le processus était arrivé à son terme au milieu du xiiie siècle.
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59Les sources écrites et les enquêtes archéologiques mettent ainsi en évidence l’existence d’une nouvelle phase dans l’histoire du peuplement dans la vallée du Turano qui s’ouvre vers le milieu du xiie siècle et se prolonge au xiiie siècle : agrandissement des villages fortifiés, fondations nouvelles, concentration de la population dans des villages ouverts définissent le processus qui connaît alors son apogée.
60Ici comme ailleurs, les abandons accompagnèrent l’essor du réseau recomposé du peuplement. Acquamezza disparut ainsi de la documentation écrite après le début du xiie siècle128. En l’absence de fouilles, nous ignorons quelle était la physionomie du castellum à la veille de son abandon tout autant que les circonstances qui conduisirent à son élimination. Il différait sans doute du château de Castiglione, détruit et abandonné à la même époque, pour ressembler davantage à Offiano, autrement dit à un village constitué, puisqu’une ou plusieurs églises, situées dans le castellum ou dans ses pertinentiae, sont mentionnées en 1092129. Les quelques désertions documentées d’une manière ou d’une autre au xiie siècle frappèrent indifféremment des châteaux isolés, tel Castiglione, et des villages fortifiés, qui étaient définis comme tels mais dont la consistance matérielle nous échappe encore, comme Acquamezza et, de manière temporaire seulement, Offiano. Si l’on en juge par l’exemple de Castiglione, le processus ne fut pas exempt de violences répétées, dont nous ignorons pourtant les causes précises.
61Des raisons démographiques, économiques et sociales expliquent sans doute largement l’ampleur du second « incastellamento » réalisé dans un contexte de durcissement de la seigneurie130. Sous prétexte qu’elles sont difficiles à établir en dépit des apparences, on ne saurait négliger les motivations d’ordre militaire résultant de la nouvelle situation géopolitique régionale créée par l’expansion normande et par la formation de la frontière terrestre du royaume de Sicile aux confins de laquelle papes et empereurs entrèrent en compétition pour asseoir leur domination ou restaurer leur pouvoir. Sans y accorder plus d’importance qu’il n’en faut, on observera à ce propos que les sites qui font leur apparition au voisinage immédiat de la frontière ont notamment en commun leur situation à des altitudes qui dominent la région131. Les sites fondés et modifiés dans un contexte général d’essor à partir du xiie siècle répondirent peut-être, mais dans une mesure dont nous ignorons l’étendue, aux nécessités liées à la sécurité des populations autant qu’à la défense d’une région frontalière sensible et menacée de manière incessante.
III – SOUABES ET ANGEVINS : LES RETOMBÉES DANS LA VALLÉE DU TURANO (PREMIÈRE MOITIÉ DU xiiie SIÈCLE – DÉBUT DU xive SIÈCLE)
62Le couronnement impérial de Frédéric II en 1220 et l’union personnelle du royaume de Sicile et du regnum Italiae, en dépit de leur séparation formelle, menaçaient l’autonomie de la papauté et ses revendications temporelles. Le conflit entre les deux pouvoirs entra dans une phase aiguë avec le pontificat de Grégoire IX (1227-1241) pour s’achever avec l’accession de Charles d’Anjou au trône de Sicile, investi en 1265 et couronné l’année suivante, et sa victoire sur le dernier des Hohenstaufen près de Tagliacozzo en 1268132. Cette histoire générale est bien connue. Ce sont ses répercussions dans la vallée à l’échelon le plus élémentaire, celui du village, qui nous intéressent ici.
63Tout au long du xiiie siècle, les habitats que nous avons choisi d’étudier ont connu des modifications dont il convient de démêler les raisons après les avoir mises en évidence. Une question, principale, se pose. Leur situation frontalière, avec les conséquences qu’elle implique en période de tensions et de conflits, est-elle responsable des évolutions observées dans le sol ? Dans l’affirmative, en quoi et dans quelle mesure ? En d’autres termes, si l’on renverse la question, l’archéologie, qui fournit habituellement ses matériaux à l’histoire économique et sociale, peut-elle contribuer à éclairer l’histoire politique ?
A) L’espace frontalier : châteaux et seigneuries
1) Les Orsini dans la vallée du Turano : le castrum de Montagliano et la villa Sancte Agnetis de Monte Aliano pendant la première moitié du xiiie siècle
64Le pontificat de Célestin III (Giacinto di Pietro Boveschi, 1191-1198) est à l’origine de l’ascension de son neveu Orso di Bobone, éponyme des filii Ursi, et de ses fils Matteo et Giangaetano, à qui le pape concéda Vicovaro, Cantalupo et Burdella situés dans la vallée de l’Aniene et noyau de l’expansion territoriale de la famille. Pendant les premières décennies du xiiie siècle, plusieurs castra vinrent agrandir les possessions encore limitées des filii Ursi le long de la via Valeria, dans la vallée du Licenza et dans la vallée du Turano133.
65Propriété éminente de l’abbaye de Farfa confirmée à nouveau par Innocent III en 1198134, le castrum de Montagliano entra dans la dépendance des Orsini au début du xiiie siècle selon des modalités et pour une durée que nous ignorons. Dans son testament de 1232, Giangaetano di Orso Orsini légua en effet cinquante livres aux habitants de Montagliano pour les indemniser des biens dont il s’était emparé ; il légua également cinquante sous aux habitants de la villa Sancte Agnetis de Monte Aliano en réparation des dommages que leur avaient fait subir les habitants du castrum135. Quelques années après la mort de leur père entre 1234 et 1237, Matteo Rosso et Napoleone procédèrent en 1242 à la division de l’héritage paternel resté jusque là dans l’indivis136. Montagliano échut alors à Matteo Rosso. Quatre ans plus tard, dans son testament daté de 1246, celui-ci légua à son tour à sa femme cent livres des rentes que procurait en théorie Montagliano chaque année : leur perception ne devait pas aller sans poser problème puisqu’est envisagée l’éventualité qu’elle reçoive cette somme d’autres revenus de son mari137. Après cette date, Montagliano n’est plus documenté parmi les biens de la grande famille romaine pendant plusieurs décennies.
66La possession du castrum par les Orsini n’a pas laissé de traces particulières sur les structures matérielles du site telles que l’enquête a pu les observer. C’est toutefois à cette époque que s’articule davantage le noyau fortifié sommital selon un plan que seule une fouille en extension mettrait en évidence138. L’intérêt principal, pour nous, réside ailleurs.
67En 1232, en effet, le testament de Giangaetano Orsini atteste l’appartenance de la villa de Sant’Agnese au territoire de Montagliano, dont elle suit alors les destinées. C’est en raison de cette dépendance que Giangaetano Orsini légua cinquante sous aux habitants de la villa de Sant’Agnese en réparation des dommages que leur avaient causés les habitants du castrum. L’intégration de la villa de Sant’Agnese dans le finage de Montagliano au xiiie siècle est un fait curieux qui semble témoigner de la discontinuité du tenimentum castri. Le privilège d’Innocent III pour l’abbaye de Farfa distinguait nettement du reste l’église Sant’Agnese et sa villa du castrum de Montagliano et de son finage139.
68Les sources ne livrent pas de description du territoire de Montagliano ni de ses limites au xiie et au xiiie siècle. Nous savons qu’il s’étendait dans les années 1070 entre Paganico, les monts de l’interfluve Turano-Salto, le territoire de Carsoli et qu’il comprenait à l’ouest le mont Croce sur le versant occidental duquel se trouvait l’église Sant’Agnese140 (carte 9, p. 260). La fondation de nouveaux villages à partir de la fin du xie siècle avait réduit le tenimentum de Montagliano qui confinait au xive siècle avec ceux de Collalto, de Poggio Cinolfo, du castrum Cellarum (noyau de l’actuelle Carsoli), de Vivaro et, ce qui nous intéresse davantage ici, avec celui de Petescia (aujourd’hui Turania) à l’ouest141 (carte 11, p. 336). Pour sa part, le territoire de la villa de Sant’Agnese était alors limité par Offiano, Montorio, Pozzaglia, les biens de Santa Maria del Piano, le rio di Petescia et le castrum Sinibaldi, Portica, Vivaro et à l’est par Petescia142. Fondé sans doute entre 1075 et 1085, Petescia s’intercala très exactement en effet entre Montagliano et Sant’Agnese143. Dès lors, le territoire de Malamorte, où la villa de Sant’Agnese se forma dans la deuxième moitié du xiie siècle, était isolé de celui de Montagliano. Pour autant, le testament de Giangaetano Orsini montre que la villa, appelée de Monte Aliano, relevait encore du castrum au début du xiiie siècle.
69A l’exception de la mention fugitive dans le testament de Giangaetano Orsini, la documentation contemporaine est totalement idigente qui se limite aux confirmations des possessions de l’abbaye de Farfa délivrées par les papes Innocent III en 1198 et Urbain IV en 1262144. On aurait pourtant aimé connaître les raisons des déprédations commises par les habitants de Montagliano dans la villa de Sant’Agnese au début du xiiie siècle et réparées par Giangaetano Orsini dans son testament. Faut-il y voir par exemple une manifestation de la volonté d’enchâteler de gré ou de force les habitants groupés dans un petit hameau satellite, isolé depuis la fondation de Petescia, à l’intérieur d’un castrum récemment agrandi, dans le but d’exercer un contrôle plus étroit sur son territoire ? On a vu en effet que la constitution de la frontière du royaume de Sicile ne suffit peut-être pas à expliquer ce qui apparaît non seulement comme un ouvrage de fortification mais aussi comme l’expansion importante d’un village qui tripla sa superficie vers le milieu du xiie siècle et la matérialisation de cette croissance dans les structures de l’habitat. L’agrandissement du mur d’enceinte de Montagliano a sans doute été entrepris dans la perspective d’attirer à l’intérieur de ses murs une population encore dispersée ou bien installée dans les hameaux qui parsemaient son territoire. Le legs accordé par Giangaetano Orsini aux habitants de la villa de Sant’Agnese en 1232 fournirait ainsi un témoignage de la volonté manifestée par la communauté des habitants de Montagliano de porter à terme le processus de recompostion de l’habitat et de remembrement foncier aux dépens des habitants des villae145. La tentative, si réellement elle eut lieu dans cette perspective, ne fut pas couronnée de succès. L’enquête archéologique n’a pas permis d’évaluer la nature ni l’étendue des préjudices subis par les habitants de la villa. Aucun niveau de destruction ou d’incendie n’a été mis au jour qui serait daté de la fin du xiie siècle ou de la première moitié du siècle suivant et qu’on pourrait ainsi mettre en relation avec une expédition des habitants de Montagliano. Il est vrai que, dans le château, la restauration du xive siècle a fait disparaître les niveaux antérieurs. Dans tous les cas, le testament de Giangaetano Orsini montre que la villa de Sant’Agnese était occupée en 1232 puisqu’il en indemnise les habitants à cette date, ce que confirme l’enquête de terrain qui n’a mis en évidence aucun abandon du site à cette époque.
70Pendant la première moitié du xiiie siècle, les Orsini possédaient par conséquent Montagliano et son territoire qu’ils avaient acquis selon des modalités qui nous échappent. Avec Montagliano, qui était alors le castrum le plus important dans cette région du confin, ils renforçaient leur présence dans le territoire contrôlant la via Valeria et s’approchaient de la frontière qu’ils allaient franchir en s’implantant à Tagliacozzo au lendemain de la mort de Frédéric II. Si rien ne l’atteste, la mainmise des Orsini sur Montagliano ne s’est peut-être pas faite sans l’aval des papes Grégoire IX et Innocent IV, lequel est intervenu à plusieurs reprises pour soutenir l’expansion territoriale d’une famille dont les branches cousines n’étaient pas encore divisées par des choix politiques opposés146. On pourrait y voir ainsi un instrument de la politique antifrédéricienne des pontifes visant à renforcer les confins de l’État pontifical menacés par l’empereur147.
71La domination des Orsini sur Montagliano et son territoire n’est plus documentée après 1246. Selon des modalités qu’on ignore, le castrum changea à nouveau de mains dans les années qui suivirent. Si l’abbaye de Farfa conserva ses droits éminents sur Montagliano, sur Offiano et sur la villa de Sant’Agnese dont la propriété fut confirmée par Urbain IV en 1262148, de nouveaux acteurs firent alors leur apparition dans cette région de la vallée du Turano.
2) Frédéric II et la frontière : châteaux domaniaux et châteaux féodaux
72La réorganisation de la défense du royaume de Sicile entreprise par Frédéric II à partir des années 1220 plaça au cœur du système militaire les châteaux domaniaux dont l’administration fut réaménagée à la charnière des années 1220 et 1230. Attestés pour la première fois en 1228-1229 puis de manière régulière à partir de 1230-1231, les provisores castrorum étaient chargés de pourvoir à la réparation, à l’entretien et à la garde des châteaux du domaine situés dans leur circonscription149. Selon les statuts de reparatione castrorum datant des années 1240-1245, la province des Abruzzes comptait alors, outre trois palais royaux, vingt-huit châteaux domaniaux dont aucun ne fut cependant une construction voulue par Frédéric II150. Six châteaux domaniaux assuraient la défense de la région frontalière qui nous intéresse ici : Capradosso, Rocca Alberici, Macchiatimone, Celle (actuelle Carsoli), Oricola, Rocca Prugna et Rocca di Botte. Parmi eux, aucun ne figurait dans la liste des castra exempta qui dépendaient directement du pouvoir central pour le choix ou le maintien de leurs châtelains et dont une liste est donnée dans les directives générales adressées aux cinq provisores castrorum le 5 octobre 1239151. Pourtant, Frédéric II intervint directement dans les affaires de deux ou trois d’entre eux qui furent assimilés de la sorte aux châteaux exempts. L’empereur témoignait ainsi autant de l’importance qu’occupaient ces châteaux dans le dispositif frontalier que de l’entière confiance qu’il accordait aux personnages chargés de leur garde. Il s’agissait du reste des membres d’une seule famille, les Castiglione, dont un représentant, Tolomeo, fut notamment justicier des Abruzzes avant d’être nommé justicier de la province du Val de Crati et de Terre Jourdaine, en Calabre septentrionale, en 1239-1240152. Une forte réaction antifrédéricienne se développa à Rieti et dans la région à partir de l’automne 1239153. Le 17 novembre, Frédéric II confirma à Bartolomeo di Castiglione, fils du justicier Tolomeo, la garde du castrum de Macchiatimone, situé dans la vallée du Salto, que lui avait confiée le maître justicier de la grande cour Henri de Morra154. Le 15 décembre de la même année, répondant point par point aux demandes formulées par le capitaine et maître justicier Andrea de Cicala, Frédéric II lui enjoignit en particulier de ne pas retirer la garde de Rocca di Botte, située près de la frontière face à Saracinesco, aux fils d’Andrea de Montone, descendants probables d’Oddo de Montanea qui la tenait de Roger II au milieu du xiie siècle155, ni à Tommaso di Castiglione, quia fideles nostri sunt ; il lui confirmait en même temps que Macchiatimone devait être gardé par Bartolomeo di Castiglione156.
73L’année suivante, Frédéric II envoya un deuxième fils de Tolomeo di Castiglione, Roberto, enlever le château de Rocca Alberici, situé non loin de Macchiatimone, où s’était retranché le rebelle Giacomo di Sinibaldo, descendant de Raynaldus Senebaldus qui la tenait en fief de Roger II au milieu du xiie siècle. La tâche était ardue. En effet l’empereur manda au justicier des Abruzzes et à tous ses fidèles d’Amiterno, des Marses, du Cicolano, de Carsoli et du Val di Petra de se tenir aux ordres de Roberto ; il enjoignit en outre au châtelain d’Antrodoco, qui avait refusé jusqu’alors d’accéder à la requête de Roberto, de mettre à sa disposition l’onagre qu’il détenait et que le justicier des Abruzzes devait acheminer avec tout le matériel nécessaire à son fonctionnement sur les lieux du siège157. Roberto exécuta avec succès la mission que Frédéric II lui avait confiée. Homme de guerre renommé, Roberto di Castiglione poursuivit une carrière brillante pendant les années 1240 quand il tint un rôle éminent dans la reconquête de la Marche d’Ancône et de la Romagne que Frédéric II avait dû abandonner en 1230. Nommé successivement capitaine, vicaire général et capitaine général de la Marche d’Ancône, il fut également podestat de Fermo et, en Lombardie, de Crémone ; il ne parvint toutefois à bloquer l’offensive du cardinal Raniero Capocci dans les Marches en 1247-1248 et perdit alors sa charge. Il mourut entre 1259 et 1266158.
74Les origines de la famille ne sont guère connues. Il n’est pas impossible que les Castiglione, comme le lignage voisin des Mareri dont la destinée fut à peu près parallèle jusqu’au xive siècle, soient issus de la dynastie comtale des Marses et de Rieti159. Le château principal de la famille, qu’elle possèdera non sans difficultés, on le verra, jusqu’à la première moitié du xive siècle, Castiglione, était situé non loin de Castelmenardo et du Mont San Mauro, dans la vallée de l’Apa, un affluent de la rive droite du Salto160. Il est sans doute cité pour la première fois vers le milieu du xiie siècle quand il est tenu in capite a domino rege par Gentile Vetulus, dernier comte de Rieti161. Ce n’est guère qu’après le milieu du xiiie siècle que les possessions de la famille dans le Cicolano, qui recouvraient largement les terres tenues en fief par Gentile Vetulus au milieu du xiie siècle et qui comprenaient en particulier, outre le castrum de Castiglione, Rocca Randisi, Poggio San Giovanni et une part de Tufo, seront documentées, assez mal du reste162.
75Les Castiglione étendirent également leurs possessions hors du royaume et s’implantèrent de l’autre côté de la frontière. Aussi est-ce à ce titre qu’ils nous intéressent ici. L’abbaye de Farfa perdit ses droits éminents sur Montagliano dans la seconde moitié du xiiie siècle. C’est en effet avec le privilège du pape Urbain IV de 1262 que le village apparaît pour la dernière fois dans les confirmations des biens de l’abbaye sabine163. Encore tenu par Matteo Rosso Orsini en 1246, on l’a vu, le castrum passa à une date et selon des modalités que nous ignorons à Bartolomeo di Castiglione et à son neveu Robertuccio, fils de son frère Roberto, durant les dernières années du règne de Frédéric II ou pendant celui de Manfred. Dans tous les cas, les Castiglione tenaient Montagliano, et peut-être aussi les sites qui gravitaient autour de lui comme Offiano, avant la défaite du dernier des Souabes en 1268. Nous y reviendrons.
76Le cas des Castiglione n’est pas isolé. Dans cette région de la frontière comme dans d’autres, il convient de souligner le soin que mirent les familles seigneuriales à étendre leur domination de part et d’autre du confin : les Mareri, dont la seigneurie s’étendait dans la vallée du Salto autour du castrum familial, s’implantèrent également dans l’État pontifical quand Tommaso reçut Castelvecchio (Castel di Tora) d’Innocent IV en 1250164 ; les Collalto, dont l’apparition dans les sources écrites coïncide avec l’enlèvement des constructions en bois et la fortification du sommet du site éponyme par l’édification d’une tour et d’un mur d’enceinte dans le courant du xiiie siècle, étaient également établis à Pescorocchiano dans le royaume165.
77En effet, la frontière du royaume de Sicile ne formait pas une ligne de démarcation fermée et infranchissable. Vers le milieu du xiiie siècle, plusieurs lignages de premier plan – les Orsini, les Castiglione, les Mareri, les Collalto à un degré moindre – ont pu édifier ainsi des seigneuries qui s’étendaient de part et d’autre du confin dans la zone frontalière166. Selon les cas, ils avaient bénéficié de l’appui de l’empereur ou du pape qui virent sans doute dans cette pratique le moyen de contrôler plus fermement une région hautement sensible. Désormais, l’histoire des vallées du Turano et du Salto allait s’identifier à celle des lignages qui y étaient établis et de leurs choix politiques, parfois divergents, dans les conflits qui opposèrent les descendants de Frédéric II à la papauté et aux Angevins. Le dernier épisode, qui signa la défaite définitive des Staufen, est sans doute à l’origine des changements qui modifièrent durablement l’organisation du peuplement dans la moyenne vallée du Turano.
B) La vallée du Turano après la bataille de Tagliacozzo (1268 – première moitié du xive siècle)
78Investi du royaume de Sicile par le pape Clément IV le 28 juin 1265, couronné au Latran le 6 janvier suivant, Charles d’Anjou entra dans le royaume le 2 février et défit l’armée de Manfred, qui fut tué durant la bataille, à Bénévent le 26 février 1266. Pendant ces événements, la région confirme la position stratégique déterminante qu’elle avait acquise depuis plus d’un siècle. Dès le mois de janvier, Clément IV, désireux de se rendre à Rieti pour la circonstance, mande au conseil de la commune d’obtenir que les seigneurs des castra du diocèse de Rieti situés dans le royaume se rallient à Charles d’Anjou, de s’assurer qu’ils obéiraient aux ordres émanant de l’Église romaine et du nouveau roi, ou, s’ils refusaient, de leur causer tout le mal possible. Le conseil envoya une ambassade aux Mareri, aux Castiglione et aux seigneurs de plusieurs châteaux frontaliers partisans de Manfred. Filippo et Giovanni Mareri changèrent de camp, se soumirent avec d’autres et furent dès lors qualifiés de fideles dans les actes de Charles d’Anjou ; quelques uns, prudents, différèrent leur réponse ; seul le châtelain d’Antrodoco refusa tout net de se soumettre, déclarant sans ambages que le castrum appartenait au roi, qu’il le tenait en son nom et qu’il le tiendrait tant qu’il le pourrait167. On ignore quelle fut alors la réponse des Castiglione. Après la défaite de Manfred, Clément IV et Charles d’Anjou intimèrent l’ordre à la commune de Rieti d’arrêter tous ses partisans, rebelles à l’Église et au roi, qui s’enfuyaient du royaume et trouvaient refuge dans la région168. En 1267 et 1268, l’expédition italienne du petit-fils de Frédéric II, Conradin, allait marquer l’ultime et vaine tentative des Hohenstaufen de recouvrer la couronne de Sicile. Elle mit de nouveau la région des vallées du Turano et du Salto aux avant-postes.
1) Avant et après la bataille : Conradin de Hohenstaufen dans la vallée du Turano
79Entré à Rome le 24 juillet 1268, acclamé empereur, Conradin réunit son armée pour tenter de reconquérir le royaume. Il quitta Rome le 10 août et emprunta la via Tiburtina-Valeria jusqu’à Celle (Carsoli) où il arriva le 18 ou le 19 août (carte 11, p. 336-337). Ne pouvant poursuivre en direction de Tagliacozzo par le col de Monte Bove, bloqué par l’armée angevine, Conradin bifurqua alors par la vallée du Turano : il y trouva le soutien des Castiglione et des Mareri, entrés en rébellion contre Charles d’Anjou, qui tenaient les deux villages principaux de Montagliano et de Castelvecchio169 ; il franchit ensuite les monts de l’interfluve Turano-Salto puis remonta la vallée du Salto jusqu’à Scurcola Marsicana où il rencontra l’armée de Charles d’Anjou le 23 août 1268170. Après la défaite, Conradin et les restes de son armée décimée s’enfuirent à travers le Réatin qu’ils purent traverser sans encombres grâce à l’appui de la population171.
80Pour curieux que cela paraisse de prime abord, la bataille de Tagliacozzo et la défaite de Conradin marquent sans doute un tournant dans l’organisation territoriale et dans l’assiette du peuplement de la vallée du Turano. Avant les grandes crises de l’automne du Moyen Âge responsables de la plupart des désertions villageoises172, les redistributions qui dessinèrent la carte du peuplement de la moyenne vallée du Turano à partir du dernier tiers du xiiie siècle paraissent étroitement liées à la victoire de Charles d’Anjou sur Conradin. Le fait, dont nous allons examiner les répercussions locales, n’est pas sans importance qui permet de considérer à nouveau les phénomènes conjoncturels et politiques pour l’histoire de l’occupation du sol et de l’habitat dans une vallée frontalière.
2) De Tagliacozzo aux Vêpres siciliennes : Charles Ier d’Anjou et les Castiglione
81La capture de Conradin à Astura par Giovanni Frangipane le 8 ou le 9 septembre 1268, son procès pour crime de lèse majesté et son exécution le 29 octobre à Naples ouvrirent la voie à la répression féroce que Charles d’Anjou exerça contre les anciens partisans de Manfred qui avaient rejoint les rangs du petit-fils de Frédéric II173. Si le roi accorda le 4 décembre son pardon aux rebelles qui, ayant reconnu leurs erreurs, s’étaient soumis avec humilité174, il prit avant tout une série de mesures pour châtier les proditores dans leurs personnes et dans leurs biens : arrestation des rebelles qui se trouvaient encore dans le royaume et dont les principaux furent condamnés à la peine capitale ; captivité pour leurs enfants ; enquêtes dans tout le royaume pour identifier les partisans de Conradin et leurs familles ainsi que ceux qui les avaient assistés dans leur fuite ; statut général contre les rebelles ordonnant la confiscation systématique des biens des proditores qui avaient été tués sur le champ de bataille ou qui avaient été condamnés, de ceux qui continuaient à résister in locis rebellibus ou qui avaient fui le royaume et dont les fiefs furent concédés en quasi totalité à des chevaliers franco-provençaux175.
82Parmi les rebelles de la province des Abruzzes, Bartolomeo di Castiglione, Giovanni Mareri et leurs familles furent visés tout particulièrement par la colère de Charles d’Anjou176. Pas plus que les Mareri, Bartolomeo ne se soumit au lendemain de Tagliacozzo. Il résista au roi de Sicile pendant plusieurs années, mettant à profit la situation frontalière de ses terres. Si la plupart des biens que tenait la famille dans le royaume avaient été confisqués et cédés en fief à des fidèles du roi177, le castrum de Castiglione, dans le Cicolano, fit l’objet d’un siège long et difficile178.
a) Le sort de Montagliano
83La répression de Charles d’Anjou ne s’arrêta pas aux frontières du royaume mais s’étendit également au-delà. Charles prit notamment des mesures pour que les rebelles ne pussent trouver refuge dans leurs terres situées hors des frontières : s’il ne pouvait y confisquer leurs castra qui échappaient à sa souveraineté, il ne se priva pas d’ordonner leur destruction. Dans un mandement adressé le 28 juillet 1269 à Philippe de Roussy, capitaine et provisor castrorum Aprutii, le roi lui enjoignait de châtier sans retard et avec dureté les communautés de Castelvecchio (Castel di Tora) et de Montagliano. Il accordait toutefois aux deux villages la possibilité d’échapper à la destruction à un certain nombre de conditions : jurer serment de fidélité et d’obéissance à l’Église et au roi ; refuser de donner refuge ou de porter aide à Giovanni et Filippo Mareri, à Bartolomeo di Castiglione et à leurs fils ainsi qu’à tout autre rebelle ; promettre de guerroyer contre tous les ennemis de la Sainte Église Romaine et du roi. Charles intimait également aux deux communautés villageoises l’ordre de livrer l’épouse de Giovanni Mareri, Margarita, et Robertuccio de Castiglione, fils de Roberto et neveu de Bartolomeo, au cas où ceux-ci auraient agi contre l’Église ou contre lui. En revanche, si Margarita et Robertuccio ainsi que les habitants des deux villages juraient de respecter ses injonctions et d’une manière plus générale d’obéir en tout au roi et à ses mandataires, ils obtiendraient son pardon179. Le mandement de Charles d’Anjou atteste sa volonté de châtier les Mareri et les Castiglione dans leurs villages situés hors du royaume qui avaient offert un soutien à Conradin dans sa marche vers Tagliacozzo et qui constituaient leur base de repli hors des frontières.
84Nous ne savons si Bartolomeo di Castiglione se rendit à Montagliano dans les mois qui suivirent le mandement du 28 juillet 1269. Le 31 mars 1270, il se trouvait à Rieti où il donnait, en son nom et au nom de son neveu Robertuccio, aux frères du couvent réatin de San Domenico des terrains à construire jouxte l’église en échange d’autres biens180. On ne peut exclure qu’il se rendît alors à Montagliano. Il devait pourtant regagner le royaume peu de temps après puisqu’on le trouve dans son castrum de Castiglione dans le Cicolano au printemps 1272 où il est assiégé par Philippe de Roussy. Le 1er mai, Charles d’Anjou écrivait toutefois à son capitaine des Abruzzes pour lui enjoindre de laisser Bartolomeo et ses fils quitter librement le royaume s’ils se soumettaient et lui livraient le castrum sans opposer davantage de résistance181. Il est vraisemblable que les Castiglione obtempérèrent, au moins momentanément. Le castrum fut pris à la fin du printemps ou au début de l’été et confié à la garde d’un châtelain avant d’être concédé à Guillaume de Cadenet avant le 2 septembre182. Bartolomeo et ses fils quittèrent sans doute le royaume pour se rendre dès cette époque dans leur castrum de Montagliano.
85Les Castiglione furent récompensés pour leur soumission. Les intérêts de la famille se déplacèrent vers le sud de la Péninsule dans les années qui suivirent. Un frère de Bartolomeo, l’archevêque de Reggio Giacomo, qui prit possession de son diocèse au lendemain de la bataille de Bénévent, était resté fidèle au parti de Charles d’Anjou au moment de l’expédition de Conradin. En 1276, l’intervention de l’archevêque et de Bertoldo il Rosso Orsini, allié puissant de Charles, permit d’obtenir la protection du souverain pour les deux fils de Bartolomeo, Roberto et Giacomo, entrés l’un comme doyen, l’autre comme chantre dans le clergé de l’église cathédrale de Reggio183. S’ils ne pouvaient revendiquer aucun droit sur les biens de leurs parents confisqués en raison de leur rébellion, les deux frères tenaient cependant des biens féodaux en Calabre, ceci dès 1275184. A la mort de Giacomo en 1277, le chapitre cathédral de Reggio alla même jusqu’à élire son neveu Roberto archevêque, élection que le pape Nicolas III annula en 1279 en raison de l’ignorance de l’intéressé en matière ecclésiastique185. Quant à Bartolomeo, il obtint également la grâce du souverain186. Toutefois, le ralliement des Castiglione aux Angevins n’était pas très solide. Au lendemain des Vêpres siciliennes187, Bartolomeo et ses fils quittèrent le royaume sans tarder pour s’établir à nouveau dans la vallée du Turano où ils sont présents dans leur castrum de Montagliano dès le 26 octobre 1282. Bartolomeo y était encore le 31 mars de l’année suivante188. On ne sait s’il y resta. Toutefois, le castrum familial de la vallée du Salto, que Charles Ier avait donné en fief à Guillaume de Cadenet en 1272, s’était révolté à nouveau : au mois de juillet 1283, le justicier des Abruzzes et le capitaine de L’Aquila l’assiégeaient quand, le 29 juillet, le prince de Salerne, vicaire général du royaume et futur Charles II, leur intima l’ordre de s’en emparer, prenant les dépenses du siège à la charge du trésor royal189.
86Il est temps de revenir à Montagliano. Le mandement royal du 28 juillet 1269 est le premier document attestant la possession du village par la famille, qui le tenait certainement depuis quelques années déjà. Selon des modalités que nous ignorons, les Castiglione avaient acquis la propriété pleine et entière du castrum, encore cité parmi les possessions de l’abbaye de Farfa en 1262, qu’ils conservèrent jusqu’au xive siècle190. Les importants travaux réalisés, on l’a vu, dans la rocca et sur le mur de l’enceinte sommitale du castrum, entièrement reconstruit par endroits, que la céramique et les monnaies permettent de dater de la deuxième moitié du xiiie siècle ou du début du xive siècle, doivent donc leur être attribués191. Il est tentant, naturellement, d’y voir une conséquence des ordres donnés par Charles d’Anjou à son capitaine des châteaux d’Abruzzes en 1269. La fouille n’a pourtant mis en évidence aucun niveau de destruction ni d’incendie contemporain. A supposer que Philippe de Roussy ait effectivement démantelé Montagliano, les Castiglione, qui en restaient les maîtres, auraient restauré le castrum immédiatement après sa destruction partielle, laquelle n’aurait ainsi laissé aucune trace dans la stratigraphie fouillée. Mais il est également possible que les Castiglione aient entrepris ces travaux pour renforcer la défense d’un castrum que sa localisation hors du royaume transformait en base de repli d’importance désormais vitale pour eux. En 1269, Robertuccio di Castiglione était présent à Montagliano où Bartolomeo passa peut-être au printemps 1270 et où il s’installa pour quelque temps sans doute après la chute de son castrum de Castiglione dans le Cicolano à l’été 1272 et où il demeura certainement de l’automne 1282 au printemps de l’année suivante. Les Castiglione auraient alors entrepris de renforcer voire de rebâtir totalement par endroits le mur d’enceinte du village qui, dans sa partie sommitale, remontait au milieu du xie siècle et d’aménager une rocca et un palais où résidaient Bartolomeo et sa famille au début des années 1280192. Autre hypothèse également vraisemblable, les travaux de restauration ont pu suivre une destruction provoquée par le tremblement de terre de 1298, dont la violence fut catastrophique dans la région, comme on va le voir. Si Montagliano ne fut donc pas pris ni peut-être démantelé par les Angevins, d’autres châteaux et villages qui lui étaient étroitement liés furent détruits à cette époque.
b) Destruction et abandon séculaire d’Offiano
87Reconstruit vers le milieu du xiie siècle, le castrum d’Offiano ne fut pas réoccupé de manière durable. En effet, l’enquête archéologique a mis en évidence une nouvelle destruction d’Offiano vers le milieu ou dans la seconde moitié du xiiie siècle : la tour fut alors abattue et le castrum incendié. Les habitants désertèrent le site qui resta abandonné pendant près d’un siècle, comme en témoigne l’absence des classes céramiques contemporaines, notamment la « vetrina verde » et la « vetrina laziale », pourtant répandues dans la région193. La documentation écrite n’est d’aucun secours, qui est totalement indigente jusqu’à la seconde moitié du xive siècle à l’exception de la seule mention du castrum Oflani cum ecclesiis et pertinentiis suis dans la confirmation des biens de Farfa donnée par le pape Urbain IV en 1262194.
88Quelle cause attribuer à cette destruction et à l’abandon qui suivit ? Si la faiblesse chronique d’Offiano explique sans doute la désertion séculaire du site, sa destruction peut être mise au compte de facteurs divers.
89Après une période de calme relatif du xe au xiie siècle, les dernières décennies du xiie siècle voient un regain de l’activité sismique en Italie centrale, qui s’accélèra jusqu’à prendre des proportions catastrophiques pendant le siècle suivant. Les degrés VIII et IX de l’échelle Mercalli-Cancani-Sieberg, dont les effets destructeurs sont très importants, sont atteints à plusieurs reprises, à Subiaco en 1216, au Mont-Cassin en 1231. La fréquence s’accroît à partir des années 1240. Le dimanche 30 novembre 1298, à l’heure de la messe du matin, un tremblement de terre dont l’épicentre était situé entre Spolète et Rieti connut une intensité dévastatrice ce jour là et le lendemain (degré X)195. Les secousses se succédèrent pendant plusieurs jours. La présence de Boniface VIII à Rieti où il se préparait à célébrer la messe dans l’église cathédrale quand survint la catastrophe a rendu les chroniqueurs prolixes sur l’événement. Le pape et les cardinaux s’enfuirent aussitôt de la ville où s’accumulaient les ruines des tours et des maisons ; la cathédrale et le palais pontifical furent endommagés, trois hôpitaux également ; les habitants qui n’avaient pas été ensevelis sous les décombres abandonnèrent leurs demeures196. Au dehors de la ville, les effets furent également dramatiques : Poggio Bustone, à cinq ou six milles au nord de Rieti, fut détruit totalement ; plus d’une centaine de personnes périrent sous les ruines des constructions en moins d’une heure197. Dans un rayon de quarante milles autour de Rieti, jusqu’à Rome, villes et castra furent touchés gravement ; à Subiaco, le dortoir de Santa Scolastica fut détruit totalement198. A Caprignano, la fouille a mis en évidence les démolitions, provoquées sans doute par le tremblement de terre, dont les restaurations qui suivirent révèlent l’ampleur199. La catastrophe pourrait être responsable de la destruction d’Offiano dont la tour s’écroula vers la même époque, si l’on en croit du moins les datations approximatives que propose l’étude du mobilier céramique. Indice éventuel en ce sens, les vestiges d’un mur de la tour présentent une lézarde jusqu’au niveau des fondations : toutefois la lésion, impossible à dater, peut résulter de tout autre événement voire de la seule instabilité architectonique de l’édifice.
90D’autres raisons peuvent expliquer également la ruine d’Offiano dans la seconde moitié du xiiie siècle. On ignore qui tenait le petit castrum dans les décennies qui ont précédé sa destruction et par conséquent quel parti embrassa Offiano dans le conflit qui opposa Souabes et Angevins pour la couronne de Sicile, les deux choix étant représentés dans la vallée du Turano. Situé dans l’orbite du village de Montagliano que tenaient les gibelins de Castiglione, Offiano prêta main forte ou au moins assistance à Conradin lorsque celui-ci traversa la vallée dans sa marche vers Tagliacozzo. Si Montagliano ne fut pas démantelé par les Angevins dans les années qui suivirent la bataille décisive (ou, s’il le fut, sa restauration a suivi sans délai), Offiano fut bel et bien démoli et incendié. Dans cette hypothèse, une expédition conduite dans la vallée par le capitaine des châteaux d’Abruzzes Philippe de Roussy sur l’ordre de Charles d’Anjou pourrait avoir provoqué la destruction du site. Dans l’hypothèse contraire où Offiano eût été acquis alors au parti angevin, à l’instar de Collalto auquel son sort le lia un siècle plus tard et peut-être avant200, l’armée de Conradin aurait détruit au passage le petit castrum, situé à deux pas de la route.
91Catastrophes naturelles et faits de guerre ne sont pas seuls en cause. La destruction et la désertion d’Offiano peuvent avoir été causées tout autant par un village voisin dont le dynamisme l’aurait conduit à absorber ses habitants et incorporer son finage. Attesté par ailleurs, le phénomène ne se serait pas déroulé sans violences dont témoignent l’incendie de la cour et la destruction de la tour. A en croire le testament de Giangaetano Orsini de 1232 du reste, la tentative, antérieure de quelques décennies à l’abandon d’Offiano, des habitants de Montagliano d’enchâteler ceux de la villa de Sant’Agnese ne s’est pas déroulée sans le recours à la force201.
92Dans tous les cas, le petit castrum dont les dimensions se réduisaient alors aux 650 m2 occupés au xive siècle par la seule rocca ne se releva pas de cet événement et resta abandonné pendant près d’un siècle.
c) Le déclin de la villa de Sant’Agnese
93Comme Montagliano et Offiano, l’église Sant’Agnese et la villa sont mentionnées dans le privilège d’Urbain IV confirmant les possessions de l’abbaye de Farfa en 1262202. A l’égal d’Offiano, la documentation écrite, à ce stade, devient des plus lacunaires. La fouille a toutefois permis d’obtenir plusieurs indices convergents sur le déclin de la villa de Sant’Agnese à partir du xiiie siècle. La répartition de la céramique décorée, datée avec plus de précision que la céramique achrome, tendrait à prouver sinon l’abandon, du moins l’occupation réduite et limitée du site, en particulier dans le secteur du village à partir de la seconde moitié du xiiie siècle. On observe en effet l’absence totale de céramique à « vetrina verde » et presque totale de céramique à « vetrina laziale » tandis que la céramique à « vetrina sparsa », pour la période précédente, et la majolique archaïque, pour la phase successive, sont davantage représentées203. Le répertoire de la céramique de table achrome ou décorée à « vetrina sparsa », limité à la cruche, suggère en outre un ralentissement voire un arrêt de la distribution de ces formes céramiques à Sant’Agnese dans le courant du xiiie siècle quand on observe ailleurs la multiplication d’ustensiles diversifiés. Dans le village, « vetrina laziale » et majolique archaïque ne représentent ensemble que 2,7 % de la céramique fournie par le secteur fouillé tandis que la céramique à « vetrina sparsa » dépasse légèrement 10 %. En outre le sondage III ouvert dans le village n’a pas livré de céramique à « vetrina sparsa » dans les couches qui recouvraient le niveau d’occupation constitué par les unités stratigraphiques 307-309 où seuls deux tessons de céramique à « vetrina laziale » indiquent une présence réduite dans la seconde moitié du xiiie siècle et au début du siècle suivant.
94Dans le château également où, en dépit des travaux de restauration datant de la seconde moitié du xive siècle qui ont enlevé les niveaux antérieurs en totalité, la céramique à « vetrina sparsa » (28,5 % de la vaisselle de table décorée) atteste l’occupation jusqu’au milieu du xiiie siècle tandis que la « vetrina laziale » ne représente que 5,7 % de ce mobilier. La fouille a du reste mis en évidence la destruction et l’abandon temporaire du château, en partie en ruine, à un moment qu’il faut placer entre la construction du mur M23 à la fin du xiie ou au début du xiiie siècle et la restauration de la seconde moitié du xive siècle.
95Dans le secteur de l’église enfin, l’absence de niveaux entre les sols de terre battue de la fin du xiie et de la première moitié du xiiie siècle, qui ne présentent aucun tesson postérieur à la céramique à « vetrina sparsa » B (U.S. 1012), et le sol empierré postérieur (UU.SS. 1005, 1007, 1008) dévoile la faible intensité de l’occupation du site entre ces deux phases. L’absence presque totale de céramique à « vetrina laziale » et de majolique archaïque vont également dans le sens d’un quasi abandon de ce secteur entre le milieu du xiiie et celui du xive siècle.
96La mention de l’église Sant’Agnese et de sa villa dans le privilège d’Urbain IV confirmant en 1262 les biens de Farfa ne suffit évidemment pas à prouver son occupation à cette date : le castrum d’Offiano, cité dans le même document, était abandonné, on l’a vu, entre le milieu du xiiie et le milieu du xive siècle. A Offiano, l’absence totale des céramiques à « vetrina verde » et à « vetrina laziale » plaide en faveur d’un abandon complet du site durant cette période. Si la villa de Sant’Agnese ne paraît pas totalement désertée, son déclin est en revanche assuré à partir du milieu ou de la seconde moitié du xiiie siècle ; du reste, il n’est pas exclu que le château fît l’objet d’une destruction violente à cette époque pour des raisons peut-être identiques à celles qui conduisirent à l’abandon d’Offiano pendant près d’un siècle.
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97L’enquête archéologique conduite dans la vallée du Turano met ainsi en évidence les difficultés que les sites retenus ont traversées dans la seconde moitié du xiiie siècle. Leur destinée, ensuite, divergea. Le castrum de Montagliano fut renforcé pour assurer une base de repli à ses propriétaires qui y séjournèrent fréquemment dans le dernier tiers du siècle. S’il ne fut pas détruit, son territoire et les alentours furent dévastés, peut-être par le capitaine des châteaux d’Abruzzes de Charles d’Anjou et sur ses ordres : incendié et détruit, Offiano fut ensuite abandonné pendant près d’un siècle ; la villa de Sant’Agnese, où le château fut démoli en partie du moins, déclina lentement à partir du xiiie siècle. Nous ignorons si d’autres villages de la vallée du Turano connurent alors un sort identique. Comme Montagliano et pour les mêmes raisons, Castelvecchio, qui dépendait de la seigneurie des Mareri, était visé expressément par la vengeance de Charles d’Anjou. Le roi confisqua à Filippo et Giovanni leurs fiefs de la baronia Marerii in Aprutio, situés dans la vallée du Salto, et les concéda à plusieurs chevaliers angevins204. Au reste, un de leurs castra, Staffoli, fut détruit et ses habitants dispersés dans les alentours205. Les deux frères ne se soumirent pas pour autant et, ayant fui le royaume, se réfugièrent sans doute à Castelvecchio d’où ils continuèrent à résister au roi de Sicile206. Les difficultés que traversèrent les castra des Castiglione et ceux des Mareri pour avoir soutenu Conradin dans sa marche vers Tagliacozzo et pour l’avoir assisté dans sa fuite après la défaite ne furent pas générales.
3) L’essor de Collalto
98La seconde moitié du xiiie siècle correspond en effet à l’expansion de Collalto qui allait occuper bientôt une position dominante dans la vallée du Turano. Dans le conflit qui opposa Souabes et Angevins pour la domination du royaume de Sicile, les seigneurs de Collalto embrassèrent le parti de Charles d’Anjou. Aucun membre de la famille n’est en effet cité parmi les rebelles de la province des Abruzzes dont la liste a été dressée à la suite du statut général édicté contre les proditores et leurs biens : aussi le mandement de Charles Ier dirigé en 1269 contre les communautés de Castelvecchio et de Montagliano et contre leurs seigneurs, Giovanni et Filippo Mareri et Bartolomeo de Castiglione, ne fait-il aucune mention de Collalto. Au contraire, Pandolfo di Collalto tenait du roi plusieurs fiefs in capite – Pietrasecca, Poggio Cinolfo, Macchiatimone, Monte Falcone et un tiers de Roccadisotto situés à la frontière du royaume dans les vallées du Salto et du Turano – pour lesquels il prêtait le service féodal en 1279207. Ainsi ne peut-on exclure a priori que Pandolfo ait participé personnellement à la répression contre les Mareri, dont un fils de Giovanni fut son prisonnier avant d’être transféré à Trani en 1278208, et contre les Castiglione, dont les châteaux voisins des siens limitaient l’expansion de sa seigneurie.
99A la fin du xiiie et au début du xive siècle, le castrum de Collalto connut un développement important que caractérisèrent en particulier la construction et l’aménagement d’édifices destinés à l’habitation et de magasins209. L’essor du village, dont témoigne l’articulation croissante des bâtiments construits à l’intérieur de l’enceinte, offre ainsi un contraste singulier avec les châteaux avoisinants qui subirent les conséquences de la résistance farouche qu’opposa Bartolomeo di Castiglione à Charles d’Anjou pendant plusieurs années. Montagliano, qui avait été jusque là le centre de l’organisation territoriale de la moyenne vallée du Turano, entama une période de déclin que ne purent enrayer les travaux réalisés au sommet de la colline. Dès lors, Montagliano ne fut plus en mesure de contrer efficacement l’ascension du village concurrent qui allait peu à peu l’absorber. Sous l’égide des seigneurs de Collalto, l’organisation du peuplement et l’assiette territoriale qui avaient prévalu depuis plus de deux siècles dans cette région de la vallée allaient connaître une redistribution au détriment de Montagliano et au profit de leur village éponyme. Aussi est-ce sans doute aux engagements politiques opposés de leurs seigneurs qu’il convient d’attribuer la destinée contraire des castra de Collalto et de Montagliano à partir de la fin du xiiie siècle.
CONCLUSION
100La situation politique de la vallée du Turano, créée au milieu du xiie siècle par la formation d’une nouvelle frontière étatique qui la traversa, n’a pas été sans conséquences sur l’histoire du peuplement. Les événements auxquels la vallée a été mêlée et qui la dépassent largement ont eu certainement des retombées, plus ou moins immédiates, négatives ou positives selon les cas, sur l’histoire de quelques châteaux et villages, observée au ras du sol. En l’absence de dossiers documentaires bien fournis, il est difficile de relier les phénomènes reconnus dans l’épaisseur de la stratigraphie ou dans l’agencement des maçonneries, datés avec une précision toute relative en fonction des connaissances actuelles des mobiliers archéologiques, aux grands épisodes de l’histoire générale sans risque de surinterprétation. Ainsi ne doit-on pas sous-estimer la part des faits contingents qui ont pu intervenir sans aucune relation avec les processus historiques en acte. A tort ou à raison, il nous semble pourtant que l’étude conjointe de plusieurs sites contigus – qu’il conviendrait naturellement d’approfondir et d’élargir – permet d’obvier à ce travers qui menace l’archéologue ou, à tout le moins, de l’atténuer, pour peu que les observations conduites au cas par cas s’accordent dans leurs grandes lignes. Il appartient au lecteur d’en juger.
Notes de bas de page
1 Voir le chapitre 1.
2 Sur les étapes de la conquête normande, voir d’une manière générale F. Chalandon, Histoire de la domination normande en Italie et en Sicile ; E. Duprè Theseider, Lo stanziamento dei Normanni nel Mezzogiorno ; A. Clementi, Le terre del confine settentrionale ; E. Cuozzo, L’unificazione normanna e il regno normanno-svevo ; rappels dans J.-M. Martin, Italies normandes, p. 31-78.
3 Voir en dernier lieu L. Feller, Les Abruzzes médiévales, p. 723-784 et Id., Le développement des institutions féodales dans les Abruzzes adriatiques.
4 A l’issue des conquêtes effectuées jusqu’en 1140, les frontières du royaume, dont le confin terrestre borde notamment le duché de Spolète, sont alors décrites de la manière suivante par l’auteur de la Chronica de S. Maria de Ferraria : Et factum unum regnum ex omnibus provinciis que continentur infra tria maria, scilicet ab oriente est mare magnum, quod est ultra Siciliam, a meridie est mare Tirrenum quod est inter ipsum regnum et Africam et Mauritaniam, a septentrione est mare Adriaticum quod est inter ipsum regnum et Greciam et Sclavoniam et Ungariam, ab occasu habet confines provinciam Campanie, ducatum Spoleti et marchiam Ancone, Ignoti monachi cisterciensis S. Mariae de Ferraria Chronica, éd. A. Gaudenzi, p. 26 ; en 1143-1144, une partie du duché de Spolète est conquise quand les fils de Roger II ceperunt Marsiam, Amiternum et totam terram usque Reatem, quam postea Robertus eiusdem regis cancellarius igne combusit, ibid., p. 28.
5 F. Chalandon, Histoire de la domination normande, t. 2, p. 95-119 ; E. Duprè Theseider, Lo stanziamento dei Normanni, p. 93-94 ; C. Rivera, L’annessione delle terre d’Abruzzo al regno di Sicilia, p. 252 sq. Sur la prise de Rieti, voir en particulier Annales Reatini, éd. Bethmann, p. 267 ; CF II, p. 321 ; le passage de la Chronica de Santa Maria de Ferraria cité à la note précédente ; cf. T. Leggio, Le fortificazioni di Rieti, p. 11.
6 M.G.H., Legum sectio, IV, Constitutiones et acta publica imperatorum et regum, I, n° 413, p. 587-588 ; P. Fabre et L. Duchesne, Le Liber censuum de l’Église romaine, I, p. 376-377. Cf. M. Maccarone, Papato e Impero dalla elezione di Federico I alla morte di Adriano IV, p. 141-158 ; R. Elze, Ruggero II e i papi del suo tempo ; M. Pacaut, Papauté, Royauté et épiscopat dans le Royaume de Sicile.
7 D’une manière générale, voir V. D’Alessandro, La politica di Federico Barbarossa nei confronti del regno normanno di Sicilia et, en particulier, D. Clementi, The relations between the Papacy, the Western Roman Empire and the emergent Kingdom of Sicily and South Italy ; Ead., L’atteggiamento dell’Imperatore Federico I nella questione del confine terrestre nel regno normanno di Sicilia.
8 Annales Ceccanenses, p. 286 ; Annales Casinenses, p. 312 ; CF II, p. 320.
9 Voir en particulier F. Gori, Una lapide commemorante il matrimonio celebrato in Rieti nel MCLXXXV tra Costanza di Altavilla ed Henrico VI.
10 F. Chalandon, Histoire de la domination normande, t. 2, p. 386-387 ; V. D’Alessandro, La politica di Federico Barbarossa, p. 130-132 ; Studi sulla pace di Costanza ; La pace di Costanza, 1183 ; T. Kölzer, Regno di Sicilia e Impero alla fine del secolo xii ; G. Tabacco, Impero e Regno meridionale ; Id., Impero e Papato in una competizione di interessi regionali ; P. Zerbi, Papato e Regno meridionale dal 1189 al 1198.
11 Sur la recomposition territoriale du royaume normand, voir principalement E. Cuozzo, « Quei maledetti Normanni », p. 105-113 : L. Feller, Les Abruzzes médiévales, p. 764-768 ; E.M. Jamison, The Norman Administration of Apulia and Capua more especially under Roger II. and William I. ; en particulier pour notre région A. Sennis, Potere centrale e forze locali, p. 64-74. Voir aussi D. Clementi, Definition of a Norman County in Apulia and Capua.
12 Catalogus baronum, éd. E. Jamison ; E. Cuozzo, Catalogus baronum. Commentario. Cf. E. Jamison, Additional Work on the Catalogus baronum et son introduction à l’édition du document, p. xv-xxxv.
13 Cf. E. Cuozzo, Il sistema difensivo del Regno normanno di Sicilia e la frontiera abruzzese nord-occidentale ; P. Delogu, Lineamenti della storia, p. 10 et J.- M. Martin, La frontière septentrionale du Royaume de Sicile à la fin du xiiie siècle.
14 Cf. E. Cuozzo, Il sistema difensivo, p. 286-287 ; T. Leggio, I conti di Cunio e la Sabina, p. 372-373 et R. Lorenzetti, Il territorio di carta. La Sabina, p. 86-87.
15 Catalogus baronum, § 1133.
16 Catalogus baronum, § 1115-1122. Sur les filii Oderisii, auxquels l’abbé Jean de Subiaco acheta pour trente livres la rocca de Camerata peu de temps après son accession au trône abbatial en 1068, voir Chronicon Sublacense, éd. R. Morghen, p. 177.
17 Catalogus baronum, § 1134-1136. La résolution du nom abrégé d’Octo de Montan˜a proposée par Evelyn Jamison doit sans doute être corrigée en de Montanea. Le lignage, auquel appartenait Imperatrice de Montanea, femme de Filippo Mareri et mère de sainte Filippa Mareri, était implanté aux confins orientaux du diocèse de Tivoli où il est bien documenté pendant les derniers siècles du Moyen Âge ; voir notamment T. Leggio, Profilo biografico di un funzionario di Federico II, p. 122 et 127.
18 Cf. T. Leggio, Momenti della riforma cistercense, p. 31.
19 Catalogus baronum, § 1123-1132. Evelyn Jamison suggère avec prudence d’identifier Castellione au Castiglione déserté dans le territoire de Tornimparte (L’Aquila). Or le castrum Castellionis que tenait Gentile Vetulus se trouvait non loin de Castelmenardo (voir dans ce chapitre le paragraphe III/A/2). Pour la topographie de la région, voir d’une manière générale A. R. Staffa, L’assetto territoriale della Valle del Salto.
20 Catalogus baronum, § 1133.
21 Catalogus baronum, § 1140-1141.
22 Voir en particulier le témoignage de l’auteur de la Chronica de Santa Maria de Ferraria : Cuius regni ingressus idem rex sic munivit, quod vix posset aliquis illic ingredi contra eius libitum. Nam clausum est idem regnum aut fluminibus, que nisi per pontes transiri non possunt, aut montibus, quorum valles clausit muris. Per ceteras vero partes habet maria, quorum horas munivit turribus aut custodibus, ut, si superveniret super, aria navalis exercitus, per fanones apparentes in oris marinis quot et ubi essent cito percipi posset, Ignoti monachi cisterciensis S. Mariae de Ferraria Chronica, éd. A. Gaudenzi, p. 26-27 ; cf. E. Cuozzo, « Quei maledetti Normanni ».
23 Cf. A. R. Staffa, L’assetto territoriale della Valle del Salto et surtout les résultats de l’enquête archéologique conduite par la British School at Rome et l’Université de Leicester sur les sites de Rascino, Macchiatimone et Poggio Poponesco : P. Beavitt, N. Christie et al., The Cicolano Castles Project : preliminary excavation report, 1991 ; Eid., The Cicolano Castles Project : second interim report, 1992 ; Eid., The Cicolano Castles Project : 1993 interim report ; N. Christie, Excavations and survey at the castle and villages of medieval Rascino ; voir aussi T. Leggio, Il castello di Rascino.
24 Sur la naissance de l’État pontifical, voir d’une manière générale P. Partner, The Lands of San Peter, p. 138-228 ; P. Toubert, Les structures du Latium médiéval, p. 1068-1081 ; D. Waley, The Papal State in the Thirteenth Century, p. 1-29 ; Id., Lo Stato papale dal periodo feudale a Martino V, p. 231-242.
25 Voir en dernier lieu M. Stroll, The Medieval Abbey of Farfa, p. 240-267 ; T. Leggio, Momenti della riforma cistercense, p. 18-33 ; Id., I conti di Cunio e la Sabina, p. 370-373.
26 P. F. Kehr, Urkunden zur Geschichte von Farfa im XII. Jahrhundert, doc. n° I, p. 177-178.
27 P. F. Kehr, Urkunden zur Geschichte von Farfa, doc. n° IV, p. 180-181 (= DF I, n°95) : Nichilominus intelligentiam vestram scire volumus, quod, quecumque possessiones de Pharphensi monasterio a tempore pie recordationis Adenulfi abbatis per Rainaldum, Rolandum atque Berardum, quos utique iuste esse depositos decernimus, alienate sunt sive per locationem seu per pignoris obligationem aut per feodi donationem aut per emphyteosim sive per venditionem, omnes in ius monasterii et potestatem abbatis restitui plenarie precipimus.
28 P. F. Kehr, Urkunden zur Geschichte von Farfa, doc. n° V, p. 181-182 (= DF I, n° 399) : Misimus itaque ad te dilectum et honorabilem capellanum Heribertum venerabilem curie nostre prepositum, qui aput te vices nostras explebit. Sur Héribert, voir en particulier C. Brühl, Fodrum, gistum, servitium regis, p. 697-698 et 737 ; sur les légats et envoyés impériaux, voir p. 757-759.
29 DF I, n° 891 : videlicet predia, castra, villas et ecclesias et quicquid possidet in rebus inmobilibus in Romania et in Marchia et in comitatu Samnensi et in comitatu Spoletano vel in comitatu Thudertino sive Perusino, Assisinate, Orthano, Narniense, Biteruiense, Reatino, Amiternino, Valuensi, Marsicano nec non et Theatino, insuper quicquid habet in comitatu Firmano, Esculano et ubicumque in Romano imperio.
30 T. Leggio, Il privilegio di Innocenzo III del 7 settembre 1198 in favore del monastero di Farfa. Cf. M. Stroll, The Medieval Abbey of Farfa, p. 267-273.
31 T. Leggio, I conti di Cunio e la Sabina, p. 374.
32 P. F. Kehr, Regesta pontificum romanorum, Italia pontificia, IV : Umbria, Picenum, Marsia, p. 23-24 : Anastase IV (1153) ; Adrien IV (1154-1159) ; Alexandre III (1159-1181) et Lucius III (1182). Les privilèges d’Adrien IV et d’Alexandre III ne sont connus que par la mention qui en est faite dans celui de Lucius III. Sur le diocèse de Rieti, voir aussi dans ce chapitre le paragraphe II/B/4.
33 Cf. T. Leggio, I conti di Cunio e la Sabina, p. 373-374.
34 DF I, n° 723 : Noverint... quod nos dilectum nostrum Dodonem Reatine ecclesie venerabilem episcopum cum tota sua ecclesia, universo scilicet clero et eius pertinentiis in nostre imperialis tuicionis protectionem specialiter suscipimus... Preterea eidem episcopo et sue ecclesie per nostram auctoritatem confirmamus omnes possessiones... Ad hec autem de nostre serenitatis benivolentia absolvimus eandem Reatinam ecclesiam et totum eius clerum ab omni exactione, quam nominatim Reatini consules aut illorum commune aut ullus consulatus vel populus vel aliqua imperii nostri persona magna seu parva ab eadem ecclesia et eius clero irrationabiliter et preter manifestam et notam iusticiam requirere posset. Quod expresse determinantes precipimus, quatinus nec dux nec marchio nec comes nec capitaneus nec consul nec commune nec quisquam occasione publici vel regalis debiti vel occasione patronatus a predicta ecclesia vel ab eius clero presumat deinceps exigere fodrum, collectam, albergarias seu quaslibet angarias aut perangarias vel ulla indebita servicia aut pensiones. Sur la politique de Frédéric Barberousse vis-à-vis de l’évêché de Rieti, voir aussi T. Leggio, I conti di Cunio e la Sabina, p. 373-374.
35 En 1155, Barberousse fit accompagner l’abbé de Farfa Rusticus nouvellement investi par son chapelain Héribert ut ei tam in fodro nostro colligendo quam in datis pro expeditione suscipiendis consilium et auxilium prebeat. En 1163, Héribert fut de nouveau député auprès de l’abbé Godefroid sans doute pour la même raison. En 1177, l’évêché de Rieti, exempt de toute imposition, était assujetti au fodrum : fodrum enim regale, quod nobis inde debetur exhiberi, statuimus, ut nemo exigat nisi nos aut certus nuncius noster ad hoc specialiter destinatus. Même chose pour Farfa en 1185 : ut in omnibus rebus ac bonis suis omnino sint inmunes ab omni illicita exactione et quorumlibet hominum vexatione et quod nulli prorsus persone humili vel alte subiaceant nec habeant respondere nisi tantum imperiali vel regie maiestati vel certo misso nostro ad hoc destinat. Ad hec nominatim et expresse mandato imperatorie maiestatis firmiter inhibemus, ne in castris aliisque bonis Faruensis abbatie Romanis tributum sive fodrum liceat aliquo tempore exigere. Éditions citées notes 27-29 et 34. Voir d’une manière générale C. Brühl, Fodrum, gistum, servitium regis, p. 659-761, et en particulier p. 698 et 737 pour Farfa. Sur les prétentions de Frédéric Barberousse en matière de fodrum, voir aussi G. Tabacco, Impero e Papato in una competizione di interessi regionali, p. 24-26 et P. Toubert, Les structures du Latium médiéval, p. 1003-1004 et note 5.
36 T. Leggio, I conti di Cunio e la Sabina ; voir aussi M. Banzola, I conti di Cunio fra Romagna e Sabina.
37 Cf. I. Schuster, Un protocollo di notar Pietro di Gregorio nell’archivio di Farfa, doc. n° 24 (1344), p. 571-575.
38 T. Leggio, I conti di Cunio e la Sabina, p. 376-377. Quelques notices sur la famille et ses biens au xiiie et au xive siècle dans S. Carocci, Baroni di Roma, voir à l’index s.v. « Romagnia (de) ».
39 P. Delogu, Lineamenti della storia, p. 13-14 et T. Leggio, I conti di Cunio, p. 374. Pour la politique de Frédéric II et l’implantation de ces familles, voir dans ce chapitre le paragraphe III. Sur l’appartenance de la région à l’Empire dont témoignent quelques actes notariés, voir le chapitre 10 au paragraphe I/B/1.
40 M.G.H., Legum sectio, IV, Constitutiones et acta publica imperatorum et regum, I, n° 413, p. 587-588 ; P. Fabre et L. Duchesne, Le Liber censuum de l’Église romaine, I, p. 376-377 ; voir aussi ibid., p. 16 : Rogerius, tunc rex Sicilie, constituit ipsi dare annualiter, pro Apulia et Calabria, CCCCCC squifatos. Postmodum vero W(illelmus) rex, filius ejus, pro Marsia quam occupaverat tempore ipsius Innocentii pape, super addidit CCCC squifatos, tempore pape Adriani, quando fecit hominium et fidelitatem apud Beneventum. La distinction entre les deux ensembles est confirmée par l’accord de Gravina conclu entre Célestin III et Tancrède en 1192, cf. J.-M. Martin, La frontière septentrionale du royaume de Sicile, p. 291-292.
41 Cf. P. Toubert, Les structures du Latium médiéval, p. 1069-1081.
42 Le castellum lui-même ne fut pas donné au pape mais uniquement in castello Ugonis villam cum hominibus, terris et vineis : P. Fabre et L. Duchesne, Le Liber censuum de l’Église romaine, I, doc. n° CXVI, p. 397-398 (cf. P. F. Kehr, Italia Pontificia, II. Latium, n° 1, p. 70-71).
Cf. P. Toubert, Les structures du Latium médiéval, p. 398-399 ; voir aussi T. Leggio, I conti di Cunio e la Sabina, p. 360-361, note 55 pour la correction proposée à l’identification du castellum. Pour la donation à Farfa du castellum de Hugo par les filii Hilperini, voir RF V, n° 1111 ; le castellum est sorti du patrimoine abbatial à la fin du siècle quand l’abbé Bérard II (1090-1099) le céda en même temps que de nombreux autres castella au comte de Sabine Rainaldo selon un pactum legaliter damnabile : RF V, p. 155 (= CF II, p. 215) ; voir aussi RF V, n° 1317 (début du xiie siècle). Pour des éléments sur la généalogie des comtes de Sabine, cf. H. Müller, Topographische und genealogische Untersuchungen, p. 30-32.
43 Pour les confirmations pontificales à l’évêché de Rieti, voir plus haut la note 32. Sur la politique pontificale à Rieti et dans la région, cf. M. T. Caciorgna, Confini e giurisdizioni tra Stato della Chiesa e Regno, passim (en particulier p. 307-310 pour la deuxième moitié du xiie siècle).
44 Voir notamment G. Battelli, I diplomi di Enrico VI nell’Archivio Vaticano, p. 49-50 et 59-60, n° 9, 10 et 13.
45 M. T. Caciorgna, Confini e giurisdizioni tra Stato della Chiesa e Regno, p. 308. En 1198, Innocent III se rendit à Rieti, première étape de son voyage politique dans les terres de l’Église ; il y reçut le cens du podestat : P. Fabre et L. Duchesne, Le Liber censuum de l’Église romaine, I, doc. n° II, p. 8*.
46 Pour une région voisine, voir Il Lazio meridionale tra Papato e Impero al tempo di Enrico VI, en particulier les contributions de G. Battelli, I diplomi di Enrico VI ; P. Csendes, I consiglieri di Enrico VI ; Th. Kölzer, Regno di Sicilia e Impero et G. Tabacco, Impero e Papato in una competizione di interessi regionali.
47 Le 29 mai 1191 : P. F. Kehr, Italia Pontificia. IV. Umbria, Picenum, Marsia, p. 26, n° 3 ; Id., Papsturkunden in Rom, n° 40, p. 190. En 1221, Honorius III renouvela le privilège : P. Pressutti, Regesta Honorii Papae III, I, p. 535, n° 3282. Voir aussi I. Schuster, Il monasterio imperiale del Salvatore, p. 425-426.
48 Le 20 septembre 1191 : F. Gori, Una lapide commemorante il matrimonio celebrato in Rieti, doc. n° X, p. 278-280 (J.F. Böhmer et G. Baaken, Regesta Imperii, IV/3 : Die Regesten des Kaiserreiches unter Heinrich VI., n° 167). Pour le diplôme de Frédéric Barberousse, voir plus haut note 34.
49 P. Fabre et L. Duchesne, Le Liber censuum de l’Église romaine, I, p. 346, n° 7 et la note 8, p. 358 où les éditeurs expriment leur perplexité sur la présence de ce passage à cet endroit du Liber censuum. Comme on sait, les rubriques LXXI-LXXIII du Liber censuum de Cencius reprennent le chapitre 30 du livre X des Digesta d’Albinus, compilé moins d’une dizaine d’années auparavant (entre 1183 et 1189), dont la source se trouve dans la Collectio canonum de Deusdedit, préparée sous Grégoire VII et dédiée au pape Victor III en 1087 (V. W. von Glanvell, Die Kanonessammlung des Kardinals Deusdedit, p. 348sq. : Lib. III, CXC, p. 353 pour le passage concernant les monastères ; la notation ut in sequentibus legitur qui suit la localisation des abbayes dans le patrimoine de saint Pierre renvoie peut-être aux extraits de l’Ottonianum de 962 copiés par Deusdedit, éd. V. W. von Glanvell cit., Lib. III, CCLXXXI, p. 390-391, qui se trouvent également dans le Liber Censuum, I, § LXXVIII, p. 365, dans lesquels Otton Ier donna à l’Église romaine de proprio nostro regno civitates et oppida cum piscariis : idest Reatem, Amiternum..., = DO I, n° 235, p. 365 ; dans tous les cas, c’est le seul document copié par Deusdedit qui fasse référence à Rieti. Voir aussi le chapitre 7, paragraphe I/B/1/b). Voir Th. Montecchi Palazzi, Cencius Camerarius et la formation du « Liber Censuum », avec toute la bibliographie utile.
50 Pour une localisation du monastère, contemporaine du Ludovicianum (817), cf. L. Duchesne, Le Liber pontificalis, II, p. 59 (Pascal Ier, 817-824) : in monasterio Salvatoris Domini nostri Iesu Christi sito in territorio Reatino. Le monastère est également localisé de manière explicite in comitatu Reatino, cf. I. Schuster, Il monastero imperiale del Salvatore, p. 408. Sur la frontière entre la Sabine et le Réatin, voir le chapitre 7, paragraphe I/B/1.
51 P. F. Kehr, Italia Pontificia. IV. Umbria, Picenum, Marsia, p. 26-27, n° *2 (Innocent II, 1130-1143), *3 (Alexandre III, 1159-1181) et *8 (Célestin III, 1195 : monasterium SS. Quirici et Iulittae in dioec. Reatina). Sur Antrodoco aux xiiie-xve siècles, voir M. R. Berardi, Antrodoco : un castrum di confine tra età sveva e angioina.
52 Voir le catalogue des monnaies établi par Alessia Rovelli dans le volume suivant de la série et, en dernier lieu, A. Rovelli, La circolazione monetaria in Sabina e nel Lazio settentrionale nel Medio Evo. Materiali dagli scavi di alcuni siti incastellati.
53 Voir le chapitre 5, paragraphe II/D. Les datations au radiocarbone proposent un intervalle de 1021 à 1155 et situent trois maxima de probabilités autour des années 1033, 1110 et 1150. La première date est incompatible avec le dossier documentaire et la qualité de la céramique trouvée sur le site. L’achèvement de l’étude du mobilier et d’autres analyses fourniront sans doute des précisions supplémentaires.
54 LL II, n° 1264.
55 Voir le chapitre 8 au paragraphe III.
56 Voir le chapitre 5.
Sur l’incendie qui aurait détruit le castellum de Vivaro dans la deuxième moitié du xie siècle et son interprétation comme châtiment divin, voir le chapitre 8, paragraphe II/A/1/a. Sur les destructions de castra, voir P. Toubert, Les structures du Latium médiéval, p. 356-358. Il n’est guère possible de mettre au compte d’un tremblement de terre la destruction du château de Castiglione (dont le mur M3 est lézardé de haut en bas). On n’a pas connaissance d’un tremblement de terre qui aurait affecté la région au xiie siècle. En 1114, un tremblement de terre dont l’épicentre était situé dans les environs de Viterbe a atteint l’intensité VIII de l’échelle Mercalli-Cancani-Sieberg, qui provoque des dégâts très importants ; en 1120, le tremblement de terre de Larino a atteint le degré IX, qui détruit la moitié des constructions en pierre ; en 1141, celui de Montecassino n’a pas dépassé le degré V, qui n’affecte pas les constructions ; en 1170, celui de Ceccano a atteint le degré VIII, cf. D. Postpichl (éd.), Catalogo dei terremoti italiani, p. 28. Aucune notice de destructions provoquées par des tremblements de terre à Rome du xe au xiiie siècle, période de calme sismique : D. Molin et E. Guidoboni, Effetto fonti, effetto monumenti a Roma : i terremoti dall’antichità ad oggi, p. 203-204. Pour l’étendue des destructions selon les degrés de l’échelle Mercalli/Cancani/Sieberg, voir les informations très utiles fournies par D. Postpichl, L’osservazione e i dati strumentali per lo studio dei terremoti, p. 683-686.
57 Voir le chapitre 8, paragraphe III.
58 RF I, doc. I, p. 31-32 : Nos S. et T. facimus tibi domino abbati R. et farfensi monasterio hominium et fidelitatem, et reddimus tibi castrum quod vocatur Ophanu et reedificamus tibi et farfensi monasterio eum et antiquis eiusdem castri habitatoribus tenimenta pro tuo velle reddemus, qui vobis fidelitatem et hominium sunt facturi.
59 Sur les désertions anciennes et leur interprétation, voir P. Toubert, Les structures du Latium médiéval, p. 349-365. Voir également Castrum 3 : Guerre, fortification et habitat dans le monde méditerranéen, en particulier la contribution de J.-M. Pesez et F. Piponnier, Les traces matérielles de la guerre sur un site archéologique.
60 A. D. 1142. Reate maxima mortalitas fuit, Burchardi et Cuonradi Urspergensium Chronicon, éd. O. Abel et L. Weiland, p. 20.
61 Voir le chapitre 2 au paragraphe II/B/2 ainsi que les contributions d’Elisabetta De Minicis et de Nolwenn Lécuyer dans le volume suivant.
62 Voir le paragraphe I/B de ce chapitre.
63 Du côté normand, les listes des sites mentionnés dans le Catalogus Baronum, § 1115-1136, p. 218-225 en fourniraient le point de départ. L’enquête archéologique réalisée dans le Cicolano par la British School at Rome et l’Université de Leicester n’a pas été orientée de manière spécifique dans cette direction : sur cette enquête, voir en dernier lieu N. Christie, Excavations and Survey.
De l’autre côté de la frontière, outre notre enquête sur Montagliano, Offiano, la villa de Sant’Agnese et Castiglione, des fouilles ont été réalisées dans le château de Collalto Sabino, voir dans ce chapitre les paragraphes II/B/4 et III/3. D’une manière générale, voir Castrum 4 : Frontière et peuplement dans le monde méditerranéen au Moyen Âge.
64 Pour le castrum du xie siècle, voir le chapitre 8 au paragraphe I/B/1.
65 Voir dans ce chapitre le paragraphe III/A.
66 Voir dans le chapitre 2 le paragraphe II/C et le chapitre 10 au paragraphe II/A/1.
67 Henri IV (1084) : RF V, n° 1099 (= CF II, p. 176 ; DH IV, n° 358) ; Henri V (1118) : RF V, n° 1318 = CF II, p. 284 ; Innocent III (1198) : T. Leggio, Il privilegio di Innocenzo III, p. 246 ; Urbain IV, 1262 : J. Guiraud, La badia di Farfa, p. 281.
68 Voir dans ce chapitre le paragraphe I/C.
69 Voir le chapitre 3 au paragraphe II/A.
70 Voir les documents cités à la note 67.
71 Biblioteca Apostolica Vaticana, Cod. Vat. lat. 8487, f° 68r, 2e col. ; éd. RF I, appendice, doc. I, p. 31-32 ; I. Schuster, L’imperiale abbazia di Farfa, p. 395, donne également des extraits du document.
72 Les structures du Latium médiéval, note 3 p. 1134 p. 1143-1153, note 2, p. 1181.
73 Nous redonnons ici pour la commodité du lecteur les passages du document intéressant Offiano : Nos vero R. farfensis monasterii abbas una cum fratribus reddimus vobis feudum sicut tenuit Gentilis Rainaldi in castro Ofano et vos et terram vestram adiuvabimus sicuti terram nostrorum fidelium consuevimus adiuvare.
Nos S. et T. facimus tibi domino abbati R. et farfensi monasterio hominium et fidelitatem, et reddimus tibi castrum quod dicitur Ophanu et reedificamus tibi et farfensi monasterio eum, et antiquis eiusdem castri habitatoribus tenimenta pro tuo velle reddemus, qui vobis fidelitatem et hominium sunt facturi. Per terram nostram pro te et farfensi monasterio guerram cum volueris faciemus. Si aliquis nostrum obierit, vel filiorum nostrorum si adulti fuerint, cadavera mortuorum ad farfense monasterium deferentur. Nostri vero homines, sicut consuetudinis fuit tempore abbatis Beraldi, apud S. Iohannis ecclesiam sepelientur, RF I, appendice, I, p. 31-32.
74 RF I, appendice, p. 31, note 2.
75 I. Schuster, L’imperiale abbazia di Farfa, p. 395, note 1.
76 CF II, p. 205 : Defuncto autem prefato domno Berardo, orta est inter nos dissensio de abbate eligendo, nitentibus permaxime qui nos videbantur regere ut Regizonem Sabinensem episcopum eligerent ; quibus, quamvis minima, saniori tamen confratrum resistente parte, ab hac quieverunt intentione ; continuoque quasi precipiti subitaneoque assensu omnium, contra sanctorum canonum sanctiones, adhuc instante nocte et necdum humato predicto migrato pastore, domnum Rainaldum elegimus... Voir aussi I. Schuster, L’imperiale abbazia di Farfa, p. 216-217 et 229.
77 RF V, n° 1318 et CF II, p. 284 : Montalianum, Ophianum, Castellum Vetus, de Vivaro et rocca Tancie et Grecie quasdam partes. Pour les donations correspondantes, voir respectivement RF V, n° 1093 de 1085 (= CF II, p. 170) et n° 1136 de 1096-1097 (= CF II, p. 212) : Guillelmus illustrissimus vir filius olim Leonis donne différents biens et en particulier totam in integrum portionem meam de rocca quae dicitur Tancies, simulque cum muris, portis, casis, plateis et omnibus aedificiis suis, et omnia in omnibus ad ipsam praedictam roccam generaliter et in integrum pertinentia. Affines vero eius : a primo latere, quod est a capite, bibuli qui dicuntur de Tancia et per ipsos bibulos pergit in res de Camponiscis et per ipsas res vadit in rigum siccum et per ipsum rigum revertitur in praedictos bibulos de Tancia.
78 P. F. Kehr, Urkunden zur geschichte von Farfa, doc. IV, p. 180-181 (= DF I, n°95) :... possessiones de Pharphensi monasterio a tempore pie recordationis Adenulfi abbatis per Rainaldum, Rolandum atque Berardum, quos utique iuste esse depositos decernimus, alienate sint... et p. 175 où P. F. Kehr note qu’on ne sait rien sur lui. I. Schuster, L’imperiale abbazia di Farfa, p. 283 – suivi par M. Stroll, The Medieval Abbey of Farfa, p. 259 – penche pour une identité entre ce Rainaldo et le Rainaldo élu à la mort de Bérard III en 1119.
79 Voir en particulier RF V, n° 1109 (1086) pour la délimitation des confins du castellum de Leto et de Turricella : a primo latere terram tenentes Campaniscos, a II° latere pertinentiam de rocca Sinebaldi.
Précisons toutefois que la liste des castella que de iure nostri monasterii possident filii comitis Rainaldi que Gregorio da Catino a donnée à la fin du chapitre du Chronicon consacré à l’abbé Bérard II ne mentionne pas Offiano. Voir le chapitre précédent au paragraphe II/A/1/d.
80 LL II, n° 1264 : il s’agit d’une rétrocession pour deux générations par l’abbé Bérard II à Petrus qui vocatur de Adelguda et Anselmo de Agati, entrés dans le vasselage de l’abbaye, des biens situés in vocabulo castello vetulo de Ophiano et concédés précédemment à l’abbaye ; le document précise en particulier : si non observaverint fidelitatem domno abbati et in hoc monasterio et si dominium mutaverunt sit sibi scriptum hoc inane et vacuum. Pour des clauses spécifiques sur la sépulture concédées par l’abbé Bérard II dans d’autres cas, voir notamment RF V, n° 1126 (1091).
Sur l’obligation de fidelitas imposée aux paysans, cf. S. Carocci, Baroni di Roma, p. 205-207 ; Id., Ricerche e fonti sui poteri signorili nel Lazio meridionale nella prima metà del xiii secolo : Villamagna e Civitella ; Id., La signoria rurale nel Lazio (secoli xii e xiii).
81 Cf. ci-dessus à la note 73. On peut rapprocher cet exemple du cas, contemporain et à peu près identique, de la rocca Septem Ianule, proche de Rieti : en 1140, Enrico di Guiscardo jura hommage et fidélité à l’abbé Adinolfo pour le podium quod fuit ante roccam Septem Ianule et ses pertinentiae que ses parents avaient donnés à l’abbaye et reçus en fief de reprise ; Enrico promet de regrouper tous les habitants du podium dans la fortification sommitale qu’il s’engage également à reconstruire : promisi legitima conventione me inducere invehere in prefatam arcem omnes habitatores predicti podii, omnemque pertinentiam eius constituere sub curte et pertinentia predicte arcis, et promisi reconciliari et reficere et nullo modo destruere aut minuere predictam arcem, sed magis augere, ampliare sicut bonus paterfamilias ; quam arcem in feudum recepi a predicto monasterio et domno abbate Farfensi, CF II, p. 316-317.
On notera que les Camponesci étaient également inféodés dans le royaume, cf. Catalogus baronum, § 1163.
82 RF V, n° 1099 (= CF II, p. 176 ; DH IV, n° 358).
83 RF V, n° 1318 (= CF II, p. 285).
84 Voir respectivement T. Leggio, Il privilegio di Innocenzo III, p. 246 et J. Guiraud, La badia di Farfa, p. 282.
85 Voir le chapitre 4 au paragraphe II/C.
86 Sur les rapports entre les matériaux de construction des maisons et la stabilité ou la mobilité de la population, voir notamment E. Hubert, Mobilité de la population et structure des habitations à Rome et dans le Latium.
87 Sur les travaux de la Chiesa Nuova, cf. F. Bougard, E. Hubert et G. Noyé, Les techniques de construction. Il convient de situer la reprise des travaux entreprise par l’abbé Adinolfo en 1142 dans le cadre de ses efforts pour introduire la réforme cistercienne à Farfa, cf. T. Leggio, Momenti della riforma cistercense nella Sabina, p. 24-29.
88 Si ce n’est dans la fosse U.S. 1003 qui contient également de la majolique de la Renaissance.
89 Voir dans le volume suivant A. Rovelli, Catalogue des monnaies, n° 3.
90 Voir le chapitre 4 au paragraphe II/A.
91 Voir le chapitre 4, paragraphe II/B.
92 Et praesentis decreti stabilitate sancimus, ut Universae Parochiae fines sicut a tuis antecessoribus usque hodie possessi sunt, ita omnino integra quam tibi, quam tuis successoribus in perpetuum conserventur. Qui videlicet fines... Cf. P. F. Kehr, Italia pontificia, IV, p. 23-24, n° 10 ; éd. M. Michaeli, Memorie storiche della città di Rieti, II, doc. n° IV, p. 268-272. Les privilèges de Pascal II, d’Adrien IV et d’Alexandre III pour l’Église de Rieti (P. F. Kehr, Italia pontificia, IV, p. 23, n° *6, *8 et *9) ne sont connus que par la mention qui en est faite dans celui de Lucius III (ad exemplar praedecessorum nostrorum...) tandis que celui d’Anastase IV (1153), dont l’original est conservé aux archives capitulaires de la cathédrale de Rieti (Arm. II, fasc. A, n° 1), n’est pas cité dans le privilège de 1182 : au reste, il ne délimite pas les confins du diocèse, cf. P. F. Kehr, Italia pontificia, IV, n° 7 ; éd. M. Michaeli, Memorie storiche della città di Rieti, II, n° III, p. 265-268 ; voir également le paragraphe suivant.
93 Pour les limites du diocèse de Sabine qui s’étendait jusqu’au Turano au xe siècle et l’appartenance territoriale controversée de ce secteur de la rive gauche de la vallée, voir le chapitre 7, paragraphe I/B/1/b. Nous ne possédons pas de délimitation contemporaine du diocèse de Sabine, le privilège d’Anastase IV (1153-1154) n’étant connu que par sa mention dans celui d’Innocent III de 1209 : P. F. Kehr, Italia pontificia, II, p. 55, n° *6. La modification des confins survenue depuis le xe siècle fut du reste éphémère, comme on va le voir.
Pour les limites du diocèse des Marses que Pascal II confirma en 1114, qui s’étendait peut-être jusqu’à Offiano à cette date, voir le chapitre 8, paragraphe I/C.
94 Privilège de Lucius III, édition citée note 92, p. 269 : Inde per montem de Cerru per Roccam Salecis per Vallem bonam per serram montis de Canemortuo. Inde per viam porticam per vallem Manfrede per tofum filii Arimanni per campum satrum...
Pour les castra qui servent alors de repères, voir le chapitre 8, paragraphe II/ A-B. Sur Vallebuona, cf. A. R. Staffa, L’incastellamento nella valle del Turano, p. 194-195 ; il convient de corriger J. Coste, I villaggi medievali abbandonati dell’area dei Monti Lucretili, p. 405-406, où sont confondus le castrum proche d’Orvinio et le village homonyme situé dans la vallée du Salto (sur ce dernier et pour la fin du Moyen Âge, voir A. Cortonesi, Ai confini del Regno. La signoria dei Mareri sul Cicolano, nombreuses mentions, voir à l’index s.v.).
95 Cf. P. F. Kehr, Italia pontificia, IV, p. 241, n° 4 ; éd. F. Ughelli, Italia sacra, I, col. 892-893. Entre Oricola et Tufo, le diocèse des Marses s’étendait alors jusqu’aux turres de Ofrano, que l’on doit peut-être identifier au vocabulum ubi sunt ipsae turres, sis dans la pertinentia de Ophiano, attesté par un acte de 1038 (RF III, n° 570). L’intégration du lieu-dit Offiano dans le diocèse de Carsoli, séparé de celui des Marses, aurait résulté de la mainmise par les comtes des Marses Bérard II et son fils Oderisio II sur Montagliano et son territoire vers le milieu du xie siècle : voir le chapitre 8, paragraphe I/C.
96 Voir dans ce chapitre les paragraphes I/A-B.
97 Voir l’édition du privilège d’Anastase IV, citée note 92, p. 266 pour la mention des plebes Sancti Andreae in Laceto (Ricetto) et sanctae Luciae in Colle Alto. Pour les privilèges des papes Anastase IV et Adrien IV pour les trois diocèses, cf. P. F. Kehr, Italia pontificia, II, p. 55, n° *6 ; Id., Italia pontificia, IV, p. 23, n° 7 et *8, p. 242, n° *8 et *9.
98 Voir la note 94 pour les confins du diocèse de Rieti. Pour les églises du diocèse des Marses, qui comprend dans la région les territoires d’Oricola, de l’antique civitas Carsioli, de Celle (actuelle Carsoli), de Poggio Cinolfo, de Tufo et de Pietrasecca, voir P. Sella (éd), Rationes decimarum Italiae. Aprutium-Molisium, p. 21-56.
99 Voir le chapitre 7, aux paragraphes I/B/1/b et I/C/3/e.
100 Les deux privilèges d’Anastase IV et de Lucius III ne mentionnent en effet aucune église sur la rive gauche du Turano au sud de la plebs de Sant’Anatolia in Tore située non loin d’Antuni (éditions citées à la note 92, p. 266 et 270) : la carte des églises qui dépendaient de l’évêché de Rieti dans la deuxième moitié du xiie siècle présente ainsi un blanc de Rocca Salice jusqu’à la limite méridionale du diocèse qui s’étendait alors jusqu’à Vivaro et Vallinfreda, selon la définition territoriale donnée par le privilège de Lucius III (voir note 94) ; la région dépendait de la juridiction de Santa Maria del Piano et, pour partie, de celle de l’abbaye de Farfa.
Sur l’exemption monastique et la reconquête épiscopale dans le Latium, voir E. Petrucci, Pievi e parrocchie del Lazio nel basso medioevo, en part. p. 961-1001 ; Id., Vescovi e cura d’anime nel Lazio ; P. Toubert, Les structures du Latium médiéval, p. 898-924 ; voir aussi Id., Monachisme et encadrement religieux dans les campagnes en Italie. Pour les Abruzzes, cf. L. Feller, Les Abruzzes médiévales, p. 825-852.
101 Sur celui-ci et sa carrière (cardinal-diacre de Santa Maria in Aquiro en 1212, cardinal-prêtre de San Lorenzo in Damaso en 1216, élevé cardinal-évêque de Sabine en 1217), voir W. Maleczek, Papst und Kardinalskolleg von 1191 bis 1216, p. 172-174.
102 Sur ses réussites et ses échecs dans ce domaine, voir E. Petrucci, Pievi e parrocchie del Lazio, p. 964-967 (Farfa), p. 978-980 (Santa Maria del Piano), p. 980-984 (San Salvatore Maggiore), p. 984-986 (Sant’Andrea in flumine), p. 988 (San Giovanni in Argentella).
103 Cf. W. Maleczek, Papst und Kardinalskolleg von 1191 bis 1216, p. 137-139. Au tournant des xiie et xiiie siècle, les Brancaleoni, issus de la famille de Romania installée dans la basse vallée du Turano depuis la deuxième moitié du xiie siècle (voir dans ce chapitre le paragraphe I/C), s’en détachèrent pour former un rameau distinct (cf. T. Leggio, I conti di Cunio e la Sabina, p. 376-377). Ils possédaient en particulier Ginestra et Monteleone Sabino, dont ils ajoutèrent le nom au leur à la fin du Moyen Âge, et plusieurs villages de la vallée du Turano : cf. N. Kamp, Brancaleoni, Andrea ; G. Silvestrelli, Città, castelli e terre, II, p. 427 et 429-430 et le chapitre 10, paragraphe I/B/1.
104 En voici les termes principaux : Noverit... quod cum controversia verteretur inter venerabilem patrem P. Sabinensem episcopum ex una parte et monasterium Sancte Marie de Putealia et clericos castrorum, scilicet Puzalie, Montorii, Rocche felicis [sic pour Salicis], Petre vallis et Petece, necnon et nobiles viros Andream de Canemortuo, Iohannem de Puzalia et Gentilem de Petra fortis ex altera super quibusdam que idem Episcopus ab eodem monasterio et clericis dictorum castrorum petebat, eadem questio nobis mediantibus, consentientibus tam Pandulfo domini Pape subdiacono et notario pro fratribus suis [qui agissait donc au nom d’Andrea de Canemortuo, lequel n’est plus mentionné ici] et dicto Gentile quam etiam Iohanne de Puzalia pro se, necnon etiam abbate ipsius loci pro parte monasterii hoc modo extitit terminata. Videlicet quod Episcopus habet correctionem et iurisdictionem episcopalem in presbiteris et clericis castrorum ipsorum, et quod omnes clerici dictorum castrorum iurabunt eidem Episcopo fidelitatem, et quod servabunt honores et iura ipsius et respondebunt ei vel cui hoc ipse commiserit de iustitiis suis ; scilicet de decimis et mortuariis et sedio, iuxta formam inferius comprehensam, et quod sententias excommunicationis eius vel interdicti servabunt. Monasterium dabit eidem Episcopo de decimis duo modia frumenti et totidem spelte, ad modium tyburtinum, in festo sancti Angeli de septembre. Residuum vero decimarum ipsarum per abatem vel per alium monacum ipsius monasterii sicut Episcopo prefato placebit, expendendum in utilitatem monasterii, iuxta mandatum ipsius Episcopi. Pro mortuariis vero et sedio dabit monasterium Episcopo XX soll. Abbas vero qui pro tempore fuerit tamquam vicarius eius instituet clericos in ecclesiis predictorum castrum ; et clericus institutus ab ipso infra XX dies presentabit se et faciet manualem obedientiam. Quod si abbas vult recipere iuramentum a clericis, recipiet illud, salvo iuramento Episcopo prestito et prestando. Si abbas aliquem instituerit minus ydoneum vel per simoniacam pravitatem, vel alio modo contra canones, liberum erit Episcopo, postquam ei de veritate constiterit, removere taliter institutum..., éd. par G. Tomassetti et G. Biasiotti, La diocesi di Sabina, p. 100-101 ; cf. E. Petrucci, Pievi e parrocchie del Lazio, p. 978-980.
Pour la légation du sous-diacre et notaire apostolique Pandolfo, cf. P. Pressutti (éd.), Regesta Honorii papae III, II, n° 4402, 4771, 5092 et 5093 (20 juin 1223 au 19 juillet 1224).
105 BnF, ms. latin 1556, f. 1-17v pour les statuts synodaux du xive siècle et f. 18r-26r pour la summa omnium ecclesiarum tam civitatis quam dyoecesis Reatine dont la compilation a été ordonnée par l’évêque Tommaso volentes scire vires et facultates Ecclesie Reatine ad utilitatem nostram et subditorum curam facilius subportandam successorum nostrorum perpetuam memoriam omnes ecclesias que fuerunt et sunt in ordino congruo duximus adnotandas infra dyocesem Reatinam (f. 18r). Les statuts et la liste des églises forment deux parties d’un tout : Expliciunt constitutiones et redditus et proventus episcopi Reatini. Deo gratias, amen (f. 26r) ; ils ont du reste été copiés par la même main ; on observe quelques rares interventions de mains contemporaines (par exemple aux f. 17v et 23r).
Sur ce manuscrit, voir en premier lieu Bibliothèque nationale. Catalogue général des manuscrits latins, t. II, p. 65. Il provient de la bibliothèque de Mazarin, où Gabriel Naudé avait dû l’apporter après son séjour à Rieti vers 1638 : A. Franklin, Les manuscrits du cardinal Mazarin ; P. Toubert, Recherches de diplomatique et d’histoire lombardes, p. 177. Pour son utilisation, voir E. Petrucci, Vescovi e cura d’anime nel Lazio, p. 441-443 et R. Brentano, A new world in a small place, en part. p. 85sq. et p. 109 ; voir aussi les observations de T. Leggio, Il convento di S. Domenico nel paesaggio urbano di Rieti, p. 71 et 78 ; Id., Momenti della riforma cistercense nella Sabina e nel Reatino, note 191, p. 47-48 ; Id., Profilo biografico di un funzionario di Federico II, p. 140 ; Id., Tarano nel Medioevo, p. 90-92.
L’évêque de Rieti Saverio Marini (1779-1813) utilisa à son tour un « registro delle chiese parochiali e plebali... che è dell’anno 1398 » « che fu estratto da altro di più remota età », sans doute identique à l’état qu’on trouve dans le ms. latin 1556 de Paris (lequel ne mentionne pas la date de 1398), dont il copia de très larges extraits, ajoutant des notes sur l’état des églises qu’il visita à plusieurs reprises au tournant des xviiie et xixe siècles : les passages de ce registre, disparu à une date inconnue, copiés par l’évêque Marini et les commentaires de celui-ci ont été édités par V. Di Flavio, Il registro delle chiese della diocesi di Rieti del 1398 (p. 15 pour les citations de l’évêque Marini), qui ne mentionne pas l’existence du manuscrit parisien ; voir aussi le compte rendu qu’a donné Jean Coste de cette édition, sans faire état non plus de la liste parisienne, dans l’Archivio della Società romana di storia patria, 113, 1990, p. 361-364.
L’évêque Tommaso fit également édifier le clocher de la cathédrale dès 1252 : R. Brentano, A new world in a small place, p. 85-86 ; T. Leggio, Il « magister Andrea murator » ; L. Mortari, Rieti, p. 104 et 112.
106 BnF, ms. latin 1556, f. 23r.
107 Comme le montre le registre des églises du diocèse de Sabine de 1343 : voir le chapitre 10, paragraphe I/A.
108 F. Bulgarini, Notizie... sulla città di Tivoli, p. 35.
109 Voir respectivement P. F. Kehr, Italia pontificia, IV, p. 26, n° 3 et P. Pressutti, Regesta Honorii papae III, I, n° 3282 ; cf. I. Schuster, Il monastero imperiale del Salvatore, p. 425-426.
110 Cf. E. Petrucci, Pievi e parrocchie del Lazio, p. 980-984.
111 Rieti, Archivio capitolare, Arm. IV, fasc. P, n° 1 : 5 documents. Cf. P. Desanctis, Notizie storiche del monastero di San Salvatore Maggiore, p. 139sq et p. 164-168 pour l’édition d’une des cinq pièces du dossier ; R. Brentano, A new world in a small place, p. 87 sq.
112 Ed. P. Desanctis, Notizie storiche del monastero di S. Salvatore Maggiore, p. 164-168 : In primis dicit T. episcopus Reatinus contra abbatem Sancti Salvatoris Reatini et alios rectores ecclesiarum in libello designatarum quod monasterium Sancti Salvatoris situm est in dioecesi Reatina, quod dominus abbas non credit. Similiter ponit quod omnes ecclesiae declaratae in libello, de quibus agitur, et qualibet earum consistunt et sunt sitae in dioecesi Reatina, non credit abbas de ecclesiis abbatiae, de aliis credit. Similiter ponit quod tam praenotatum monasterium quam praedictae ecclesiae consistunt intra fines dioecesis Reatinae, quod dominus abbas non credit sed dicit quod sunt in abbatia. Similiter quod dioecesis Reatina pertenditur a Reate usque ad Collem altum, quod abbas non credit. Similiter quod usque ad montem leonem, quod abbas non credit. Similiter usque ad Antuni et ultra non credit. Similiter usque ad Castrum veterem de Valle Torae et ultra, non credit. Similiter usque Roccam Sinibaldam et ultra, non credit... Similiter ponit quod monasterium sicut abbatia Sancti Salvatoris, unde agitur, est situm infra civitatem Reatinam, Roccam Sinibaldam, Castrum veterem, Postam, Paganicam, Colle altum, Licettum, Roccam Berardi, Marerium, Pretellam, Pendentiam et Balvianum, non concedit abbas de monasterio.
Le 1er avril, plusieurs prêtres des églises de San Salvatore sont interrogés à leur tour : l’un d’eux nia en bloc toutes les affirmations de l’évêque (omnia negat), à l’exception toutefois de l’extension du diocèse jusqu’à Posticciola, Capitiniano, Ricetto et Marcetelli : Similiter ponit usque ad Postam et ultra non credit. Similiter usque ad Capitinianum et ultra non credit. Similiter usque ad castrum Licetti et ultra non credit. Similiter usque ad castrum Marcetelli et ultra non credit.
Pour les églises de San Salvatore, situées principalement dans la vallée du Salto, cf. BnF, ms. latin 1556, f. 25v-26r : V. Di Flavio, Il registro delle chiese della diocesi di Rieti, p. 103-104. San Salvatore possédait depuis le ixe siècle des biens jouxte Paganico dans la vallée du Turano (RF III, n° 311 de 873).
113 Regestum Clementis papae V, a. V, n° 5449-5450, p. 124-126. Voir aussi le chapitre 10, paragraphe I/A.
114 Sur l’adaptation de la géographie diocésaine aux cadres nouveaux de l’habitat, voir P. Toubert, Les structures du Latium médiéval, p. 793-803.
115 Voir le chapitre 10, paragraphe I/A pour quelques observations à ce sujet et les renvois bibliographiques.
116 Pour des vues divergentes sur la disparition ou la restructuration du système pléban, voir P. Toubert, Les structures du Latium médiéval, p. 797-803 et p. 855-930 ; E. Petrucci, Pievi e parrocchie del Lazio. Pour l’Italie centro-septentrionale, voir d’une manière générale les contributions de C. Violante, Le strutture organizzative della cura d’anime... (secoli v-x) ; Id., Pievi e parrocchie... secoli xi e xii ; Id., Sistemi organizzativi della cura d’anime tra Medioevo e Rinascimento.
117 Ed. M. Michaeli, Memorie storiche della città di Rieti, II, doc. n° III et IV, p. 265-268.
118 Peut-être doit-on ranger parmi les créations nouvelles certaines églises plébanes accompagnées d’un toponyme qui n’est pas attesté pour le haut Moyen Âge et qui fut celui d’un castrum ou d’une villa à partir des xie et xiie siècles, en particulier les trois plebes attestées dans cette partie de la vallée (cf. A. R. Staffa, L’assetto territoriale della valle del Turano, p. 259), mais certainement pas toutes, qui ont pu changer de nom à la suite de l’« incastellamento » : voir par exemple le cas de la plebs S. Iustini in Rocca Sinibaldi, attestée pour la première fois en 853, sous la forme S. Iustini in Nautona (LL I, n° 18) et sans doute plus ancienne encore, cf. E. Migliario, Uomini, terre e strade, p. 42 ; Ead., Per una storia delle strutture agrarie, p. 61 ; A. R. Staffa, L’assetto territoriale della valle del Turano, p. 242-247.
119 Cf. P. Delogu, Lineamenti della storia ; S. Coccia, H. Patterson et A. Vigil-Escalera Guirado, L’indagine archeologica et S. Coccia, Gli scavi archeologici nel castello di Collalto Sabino.
Pour Ricetto et Collalto, A. R. Staffa, L’assetto territoriale della valle del Turano, p. 260. Andrea Staffa, L’incastellamento nella valle del Turano, p. 182 confond Collalto dans la vallée du Turano et le castellum de Collalto, situé dans la vallée de l’Aniene entre Trevi et Jenne (cf. P. Delogu, Territorio e cultura fra Tivoli e Subiaco, tav. I), documenté depuis le début du xiie siècle : cf. Il Regesto Sublacense, p. 8 ; R. Morghen (éd.), Chronicon Sublacense, p. 181, 183 et 185 ; Id., Le relazioni del monastero sublacense col papato, la feudalità, p. 236 et L. Travaini, Due castelli medievali, p. 49.
120 Sur l’église Santa Lucia, voir Archivio Vescovile di Rieti, X, 4 (visite pastorale Camaiani, 1573-1574), f. 169r : S. Lucia extra et prope moenia dicti castri Collis Alti in qua sepeliuntur defunctorum cadavera dicti loci ; cf. P. Delogu, Lineamenti della storia, p. 9 et A. R. Staffa, L’assetto territoriale della valle del Turano, p. 260.
121 Sous une forme corrompue, Montagliano apparaît à ce titre parmi les églises dépendant de Farfa dans la liste de l’évêque Tommaso au milieu du xiiie siècle : BnF, ms. latin 1556, f. 25v. Sur la juridiction de Farfa dans la vallée du Turano aux xiiie-xive siècles, voir le chapitre 10, paragraphes I/A et II/A/2/b.
122 Intra quos fines plebes omnes cum cappellis vel ecclesiis et quicquid in presentiarum iuste et canonice possides... firma tibi tuisque successoribus et illibata permaneant : éd. M. Michaeli, Memorie storiche della città di Rieti, II, doc. n° IV, p. 268-272. Voir aussi R. Brentano, A new world in a small place, p. 81 et suiv. dont les additions diffèrent légèrement des miennes, que je laisse donc volontairement imprécises. La chose importe peu, l’important étant de relever l’accroissement du nombre d’églises plébanes et de monastères, qui doublent en trente ans ; les deux privilèges laissent dans l’ombre les églises non plébanes, appelées chapelles, dont la prolifération fut sans doute plus importante encore.
123 Voir la note 104.
124 Voir la note 105. Nous n’en avons pas fait le décompte. Selon Paolo Desanctis (1816-1907), chanoine de la cathédrale de Rieti avant de devenir évêque de Poggio Mirteto, le registre perdu de 1398, qui reproduisait également la liste de l’évêque Tommaso, énumérait 866 églises, dont 731 séculières et 135 régulières : cf. V. Di Flavio, Il registro delle chiese della diocesi di Rieti, p. 19.
125 BnF, ms. latin 1556, f. 24v-26r.
126 A Collalto, l’église principale est désormais San Gregorio, dans le castrum ; Paganico comprend deux ou trois églises : San Giovanni, hors du village, San Nicola et peut-être déjà Santa Maria ; Pietraforte, Santo Stefano dans le castrum et Santa Maria de’ Casali, à l’écart. Sont également mentionnées San Nicola de Screya (Ascrea), San Pietro de Bulgaretta, les églises Santa Maria et San Sebastiano à Nespolo, Sant’Andrea et Santa Maria à Ricetto, Santa Maria de Collegiove : BnF, ms. latin 1556, f. 23r et 25v.
Voir aussi A. R. Staffa, L’incastellamento nella valle del Turano, p. 181-187 et, pour Ascrea, Id., Il territorio di Ascrea. Note di storia e topografia et V. Di Flavio, Ascrea nei documenti ecclesiastici.
127 On rappellera que toutes les « pievi » n’avait pas cédé leur place de premier plan comme le montre l’exemple de San Giustino de Roccasinibalda, ancienne cella de Farfa dans la massa Nautona, attestée comme plebs au xiie siècle et restée matrice au xiiie siècle : BnF, ms. latin 1556, f. 23v. A ce sujet, voir notamment V. Di Flavio, Il registro delle chiese della diocesi di Rieti, p. 22-25.
Sur l’organisation de l’encadrement paroissial à partir du milieu du xiiie siècle, voir le chapitre 10, paragraphe I/A.
128 A notre connaissance, Acquamezza est mentionné pour la dernière fois dans la liste des biens enlevés à l’abbaye de Farfa et adressée dans les toutes premières années du xiie siècle au pape Pascal II par les moines pour obtenir leur restitution, sans succès : RF V, n° 1317. Son abandon ultérieur, à une époque que nous ignorons, ne paraît pas douteux. La documentation postérieure ne le cite plus jamais, à la différence d’autres sites voisins, comme Pietra Balda ou Bulgaretta, mentionnés dans le même document et sortis du patrimoine de Farfa à la même époque, qui furent occupés pourtant jusqu’à la fin du Moyen Âge (voir le chapitre 10, en particulier au paragraphe I/B). Sur Acquamezza, voir aussi A. Staffa, L’incastellamento nella valle del Turano, p. 177 et P. Toubert, Les structures du Latium médiéval, p. 420-421 et p. 349-365 sur les désertions anciennes qui apparaissent comme une crise de croissance de l’« incastellamento » ; voir également à ce sujet G. Duby, Démographie et villages désertés, p. 17 et suiv.
129 RF V, n° 1130 : Et ecclesias quae in Aqua Meza et in Petra Balda, deintus et deforis per eorum pertinentias stare videntur. Rappelons que la pertinentia d’Acquamezza est mentionnée dès la première attestation du castellum en 1068-1069 : RF IV, n° 984 (qui livre au demeurant la première mention de la pertinentia d’un castellum dans la moyenne vallée du Turano, voir le chapitre 8, paragraphe II/C).
130 On ne dispose pas de travaux d’ensemble sur la poursuite de l’« incastellamento » au xiiie siècle. Voir cependant, et pour ses liens avec le développement de la seigneurie territoriale, S. Carocci, Baroni di Roma, passim et en part. p. 146-154 ; Id. La signoria rurale nel Lazio ; J. Coste, L’incastellamento lungo la via reatina, p. 507-510 ; P. Delogu, Problemi di castelli nel Lazio ; Id., Castelli e palazzi. La nobiltà duecentesca nel territorio laziale ; M. Vendittelli, La famiglia Curtabraca. Contributo alla storia della nobiltà romana del Duecento, p. 242-268.
Les sources manquent totalement pour étudier la démographie des villages de la vallée à cette époque. Aussi est-il impossible d’établir la part respective de la croissance naturelle de la population villageoise, celle de la redistribution de l’habitat dispersé préexistant et celle des mouvements migratoires de plus ample rayon (cf. chapitre 1, paragraphe II/B). A ce sujet, voir en premier lieu P. Toubert, Les structures du Latium médiéval, p. 651-657 et S. Carocci, Baroni di Roma, p. 266-270 ; voir aussi Id., Ricerche e fonti sui poteri signorili nel Lazio meridionale, en part. p. 121-122 ; E. Hubert, Considérations sur la propriété immobilière dans les villages, p. 134-138 ; Id., Mobilité de la population et structure des habitations.
131 Rigatti : 837 m ; Marcetelli : 929 m ; Ricetto : 982 m ; Collegiove : 1015 m ; Nespolo : 886 m ; Collalto : 980 m. Les sites fondés précédemment se trouvent à des altitudes généralement moins élevées : Montagliano : 822 m ; Castiglione : 737 m ; Offiano : 627 m ; Petescia/Turania : 703 m.
132 Voir d’une manière générale les ouvrages classiques d’E. Kantorowicz, L’empereur Frédéric II et E. Jordan, Les origines de la domination angevine en Italie ; voir aussi E. Cuozzo, L’unificazione normanna e il regno normanno-svevo ; G. Vitolo, Il regno angioino ; G. Galasso, Il regno di Napoli ; D. Waley, The Papal State in the Thirteenth Century ; Id., Lo Stato papale dal periodo feudale a Martino V ainsi que les actes de colloques récents : Federico II, éd. par P. Toubert et A. Paravicini Bagliani ; Friedrich II, éd. par A. Esch et N. Kamp ; L’État angevin. Pouvoir, culture et société entre xiiie et xive siècle ; voir également les observations de R. Elze, Papato, Impero e Regno meridionale dal 1210 al 1266.
133 L’histoire de la famille a été renouvelée depuis le début des années 1990 : voir F. Allegrezza, Organizzazione del potere e dinamiche familiari. Gli Orsini dal Duecento agli inizi del Quattrocento ; Ead., Un dominio di frontiera : la costituzione del patrimonio degli Orsini tra terre della Chiesa e Regno dal xii al xv secolo ; S. Carocci, Baroni di Roma, en part. p. 69-183 sur la formation des seigneuries baronniales et p. 387-389 ; voir aussi Id., Il nepotismo nel medioevo, p. 32-33 ; M. Thumser, Rom und der römische Adel in der späten Stauferzeit, en part. p. 140-157.
134 T. Leggio, Il privilegio di Innocenzo III, p. 246 : castrum Montis Aliani cum ecclesiis et pertinentiis suis.
135 Insuper pro anima mea... relinquo de bonis meis CCC lib. prov. de quibus relinquo hominibus Vicovarii, Cantalupi, Burdelle, Civitelle et Montis Aliani CL lib. prov., videlicet Montaliani L lib... pro emendatione et satisfactione rerum a me iniuste ab eis ablatarum... Item hominibus ville Sancte Agnetis de Monte Aliano L sol. prov. pro emendatione dampni eis facti per homines dicti Monti Aliani, éd. M. Thumser, Zwei Testamente aus den Anfängen der Statrömischen Familie Orsini, p. 98-99.
136 Voir principalement S. Carocci, Una divisione dei possessi romani degli Orsini (1242-1262).
137 Relinquo pro alimentis dotis sue omni anno C lib. de fructibus Montaliani et si acciderit, quod aliquo tempore non possit habere, recolligat ubi voluerit et si non habeat ea, de fructibus Neptuni, scilicet de silva et de quarte et de V sol. et fructibus molendini, usque in dicta quantitate, éd. M. Thumser, Zwei Testamente, p. 114.
138 Voir le chapitre 2.
139 T. Leggio, Il privilegio di Innocenzo III, p. 246.
140 Voir le chapitre 8, paragraphe I.
141 Cf. par exemple Archivio Colonna, pergamene, cass. 17, n° 186 (1339).
142 Voir notamment l’énumération des confins d’Offiano en 1364 : iuxta tenimentum Petre fortis et tenimenta castrorum Montorii, Petescie, Montis Aliani et villarum Sancte Agnetis et Cervie, en ASRoma, collezione delle pergamene, cass. 117, n° 11, f. 6v-7v (éd. E. Hubert, Le « locus qui dicitur Ophiano » et le « castellum de Ophiano », p. 228) ; et ceux de la villa de Sant’Agnese au xvie siècle : ab uno latere tenimentum Montis Orei, ab alio tenimentum Puzzaglie, ab alio res ecclesie Sancte Marie in Putealia, a capite tenimentum et pertinentias castri Vivarii et serras ipsius castri Vivarii, ab alio latere tenimentum Portice, ab alio latere tenimentum Petesie, a pede rivum Sancti Martini et castrum dirutum Sinibaldi, ASRoma, Congregazione del Buon Governo, II, 3470.
143 Voir le chapitre 8, paragraphe II/A/1/a.
144 Voir respectivement T. Leggio, Il privilegio di Innocenzo III, p. 246 et J. Guiraud, La Badia di Farfa, p. 282.
145 Pour un exemple éclairant, contemporain et mieux documenté par les actes d’un procès, des rapports conflictuels entre castrum et villa, en l’occurrence Sgurgola et Villamagna près d’Anagni, et entre leurs seigneurs respectifs, voir S. Carocci, Ricerche sui poteri signorili nel Lazio meridionale, p. 112-123.
146 Cf. F. Allegrezza, Un dominio di frontiera, p. 329-332 et, d’une manière plus générale, Ead., Organizzazione del potere, p. 4-27 ; sur Matteo Rosso Orsini, soutien actif de la papauté, et sa politique contre Frédéric II, voir aussi P. Brezzi, Roma e l’Impero medioevale, 443-451.
147 Voir en particulier M.-T. Caciorgna, Confini e giurisdizioni tra Stato della Chiesa e Regno, p. 312 et suiv. Pour la politique pontificale beaucoup plus marquée à cet égard dans le Latium méridional, voir G. Falco, I comuni della Campagna e della Marittima nel Medio Evo (1919-1926), en part. p. 465-475 ; voir aussi P. Delogu, Territorio e dominii della regione pontina nel Medio Evo, p. 25-27 ; M. T. Caciorgna, Questioni di confine : potere e giurisdizioni tra Stato della Chiesa e Regno et J.-Cl. Maire Vigueur, Forme e strumenti della presenza imperiale nel Lazio meridionale.
148 J. Guiraud, La Badia di Farfa, p. 281-282.
149 Cf. E. Sthamer, Die Verwaltung der Kastelle im Königreiche Sizilien ; voir aussi F. Cardini, Gli ordinamenti militari ; G. Fasoli, Castelli e strade nel « Regnum Siciliae », p. 32-34 ; J. Göbbels, Die Militärorganisation im staufischen Königreich Sizilien, p. 492-495 ; J.-M. Martin, L’organisation administrative et militaire du territoire, 106-107.
150 E. Sthamer, Die Verwaltung der Kastelle, p. 117-122. Pour les châteaux des Abruzzes, voir en particulier cf. G. Chiarizia et al., Abruzzo dei castelli ; C. Delle Donne, I castelli d’Abruzzo in età federiciana.
151 E. Sthamer, Die Verwaltung der Kastelle, p. 128-130.
152 J.-M. Martin, L’organisation administrative et militaire du territoire, p. 86.
153 Cf. M. Michaeli, Memorie storiche della città di Rieti, III, p. 18-35 : p. 25-26 ; T. Leggio, Profilo biografico di un funzionario di Federico II, p. 138-141.
154 J.-L.-A. Huillard-Bréholles, Historia diplomatica Friderici Secundi, t. V/1, p. 514. Le castrum abandonné de Macchiatimone, situé sur la rive gauche du Salto dans le territoire de la commune de Pescorocchiano, a fait l’objet d’une intervention archéologique au début des années 1990 : cf. P. Beavitt et N. Christie (dir.), The Cicolano Castles Project... 1991, p. 493-494 et 501-505 ; Eid., The Cicolano Castles Project... 1992, p. 441-451.
155 Voir dans ce chapitre le paragraphe I/B.
156 Cf. J.-L.-A. Huillard-Bréholles, Historia diplomatica Friderici Secundi, t. V/1, p. 557-562 : p. 559.
157 J.-L.-A. Huillard-Bréholles, Historia diplomatica Friderici Secundi, t. V/2, p. 881 (6/04/1240) et p. 932-933 (28/04/1240). Sur Roberto di Castiglione, voir N. Kamp, Castiglione, Roberto. Le fils de Roberto, Robertuccio, était le nepos (que l’on doit entendre ici au sens de neveu et non de petit-fils) de Bartolomeo, cf. ASRieti, Pergamene, S. Domenico di Rieti, n° 12 de 1270. Sur le castrum abandonné de Rocca Alberici, cf. A. R. Staffa, L’assetto territoriale della valle del Salto, p. 60. Sur Antrodoco, cf. M. R. Berardi, Antrodoco : un castrum di confine tra età sveva e angioina. Pour la blida, une machine à double contrepoids novatrice, dont c’est la deuxième attestation connue pour l’Italie, voir A. A. Settia, Comuni in guerra, p. 297, 311 et, pour le perfectionnement des techniques de siège et la mécanisation de la guerre, Id., Castelli, popolamento e guerra, p. 363-373.
158 Cf. N. Kamp. Castiglione, Roberto. Sur la politique impériale dans les Marches et en Romagne, voir J.-Cl. Maire Vigueur, Impero e papato nelle Marche : due sistemi di dominazione a confronto et A. Vasina, La Romagna nella politica di Federico II. Sur les podestats impériaux, voir O. Guyotjeannin, I podestà imperiali nell’Italia centro-settentrionale (1237-1250).
159 Pour les Mareri, voir T. Leggio, Profilo biografico di un funzionario di Federico II, p. 123-125.
160 A. R. Staffa, L’assetto territoriale della valle del Salto, p. 68. Le privilège d’Anastase IV pour l’Église réatine (1153), le paragraphe du Catalogus baronum le concernant, cités tous deux à la note suivante, et plusieurs actes du fonds Orsini de l’Archivio storico capitolino (par exemple AO II A IV 33 de 1339) permettent d’écarter l’hypothèse d’Evelyn Jamison proposant d’identifier le Castellione du Catalogus baronum, § 1123, au Castiglione situé dans le territoire de Tornimparte, quelques kilomètres plus au nord (ibid., note 4, p. 221, suivie par Norbert Kamp, Castiglione, Giovanni, p. 80 et Id., Castiglione, Roberto, p. 98). Peut-être faut-il reconnaître dans ce dernier site le Castellionum de Valle quod est casale Aquile mentionné notamment dans l’acte de 1339 des archives Orsini cité plus haut.
Un problème se pose pour ce Castiglione. La liste des églises du diocèse de Rieti, dressée sur ordre de l’évêque Tommaso, mentionne le monastère S. Pauli de Utili, ubi fuerunt fratres minores usque ad destructionem castri Castilionis (BnF, ms. latin 1556, f. 22v ; sous la même forme dans le registre de 1398 : V. Di Flavio, Il registro delle chiese della diocesi di Rieti del 1398, p. 76, n° 339). Tersilio Leggio (Profilo biografico di un funzionario di Federico II, p. 140) suggère d’attribuer la destruction de Castiglione aux opérations militaires liées au siège de Rocca Alberici conduit par Roberto di Castiglione ; le départ des Franciscains devant par ailleurs être attribué à l’expulsion des Mineurs du royaume décrétée en 1240 (sur la portée de l’éloignement des Mendiants, voir cependant G. Barone, Federico II di Svevia e gli ordini mendicanti, p. 615sq.). Si le castrum fut alors détruit, il fut restauré immédiatement après puisque les Castiglione eux-mêmes le possédèrent au moins du milieu du xiiie siècle jusqu’aux années 1340 quand ils le vendirent aux Orsini (voir le paragraphe suivant et le chapitre 10, paragraphe II). Rappelons que la liste des églises du milieu du xiiie siècle n’est connue que par le manuscrit de Paris, copié à la fin du xive siècle et par les extraits tirés du registre de 1398 par l’évêque Saverio Martini au tournant des xviiie et xixe siècles. Il n’est pas exclu que des ajouts aient été portés entre le milieu du xiiie et la fin du xive siècle. Le manuscrit de Paris énumère en effet les couvents mendiants au f. 25r, citant celui de S. Paolo de Utili tandis qu’au f. 22v il y est dit ubi fuerunt fratres minores ; autre indice d’un ajout postérieur, Santa Lucia de Collalto, où sunt ibi moniales (f. 23r), est mentionnée dans la liste des couvents féminins sous la forme suivante au f. 25r : apud Colle Altum ubi sunt fratres. La venue des frères à Collalto doit être postérieure à la rédaction originale, sinon le couvent aurait sans doute été cité parmi les couvents masculins. Il n’est pas impossible que la mention relative à la destruction de Castiglione doive être attribuée à un ajout de la seconde moitié du xive siècle quand il disparut effectivement.
161 Catalogus baronum, § 1123 où Castiglione est localisé avec Pescorocchiano, Varri, Macchiatimone, Rocca Melitum, Castelmenardo, Collefegato, San Giovanni de Elpidio et Rocca Randisi dans le Val di Petra, ensemble très compact des châteaux que tient en fief Gentile Vetulus. En 1150, celui-ci donna à l’évêque de Rieti le monastère San Mauro quod situm est in monte de Fano quod est inter vallem de Petra, mentionné dès 1134 : F. Ughelli, Italia sacra, t. I, col. 1199. Le monastère est localisé supra Castilione de Valle de Petra dans le privilège d’Anastase IV confirmant les biens de l’Église réatine en 1153, éd. M. Michaeli, Memorie storiche della città di Rieti, II, doc. n° III, p. 266. Voir aussi A. R. Staffa, L’assetto territoriale della valle del Salto, p. 69.
162 Voir dans ce chapitre le paragraphe III/B/2.
163 J. Guiraud, La Badia di Farfa, p. 281. Farfa conserva toutefois sa juridiction ecclésiastique sur Montagliano jusqu’aux xive-xve siècles, voir le chapitre 10, paragraphe I/A.
164 Les statuts de reparatione castrorum des années 1240-1245 mentionnent notamment la terra domini Thomasii de Mareri, convicina au château domanial de Capradosso à la réparation duquel elle devait contribuer : cf. E. Sthamer, Die Verwaltung der Kastelle, p. 118. Pour la concession de Castelvecchio et la baronnie des Mareri, cf. A. Di Nicola, Il governo dei Mareri a Petrella e nel Cicolano nei secoli xiii e xiv, p. 48 et passim ; A. Cortonesi, Ai confini del Regno. La signoria dei Mareri sul Cicolano.
165 Pandolfo de Collalto fut seigneur de Pescorocchiano au temps de l’empereur Frédéric II : I Registri della Cancelleria Angioina, IX, p. 234 ; cf. P. Delogu, Lineamenti della storia, p. 9. Pour les résultats de l’enquête archéologique, voir S. Coccia, H. L. Patterson et A. Vigil-Escalera Guirado, L’indagine archeologica, p. 35-52 et S. Coccia, Gli scavi archeologici nel castello di Collalto Sabino.
166 Voir également le cas célèbre des seigneurs d’Aquino dans le Latium méridional, cf. J.-C. Maire Vigueur, Forme e strumenti della presenza imperiale nel Lazio meridionale, p. 59.
167 Quelques feuillets d’un fascicule des Riformanze de la commune ont été conservés à ce propos et ont été édités par M. Michaeli, Memorie storiche della città di Rieti, III, doc. n° VI, p. 118-122 (p. 121 pour la réponse du châtelain d’Antrodoco : respondidit quod idem castrum est Manfredi regis et per eum tenet et tenebit quousquequo potuerit). Clément IV (quod dominus Papa et eius curia vult dictam Civitatem Reate accedere moraturi, p. 118) n’alla pas à Rieti finalement : cf. A. Paravicini Bagliani, La mobilità della Curia romana, p. 251. Pour Filippo Mareri, voir notamment G. Del Giudice, Codice diplomatico del regno di Carlo I e II d’Angiò, parte Ia : Carlo I° d’Angiò, vol. I, p. 245-248, doc. n° 80 (23 décembre 1266). Voir aussi M. T. Caciorgna, Confini e giurisdizioni tra Stato della Chiesa e Regno, p. 317-318.
168 M. Michaeli, Memorie storiche della città di Rieti, III, doc. n° VIII-IX, p. 122-123.
169 Dès avant le mois de mars 1268, Giovanni Mareri avait rejoint les ennemis de Charles d’Anjou comme l’atteste une lettre de Clément IV datée du 10 mars 1268 et adressée au capitaine du royaume de Sicile citra Farum : Sane de castris Iohannis de Marerio scire te volumus, quia licet sint in imperio, sub nostrae tamen defensionis praesidio, favore vel gratia non consistunt, dum regis inimicis adhaerent, éd. M. Michaeli, Memorie storiche della città di Rieti, III, doc. n° XIII, p. 127. La localisation des castra utilisée dans cette lettre montre l’ambiguïté territoriale de la région, voir à ce sujet le paragraphe I/C dans ce chapitre et le chapitre 10, paragraphe I/B.
170 Cf. P. Sella, L’itinerario di Corradino di Svevia da Roma ai Campi Palentini. Voir d’une manière générale E. Duprè Theseider, Roma dal comune di popolo alla signoria pontificia, p. 151-182 ; G. Galasso, Il Regno di Napoli, p. 26-35 ; voir aussi R. Manselli, Corradino di Svevia e Roma.
171 Cf. G. Del Giudice, Codice diplomatico del regno di Carlo I° e II° d’Angiò, parte Ia : Carlo I° d’Angiò, vol. II/1 (1267-1268), doc. n° 59, p. 195, 26 août 1268 (= M. Michaeli, Memorie storiche della citta di Rieti, III, doc, n° XII, p. 126 ; voir aussi p. 46-47 et doc. n° XIII, p. 127) : lettre de Clément IV à la commune de Rieti dans laquelle il enjoint aux Réatins, qui laissaient passer librement les battus de Tagliacozzo, de les arrêter et de les tenir en captivité.
172 Voir le chapitre suivant.
173 Voir d’une façon générale G. Galasso, Il Regno di Napoli, p. 33 et suiv. Pour les partisans de Manfred, voir E. Pispisa, Il regno di Manfredi. Proposte di interpretazione.
174 G. Del Giudice, Codice diplomatico del regno di Carlo I, parte Ia, vol. II/1, doc. n° 91, p. 250-253 (4/12/1268).
175 Sur les répressions qui ont suivi Tagliacozzo, voir notamment les documents édités par G. Del Giudice, Codice diplomatico del regno di Carlo I°, parte Ia, vol. II/1, p. 220 et suiv., en particulier le doc. n° 93, p. 258-267 (15/12/1268) pour le statut général contre les rebelles et bona omnia proditorum nostrorum qui corporaliter sunt dampnati vel in prelio contra nos aut alias interfecti vel per fugam se absentarunt aut in locis rebellibus commorantur seu in nostro latitant Regno... Cf. L. Cadier, Essai sur l’administration du royaume de Sicile sous Charles Ier et Charles II d’Anjou, p. 5 et suiv. ; P. Durrieu, Études sur la dynastie angevine de Naples. Le Liber donationum Caroli Primi et Id., Les archives angevines de Naples. Étude sur les registres du roi Charles Ier. Sur les concessions féodales aux chevaliers provençaux, voir aussi E. Cuozzo, Modelli di gestione del potere nel Regno di Sicilia et S. Pollastri, La noblesse provençale dans le royaume de Sicile (1265-1282) ; nous n’avons pu consulter sa thèse sur La noblesse napolitaine sous la dynastie angevine.
176 En 1270, Charles ordonna aux justiciers une enquête sur les biens des rebelles ; parmi les noms cités pour l’Abruzze sont mentionnés en particulier Giovanni Mareri et Bartolomeo de Castiglione : cf. G. Del Giudice, Codice diplomatico del regno di Carlo I°, parte Ia, vol. II/1, appendice I, doc. n° XXIV, p. 322-323 (= I Registri della Cancelleria Angioina, III, p. 128).
177 Rocca Randisi, Poggio San Giovanni et le neuvième de Tufo, qui avaient appartenu à Giovanni di Castiglione, furent confisqués puis restitués au second mari de Maria, fille de Teodino de Carboncellis et mariée en premières noces au fils de Giovanni di Castiglione : B. Mazzoleni (éd.), Gli Atti perduti della Cancelleria angioina transuntati da Carlo De Lellis, Parte I : Il regno di Carlo I, vol. 1, p. 74, n° 311 (= I Registri della Cancelleria Angioina, IV, p. 80).
178 I Registri della Cancelleria Angioina, II, n° 193, p. 53-54 (1/04/1269) :...verum quia contra obsidionem terre Castellionis, nostrorum rebellium, jurisdictionis tue, f.t. mandavimus quatenus homines de partibus Marsie Aquile Carsilioli et Sicoli... ad obsidionem dicte terre Castellionis deputares... ad conterendum rebelles..., homines ipsarum partium a servitio nostri felicis exercitus contra Sarracenos Lucerie..., tam si personaliter venire vellent quam pecunialiter,... prorsus excludas et pour l’application de cette exemption particulière, cf. I Registri della Cancelleria Angioina, III, p. 119 (31/03/1270) et IV, p. 2 (14/04/1270 : les vassaux d’Oderisio de Ponte à Sculcula ont participé 6 mois durant au siège de Castiglione).
179 Volumus et mandamus quod omne malum quod facere poteris hominibus Castriveteri et rebus eorum et ipsi castro, et hominibus Montis Aliani et eorum rebus et ipsi castro, facias viriliter et sine mora, nisi faciant te nomine nostro securum bene quod ipsi erunt fideles et obedientes perpetuo Sancte Romane Ecclesie atque nobis et quod non recipient aliquo tempore absque nostra licentia et mandato Iohannem de Manerio vel Philippum de Manerio vel Bartholomeum de Castellione vel eorum filios vel adiutores vel aliquos alios proditores vel inimicos Ecclesie vel nostros, nec eis dabunt consilium vel auxilium vel iuvamen, ymmo omnibus inimicis Ecclesie et nostris suo posse faciant vivam guerram. Et si contingerit quod Margarita, uxor dicti Iohannis, vel Robertus de Castellione facerent contra Sanctam Romanam Ecclesiam vel nos vel heredes vel homines nostros vel darent proditoribus nostris vel inimicis nostris auxilium consilium et iuvamen quod homines dictorum locorum teneantur eos capere et nobis reddere suo posse et quod de cetero nostris nunciis postquam predicti Margarita et Robertus facerent contra predicta teneantur in omnibus obedire Sancte Romane Ecclesie atque nobis et quod ipsi Margerite vel Robertucio vel alicui alii proditori vel inimico nostro in aliquo non obediant nec intendant. Et si dicta Margarita et dictus Robertucius et omnes dictorum castrorum volunt predicta omnia promittere et iurare et fideiussores ydoneos dare, possis eos nostro nomine affidare et recipere in nostra gratia et amore. Alias procedas contra eos sicut contra inimicos viriliter et potenter, éd. C. Minieri Riccio, Saggio di codice diplomatico formato sulle antiche scritture dell’Archivio di Stato di Napoli, vol. 1, doc. n° xlvii, p. 52 (= I Registri della Cancelleria Angioina, II, n° 589, p. 151). Sur Philippe de Roussy, voir P. Durrieu, Les archives angevines de Naples, t. 2, p. 375.
180 ASRieti, Pergamene, S. Domenico di Rieti, n. 12 (citée par T. Leggio, Il paesaggio urbano di Rieti tra età romana e alto medioevo, p. 16). Sur le couvent S. Domenico, cf. Id., Il convento di S. Domenico nel paesaggio urbano di Rieti del pieno medioevo, p. 72-75, et, pour quelques notices sur son fonds d’archives, Id., Le fortificazioni di Rieti, p. 14 et note 111, p. 70.
181 I Registri della Cancelleria Angioina, VIII, p. 231 : ut, si castrum Castilionis, tunc nobis rebelle, non adhuc in suis manibus recepisset, et hii qui tenebant illud resignare ipsum vellent eidem, reciperet illud iuxta formam alias sibi datam ; Bartholomeo vero de Castilione et filiis eius aliisque hominibus dicti castri, super securitates ydoneas quod Nos vel Regnum nostrum per se vel per terras suas aliquatenus non offenderent, concederet... licentiam in terris aliis extra Regnum secure morandi. Pour le siège d’un autre castrum rebelle, voir par exemple ibid., V, p.253 (1er août 1272) : le roi mande au justicier des Abruzzes d’assister Mathieu du Plessis, capitaine du siège du castrum Maccle, à qui il a ordonné de faire élever des bastidae seu castella lignea tout autour du castrum pour empêcher quiconque d’entrer ou de fuir.
182 I Registri della Cancelleria Angioina, VIII, p. 183 pour la concession du castrum Castellionis quod fuit Bartholomei de Castellione proditoris à Guillaume de Cadenet et p. 45 et 146 pour l’exécution ; ibid., IX, p. 66, n° 4 pour la lettre du 2 septembre 1272 informant le châtelain du castrum Castellionis de la concession du castrum à Guillaume de Cadenet. Sur Guillaume et Bertrand de Cadenet, lequel fut notamment justicier de Basilicate en 1283-1284, cf. P. Durrieu, Les archives angevines de Naples, t. 2, p. 297 et 300 et S. Morelli, I giustizieri nel regno di Napoli al tempo di Carlo I d’Angiò, note 40, p. 504 et p. 515.
183 I Registri della Cancelleria Angioina, XVI, n° 12, p. 6 (11/10/1276). Sur l’archevêque de Reggio, cf. N. Kamp, Castiglione, Giacomo.
184 I Registri della Cancelleria Angioina, XIII, n° 308, p. 282-283 (25/09/1275).
185 Les Registres de Nicolas III (1277-1280), p. 245, n° 574 et N. Kamp, Castiglione, Giacomo, p. 81.
186 Notre homme est-il le même que celui qui tint à ferme, avec deux associés, la secretia de Sicile, chargée d’administrer la fiscalité indirecte dans l’île, en 1281-1282 ? Cf. B. Mazzoleni (éd.), Gli atti perduti della Cancelleria angioina, parte I, vol.1, p.476, n°50 : Rogerius de Mauro, Bartholomeus de Castelliono et dominus Riccardus Fimetta de Panormo, secreti Sicilie et I Registri della Cancelleria Angioina, XXV, p. 135, n° 78 (1281-1282). Henri Bresc donne cependant le secretus de 1281-1282 comme originaire de Messine : 1282 : Classes sociales et révolution nationale, p. 251. Sur la secrezia de Sicile et le changement de ses titulaires dans les années qui précèdent les Vêpres, voir aussi Id., Un monde méditerranéen. Économie et société en Sicile, 1300-1450, p. 758-759.
Charles d’Anjou réorganisa l’administration des finances et divisa le royaume en 4 secrezie : Principat, Terre de Labour et Abruzzes ; Pouille ; Calabre ; Sicile. Cf. L. Cadier, Essai sur l’administration du royaume de Sicile, p. 23 et suiv. et en dernier lieu J.-M. Martin, Fiscalité et économie étatique dans le Royaume angevin de Sicile et S. Morelli, I giustizieri nel regno di Napoli, p. 504-507.
187 Voir d’une manière générale G. Galasso, Il regno di Napoli, p. 81-103.
188 Bartolomeo et ses fils vendent alors des biens sis à Rieti : la nomination de procureur le 26 octobre 1282 et la ratification de la vente le 31 mars 1283 sont établies dans le castrum de Montagliano, cf. Arch. Cap. Rieti, Arm. IX, fasc. D, n° 2. Je dois l’indication de ces actes à Tersilio Leggio que je remercie vivement.
189 I Registri della Cancelleria Angioina, XXVI, p. 94, n° 43.
190 En 1326, Roberto di Castiglione vendit aux Orsini la moitié de Montagliano ad veram et mundam proprietatem perpetuamque hereditatem et ab omni honere census et servitutis seu cuiuslibet alterius honeris exemptam : Archivio Colonna, pergamene, cass. 17, n° 139 ; voir également le chapitre suivant, paragraphe II/ A/1.
191 Voir le chapitre 2.
192 C’est ante palatium domini Bartholomei qu’instrumente le notaire dressant l’acte de 1283 cité à la note 188.
193 Voir le chapitre 3 (paragraphe II/B) et la contribution de Nolwenn Lécuyer dans le volume suivant.
194 J. Guiraud, La Badia di Farfa, p. 281.
195 Cf. D. Postpischl (éd.), Catalogo dei terremoti italiani dall’anno 1000 al 1980, p. 28-30 ; Id., L’osservazione e i dati strumentali per lo studio dei terremoti, p. 683-686. Sur le tremblement de terre du 6 janvier et du 5 mai 1241, voir les notes inscrites au verso d’une charte de Valva : Archivio paleografico italiano, I, pl. 77-73 ; Bullettino dell’Archivio paleografico italiano, II, 1910, p. 218 ; G. Zanon, Una carta di Valva dell’843, p. 281.
196 D. Bortolan, Cronaca romana dell’anno 1288 al 1301, p. 431 : le tremblement de terre fut encore plus fort dans la soirée du lundi 1er décembre ita quod multe domus et hospicia tres ceciderunt et contracte sunt in civitate Reatina et quamplures homines et mulieres exinde mortui sunt et fuerunt et per plures dies post terrremotus in eadem civitate duravit ; Continuationes Chronici Martini Oppaviensis, éd. L. Weiland, p. 254-255 : scissum est palacium pape et per civitatem ruerunt turres multe et alia edificia et oppresserunt multos... Eodem die septem vicibus concussa fuit civitas a terremotu in tantum, quod coacti sunt homines civitatis egredi et relinquere domos vacuas ; Tholomei Lucensis Annales, éd. B. Schmeidler, p. 234. Voir aussi T. Leggio, Il convento di S. Domenico, p. 68 ; Id., Le fortificazioni di Rieti, p. 17.
197 Chronicon fratris Francisci Pipini Bononiensis O.P., éd. L. A. Muratori, IV, 42, col. 742 : Podium Vasconis a civitate ipsa quinque milliaribus distans funditus eversum est et in momento ultra CL habitatores ipsius hujus ruinae causa oppressit ; L. Fumi et A. Cerlini, Una continuazione orvietana della Cronaca di Martin Polonio, p. 123 : Ex ipsis terremotibus castrum Podii prope ipsam civitatem ad VI miliaria quasi totaliter est dirutum et concussum et una hora ex hedifitiorum ruina CXIII persone et anplius ibi perierunt.
198 Continuationes Chronici Martini Oppaviensis, éd. L. Weiland, p. 254-255 : Et missi fuerunt cursores ad omnes partes, ut certificaretur papa et qui cum ipso erant, quo tucius imineret confugium. Et significatum fuit eis, quod per quadraginta miliaria in circuitu idem accidit infortunium. Ruinas autem civitatum et castrorum non sufficio enarrare ; Sifridi presbyteri de Balnhusin Historia universalis, éd. O. Holder-Egger, p. 714 : et protendebatur per tres dietas usque Reatum civitatem... et de Reate per tres dietas usque ad muros Urbis Romae. Fuit autem tam vehemens ille terremotus, ut in diversis castris et civitatibus multas turres et domos subrueret, quarum ruina quot homines utriusque sexus obruti et perempti fuerint, quis enarrare sufficiat ? ; Ex annalibus Wigorniensibus, éd. F. Liebermann et R. Pauli, p. 472 : Que tempestas ultra quadriduum perseverans usque Romam inclusive per adiacentes provincias se extendit... turres contrivit et menia, castra contrivit fortissima... Cronaca Sublacense, XXII, p. 349-351 : Eo terraemoto horrendo concidit funditus antiquum monasterii S. Scholasticae dormitorium.
199 F. Bougard, E. Hubert et G. Noyé, Du village perché au castrum, p. 461.
200 Voir le chapitre 10, paragraphe II/A/2/b.
201 Voir plus haut le paragraphe III/A/1. Pour l’exemple bien documenté de l’absorption de Caprignano par Aspra (Casperia) au début du xive siècle, voir F. Bougard, E. Hubert et G. Noyé, Du village perché au castrum, p. 453-462.
202 J. Guiraud, La Badia di Farfa, p. 281-282.
203 Les sondages fouillés dans la villa ont permis de recueillir 101 tessons de céramique à « vetrina sparsa », soit près de 16 % de l’ensemble du mobilier et 68 % de la céramique de table décorée ; 6 tessons seulement de céramique à « vetrina laziale », soit moins de 1 % de la céramique totale et 4 % de la céramique de table décorée, et 26 tessons pour la majolique archaïque soit 4 % de l’ensemble du mobilier et un peu plus de 17 % de la céramique de table décorée : voir la contribution de Nolwenn Lécuyer dans le volume suivant.
204 Confisqué, le castrum de Mareri était gardé dès l’été 1269 par le châtelain Guillaume de Denamais : B. Mazzoleni (éd.), Gli Atti perduti della Cancelleria angioina transuntati da Carlo De Lellis, Parte I : Il regno di Carlo I, vol. 1, p. 287, n° 43 et vol. 2, p. 38, n° 208. Charles donna ainsi à Guillaume Accrochemoure, chevalier terrier de l’Hôtel, les castra de Mareri, Petrella, Casardita, Rigatti, Rocca de Sopra, Marcetelli et Vallebona de baronia Marerii in Aprutio, que fuerunt Philippi de Marerio proditoris le 17 juillet 1271 : ibid., p.170, n°240= I Registri della Cancelleria Angioina, VI, p. 137 et VII, p. 188 ; sur le personnage, voir notamment P. Durrieu, Les archives angevines de Naples, t. II, p. 268. Les biens dotaux de Constance, épouse de Filippo Mareri, furent également confisqués par Charles d’Anjou : I Registri della Cancelleria Angioina, III, p. 167 (1270). Voir aussi A. Di Nicola, Il governo dei Mareri, p. 53-54.
205 BAV, cod. vat. lat. 10334, f. 69v : In Apprutio ultra circa Regni confinia castrum Staffuli, cuius fortilitia fuit in quadam summitatem montis et homines ipsius castri habitabant in circuitu ipsius fortilitii et superveniente turbatione Curradini dictum castrum dirutum fuit et ipsius incole reducti fuerunt ad habitandum in planitie dicti castri, cité par A. Di Nicola, Il governo dei Mareri, note 50, p. 53-54. Le castrum fut reconstruit au début du xive siècle par Francesca Mareri.
206 I Registri della Cancelleria Angioina, III, p. 167 (1270) ; XX, n° 39, p. 84, n° 50, p. 87 (1279). Cf. A. Di Nicola, Il governo dei Mareri, p. 54 et suiv.
207 P. Delogu, Lineamenti della storia, p. 10 et p. 26.
208 I Registri della Cancelleria Angioina, XXI, p. 277, n° 168. Cf. A. Di Nicola, Il governo dei Mareri, p. 54 et P. Delogu, Lineamenti della storia, p. 26.
209 Voir S. Coccia, H. L. Patterson et A. Vigil-Escalera Guirado, L’indagine archeologica, p. 38-39 ; S. Coccia, Gli scavi archeologici nel castello di Collalto Sabino, p. 216-219.
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