Grain de cnide et cumin d’Éthiopie
Les médecins hippocratiques et les plantes des autres
p. 173-196
Résumés
Les auteurs hippocratiques fournissent peu d’informations sur les substances pharmaceutiques et, exceptionnellement, emploient des épithètes géographiques pour les qualifier. À quoi sont dues ces exceptions ? Les cas du cumin d’Éthiopie (ammi d’Égypte, Trachyspermum copticum Link = Ammi copticum L.) et du grain de Cnide (daphné sainbois, Daphné gnidium L.), parce qu’ils renvoient à deux pôles géographiques très éloignés l’un de l’autre, permettent d’éclairer les choix des auteurs hippocratiques, motivés par leur quête de rigueur scientifique et d’efficacité thérapeutique.
The authors of the Hippocratic corpus give very few informations about the pharmaceutical substances they use. For what reasons do they occasionnaly apply a geographical epithet to some of them ? Ethiopian cumin (Trachyspermum copticum Link = Ammi copticum L.) and Cnidian berry (Daphné gnidium L.) are two interesting cases because they refer to two distinct poles, very far from each other. The way these two plants are used helps enlighten medical choices : it appears that Hippocratic physicians never cease to look for thoroughness in writing recipes and effectiveness in making a drug.
Entrées d’index
Mots-clés : Épithètes géographiques, exotisme, expertise médicale, pharmacopée
Keywords : Geographical epithets, exotism, medical expertise, pharmacopoeia
Texte intégral
1Dans l’abondante pharmacopée hippocratique, les substances employées dessinent comme une carte des produits pharmaceutiques remarquables. Elles proviennent du monde méditerranéen, comme le dictame et la mercuriale, ou de terres plus lointaines, comme la myrrhe et l’encens. Pour la plupart d’entre elles, l’origine géographique n’est pas indiquée, comme si elle était connue des lecteurs ou jugée sans importance. Seules quelques substances voient leur origine précisée par l’emploi d’une épithète géographique.
2Cette disproportion peut s’expliquer par des choix linguistiques : les auteurs grecs, dans la mesure du possible, s’approprient un nom de plante étranger en l’hellénisant ou en le transcrivant. Certains noms, hellénisés, désignent des substances bien connues et intégrées depuis longtemps à la vie courante grâce aux échanges commerciaux1, tandis que d’autres, transcrits, conservent dans leur sonorité une tonalité étrangère qui dispense d’indiquer leur provenance lointaine2.
3Il est donc logique que le lieu d’origine d’une substance soit rarement mentionné. En revanche, il est plus délicat d’identifier les critères qui ont motivé sa mention : pourquoi les auteurs hippocratiques ont-ils pris soin d’attribuer une épithète géographique à seulement quelques substances ?
4Les emplois de deux d’entre elles, le grain de Cnide et le cumin d’Éthiopie, sont significatifs à cet égard. Ces deux substances semblent comme aux antipodes : la première renvoie à la cité de Cnide, célèbre pourvoyeuse de médecins professionnels dans le monde grec antique, et la seconde à une contrée lointaine située au sud de l’Égypte, l’Éthiopie. Pourtant toutes les deux ont en commun d’une part d’être fréquemment citées3, d’autre part d’être qualifiées par une épithète géographique, phénomène qui n’est pas si fréquent pour un médicament de la Collection hippocratique.
5Cette façon de les distinguer implique probablement un choix de la part des auteurs médicaux, et c’est à ce choix que nous allons nous intéresser.
I. Exotisme et quotidien
6Il convient d’abord d’insister sur l’exotisme4 relatif de certaines substances. Des produits d’origine lointaine étaient utilisés au quotidien dans la parfumerie, la tannerie, la teinture et la médecine. Ainsi, dans certains traités hippocratiques, les points de comparaison ne sont pas toujours grecs. En témoigne le passage suivant, situé dans une série de six recettes (une fumigation et cinq applications) contre la stérilité :
Ou un petit bulbe – on le voit dans les blés, surtout en Égypte, il est âcre, semblable au cumin d’Éthiopie ; appliquez ensemble cet ingrédient, ail, nitre5.
7Dans le même chapitre, pour indiquer la taille d’un amalgame à appliquer contre l’orifice utérin, il est fait référence à la fève d’Égypte6 :
Faire bouillir du miel et le remuer avec une branche de pin ; en appliquer la valeur d’une fève d’Égypte (ὅσον Αἰγύπτιον κύαμον προστιθέναι)7.
8Comme l’auteur aurait pu se référer simplement à la fève8, l’indication géographique semble indiquer ici à peu de frais que l’amalgame doit être plus gros9 qu’une fève grecque. Les auteurs médicaux vivaient dans un monde où certaines substances venues de loin, telles que l’encens et la myrrhe10, étaient devenues familières à leurs contemporains, et pas seulement à leurs collègues. La fève d’Égypte, notamment, était connue au moins depuis Hérodote11. Un auteur pouvait ainsi éprouver le besoin de signaler que sa fève de référence était grecque12 :
Le suc de silphium est un remède très puissant quand on en prend en potion dans de l’eau la valeur d’une fève grecque (ὅσον κύαμος Ἑλληνικός)13.
9Le dosage étant déterminant dans la prescription d’un remède fort, l’épithète géographique serait ici destiné à lever toute ambiguïté et à satisfaire ainsi des exigences de rigueur.
10Cependant, la série de recettes du c. 181 de Maladies des femmes II, parce qu’elle concentre épithètes géographiques et incises explicatives14, a de quoi laisser perplexe. Dans quelle mesure ces épithètes ne sont-elles pas liées au goût du détail qui semble animer certains auteurs hippocratiques ? Relèvent-elles d’une recherche artificielle d’ingrédients rares et coûteux destinés à impressionner la patiente et son entourage15 ? D’un contexte culturel qui confèrerait une valeur supplémentaire à certains ingrédients16 ? D’un étalage de connaissances destiné à renforcer la crédibilité de l’auteur ? Ou encore de la volonté de diffuser un savoir technique de qualité ?
II. Appellation d’origine non contrôlée
11Car pour la détermination des produits, les informations qui circulent sont sujettes à caution, tant les routes du commerce ont brouillé les pistes et engendré de confusions. Théophraste rapporte ainsi une divergence sur l’origine de la cardamome et de l’amome, que certains estiment venir de l’Inde et d’autres de la Médie17. Les auteurs hippocratiques n’échappent pas à ce genre de divergences. L’un d’eux tient à s’expliquer sur l’origine du poivre :
Autre application : trente grains (κόκκους), que vous aurez décortiqués ; le produit indien (τὸ Ἰνδικόν) que les Perses (οἱ Πέρσαι) appellent poivre (πέπερι) – et dans celui-ci, il y en a un rond (στρογγύλον) qu’ils appellent myrtidanon (μυρτίδανον) –, à broyer ensemble dans du lait maternel et à délayer dans du miel18.
12Le passage a des allures de mise au point au sein même de la Collection hippocratique : poivre et grain rond désignent le même ingrédient et ce médicament n’est pas d’origine médique (c’est-à-dire perse), mais indienne. Or justement deux versions parallèles de la recette prétendaient le contraire en mentionnant « le médicament médique pour les yeux, qui est appelé poivre (Mηδικοῦ φαρμάκου τοῦ τῶν ὀφθαλμῶν ὃ καλεῖται πέπερι) ».19
13La divergence sur l’origine du poivre, comme sur celle de la cardamome et de l’amome, s’explique par l’existence de deux itinéraires possibles : une voie maritime, qui partait des ports des rivages de l’Inde ; une voie terrestre, comme une « route du Nord », qui passait par le plateau iranien et la Médie20.
14L’épithète géographique ne renvoie donc pas forcément au lieu de naissance de la plante.
15Il arrive en outre qu’elle ne renvoie pas non plus aux routes commerciales, mais à leurs utilisateurs. C’est le cas de l’emblématique grain de Cnide. Cette baie écarlate, fruit du garou ou daphné sainbois, Daphné gnidium L., croît sur tout le pourtour méditerranéen21 et se rencontre donc ailleurs que sur la péninsule de Cnide. Rufus d’Éphèse précise que la Carie, située juste derrière la côte ionienne et Cnide, en donne une excellente variété. Il nous apprend que l’expression « grain de Cnide » résulte de l’usage privilégié et abondant qu’en ont fait les Asclépiades de Cnide22.
16Enfin, la présence des épithètes géographiques – ou leur absence – est étroitement liée aux aléas de la tradition manuscrite. D’un texte à l’autre, la sorte de cumin peut changer, comme le révèle la confrontation des témoins d’une même recette :
Mul.I 75 c.123 : Si une femme ayant déjà enfanté ne le peut plus : nitre, résine, myrrhe, cumin d’Éthiopie (Αἰθιοπικὸν MVb : om. θ)24 et parfum, à broyer d’un seul coup et à appliquer.
= Mul.I c. 1325 : ou nitre avec myrrhe, résine, cumin et parfum blanc.
17La première version de la recette ouvre un catalogue dont les recettes respectent des normes de rédaction : affichage de l’objectif thérapeutique, liste des ingrédients, mode de préparation et mode d’administration. L’un des témoins, θ, omet l’épithète géographique qui se rapporte au cumin. La seconde version apparaît dans une prescription contre l’altération de l’orifice utérin entraînant une stérilité ; en deuxième position dans une série d’applications possibles, elle se présente comme une variation de la recette qui la précède (composée de nitre rouge, cumin et résine) et dont elle reprend implicitement le mode d’administration (dans un linge, en application).
18Comme l’objectif thérapeutique est le même dans les deux passages – favoriser la conception –, et comme une omission s’est produite dans la tradition directe du premier, on ne peut écarter l’hypothèse d’une omission dans le second, dont le style est plutôt expéditif. Il convient néanmoins de vérifier si d’autres paramètres, tels que la préparation et le mode d’administration, n’entrent pas en ligne de compte dans cette opposition entre cumin et cumin d’Éthiopie.
19Car l’hésitation entre les deux produits réapparaît dans un autre cas d’application, dont il existe cinq versions.
III. Choisir son cumin
III.1. D’un cumin à l’autre
20Dans les traités gynécologiques hippocratiques se lisent parfois plusieurs versions d’une même recette dont certaines sont si proches les unes des autres que l’on peut parler de « rédactions parallèles ». Il existe ainsi cinq versions d’une recette que nous appellerons « l’application au narcisse » : deux versions longues, qui sont des rédactions parallèles, et trois versions brèves, parallèles entre elles :
Mul.I 84.126 : Purgatif émollient ; attire l’eau, les peaux et l’ichor sanguinolent, provoque les règles si elles n’ont pas un long retard, et amollit l’orifice : parfum au narcisse, cumin qui se mange (κύμινον ὃ ἐσθίεται), myrrhe, encens, absinthe, sel de Chypre (Κύπριον ἅλας θ Κύπριον MVb), onguent aux roses, farine ; une égale quantité de chacun des ingrédients, sauf pour le parfum au narcisse, quatre parts…
Nat.Mul. 109.2727 : Purgatif émollient ; attire l’eau, les peaux et l’ichor sanguinolent, provoque les règles si elles n’ont pas un long retard, et amollit l’orifice : parfum au narcisse, cumin que nous mangeons (κύμινον ὃ ἐσθίομεν), myrrhe, encens, absinthe, sel de Chypre (Κύπριον ἅλα Va κυπαρίσσον, ἅλας IRHb)28 et onguent aux roses ; un conge de chacun des ingrédients, sauf pour le parfum au narcisse, quatre parts…
Cf. Mul.I 74.329 : Émollients par lesquels sont purgés eau et sable ; amènent les règles, si elles n’ont pas un long retard, et amollissent l’orifice : narcisse, cumin, myrrhe, encens, absinthe, souchet (κύπαιρον θ κύπερον MVb), une égale quantité de chaque mais de narcisse, quatre parts…
= Mul.II 205.730 : Amène hors de l’utérus, amollit l’orifice : narcisse, cumin, myrrhe, encens, absinthe, souchet (κύπαιρος Μ κύπαιρον θ κύπερον Vb)…
= Nat.Mul. 32.9531 : Autres remèdes, émollients, qui purgent de l’eau et du sang, attirent les règles si elles n’ont pas un long retard, et amollissent l’orifice : huile de narcisse, cumin d’Éthiopie (κύμινον Αἰθιοπικόν), encens, absinthe et souchet (κύπαιρον θΜ κύπερον Va) – une égale quantité de chacun de ces derniers, mais quatre parts d’huile de narcisse…
21Les deux premières versions ont la particularité de préciser la sorte de cumin à utiliser. Or elles en soulignent non pas l’aspect exceptionnel, mais la banalité ; elles recommandent le cumin employé d’ordinaire en cuisine et très fréquent en médecine32.
22Le texte a-t-il souffert de la tradition manuscrite ? Car les leçons ὃ ἐσθίεται (Mul.I 84), ὃ ἐσθίομεν (Nat.Mul. 109) et Αἰθιοπικόν (Nat.Mul. 32) se ressemblent : une confusion des rondes Ο/ϵ ou une faute αι/ε pourraient avoir entraîné une série d’innovations dans l’une ou l’autre des versions. En outre, l’emploi du verbe ἐσθίω en incise reste exceptionnel dans la Collection hippocratique, la pharmacopée ne mentionnant aucun autre ingrédient « de cuisine »33. On peut également s’interroger sur l’ingrédient qui suit l’absinthe dans la liste : les deux versions longues mentionnent le sel de Chypre, Κύπριον ἅλα(ς), et les trois versions brèves le souchet (κύπαιρον). Or les formes κύπαιρον et Κύπριον, très proches, peuvent résulter de la mélecture de l’une ou l’autre34.
23Dans l’hypothèse où le texte des deux premières versions serait sans erreur, il faut comprendre que la précision portant sur la sorte de cumin a paru nécessaire à l’auteur de la recette. Le lecteur, sans cette précision, aurait-il utilisé du cumin d’Éthiopie ? L’ingrédient, suffisamment connu, nous l’avons vu, pour servir de point de comparaison, n’est pourtant jamais désigné sans son épithète géographique. S’agissait-il d’en détourner explicitement le lecteur ? La précision renverrait ainsi en creux au cumin d’Éthiopie : s’il s’agit de cumin de table, c’est qu’il ne s’agit surtout pas de cumin d’Éthiopie. Or si l’auteur avait souhaité interdire l’emploi du cumin d’Éthiopie dans la recette, de quel autre moyen disposait-il pour l’écrire ? Galien, à l’époque romaine, choisira la formule « le cumin de chez nous » (κύμινόν τε τὸ παρ’ ἡμῖν)35.
24Trois questions s’imposent alors : le cumin est-il perçu comme un ingrédient de cuisine par définition ? Se distingue-t-il radicalement du cumin d’Éthiopie ? Que changerait l’emploi de ce dernier dans la recette ?
III.2. Le cumin de cuisine
25Dans la Collection hippocratique, le cumin est bel et bien considéré comme un ingrédient de cuisine. C’est un condiment courant que les médecins recommandent en régime, comme l’illustre parfaitement le passage suivant :
Quand vous voulez dessécher le corps, donner du pain, ainsi que des plats (ὄψα) rôtis et secs, et plutôt chauds ; pour les viandes, tous les morceaux charnus, pour les poissons, ceux de roche ; en légumes verts, la rue, le thym ou l’origan ; quand au vin, du noir, astringent. Préparer les plats (τὰ ὄψα) avec sel et cumin (ἁλσὶ καὶ κυμίνῳ) et utiliser le moins possible les autres condiments (τοῖς ἄλλοις ἀρτύμασιν)36.
26Il s’utilise en assaisonnement, au même titre que le sel et l’huile37, et se range parmi les aromates38. Il est ainsi ajouté dans un plat de fèves destiné à déranger le ventre39, ou dans des potages : pour chasser les douleurs de poitrine40 et les douleurs utérines41, ou pour favoriser les purgations gynécologiques42. Il peut même remplacer le miel pour la confection de pastilles à sucer43. Ces emplois expliquent que le cumin n’apparaisse souvent qu’à la fin d’une liste d’ingrédients, comme un plus.
27Du point de vue des associations, le cumin d’Éthiopie se range, lui, dans une catégorie d’ingrédients dont l’odeur est plus prononcée, comme la graine de fenouil et la coriandre44. Il fait partie des « arômates à brûler » (θυμιήματα)45, ces substances qui dégagent un parfum en brûlant et sont utilisées dans les sacrifices.
28Dans ces conditions, pour la version longue de la recette au narcisse, un auteur a pu considérer que la présence de cumin d’Éthiopie était incongrue : il risquait d’estomper l’odeur du parfum de base et d’en réduire les effets.
29D’autre part, certains usages thérapeutiques de la Collection pourraient venir justifier une préférence pour le cumin commun, qui, s’il répond souvent aux mêmes objectifs que le cumin d’Éthiopie, n’en connaît que rarement les mêmes modalités d’administration. Outre son emploi en régime et en électuaire, le cumin est principalement prescrit en usage externe46, tandis que le cumin dit d’Éthiopie l’est en potion47. Si la présence de cumin a paru incongrue à l’un des transmetteurs de la version longue, alors, la subordonnée relative, qui insiste de façon exceptionnelle sur le fait qu’il s’agit de cumin de cuisine, serait une mise au point explicite sur la composition de la recette, tout comme l’incise qui précise ailleurs l’origine du poivre. Mais il s’agirait cette fois d’un choix thérapeutique réfléchi.
III.3. Le cumin dit d’Éthiopie
30Le cumin d’Éthiopie a été confondu à tort avec la nigelle, μελάνθιον48, probablement parce que cette dernière est appelée encore aujourd’hui « cumin noir »49. Pourtant, les auteurs hippocratiques, eux, ne confondaient pas la nigelle avec le cumin, comme l’attestent plusieurs passages ou les deux ingrédients apparaissent dans une même énumération50. La nigelle apparaît plutôt comme un succédané du cumin d’Éthiopie51, lequel serait identifiable à l’ajouan ou ammi d’Égypte52, Trachyspermum copticum Link = Ammi copticum L., si l’on en croit Dioscoride :
Certains l’appellent lui aussi cumin d’Éthiopie, d’autres cumin royal (βασιλικόν) ; certains ont dit que le cumin d’Éthiopie et l’ammi étaient de nature différente. Sa petite graine (τὸ σπερμάτιον) est bien connue ; elle est bien plus petite que celle du cumin ; elle a le goût de celle de l’origan.53
31La graine du cumin d’Éthiopie ressemblait donc à celle du cumin commun, en plus petit. En raison de son arome particulier et prononcé, le cumin d’Éthiopie n’était pas utilisé dans la cuisine grecque comme il l’était dans la cuisine éthiopienne ; les médecins l’utilisaient plus volontiers en potion. La distinction n’est pas sans rappeler l’usage de la fleur d’oranger, encore aujourd’hui, en France et en Espagne : utilisée comme arome en pâtisserie et vendue dans les rayons d’alimentation en France, la fleur d’oranger ne s’emploie qu’en remède et se vend essentiellement dans les pharmacies en Espagne.
32À cette distinction culturelle, s’ajoute une notion de degré aux yeux des médecins hippocratiques. Le cumin d’Éthiopie semble plus puissant que le cumin commun, peut-être en raison de sa forte odeur ou de sa provenance connotée. Car la terre d’Éthiopie étant située plus au sud que l’Égypte, les ingrédients qui en proviennent sont censés être plus chauds et plus échauffants.
33Le cas du cumin met finalement en évidence deux raisons qui ont pu inciter les auteurs hippocratiques à employer une épithète géographique :
- manifester l’ampleur de leurs connaissances, qui ne sauraient se limiter aux plantes indigènes ;
- éviter les confusions : le cumin d’Éthiopie, malgré son apparence, est distinct du cumin commun et requiert une préparation spécifique.
34Ces choix se retrouvent dans la désignation d’un fruit à coque, la noix. La noix commune, dépourvue de qualificatif, sert d’unité de mesure54 ou fait partie de l’alimentation courante55. Mais il existe dans la Collection hippocratique deux autres sortes de noix : une noix de Thasos, qui s’administre en potion56, et une noix du Pont, qui s’administre en application interne57.
IV. Choisir le grain de Cnide
IV.1. « Grain » et « grain de Cnide »
35Pour le grain de Cnide, la tradition manuscrite semble moins problématique58, sans doute en raison de l’aspect facultatif de l’épithète Κνίδιος. Le nom κόκκος suffit en effet à désigner le grain de Cnide ; pour toutes les autres sortes de grain, le nom κόκκος est systématiquement accompagné d’un complément du nom au génitif59, plus rarement d’une épithète60. Les emplois avec ou sans épithète pour désigner le grain de Cnide se répartissent comme suit dans la Collection hippocratique :
κόκκος Κνίδιος : Affections internes (19 occurrences), Fistules (1), Nature de la femme (1), Maladies des femmes I (3)61, Maladies des femmes II (1)62
κόκκος : Maladies II (1), Nature de la femme (5), Maladies des femmes I (7), Maladies des femmes II (6).
36Les emplois sont moins dispersés qu’il n’y paraît. Toutes les occurrences soulignées décrivent en fait une même recette ou y renvoient : un remède purgatif à utiliser en lavement. En voici la version transmise par le traité des Fistules :
Il faut donc traiter de la manière suivante : donner un bain de siège chaud et, après avoir broyé soixante grains du grain de Cnide (τοῦ κόκκου τοῦ Κνιδίου ἑξήκοντα κόκκους), les délayer dans une cotyle de vin et une demi-cotyle d’huile ; après avoir fait chauffer, utilisez en lavement. Cette préparation amène le phlegme et les excréments63.
37Ce lavement est destiné à traiter une inflammation du rectum provoquée par un excès de phlegme. Le grain de Cnide, considéré comme un puissant échauffant, a dû sembler idéal pour évacuer le phlegme, qui est une humeur froide. La recette est remarquable à plus d’un titre : par le statut du grain de Cnide, ingrédient unique, par la façon exceptionnelle dont il est désigné64, par le dosage précis et élevé (une soixantaine de grains), et par son rayonnement. Il s’agit en effet d’un remède de référence, utilisable dans d’autres circonstances pathologiques. Quatre passages des traités gynécologiques65 en fournissent eux-mêmes une version, avec usage de l’épithète et dosage identique ; seul l’excipient varie, le vin étant remplacé par de l’eau. Il existe en outre trois références à ce remède : avec épithète dans Maladies des femmes II66 et sans épithète dans Maladies II et Maladies des femmes I67.
38Toutes les autres mentions du grain de Cnide se répartissent nettement entre Affections internes, avec épithète (19), et les traités gynécologiques, sans épithète (16 occurrrences, pour 10 recettes différentes, puisqu’il existe des rédactions parallèles).
39L’emploi du grain de Cnide a déjà été expliqué par les niveaux d’écriture et la référence à une école médicale appelée, à tort ou à raison, « école de Cnide »68. La présence de l’épithète Κνίδιος permet-elle d’affiner cette analyse ? L’épithète est-elle tombée en désuétude ou a-t-elle été ajoutée par les médecins d’autres écoles ou d’autres époques ? Est-elle révélatrice du lieu de formation du médecin qui l’emploie, ou de son lieu d’exercice ?
40En tout cas, il n’y a pas de substantivation avérée avec τὸ Kνίδιον pour le grain69 comme il y en a pour le parfum d’Égypte (τὸ Αἰγύπτιον) par exemple. L’attention s’est focalisée sur le grain, soit que les utilisateurs aient su que l’appellation « Cnidien » était imputable à un usage médical et donc non spécifique au produit, soit que le grain de Cnide soit devenu « le grain » par excellence : caractéristique par sa couleur et par sa taille, particulièrement efficace pour purger.
41Car le grain de Cnide, fruit du garou ou daphné sainbois, Daphné gnidium L., est une baie dont la couleur écarlate, caractéristique, prête peu à confusion, contrairement au cumin d’Éthiopie. Son usage n’est pas non plus limité aux lavements ni aux applications70, puisque le grain de Cnide peut se prendre en potion71 ou en pilule (κατάποτον)72. En revanche, il s’inscrit dans des alternatives et des énumérations pharmaceutiques dont la logique est problématique.
IV.2. Logiques de substitution
42En dépit de sa renommée et d’un usage répandu, il arrive que le grain de Cnide vienne à manquer :
Si les matières qui sortent sous l’effet du lavement sont d’aspect phlegmatique, faire un nouveau lavement, après avoir attendu trois ou quatre jours : on aura décortiqué deux coupelles du grain (de Cnide) ; s’il n’y a pas de grain à proximité (ἢν δὲ μὴ παρῇ κόκκος), une seule coupelle de la racine de la thapsie73.
43Son absence peut dépendre de la saison, l’inflorescence de la plante s’étalant de mars à octobre. Cependant le grain devait probablement être séché à des fins de conservation74. L’auteur proposant un succédané, on peut tout au plus supposer que la thapsie est moins efficace contre le phlegme, tout en restant une substance forte, puisqu’elle est deux fois moins dosée75. La thapsie est notamment prescrite en toute petite quantité contre la toux des enfants76. Pourtant, il arrive également que dans le jeu des substitutions le dosage reste identique et la thapsie mentionnée avant le grain de Cnide :
Lavement ; amène le phlegme : une coupelle de thapsie, ou du raisin sec, la valeur de quarante grains, ou une coupelle (de grain) de Cnide (ἢ Κνιδίου πόσιν)77, ou du cnestron78…
44Cette énumération vient-elle contredire le statut privilégié du grain de Cnide ? Est-elle aléatoire ou suit-elle une logique thérapeutique ? La question se pose avec force dans le traité des Affections internes. En cas de choix d’une substance pharmaceutique, le grain de Cnide n’est employé qu’en deuxième ou troisième ressort dans plusieurs passages79. Dans un cas de phtisie, l’auteur propose d’utiliser d’abord une plante dénommée hippophée80 :
Chez ce malade, lorsqu’il est dans cet état, purger la tête avec le suc d’hippophée ou le grain de Cnide (τῷ ἱππόφεω ὀπῷ ἢ τῷ Κνιδίῳ κόκκῳ), après avoir donné un bain de vapeur complet pour le corps81.
45L’auteur va même jusqu’à proposer trois ingrédients au choix, cnéôron, hippophée ou grain de Cnide, comme dans l’extrait suivant82 :
Lui donner en potion cnéôron ou suc d’hippophée ou grain de Cnide (κνέωρον ἢ ἱππόφεω ὀπὸν ἢ κόκκον Κνίδιον)83.
46La préférence de l’auteur, selon les cas, va directement à l’hippophée, identifiable à l’euphorbe buisson épineux84, ou au cnéôron, identifiable à la passerine85. Ces deux plantes ont en commun d’être très présentes à Athènes. De plus, l’euphorbe buisson épineux ne se rencontre dans aucun autre traité hippocratique conservé, et l’emploi de la passerine, dans la Collection, se limite à Affections internes et aux traités gynécologiques. Faut-il en déduire que l’auteur privilégie les plantes les plus accessibles ? Ou bien qu’il provient d’une école médicale qui ne donnait pas la préférence au grain de Cnide ? Aucune de ces déductions n’est recevable, puisque l’auteur utilise ailleurs le grain de Cnide comme unique purgatif, sans proposer d’alternative86. C’est même, vu la répartition des occurrences dans la Collection hippocratique, l’un de ses ingrédients de prédilection. Ce choix est en réalité étroitement lié à la notion de dosage, comme l’auteur lui-même prend l’heureuse initiative de l’expliquer au détour d’une prescription dans un cas d’hydropisie :
À ce malade, lorsqu’il est dans cet état, donner du cnéôron ou le suc d’hippophée ou le grain de Cnide (ἢ τὸν Kνίδιον κόκκον) ; ces médicaments (ταῦτα δὲ τὰ φάρμακα), il faut les donner de la façon suivante : le cnéôron tous les six jours, le suc d’hippophée tous les huit jours, et le grain de Cnide (τὸν δὲ Κνίδιον κόκκον) tous les dix jours. Il faut les donner jusqu’à ce que le malade soit complètement purgé et détendu (λαπαρός)87.
47La force du médicament est proportionnelle à l’espacement des prises : plus l’intervalle est grand entre deux prises, plus le médicament est puissant. Ainsi, l’énumération obéit à une logique de gradation, le grain de Cnide étant particulièrement puissant, grain purgatif par excellence.
48Ce principe de gradation se retrouve dans d’autres énumérations de médicaments :
Ce malade, lorsqu’il est dans cet état, lui faire prendre en potion élatérium (ἐλατήριον) ou racine de thapsie (θαψίης ῥίζαν) ou ellébore (ἐλλέβορον) ou suc de scammonée (ὀπὸν σκαμωνίης)88.
49Or le passage fait écho à un enchaînement de recettes pour lavement dont la gradation n’est pas explicitée. Ces recettes gynécologiques se caractérisent par l’ingrédient cité en premier dans la composition pharmaceutique :
élatérium Nat.Mul. 33.19 = Mul.I 78b.1589
thapsie Nat.Mul. 33.22 = Mul.I 78b.17 = Mul.I 78b.44
ellébore. Nat.Mul. 33.23 = Mul.I 78b.18 = Mul.I 78b.45
scammonée Nat.Mul. 33.28
50Par conséquent, dans le lavement gynécologique qui mentionnait la thapsie avant le grain de Cnide, l’énumération des substances à choisir – thapsie, raisin sec, grain de Cnide ou cnestron–, relèverait de la même logique, et non pas d’une situation de pénurie nécessitant de remplacer le grain de Cnide par la thapsie. Le dernier ingrédient, le cnestron, occupe dans un catalogue une place qui lui confère le statut d’un puissant médicament90. La gradation cneôron-grain de Cnide expliquée par l’auteur d’Affections internes se retrouve également dans ces chapitres91.
51Si quelques catalogues signalent bien une augmentation de la force des remèdes dans une série de recettes92, les énumérations de substances laissées au choix du praticien dans une même recette sont rarement justifiées. Or notre enquête permet d’avancer que ces énumérations hiérarchisent les ingrédients du moins fort au plus fort, tandis que l’alternative entre deux ingrédients suit une logique inverse : inscrite dans une démarche de remplacement où se sous-entend une formule du type « s’il n’y en a pas », elle va du plus fort au moins fort. Un extrait de la longue partie thérapeutique d’un exposé gynécologique permet de s’en assurer :
Après quoi, faire un lavement de l’utérus, si elle est d’un tempérament phlegmatique, avec la solution au grain de Cnide (τῷ κόκκῳ τῷ Kνιδίῳ) ou celle à la racine de thapsie (ἢ τῇ ῥίζῃ τῆς θαψίης) mais si elle est bilieuse, avec celle au suc de scammonée (τῆς σκαμμωνίης τῷ ὀπῷ) ou à la coloquinte sauvage (κολοκυνθίδι τῇ ἀγρίῃ) ; après avoir broyé et répandu deux cotyles d’eau, mettre à bouillir jusqu’à réduction de moitié. Mélanger avec cette réduction miel et huile de narcisse (ἔλαιον ναρκίσσινον) ou de lis (ἄνθινον)93.
52On notera d’emblée que la thapsie n’est plus citée au début d’une série de possibilités comme dans l’extrait précédent, mais en seconde position. La première alternative, grain de Cnide ou racine de thapsie, qui renvoie en fait à deux recettes phares94, repose sur l’éventualité d’une absence de grain de Cnide, ici implicite, mais explicitée plus loin dans le traité95. Il en va de même pour la troisième, puisqu’un passage atteste que l’huile de lis peut pallier l’absence d’huile de narcisse96. Pour la seconde alternative, il n’existe pas de discours explicite sur la coloquinte sauvage comme succédané du suc de scammonée au sein de la Collection hippocratique97. Néanmoins, le remède à la scammonée contre la bile apparaît ailleurs comme un remède de référence de même importance que celui au grain de Cnide contre le phlegme98.
53Il y a donc au moins deux logiques de substitution dans la sélection des substances pharmaceutiques : la recherche de produits de plus en plus forts d’une part, probablement pour traiter les affections résistantes, et la nécessité de trouver des succédanés d’autre part, moins efficaces ou moins forts, mais probablement plus accessibles en fonction des saisons, du commerce99 ou des régions. Les deux logiques sont à l’œuvre dans Maladies des femmes I et II et leur répartition dans les chapitres pourraient ouvrir de nouvelles pistes pour la délimitation des niveaux d’écriture.
54Par conséquent, le choix du grain de Cnide répond à une recherche d’efficacité – donner le médicament le plus puissant si nécessaire – et l’emploi de l’épithète Κνίδιος, irrégulier, coïncide avec des emplois identifiables : d’une part avec les choix thérapeutiques très particuliers de l’auteur d’Affections internes et, d’autre part, avec la description ou la mention d’une recette phare de lavement dans les traités rattachés à l’école dite de Cnide, comme s’il avait fallu conserver une dénomination précise qui permît à la recette de traverser intacte les époques et les contrées. La présence de l’épithète, dans les deux cas, aurait été délibérée – conservée ou rajoutée – pour viser un public qui sortait du cercle professionnel initial. Enfin, c’est par ses succédanés que le grain de Cnide, dans Affections internes, conduit à s’interroger sur les lieux où exerce le médecin.
V. Le sel de la vie
55La façon dont l’auteur d’Affections internes semble puiser dans son environnement proche, peut-être les collines d’Athènes, pour trouver des purgatifs moins forts que le grain de Cnide, incite à s’intéresser à l’influence du milieu sur le choix des médicaments. Cnide et Cos sont bien identifiées comme des sites pourvoyeurs de médecins. Ces professionnels, en fonction de leur lieu de formation, développaient probablement des préférences pour telle ou telle substance pharmaceutique et se voyaient parfois contraints de compléter leur pharmacopée par des plantes locales qui leur permettaient de s’adapter à leur nouveau lieu d’exercice. Par exemple, le tribule marin, τρίβολος παραθάλασσιος, Trapa natans L., Mâcre nageante ou Châtaigne d’eau, caractérise une formule pharmaceutique aux cantharides100 ; plante aquatique, elle n’était probablement pas accessible dans toutes les régions. Certaines épithètes géographiques ne nous renseigneraient-elles pas plutôt sur le lieu d’exercice des auteurs hippocratiques, sur le lieu où ils écrivent ?
56Les emplois du sel, plus que d’autres, pourraient nous éclairer. En effet, dès l’Antiquité, les lieux de production d’un sel de qualité101 étaient nombreux et éloignés les uns des autres102. Lorsqu’un auteur donne sa préférence à un type de sel, on peut donc espérer qu’il choisit, parmi les nombreux sels de qualité supérieure, celui qu’il se procure le plus facilement. Or les traités gynécologiques sont les seuls à exiger un type de sel en précisant son origine géographique : sel de Chypre103, sel d’Égypte104 et sel de Thèbes105. Ce dernier doit probablement son épithète à un pôle commercial puisqu’ il existait une route du sel transsaharienne partant de Thèbes106, ville d’Égypte. Mais pourquoi du sel de Chypre ? Certes, il est tentant d’expliquer ce choix par sa connotation avec la naissance d’Aphrodite, mais dans ce cas, pourquoi l’auteur d’un remède explicitement affiché comme destiné à faire concevoir ne l’aurait-il pas lui aussi préféré au sel d’Égypte107 ? Bien sûr, le sel des marais salants était particulièrement apprécié pour sa blancheur, et donc d’excellente qualité108. Mais le paramètre géographique n’est pas négligeable non plus, car le trajet maritime vers Cos ou Cnide est nettement plus court à partir de Chypre qu’à partir de la côte égyptienne. Les praticiens qui recommandaient le sel de Chypre exerçaient donc probablement sur la côte ionienne.
VI. Efficacité et qualité
57Quel que soit le lieu de la conception des recettes, le souci d’efficacité est communément partagé par les auteurs hippocratiques. Certains remèdes isolés et contenant des substances rares, par exemple, semblent avoir été insérés comme de précieux renseignements à conserver à tout prix :
Si une jeune fille souffre de lithiase, donner la feuille et la racine d’Éthiopie en égale proportion, en les donnant pendant dix jours dans du vin vieux, et en donnant le reste, que vous filtrez, pendant vingt jours avec de l'eau109 ;
58La lithiase est déjà en soi une affection délicate pouvant nécessiter une intervention chirurgicale110. Le remède qui permettrait de l’éviter vient d’Éthiopie : soit il a été transmis par des médecins étrangers qui le connaissaient, soit un médecin grec a tenté d’utiliser une nouvelle plante étrangère dans une situation extrême.
59Dans d’autres recettes, la provenance géographique vient rehausser les substances les plus communes, minérales ou animales, telles que la spode et le miel. La spode de Chypre (σποδὸς Kυπρίη) permet de produire un emplâtre particulièrement énergique111 et le miel d’Attique est recommandé par l’auteur d’Affections internes :
Ajouter à ces ingrédients une cotyle de miel attique (μέλιτος Ἀττικοῦ) si vous ne voulez pas faire cuire le miel avec ; s’il n’y en a pas qui vient d’Attique (ἢν δὲ μὴ ἔχῃς Ἀττικόν), du très beau (τοῦ καλλίστου), une cotyle…112
60L’adjectif κάλλιστος, « très beau », indique la recherche d’un miel de qualité supérieure et vaut pour d’autres ingrédients, tels que le cérat, l’huile d’iris ou l’encens113. Pour ce dernier cependant, l’adjectif est bien vague, comparé aux précisions possibles : encens mâle114, encens en grain115, encens translucide116. Il n’est d’ailleurs jamais employé pour la myrrhe (σμύρνα), alors que les médecins sont particulièrement regardants sur la qualité et l’aspect de cet ingrédient : myrrhe sans additif (ἄκρητος), myrrhe pure (καθαρή), myrre en pâte (ἀπαλή), myrrhe très grasse (πιοτάτη), myrrhe première (πρώτη), myrrhe en gouttes (στακτή). Or le contexte comporte souvent un objectif thérapeutique qui justifie l’exigence du médecin : la myrrhe sans additif est recommandée en pilule117, la myrrhe en pâte doit pouvoir être étirée afin de confectionner un ovule pharmaceutique118, la myrrhe très grasse éviter à un amalgame de devenir collant119, et la myrrhe en gouttes être associée à un mélange qui sera fondu120. Cette dernière exigence répond en outre à une recherche de qualité, parce que la myrrhe en gouttes est la forme la plus pure qui soit de la myrrhe121 et que le mélange est appliqué avec une très belle touffe de laine de Milet, la laine de Milet étant elle-même l’une des plus réputées dans l’Antiquité. La qualité d’un produit, loin d’être une simple connotation de sophistication et de luxe, conditionne réellement l’efficacité d’un remède et s’inscrit dans une logique thérapeutique.
VII. Conclusion
61En conclusion, l’étude des usages thérapeutiques du cumin d’Éthiopie et du grain de Cnide mène à plusieurs explications sur la présence des épithètes géographiques dans la pharmacopée hippocratique. Ce mode de qualification permet aux auteurs d’attester à la fois d’une vaste connaissance des plantes des autres et d’un souci de précision dans la désignation des ingrédients, véritables gages de professionalisme. Il rend compte en outre d’une quête incessante d’efficacité et d’efforts constants pour s’adapter au milieu d’exercice.
62Les épithètes géographiques pouvaient certes contribuer à impressionner les patients, par leur connotation exotique ou luxueuse, mais il convient de relativiser le prestige des ingrédients lointains. Il ne saurait être question non plus de négliger la dimension culturelle et religieuse de certains choix qui a été bien démontrée pour les traités gynécologiques. Mais on ne saurait non plus sous-estimer la démarche médicale des auteurs hippocratiques et les choix techniques qu’elle implique. Leur recherche de la qualité les a poussés à s’intéresser aux plantes des autres. Les connaître et savoir les utiliser, c’était avant tout faire preuve de curiosité scientifique et d’expertise médicale.
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Ouvrages à caractère de source
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10.1163/ej.9789004171541.i-366 :Notes de bas de page
1 D’après Faure 1987, p. 290-301, les sept aromates les plus employés dans l’Antiquité sont les suivants: baccar, cannelle (4 espèces: casse, cinnamome, malobathre, serichatum), ladanum (oléo-résine de divers cistes), myrrhe en gouttes, safran, styrax. Sur la présence quotidienne de produits exotiques, voir par exemple Salle 2012, p. 55-61.
2 À part le nitre, λίτρον ou νίτρον, et la gomme, κόμμι, les substances égyptiennes utilisées dans la pharmacopée hippocratique ont toutes un nom grec (Totelin 2009, p. 156). Inversement, chez Strabon (XVI, 4, 4), il arrive que des noms de substances soient à l’origine de toponymes : il existe ainsi une terre porteuse d’encens (σμυρνοφόρος) et une autre porteuse de cinnamome (κινναμωμοφόρος) (Salle 2012, p. 56-57).
3 La Collection hippocratique compte 44 mentions du grain de Cnide et 34 mentions du cumin d’Éthiopie.
4 La notion d’exotisme est elle-même délicate. La zone égéenne constituait un centre et était approvisionnée, surtout en produits bruts, par une périphérie qui allait de l’Égypte et de Cyrène au Pont-Euxin, de Chypre à la Sicile, et comprenait l’occident méditerranéen (Bresson 2008, p. 142-143).
5 Hp. Mul.II 181.6, Littré VIII, 364, 10 = Potter c. 72, 402. Les premières références sont celles de mon édition en préparation (avec nouvelle collation des manuscrits), où les catalogues sont subdivisés en autant de paragraphes que de recettes : le premier nombre indique le chapitre et le second paragraphe. Pour les passages hors catalogue, le texte grec de référence est celui de la récente édition de Paul Potter, que je remercie chaleureusement de me l’avoir offerte. Toutes les traductions, sauf mention expresse, sont personnelles.
6 La fève d’Égypte correspond au lotus rose, Nelumbo nucifera Gaertner. Elle était ainsi dénommée parce que ses graines (les akènes de l’alvéole du fruit), comestibles, ressemblaient à des fèves, et parce que cette plante, originaire de l’Inde, était très répandue en Égypte (Thphr., HP IV, 8, 7, Amigues II, 90 et note 12 p. 266).
7 Hp. Mul.II 181.4, = Littré VIII, 364, 6 = Potter c. 72, 402.
8 La fève sert par exemple de référence pour doser la fleur de cuivre dans une composition : ἄνθος χαλκοῦ ὡς κύαμον, Hp. Mul.I 74.4 (Littré VIII, 154 = Potter 162) = Hp. Nat.Mul. 32.96 (Bourbon 42 = Littré VII, 364).
9 La fève d’Égypte, également appelée fève du Pont, était plus grosse que la fève grecque, et plus foncée (Dsc., II, 106, Wellmann I, 180).
10 La myrrhe et l’encens sont les ingrédients exotiques cités le plus souvent dans la Collection hippocratique (Totelin 2009, p. 148).
11 Hérodote (II, 92), sans la nommer ainsi, évoquait déjà le fruit du lotus à fleur rose et son usage dans l’alimentation.
12 Cette tendance s’observe notamment chez Paul d’Égine et Oribase, qui ont souvent recours à la fève grecque comme unité de mesure.
13 Hp. Mul.I c. 46, Potter, 108, 22-23 = Littré VIII, 106, 3.
14 Sur les cinq recettes de ce chapitre 181, trois comportent un ingrédient commenté : le « petit bulbe » en question, le pélécinus (hapax hippocratique attesté chez Dioscoride et Galien), « qui croît dans les blés », et la conyze, dont il est précisé qu’elle croît en terrain sablonneux et surtout en Égypte.
15 Peut-être existait-il une « haute médecine » comparable à une « haute cuisine » (Totelin 2009, p. 177). Les échanges internationaux dans l’Antiquité, surtout à l’époque archaïque et à l’âge classique, étaient surtout conçus comme une importation de manques et une exportation de surplus (Bresson 2008, p. 137). Certains produits « superflus » étaient demandés par les couches sociales les plus fortunées (ibid. p. 145).
16 Parmi les indications géographiques pouvant sublimer un ingrédient par ses connotations culturelles, figurent les modes sociales, les mythes et les pratiques religieuses. Pour les modes sociales, on citera par exemple l’engouement des Athéniens pour l’Éthiopie, perceptible dans des titres de comédies (Totelin 2009, p. 158). Pour les mythes, l’île de Chypre, lieu de naissance d’Aphrodite, apparaît toujours étroitement liée au monde féminin (Moinier – Weller 2015, p 264). Pour les pratiques religieuses, le cas des parfums, très employés dans les recettes gynécologiques, est particulièrement intéressant : lis, rose, narcisse et iris s’employaient pour l’entretien des statues en bois dans les temples (Paus. IX, 41, 7, Papachatzis 266 et 511). Les comptes des temples de Délos ont conservé des traces de cette consommation (voir Leka 2012, p. 284-288). Sur les liens entre cultes religieux et pharmacopée, voir von Staden 1992.
17 Thphr., HP IX, 7, 2, Amigues 18, note 10 p. 110.
18 Hp. Mul.II 205.6, Potter 96.6, 436 = Littré VIII, 394.
19 Mul.I 81.9 (Potter 216, 8-9 = Littré VIII, 202) = Nat.Mul. 32.96 (Bourbon 41 = Littré VII, 364).
20 Thphr., HP IX, 7, 2, Amigues 18, note 10 p. 110. Sur les routes de navigation dans la Méditerranée orientale, voir Arnaud 2005, p. 212-224.
21 Thphr., HP IX, 20, 1, Amigues V, 57, note 3 p. 239.
22 Ruf. Med. purg. in Oribase, Coll. med. 7/26.30 (I.231, 8-14 Raeder).
23 Hp. Mul.I 75.1, Potter 75.3, 172 = Littré VIII, 164.
24 M = Marcianus gr. 269 [coll. 533] (Xe s.) ; θ = Vindobonensis med. gr. 4 (XIe s.) ; Vb = Vaticanus gr. 276, ff. 149-178 (XIIe s.).
25 Hp. Mul.I c. 13, Potter 54, 7-8 = Littré VIII, 52, 12-13.
26 Hp. Mul.I 84.1, Potter 84.1, 218 = Littré VIII, 204.
27 Hp. Nat.Mul. 109.27, Bourbon 95-96 = Littré VII, 430.
28 Va = Vaticanus gr. 276, ff. 1-148 (XIIe s.) ; I = Parisinus gr. 2140 (XIIe s.) ; R = Vaticanus gr. 277 (XIVe s.) ; Hb = Parisinus gr. 2142 [part. rec.] (XIVe s.).
29 Hp. Mul.I 74.3, Potter 74.2, 160 = Littré VIII, 154.
30 Hp. Mul.II 205.7, Potter 96.7, 436 = Littré VIII, 394.
31 Hp. Nat.Mul. 32.95, Bourbon 41 = Littré VII, 364.
32 La Collection hippocratique compte 50 occurrrences du cumin, dont 10 emplois hors contexte gynécologique, et 34 du cumin d’Éthiopie, dont 3 hors contexte gynécologique.
33 Les dérivés ἔδεσμα et ἐδεστός ne désignent que l’alimentation solide en général. Il existe peut-être une mention de « laurier comestible » (Nat.Mul. 33.27, Bourbon 45-46 [= Littré VII, 370], note 1 ad loc. p. 171).
34 L’adjectif géographique Κύπριος, lorsqu’il ne qualifie pas la spode (σποδός), se trouve trois fois sur cinq en concurrence avec d’autres leçons dans la tradition manuscrite hippocratique (voir Index Hipp. s. v.).
35 Gal. Glauc. med. meth. II, Kühn XI, 113, 2.
36 Hp. Aff. c. 43, Potter 66, 6-12 = Littré VI, 252, 12.
37 Voir encore Aff. c. 41, Potter 64, 12-13 = Littré VI, 250, 18.
38 Le cumin apparaît dans une liste de substances (Acut. 23.1, Joly 46 = Littré II, 274) à l’odeur agréable (εὐωδέων), pour traiter une douleur située sous le diaphragme : ellébore noir, daucus, séséli, cumin, anis ou autre aromatique (εὐωδέων).
39 Hp. Epid.II, 6, 75, Littré V, 134, 12.
40 Hp. Epid.VII, 2.7 Jouanna 50 = Littré V, 368.
41 Hp. Mul.I c. 51, Littré VIII, 110, 19.
42 Steril. 20.22, Bourbon 94 = Littré VIII, 444.
43 Mul.I c. 14, Potter 54, 16 = Littré VIII, 52. Pour d’autres exemples d’électuaires où entre le cumin : Acut. sp. 30.1 (Joly 82 = Littré II, 454, pour traiter une fièvre accompagnée de hoquet) et 63.1 (Joly 96 = Littré II, 518, pour traiter un empyème).
44 Hp. Int. c. 35, Littré VII, 256, 10, en traitement contre un ictère.
45 Mul.II, c. 133, Potter 328, 11 = Littré VIII, 294.
46 Le cumin de cuisine n’est prescrit en potion que dans deux passages : Morb.III, Littré VII, 148, 2, dans une liste d’ingrédients pour traiter une douleur sous les hypocondres ; Superf. 33a.1, Bourbon 293 (= Littré VIII, 500), pour accompagner un traitement local émollient. La première recette se situe dans un traité dont c’est la seule mention du cumin et la seconde s’apparente à un régime (jus de poireau et vin blanc doux additionnés de résine, huile et cumin).
47 Le cumin d’Éthiopie est prescrit dans une application au bupreste, dont il existe deux rédactions parallèles : Mul.I 74.25, Potter 74.13, 166 = Littré VIII, 160 ; Nat.Mul. 32.73, Bourbon 38 = Littré VII, 360. Cette recette est remarquable parce que le cumin d’Éthiopie, en étant le premier adjuvant, et donc le premier élément d’une variante de la formule au bupreste, devient caractéristique de la recette. Dans les deux catalogues parallèles, elle se trouve à proximité de la version courte de l’application au narcisse (avec cumin simple en Mul.I 74.3 et cumin d’Éthiopie en Nat.Mul. 32.95). Ce contexte soulève la question de l’évolution des pratiques thérapeutiques : les recettes les plus anciennes (car les deux catalogues remontent probablement à un fonds ancien) privilégiaient-elles les produits très odorants ?
48 Hardy– Totelin 2016, p. 72 : « relatively easily identifiable as our nigella or black cumin, Nigella sativa L. ». L’assertion repose sur Dalby 2003, où sont relevées 109 occurrences du cumin d’Éthiopie dans les recettes pharmocologiques et culinaires.
49 André 1985 p. 157 s. v. melanthion (graines gris foncé) : « Nigella sativa L., dite aussi « cumin noir ».
50 Mul.II 192.8, Littré VIII, 372 = Potter 83.7, 410 ; Nat.Mul. 32.62, Bourbon 36 = Littré VII, 356 ; Steril. 9.8, Bourbon 83 = Littré VIII, 426.
51 C’est ainsi qu’elle est présentée dans une série d’équivalences : Ps. Galien, Succed. Kühn XIX, 733, 13 : ἀντὶ κυμίνου Αἰθιοπικοῦ, μελάνθιον, « au lieu du cumin d’Éthiopie, nigelle ». Dans la Collection hippocratique anis et cumin d’Éthiopie en potion soignent les douleurs des lombes (Mul.I 34, Potter, 82, 9 = Littré VIII, 80), comme l’anis et la nigelle, qui sont surtout cholagogues (Mul.I 79.8, Potter, 198, 22 = Littré VIII, 198).
52 L’ajouan fait partie aujourd’hui du commerce indien et ses grains ressemblent à ceux du cumin (Miller 1969, p. 106).
53 Dsc., III, 62, Wellmann 73, 6-9. Traduction de J. André (Pline, XX, p. 181 § 163). Comparer avec Hippiatr. 71, 18, Oder– Hoppe 210, 6-9 : ἄμις Αἰθιοπικὴ καὶ Ἰταλικὸν κύμινον, « de l’ammi d’Éthiopie et du cumin d’Italie ». Pour Aétius (IX, c. 31, Zervos 344, 27-28), le cumin d’Éthiopie est plutôt un cumin sauvage (κύμινον ἄγριον, ὃ δὴ Αἰθιοπικὸν καλοῦσιν). Enfin, c’est au cumin d’Éthiopie que Dioscoride (III, 59, Wellmann II, 71, 6-10) identifie le cumin « de chez le roi », τὸ παρὰ βασιλεῖ, mentionné en Hum. c. 10, Littré V, 490, 13.
54 Par exemple en Mul.I 74.10, Littré VIII, 156 = Potter 74.7, 162.
55 L’auteur du Salubr. (II, 55.5, Joly 55 = Littré VI, 564) note ainsi que les noix rondes sont échauffantes et les plates nourrissantes.
56 Morb.III, Littré VII, 132, 1 ; l’auteur semble particulièrement apprécier Thasos, dont il cite le vin (Morb.III, Littré VII, 160, 5), lequel, d’après Athénée (28d-29e), est un grand cru de la Grèce antique, « généreux à boire » (γενναῖος).
57 Mul.II 208.2, Littré VIII, 402 = Potter c. 99, 446 : « Secourt également : safran, myrrhe, noix du Pont, farine pure, dans de la graisse d’oie et du parfum aux iris, à appliquer. »
58 Seul un passage est sujet à caution : un remède, utilisé en onction dans les narines pour faire disparaître les suffocations, comporte du grain de Cnide d’après Nat.Mul. 32.65 (Bourbon 37 = Littré VII, 358) mais, d’après Mul.II 201.1, Littré VIII, 384, 7 (= Potter c. 92, 424), soit du safran (κρόκος θ), soit de la pourpre (κόχλου MVb). Comme la substance est utilisée pour son intérieur blanc, à mélanger avec du miel, il pourrait s’agir du noyau de la baie du sainbois (la baie étant le grain de Cnide) ou bien du mollusque de la pourpre.
59 Grains de peuplier de Crète (αἰγείρου Κρητικῆς), de raisin sec (ἀσταφίδος), de pivoine (γλυκυσίδης), du médicament indien (Ἰνδικοῦ φαρμάκου), de lierre (τοῦ κισσοῦ), de frêne (μελίης), de poivre (πεπέριος), de grenade fraîche (σίδης νεαρῆς). Pour les références aux passages, voir Index Hipp. s. v. κόκκος. Le principe est appliqué une fois de plus pour désigner le grain de Cnide lui-même, appelé « grain du “grain de Cnide” » (voir n. 64).
60 Grains de Phénicie (Φοινικικός), Nat.Mul. 32.24, Bourbon 32 (= Littré VII, 352).
61 Il faut compter une occurrence de plus dans Mul.I, difficile à classer (voir n. 69).
62 Il faut peut-être compter une occurrence de plus dans Mul.II (voir n. 58).
63 Fist. VII.2, Joly 141 = Littré VI, 454.
64 Le terme κόκκος devient ici éponyme de la plante qui donne le grain de Cnide, de même que κύαμος, « fève », peut désigner la plante donnant la fève d’Égypte (Thphr. HP IV, 8 = Amigues II, 90 et note 7 ad loc. p. 266-267. Galien (Gloss., Kühn XIX, 115, 9-11) note que certains désignent la fève d’Égypte par κυάμου καρπόν, « fruit de la fève ». Comparer avec κυμίνου Αἰθιοπικοῦ καρπόν, « fruit du cumin d’Éthiopie », Superf. 29.7, Bourbon 290 = Littré VIII, 496.
65 Nat.Mul. 33.26 (Bourbon 45 = Littré VII, 370) = Mul.I 78b.19 (Potter 78.57, 202, 24-25 = Littré VIII, 192) = Mul.I, 78b.45 (Potter 78.60, 206, 26-27 = Littré VIII, 196) = Mul.I 80.4 (Potter 80.3, 212 = Littré VIII, 200). Toutes les versions comportent de l’huile d’olive (ἔλαιον sans qualificatif), sauf la dernière, qui comporte de l’huile de lis (ἄνθινον). Pour Nature de la femme et Maladies des femmes I, il s’agit des seuls passages où κόκκος est accompagné de l’épithète Κνίδιος, probablement parce qu’il s’agit d’une recette phare remontant à un fonds commun.
66 Mul.II c. 118, Potter 286, 23 = Littré VIII, 256, 16 : τῷ κόκκῳ τῷ Kνιδίῳ, « avec le grain de Cnide ». Il s’agit du seul passage de Maladies des femmes II où κόκκος est accompagné de l’épithète Κνίδιος.
67 Morb.II 47.3, Jouanna 185 = Littré VII, 74, 7 : ἐς ὃ ὁ κόκκος συμμίσγεται, « la préparation où est mélangé le grain (de Cnide) » ; Mul.I c. 57, Littré VIII, 116, 1 (= Potter 118) et Mul.II c. 162, Littré VIII 340, 19 (= Potter c. 53, 378) : τῷ σὺν τῷ κόκκῳ, « le remède au grain (de Cnide) ».
68 Jouanna 1974, p. 473 n. 4, et Grensemann 1975, p. 67-70.
69 Le seul passage où Kνίδιος apparaît sans κόκκος ne permet pas de trancher, parce qu’il est lacunaire : il manque soit κόκκου soit l’article τοῦ qui permettrait de le substantiver : Mul.I 109a.1, Potter 109.1, 248 = Littré VIII, 230, 16, ἢ Κνιδίου πόσιν.
70 Par exemple, en Mul.I 84.5, Littré VIII, 206 = Potter 220.
71 Nat.Mul. 109.23, Bourbon 94 = Littré VII, 428, avec des grains frais.
72 Nat.Mul. 34b.1 (Bourbon 49 = Littré VII, 374) = Mul.I c. 85 (Potter 226 = Littré VIII, 210) = Mul.I c. 89 (Potter 89.1, 228 = Littré VIII, 212) = Mul.II 203.1 (Littré VIII, 386 = Potter c. 94, 428).
73 Hp. Mul.II, Potter c. 10, 290, 13-16 = Littré c. 119, VIII, 260, 6-7.
74 Ce que suggère a contrario une recette qui recommande d’utiliser des grains de Cnide frais (Nat.Mul. 109.23, Bourbon 94 = Littré VII, 428). Les autres ingrédients de la recette étant tous rouges, le terme χλωρός qui qualifie les grains ne prend pas le sens de « vert tendre, jaunâtre », mais celui de « frais » par analogie avec les jeunes pousses dont il désigne habituellement la couleur (DELG s. v.).
75 Dans une autre recette de lavement, la thapsie est dosée à deux coupelles : Nat.Mul. 33.22 (Bourbon 45 = Littré VIII, 368) = Mul.I 78b.17 (Potter 78.57, 202, 21-23 = Littré VIII, 192) = Mul.I 78b.44 (Potter 78.60, 206, 17-18 = Littré VIII, 194). La thapsie (Thapsica garnica L.) était très énergique : émétique et purgative, elle était même toxique pour le bétail (Thphr., HP IX, 3, Amigues V, 58).
76 Mul.I 92.1, Potter 92.1, 238 = Littré VIII, 222.
77 Sur cet emploi exceptionnel de Κνίδιος, voir n. 69.
78 Hp. Mul.I 109a.1, Littré VIII, 230, 15-16. D’après Dioscoride (IV, 172, Wellmann II, 321, 1-3) et Galien (Gloss. Kühn XIX, 112, 9) cnestron est une autre désignation du cnéôron. C’est même, d’après Disocoride, la plante qui donne le grain de Cnide. Théophraste ne mentionne pas le cnestron et sa description du cnéôron renvoie à une passerine (voir n. 85). Cependant le cnestron, qui dans la Collection hippocratique n’est mentionné que par les traités gynécologiques, semble plus fort que le grain de Cnide (voir n. 90).
79 La remarque a déjà été faite dans Jouanna 1975, p. 487 n. 1.
80 La proposition est reconduite dans un cas de typhus : Int., c. 42, Potter 214, 6 = Littré VII, 272, 7 : « purger le malade avec le suc d’hippophée ou le grain de Cnide (τῷ ἱππόφεω ὀπῷ ἢ τῷ Κνιδίῳ κόκκῳ) ». Dans un cas de coxalgie, le grain de Cnide est proposé avant l’hippophée (Int., c. 51, Potter 248, 2 = Littré VII, 296, 8).
81 Hp. Int., c. 13, Potter 116, 11 = Littré VII, 200, 12.
82 Il s’agit d’un cas de leucophlegmasie avec hydropisie. La proposition est reconduite pour un cas d’affection de la rate avec hydropisie (Int. c. 25, Potter 156, 16-17 = Littré VII, 230, 15) et pour un cas d’iléus avec essoufflement (Int., c. 44, Potter 220, 11 = Littré VII, 276, 10). Les trois ingrédients ne sont pas toujours proposés dans le même ordre : l’hippophée est citée en dernier dans un autre cas de leucophlegmasie (Int., c. 21, Potter 140, 14-15 = Littré VII, 218, 16) et dans un cas de maladie épaisse (Int., c. 47, Potter 230, 4 = Littré VII, 282, 21). Ces deux variantes peuvent résulter des aléas de la tradition manuscrite.
83 Hp. Int. c. 22, Potter 146, 11-12 = Littré VII, 222, 20.
84 La plante nommée hippophée correspond à l’euphorbe buisson d’épines, Euphorbia acanthothamnos Heldr. & Sart. Comme elle abonde sur les collines d’Athènes, Théophraste se contente de la citer parmi les épineuses (Thphr. VI, 5, 1, Amigues III, 43, note 1 p. 178). Pour sa description, voir Dsc. IV, 159, Wellmann II, 303-304.
85 Thymelaea Miller spp. Le cnéôron est souvent rangé dans le genre Daphné L. (André 1985, LSJ), mais la description donnée par Théophraste (VI, 2, 1 Amigues III, 32 et note 2 ad loc. p. 129) permet de reconnaître une plante qui s’observe encore sur les collines d’Athènes et de le ranger dans le genre Thymelaea Miller ; pour les textes hippocratiques, il n’est pas possible de trancher entre le cnéôron blanc, passerine tartonraire, et le cnéôron noir, passerine hirsute, légèrement plus foncée.
86 Par exemple dans le traitement d’une maladie de la rate : Int. c. 30, Potter 176, 12 = Litrré VII, 244, 17 : « Ce malade, lorsqu’il est dans cet état, lui donner en potion l’ellébore et le purger complètement par le bas avec du grain de Cnide (Κνιδίῳ κόκκῳ). »
87 Hp. Int. c. 26, Potter 160, 18-24 = Littré VII, 234, 7.
88 Hp. Int. c. 18, Potter 130, 22-23 = Litté VII, 210-212, cas de coxalgie.
89 Nat.Mul. 33.19-28, Bourbon 45-46 = Littré VII, 368-370 ; Mul.I 78b.15-18, Potter 78.57, 202, 16-27 = Littré VIII, 192 ; Mul.I 78b.44-45, Potter 78.60, 202, 17-28 = Littré VIII, 194-196.
90 Une version du lavement phare au grain de Cnide (Mul.I 80.4, Potter 212, 16-18 = Littré VIII, 200) est immédiatement suivie d’une recette au cnestron (80.5, Potter 212, 19-21 = Littré VIII, 200). Le c. 80 s’achève sur un remède associant grain de Cnide et mandragore (80.12, Potter 214, 15-16 = Littré VIII, 202), qui doit être le plus puissant de la série puisque la mandragore est bien connue pour faire perdre la raison (Hp. Loc.Hom. c. 39.1, Joly 69 = Littré VI, 328).
91 Dans Mul.I, les deux recettes se suivent immédiatement : Mul.I 78b.47.48 ; leurs rédactions parallèles sont inversées dans Nat.Mul. : Nat.Mul. 33.27 et 33.26. Cependant, en Nat.Mul., le parallèle entre cnéôron et grain de Cnide est établi plutôt entre les recettes 33.27 (au cnéôron) et 33.29 (au grain de Cnide) qui sont les seules à renvoyer explicitement à une nature phlegmatique.
92 Par exemple Mul.II 103.3, Potter 103.3, 242 = Littré VIII, 226 : ἔμπλαστρον ἰσχυρότερον τούτου, « emplâtre plus énergique que ce dernier. »
93 Hp. Mul.II, Potter c. 9, 286, 21-27 = Littré c. 118, VIII, 256.
94 Voir n. 65 et 75.
95 Mul.II, Potter c. 10, 290, 16-17 = Littré c. 119, VIII, 260, 6-7 : « s’il n’y a pas de grain à proximité, une seule coupelle de la racine de la thapsie. »
96 Mul.II, Potter c. 53, 378, 17 = Littré c. 162, VIII, 340.
97 Mais elle l’est chez le Pseudo-Galien, De succed., Kühn XIX, 743, 1.
98 Un traitement (Mul.II, Potter c. 53, 378, 13-14 = Littré c. 162, VIII, 340) comporte le même balancement entre remèdes pour les natures phlegmatique et bilieuse, mais avec une seule recette de référence pour chacune : le remède au grain de Cnide (τῷ σὺν τῷ κόκκῳ) et celui à la scammonée (τῷ ἀπὸ τῆς σκαμμωνίης).
99 D’après Théophraste (HP IX, 7, 3, Amigues V, 18), les aromates viennent tous d’Asie, sauf l’iris. Ce dernier donne une huile qui peut facilement remplacer toutes les autres dans les traités gynécologiques hippocratiques (Mul.II, Potter c. 24, 326, 5 et 328, 21 = Littré c. 133, 292, 7-8 et 294, 16).
100 Nat.Mul. 32.5 (Bourbon 28 = Littré VII, 346) = 78a.25 = 78a.59 = 84.19 = (Potter 78.12, 186 ; 78.24, 192 ; 84.5, 224 = Littré VIII, 178, 182 et 208).
101 D’après Arist. Météorol. II, 3, 41, il était possible en faisant chauffer de l’eau salée, d’obtenir le sel après évaporation et refroidissement. Ce sel, sel ignigène, était moins compact que le sel gemme et moins blanc que celui des marais salants (Moinier – Weller 2015, p. 43).
102 L’importation de manques et l’exportation de surplus réglait les échanges internationaux à l’âge classique (Bresson 2008, p. 137), mais il est possible également qu’ait joué un avantage comparatif, une région ayant intérêt à se spécialiser dans un domaine où la productivité était la plus élevée (ibid. p. 139). Sur l’île de Chypre, à Salamis, la production de sel était soutenue par le traitement du minerai de cuivre (Moinier – Weller 2015, p. 133).
103 Voir les deux extraits mentionnés en III.1.
104 Mul.I 75c.14, Potter 75.15, 176 = Littré VIII, 168 ; 78a.80 = Potter 78.44, 196 = Littré VIII, 186 ; 78a.82 = Potter 78.46, 196 = Littré VIII, 188.
105 Nat.Mul. 72.1 (Bourbon 74 = Littré VII, 404) = Mul.II Potter c. 56, 382 (= Littré c. 164, VIII, 344). Les deux rédactions parallèles mentionnent le sel de Thèbes et la première également une plante nommée « feuille éthiopienne ».
106 D’après Hdt. IV, 181-185, Moinier – Weller 2015, p. 129.
107 Mul.I 75c.14, Potter 75.15, 176 = Littré VIII, 168.
108 D’après Dsc. V, 107, 1, « le meilleur sel marin est produit à Salamis de Chypre, à Mégare en Sicile ». (Moinier – Weller 2015, p. 81). Pour une carte avec situation des marais salants à Chypre voir Moinier – Weller 2015, p. 134.
109 Hp. Nat.Mul. 101.1, Bourbon 84 = Littré VII, 416.
110 Hp. Jusj. c. 5, Jouanna 4 = Littré IV, 630 et note ad loc. p. 35.
111 Mul.I 103.3, Potter 103.3, 242 = Littré VIII, 206. La spode est l’ancien nom de l’oxyde de zinc. La meilleure cadmée, dépôt servant de base à la spode, est censée provenir de Chypre (Dsc. V, 74, Wellmann III, 37).
112 Hp. Int. c. 51, Potter 244,17– 246,8 = Littré VII, 294,16– 296,2 :
113 Pour le cérat (κηρωτή) : Steril. 20.9, Bourbon 92 = Littré c. 230, VIII, 442 ; pour l’huile d’iris (ἴρινον) : Mul.II, Potter c. 53, 378, 17 = Littré c. 162, VIII, 340 ; pour l’encens (λιβανωτός) : Superf. 29.7, Bourbon 290 = Littré VIII, 496.
114 Mul.I 75c.9, Potter 75.10, 174 = Littré VIII, 166, 19, λιβανωτὸς ἄρσην.
115 Superf. 33a.2, Bourbon293 = Littré VIII, 502, dans une potion où n’entrent que des graines (de céleri et de cumin d’Éthiopie).
116 Chairs 17.1 Joly 199 = Littré VIII, 606, ὡς λιβανωτὸς διαφανής, « comme l’encens translucide ». « L’encens recueilli sur les nattes était pur et translucide (διαφανῆ) » (Thphr. HP, IX, 4, 2, Amigues V, 12).
117 Mul.II, Potter c. 38, 360 = Littré c. 147, VIII, 324.
118 Mul.II, Potter c.72, 402, 14-17 = Littré c. 181, VIII, 364 (littéralement « myrrhe molle »).
119 Mul.II, Potter c. 49, 372, 19-22 = Littré c. 158, VIII, 336.
120 Steril. 9.3, Bourbon 82 = Littré c. 221, VIII, 426.
121 La myrrhe en gouttes, d’après Thphr., Od. 29, est soit une huile qui coule à partir de l’incision de l’arbre, soit un composé : sur des boules de myrrhe solides réduites en miettes et dissoutes dans de l’huile de noix de ben (balanos) à feu doux, est versée de l’eau chaude qui « précipite au fond du récipient la myrrhe gorgée d’huile, comme un dépôt »; l’eau est ensuite filtrée et le sédiment passé au pressoir (Faure 1987, p. 295). La myrrhe « première » pourrait correspondre à l’huile obtenue par incision.
Auteur
ESPE, Paris – Sorbonne Université - florence.bourbon@espe-paris.fr
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