Chapitre VI. Présences1
Première Partie
p. 181-282
Texte intégral
« Au mois de février 1817, dans la commune de Marino, près de l’emplacement de l’ancienne Albe-la-Longue, non loin de Castel-Gandolfo et auprès de la route qui conduit à Albano, des paysans creusaient dans le peperino qui recouvre les flancs du mont Albain des fosses destinées à la plantation de la vigne. Après avoir enlevé un banc de roche de 50 à 60 centimètres d’épaisseur, ces hommes découvrirent, à côté de nombreux fragments de poteries, des vases de différentes formes dont quelques-uns renfermaient des cendres ; la plupart des autres étaient de petite dimension, presque tous étaient parfaitement intacts.
[...]
La matière employée à la confection de ces vases est une argile noirâtre mêlée de sable volcanique ; la fabrique en est grossière, ils ont été probablement façonnés à la main et sans l’aide du tour à potier.
À quelle époque peut-on faire remonter ces vases funèbres ?
À quelle race doit-on rattacher les êtres humains dont ils renferment les cendres ? »
Duc de Blacas, « Mémoire sur une découverte de vases funéraires trouvés près d’Albano », in Mémoires de la Société impériale des Antiquaires de France, t. 28, 3e s., 8, 1865, p. 90-110 (p. 90 et p. 95).
DILETTANTES ET ANTIQUAIRES
1C’est l’archéologie, et elle seule, qui permet de répondre aux questions que posait le duc de Blacas1, et à bien d’autres encore, nées du développement même des recherches. Un mot d’abord sur ce que cette étude n’est pas : nous n’avons voulu, en aucune manière, dresser ici l’inventaire complet de toutes les trouvailles archéologiques faites sur les monts Albains. Non que nous doutions de l’utilité de ce genre de catalogue, assurément très grande, mais parce que, comme on le sait, un tel inventaire, exhaustif à sa date, existe : c’est celui qu’établit, voici maintenant plus de quarante ans, le Suédois Pär Göran Gierow2, disciple d’Einar Gjerstad et continuateur pour le Latium de l’œuvre entreprise par son maître à Rome. D’autre part, si les limites établies par la spécialisation des recherches et des compétences doivent être, à l’occasion, non pas ignorées mais franchies pour une meilleure approche du passé, elles ne s’en imposent pas moins d’elles-mêmes.
2Nous faudra-t-il pour autant nous désintéresser de ces aspects archéologiques, qui pourraient sembler, à première vue, étrangers à l’étude des légendes albaines ? Ce serait oublier que cette dernière, sur plusieurs points essentiels, ne peut se limiter à un point de vue strictement philologique : comment, par exemple, pourrait-on faire l’analyse du très classique problème de la localisation d’Albe La Longue, comment, encore, aborder l’institution, si curieuse, au regard de la physionomie du Latium à l’époque classique, des Féries Latines, sans prendre en considération le témoignage de l’archéologie ? Nous avons déjà vu, d’ailleurs, que ce dernier était indispensable pour l’étude de l’emissarium, qui occupe une si grande place dans le corpus légendaire albain ; nous verrons qu’il l’est également pour bien d’autres thèmes appartenant à cet ensemble : ainsi, les traditions sur le règne de Tullus Hostilius, à qui la mythe-histoire des primordia Vrbis attribue la destruction d’Albe, ne peuvent être évaluées qu’en tenant compte des données archéologiques. À vrai dire, c’est presque constamment que le récit des origines, aussi bien pour Albe que pour Rome, doit être confronté avec l’archéologie, et cette évidente nécessité est illustrée à l’abondance par la recherche contemporaine. Bien entendu, cette confrontation doit être menée selon une démarche où toute interférence indue entre deux séries de données qui ne se confondent pas, est à éviter impérativement. Si comparaison il y a, ce ne peut être qu’un point d’arrivée et non un point de départ, un résultat et non un donné a priori, une démonstration et non une hypothèse. Sur ces principes, qui sont de simple bon sens, et que nous avons défendus ailleurs3, l’accord4 est assez grand pour que nous n’y revenions pas.
3On n’échappe donc pas à l’archéologie, fût-ce pour l’étude de la part la plus mythique, la plus ancienne et, semble-t-il, la plus insaisissable du récit des origines de l’Vrbs, celle qui concerne Albe. À partir de cette constatation, une raison nous a paru rendre souhaitable un réexamen des présences archéologiques dans les monts Albains : quels que soient ses mérites, qui sont immenses, le recueil de Gierow a besoin aujourd’hui d’être complété sur plusieurs points. Qui entreprendrait l’étude des légendes albaines sur la seule base de travaux publiés maintenant depuis plusieurs décennies, risquerait fort de se fourvoyer sur des questions d’un intérêt non négligeable. Au vu des conclusions de l’Iron Age Culture of Latium, et aussi d’autres publications postérieures, on a ainsi longtemps parlé d’un abandon de la région au viie s., voire dès le ixe siècle. Or cette conclusion est sans doute à revoir. D’abord, parce que Gierow avait en général dédaigné de recourir aux publications des antiquaires pré-niebuhriens d’ancien régime, dont l’œuvre est de nos jours justement réévaluée et exploitée comme il convient. Malgré ses défauts, indéniables, et ses errements de toutes sortes, on s’aperçoit désormais de plus en plus que cette érudition ne saurait sans dommages être négligée. Les rédacteurs du CIL le savaient du reste fort bien, eux qui y avaient constamment recours, consultant même, lorsqu’il le fallait, les recueils manuscrits ou les publications rares, et si bien que nombre de leurs successeurs ont pu se croire définitivement dispensés de suivre leur exemple : à tort, puisque, pour le point de vue qui est le nôtre, l’apport de cette littérature est loin de se limiter à l’aspect épigraphique. Riccy, par exemple, dont Dessau connaissait et a utilisé le mémoire de 1787 sur l’Antichissima città di Alba Longa – en reléguant, il est vrai, dans l’enfer de la rubrique « Falsae » les inscriptions que le jeune jésuite d’Albano avait transcrites –, livre plusieurs renseignements qu’on ne trouve pas ailleurs et qui se révèlent utiles pour la topographie et l’archéologie albaines5.
4Mais la nécessité d’un complément provient surtout, bien sûr, des nouvelles découvertes faites sur les pentes albaines depuis 1964. Bien qu’il n’y ait eu, pendant longtemps, aucune véritable fouille sur un site albain depuis celles qu’avait menées V. Antonielli en 19286, les trouvailles occasionnelles sont assez nombreuses pour, çà et là, justifier des amendements d’importance aux conclusions formulées par Gierow : il fallait donc mettre à jour les relevés établis par ce dernier. Un seul chiffre suffira d’ailleurs à mesurer l’importance des nouvelles trouvailles : d’après Pino Chiarucci7, qui en est très souvent l’auteur, ces dernières ont plus que doublé le nombre des présences archéologiques albaines répertoriées par Gierow.
5Ce travail de révision nous paraissait d’autant plus nécessaire que les classifications – tant chronologiques que typologiques – dont faisait usage l’érudit suédois n’ont pas été adoptées, pour des raisons sur lesquelles nous reviendrons, par ceux qui ont eu ensuite à citer et à discuter le matériel qu’il décrivait.
6Enfin, les fouilles ont été, on le sait, très nombreuses et très fécondes dans le reste du Latium : par elles, fût-ce indirectement, les trop rares vestiges archéologiques recueillis dans les monts Albains se trouvent, bien souvent, pourvus de nouvelles significations et doivent être réinterprétés à la lumière de ces parallèles que ne pouvait, en 1964, connaître Gierow8. Il est juste de dire que le chemin de cette nécessaire relecture a été ouvert par l’auteur lui-même de l’Iron Age Culture of Latium qui, en 1977, puis en 1983, a tenu à prendre en compte, mais sans renoncer à ses classifications, l’apport des nouvelles découvertes9. Avant, donc, de procéder à cette révision générale, nous tenons à souligner la valeur du travail réalisé par ce savant, grâce auquel un matériau d’intérêt exceptionnel, mais dispersé et mal identifié, est devenu commodément utilisable pour la recherche. Pour autant, on ne s’attendra pas à ce que les techniques les plus récentes et les plus éclairantes de l’archéologie puissent être appliquées à des fouilles qui, la plupart du temps, ne méritent pas, à vrai dire, ce nom. La date ancienne à laquelle elles furent faites, si elle leur valut, à partir du moment où le sol romain commença à livrer ses vestiges les plus anciens, de se trouver placées au premier rang du débat scientifique10, les reléguerait plutôt aujourd’hui à l’arrière-plan. C’est ailleurs, notamment à Lavinium, à l’Osteria dell’Osa, à Rome même, que s’est fait entre-temps le renouvellement des méthodes et des problématiques. Ainsi peut-on expliquer, sans doute, le désintérêt visible, dont nous avons déjà vu plusieurs exemples, de la recherche contemporaine à l’égard de la question albaine. En d’autres termes, il s’agit clairement d’un cas où les insuffisances contingentes de la documentation infléchissent, insensiblement et souterrainement, le cours de la recherche contemporaine : à juste titre, on a beaucoup parlé de Lavinium depuis deux ou trois décennies ; cependant, on n’a peut-être pas porté aux Colli et à la légende albaine toute l’attention nécessaire.
7Prise en compte de la stratigraphie, tant verticale qu’horizontale, datations au radiocarbone (C 14) ou à la thermoluminescence, étude site par site du paléo-environnement et des restes organiques, utilisation de l’archéologie aérienne et des derniers progrès de la cartographie par satellites, ethnoarchéologie, archéologie expérimentale, constitution de répertoires par l’informatique : il est vrai que la plupart de ces méthodes11, dont les implications ne sont pas seulement techniques, n’ont pu être mises en œuvre sur le matériel albain qui, eu égard aux enseignements que des opérations rigoureusement conduites auraient pu apporter, reste, en raison même de la date et de l’histoire de sa mise au jour, d’une lecture difficile et incertaine.
8Ce n’est ici pas le lieu, assurément, d’évoquer les conditions générales de ce qu’on hésite à appeler archéologie durant le xixe siècle. Tout au moins est-il nécessaire de ne pas oublier, en faisant l’examen de ce qui a été découvert dans les monts Albains, la façon dont une situation générale s’est traduite dans ce cas particulier. Comme presque toujours, il s’agit de trouvailles fortuites, réalisées à l’occasion de l’aménagement de routes (cas des découvertes de 1816) ou de vignes (cas de la plupart des découvertes suivantes)12. Or, selon ce qu’a montré A. Guidi il y a déjà plus de vingt ans13, cette caractéristique factuelle a des conséquences scientifiques importantes. Au vu des relevés de Gierow, en effet, on constate que si, pour les premières périodes de la civilisation latiale, les nécropoles sont beaucoup plus nombreuses que les sites d’habitat, la situation s’inverse pour les périodes suivantes ; cependant, dans la plaine, on n’observe nullement une telle dissymétrie. Plutôt que d’en inférer, comme on avait pu être tenté de le faire naguère, de fragiles déductions sur les genres de vie, les « cultures » respectives des communautés albaines et de la côte latine, on se souviendra plus opportunément à ce propos, que de 1816 à 1964, c’est le hasard qui fut presque à chaque fois la cause première des trouvailles archéologiques, à une époque où les sites de la plaine côtière ne faisaient, à l’exception de Satricum, l’objet d’aucune fouille. Puis, à partir du milieu des années 1950, des fouilles systématiques commencent à Lavinium14 ; dans les années suivantes, sous la pression de l’extension incessante de l’agglomération romaine, les fouilles, nées la plupart du temps d’opérations de sauvetage, iront en se multipliant sur le littoral, tandis que les monts Albains, épargnés, au moins provisoirement, par cette urbanisation, restent à l’écart de cette activité archéologique. Grâce à l’aide des techniques et des méthodes auxquelles nous avons fait allusion, l’archéologie moderne est capable d’identifier et d’étudier ce qui demeurait inaccessible jadis : les habitats15 qui, en bonne logique, se révèlent être bien plus nombreux sur les sites côtiers que dans les Colli. Ainsi, on peut, on doit même se demander si le vide archéologique si souvent décrit pour les monts Albains durant les dernières phases de la civilisation latiale, n’est pas d’abord un vide épistémologique.
9D’autres vicissitudes méritent d’être rappelées, dans la mesure où elles aussi ont pu donner lieu à des interprétations indues. Passons sur le risque, pas totalement inexistant, de prendre pour des vestiges de cabanes protohistoriques les traces de ces cabanes qui, jusqu’au début du siècle dernier, se retrouvaient un peu partout autour de Rome, et dont la toponymie a gardé le souvenir, sous la forme de ces lieux-dits Cappanelle ou Le Capanne, dont on retrouve des exemples, notamment près de Grottaferrata ou d’Albano16. Il y a d’autres risques, plus subtils : s’il n’y a eu que très peu d’opérations archéologiques, au sens rigoureux du terme, dans les monts Albains, il y en a eu parfois qui, pour une raison ou pour une autre, sont restées inédites : ainsi, les notes qu’avait prises Antonielli lors de ses fouilles au Pascolaro de Marino n’ont jamais été publiées17. Autre obstacle qui se rencontre fréquemment dans l’archéologie albaine : plusieurs des « vignes » où, au siècle dernier, avaient été mis au jour des objets archéologiques, ne sont plus connues que par leur nom, et leur localisation exacte, qui dépendait de traditions orales et de documents cadastraux perdus ou non inventoriés, est aujourd’hui ignorée18. Pour remédier à cet état de choses, l’antiquisant aurait besoin ici de la coopération de l’archiviste, et il serait souhaitable, de plusieurs points de vue, qu’un grand programme d’exploration systématique des sources documentaires locales, notariales, communales et autres, soit mis sur pied, dont l’antiquisant aussi bien que le médiéviste pourraient tirer profit. Dans le même sens, il faudrait recenser celles des archives pontificales, aujourd’hui conservées à l’Archivio di Stato19, qui concernent la zone des Colli : très attentifs à ce que peut apporter ce type de documents, les Tomassetti les ont consultés et en donnent à l’occasion des extraits ; il ne serait pas inutile toutefois de procéder au moins à des sondages, à fins de vérifications. Surtout, il conviendrait de concentrer l’enquête, ce que nous n’avons pu faire en raison de l’indisponibilité temporaire desdites archives due à leur réaménagement, sur la période 1816-1870. En effet, entre l’année des premières découvertes d’urnes-cabanes près de Marino et de Castel Gandolfo et le début de la parution régulière des Notizie degli Scavi, instituées par le nouvel État italien, comme chacun sait, afin de recueillir la trace de toutes les découvertes archéologiques venues au jour dans l’ensemble du Royaume, il y a un vide, une discontinuité documentaire dont on ne s’avise pas assez. Même s’il est heureusement fort probable que toutes les découvertes les plus importantes ont été portées à la connaissance du public savant, notamment par l’intermédiaire du Bullettino de l’Institut de Correspondance Archéologique, qui accueille ces années-là plusieurs contributions importantes sur le sujet, il est possible que la trace de certaines opérations mineures, ou jugées telles par les contemporains, reste encore aujourd’hui enfouie dans les cartons de l’Archivio di Stato. Le risque est d’autant plus grand que durant toute cette première moitié du xixe siècle, règne, nous l’avons vu, pour des raisons que nous avons tenté précédemment d’analyser, un net désintérêt pour des objets qui ne sont pas alors bien datés.
10Avouons aussi que cette date de 1816-1817 n’est pas sans intriguer : non point en ce qui concerne le détail des premières découvertes, qui est et qui restera peut-être toujours entaché d’obscurité. Notre interrogation est plus générale : pourquoi a-t-il fallu attendre si tard pour que soient mis au jour les premiers vestiges de la civilisation latiale ? On peut répondre – et c’est peut-être, après tout, la bonne réponse – qu’il s’agit là d’une donnée de fait, objective, et qui échappe à la discussion : on pourra ajouter alors que ce début du xixe siècle est précisément le moment où, dans la Campagne de Rome, et particulièrement sur les Colli, prend naissance une agriculture spécialisée visant les forts rendements : sur les pentes albaines, on abandonne désormais les traditionnelles vignes arbustives, pour aménager de nouveaux pieds de vignes, plantés plus serré et plus profond20. Il est donc logique qu’on n’ait trouvé qu’à partir de l’adoption de ces procédés des vestiges qui peuvent parfois se trouver à une assez grande profondeur21. Soit : mais c’est l’aménagement d’une route, et non d’une vigne, qui semble avoir donné l’occasion de la toute première découverte. Surtout, on a, dans les monts Albains, construit des routes, aménagé des vignes, creusé des fondations avant 1816 ! Pourtant, il a fallu attendre cette année-là pour identifier des vestiges qui, même aujourd’hui, après presque deux siècles de recherches intenses, demeurent assez nombreux pour que le moindre travail de voierie effectué dans la région amène une nouvelle découverte...22. La situation est d’autant plus curieuse que les documents d’archives cités par les Tomassetti révèlent la pratique à grande échelle de ce qu’on pourrait appeler une archéologie antéscientifique. Bien sûr, le phénomène n’est pas propre aux Castelli, et il est même très connu pour Rome23 : il ne faudrait pas oublier qu’il a existé pareillement à l’extérieur de la Ville.
11En veut-on la preuve ? C’est, tout au long des xviie et xviiie siècles, la présence récurrente, dans chaque bail amphythéotique conclu par les Colonna pour leurs terres de Marino, d’une clause interdisant strictement toute fouille et leur réservant la propriété de l’intégralité des trouvailles éventuelles24. C’est encore cette admiration d’un chroniqueur du début du xviiie siècle pour la « fertilité en anticailleries » (anticaglie)25 de ce même territoire de Marino, qui n’est autre – faut-il le rappeler ? – que celui où seront trouvées les premières urnes-cabanes. On a donc remué, constamment et intensément, bien avant 1816, le sol albain26 : est-ce donc le seul hasard qui a voulu que pendant deux, sinon trois siècles, aucune urne-cabane, aucun dolium, aucune sépulture protohistorique n’ait vu le jour ? C’est possible, et nous ne voudrions pas l’exclure totalement. On se souviendra, toutefois, de ce que cherchaient des fouilleurs dont l’activité – la chose est bien connue – n’avait que très peu à voir avec ce que nous appelons archéologie et s’apparentait bien plus à une véritable chasse au trésor : statues, « médailles », or et argent bien sûr, et éventuellement (mais en seconde ligne) inscriptions27, voilà tout ce qu’ils cherchaient... et trouvaient en abondance. Le reste, et notamment, on peut le présumer, tout vestige de terre cuite, était brisé, jeté par eux, sans autre forme de procès, sans même apparaître, sauf exception, dans les relations, du reste très succinctes, qu’ils faisaient de leurs fouilles28. Songeons, d’ailleurs, qu’en plein xixe siècle, autrement dit après la date des premières découvertes de Visconti, et à une époque où ces dernières étaient sans nul doute connues de tous dans la région, bien des « vases funéraires » seront encore, au grand dam des archéologues, transformés en pots de fleurs ou brisés par leurs inventeurs qui y cherchaient des pièces d’or29 ! C’est pourquoi, en raisonnant à partir de la seule vraisemblance, il est, nous semble-t-il, licite de se demander si les découvertes officielles de 1816-1817 n’ont pas, en réalité, mais dans une réalité qui demeure floue, été précédées par d’autres trouvailles qui, elles, n’auraient pas été identifiées ou n’auraient pas retenu l’attention, parce qu’elles ne correspondaient pas à ce qui était alors recherché et estimé.
12Outre les indices en ce sens que nous venons de mentionner, il y a peut-être pour cette supposition un élément qui est resté inaperçu jusqu’à ce jour, mais qui mérite, nous semble-t-il, l’examen : accompagnant à Rome son ami et protecteur le comte de Stainville, futur duc de Choiseul, Ambassadeur de France, l’Abbé Barthélémy, durant un séjour de près de deux ans dans la Ville Eternelle, ne fit pas que jeter les premières esquisses de l’œuvre qui devait le rendre à jamais célèbre, le Voyage du Jeune Anacharsis30 ; il y parcourut aussi en tous sens la Campagne romaine, notamment autour de Frascati et d’Albano, à la recherche de « médailles » destinées à enrichir les collections du Cabinet Royal de Paris dont il avait la garde. De ces errances érudites, il tira, entre autres, un Mémoire sur les anciens monuments de Rome qu’il lut au retour à ses confrères de l’Académie des Inscriptions31. Parlant des monuments, il parle aussi des tombeaux, puis des urnes placées dans ces tombeaux : « Les cendres étaient renfermées dans des urnes qui furent successivement de terre cuite, de pierre, de marbre, de verre, de porphyre, et d’une matière plus précieuse encore. On en voit un nombre infini dans la maison de campagne de M. le cardinal Passioneï à Frescati [sic], dans toutes celles qui sont autour de Rome, ainsi que dans des cabinets particuliers : les unes sont rondes, et paraissent faites d’après ces mausolées dont j’ai parlé ; les autres sont carrées, et ressemblent à des maisons. On y distingue le toit avec ses divisions, et la porte tantôt fermée, tantôt à demi ouverte, et quelquefois occupée par le Génie de la mort »32. Certes, Barthélémy n’est pas toujours un guide très sûr : décrivant le tombeau de Palazzolo, pourtant bien connu des antiquaires ses prédécesseurs, il dira qu’il n’en a « trouvé nulle part la description », mentionnant, de plus, « une inscription qu’on ne peut pas lire du pied du rocher »...33. et pour cause, car elle n’a sans doute jamais existé que dans son imagination. Il est tout à fait possible, également, que ses lignes ne s’appliquent ici qu’aux urnes républicaines et impériales, sur le modèle de la célèbre urne de l’Esquilin34, les urnes de terre cuite étant celles qui se retrouvaient en grand nombre dans chaque columbarium35. Mais si, sur les urnes de pierre, se laisse facilement reconnaître « le toit avec ses divisions », ces urnes elles-mêmes ne sont en général, semble-t-il, pourvues d’aucune ouverture. Or, cette « porte tantôt fermée, tantôt à demi ouverte », ce « Génie de la mort » n’offrent-ils pas, par contre, une troublante analogie avec les ouvertures dont sont pourvues les urnes-cabanes, dont l’intérieur contenait parfois, outre les cendres du défunt, une statuette de terre cuite ? La forme carrée de ces urnes ne serait pas un obstacle à cette lecture, dans la mesure où, même si les urnes-cabanes albaines, celles de Castel Gandolfo notamment, sont rondes, d’autres, beaucoup moins nombreuses il est vrai, sont de forme carrée, comme certaines de celles qui furent trouvées à Marino ou à Pratica di Mare36 ; surtout, les mots de Barthélémy, qui séjourna dans les monts Albains37, ne sont peut-être pas d’une précision telle qu’ils doivent être sur ce point pris à la lettre.
13Bien sûr, à lui seul, ce témoignage imprécis ne saurait évidemment rien prouver : rapproché d’autres pièces révélant l’ancienneté de la chasse au trésor sur les monts Albains, il suggère au moins, nous semble-t-il, de ne pas exclure totalement l’hypothèse que, avant les découvertes de 1816-1817, aient été faites sur le sol des Colli d’autres trouvailles de matériel protohistorique, voire d’urnes-cabanes restées méconnues38. Du reste, en remontant même plus loin dans le temps, comment les bâtisseurs de ces innombrables villas qui, à l’époque classique, furent construites par l’aristocratie de l’Vrbs un peu partout sur les pentes des monts Albains n’auraient-ils pas rencontré quelquefois de tels vestiges ?
14Pour en revenir à l’époque moderne, on se trouverait mutatis mu-tandis dans le même cas de figure que celui qu’offrent les temples de Paestum : pour des raisons parmi lesquelles les difficultés d’accès à ces monuments ne jouent sans doute qu’un rôle très secondaire, ils ne furent pas découverts, on le sait, avant 175039. En ce qui concerne les humbles vestiges de la civilisation latiale, les raisons pourraient être généralement l’émergence, progressive et lente, d’une archéologie scientifique digne de ce nom et s’intéressant à autre chose qu’aux « marbres », ainsi que la naissance des sciences de la préhistoire ; il est d’ailleurs révélateur que, même après 1817, il faille encore attendre un demi-siècle et toute la polémique sur la « Pompéi préhistorique », pour que commencent enfin à être prises en considération des trouvailles qui jusque-là étaient restées dans l’ombre40.
15Rares, et incertains pour peu qu’on veuille leur donner un statut de documents destinés à servir de support à l’analyse historique, les vestiges archéologiques albains n’échappent pas non plus, comme tous documents, à l’influence cachée d’hypothèses préétablies qui valent comme autant de conditionnements épistémologiques. L’exemple le plus frappant pour notre sujet est sans doute celui que fournissent les successives erreurs commises quant à la localisation de telle ou telle trouvaille archéologique. Pour employer un mot qui fit florès naguère, je dirais que ces erreurs ne sont, en effet, pour certaines d’entre elles, nullement « innocentes ». De quoi s’agit-il ? Lorsqu’ils procédèrent, en 1949, à une réorganisation du Musée Pigorini qui accueille beaucoup des objets protohistoriques exhumés sur les Colli, les responsables de cette institution étiquetèrent comme provenant de Castel Gandolfo un matériel disparate trouvé dans les réserves du musée. Or, selon ce qu’a montré Gierow41 à qui nous empruntons cet exemple, c’est bien plutôt à Marino et à un site du Monte Crescenzio, mont qui se trouve sur le territoire de ce centre, qu’il convient de rapporter ces objets. Même détournement d’attribution dans l’erreur qui fit dire à Lanciani que des tombes, qu’il savait pourtant lui-même avoir été découvertes sur le Monte Crescenzio, devaient être mises en relation avec le site de Castel Gandolfo42. Quelques années plus tard, c’était au tour d’une découverte d’une tombe latiale, enregistrée vingt ans avant par le même Lanciani pour les Notizie degli Scavi, d’être indûment, car elle venait de Marino, répertoriée par Pinza dans la liste des découvertes faites autour de Castel Gandolfo43. L’attirance exercée par ce site devait être bien forte, puisque Gierow en arriva lui aussi à y localiser un matériel qui provenait en réalité du Pascolaro de Marino44 ! Cette liste n’est sans doute pas exhaustive et si nous ajoutons qu’à notre connaissance, il n’existe aucun cas identifié d’erreur d’attribution commise en sens inverse, c’est-àdire de Castel Gandolfo à Marino, on comprendra peut-être mieux le sens et la cause de ces transferts injustifiés. Ce qui les explique et les a provoqués, en parfaite bonne foi des archéologues concernés, cela va sans dire, c’est le rayonnement et, pour mieux dire, la véritable force d’attraction exercée par un lieu où, depuis les premières découvertes de 1817, on avait de plus en plus tendance à placer la mythique métropole des Latins. Ainsi, on était d’autant plus porté à y localiser des trouvailles de provenance incertaine, que les environs de Castel Gandolfo semblaient effectivement les lieux albains les plus « fertiles » du point de vue archéologique. Mais ces erreurs, qui ne paraissent pas avoir été très nombreuses, n’ont-elles pas qu’une importance limitée ? En réalité, on peut se demander si la situation est aussi simple qu’il ne le semble à première vue. D’abord, parce que la conséquence la plus évidente, la plus immédiate, des découvertes de 1816-1817 a été qu’on a cherché à fouiller les lieux mêmes où elles avaient été faites, et que ce n’est que bien plus tard que d’autres sites plus éloignés commenceront à leur tour à livrer un matériel archéologique protohistorique, qu’on n’y cherchera pas avant les années 1870 ; ensuite, parce que, comme nous l’avons vu, les découvertes de 1817 furent, pour ainsi dire, des découvertes isolées et sans lendemain, ou plutôt que si lendemain il y eut, il ne débuta pas avant la seconde moitié du siècle. Concentration des premières fouilles en un seul point, arrêt rapide des recherches dans les décennies qui suivirent : voilà qui ne pouvait qu’augmenter le poids scientifique et la signification prêtée aux découvertes faites, disait-on, près de Castel Gandolfo.
16Peut-être même y eut-il encore d’autres causes, moins visibles, qui vinrent accentuer cette tendance. On ne saurait, en effet, oublier les conditions concrètes d’émergence du « fait albain » dans l’archéologie du xixe siècle. S’il est vrai qu’avant 1816, bien peu nombreux étaient les antiquaires et les savants qui localisaient à Castel Gandolfo le site d’Albe, au contraire, après 1837 et surtout 1846, dates de la mort de Carnevali et de la vente de sa collection, cette localisation commença, du reste lentement, à venir à l’ordre du jour45. Simple scansion des « faits », explicable et justifiée, pensera-t-on ? On en arriverait plus facilement à cette rassurante conclusion, si l’on n’avait pas le soupçon, parfois, que lesdits faits ont été orientés, sinon produits, par la théorie qu’ils venaient justifier si opportunément. En d’autres termes, on peut se demander si plusieurs des trouvailles attribuées au site de Castel Gandolfo et à ses abords ne proviennent pas en réalité d’autres lieux, non autrement connus. On verra, à propos des découvertes de 1816-181746, que parfois, au moins, le soupçon se fait certitude, au moins négative, et que l’on doit alors formellement exclure que les localisations affirmées par les découvreurs de 1817 soient exactes. Il faut songer, en effet, que les « inventeurs » des urnes-cabanes trouvées en 1817, Carnevali et Pasqualucci notamment, avaient tout intérêt à brouiller les cartes et à donner à Visconti, qui reste sur bien des points la seule source scientifique sur leurs découvertes, de faux renseignements : il leur fallait éviter de donner prise aux revendications du duc Torlonia qui réclamait les « vases funéraires » comme siens. Cela pourrait conduire à supposer que certains « vases » trouvés à Castel Gandolfo aient été présentés comme venant de Marino ou d’ailleurs, bien que, il faut l’observer, les indices en ce sens fassent défaut. Cependant, au total, ce n’est pas dans cette direction que soufflait le vent. Car, dans l’ombre de l’histoire, on devine qu’après les retentissantes découvertes de 1816, un vaste mouvement d’émulation s’était créé parmi tous les viticulteurs qui travaillaient aux alentours et qui ont sans doute fébrilement cherché alors, avec succès souvent, de quoi satisfaire la curiosité non désintéressée des marchands d’antiquités qui étaient venus rôder par là47. Dans de telles conditions, ni le fournisseur, ni l’acheteur n’avaient intérêt à ce que l’on sût exactement d’où provenaient les mystérieux « vases funéraires ». Il y a plus : il était certainement plus lucratif, quelle que fût la provenance réelle des objets, d’affirmer simplement qu’ils avaient été trouvés « à Albe ». On ne saurait méconnaître, en effet, la vraie nature de la plupart de ces indications de provenance : il s’agissait d’abord de l’assertion d’un vendeur à un acheteur. Garantir que tel objet, telle urne-cabane venait d’une « Albe », éventuellement assimilée à Castel Gandolfo, c’était en augmenter le prestige...et le prix. Ainsi, avant d’être une précision scientifique, l’information était un argument de vente.
17De ce processus, à la fois commercial, psychologique et, par ses conséquences, scientifique, une urne-cabane acquise par G. de Bonstetten (qui ne doit pas être confondu avec l’auteur du Voyage sur la scène de l’Énéide) et conservée au musée de Berne vient donner un exemple : elle porta longtemps, en énormes capitales peintes, le nom magique d’« Alba Longa », finalement effacé à la suite d’une restauration récente48.
18Une dernière constatation peut contribuer à éveiller une méfiance ou, en tout cas, un doute, aussi légitime que nécessaire, à l’égard de l’origine attribuée aux découvertes de 1816-1817 : lorsque, cinquante ans après, le mouvement des fouilles reprendra son essor, sous l’impulsion d’une science archéologique, ou du moins « palétnologique », affirmant et affinant ses exigences, en particulier du point de vue de la localisation exacte des trouvailles, ce sera, beaucoup plus qu’autour de Castel Gandolfo, sur le territoire de Marino, de Grottaferrata, de Rocca di Papa, qu’apparaîtront les nouvelles découvertes. Alors, la vieille et vague indication de Visconti parlant d’« un colle nelle vicinanze dell’antichissima città di Albano »49 laissera la place à une grande diversité de lieux et de sites.
19Il ne faut pas négliger ces détails, si anecdotiques puissent-ils paraître : car, en fin de compte, c’est la connaissance elle-même que nous avons des premières phases de la civilisation dite latiale dans les monts Albains qui s’en trouve modifiée et subvertie. Où l’on voit donc que, par l’archéologie, avant d’être le résultat médité du raisonnement et de la méthode, la science est, sans le savoir, le produit du hasard et du désir.
20Destructions en tout genre, tant anciennes que modernes, trouvailles fortuites, collections dispersées, provenances inconnues, archives inexplorées, fouilles inédites sinon inexistantes : c’est bien, on le voit, une manière d’anthologie des difficultés en la matière50 qu’offre l’archéologie albaine ! Même si, grâce à des enquêtes archivistiques patientes, qui relèvent d’une véritable archéologie de cette archéologie-là, une reconquête partielle des informations perdues a pu être effectuée sur certains points importants, il ne faudrait pas, comme on a parfois tendance à le faire51, oublier ou minorer les ombres qui continuent d’entourer des zones de lumière qui demeurent rares.
21Rien ne serait plus pernicieux, d’ailleurs, que de croire que ces incertitudes et ces limitations épistémologiques sont le lot exclusif de l’érudition ancienne, tandis que les recherches modernes en seraient, heureusement et définitivement, exemptes ! Dans ce domaine, en effet, les risques sont, nous semble-t-il, tout aussi réels, même si, grâce au progrès de la science, ils seront sans doute plus circonscrits. Il y a d’abord, et nous y reviendrons, le poids des théories, des modèles transformés au fil des ans en vulgate indiscutée. Plus précisément aussi, d’autres facteurs interviennent du point de vue de l’archéologie concrète : les nouvelles découvertes, nous l’avons dit, sont la plupart du temps le fait d’opérations dites de sauvetage, dépendant donc directement du degré d’occupation actuelle du terrain. Or la partie occidentale des lacs albains étant la plus urbanisée, c’est logiquement de ce côté-là que se multiplient les nouveautés archéologiques : la prospection de surface, pratiquée ailleurs, peut atténuer ce déséquilibre ; il est probable qu’elle n’en compense pas tous les effets.
22Autre facteur à prendre en compte : les configurations administratives. Qu’est-ce à dire ? Le territoire des environs de Rome est partagé entre deux « Surintendances », celle de Rome et celle du Latium : la première mena à bien, pendant plusieurs années, grâce à des financements exceptionnels connus sous le nom de loi Biasini, une intense activité52 d’inventaire, de publication et d’analyse des gisements protohistoriques relevant de ses compétences ; ne bénéficiant pas de tels crédits, la seconde, qui a sous sa juridiction les monts Albains, se consacra à d’autres tâches. Le résultat, au moins momentané et, espérons-le, provisoire, de cette dualité administrative est, du point de vue des habitats et des nécropoles publiés, que, d’un côté, la carte des présences archéologiques se fait chaque jour plus dense, tandis que de l’autre, elle a gardé longtemps, sauf exception, beaucoup du profil qui était le sien il y a quelques décennies.
23Si l’on doit, pour étudier les légendes albaines, s’interroger préalablement sur les vestiges archéologiques identifiés dans les monts Albains, on n’oubliera donc pas, au vu des considérations qui précèdent, qu’il s’agit d’une documentation qui en elle-même doit être évaluée de façon critique (au sens où l’on parle de critique historique). De ce qui fut la « vie réelle », dans sa complexité et sa totalité, aux vestiges matériels, de ceux-ci aux vestiges conservés, de ces derniers enfin aux vestiges recueillis, on sait bien53 que la déperdition d’informations est, du point de vue de l’archéologie, immense : elle l’est d’autant plus ici qu’il s’agit de fouilles qui, la plupart du temps, n’en furent pas. Voilà ce dont il ne sera peut-être pas inutile de se souvenir à l’occasion, dans la mesure où bien des classifications ou des théories régnant dans l’étude de la protohistoire latiale ont précisément été élaborées à partir de ce matériel, ancien (nous parlons de sa date d’invention) et lacunaire54. Inversement, les développements, ailleurs, de l’archéologie latiale viennent parfois éclairer les pauvres vestiges albains. On aboutit ainsi à la double conclusion qu’on ne sait peut-être pas ce qu’on croit savoir (i.e. telle ou telle théorie pourtant communément reçue) mais qu’on ne sait peut-être pas non plus tout ce qu’on pourrait savoir : imaginons, par exemple, que le Pascolaro de Marino ait été fouillé selon les méthodes et les techniques de l’archéologie moderne...
24Ainsi, ce ne sont pas seulement les exigences propres de notre sujet qui rendent souhaitable le réexamen constant du matériel albain : tant pour corriger ou tempérer les classifications traditionnelles que pour mettre à l’épreuve, au moins ponctuellement, les nouvelles théories, l’« aggiornamento » des données recueillies par Gierow se révèle nécessaire et, croyons-nous, utile. Il va de soi que l’entreprise ne peut prétendre à retrouver ce qui ne peut l’être : les patientes enquêtes du savant suédois ont restitué, quand c’était possible, à l’archéologie albaine deux – topographie (origine des trouvailles) et typologie – des trois dimensions essentielles à toute analyse archéologique : la troisième, celle de la stratigraphie (tant verticale qu’horizontale), est, bien entendu, irrémédiablement perdue puisqu’il s’agit, presque toujours, d’objets apparus en dehors de tout « contexte ». C’est là encore une limitation essentielle à la connaissance, qu’il serait dangereux d’oublier. Nous espérons donc qu’on voudra bien considérer le panorama qui suit comme ce qu’il est, et non comme ce qu’il ne prétend nullement être : un instrument de travail pour nos analyses ultérieures, un état des lieux, qui se sait partiel et, par définition, provisoire, et qui n’a pour ambition que de ne pas arrêter la science à l’étape franchie hier (1964 en l’occurrence)55, sans pour autant vouloir fixer ce qu’elle sera demain, après une nouvelle fouille par exemple. Les recensements et taxinomies archéologiques traduisent ou, du moins, provoquent trop souvent une triple illusion que les techniques informatiques ne font que renforcer. Celle de la complétude : on pense pouvoir connaître la totalité d’une classe d’objets ; celle de la représentativité : on postule que le matériel étudié est, en lui-même, un vecteur suffisant pour l’analyse typologique, chronologique et finalement historique qui sera faite à partir de lui ; celle, enfin, de l’objectivité et de la neutralité des interprétations élaborées à partir de ce matériel, cette croyance, car c’en est une, n’étant que la résultante des deux opérations précédentes.
25Assurément, si l’archéologie albaine n’avait qu’un seul mérite, ce serait de dissiper, vu ses conditions particulières d’élaboration, ces mirages trompeurs ! Ainsi, comment ne pas rester songeur lorsqu’on s’aperçoit que la chronologie des découvertes coïncide presque toujours avec celle des recherches ? Après le long, trop long silence qui suivit les fouilles faites par Mengarelli en 192556, il aura fallu la reprise des investigations par des archéologues locaux à partir des années 1970 (c’est la revue Documenta Albana, publiée à partir de 1973, qui en recueillit les résultats) puis, décisivement, l’impulsion donnée à l’archéologie latiale tout entière par l’organisation de colloques annuels, pour que se multiplient, depuis 1978, sur le territoire des monts Albains comme ailleurs, nouvelles découvertes et nouveaux sites.
26Dans ce que G. Boissier eût appelé une « promenade archéologique », nous reprendrons le parcours adopté par Gierow, ce qui facilitera d’autant la consultation, les comparaisons et les mises à jour : du nord au sud et de l’ouest à l’est, l’itinéraire part grosso modo, en sens horaire, de Colonna, pour aller ensuite à Monte Porzio Catone, Tusculum, Grottaferrata, Boschetto, Marino, Monte Crescenzio, Riserva del Truglio, Prato della Corte, San Rocco, Rocca di Papa, Monte Cavo, puis de Castel Gandolfo, à propos duquel seront évoquées particulièrement les fouilles de 1816-1817 (qui ne s’y rapportent sans doute pas toutes), à San Sebastiano, Albano, Ariccia, Nemi, Lanuvio et Velletri57. Les nouvelles découvertes justifient l’ajout d’une rubrique consacrée spécifiquement au lac de Castel Gandolfo.
27À chacune des étapes du parcours ainsi défini, nous nous efforcerons d’indiquer : lorsque c’est possible, et ça l’est rarement, la localisation exacte des sites d’habitat et de nécropole ; un essai d’estimation de leur importance relative, qui vaut la peine d’être tenté, même s’il s’agit de trouvailles dispersées ; la mise à jour des datations de Gierow en fonction de la chronologie définie par Müller-Karpe et Peroni et communément reçue aujourd’hui, ce qui n’exclut pas, du reste, d’éventuelles modifications ponctuelles, car cette chronologie se trouve à son tour aujourd’hui soumise à révision58, en fonction des résultats obtenus par la dendrochronologie et les analyses au C14 ; c’est ainsi que la première période (I) est située maintenant au xie s., la seconde (II A et B) aux xe et ixe s., la troisième (III A et B) à la fin du ixe et au viiie s., la quatrième (IV A et B) de la fin du viiie à la fin du vie s. av. J.-C. Nous donnerons également le signalement et le commentaire, enfin, des particularités, typologiques ou autres, les plus notables, ainsi que les références bibliographiques les plus récentes. Surtout, nous tenterons d’évaluer, à chaque fois le plus précisément possible, par rapport aux objets que décrit Gierow parce qu’ils ont été conservés (et dont on verra la reproduction dans son ouvrage), ce qui avait été trouvé à l’origine, ce qui a pu être perdu, détruit ou oublié.
28Si nous reprenons ainsi l’itinéraire tracé par Gierow, c’est que les monts Albains forment du point de vue géographique, on l’a vu, un ensemble nettement défini et, pourrait-on dire, autonome. Mythographiquement, on peut aussi parler d’une strate albaine dans la légende des primordia. Aussi convenait-il de centrer l’enquête sur la région albaine proprement dite. Chronologiquement, nous avons choisi de partir des xie et xe siècles, qui voient la première affirmation d’une « culture » latiale spécifique, en allant jusqu’aux viie (où la légende place la destruction d’Albe La Longue) et vie siècles.
29Une certaine attention, enfin, a été accordée (à partir des travaux des Tomassetti) à l’histoire médiévale de chacun des Castelli, quand elle pouvait révéler de possibles continuités, mais sans, bien sûr, que nous donnions à cette esquisse de comparaison d’autre valeur que celle d’une simple suggestion.
COLONNA59 (voir planche 7)
30Situé à 343 m d’altitude, sur une colline circulaire et isolée, le village de Colonna marque la limite septentrionale des Castelli Romani. Il se trouve à 23 km de Rome. La configuration des lieux, le voisinage de plusieurs lacs, aujourd’hui asséchés60, la proximité du grand axe de communication de l’Italie centrale qu’est, dès l’époque protohistorique, et même dès la préhistoire, la vallée du Sacco61, tout cela créait les conditions les plus favorables à l’installation sédentaire des populations de la fin de l’âge du Bronze. Ce site réunit en effet plusieurs des caractéristiques que l’on retrouve dans les habitats de cette période.
31Or, au regard de ces conditions favorables, on ne pouvait qu’être frappé par l’extrême modestie des vestiges inventoriés par Gierow : sept vases, dont l’un (une kylix), attribué erronément (une erreur due à un mécanisme que nous avons commenté précédemment)62 par Pinza à Castel Gandolfo ; deux de ces pièces furent trouvées au début du siècle sur les pentes nord de la colline, sur une vigne appartenant à un certain Crescenzi, les autres on ne sait où.
32Depuis 1983, des prospections de surface et des opérations d’urgence63 sont venues fort heureusement combler un vide surprenant qui, comme très souvent, dépendait beaucoup plus de l’histoire des fouilles que de la réalité archéologique elle-même.
33Les fouilles les plus récentes sont celles qui ont apporté enfin les preuves définitives de l’occupation du site aux phases latiales les plus anciennes, et même avant : dès le Bronze ancien au Colle Mattia, et dès le Bronze moyen au Colle S. Andrea. À l’est du village actuel, dans la plaine, au lieu dit S. Chiara, une fouille de sauvetage a, en particulier, permis d’identifier six tombes de la phase II A, donc à incinération et mobilier miniaturisé tandis que, non loin de là, une campagne récente (2005) a mis au jour une nécropole d’une quarantaine de tombes de la phase IV B.
34Après quelques trouvailles isolées faites d’abord au nord du village actuel, auxquelles on peut ajouter la découverte fortuite, en juin 1983, de six pièces de céramique et de fragments d’urne-cabane64, les fouilles ont permis de localiser sur la colline même où s’élève le village actuel le site de l’habitat protohistorique. Sur les pentes occidentales du mont, en effet, au lieu-dit Pasolina, aussi bien qu’au nord, au lieu-dit Barberi, sont apparus les fragments d’un matériel « en dépôt secondaire », c’est-à-dire apporté par le ravinement là où il fut trouvé, matériel qui permet d’autre part de fixer pour cet habitat une chronologie qui va du xe au vie siècle.
35À moins d’une centaine de mètres de là, également sur le versant septentrional de la colline, étaient apparus dès 1983 les vestiges, beaucoup plus consistants, d’une petite nécropole comprenant une douzaine de tombes : la chronologie en a été fixée par les fouilleurs à la période III. De plus, non loin de l’aire fouillée en 1983, à l’ouest de la ville moderne et au lieu dit Pasolina65, la trouvaille de trois vases archaïques (dont un beau kantharos) à l’occasion de l’aménagement d’une vigne en 2001, a conduit à des sondages stratigraphiques qui ont mis au jour : des restes osseux d’animaux domestiques, ainsi que de nombreux fragments céramiques, de production locale, déjà mélangés et détruits en partie par les travaux agricoles, mais suffisants pour attester une occupation durant les périodes I et II, avec ensuite une continuité de vestiges jusqu’au Moyen Âge. Quant aux pièces retrouvées intactes, elles révèlent une aire funéraire qui n’est plus repérable aujourd’hui.
36Dans ces conditions, il vaut la peine de revenir à la petite nécropole apparue en 1983, pour faire quelques remarques simples. D’abord, la présence, dans la nécropole de la partie nord-orientale (Barberi), d’une tombe à fosse, qu’une quarantaine de mètres sépare des autres tombes de la nécropole, dont les dimensions sont plus grandes que la normale, et dont l’orientation non plus n’est pas la même que celle des autres : cette tombe, quoiqu’elle n’ait, apparemment, pas été pillée, est dépourvue de tout mobilier. A. Guidi, en 1983, avait comparé les caractéristiques de cette tombe avec celles de deux sépultures de la nécropole de Castel di Decima, datées du viie siècle par Fausto Zevi66.
37On sait que Giovanni Colonna a montré que la « discrétion » (poussée ici à l’extrême) du mobilier funéraire, qui s’observe à partir d’un certain moment dans le Latium, devait être attribuée, non point au hasard des fouilles, à la disparition du matériel, ni à une brusque paupérisation de la société latiale, mais, bien plutôt, à des « lois somptuaires », dont il a retrouvé des échos dans la législation des XII Tables limitant le luxe du cérémonial funèbre67. Qu’il y ait eu, comme on l’a dit, de véritables lois ou prescriptions formelles, dès le viie siècle, en Latium, cela n’est pas sûr ; ce qui l’est, en revanche, c’est la précoce diffusion dans toute la région d’un nouveau comportement des vivants à l’égard de leurs morts, interprété généralement comme une mainmise grandissante de la communauté civique, à qui désormais sont réservés tous les surplus de richesses, sur la sphère privée. Accessoirement, cette diffusion prouverait, s’il en était besoin, que la Ville et les pays qui l’entourent participent alors à une commune civilisation, si bien que ce qui se rencontre ici se retrouve souvent là. La question qui se pose, dans ce cas précis, est évidemment celle de l’identification de la communauté civique, inspiratrice du changement idéologique et rituel dont cette tombe est peut-être la manifestation. Comme souvent en matière de topographie latiale, il y a bien une cité dont la localisation erre, sur une même zone, entre deux lieux différents, en l’occurrence Monte Compatri et, précisément, Colonna. Cette cité, c’est Labicum, pour l’emplacement de laquelle on a jusqu’ici généralement opté en faveur de Monte Compatri. Labicum étant citée par Cicéron pour sa participation au Latiar68 des Féries Latines, et apparaissant, d’autre part, avec la qualité de colonie albaine69, on peut se demander si, comme le suggèrent G. Ghini et A. Guidi70, le résultat des nouvelles fouilles ne redonne pas crédit à l’hypothèse d’une localisation à Colonna. Quoi qu’il en soit, nous nous contenterons de relever ici qu’au témoignage même des fouilleurs, la phase la plus prospère de l’habitat de Colonna, quel qu’ait été son nom antique, doit être placée au viiie siècle.
38Pour ce qui est du reste de la nécropole, il s’agit de onze tombes à fosse qu’un cours d’eau, sans doute préexistant mais canalisé au iiie siècle av. n. è. lorsque le site fut occupé par une exploitation agricole, semble diviser en deux groupes. Si vraiment, comme le suggèrent les fouilleurs, cette répartition, qui ne trouve pas d’explication chronologique ou typologique, indique l’existence de deux « familles » distinctes, on aurait là, il est vrai à une échelle beaucoup plus réduite, un phénomène comparable à ce qui a été observé sur le site de la toute proche (six kilomètres) Gabies71. La tradition « littéraire » (le mot peut être mis entre guillemets, car il s’agit en l’occurrence de prescriptions ou traditions d’origine religieuse) n’insiste-t-elle pas à l’envi sur le particularisme rituel des gentes, dont chacune avait ses cérémonies, ses rites spécifiques ?72 On remarque également que les fouilles récentes de Colonna apparaissent au total comme l’illustration du phénomène que nous avons analysé plus haut73 : l’irrémédiable décadence des cités fortifiées du Latium archaïque et leur transformation, sous la République et l’Empire, en grosses fermes, selon un processus qui se retrouve souvent ailleurs.
39Des onze tombes de cette nécropole, dont sept sont féminines, cinq seulement sont celles de jeunes adultes, les autres étant celles d’enfants. Deux tombes méritent une mention particulière, l’une (la n° 11) parce qu’elle est pourvue d’un sol dallé, témoignant ainsi d’un processus de monumentalisation, en ce début du viiie siècle, qui aboutira ensuite aux tombes « à chambre », dont la disposition reflète celle des demeures terrestres74 ; l’autre, car elle contenait une barque miniature, donnant une idée assez précise d’embarcations à fond plat, dont le type s’est très longtemps perpétué, et qui, dès ce viiie siècle avant notre ère, devaient parcourir les eaux des nombreux lacs du massif albain, et particulièrement de ceux situés près de Colonna75. Bien sûr, ces deux découvertes ne sont pas sans intérêt non plus par ce qu’elles nous apprennent de « l’idéologie funéraire » dans le premier Latium76. Au total, cette nécropole, datant de la période III (du milieu du ixe aux débuts du viiie s.), a livré, outre une vingtaine de récipients de formes diverses (huit amphorettes latiales et cinq tasses dont deux à anses bifores), un certain nombre d’objets de parure personnelle dont certains de qualité et qui, dans trois tombes, avaient été rassemblés sur le flanc gauche de la défunte dans un vase d’argile crue façonné au moment de la déposition. La tombe n° 3, qui fut celle d’une fillette, contenait notamment deux colliers d’argent. Dans plusieurs autres sépultures, l’ambre était présent, que ce soit dans des colliers (trois en tout) ou sur des fibules (deux sur cinq), à côté de perles de verre. La présence de ce type d’objets dans des sépultures, dont la plupart sont celles d’enfants, relève clairement du phénomène décrit par la sociologie comme « dépense somptuaire ostentatoire » ; cela montre, comme le relève M. Angle, que certaines familles de cette petite communauté latiale, sans doute enrichies par les trafics passant par l’axe proche du Sacco et du Liri, entendaient affirmer, par le biais du culte funéraire, un statut « aristocratique », et ce dès le viiie s.
40C’est donc l’image d’un centre modeste mais dynamique qui se dégage des récentes découvertes, pour lequel on a évoqué une dépendance politique à l’égard de Gabies, mais que l’exemple de l’histoire médiévale du site pourrait inciter à mettre aussi bien en rapport avec Tusculum.
TUSCULUM (COMMUNE DE MONTE PORZIO CATONE)77 (pl. 8)
41De longtemps, la célébrité du site dans l’histoire du Latium archaïque n’a eu d’égales que la discrétion et la minceur du dossier archéologique le concernant : à peine une demi-page dans le recueil de Gierow, à propos de trouvailles fortuites faites sur les pentes de l’acropole, et, semble-t-il, perdues et jamais publiées. Tout au plus ces découvertes fugitives servaient-elles à prouver, ce que la configuration des lieux suggère d’ailleurs aisément, que l’éminence qu’occupa la vieille cité médiévale avant sa destruction complète par les Romains en 1191, avait été peuplée dès les temps de l’âge du Fer et même du Bronze. À vrai dire, il eût été bien peu vraisemblable qu’un relief si isolé, si facilement défendable, dont le sommet s’élève à près de 682 m au-dessus du niveau de la mer, fût demeuré inhabité : même si on pouvait légitimement hésiter à lui rapporter les découvertes faites sur le territoire voisin de Grottaferrata, à la Villa Cavalletti78, de toute façon la disposition du relief qui fait de l’acropole de Tusculum l’avant-poste nord-occidental le plus élevé des monts Albains, dominant d’un côté la plaine jusqu’à Rome, et donnant de l’autre sur la puissante silhouette du Monte Cavo79, invitait à y reconnaître un site d’occupation précoce et stable. Mais jusqu’ici, les vicissitudes de l’histoire avaient pour ainsi dire effacé jusqu’aux traces de ce très ancien passé : le sac de 1191, suivi au xixe siècle80 de cette manière de pillage qu’étaient des fouilles faites en un temps dédaigneux des humbles tessons de la protohistoire, tout cela explique un vide archéologique que des découvertes récentes invitent à ne pas surinterpréter. Remarquons en passant que c’est probablement cette absence de vestiges qui favorisa l’opinion, longtemps établie chez les « antiquaires » des xviie et xviiie siècles, que le site de la ville devait être identifié à Frascati, lieu beaucoup plus riche en témoignages archéologiques. Dans ce qui est maintenant un parc archéologique81, de nombreux tessons ont été récemment recueillis au cours de prospections de surface82 : celles-ci semblent indiquer qu’à partir de l’âge du Bronze moyen, toutes les phases de la civilisation latiale sont représentées. On notera même la présence de quelques tessons datables au viiie siècle avant notre ère83 : à notre sens, ces vestiges suggèrent que la « rocca » de Tusculum a été caractérisée par le même processus d’incastellamento que l’on voit se produire ailleurs en Latium et à Rome84 même. Bien sûr, dans le cas de Tusculum, cette lecture doit rester, pour le moment du moins, au stade de l’hypothèse, dans la mesure où on n’a pas identifié ici, comme cela a pu être le cas ailleurs, de restes de fortifications remontant à cette période qui apparaît de plus en plus comme une période clef du Latium archaïque. Mais, encore une fois, c’est l’histoire, si tourmentée, de cette « piccola Veio del Medioevo » (Tomassetti) qui a conduit à la disparition presque totale de tout vestige archéologique : un chroniqueur médiéval n’écrivit-il pas qu’en 1191, après plusieurs épisodes préliminaires qui avaient déjà conduit à des démolitions massives, lapis supra lapidem non remansit, un autre ajoutant que les vainqueurs romains castellum funditus destruxerunt ?85 Aussi bien, des puissantes murailles qu’Hannibal n’avait pas osé défier en 21186, rien ne reste sur le terrain, hormis quelques pierres éparses qu’il est difficile de dater. L. Quilici et S. Quilici-Gigli, qui en ont réalisé un minutieux relevé, qui désormais devra être préféré à ceux effectués au siècle dernier, proposent une datation de l’ensemble au ve siècle87. Cependant, comme on y remarque l’emploi, au moins à certains endroits, du pied dit dorique, parfois en usage, ils le soulignent eux-mêmes, dans les monuments de la Rome royale88, nous nous demandons pour notre part s’il ne convient pas d’interpréter cette particularité comme le signe de l’existence d’une enceinte constituée dès l’ère archaïque. Nous parlons bien sûr des vestiges actuels, et non des éventuels fossés (agger) antérieurs, qui ont pu disparaître sans laisser de traces. Il ne faut pas oublier qu’il est toujours extrêmement difficile de dater une muraille, et qu’en l’occurrence, les arguments sur lesquels se fondent L. et S. Quilici pour leur datation sont de nature essentiellement externe, faisant appel surtout à une comparaison avec le fortin de La Giostra, situé sur la route de Satricum89. Même s’il est probable qu’au ve siècle, période encore mal connue d’une manière générale et en ce qui concerne Tusculum en particulier, la cité ait accordé un soin particulier à sa défense, il serait de toute façon hautement invraisemblable qu’elle ne l’ait pas déjà fait, ou qu’on ne l’ait pas fait pour elle, auparavant. Le site occupe, on l’a vu, une véritable position-clef, constituant, si on peut dire, le verrou stratégique des monts Albains, grâce au contrôle qu’il assure envers la via Latina qu’il domine de toute sa hauteur90. Nous pensons donc qu’il a été fortifié très tôt et que, s’il ne l’a pas été (ce que nous ne croyons pas), c’est qu’on se sera contenté des défenses naturelles du lieu, déjà en elles-mêmes fort conséquentes91 : de toute façon, ceux qui, au viiie, au vie comme au ve siècle, étaient les maîtres du Latium, ne pouvaient, quels qu’ils fussent, laisser une telle position inoccupée.
42Vu l’ancienneté, désormais acquise grâce aux trouvailles mentionnées ci-dessus, de l’occupation du site, on doit, même si c’est pour la laisser irrésolue, poser au moins la question du nom qu’avait ce centre : l’appelait-on déjà Tusculum ?
MONTE PORZIO CATONE (pl. 1)
43Au lieu-dit Pilozzo92 (Vigna Savina), sur une plaine dominée par la hauteur occupée par le village de Monte Porzio Catone, des trouvailles récentes attestent une présence humaine, et l’existence probable d’un habitat au moins temporaire, à l’époque apenninique, à l’âge du Bronze moyen, remontant donc à près de quinze siècles avant notre ère. Quoique fragmentaire et dépourvue de « contexte » archéologique, cette découverte, qu’il convient de mettre en relation avec d’autres du même genre faites, on le verra, non loin de là, sur le territoire de Grottaferrata, montre que les monts Albains sont habités avant même que ne commence à apparaître ce qu’on appelle la civilisation latiale. Ici, on notera qu’il s’agit d’une trouvaille isolée, concernant un lieu qui ne semble pas avoir connu d’occupation postérieure, et qui fut ensuite abandonné.
44Le site lui-même du village de Monte Porzio Catone, qui se présente comme une ample colline conique93, n’apparaît pas dans le recueil de Gierow, dans la mesure où il n’avait, semblait-il, révélé aucune présence protohistorique ou archaïque. Cependant on pensera volontiers avec Ashby et Tomassetti94 qu’un tel relief, d’accès facile et de surface relativement ample, a pu être occupé très tôt, et nous dirions même plus, n’a pas pu ne pas l’être. Les villas républicaines et impériales, dont les restes furent répertoriés avec un soin admirable par Ashby, étaient particulièrement nombreuses sur ce coin du territoire albain qui est celui-là même dont Strabon avait fait l’éloge95. À n’en pas douter, cette densité monumentale, à laquelle on ajoutera l’ignorance et le désintérêt qui ont longtemps prévalu à l’égard des vestiges les plus anciens, explique suffisamment un tel vide archéologique. Oublié par Gierow, un indice semble d’ailleurs aller dans ce sens : Tomassetti96 fait état d’une tombe peut-être archaïque, détruite et non publiée, identifiée fugitivement sur le Monte Ciuffo, non loin de ce qui semble avoir été une antique route vers la colline qu’occupe le village de Monte Compatri97.
45Mais c’est d’un lieu proche, dit Fontana Candida, que proviennent les vestiges les plus intéressants : au détour d’une phrase du copieux rapport qu’ils consacrèrent à la nécropole de la Villa Cavalletti dans les Notizie degli Scavi, Colini et Mengarelli98 avaient mentionné, sans s’y attarder, des petites jarres, du type ovoïde et à filet, découvertes à un endroit où furent mises au jour, également, plusieurs sépultures d’époque impériale. C’est à Ashby qu’on doit d’avoir attiré l’attention sur cette découverte. Demeurée inédite, elle fut oubliée par Gierow (ainsi, apparemment, que par Pinza) et n’a donc jusqu’ici pas été prise en compte. Si insuffisante que soit l’information la concernant, elle a néanmoins l’avantage de montrer, autrement que par la seule vraisemblance, que la colline occupée par Monte Porzio Catone était habitée dès les débuts de l’âge du Fer, confirmant ainsi ce que suggère la configuration des lieux. Dans ces conditions, comme pour le cas de Tusculum dans les phases préarchaïques, il conviendrait de poser la question du nom antique, latin, d’un tel centre.
GROTTAFERRATA99 (pl. 9)
46S’étendant sur près de 1500 hectares, le territoire de la commune de Grottaferrata a livré plusieurs gisements archéologiques qui montrent que, dès les débuts de la civilisation latiale, la zone était habitée de façon sans doute assez dense : de fait, son abondance en eaux et en forêts, qui se reflète encore aujourd’hui dans la toponymie100, sa bonne accessibilité, offraient des conditions de vie favorables. Un élément doit être ajouté, qui n’est peut-être pas négligeable : la présence d’un gisement de minerai de fer, auquel l’abbaye et le village actuel doivent peut-être leur nom101, gisement qui fut exploité jusqu’au xvie siècle102. Au Moyen Âge, l’abbaye, dont les possessions, couvrant en arc de cercle une grande partie des monts Albains, allaient s’étendre loin vers le sud, fut longtemps, comme on le sait, l’une des plus puissantes d’Italie. Lieu de résidence de plusieurs papes, elle n’eut de cesse d’affirmer sa souveraineté, et, du xiie au xviiie siècle, son histoire est pleine des démêlés constants qui l’opposèrent aux évêchés voisins de Tusculum et d’Albano. Placée comme elle l’est en avant-poste de la ceinture montagneuse, elle contrôle un carrefour stratégique important, qui voit la grande voie d’accès vers l’Italie méridionale (qu’est la via Latina des temps républicains) se séparer des itinéraires, d’intérêt plus strictement local et de date probablement plus ancienne103, qui conduisent au cœur du massif, à Rocca di Papa et au Monte Cavo. Situation qui, de tout temps, eut deux conséquences : d’une part, l’occupation à plusieurs reprises par des troupes venues du midi de la péninsule, que ce soit celles du roi Ladislas de Naples de 1409 à 1413 ou encore celles du général Bourcard, en 1796 et 1798-1800 ; d’autre part, des conflits fréquents et répétés avec les communes voisines comme celle de Rocca di Papa.
Valle Marciana (pl. 9)
47Dans ces lieux, où la configuration du terrain laisse deviner la présence d’un ancien lac aujourd’hui disparu104, des découvertes, sans doute antérieures, il convient de le noter, aux années 1816-1817, avaient déjà été relevées par Visconti et localisées par lui sur une Vigna dont on ignore l’emplacement exact, mais qui ne paraît pas avoir été très éloignée de la source dite Sorgente Preziosa, la Tepula des Anciens105. Un demi-siècle plus tard, De Rossi identifia, sans en donner toujours la localisation exacte, plusieurs vestiges qu’il interpréta comme des traces d’habitat : ce dernier point mérite d’être souligné, car les découvertes anciennes ont, sur les monts Albains comme ailleurs, mis au jour beaucoup plus de nécropoles que de villages, fait qui n’a pas été sans conséquences du point de vue scientifique, notamment pour la question si débattue de l’emplacement exact d’Albe La Longue. Près de Borghetto, où s’élèvera au Moyen Âge une forteresse destinée à contrôler le passage sur la via Latina, qui devra du reste à cette sollicitude son abandon, De Rossi avait notamment identifié un fragment de paroi de cabane, portant encore l’empreinte d’un pieu de soutènement. Colligeant et résumant ces découvertes, Gierow écrivait en 1964 : « No finds from Valle Marciana are preserved today. It is therefore impossible to say anything of the date of the village and the tombs »106.
48Il se trouve que, depuis la date où ces lignes ont été écrites, des découvertes réalisées en prospection de surface sont venues donner des indications supplémentaires, précieuses même si elles sont fort incomplètes. Par rapport à ce qui était connu, elles permettent, une fois encore, de reculer dans le temps la date d’une présence continue sur le site, comblant là aussi un « vide archéologique » qui n’était finalement qu’une lacune provisoire. C’est ainsi qu’au lieu-dit Colle dell’Asino107, on a pu identifier des tessons attestant une occupation à l’ère apenninique, tandis que d’autres vestiges relèvent du protovillanovien, dont la chronologie exacte est sujette à discussion, mais qu’il semble possible en l’occurrence de fixer au xie siècle108. Reste ouvert, au vu de ces récentes données, le problème d’une présence au subapenninique, c’està-dire vers le xiiie siècle av. J.-C., pour l’instant non ou peu attestée, même si l’exemple d’autres sites109 (Ficana, lac de Gabies, Lavinium et, pour les monts Albains, Rocca Priora) tend à suggérer que, là non plus, la continuité de vie n’a pas été interrompue.
Vigna Capri-Onorati (pl. 9)
49Dans un lieu qui se trouve un peu plus près de Marino que de Grottaferrata, bien qu’il appartienne au territoire de cette dernière commune110, sur une colline, dite Castel de Paolis, qui est elle-même dominée par une hauteur appelée Colle Cimino, fut mise au jour, au tout début du siècle dernier, une tombe isolée à crémation, constituée d’un dolium, retrouvé intact avec à l’intérieur cinq petits vases111. Le matériel ayant disparu depuis, la datation ne peut qu’être hypothétique, sans doute la phase I-II A (xe s.). Tombe isolée ou nécropole ? Sans qu’ils précisent ce sur quoi ils se fondaient, les témoignages contemporains112 de la découverte optent pour la seconde solution.
Vigna dei SS. Apostoli (pl. 9)
50On ne cherchera pas ce toponyme dans le recueil de Gierow, car il s’agit d’une découverte que l’auteur d’Iron Age of Latium a oublié de mentionner : de l’autre côté du Castel de Paolis dont il vient d’être question, au-delà d’une Valle dei Morti, dont le nom, né au xixe s., indique des découvertes anciennes de tombes, le long de la route qui mène à Marino, subsistait encore au début du xxe siècle le vague souvenir de la mise au jour de plusieurs sépultures. Une précision de Tomassetti fixe la date de la trouvaille en 1850 et une description de Pinza garantit qu’il ne s’agit pas seulement d’une tradition orale sans fondement : située le long de la route conduisant vers Marino, la Vigne des Saints Apôtres était aussi appelée Vigne Soldini113. À quel habitat rapporter cette nécropole fantôme ? On peut à vrai dire hésiter entre les hauteurs du Castel de Paolis ou celles qu’occupe l’actuel village de Marino ; on peut aussi penser au Colle Cimino qui n’est guère plus éloigné.
Colle Cimino (pl. 9)
51Il n’est besoin, en effet, que de franchir ladite Valle dei Morti pour se retrouver sur les pentes du Colle Cimino, qui s’élève au sud-ouest du médiéval Castel de Paolis, où Lanciani localisait l’importante villa des Scribonii Libones, que Tomassetti et Ashby ont préféré situer sur le mont Cimino lui-même (Vigna Galassini)114. Au xixe siècle, le topographe O. Richter reconnut sur place les traces d’une muraille qu’il identifia comme celle de Castrimoenium : en réalité, il semble que la cité fortifiée par Sylla115 occupait, selon les analyses convergentes d’Ashby et de Tomassetti, le site actuel de Marino, son forum s’étendant quant à lui sur la colline dite Bel Poggio (qui ne doit sans doute faire qu’un avec la Vigna Settimi et la Vigna Bevilacqua)116. Il faut renoncer dans ces conditions à donner un nom à la hauteur du Colle Cimino : De Rossi y avait pourtant ramassé quelques tessons, qui, dès le xixe siècle, faisaient, fût-ce d’une manière très vague, deviner l’existence en ces lieux d’un antique habitat117. Il y a une trentaine d’années118, de nouvelles trouvailles sont venues, plus d’un siècle après, confirmer et préciser ces premières indications. Il s’agirait de pièces dont les plus anciennes sont d’origine apenninique et protovillanovienne. Si aux ixe et viiie siècles, le lieu était encore occupé, il est possible que la tombe trouvée au Castel de Paolis ait appartenu à la nécropole de ce petit habitat dont le site mériterait assurément d’être fouillé.
Vigna Giusti119 (pl. 9)
52Le long d’une route120 qui de Grottaferrata monte à un lieu dit l’Osteria del Fico, sur un terrain près duquel, durant les xviie et xviiie siècles, avaient été découverts plusieurs de ces beaux marbres qu’on recherchait alors avec une passion exclusive121, des vignerons mirent au jour fortuitement, à partir de 1876, les restes d’une nécropole, qui peut être datée des débuts de la civilisation latiale. Il s’agissait de tombes à puits, le rite pratiqué étant l’incinération. Les conditions des trouvailles furent les mêmes que celles qui avaient prévalu, cinquante ans plus tôt, à Castel Gandolfo122, illustrant la marginalité persistante d’un domaine d’études qui, ballotté comme il l’était entre la géomorphologie et la vulcanologie, la paléontologie et la préhistoire, voire l’histoire classique, allait devoir encore attendre longtemps avant de trouver sa juste place. Quant au propriétaire de la vigne de ce nom, il n’hésita pas à utiliser plusieurs des vases recueillis comme pots de fleurs123.
53C’est ainsi que ne peut être connu avec précision que le mobilier d’une seule tombe124, le matériel restant se trouvant irrémédiablement mélangé. C’est pourtant, comme on le sait, seule la connaissance de la nature exacte des objets contenus dans chaque sépulture, qui permet d’en déterminer la chronologie avec une précision suffisante. Toujours est-il que l’unique tombe connue de manière à peu près satisfaisante contenait une urne-cabane (ceci n’étant sans doute pas étranger à cela) : cette dernière, de forme circulaire et de silhouette légèrement conique, est d’un type qui se retrouve à Rome dans la nécropole du temple d’Antonin et de Faustine, et près de Castel Gandolfo125. Elle présente en outre une particularité sur laquelle nous aurons à revenir : la corniche saillante qui est à la base de son toit est percée circulairement d’une rangée de petits trous126. Il semblerait, d’après les quelques objets en bronze qui furent trouvés avec l’urne-cabane (une fibule127, un anneau, un bracelet, un petit disque de bronze), que l’urne ait renfermé les cendres d’un individu mâle128 ; conservée, comme tout ce qui provient de cette nécropole, au Musée Pigorini de Rome, elle doit sans doute être identifiée avec une urne attribuée naguère par erreur au territoire de Tusculum129. Mais l’élément le plus curieux était l’architecture, si l’on peut dire, de cette tombe et, semble-t-il, de plusieurs autres de cette nécropole : un amas de pierres constituait une manière de voûte à coupole que fermait une dalle de tuf130.
54Un élément nouveau, qui n’est pas dépourvu d’importance, est venu au moment de la publication, par A. Guidi, de la collection Ceselli131 – le « découvreur », avec De Rossi, de la Vigna Giusti –, collection conservée à Subiaco et à laquelle Gierow n’avait pas eu accès132 : on put voir, désormais, que la période IV A, autrement dit l’Orientalisant récent, était représentée sur le site.
55La Vigna Giusti ne saurait être considérée comme une unité topographique autonome : au-delà du carrefour dont elle est voisine, apparut jadis de la « poterie archaïque » (sic), qui ne fut jamais publiée133.
Villa Cavalletti
56En continuant un peu vers Frascati, et en traversant la via Latina, on arrive à une hauteur isolée surplombant cette dernière qui part en direction de Marino et de Rocca di Papa. Du sommet, la vue s’étend au loin, jusqu’à l’embouchure du Tibre et à Rome134. C’est là, au bas de la pente orientale de la colline, que fut découverte, au tout début du xxe siècle, une nécropole qui allait pendant longtemps, jusqu’aux fouilles récentes des années 1970, constituer l’un des gisements archéologiques les plus riches pour les premières périodes de la civilisation latiale. Longuement décrite dans les Notizie degli Scavi par Colini et Mengarelli, minutieusement répertoriée par Pinza, puis, de nouveau, par Gierow135, elle doit à cette entrée dans ces « corpus » d’être souvent citée et utilisée dans tous les travaux concernant non seulement les monts Albains mais, plus généralement, la Rome des primordia. Dès le début, en effet, on remarqua les affinités qui unissent le matériel de cette nécropole avec celui de la nécropole romaine du temple d’Antonin et de Faustine, que Boni découvrait au même moment (à tel point que cette dernière est publiée dans le même numéro des Notizie) sur le Forum. On a donc affaire à l’un des rares sites albains qui soient pourvus, du point de vue de la taxinomie archéologique, d’une véritable valeur de paradigme : la conséquence en a été qu’il a joué d’abord un rôle-clef dans l’élaboration initiale des séquences chronologiques qu’on distinguait dans le déroulement de la civilisation latiale, et qu’il a servi, en retour, de pierre de touche, à l’aune de laquelle ont été évaluées et datées les nouvelles découvertes136.
57Il est vrai qu’aujourd’hui, la fouille et la publication de la nécropole, qui lui est contemporaine, de l’Osteria dell’Osa, ont, d’une certaine manière, mis fin à cette situation : la quantité comme la qualité des données mises au jour autour du lac de Gabies renouvellent décisivement la connaissance de périodes qui n’étaient étudiées jusqu’ici qu’à partir d’un très petit nombre de sites, où la Villa Cavalletti, précisément, occupait une grande place. En remettant ainsi en question ce qu’on supposait bien établi, les résultats des recherches faites à l’Osteria dell’Osa invitent à s’interroger sur les conditions réelles dans lesquelles s’était élaboré un savoir, vite transformé en vulgate, et désormais en partie obsolète. Or, cet examen n’est pas sans réserver quelques surprises. Présentant le matériel recueilli sur le site, Gierow écrivait ainsi : « The necropolis of Villa Cavalletti is one of the Iron Age cemeteries of the Alban Hills that has given us the greatest quantity of material. The circumstances at the discovery were also more favourable than usual », ajoutant que « the material from Villa Cavalletti is therefore one of the most valuable sources for our knowledge of the Iron Age of Latium »137.
58Pour nous, qui avions en mémoire les plaintes amères exprimées par Pinza138 à propos des conditions dans lesquelles furent menées – la compétence et la diligence de Colini et de Mengarelli n’étant nullement en cause – les fouilles à la Villa Cavalletti, ce bulletin de victoire prenait les allures d’une énigme. Qu’en était-il exactement ?
59Pour trancher, entre le désenchantement de Pinza et la satisfaction de Gierow (et de ceux qui l’ont suivi), il faut évidemment se référer au rapport détaillé des Notizie. On y voit d’abord que, même en ce début du xxe siècle, le schéma de découverte reste à peu près le même que celui qui avait prévalu, presque un siècle plus tôt, pour les premières trouvailles de Visconti : c’est un « scassato », autrement dit un bêchage profond effectué afin de préparer la plantation de nouveaux ceps de vigne, qui fit émerger du sol les premiers vases et tessons. On y voit également que les cultures antérieures, faites plus en surface, n’avaient pas atteint la couche archéologique. De plus, à la Villa Cavalletti, comme à Castel Gandolfo et comme presque partout ailleurs, les archéologues professionnels arrivent après la bataille139. Ainsi, cent ans après, ou peu s’en faut, les polémiques et les obscurités de toutes sortes qui avaient entouré l’apparition des premières urnes-cabanes albaines, les leçons de tant de déconvenues n’avaient été que très imparfaitement tirées140. Au moins connaissait-on – et c’était déjà beaucoup –, cette fois-ci, le lieu exact où se situait la nécropole. Mais pour le reste, on hésite à considérer comme une fouille véritable ce qui fut plutôt, pour paraphraser une expression qui revient souvent dans les publications de l’époque, « un travail agricole conduit sous la surveillance [toute relative, faudrait-il ajouter, car exercée, en très grande partie, a posteriori] des autorités compétentes ». Tout au moins pourrait-on penser, à en juger par les travaux plus récents où elle est citée et utilisée, que la Villa Cavalletti avait livré une dizaine de tombes exactement inventoriées, puisque tel est le chiffre qui revient la plupart du temps, quoique avec des variations qui ne laissent pas d’être curieuses : le catalogue de la désormais mémorable exposition « Civiltà del Lazio Primitivo » faisait état de « sept tombes intactes », Gierow, semble-t-il, en comptait dix, d’autres spécialistes réduisant ce nombre à neuf141.
60La réalité est plus décevante, et plus surprenante... : on ne connaît exactement, sur le site de la Villa Cavalletti, que le mobilier d’une seule tombe. Le témoignage des « fouilleurs » (le terme est, on peut l’affirmer maintenant, impropre) est en effet très clair à cet égard. Ils déclarent (o.c., p. 136) avoir eu « la fortuna di assistere alla scoperta di tre tombe relativamente in buona condizione », précisant néanmoins que « due soltanto si poterono osservare con qualche diligenza ». Dans le détail, on s’aperçoit que, de ces trois tombes, la première est sans doute incomplète : « E probabile che parte della suppellettile siasi guastata o estratta già durante i lavori dello scassato » (ib.)... ; la seconde, effectivement, fut retrouvée intacte et décrite minutieusement (ib., p. 137-139) ; quant à la troisième, Colini et Mengarelli prennent soin de préciser qu’elle ne fut fouillée que partiellement : « Non fu possibile condurvi uno scavo sistematico » (p. 139)142. Ensuite, outre ces trois tombes, qui n’en font donc qu’une, les éditeurs de la Villa Cavalletti en mentionnent trois autres, explorées avant leur arrivée, et pour lesquelles ils sont contraints de se fonder sur le témoignage de ceux qui les avaient trouvées : on voit à ce propos qu’ils multiplient les formules de précaution, voire de réserve143. Enfin, ils ajoutent à ces six tombes quatre autres sépultures, dont le mobilier avait été déposé, avant leur arrivée, dans la Villa Cavalletti : à ce propos, ils soulignent que, même s’il était probablement (mais non sûrement) complet, ce matériel avait été mélangé, perdant par là beaucoup de son intérêt scientifique144.
61Voilà donc la véritable identité d’un site considéré pourtant comme exemplaire et utilisé comme tel. La petite « déconstruction » que nous venons d’effectuer n’aurait pas d’intérêt si elle ne montrait la faiblesse de modèles théoriques qui, pour nécessaires qu’ils soient sans doute, reposent trop souvent sur des bases dont on oublie la fragilité. Le cas de cette nécropole – longtemps l’une des plus importantes, répétons-le, pour la connaissance des deux premières phases de la civilisation latiale, non seulement dans les monts Albains mais dans l’ensemble du Latium – est d’autant plus révélateur que l’opération critique de délimitation et de définition de chacune des périodes en question a reposé, à chaque fois, sur un nombre très restreint de tombes, quarante à cinquante au maximum145, et dans un cas une dizaine seulement... : or, à elle seule, la Villa Cavalletti semblait en fournir une dizaine. Vérification faite, on a vu qu’il faut diviser par dix cette estimation. Le plus curieux dans tout cela n’est pas qu’il faille corriger une donnée auparavant tenue pour certaine, car c’est là, après tout, le lot commun de tout domaine scientifique, mais bien que ce résultat révisé avait déjà été formulé explicitement par Pinza146 dès 1905 : cela n’a cependant empêché ni les affirmations inexactes ni les généralisations conséquemment abusives, tant est forte l’exigence de classification qui est celle de l’archéologie. Exigence légitime, mais qui doit constamment, cet exemple le montre s’il en était besoin, s’accompagner de réajustements, voire de remises en question plus radicales.
62On ne s’étonnera pas, dans ces conditions, que le matériel découvert à la Villa Cavalletti ait fait l’objet d’évaluations qui ont évolué depuis trente ans : datée d’abord des périodes I et II A, et décrite comme abandonnée après, la nécropole serait aujourd’hui considérée comme ayant été encore en usage durant la phase II B, soit, pensait-on hier, le début du viiie siècle, et maintenant le milieu du ixe147. Si toutes les tombes sont à incinération, certaines se distinguent, sans qu’on sache très bien à quels critères obéissait le rituel, par la présence d’une urne-cabane. C’est le cas notamment des tombes 8, 9 et 10, datables toutes les trois, il convient de le souligner, à la première phase latiale, c’est-à-dire aux xie-xe siècles148. Parmi celles-ci, la tombe 8 occupe une place particulière149, ce qui se traduisait sans doute dans sa disposition spatiale par rapport aux autres tombes, ce qu’on appelle la « stratigraphie horizontale », qu’on ne peut plus, en l’occurrence, que supposer, les fouilleurs de 1902 s’étant seulement préoccupés de recueillir des vases, en négligeant totalement toute précision topographique. Sur la paroi gauche de l’urne-cabane de cette tombe 8, un fin liséré suggère la présence d’une fenêtre, tandis que la corniche du toit est percée d’une ligne de petits trous150. L’urne contenait les restes d’un individu âgé de plus de vingt-cinq ans, et était accompagnée de petits objets, dont plusieurs assez inhabituels : trois fusaïoles, trois fibules, plusieurs anneaux de bronze et un d’or, des perles d’ambre et de verre (qu’on ne retrouve ailleurs à cette date qu’au Forum Romain), une statuette de terre-cuite. On notera que, de ces objets, les uns caractérisent ordinairement une tombe comme celle d’un individu mâle, tandis que les autres appartiennent au mundus muliebris. Pour les deux autres urnes-cabanes complètes qu’a livrées la Villa Cavalletti, on remarque que l’une (la tombe 10) contenait les restes d’un enfant de six à huit ans. S’ajoutent à ces urnes-cabanes complètes, cinq spécimens fragmentaires, dont l’un est pourvu d’une porte ornée, paraît-il151, de deux svatiskas, et dont l’autre, qui contenait les restes d’un enfant d’une dizaine d’années, a la base du toit percée de trous. À côté de ces urnes-cabanes, on peut remarquer la présence d’un type d’urne mixte, si on peut dire, constitué d’un vase normal pourvu d’un couvercle en forme de toit de cabane. Malgré certaines affirmations, il semble bien qu’il s’agisse là, au moins à la Villa Cavalletti, d’un usage postérieur à celui des urnes-cabanes proprement dites : le rite est conservé, mais simplifié152. Pour le reste, ces urnes-cabanes étaient accompagnées d’objets miniaturisés (lances, rasoirs), parmi lesquels cinq petits disques de bronze, ornés de quatre cercles de points au repoussé, selon un modèle dont un exemplaire figurait aussi à la Vigna Giusti, et qu’on interprétait jadis comme la reproduction de bullae153 : selon Giovanni Colonna154, il s’agirait plutôt de boucliers ronds servant deux par deux à former les fameux boucliers bilobés des saliens (mais rien n’assure ici que ces petits disques aient été appariés), collège sacerdotal à propos duquel la tradition établit un rapport avec le contexte albain155.
63Au total, la nécropole de la Villa Cavalletti n’a livré qu’un nombre très restreint d’objets de bronze, ce dont on n’a pas manqué, naguère, de tirer d’importantes conclusions156 pour la définition des premières périodes de la civilisation latiale, dont elle a longtemps été l’une des meilleures illustrations. Si louable soit-elle, la volonté de se limiter à ce qui est parvenu à la connaissance de l’archéologie « officielle » peut se révéler en l’occurrence bien périlleuse, lorsqu’on songe qu’aux yeux de Colini et de Mengarelli, cette particularité s’expliquait plus prosaïquement par des vols commis avant leur arrivée157.
64Cette incomplétude est aussi le lot de l’ensemble du site : il ne faut pas oublier, en effet, que la nécropole de la Villa Cavalletti, qui a livré un matériel venant, selon toute probabilité, d’une trentaine de tombes, n’a pas été fouillée complètement158. Quant à l’habitat dont elle dépendait et qui n’est sans doute autre que la Villa Cavalletti elle-même159, située à 150 m, il n’a pas, semble-t-il, été fouillé du tout. C’est dire que ce site des monts Albains est probablement l’un de ceux dont l’exploration systématique pourrait être reprise, avec les meilleures chances de succès.
Boschetto (pl. 9)
65En redescendant de la Villa Cavalletti vers Marino, suivant une route qui est sans doute antique160, on arrive au Ponte Squarciarelli, non loin duquel se trouvent des sources importantes traditionnellement identifiées comme étant celles de l’aqua Iulia161 : c’est là, le long d’une route dont le point de départ est sur la Latina et qui, selon Lanciani, correspond donc au deuerticulum mentionné par Frontin162, que fut, au tout début du xxe s., mise au jour par des ouvriers carriers travaillant à l’exploitation d’une veine de basalte, une tombe isolée, qui ne l’était peut-être pas à l’origine163. Elle se trouvait au pied de la hauteur longtemps dite Le Capanne et à laquelle le nom de Poggio Tulliano a été donné lorsqu’on a cru, sans doute à tort, devoir y localiser la villa de Cicéron164, au bord d’un versant qui domine un profond vallonnement. Importante, cette tombe l’est moins par son mobilier (une jarre servant d’ossuaire et six petits vases) que par le fait qu’elle est à l’origine d’une classification archéologique proposée par l’école suédoise à la suite de G. Säflund165 : il s’agit du « groupe de Boschetto », dont les traces se retrouvent notamment à Marino (San Rocco et Vigna Delsette) et Rocca di Papa (San Lorenzo Vecchio). Mettant en relief les particularités typologiques qu’offre cette tombe, dont les vases sont décorés de lignes finement incisées, les successeurs de Säflund, Gjerstad et Gierow, ont considéré qu’elle représentait un véritable courant « culturel » actif durant une grande partie de l’âge du Fer : c’est ainsi que Gierow la date de la période II, qui correspond pour lui au viiie siècle. Or, c’est d’au moins deux siècles, à en juger par les analyses convergentes des spécialistes actuels (Peroni, Müller-Karpe et Bietti Sestieri)166, qu’il convient de remonter la chronologie des vases de Boschetto, qui doivent être placés au début (phase I) de la civilisation latiale. La spécificité typologique de ce matériel n’est donc pas niée ; les analyses récentes donnant même du groupe de Boschetto une définition élargie par rapport à Gierow167 – mais elle est interprétée essentiellement sur une base chronologique.
66Du point de vue topographique, on peut ne pas exclure qu’il s’agisse là d’une tombe isolée, puisque le phénomène est connu et se retrouve par exemple à San Lorenzo Vecchio168. Les conditions de la découverte, cependant, tout comme les particularités du lieu, s’accommoderaient peut-être mieux de l’hypothèse d’une nécropole dépendant d’un habitat, qui pourrait être localisé, soit sur le plateau surplombant des Capanne, soit sur les hauteurs toutes proches occupées par la Villa Schiboni et l’abbaye de Grottaferrata elle-même169. Mentionnant ensemble les découvertes faites tant à la Vigna Giusti qu’au Casale del Fico, à la Villa Cavalletti et à Boschetto, Ashby, suivi par Tomassetti170, les rapportait toutes à un seul et unique habitat, qu’il situait à l’emplacement de la Villa Cavalletti. Cette hypothèse n’était pas celle des archéologues des Notizie degli Scavi qui, à chaque fois, avaient préféré supposer plusieurs petits centres, distincts et indépendants les uns des autres171. C’est ce schéma d’un habitat « éclaté » qui, pour le territoire de Grottaferrata durant les débuts de la civilisation latiale, prévaut aujourd’hui172, et cela, croyons-nous, à juste raison. Si nous rappelons pourtant l’interprétation d’Ashby, c’est parce qu’elle illustre bien un type de raisonnement qu’il a appliqué, de la même façon, pour la lecture des vestiges archéologiques mis au jour sur l’autre versant du lac Albain, lorsqu’il les a référés tous à un centre unitaire qu’il a placé, comme on sait, à Castel Gandolfo, identifié par lui avec le site d’Albe La Longue173. Assurément, on échappe, dans le cas de Grottaferrata, à la pesanteur d’une tradition littéraire qui, de l’autre côté du lac, vient brouiller, plus qu’elle ne les clarifie, les données archéologiques, alors que l’incongruité du modèle d’un centre unique est ici plus facilement visible. On peut admettre, cela dit, que parmi ces villages ou hameaux, l’un d’entre eux, qui pourrait être l’habitat (hypothétique) de la Villa Cavalletti, ait joué, ou commencé à jouer, un rôle plus important que les autres, mais c’est là, on nous permettra de le souligner, une interprétation qui n’est nullement réductible à celle que nous évoquions pour la récuser. En tout cas, on peut, avec Colini et Mengarelli, souligner l’un des enseignements essentiels apportés par la nécropole de la Villa Cavalletti : révélées un an après la publication de l’article d’Ashby sur Alba Longa, ces découvertes faisaient clairement apparaître l’existence, sur le rivage septentrional du lac Albain, d’un troisième pôle de peuplement, qui venait s’ajouter à ceux déjà connus de Marino et de Castel Gandolfo. On n’a pas assez remarqué qu’à eux seuls ils modifiaient substantiellement la donne à laquelle s’était fié Ashby pour formuler son interprétation et sa localisation d’Albe à Castel Gandolfo.
67Autre enseignement, et non des moindres nous semble-t-il, livré par les vestiges épars sur la commune de Grottaferrata : ils montrent, si besoin était, l’inadéquation du modèle déterministe ou évolutionniste pour l’intelligence du devenir historique. Même s’il était un peu plus important que ceux qui lui étaient voisins, le village de la Villa Cavalletti (à supposer, répétons-le, qu’il ait existé) n’est apparemment pas devenu un centre urbain dominant à l’époque archaïque ; bien plus, c’est même l’ensemble du territoire de Grottaferrata qui semble manquer d’un tel point de gravité. Bref, la preuve est faite que tout ensemble de villages, si proches soient-ils les uns des autres, ne devient pas ipso facto une ville : pour que cette évolution, ou plutôt cette mutation décisive ait lieu, il y faut d’autres facteurs, d’autres adjuvants. C’est donc toute la problématique actuelle de ce qu’on appelle le proto-urbain qu’il faudrait prendre en considération ici, et c’est ce que nous ferons dans notre chapitre consacré à la localisation d’Albe (p. 445 et s.)
68Autour de Boschetto, la contrée était habitée depuis fort longtemps : c’est ainsi que, non loin d’une source, fut trouvée en septembre 1902, à l’emplacement de la Vigna Schiboni, anciennement Villa Cavallini, une tombe datant de l’énéolithique174, absente, comme il se doit, du recueil de Gierow, qui ne concerne que l’âge du Fer ; elle mérite pourtant d’être signalée, par ce qu’elle révèle de possibles continuités.
Colle delle Streghe (pl. 9)
69En continuant sur la route qui va de Grottaferrata à Rocca di Papa, avant de conduire au sommet du Monte Cavo, se rencontre après le carrefour du Ponte degli Squarciarelli une bifurcation qui mène à une hauteur dite Colle delle Streghe : c’est là, à deux kilomètres à l’est de Grottaferrata, et à proximité des deux importants points d’eau qu’étaient les sources de Squarciarelli d’une part (sans doute anciennement celles de l’aqua Iulia)175 et celles de l’acqua Algidiosa d’autre part, que furent fortuitement mis au jour, en 1914, une dizaine de vases « latiaux ». Considéré par son premier éditeur176 comme hétérogène et mélangé, ce matériel, disparu depuis, pourrait, selon Gierow177, n’appartenir qu’à une seule tombe archaïque, datable alors de la période IV. Le fait que ces vases gisaient à la même profondeur178 qu’un segment de route antique le long duquel ils furent trouvés pourrait suggérer qu’ils lui étaient contemporains179. Dans ce cas, n’aurait-on pas ici un de ces exemples, connus depuis peu180, de route aménagée dès l’Orientalisant ? Toujours est-il que l’orientation de cette route correspondrait bien à une liaison Tusculum-Grottaferrata.
70Sur le site mitoyen, dit Tor delle Streghe, a été identifié, depuis 1977, un tesson remontant au protovillanovien181, qui vient, une nouvelle fois, élargir décisivement l’horizon chronologique des présences attestées sur les monts Albains.
Varia
71On ne peut quitter le territoire de Grottaferrata sans faire au moins allusion aux collections du musée de l’abbaye182 : les poteries qui y sont conservées, et qui passent pour avoir été recueillies dans les parages, sont malheureusement dépourvues de toute indication précise de provenance. Même s’il faut sans doute mettre à part le cas de deux ou trois pièces qui appartiennent très probablement à d’autres contextes géographiques et culturels, cet ensemble anonyme semble illustrer néanmoins une continuité et une relative vitalité pour l’histoire de cette partie des monts Albains, et cela jusqu’à la fin de l’ère archaïque183.
MARINO (pl. 9)
72À vingt-quatre kilomètres de Rome, et à 375 m d’altitude, dominant d’un côté le lacus Albanus, de l’autre les contreforts du massif et la plaine, Marino doit à sa solide position d’avoir joué un rôle important dans l’histoire médiévale de la région184. Siège d’une puissante forteresse, elle fut durant tout « l’età di mezzo », et jusqu’à la destruction de 1501, un fief envié, âprement disputé entre la Papauté et une aristocratie toujours plus ou moins rebelle à la limitation de ses prérogatives temporelles. C’est sur son territoire, abondant non seulement en eaux et forêts mais aussi en carrières, et renommé pour la qualité de ses vins185, qu’il faut rechercher le site de l’antique Castrimoenium, fortifiée, si ce n’est fondée par Sylla186 : il semblerait que le forum de la cité ait été situé, non sur le Colle Cimino comme on le dit parfois187, mais sur la hauteur voisine dite Bel Poggio, au nord-est du village actuel, à moins qu’il ne doive être placé plus à l’ouest, sur l’étendue appelée Castagnana (ou Costagnagni)188. Quant à la ville elle-même, son emplacement ne serait autre que l’éminence réoccupée par le village médiéval et moderne, selon le schéma de ces récurrences topographiques que nous avons déjà vu se manifester souvent dans la région189. Si l’acropole médiévale n’a livré, semble-t-il, aucun vestige protohistorique ou archaïque, ce que la succession des constructions et destructions dont elle fut l’objet peut suffire à expliquer, il n’en va pas de même pour le reste du territoire de Marino, qui est, incontestablement, dans les monts Albains, l’une des contrées les plus riches, sinon la plus riche en présences archéologiques appartenant à la civilisation latiale. Sur un sol dont la « fertilité archéologique »190 est depuis longtemps, depuis le xvie siècle au moins, connue et mise à profit, ont surgi, au hasard des trouvailles et des fouilles, plusieurs sites « primordiaux », qui, là comme ailleurs, n’ont été la plupart du temps que très insuffisamment explorés. Ces dernières années, des prospections systématiques de surface ont été menées par M. Angle qui doit les publier sous peu.
Frattocchie (pl. 9)
73À son onzième mille, la via Appia est croisée par une route, appelée aujourd’hui via Cavona, qui, longeant la bordure nord-occidentale du massif albain, provient de Tibur et va aboutir ensuite à Anzio. Au seul vu de la carte, il y a toutes raisons de penser que ce carrefour a marqué, dès les premières phases de la civilisation latiale, une étape importante pour un itinéraire qui reliait directement la montagneuse Sabine à la mer191. Par ailleurs, il est fort possible que l’auberge où fut transporté Clodius blessé par Birria – in tabernam proximam Bovillano –192avant d’y être achevé sur ordre de Milon, ne soit autre que celle qui a constitué le noyau de la bourgade médiévale des Frattocchie, née d’abord à l’ombre des ruines nombreuses qui parsemaient en ces lieux les abords de la « reine des routes »193. Pourtant, au regard de cette histoire ancienne et mouvementée, les vestiges archéologiques ont longtemps pu sembler insignifiants. Sous la rubrique « Frattocchie », Gierow194 ne cite, en effet, qu’un vase et un fragment de bronze mentionnés sans plus de précision par De Rossi en 1868. Il le place un peu au sud du village actuel, ce qui, vu l’ordre topographique que semble suivre De Rossi dans son énumération, semble possible, même si cela n’est pas certain195. Si isolée fût-elle, cette découverte prouvait en tout cas que le centre impérial de Bovillae avait eu – mais où exactement ? – un prédécesseur dès l’époque protohistorique : nous verrons que depuis 1964, des nouveautés (qui n’en sont pas à vrai dire) sont venues étayer cette déduction.
Vigna Batocchi (pl. 9)
74Sur cette vigne dont, comme souvent, on ne connaît pas l’emplacement, Lanciani196 avait assisté « en passant » à la découverte « inconsciente » (sic) d’une tombe (ce qui a dû aussi arriver souvent...) pourvue d’un riche mobilier et de nombreux bijoux : ces caractéristiques l’ont fait attribuer à l’époque archaïque (per. IV, soit l’Orientalisant récent), ce qui ne peut être vérifié, le mobilier ayant disparu (« of course », note Gierow avec une lucidité désabusée)197. L’auteur d’Iron Age of Latium la situe près du Colle Oliva, c’est-à-dire aux Selve Nuove, mais Lanciani ne mentionnant pas cette hauteur, une localisation aux Selve Vecchie, un peu plus au sud, nous semble tout aussi plausible, d’autant qu’on se rapprocherait dans ce cas des découvertes faites au Castel de Paolis (cf. supra p. 213) ou à Campofattore (cf. infra p. 232)198. Il n’est pas sans intérêt, nous semble-t-il, de relever que le site fut intégré par Pinza aux découvertes faites à partir de 1816/1817 à Castel Gandolfo, ce qui ne saurait être accepté, comme le souligne Gierow199.
Casale Liscia (pl. 9)
75C’est à Giovanni M. De Rossi que revient la publication d’une très importante découverte également due à Lanciani, demeurée longtemps inédite, et absente, par conséquent, du recueil de Gierow. Au pied du Monte Crescenzio, entre les Frattocchie et le site probable de Castrimoenium, les notes manuscrites de Lanciani ont gardé le souvenir d’un site d’habitat : « I fabbricati [il s’agissait de restes romains] dall’uno e l’altro lato della strada lapidea riposano in parte su roccia vulcanica sulla superficie della quale traccie di capanne rette da pali, con focolari e pozzetti funebri, esattamente come al Palatino »200. Comme l’écrit l’auteur de Bovillae : « Non può sfuggire l’estrema importanza di questo rinvenimento (le cui testimonianze non sono ora più individuabili a causa delle recenti intense trasformazioni della zona), specie in relazione al fatto che nelle immediate vicinanze vennero effettuate, nel secolo scorso, le scoperte del sepolcreto di Campofattore ». En outre, plusieurs tombes à puits furent mises au jour non loin de là en 1908, mais non publiées201. L’identification, grâce à l’acribie de Lanciani, d’un tel habitat était d’autant plus précieuse que, la plupart du temps, ce type de vestiges a été détruit sans avoir même été identifié. Pour sa part, G. M. De Rossi n’a pas hésité à voir dans ces fonds de cabanes la trace de l’habitat protohistorique de Bovillae ; il est certain que cette découverte redonne crédit à la vieille hypothèse de Canina, qui voulait que la cité républicaine se fût étendue non seulement à droite, mais aussi à gauche de l’Appia. Il convient seulement d’amender cette suggestion, dans la mesure où il s’agirait non pas d’un développement ultérieur, mais bien de l’emplacement premier de l’habitat. Il ne serait pas étonnant, en effet, que la cité, si cité il y eut (ce qui n’est pas sûr), ait pu finalement se déplacer et céder à la force d’attraction de l’Appia et de son trafic incessant202 : le site de Gabies offre un bon exemple d’une telle évolution (voir CLP, p. 187, L. Quilici). En tout état de cause, l’importance des fonds de cabanes du Casale Liscia ne saurait être sous-estimée, à partir du moment où, en 1980 (A. Bedini et F. Cordano, in DdA, p. 98) encore, la doctrine régnante était que « sui colli Albani non si possono individuare né centri abitati né necropoli ad essi riferentesi » dans le cadre de la période latiale III, qui correspond comme on sait à la fin du ixe et au viiie s. av. J.-C.
Campofattore (pl. 9)
76Il semble en tout cas difficile de ne pas mettre en relation l’habitat de Casale Liscia et la nécropole, entrevue plus que fouillée, au xixe siècle, à Campofattore, dans la mesure où il s’agit de deux lieux quasiment contigus203. La plaine dite Campofattore, qui domine une vallée où coule le cours d’eau identifié à tort au xixe siècle avec le caput aquae Ferentinae, s’étend au pied du Monte Crescenzio. C’est là qu’en 1871, M. S. De Rossi découvrit, ou plutôt identifia, deux tombes auxquelles vint, quelques années plus tard, s’ajouter une troisième, dont le matériel, sans doute incomplet (à moins qu’il ne s’agisse d’objets appartenant à plusieurs tombes), fut racheté en 1878 par L. Nardoni. Il faut souligner, après De Rossi dont le témoignage est, à cet égard, éloquent, que ces tombes n’étaient nullement isolées, mais qu’elles appartenaient à une nécropole déjà dévastée au moment de leur découverte204.
77On peut dire que, par le contenant comme par le contenu, les deux tombes révélées au monde savant par De Rossi devinrent tout de suite célèbres : extérieurement, les objets qu’elles recelaient étaient en effet protégés par un véritable caisson circulaire de pierres, dont le couvercle légèrement conique affleurait sans doute, originellement, à la surface du sol205. Le plus grand de ces « caissons » (les archéologues italiens parlent de tombe « a cassettone ») renfermait une urne-cabane reposant elle-même sur un fond aplani de petites pierres. Dès leur publication, ces deux dispositifs, auxquels De Rossi n’hésita pas à donner le nom de dolmen, suscitèrent force commentaires et discussions : on débattit longuement, et sans doute un peu inutilement206, pour savoir s’il fallait ou non considérer l’agencement particulier des trouvailles de Campofattore comme la signature archéologique de ces mystérieux incinérateurs venus du Nord dont, au même moment, Pigorini retraçait l’histoire, une histoire passée aujourd’hui du côté du roman207.
78Plus intéressante pour notre propos, nous paraît une remarque faite par De Rossi208 (et négligée par Gierow), selon laquelle d’autres sépultures du même type auraient été trouvées dès 1817. À l’intérieur du plus grand de ces caissons fut trouvée, disposée de manière à ce que sa porte fût tournée vers l’Orient, une urne-cabane pourvue d’une espèce de portique à colonnes dégagées et torsadées : bien que, contrairement à ce qu’on a pu écrire récemment, De Rossi ne fût pas le premier à évoquer à propos de ce type d’objets la « cabane de Romulus », Ampère l’ayant déjà fait avant lui209, la perfection esthétique de l’exemplaire de Campofattore lui valut d’être aussitôt reproduit210 et popularisa définitivement cette comparaison. Après De Rossi, Sir A. Evans se plut également à évoquer le temple de Vesta211, ce qui conduisait du reste à une interprétation de type religieux qui pouvait se révéler sensiblement différente de la première, plus « laïque » quant à elle. Alors que Gierow datait cette urne-cabane et la sépulture mitoyenne de sa troisième période, et plaçait le matériel récupéré par Nardoni en 1878 dans sa première période, la chronologie établie aujourd’hui invite à inverser ces conclusions : l’urne-cabane et le matériel y afférent sont placés dans la période latiale I et datés du xe siècle avant notre ère212 ; ces deux tombes si proches l’une de l’autre (30 cm les séparent) n’en forment d’ailleurs peut-être qu’une, le second caisson, plus petit, ne renfermant pas, au moins dans l’état où il fut retrouvé et recomposé par De Rossi, d’ossuaire mais seulement du matériel d’accompagnement (vase et tasses). Quant à la troisième tombe, elle a livré, outre des vases « à filet », un couvercle en toit de cabane : rien n’oblige, nous semble-t-il, à la considérer comme strictement contemporaine des deux précédentes213, et tout invite, au contraire, à la placer dans la période II A, ce qui augmenterait d’autant la durée d’existence214 d’un habitat et d’une nécropole qui restent en très grande partie, il ne faut pas l’oublier, fantomatiques, car irrémédiablement détruits215.
MONTE CRESCENZIO216 (pl. 9)
79À l’ouest de Marino, et non loin du lac, s’élève une ample hauteur tournée vers l’Appia et dont le nom pérennise peut-être celui d’un Grec de l’Empire qui y eut sa sépulture217, à moins qu’il ne soit dû à la puissante famille des Crescenzii, présente dans toute la contrée à l’époque médiévale218. Un peu partout au bas des pentes de ce mont, furent mis au jour, tout au long du xixe siècle, des « vases funéraires albains » : il semble que cette série de découvertes ait commencé dès 1816. On n’est pas loin, assurément, du Casale Liscia, ni de Campofattore, dont Pinza décrit même la situation en précisant qu’il se situe « à l’extrême pente du Monte Crescenzio »219 ; et nous avons vu que l’habitat entrevu (cf. supra p. 231) par Lanciani doit très probablement être mis en relation, d’une manière ou d’une autre, et selon des modalités qui nous échappent en grande partie, avec ce Monte Crescenzio. En d’autres termes, il est sans aucun doute erroné de rapporter, comme l’ont fait pourtant Visconti et Ashby, les nombreuses trouvailles faites sur les pentes du Monte Crescenzio à l’acropole de Castel Gandolfo, dominant quant à elle un autre versant du lac. Ces conclusions sont d’ailleurs très exactement celles que formule F. Arietti dans une étude220 qui met bien en lumière l’importance stratégique du Monte Crescenzio, dominant à la fois, à l’ouest, le site de Bovillae, et, de son versant oriental, ceux de Squarciarelli et de la vallée de Marino.
Vigna Meluzzi (pl. 9)
80Située au bas de la pente nord-orientale du Monte Crescenzio, le long de la route qui relie le carrefour des Due Santi, sur l’Appia, à Marino, cette vigne fut, à partir de 1864, le lieu de quelques découvertes intermittentes221 (1866, 1867 et 1868). Or, dans l’histoire de l’archéologie albaine, elle a une importance qu’on ne soupçonnerait assurément pas, au seul vu des quelques vases qui y furent recueillis par De Rossi. De quoi s’agit-il en effet ? D’un épisode, que Gierow passe sous silence, mais qui mérite, nous semble-t-il, d’être signalé et souligné. Car c’est là que le déjà illustre Schliemann vint, à l’automne 1875, auréolé par le succès de sa première campagne de fouilles à Hissarlik, pour creuser le sol albain à la recherche de la métropole mythique des Latins222. Sans doute celui qui lui avait demandé de faire ce sondage et qui n’était autre que le directeur des Beaux-arts du tout nouveau royaume d’Italie, Giovanni Fiorelli, espérait-il, lui qui avait pendant vingt ans œuvré à l’exploration de Pompéi, que Schliemann saurait, tel un magicien, faire surgir du sol italien une nouvelle Troie. La légende n’établissaitelle pas un lien explicite entre Troie et Albe, faisant même de la seconde la réplique de la première ? Officiellement, en tout cas, il espérait une nouvelle Pompéi : Schliemann avait pour mission de vérifier la validité des thèses de De Rossi, qui suscitaient alors l’opposition déclarée et violente223 de quelques contradicteurs éminents, dont Pigorini. Schliemann, n’ayant trouvé ni une autre Pompéi ni une autre Troie – et pour cause –, ne s’attarda pas et repartit pour d’autres horizons224.
81On peut se demander néanmoins pourquoi il avait choisi d’explorer, de préférence à tout autre, le site de la Vigna Meluzzi. Pour le comprendre, il convient de replacer cet épisode dans la chronologie relative de l’histoire de l’archéologie albaine : on s’aperçoit alors que le choix de Schliemann (qui lui avait été suggéré par De Rossi lui-même, comme l’indique ce dernier in BPI, 1, 1875, p. 189) ne devait rien au hasard. On n’oubliera pas qu’en cette année 1875, les découvertes de la Villa Cavalletti comme celles de la Riserva del Truglio, autrement dit deux des sites archéologiques majeurs de tout le massif albain, étaient encore à venir. Certes, Schliemann eût pu décider de faire creuser une tranchée près de la Villa Torlonia de Castel Gandolfo, là même où une partie des premières découvertes avait été faite en 1817 : on pouvait aisément penser, cependant, que le terrain, fouillé en tous sens depuis cette date, ne donnerait pas là grand-chose de nouveau. Or la zone du Monte Crescenzio apparaissait alors comme l’une des plus prometteuses archéologiquement de toute la contrée, les découvertes ne cessant de s’y multiplier, suivant un rythme dont – il ne faut pas l’oublier – les comptes rendus écrits ne donnent qu’une image affaiblie225. De plus, c’est au pied de cette hauteur qu’avait été effectuée, en 1817, la fouille officielle de Carnevali, avec un résultat positif. En choisissant donc d’ouvrir un sondage au bas de ce même Monte Crescenzio, mais sur un autre versant, de manière à ne pas refaire ce qui avait été fait, Schliemann pouvait donc être en droit de penser qu’il mettait les meilleures chances de son côté. On peut remarquer que sa fouille, située intellectuellement au carrefour des problématiques pompéienne et troyenne, se plaçait sur le terrain à peu près à mi-chemin entre deux pôles de découvertes archéologiques : celui des années 1816-1817 (Castel Gandolfo) et celui que les recherches menées par De Rossi avaient mis en lumière autour du Ponte Squarciarelli et du Capo d’Acqua, où, pour sa part, ce savant proposait de reconnaître le site d’Albe226. Excluant de son côté ces hypothèses, Schliemann, qui ne renonçait nullement au concept du site unique, se déclara en faveur d’Albano227, une proposition de localisation qu’ont illustrée de nos jours les travaux de P. Chiarucci et d’A. Carandini228.
82De tout cela, il n’est resté que le matériel, probablement non complet, et dont une grande partie est aujourd’hui perdue, de trois tombes à incinération, les deux premières révélées en 1864 et 1866, la troisième reconstituée par Pinza à partir de notes laissées par De Rossi (elles aussi perdues)229. Il nous semble que les vases que Meluzzi montra à Schliemann provenaient des fouilles de 1867 et 1868, dont les résultats ne sont pas autrement connus230. En tout cas, l’un des principaux apports de ces trouvailles est que deux des tombes qu’elles ont révélées datent de la période latiale IV A, autrement dit de l’Orientalisant (fin viiie, première moitié viie siècle)231, la première remontant à la période I B.232
Vigna Limiti (pl. 9)
83Limitrophe de la précédente, au sud de laquelle elle se situe, elle semble, selon le témoignage de son propriétaire, recueilli par De Rossi et déjà souligné par Gierow233, avoir livré du matériel archéologique dès 1817. De cette longue histoire, qui en fait donc l’un des sites albains les plus anciennement connus, ne subsiste plus aujourd’hui qu’une seule amphore. Par la suite, des trouvailles fortuites survenues en 1874 mirent au jour une autre amphore, des fragments de poterie ainsi qu’un étui d’épée et une pointe de lance, tous deux en bronze : quoique perdus, ces objets indiquent au moins la présence d’une tombe masculine, datable sans doute de la troisième période latiale234.
Vigna Pavoni (pl. 9)
84À l’est de la précédente, dans la direction du lac, la propriété Pavoni est l’une des trois vignes qui furent explorées par De Rossi235en 1867 et 1868. Aucune découverte précise n’est rattachée à ce lieu, si ce n’est celle d’un poignard de bronze236. Quant à la régularité que De Rossi, ici et dans les deux autres vignes mentionnées, avait cru pouvoir remarquer dans la disposition des vestiges archéologiques, il semble, comme l’a montré Gierow237, qu’elle ne soit due en réalité qu’à l’alignement observé par les vignerons dans leurs travaux de préparation du terrain lorsqu’ils y plantaient les futurs ceps...
Vigna Testa (pl. 9)
85En descendant encore vers le lac, le long de la route qui va de Marino à Castel Gandolfo, fut mise au jour en 1871, en présence de l’archéologue Garrucci, une tombe à inhumation, dont la fosse avait été protégée par une pesante dalle de pépérin238 : des trouvailles éparses et huit vases intacts indiquent la présence d’autres tombes, à fosse également, mais d’un type légèrement différent. L’ensemble daterait de la troisième phase latiale, et il nous semble qu’on puisse restituer au moins la présence de trois ou quatre tombes239.
Vigna Tomassetti (pl. 9)
86C’est là où, après les premières trouvailles de 1816 sur l’Appia, le négociant en antiquités Carnevali fit ouvrir devant témoins quelques sondages dans l’espérance de voir confirmer et authentifier les découvertes précédentes. Ce qui est intéressant, c’est moins l’échec de cette tentative, qui n’aboutit qu’à l’identification de quelques vases240, que la démarche intellectuelle qui l’avait guidée : on peut à cette occasion constater, en effet, que le Monte Crescenzio était considéré alors comme ne faisant qu’un, topographiquement parlant, avec les hauteurs (dont le « Montecucco ») de Castel Gandolfo, dont en réalité il est un tout petit peu plus éloigné (1,7 km) que de Marino... L’idée même de rapporter à un site unique des vestiges archéologiques trouvés en réalité sur la totalité d’un territoire vaste de plusieurs dizaines de kilomètres carrés est d’ailleurs, nous le savons aujourd’hui, particulièrement inadaptée pour les premières périodes de la civilisation latiale. C’est elle néanmoins, il ne faut pas l’oublier, qui a alors, et pour longtemps, inspiré les classifications, les attributions, et les reconstitutions historiques subséquentes : c’est en fonction d’elle que les nombreuses découvertes faites sur le Monte Crescenzio, site si l’on peut dire autonome géographiquement, ont été rapportées (et souvent sans possibilité de vérification ultérieure) au site de Castel Gandolfo. Ajoutons que les considérations développées ici se trouvent pleinement confirmées par une étude récente, due à F. Arietti241 et qui met bien en lumière la spécificité de l’habitat présumable sur le Monte Crescenzio.
Monte Crescenzio et provenance inconnue (pl. 9)
87Ce que nous avons déjà dit des conditions concrètes dans lesquelles se déroulèrent les fouilles, expliquera facilement la présence, ici ou là, d’objets dépourvus de tout « contexte » archéologique et dont on sait seulement qu’ils furent trouvés quelque part sur le Monte Crescenzio242. Un fragment de grande jarre provient peut-être de la Vigna Meluzzi où De Rossi dit avoir vu plusieurs tombes à dolium ; quelques bronzes dispersés, dont un pendentif en forme de bélier, proviennent d’une vigne Mercuri dont on ne connaît pas l’emplacement ; d’autres objets sont sans localisation ni datation sûres243.
88Deux découvertes d’importance, enfin, peuvent être rapportées au Monte Crescenzio, l’une de façon certaine, l’autre avec une bonne probabilité. Il s’agit, pour la première, d’une tombe située près du sommet du mont, et dont le très riche mobilier comprenait notamment, selon Lanciani, deux bijoux d’or244. La seconde, identifiée dans les alentours et décrite par Helbig, était comparée par l’inventeur de la fibule de Préneste (le mot n’implique pas que nous prenions parti dans cette polémique délicate...) à la « tombe du guerrier » à Tarquinia ; il s’agissait de plus, comme pour la tombe I de la Vigna Meluzzi, d’une tombe à inhumation. Si le parallèle suggéré par Helbig était juste, il tendrait à prouver que la zone était encore habitée aux débuts de l’Orientalisant récent (période IV A)245.
Riserva del Truglio (pl. 9)
89C’est bien d’ailleurs ce qui ressort également de la nécropole identifiée sur le Pascolaro de Marino, au lieu-dit Riserva del Truglio : une fois n’est pas coutume, il s’agit ici d’un site fouillé mais aussi publié selon les exigences rigoureuses d’une véritable archéologie scientifique. À la suite de quelques découvertes fortuites, V. Antonielli246 mena en effet deux campagnes de fouilles durant l’été 1923, continuées par E. Stefani le mois d’octobre suivant, dont les résultats furent exhaustivement décrits dans les Notizie degli Scavi, puis complétés et précisés par la republication de Gierow247. À vrai dire, l’importance du site dans les recherches albaines ne tient pas à des raisons intrinsèques, s’agissant d’une nécropole relativement tardive et modeste ; c’est plutôt que, pour la première fois, l’exploration d’un gisement archéologique se trouvant dans les monts Albains obéissait à une méthode scientifique, et non plus au hasard des trouvailles et des convoitises. Ainsi, de 1816 à 1923, il avait fallu plus d’un siècle pour que soit entendue la voix de la science dans la découverte des vestiges de l’antique passé albain et latial ! À bien y regarder, ce n’était du reste pas les lointaines recherches de Visconti qui avaient inspiré ce changement, mais, beaucoup plus, les fouilles spectaculaires menées par Boni, selon les procédés les plus modernes248, sur le Forum de Rome depuis le début du siècle. Si elles furent les premières du genre sur le territoire des Colli, on ne saurait oublier non plus que les excavations d’Antonielli devaient en être, pour longtemps aussi, les dernières, tant il est vrai qu’il faudra attendre 1971 et l’ouverture du chantier de l’Osteria dell’Osa pour que l’archéologie soit de nouveau activement présente sur le terrain albain ; encore doit-on préciser qu’il s’agit d’un lieu un peu marginal et excentré par rapport au massif lui-même.
90Sans doute, la mort prématurée d’Antonielli en 1935 explique-telle en partie que l’épisode de la Riserva del Truglio soit resté sans lendemain, mais il y a, probablement aussi, d’autres raisons, plus complexes, à l’origine de ce qui apparaît, une nouvelle fois, comme un rendez-vous manqué et une occasion perdue.
91L’exclusive attention accordée par les autorités officielles du temps à la période césarienne et impériale de la « Romanité » n’est à coup sûr pas étrangère à la persistance d’un désintérêt que nous avons déjà rencontré tout au long du xixe siècle. Dans ce cas précis, la modestie, le caractère non spectaculaire, pour ne pas dire décevant, des vestiges retrouvés, jouèrent certainement aussi en ce sens : à quoi bon continuer des fouilles qui, même lorsqu’elles étaient conduites selon la bonne méthode (à ce moment, encore peu pratiquée et non acceptée par tous), et sur les lieux albains les plus « fertiles », n’aboutissaient qu’à la découverte d’un matériel et d’objets infiniment inférieurs, en qualité comme en quantité, à ce qu’on pouvait tirer, au même moment, du sol inépuisable de la toute proche Étrurie ? À cet égard, nul doute que la pesée de l’étruscologie sur l’étude des primordia latins et romains ou, plus exactement, l’appartenance alors en vigueur de cette dernière à la première, n’ait joué un rôle puissamment négatif : entre 1924 et 1971, au silence presque total de l’archéologie albaine (seule la découverte fortuite d’une tombe préromaine est signalée à Velletri en 1934) répondent ainsi des fouilles nombreuses et incessantes de l’autre côté du Tibre, tant à Allumiere, Bolsena, Cerveteri, Chiusi, Gravisca, Luni Sul Mignone, Orvieto, qu’à Poggio Civitate, Populonia, San Giovenale, Tarquinia, Véies et Vetulonia. Pour ce qui est du domaine albain, il est probable, enfin, que le fait de se trouver en face d’un corpus littéraire presque entièrement légendaire par rapport auquel elle ne savait quel statut exact donner à l’archéologie, et pour l’interprétation duquel elle ne disposait que d’instruments conceptuels fort insuffisants249, a gêné la recherche contemporaine et l’a détournée vers d’autres terrains d’investigation : mais c’est là un problème général qui se retrouve pour presque tous les aspects de notre sujet d’étude.
92Un des apports les plus notables de la fouille et de la publication d’Antonielli fut aussi d’infirmer définitivement les thèses « vulcanologiques » défendues au siècle précédent par De Rossi, et de mettre le point final à la longue polémique sur la « Pompéi préhistorique »250 : de ce point de vue, également, l’épisode pouvait sembler beaucoup plus clore un cycle de recherches désormais achevé qu’ouvrir une nouvelle ère. De fait, les quelque deux cents mètres carrés explorés en 1923 ne constituent à coup sûr qu’une petite partie de la nécropole de la Riser-va del Truglio, qui fut ensuite abandonnée par les archéologues : ici comme ailleurs, la fouille mériterait assurément d’être reprise.
93Le site se présente comme une plaine en pente douce, à l’origine bordée en contrebas par un cours d’eau, au-delà duquel s’élèvent en face les pentes du Monte Crescenzio. Une trentaine de tombes y furent retrouvées251, dont la plupart étaient à inhumation, fait assez rare dans les monts Albains. La datation explique cette prédominance, puis-qu’elle va de la fin du viiie à la fin du viie siècle252, vingt-sept tombes se plaçant à la période IV A, trois à la période IV B, selon un déséquilibre qui s’observe aussi ailleurs. L’orientation d’ensemble de la nécropole (S.E./N.O.) est celle du ruisseau qu’elle borde, même si la disposition de chaque sépulture peut varier (la tête du mort est en général au sud ou à l’est). Il ne semble pas y avoir de disproportion significative entre le nombre des hommes et celui des femmes, bien que l’attribution de plusieurs tombes soit douteuse253 ; aucun enfant parmi ces morts, ce qui s’explique par leur ensevelissement à l’intérieur des limites de l’habitat, dont on ne connaît pas l’emplacement. L’assise des fosses est creusée dans le pépérin, et plusieurs d’entre elles étaient signalées par un cippe, à la base duquel étaient souvent accumulées de grosses pierres254. À trois reprises au moins, les fouilleurs crurent reconnaître la présence de vases isolés, enterrés avec soin à l’extérieur des tombes255 ; à trois reprises aussi, ils identifièrent dans le sol d’anciennes cavités circulaires qu’ils interprétèrent comme les traces de tombes à puits, aux dimensions analogues à celles retrouvées à Rome sur le Forum. Selon Antonielli, ces tombes à incinération auraient été détruites par les fossoyeurs de l’époque archaïque ; cette hypothèse, comme l’a montré Gierow256, n’est pourtant pas la plus probable. Il est plus vraisemblable que ces tombes aient été détruites à l’époque moderne, peu avant l’arrivée des fouilleurs, d’autant que parmi le matériel répertorié en vrac et provenant de la nécropole, figurent des objets appartenant indiscutablement aux premières phases de la civilisation latiale257. Si elle est juste, cette rectification de Gierow n’est pas sans conséquences : car malgré le caractère très partiel de la fouille, qui empêche toute conclusion sûre, il nous semble que plusieurs des tombes archaïques sont groupées un peu en cercle autour de la probable tombe à puits dite a)258. En tout cas, l’utilisation d’un même espace comme nécropole, des xe-ixe siècles aux viie-vie siècles, implique une forte mémoire collective et cultuelle, à moins qu’on ne suppose que seul le hasard soit à l’origine d’une telle continuité.
94Quoiqu’il en soit, la nécropole de la Riserva del Truglio, bien qu’elle fût à peu près contemporaine des grandes tombes princières de Préneste, n’a révélé qu’une communauté au niveau de vie modeste, qui, sans être dans la misère, n’avait accès qu’à ce qu’on pourrait appeler un luxe de pacotille : la céramique, comme les bronzes, d’ailleurs peu nombreux, se caractérise par l’imitation des influences venues d’outre-Tibre (Véies, Vulci, Caere et le territoire falisque sont évoqués à son propos) ou par des traits d’archaïsme, ce qui n’est pas contradictoire. L’une des trois tombes les plus riches, toutes placées à l’ouest de la nécropole, contenait des objets attestant qu’à cette époque le Latium, fût-ce dans les villages les plus reculés de l’intérieur des terres, est désormais ouvert aux trafics d’outre-mer : des scarabées d’inspiration égyptisante259 ainsi qu’une fibule ornée au repoussé, d’un type phrygien260, furent retrouvés dans la tombe 29. La présence d’une tombe double a, par ailleurs, été considérée comme un signe de l’affirmation à cette époque de la « famille nucléaire »261. Enfin, une coupe portant au revers le monogramme « A » (triangulaire avec traverse descendante) témoigne de la connaissance, au moins sommaire, de l’écriture en Latium, à une période qui peut être fixée au second quart du viie siècle262. Le fait est moins étonnant depuis qu’a été découverte, non loin de là, sur le site de la nécropole de l’Osteria dell’Osa, une inscription en caractères grecs remontant, quant à elle, au début du viiie siècle, voire au ixe, et dont l’ancienneté tout comme la localisation constituent un double défi à ce qui avait longtemps été la doctrine courante263 : il n’en mérite pas moins d’être souligné, en relation, précisément, avec le caractère modeste de l’ensemble de la nécropole264.
95Parce qu’elle est la mieux connue des monts Albains, cette nécropole a donné lieu à nombre de commentaires portant surtout sur la question de la composition sociale de la communauté dont elle perpétuait la mémoire : on n’a pas manqué265 d’interpréter sa relative homogénéité et sa « modestie » comme le signe d’une société à la fois paupérisée et uniforme, pour ne pas dire égalitaire, les tombes de la Riserva del Truglio étant censées illustrer l’appauvrissement, voire l’abandon dont auraient été victimes, à partir de l’Orientalisant, les monts Albains266. Il y a sans doute beaucoup d’illusion, ou d’hypothèse, dans un tel schéma : car si l’on met en rapport, comme cela a pu être proposé, avec cette nécropole, des tombes contemporaines situées non loin de là, comme celles qu’identifièrent Helbig267 et peut-être Lanciani, tombes qui étaient, elles, visiblement beaucoup plus riches, pourvues par exemple de métaux précieux qui manquent totalement à la Riser-va, on peut alors imaginer un schéma tout à fait différent. Sans remettre en cause, bien au contraire, le caractère « inférieur » de la communauté représentée dans la nécropole fouillée par Antonielli, on verrait alors dans les riches tombes isolées du Monte Crescenzio et de ses abords immédiats les traces de ceux qui furent les maîtres des paysans-soldats enterrés ici dans des tombes dont le matériel révèle, nous l’avons vu, une nette empreinte villanovienne268. La société étrusque de ces temps ne se caractérisait-elle pas, après tout, par une forte opposition entre « dominants » et « dominés » ?269. On doit cependant se garder de conclusions trop générales à propos d’une seule nécropole270.
96Où situer l’habitat de cette communauté ? La plupart du temps271, on s’accorde pour le placer sur le Monte Crescenzio lui-même, ou sur ses pentes nord. À juste titre, nous semble-t-il. Dans ce cas, il faudra sans doute (comme on le fait généralement) rapporter au même village les nécropoles des vignes contiguës Costa et Caldarini, et sans doute également celles qui portent les noms de Meluzzi272, Limiti, Pavoni et Tomassetti. Or cette observation en appelle, à notre avis, une autre. À les considérer dans leur unité topographique et leur diversité chronologique, on s’aperçoit en effet que ces différents gisements archéologiques attestent finalement la présence, sur la rive occidentale du lac Albain, de toutes les phases de la civilisation latiale, des périodes II A (et peut-être I) à la fin de la période IV, et cela pendant une durée qui exclut, semble-t-il, toute solution de continuité. En d’autres termes, le vacuum archéologique dont il est souvent fait état à propos des monts Albains à partir de l’Orientalisant ne doit pas être indûment surévalué : tout au plus parlera-t-on de déclin relatif, si l’on veut donner pleine valeur de preuve à la modestie du mobilier de cette nécropole de la Riserva del Truglio273.
PASCOLARO (pl. 9)
97Vaste dépression s’étendant entre les deux hauteurs qui portent le nom de Monte Cucco et Monte Crescenzio, le Pascolaro274, dit tantôt de Marino, tantôt275 de Castel Gandolfo, suivant qu’on le rapporte à l’une ou l’autre des localités qu’il sépare, fut longtemps un terrain de pâture pour les troupeaux des villages avoisinants. Lorsque, à partir du début du xixe siècle, les productions viticoles apparurent d’un rendement bien meilleur que les traditionnelles activités d’élevage, ses champs furent convertis en vignobles, mais il garda son nom : c’est alors, dès 1816 et 1817, que surgirent du sol albain les premiers témoignages archéologiques de la civilisation latiale.
98Après avoir fouillé la nécropole de la Riserva del Truglio, qui se trouve elle-même sur le Pascolaro, Antonielli continua ses recherches, dans l’espoir, certainement, de découvrir à son tour certains de ces « vases funéraires » qui, cent ans plus tôt, avaient fait la gloire de Visconti. Des fouilles qu’il entreprit, en 1927, dans un terrain voisin de la Riserva, la trace a été retrouvée par Gierow sous la forme de notes (inédites) qu’il avait prises alors, mais sans qu’il fût possible d’identifier le matériel trouvé dans la tombe qu’il y mentionnait, matériel qui a dû vraisemblablement échouer anonymement dans les fonds d’« objets dispersés » et rattachés à tel ou tel site des environs276. D’autre part, le même Gierow277 a également identifié, dans les collections du musée de Stockholm, un matériel dont on savait qu’il avait été trouvé dans le Pascolaro, au lieu-dit Fosso del Truglio, lui aussi voisin, comme son nom l’indique, de la nécropole de la Riserva. À côté de sept petits vases se trouvait une urne-cabane, de plan rectangulaire, et dont les parois sont pourvues de semi-colonnes faites à l’image de pieux de soutènement. Datée, par l’auteur d’Iron Age Culture of Latium, de sa période II, cette urne doit plus vraisemblablement être placée au début de la civilisation latiale, soit la période I qui correspond au xe siècle (en l’occurrence, plutôt vers la fin), voire au xie siècle278. On peut évidemment déduire de cette urne-cabane qu’il s’agissait d’une tombe à puits et, grâce à un rasoir de bronze très bien conservé qui l’accompagnait, d’une tombe masculine279. À propos de ce dernier objet, comment ne pas penser à l’obligation qui était faite au flamine de Jupiter à Rome de ne se raser qu’avec un rasoir de bronze ?280 Comme il arrive souvent, les prescriptions du droit sacré romain ne faisaient que perpétuer dans le rite les usages de l’ancienne civilisation latine, cette civilisation qui, à la fin de l’âge du Bronze, avait précisément eu son centre dans les monts Albains.
99L’entrée en 1957 de ces objets dans le musée de Stockholm implique sans doute qu’ils avaient appartenu auparavant à une de ces collections privées où, à l’avant-dernier siècle, s’éparpilla une bonne partie des découvertes archéologiques albaines. Or, la principale occasion de cette dispersion fut provoquée par la vente aux enchères, neuf ans après sa mort, des collections de l’antiquaire Carnevali281, qui, sa vie durant, s’était soucié de recueillir le résultat des fouilles des années 1816-1817. De là à supposer que l’acquisition du Medelhavsmuseet avait d’abord fait partie de ce fonds, il n’y a qu’un pas, qu’il est tentant de franchir. Si cette hypothèse était vérifiée, elle montrerait, une fois de plus (car il y a bien d’autres preuves que cette simple présomption)282, que les fameuses découvertes de Visconti ne se situaient pas toutes, comme on l’a trop souvent dit, le long de la via Appia et aux abords immédiats de Castel Gandolfo, et qu’une part au moins d’entre elles provenaient de lieux un peu moins proches du futur siège de la villa impériale. Quoi qu’il en soit, les faits topographiques parlent d’eux-mêmes : ce matériel fut trouvé, en effet, à un kilomètre et demi de Castel Gandolfo, mais à quelques centaines de mètres du Monte Cucco et à un kilomètre au plus du Monte Crescenzio. Pourtant, il a été référé systématiquement, et par Gierow lui-même dans un premier temps283, au premier de ces trois sites, et non aux deux autres pourtant plus proches. Ainsi se trouvait, au fil des découvertes et des attributions successives, et sous l’effet d’une hypothèse qui n’est qu’un théorème – celui de la localisation d’une Albe vue comme un centre unique et urbain (ou préurbain, peu importe) –, grossi peu à peu le rôle d’un habitat dont l’importance supposée croissait avec la multiplication des trouvailles dans toute la contrée : l’erreur se nourrissait d’elle-même, chaque nouvelle attribution, fût-elle indue, venant « confirmer » l’exactitude prétendue des attributions précédentes.
Terrain Costa (pl. 9)
100Limitrophe de la Riserva del Truglio, mais à un emplacement qui n’est plus connu aujourd’hui, la propriété d’un certain Costa284 fut fouillée en 1928 par Antonielli et révéla treize tombes appartenant très probablement à la même nécropole que celle qui avait été découverte cinq ans auparavant. Les objets mis au jour à cette occasion ont disparu, peut-être intégrés dans le fonds formé par des pièces détachées de tout contexte qui a été annexé au matériel trouvé à la Riserva ; seule une petite tête égyptisante de Nefertem à fleur de lotus, en faïence, probablement une imitation, vient, une nouvelle fois, attester, à côté des scarabées trouvés à la Riserva, le recours, de la part de cette petite communauté archaïque, à la magie protectrice des talismans et amulettes en tout genre285.
Terrain Maroni (pl. 9)
101Peu auparavant (en mars et avril 1928), le même Antonielli avait exploré un terrain qu’il dit avoir été situé à Castel Gandolfo, mais qui se trouvait en réalité, comme Gierow l’a montré286, sur le territoire de Marino, à quelques centaines de mètres du carrefour de l’Appia appelé Due Santi. Si ce n’est pas au Monte Crescenzio287, trop éloigné, c’est à l’habitat qui devait occuper les hauteurs de Castel Gandolfo288 que peut être rapporté le matériel exhumé par Antonielli, à moins que ce ne soit, nous semble-t-il, à celui du Monte Cucco, dont le séparait la même distance (six cents mètres dans les deux cas). Le matériel retrouvé sur une aire d’environ quatre cents mètres carrés appartenait à au moins deux tombes mises au jour avant l’arrivée sur place d’Antonielli ; ce dernier procéda à des sondages qui ne donnèrent pas grand résultat, hormis la trouvaille de quelques membra disiecta289 ; de toute évidence, les travaux agricoles et sans doute aussi des investigations menées antérieurement sans méthode ni contrôle avaient déjà épuisé le sol de ses vestiges : c’est ainsi que d’une tombe découverte deux ans auparavant sur la proche Vigna Brunamonti ne sont connus que quelques vases que Gierow assignait à sa première période, mais qui semblent plutôt devoir être placés dans la phase II A ou B290. C’est également à cette période que remonte la tombe dont la découverte provoqua la venue d’Antonielli : elle contenait notamment une urne-cabane circulaire291, ornée d’un décor incisé en forme de svastiskas et de figurines anthropomorphes placées sur la porte et de part et d’autre d’une espèce d’ouverture mansardée aménagée au-dessus de cette dernière ; le premier de ces motifs se voit également sur la chaufferette (« calefattoio ») trouvée avec l’urne ; enfin, un rasoir incurvé292 indique qu’il s’agissait sans doute d’une tombe masculine. Au total, la propriété Marroni semble avoir été utilisée comme nécropole durant les périodes II A et II B, révélant ainsi une continuité d’utilisation assez rare pour ces phases hautes et qui mérite d’être notée293.
PRATO DELLA CORTE (pl. 9)
102De l’autre côté de Marino, les collines qui forment le versant oriental du lac de Castel Gandolfo redescendent vers l’intérieur des terres en pente douce, formant une vaste plaine un peu inclinée qu’on appelle le Prato della Corte : au fond, creusant une véritable vallée, court une entaille creusée par les eaux294. C’est là, entre Marino et Rocca di Papa, mais plus près du premier centre que du second295, qu’apparurent d’abord en 1860, sur une aire de plus de mille mètres carrés située vers le haut de la pente, les débris d’une soixantaine de vases disposés en groupes de cinq, huit ou dix ; à la suite de ces découvertes, De Rossi fit procéder à des fouilles qui lui permirent notamment d’identifier en mars 1868 quatre nouveaux amas de tessons sur une aire où il recueillit aussi une inscription funéraire datant de l’Empire296. L’absence d’urnecabane, contrairement à ce qui se constatait ailleurs, la présence d’un squelette, furent interprétées par De Rossi comme la confirmation éclatante de sa vision d’Albe comme une « Pompéi primitive » : ainsi diagnostiquait-il, au vu du crâne du squelette en question (connu dès 1860), qu’il s’agissait « d’un vecchio che non potè fuggire dall’eruzione »297 ! Gardons-nous de ne voir dans cette interprétation que la preuve d’une imagination débridée, décidément anti – ou préscientifique. Ne pouvait-elle pas, en effet, s’autoriser de l’exemple tout récent du procédé mis au point en 1863, soit à peine cinq ans auparavant, par Fiorelli à Pompéi, et dont le résultat était de rendre visible, par injection de plâtre, les corps de ceux qui n’avaient pu échapper au Vésuve298 ? Déjà avaient été retrouvés ici et là dans la cité campanienne des squelettes d’habitants qui n’avaient pu s’échapper299. Contrairement à ce qu’il semblerait au premier abord, le raisonnement de De Rossi se caractérisait donc par une grande rigueur et pouvait s’autoriser de la caution de cette nouvelle science en plein essor qu’était alors l’archéologie. Il fallut attendre trente ans ensuite pour que les vestiges du Prato della Corte fussent interprétés comme il convenait : Pinza, qui n’avait d’ailleurs pas abandonné pour autant l’idée d’un volcanisme albain actif à l’époque historique300, démontra que les particularités relevées par De Rossi s’expliquaient beaucoup mieux si on y voyait les vestiges du mobilier de tombes à fosse mal conservées et non reconnaissables, l’absence d’urnes-cabanes étant alors tout à fait logique301. Peu après, F. von Duhn302, partant sans doute de l’idée consensuelle que la vérité naît de la combinaison des contraires, crut bien faire en proposant de voir dans les vestiges du Prato della Corte les traces d’un habitat pourvu d’une nécropole. Mais il n’est pas sûr que la science ait toujours à gagner à la méthode du pot-pourri : comme Gierow l’a montré, il s’agissait bien de restes de tombes à inhumation, ce qui n’empêcha pas l’auteur d’Iron Age of Latium de reconnaître un site d’habitat dans les parages, mais ailleurs, à l’ouest du lieu probable de la trouvaille faite par De Rossi303. Obnubilé par la polémique qui l’opposait à Pigorini sur la question de la composition exacte des sols où étaient découverts les vases albains, ce dernier ne prêta pas sans doute toute l’attention souhaitable à la localisation précise, comme à la description détaillée des documents archéologiques qu’il recueillait ou dont il entendait parler304. Pour ce site albain comme pour les autres, on ne saurait oublier non plus que la part du matériel connu, conservé et partant publié et utilisé scientifiquement est probablement de beaucoup inférieure à celle mise au jour sur les lieux, mais ensuite perdue et oubliée. C’est ainsi que De Rossi note incidemment, à propos du Prato della Corte, que « il suolo coltivato è riccamente sparso di frammenti del noto vasellame » ; lui-même ne parle du reste des vases qu’il décrit plus ou moins précisément que comme de « reliquie superstiti alla distruzione fattane »305. De la même manière, il semble qu’on ait perdu la trace de tout un dépôt votif trouvé sur place306. En 1868, décrivant la fouille à laquelle il avait procédé en mars de la même année, il indiquait que « grande quantità di rottami d’altri vasi, specialmente di grosse anfore, giacevano mescolati all’argila »307 ; c’est précisément cette dernière indication (non relevée, semble-t-il, par Gierow) qui pourrait donner raison à Pinza308, lequel pensait qu’aux sépultures à fosse rencontrées, mais non reconnues, par De Rossi, avaient dû s’ajouter originellement des tombes à puits : ne pourrait-on pas en effet voir dans ces nombreux débris de « grosses amphores », des tessons de dolia révélant la présence du rituel de l’incinération ? Un autre indice pourrait aller dans le même sens, c’est la présence sur le site de nombre de « lampes », d’un modèle très fréquent durant les premières phases de la civilisation latiale309 : on peut donc admettre, et sur une base un peu plus large que celle définie par Gierow, que le Prato della Corte commença à servir de nécropole dès la période II A, même si la très grande majorité du matériel conservé, et en particulier celui des quatre tombes à fosse trouvées en 1868, doit être daté de la quatrième période latiale. La troisième période étant quant à elle représentée par quelques vases dépareillés, on peut également accepter l’hypothèse d’une continuité d’utilisation du site comme nécropole, des xe-ixe s. au viie s.310 Quant à l’habitat identifié par Gierow311, il daterait plutôt de cette dernière période, en relation, par conséquent, avec la plupart des vestiges recueillis par De Rossi.
Vigna Delsette (pl. 9)
103Toujours dans la vallée du Capo d’Acqua, mais de l’autre côté, vers le Ponte Squarciarelli et près du lieu-dit Capo Croce, à un kilomètre à peu près à l’est du terrain Caracci, dont il vient d’être question, quelques poteries éparses, recueillies par les vignerons, avaient été données à De Rossi qui en fit brièvement mention312. Conservées au Musée Pigorini, elles permettent seulement de conclure à la présence de tombes313 remontant sans doute au début de la seconde période latiale314.
San Rocco (pl. 9)
104Sous ce toponyme, Gierow315 a regroupé les trouvailles faites dans trois endroits différents mais proches, à propos desquels, comme il l’a montré, les confusions, entre lieux et entre objets, des archéologues sont venues s’ajouter à l’oubli et aux approximations qui avaient enveloppé les premières découvertes.
105Exemples de cette spectaculaire continuité que nous avions mise en lumière (cf. supra p. 176), des tombes latiales surgirent, à la fin de l’avant-dernier siècle et au début du siècle dernier, du sol même du cimetière de Marino : là, au nord-est du bourg, et le long de la route qui conduit au Ponte Squarciarelli, les croque-morts devenus archéologues malgré eux (mais n’y a-t-il pas du croque-mort chez tout archéologue ?) mirent au jour, en 1898, puis en 1907 et 1908316, deux tombes à puits, datables, semble-t-il, à la phase II. Il y faut ajouter quelques objets disparates en bronze qui, d’après une tradition orale recueillie par Pinza317, provenaient d’autres tombes non autrement connues, situées elles aussi au sud-ouest du cimetière moderne. Sur son côté est, s’étendait alors la vigne dite « Delle piccole Suore » où, en 1829, à l’occasion de travaux, furent identifiées « due o tre tombe a dolio », contenant notamment une dizaine de vases que Pinza décrivit en les rattachant par erreur au site voisin de Capo d’Acqua318. Des trouvailles faites dans ce dernier lieu, qui tire son nom d’une source abondante que nombre de topographes du xixe siècle identifièrent avec l’aqua Ferentina319, ne subsiste aujourd’hui qu’une demi-dizaine de vases320. Rien ne serait plus faux pourtant que de juger de l’importance du site d’où ils proviennent à proportion de ce si petit nombre : à plusieurs reprises, De Rossi souligna au contraire la fertilité archéologique de l’aire où ils avaient été trouvés321. L’abondance des tessons affleurant à même le sol était telle qu’elle l’amena à y voir, ce qui était probablement erroné, les traces d’un habitat de grandes dimensions et à y reconnaître (ce qui ne l’était pas moins) le site même d’Albe322. À en juger pourtant au seul vu des humbles poteries photographiées et décrites par Gierow, on ne saurait apprécier le rôle réel du Capo d’Acqua dans la topographie, l’archéologie et l’historiographie albaines. C’est dire, une fois encore, que l’évaluation exacte des données archéologiques albaines ne peut être fondée uniquement sur le relevé, si utile soit-il, de ce qui a été conservé.
Coste Caselle (pl. 9)
106Dans son second rapport publié en 1868, De Rossi faisait état de « vasi laziali rinvenuti nel territorio di Marino nei luoghi appellati Col-li », spécifiant à ce propos que « le altre olle, che quasi coi miei occhi vi-di estrarre da sotto il peperino in due vigne non limitrofe, ai Colli sul ciglio del lago Albano, distano assai più di un kilometro verso occidente dal Caput aquae »323. À première vue, ces précisions sont contradictoires : il y a bien un lieu appelé les « Colli », mais il se trouve sur le territoire de Rocca di Papa, non de Marino, et surtout, son emplacement comme son orientation relativement à ce que De Rossi croyait être le caput aquae Ferentinae, c’est-à-dire le Capo d’Acqua, ne sont pas ceux qu’il indique. Ce sont ces raisons qui ont poussé Gierow324 à voir dans l’appellation « i colli » non point un nom propre, mais un simple nom commun, qu’il propose d’appliquer aux hauteurs qui s’élèvent entre Marino et les eaux du lac Albain, en conformité donc, à défaut d’un toponyme inexistant, avec les détails topographiques donnés par De Rossi. Cette localisation nous semble effectivement la plus convaincante, dans la mesure où les deux autres lieux de trouvailles mentionnés par l’auteur du « Secondo Rapporto » délimitent alors une manière de triangle, dont les Coste Caselle formeraient la base occidentale, le Pozzo Carpino la base orientale et le Capo Croce (Vigna Delsette) la pointe. On comprend, dans ces conditions, que De Rossi ait pu parler, immédiatement à la suite des lignes où il mentionnait ces trois lieux, des « confins d’une immense aire », et qu’il ait pu la situer dans le territoire de Marino. Et l’on appréciera, une fois de plus, l’importance de ce qui a été perdu, par référence à des traditions orales recueillies par De Rossi et dont on ne saurait sous-estimer l’intérêt. À propos des lieux que nous venons de mentionner, le savant vulcanologue ajoutait en effet : « I proprietarii poi delle vigne sparse entro i confini di questa immensa area, quasi tutti più o meno ricordano vasellame estratto da sotto al vergine ed al tosto dai loro antenati e da loro medesimi nei passati tempi »325. De ces récoltes anonymes, faites en un temps où le tesson était pour ainsi dire un matériau naturel, apparaissant un peu partout autour des lacs albains à même la surface du sol, ne subsiste aujourd’hui, pour les Coste Caselle, qu’un seul vase, identifié par Gierow sur la base d’une fiche d’inventaire du Musée Pigorini rédigée par De Rossi lui-même. Pour le reste, les autres vases furent détruits ou ont perdu leur identité en entrant dans la collection De Rossi, passée telle quelle au Musée Pigorini.
107Le lieu probable d’origine du vase décrit par Gierow n’est pas indifférent : c’est aux Coste Caselle, en effet, que William Gell, contemporain de Stendhal, voulait placer Albe, interprétant des fragments de colonnes comme « les restes d’un de ces temples que les Romains épargnèrent lors du sac de la ville », et des blocs de pierre épars qu’il y avait trouvés comme les traces de la citadelle d’Ascagne, alors qu’il s’agissait de vestiges d’une villa romaine326. Néanmoins, le site, malgré ce qu’en disait Ashby327, n’est pas vide de tout vestige de l’âge du Bronze : en 1962, Gierow put recueillir, au bas de la pente, des tessons déplacés par le ravinement, qui attestaient que ces coteaux dominant les eaux du lac Albain avaient été occupés par les Anciens Latins328. Conclusion qui, bien sûr, ne signifie nullement un retour à l’hypothèse de Gell !
ROCCA DI PAPA (pl. 8)
108À l’ombre du Monte Cavo, dont il forme une manière de contrefort, le village de Rocca di Papa est l’un des sites habités les plus élevés (641 à 730 m) et les plus abrupts du paysage albain, et en général, du Latium : aussi fut-il âprement disputé tout au long du Moyen Age par les grandes familles romaines, les Orsini, Colonna et Annibaldi, et son contrôle fut-il, de la part de la papauté, l’objet d’un soin jaloux depuis le xiie siècle329. Malgré les apparences, ce ne serait néanmoins pas à cela qu’il devrait son nom, sans doute déjà établi avant cette date330, même si la mainmise papale a ensuite indubitablement conforté et le toponyme et l’interprétation qui paraissait s’imposer331 ; Ashby a proposé d’y voir plutôt la déformation de l’antique Cabum332, dont les prêtres administraient le sanctuaire du Jupiter Latin, ville dont le site est probablement à chercher, non sur le mont Albain lui-même, mais plutôt sur l’éminence occupée par le village moderne. Quoi qu’il en soit de cette hypothèse333, il y a toute apparence, en effet, que l’acropole où fut bâtie la forteresse médiévale qui assura, du haut de ses 760 m, aux comtes de Tusculum (ville d’où l’on distingue parfaitement le site de Rocca di Papa)334 d’abord, à la papauté ensuite, la maîtrise de ce promontoire du Latium qu’est le Monte Cavo, avait déjà été occupée dès l’âge du Bronze, même si sa destruction opérée sur ordre de Paul III et sa transformation subséquente en carrière par les habitants du bourg, rendent toute vérification à peu près impossible335. Il est certain, en tout cas, que Rocca di Papa, que domine à l’orient le grand plateau incurvé appelé Campi d’Annibale, est le site habitable le plus proche du sommet du Monte Cavo : car ce dernier, tout comme la crête des monti delle Faete, se trouve à une altitude élevée (900 m en moyenne) et exposée aux rigueurs du climat. Plus accessible, et mieux défendable grâce à sa configuration qui l’isole et la protège, la « Rocca di Papa » dut, quant à elle, être occupée très tôt, faisant fonction de véritable verrou commandant l’accès au mons Albanus et à tout son massif.
San Lorenzo Vecchio (pl. 9)
109Sur le territoire actuel de la commune, mais plus près du Ponte Squarciarelli et du carrefour Capo Croce que de son chef-lieu, furent retrouvés d’une part, en 1873, un tesson d’impasto isolé et indatable, en un endroit dit Vigna ou Villa Blasi336 et, d’autre part, une importante tombe apparue par hasard en 1940 et publiée aussitôt par Giglioli337. Suivant, à l’exemple de Gierow338, les délimitations administratives modernes, nous l’incluons dans les trouvailles faites sur le sol de Rocca di Papa ; la réalité topographique, cependant, montre qu’elle appartient aux nombreuses trouvailles faites à l’est de Marino, n’étant éloignée du site de Capo Croce et de la vigne Delsette que d’un peu plus de deux cents mètres339.
110Une seule tombe fut retrouvée en 1940, mais le manque de recherches ultérieures340 ne permet pas de savoir si la sépulture était réellement isolée, selon un schéma qu’on retrouve parfois ailleurs, notamment à Boschetto341, ou si elle appartenait à un ensemble plus vaste. La présence, parmi le matériel exhumé, d’un dolium et d’une urne-cabane, révèle en tout cas qu’il s’agissait d’une tombe à puits et à incinération. La typologie de ce matériel confirme les suggestions de la topographie, puisqu’elle manifeste d’étroites affinités avec les trouvailles faites à l’est de Marino, qu’on rassemble sous l’appellation commune de « groupe de Boschetto »342. La tombe mise au jour à San Lorenzo Vecchio témoigne d’un rituel funéraire défini et cohérent : les six vases qui accompagnaient l’urne-cabane sont tous d’un format miniaturisé ; quant à cette dernière, elle se présenterait comme un vase, n’était la stricte verticalité de ses parois, sobrement décorées de motifs incisés : aucune ouverture, aucun détail ne vient rappeler ici les portes, fenêtres et poutres des cabanes réelles343. Seul un couvercle mobile, d’un modèle qu’on ne trouve guère qu’en Latium et qui se rencontrera plus tard dans des urnes trouvées à l’Osteria dell’Osa et à Pratica di Mare344, pourvu de lignes de relief rappelant la disposition d’une charpente, compense l’absence de porte et identifie clairement l’objet comme une urne-cabane. Comment interpréter cette sobriété décorative ? Comme le signe d’un processus symbolique en cours et où l’usage du vase-ossuaire villanovien se laisse encore reconnaître, ou, au contraire, comme l’affadissement d’un rite qui ne serait plus évoqué que par allusion ? L’ancienneté de la tombe, qu’on s’accorde maintenant à dater (au moins) du xe siècle345, oriente vers la première solution. On remarquera d’autant mieux la statuette de terre cuite représentant de manière très schématique une personne portant un vase, figurine dont on ne sait si elle fut trouvée à l’intérieur ou à l’extérieur de l’urne. Dernière particularité digne d’être notée : des analyses anthropologiques faites depuis la publication de Gierow ont révélé que l’urne contenait les restes d’un enfant dont l’âge n’excédait pas douze ans346.
Pozzo Carpino (pl. 9)
111Sur un site riche en eaux, et qui forme l’un des angles du triangle formé par les autres points représentés par les vignes Delsette, Caracci et les Coste Caselle, De Rossi faisait état en 1868 de découvertes abondantes de tessons extraits de « puits antiques »347, qui pourraient être des traces d’habitats, à moins qu’il ne s’agisse, comme l’a supposé Gierow348, de tombes à puits mal interprétées. Fragmentaire, ce matériel ne fut pas jugé digne d’être conservé : il nous semble en tout cas, par rapport à la localisation indiquée par l’auteur de The Iron Age Culture of Latium, qu’il conviendrait de situer le lieu de la découverte, non pas au-delà du chemin qui, de la via dei Laghi, mène à Rocca di Papa, mais en deçà, juste au-dessous de la place occupée par le toponyme sur les cartes de l’IGM au 1/25 000e349. Le site est presque exactement à mi-distance de Marino et de Rocca di Papa (deux kilomètres dans chaque cas) et, vu l’absence de toute information plus précise concernant la nature comme la chronologie du matériel qui y fut trouvé, il est difficile de savoir à quel contexte topographique il appartenait.
Campi d’Annibale (pl. 8)
112Autre exemple d’un site archéologique dévasté et trop mal connu, l’ample plateau incurvé dominant Rocca di Papa, et auquel la tradition populaire a attaché indûment le nom du vainqueur de Cannes. Bornée au nord par la muraille basaltique dite Pentima Stalla, cette plaine fut, à la préhistoire et à la protohistoire, occupée en partie, nous l’avons vu, par un lac350. Le site reste riche en sources, pourvu d’une abondante végétation, et revêt une grande importance stratégique, car il apparaît comme une espèce de plate-forme contrôlant à la fois les deux grandes voies de communication de la région que sont la Latina et l’Appia351. C’est à la puissante famille des Annibaldi, ou Annibaldeschi, longtemps maîtresse de Rocca di Papa, qu’il doit son nom : il est probable cependant, à notre avis, que les troupes placées en hâte par le Sénat pour prévenir l’avancée d’Hannibal aient eu ici, plutôt que sur le sommet même de la montagne, trop exigu, leur campement et leur quartier général. Au-delà des siècles, un exemple frappant vient illustrer cette immuable logique des lieux. C’est aux Campi d’Annibale, en effet, que prendra l’habitude de s’entraîner l’armée pontificale lorsque la papauté inquiète voudra se prémunir d’attaques éventuelles de la part des garibaldiens venus du sud, comme, plus de vingt siècles auparavant, le pouvoir romain l’avait fait contre le Carthaginois : des photographies352 du temps en témoignent, qui montrent le vaste plateau parsemé de tentes, de canons et de cabanes, et tout grouillant de troupes : Praesidia [...] in monte etiam Albano [...] ponuntur353. Il est vrai qu’on pourrait penser à un sens plus général pour l’expression mons Albanus, qui désignerait alors l’ensemble du massif, comme le fait sans doute parfois Strabon par les mots Ἀλβανὸν ὄρος (en 5, 3, 12), mais l’usage livien de la formule paraît plus précis que celui de l’auteur grec. C’est là aussi que nous situerions le refuge des Gaulois mis en fuite en 346 (350) par l’impétuosité des soldats du consul M. Popilius Laenas et gagnant en toute hâte « parmi des hauteurs de même altitude, ce qui les domine et frappe leurs regards, la citadelle d’Albe »354 : l’expression convient beaucoup mieux, en effet, à la haute silhouette du Monte Cavo qu’aux collines de Castel Gandolfo où l’on localise d’ordinaire, à la suite d’Ashby, l’épisode, collines qui, loin d’être plus hautes que les coteaux avoisinants, sont au contraire au même niveau qu’eux. En réalité, la localisation de l’épisode aux Campi d’Annibale s’impose d’autant plus que l’expression arcem Albanam renvoie visiblement ici, à notre sens, à la théorie reçue chez les antiquaires et annalistes, qui plaçaient le site de la ville d’Albe sur le mons Albanus lui-même : or le plateau des Campi d’Annibale n’est pas autre chose qu’une partie du mont Albain, dont il contrôle l’accès. Dans ces conditions, nous proposerons de reconnaître dans ce site l’une des principales bases d’opérations utilisées par les Gaulois pour une présence en Latium qui a dû durer quelques mois, voire quelques années355.
113Site de lac, d’altitude et doté d’une vaste aire plane, le plateau des Campi d’Annibale a dû à cette triple caractéristique d’être occupé très tôt et longtemps. La présence humaine y est attestée dès le néolithique par d’abondantes trouvailles356 faites tout au long du xixe siècle, tandis que quelques tessons et objets témoignaient de sa fréquentation à l’époque archaïque357 : des unes et des autres ne subsiste d’ailleurs que le seul souvenir. Les vases décrits par De Rossi ont été perdus, tandis que le seul dolium provenant du site, d’un type semblable à ceux qui furent trouvés à la Villa Cavalletti (Grottaferrata) ou à Castel Gandolfo, n’était pas décrit par le vulcanologue358, qui le jugeait sans doute trop commun pour le signaler particulièrement : indice supplémentaire, s’il en était besoin, de la prudence avec laquelle il convient d’apprécier les dits, mais aussi les non-dits de l’archéologie ancienne ! Oubliées par Gierow, et conséquemment par Hölbl dans le recueil des Aegyptiaca d’Italie, deux figurines de faïence359 sont probablement à rapporter à des tombes archaïques du lieu, illustrant ce même souci de protection magique que nous avons vu se manifester à la Riserva del Truglio.
114S’il est vrai, comme le pensait Ashby360, que les restes de murs en opus quadratum, décrits par De Rossi comme situés à proximité, se trouvaient sur le Colle (Castel ?) Molare, ne peuvent être mentionnées que deux tombes, situées respectivement au nord-ouest et au nord-est du plateau361, toutes deux à incinération ; l’une se composait d’un profond puits au fond duquel les cendres du mort avaient été recouvertes de pierres, l’autre était constituée par une fosse aménagée en pierres taillées, contenant un vase-ossuaire ainsi que d’autres récipients remplis par des ossements d’animaux domestiques, traces de sacrifices funéraires. Un cippe anépigraphe, d’un type commun à Caere et à Préneste, complétait l’ensemble selon De Rossi, qui suggérait la présence d’autres tombes à partir de l’identification de quelques tessons épars. C’est donc probablement d’une nécropole entière, existant depuis les premières périodes latiales et jusqu’à l’ère archaïque, qu’il faut supposer l’existence sur le plateau désertique des Campi d’Annibale qui n’était plus occupé à l’époque classique que par les cippes délimitant le cours de l’aqua Augusta362. Quant à l’habitat correspondant, on peut le situer, à titre d’hypothèse, sur l’éminence occupée aujourd’hui par le village de Rocca di Papa, ce qui n’exclut pas, à notre sens, la présence, durant au moins les premières périodes (I et II A) latiales, de cabanes sur les bords du lac qui se trouvait alors au centre du plateau. De ce point de vue, une trouvaille ancienne, succinctement mentionnée par Gierow, revêt sans doute une grande importance : c’est celle d’une hache de bronze trouvée fortuitement sur le site en 1901363. Si elle date vraiment, comme on l’a proposé, de la fin du Bronze ancien ou des débuts du Bronze moyen, soit du xvie siècle av. n. è., on aurait là un exceptionnel témoignage d’une présence humaine précoce, sur ce site clé des monts Albains : la découverte de haches de même type dans les eaux du lac Albain viendrait alors confirmer l’occupation, dès cette haute époque, des lacs du massif364.
Vivaro (pl. 8)
115Vers l’est, toujours sur le territoire actuel de la commune de Rocca di Papa, mais ailleurs, dans l’espace comme dans le temps, près d’une petite éminence bordant un bas-fond lacustre nommé le Pantano della Doganella, a été récemment identifiée, ou plus exactement reconstituée, une tombe datant de l’Orientalisant365. Or cette conquête de ce que l’on pourrait appeler une archéologie au carré est importante, aussi bien topographiquement que chronologiquement. Elle avait été trouvée à peu près à mi-distance entre deux hauteurs : l’une, le Colle dei Morti, dont les pentes méridionales sont riches en tessons (de I et II A jusqu’au iiie s. av. J.-C.), l’autre, le Monte Castellaccio, au pied duquel court la Latina, se faufilant entre le lac-marais et la colline, aujourd’hui érodée par une carrière ; on sait néanmoins que des restes d’habitat, allant du ixe au ve siècle, y avaient été aperçus. Le nom médiéval de castrum Algidum y a fait localiser l’Algide que se disputaient Romains et Èques366 : on peut y supposer une place forte et un habitat d’environ trois hectares. Le Colle della Mola, voisin, a révélé des vestiges d’occupation durant le Bronze récent et final (deux cabanes : voir ENL, p. 99), mais sans que l’absence de traces plus récentes implique nécessairement un abandon du site.
116L’or, l’argent, le bronze et l’ambre abondent dans cette tombe du Vivaro, au luxe véritablement princier, et dont le mobilier céramique présente des analogies avec celui de la nécropole de la Riserva del Truglio, tandis que d’autres objets révèlent des parentés avec Castel di Decima367 ou Préneste368. C’est une tombe aristocratique, peut-être féminine, et qui, remontant à la fin du viiie siècle, se trouve être contemporaine de la fondation de Rome. Si son isolement topographique n’est pas dû à la perte d’autres témoignages éventuels, elle révèle une présence « éclatée » sur le territoire albain, non dénuée de parallèles369, de la part d’une aristocratie dont la prospérité n’était sans doute pas sans relation avec les trafics de la toute proche voie Latine. Évoquant l’Étrurie, Castel di Decima, aussi bien que Préneste, elle illustre de manière frappante la perméabilité de la montagne albaine aux échanges inter-régionaux, montrant particulièrement l’attraction exercée alors par la florissante Préneste et l’axe majeur de communications représenté par les vallées du Sacco et du Liri. Son importance est également d’ordre historiographique : que n’a-t-on pas écrit, dans les années 1970, sur le « vide » ou la « pauvreté » archéologique des monts Albains à l’époque orientalisante ! Sans remettre en cause le poids des communautés côtières, telle, précisément, Castel di Decima, avec ses centaines de tombes, cette découverte, qui ne restera sans doute pas isolée, démontre que le grand mouvement de prospérité caractérisant l’Orientalisant a exercé aussi ses effets dans les monts Albains. Ainsi peuvent être tempérées les conclusions déduites naguère peut-être un peu trop rapidement à partir du tableau de la « destruction d’Albe »370 dressé par les sources littéraires.
Monte Cavo (pl. 8)
117Montagne sacrée du Latium, ce haut lieu du massif albain vaut aussi comme une illustration exemplaire, du point de vue historiographique, des approximations et, finalement, du désintérêt qui ont trop longtemps caractérisé l’attitude de la recherche à l’égard de la part albaine dans la légende des primordia. On ne compte plus les erreurs dont son étude est encombrée371 : ainsi, un extraordinaire aveuglement collectif a conduit la quasi-totalité des commentateurs – à commencer par l’auteur de ces lignes ! – à affirmer qu’il s’agirait du plus haut sommet albain, en contradiction manifeste, pourtant, avec des indications qu’on trouve dans n’importe quelle bonne carte372.
118Le Jupiter Latin honoré sur le mont à l’occasion des Féries Latines y avait-il un temple ? On dit en général que les sources littéraires, il est vrai assez discrètes, ne donnent aucune indication, voire qu’elles permettent de répondre par la négative373. Nous pensons le contraire : s’il est vrai que l’expression ἱερòν κοινòν dont use Denys (4, 49) pour décrire la fondation des Féries par Tarquin est à elle seule trop vague pour autoriser quelque conclusion que ce soit, on n’a pas assez pris en compte l’indication que peuvent donner, eu égard à la perspective étiologique dans laquelle elles se placent, les lignes où Tite-Live (1, 29, 6) décrit l’effet de la clémence de Tullus Hostilius après la prise d’Albe : Templis tamen deum – ita enim edictum ab rege fuerat – temperatum est. Même si l’interprétation de ce mot templis dépend en partie de l’identification – incertaine374 – du site où l’auteur de l’Ab Vrbe Condita localisait la métropole latine, il nous semble difficile de ne pas y voir au moins une allusion à un temple du mons Albanus, d’autant que, dans le même passage, il montre le roi restaurant le rituel des Féries Latines. Mais il y a plus, puisque, à propos des prodiges signalés pour l’année 209 av. J.-C., l’historien, dans une phrase que nous avons déjà citée à un autre point de vue375, écrira (en 27, 11, 1) que : In Albano monte tacta de caelo erant signum Iouis arborque templo propinqua. Ici aussi, il est difficile de penser que le terme templum ait pu désigner, venant après la précision signum Iouis, un autre édifice que celui du Jupiter Latin, voire une simple aire sacrée. On trouvera également chez le néophyte Firmicus Maternus376 une mention qui n’est peut-être pas seulement livresque, l’auteur ayant vécu longtemps à Rome, d’un « temple Latial ». Quant au silence de Cicéron sur un éventuel édifice dans l’invocation qu’il adresse à Jupiter Latin au terme du Pro Milone (31, 85), il ne signifie rien, bien au contraire : la villa de Clodius s’étendait de l’autre côté du lac, et si le défenseur de Milon se plaît à énumérer les bois, les autels, que les constructions sacrilèges du tribun assassiné avaient, dit-il, profanés, il n’aurait eu garde de parler du temple fédéral qui, de toute manière, se situait bien à l’écart des lieux du drame. L’eût-il fait que son argumentation aurait facilement tourné au désavantage de son client, puisque, assurément, le sanctuaire du mons Albanus n’avait subi aucun dommage du fait de Clodius !
119Si, en fait, on n’a pas tenu compte des précédents témoignages, c’est parce qu’on n’a voulu voir dans le templum dont ils font état qu’une aire sacrée à ciel ouvert, en conformité, pensait-on, avec les rites et les exigences d’une religion venue du fond des âges. Mais, à l’examen, il s’avère que lorsque Tite-Live emploie templum dans son sens technique, emprunté au vocabulaire augural, d’espace consacré, il ne manque jamais de le spécifier clairement par le contexte. Autrement, c’est-à-dire dans la quasi-totalité des cas, et en particulier en ce qui concerne le sanctuaire du Jupiter Capitolin, qui est vis-à-vis de celui du dieu Latial dans un évident parallélisme, le mot templum renvoie constamment chez l’historien à un édifice religieux considéré dans sa réalité matérielle377. Enfin, quelque oublié qu’il soit, l’argument mis en avant par Volpi, en 1737, ne saurait être négligé : l’auteur du Vetus Latium considérait que l’application du participe residens au Jupiter Latial, dans l’invocation que Lucain met dans la bouche de César sur le point de franchir le Rubicon, impliquait la présence d’un temple sur le mont Albain378.
120Mais ne donnons pas à ces remarques une portée trop grande : le fait est qu’il n’y a aucune attestation littéraire du mot aedes pour le sanctuaire du mons Albanus, ce qui n’est peut-être pas sans signification. C’est d’ailleurs surtout à l’archéologie qu’on a demandé des preuves de la non-existence d’un édifice cultuel dédié à Jupiter sur le lieu des Féries Latines. Des fouilles, toujours partielles, entreprises en fonction d’autres objectifs379 et jamais publiées de façon satisfaisante, ont accrédité l’idée que le sommet du mont Albain n’avait été occupé que par un autel laissé à l’air libre. L’inspirateur de cette thèse, qui demeure la communis opinio en la matière, fut Lugli, qui, vers 1930, eut à reprendre et à achever des sondages entrepris avant la guerre par Giovannoni, et interprétés par ce dernier d’une manière fort différente380. Jusque-là, on avait presque toujours pensé en effet que les vestiges épars sur le sommet du Monte Cavo étaient ceux du temple de Jupiter, sans chercher, il est vrai, à donner à cette conviction une grande cohérence archéologique. Mais selon Lugli, il ne pouvait s’agir que d’édifices annexes et d’un portique enserrant l’area. Passant en revue les grands sanctuaires du Latium dans une étude panoramique, il ne mentionna donc pas celui du mons Albanus, qui, pour la même raison, est absent des études consacrées au même sujet par F. Castagnoli et F. Coarelli381. Aussi Gierow, dans la demi-page qu’il consacrait au Monte Cavo, se déclarait-il en faveur de la seule existence d’un « open temenos », thèse qui s’est ensuite imposée382.
121Cependant, l’hypothèse ancienne d’un temple de Jupiter Latial sur le Monte Cavo ne doit pas être écartée définitivement. Il y aurait d’abord une raison de simple vraisemblance météorologique. Comme l’a dit un archéologue contemporain à propos d’une hypothèse analogue concernant le site de Satricum : « Io non riesco a credere, avendo vissuto a Satricum ed avendo veduto la pioggia veramente terribile, in un culto all’aria aperta » !383 Plus sérieusement, d’autres données ont été ajoutées récemment au dossier : non pas des nouvelles fouilles, au moins pour l’instant, mais la publication d’inédits comme ceux de Lanciani, ou l’étude de rapports de fouilles, retrouvés alors qu’on les croyait perdus, bref, un exemple de cette archéologie au carré dont nous avons eu déjà plusieurs fois l’occasion de souligner l’utilité et la nécessité. Celles-ci sont d’autant plus grandes en l’occurrence que le site est loin d’avoir été fouillé en totalité, et que, de ce qui a été fouillé, bien peu a été publié. Le reste, notamment les trouvailles faites par De Rossi, est sans doute irrémédiablement perdu, et il ne faut même pas parler des vestiges sans cesse mis au jour depuis le xvie siècle. Néanmoins, des recherches d’archives faites récemment par C. Cecamore384 suffisent à suggérer assez nettement l’existence d’édifices antiques sur le sommet du mons Albanus. La question est de déterminer aussi précisément que cela est possible leur emplacement, et d’identifier s’il y a lieu les traces éventuelles du grand sanctuaire latin, en déterminant leur chronologie. On a longtemps pensé385, lors même qu’on ne mettait pas en doute la présence d’un temple, que ce dernier aurait été détruit par la construction du couvent des Passionistes exécutée en 1783 par le cardinal d’York, dernier représentant d’un nom illustre : ainsi Ampère pouvait-il se croire fondé à remarquer, non sans acerbité, qu’il était « plus aisé d’abattre un vieux temple que de relever un vieux trône » (Hist. r., 1, p. 277). Pour en être spirituelle, la formule n’en était pas moins inexacte. En réalité, les destructions avaient, sur le Monte Cavo comme ailleurs, commencé bien avant la fin du xviiie siècle, bien avant même l’année 1777 que proposait Hülsen386. En effet, que cette dernière date ne valût nullement comme un terminus post quem, c’est ce qu’Ashby put facilement démontrer en citant les lignes, datées de 1767, et en réalité démarquées de celles publiées par Volpi près de quarante ans plus tôt, où Chaupy décrivait et déplorait des destructions d’ores et déjà accomplies387. L’étude attentive des différentes interventions modernes sur le site, telles que les a décrites Tomassetti388, montre d’ailleurs qu’il n’y eut pas moins de quatre édifices successifs sur le sommet latin, sans parler des réaménagements parfois importants opérés sur chacun d’entre eux. En 1453, Pie II, à qui l’on doit la première description moderne du sommet, y trouvait déjà un ermitage installé sur les ruines d’une église, ou plutôt d’une chapelle à laquelle d’autres documents donnent le nom de « S. Petri in Monte Cavi ». Puis au début du xviiie siècle, un autre ermitage sera édifié avant le couvent actuel, en 1714, occupé par les Trinitaires de 1723 à 1744 et par les Passionistes à partir de 1757. Au siècle suivant, l’endroit, ravagé par un tremblement de terre en 1806, sera successivement propriété des Colonna et siège d’un observatoire astronomique installé là en 1873, avant que des bâtiments du ministère de l’Agriculture, puis une auberge ne viennent occuper à leur tour l’ancienne aire sacrée ; au siècle dernier, un observatoire météorologique et des installations à usage militaire ont utilisé, à des fins variées, les possibilités de ce belvédère naturel exceptionnel, défiguré aujourd’hui par l’implantation – du reste illégale – d’antennes satellitaires pour les réseaux de télévision.
122Dans tous ces avatars successifs, les vestiges antiques n’ont cessé de servir de carrière aux différents occupants du site : on le devinerait par simple vraisemblance et analogie avec ce qui se passe ailleurs ; on en a parfois la preuve grâce à tel document d’archive389. C’est assez dire que l’identification précise des structures antiques, avec la solution des importantes questions historiques qui en dépendrait, est presque désespérée !
123La chapelle que vit Pie II était sans doute peu de chose, et la première transformation d’importance qu’eut à subir le site est donc la construction du premier couvent en 1714, à propos de laquelle l’antiquaire Volpi mentionne la découverte d’un grand torse de marbre390. Il faudrait par conséquent disposer de documents antérieurs à cette date pour avoir une idée des ruines antiques à un moment où elles n’avaient encore eu à subir que les outrages du temps. On considère communément que le seul document disponible est le dessin connu sous le nom de Codex Barberini, et qui, datant du xviie siècle, fut révélé pour la première fois par De Rossi391 en 1876. Mais, dépourvu d’échelle et d’orientation (encore qu’un second dessin, souvent oublié, puisse donner quelque indication en ce sens), ne fournissant aucun point de repère, ni signé ni daté, il est difficilement utilisable et la recherche récente de C. Cecamore a pu montrer la fragilité de la lecture qu’en avait faite son découvreur : ce qu’il considérait comme un mur peut avoir été le fondement d’un édifice, ce que le dessin nomme « base d’autel » pourrait correspondre à une structure (le temple ?) réoccupée ensuite par le couvent, bref ce relevé sommaire ne saurait en aucun cas être considéré comme une planimétrie directement transposable sur le terrain. Malgré ce qu’en dit C. Cecamore, même le lieu de trouvaille des célèbres fragments épigraphiques des Fastes des Féries Latines ne peut servir à indiquer l’emplacement de l’édifice qu’ils ornaient, s’il est vrai, comme l’écrivait De Rossi, que leur concentration résultait déjà d’un récolement préalable et qu’à l’origine ils étaient épars sur tout le sommet392.
124Dans ces conditions, il peut être utile, comme nous l’avons fait déjà pour l’étude du cadre naturel, de se référer aux anciennes descriptions des voyageurs qui se sont succédé sur le sommet à partir de la fin du Moyen Âge.
125Pie II, le premier d’entre eux, n’est encore guère précis ; il ne connaît pas l’identité antique du lieu, se contentant de noter l’existence de grandes substructures, et se montrant plus sensible aux beautés du paysage qu’aux réalités archéologiques393 ; quant à son contemporain Flavio Biondo, il paraît avoir ignoré le site. Il faut attendre presque un siècle pour que ce dernier soit correctement identifié et Alberti, en 1550, fait état d’une grande quantité de restes monumentaux394. Dans la suite des temps, Holstein et Kircher se contenteront d’évoquer les vestigia maxima présents sur le mont, mais sans prendre la peine, hélas, de les décrire plus précisément395. Or il est possible qu’une autre source, aujourd’hui décriée, soit pourvue d’une réelle valeur documentaire, malgré sa date tardive. Piranèse, en effet, a consacré au sommet albain l’une des planches de son recueil de 1762, Descrizione e disegno dell’emissario del lago Albano. On y voit des colonnes doriques, ou plus exactement « toscanes »396, qu’il attribue au temple (pl. I), ainsi que des « sepolcrali e tegole di terra cotta ». Le problème de la fiabilité de Piranèse mérite d’être étudié au cas par cas ; par réaction contre la confiance que lui accordaient ses contemporains, on souligne volontiers aujourd’hui ses exagérations et partis pris397. Ainsi pourrait-on être tenté de ne voir dans son évocation des tombeaux qu’il dit avoir rencontrés sur le sommet albain que la trace de la description d’Alberti qui en faisait déjà état ; ce soupçon pourrait être d’autant plus fondé que, en Piranèse, l’artiste se doublait d’un érudit, dont les solides lectures sont manifestes dans les préfaces qui introduisent à ses recueils d’eaux-fortes. Cependant, lorsqu’on voit que les fouilles de Giovannoni, en 1912, aboutirent à l’identification, dans la partie méridionale du mont, un peu en contrebas du sommet, de « molte tombe, scavate nel terreno, chiuse nella forma a cappuccina od a cassettone, dai tegoloni del tempo di Tiberio » (NSA, 1912, p. 383), on ne peut que remettre en cause une condamnation qui apparaît comme injustifiée. Dans ces conditions, on prendra note du témoignage de Lalande : « On voit encore une multitude de grands blocs de pierre, qui viennent, selon Piranèse, soit du temple, soit des fortifications dont la montagne était munie. On y trouve des restes de colonnes, de corniches, de piédestaux, qui prouvent que cette ancienne architecture était déjà fort correcte »398. Mais le témoignage le plus précis, quoique bien oublié, sur les ruines vues et dessinées par Piranèse, est sans conteste celui du nommé Riccy, alors jeune abbé, qui, tout en reprenant Volpi, le complète sur certains points. On lui doit en particulier une intéressante remarque sur l’existence d’un arc. Il distingue aussi une aire qu’il attribue à un temple, dont il se contente de déplorer la destruction en indiquant qu’il regardait, à son avis, vers le sud, et des ruines de petits édifices, où il voit les lieux de séjour et de service destinés aux magistrats venus célébrer là les Féries Latines399. Sa description, notamment sa notation d’une triple stratigraphie dans l’un d’eux, se rapporte sans doute aux bâtiments où séjournaient les consuls et les délégués des peuples latins lors de la célébration annuelle du Latiar. Ou bien faut-il la référer à la chapelle mentionnée par une note400 de Iulius Obsequens ?
126Au total, il faut souligner néanmoins que l’archéologie n’apporte aucune preuve décisive en faveur de l’existence d’un temple sur le sommet latial ; en effet, même le mot aedes présent sur une inscription trouvée par De Rossi401 peut très bien s’être appliqué à un autre sanctuaire, celui de Junon Moneta par exemple, qu’on sait avoir existé sur le site. À tout le moins ne peut-on plus dire que l’archéologie prouve la non-existence d’un temple de Jupiter : en réalité, ni les pierres ni les textes ne permettent d’aboutir à une certitude. Nous avouerons cependant que nous avons peine à croire que ces colonnes, ces chapiteaux, ces gros blocs jadis présents sur le site en si grand nombre et décrits par les anciens voyageurs, ne doivent être rapportés qu’à des portiques ou édicules adjacents à un lieu de culte qui serait demeuré, lui, à ciel ouvert. Riccy, comme deux siècles avant lui Alberti, qui avait parlé d’un petit fort, avait cru reconnaître des bases de tours sur le sommet du Monte Cavo : comme le remarqua un de ses successeurs, l’abbé Giorni, il s’agissait plutôt d’une mauvaise interprétation de restes d’une façade in antis402. Ainsi, ce sont leurs erreurs mêmes qui valident ici les observations anciennes.
127S’il y a eu un temple au Monte Cavo, au moins depuis le ier siècle et peut-être avant, et si une petite église s’élevait là, à l’aube de la Renaissance, y a-t-il eu ou non, d’une religion à une autre, cette continuité topographique qui s’observe ailleurs, par exemple sur le Soracte ?403 Bien que l’on ne trouve aucun indice archivistique en faveur de la présence d’une église au haut Moyen Âge404, nous noterons que M. S. De Rossi avait souligné une continuité numismatique de l’Antiquité à l’époque moderne dans les trouvailles faites par lui sur le site405. Qu’il y ait donc eu un temple de Jupiter au Monte Cavo, à l’époque du Principat et de l’Empire, c’est possible, d’autant que l’absence de podium mise en avant par Lugli comme preuve négative est sujette à caution406. Peut-être même en avait-il existé un dès les temps républicains : comme l’a remarqué C. Cecamore, la dédicace de Cicereius, en-179, d’un temple à Junon Moneta, par l’étroit parallèle qu’elle suppose avec le Capitole romain, semble impliquer la présence préalable, sur le Monte Cavo, d’un temple dédié à Jupiter. En réalité, la véritable question porte sur l’existence d’un temple à l’époque archaïque. Là, en dehors d’un indice en vérité bien incertain407, on ne dispose d’aucun vestige matériel en ce sens. On se gardera toutefois de tomber, à ce sujet, dans une manière de scepticisme dogmatique. Ici aussi, la comparaison avec le sanctuaire du Capitole, dont il ne restait en tout et pour tout, avant les fouilles récentes, qu’une moitié de tuile, montre bien la fragilité en un tel domaine d’une argumentation e silentio408. Il reste que l’on ne peut, en bonne méthode, que supposer la présence d’un sanctuaire archaïque, et que l’on doit demander à d’autres disciplines que l’archéologie des indices en ce sens.
128Signalons également, au chapitre des présences matérielles, un puits et une citerne, déjà indiqués semble-t-il dans le dessin Barberini et retrouvés par M. S. De Rossi en 1876. D’après ce dernier, le puits, qui était plutôt un orifice d’écoulement, était destiné à recueillir dans la citerne à laquelle un conduit le reliait les eaux tombées sur l’aire sacrée409. Il est tentant de reconnaître dans ce dispositif la réponse aux obligations rituelles qui se posaient aux célébrants des Féries. Les purifications préparatoires auxquelles ils devaient se soumettre, après les longues heures de marche qu’ils avaient faites depuis Rome et les différents centres latins d’où ils venaient, exigeaient en effet la présence, sur le sanctuaire, d’eau non souillée. À défaut d’eau vive, toute source étant exclue sur un sommet, il ne pouvait donc s’agir que d’eau recueillie dans une citerne, et nous serions disposé à voir dans la structure identifiée par De Rossi une fauissa, que le compilateur Paul Diacre, dont l’information est d’ordinaire, on le sait, « de bonne source », définissait ainsi : Fauisae locum sic appellabant, in quo erat aqua inclusa circa templa (Fest. 78L). Dans le même sens, une prescription rituelle, sans nul doute d’antique origine, et connue par le même texte, n’obligeaitelle pas les Vestales à n’user, pour la confection de la mola salsa, que d’aquam iugem, uel quamlibet, praeterquam quae per fistulas uenit (ib., 152L) ? Or cette définition s’applique non seulement à l’eau vive des sources, mais également à celle des citernes. Les Vestales elles-mêmes semblent avoir eu recours à une solution intermédiaire : c’est ainsi que, lorsque l’atrium Vestae du Forum romain fut fouillé par Lanciani, Jordan supposa que la « piscine » mise alors au jour était en réalité destinée à recevoir l’eau vive des fontaines proches apportée là par des esclaves ; l’absence de tout raccord avec le réseau d’eau courante n’était-elle pas en effet le signe de la volonté de respecter la prescription rituelle mentionnée ci-dessus ?410 Sur le sommet albain, on pensera plutôt à de véritables citernes ; la découverte par les archéologues du xixe siècle de fragments de fistules de bronze, portant des chiffres dont le montant élevé fait d’ailleurs difficulté411, n’est pas nécessairement incompatible avec cette interprétation, dans la mesure où il peut s’agir, comme à l’atrium Vestae, de restes du dispositif d’évacuation, voire de fragments provenant d’autres endroits du site.
129Autres vestiges liés au sanctuaire, sans qu’ils prouvent l’existence d’un temple : les dalles de la route souvent appelée improprement412 « Voie triomphale », d’un nom qui n’est en réalité attesté dans aucun texte antique. Mentionnée dès 1269 et toujours décrite par les visiteurs modernes du site413, cette voie romaine et albaine est encore aujourd’hui l’une des mieux conservées du genre. Dans son état actuel, qui remonte à l’Empire, elle se caractérise par la présence, dans la partie supérieure de son tracé, des deux lettres N et V inscrites à plusieurs reprises chacune séparément sur des dalles contiguës414. Peut-être les interventions dont la voie a fait l’objet depuis le Moyen Aˆ ge ont-elles, ici et là, modifié la disposition originale de ces épigraphes, ce qui expliquerait que parfois, la même lettre se trouve répétée. Traditionnellement, ces signes avaient été interprétés par les antiquaires des xviie et xviiie siècles, puis par Nibby415, comme l’abréviation de numinis uia, certains proposant même n. uotum416, par allusion à la divinité au sanctuaire de laquelle la route conduisait. À l’occasion d’une visite qu’il y fit en 1885, Mommsen suggéra à Hülsen, qui l’accompagnait, d’y voir la marque laissée par un entrepreneur soucieux de bien distinguer (pour faciliter peut-être le compte de ce qui lui était dû) les tronçons qu’il restaurait de ceux qui restaient en l’état : u(etus) et n(oua) (uia)417. L’hypothèse, reprise par Lugli418, a été acceptée, pour autant que la recherche se soit intéressée au problème, et apparaît effectivement comme très plausible. La seule difficulté, qui n’en est peut-être pas une, tient à l’hapax que constituent ces inscriptions ; on peut s’étonner du reste que l’érudition ancienne n’ait pas pensé à une troisième solution : non pas numinis uia, mais nominis uia, par allusion au nomen Latinum qui trouvait, au bout de la route, le lieu de ses retrouvailles annuelles.
130Mais les vestiges peut-être les plus significatifs, dont on ne sait s’ils sont en rapport avec l’existence éventuelle d’un temple, sont certainement ceux qui révèlent la présence, quelque part sur le sommet, d’un ou plutôt de plusieurs dépôts votifs : C. Cecamore a édité récemment la liste d’une partie des objets trouvés au début du xxe siècle. Telle quelle, nous voudrions souligner que cette dernière ne représente qu’une petite partie de ce que le site a révélé : De Rossi avait déjà recueilli nombre de pièces qui n’ont pas été retrouvées419, et, d’une manière générale, des témoignages anciens montrent que la récolte n’a jamais cessé depuis le xviiie siècle, sans doute même depuis le xvie siècle420. Ce sont non seulement, comme partout ailleurs en Latium et en Italie centrale et méridionale, des terres cuites et des monnaies qui n’ont cessé de venir au jour, mais aussi des statuettes de bronze et des fragments d’aes rude, informes mais peut-être régularisés quant à leur poids421 : au vu des pièces retrouvées, on peut déjà fixer une chronologie qui va du ive au iie siècle av. n. è. Cependant, une chronologie plus ancienne peut être, à notre avis, établie : dans les découvertes faites par De Rossi, au milieu de l’aes rude et de « rozze stoviglie » non autrement décrites422, figurait ainsi un « vaso arcaico laziale » (p. 324) ; la formule n’est pas, il est vrai, très précise, mais l’identification de l’objet par Gierow permet de vérifier que, selon les usages de l’époque, l’expression sert à désigner les céramiques d’impasto, c’est-à-dire jusqu’à la période III : le même De Rossi soulignait du reste à ce propos combien le sol du Monte Cavo était « richissimo di frammenti di vasi rozzi primitivi e simili alle note stoviglie arcaiche laziali ». Il se pourrait aussi qu’un chaudron de bronze423, offrande tout à fait exceptionnelle en Latium, ainsi qu’une statuette, elle aussi en bronze, et semblable aux figurines d’orants que l’on retrouve dans les urnes-cabanes, provinssent du sommet albain424 : auquel cas, la chronologie archéologique de ce lieu sacré serait à étendre jusqu’au viiie et même aux xe-xie siècles av. n. è.
131C’est d’ailleurs bien dans cette direction qu’orienteraient les résultats d’une prospection de surface entreprise en 1977 : à cette occasion furent identifiés en effet les restes d’un habitat, datable de la fin de l’âge du Bronze et des débuts de celui du Fer, soit entre le xie et le viiie siècle, tandis que des trouvailles anciennes de Rosa suggèrent, à notre avis, l’existence d’une nécropole près de la route d’accès425. Or l’importance de cet habitat, qui s’étendait au-delà de l’aire concédée pour la fouille, nous a été personnellement confirmée (avril 2005) par F. Di Gennaro, qui, avec A. Guidi, n’avait pu alors que procéder à des sondages exploratoires. Bien que, malheureusement, encore sans suite, cet épisode pourrait contribuer à éclairer les découvertes anciennes faites aux Campi d’Annibale, qui ne sont qu’à trois cents mètres de là. S’agit-il ici des traces du centre de *Cabum, dont le nom est présent dans les prêtres Cabenses qui veillaient au bon déroulement des Féries Latines, et se retrouverait également, selon une hypothèse célèbre de Mommsen, dans l’appellation même de Monte Cavo ?426 Pour des raisons autres qu’archéologiques, il nous paraît qu’il faut en réalité réserver le nom de *Cabum/Caba à Rocca di Papa, ce qui laisse ouverte la question du nom à donner à l’habitat éventuel du Monte Cavo : il est alors difficile de penser qu’un tel site n’ait pas porté le nom d’Alba, qui est d’ailleurs celui que donnera presque toute la tradition antique à la montagne elle-même. Pourquoi alors avoir donné à cet habitat sommital le nom de Longa, et l’avoir imaginé comme une ville, une métropole même ? C’est là tout le travail du mythe des origines, qu’il nous reviendra d’éclairer par la suite. Auparavant, et pour en rester à un point de vue archéologique, la présence sur le sommet albain d’un habitat, cinq ou quatre siècles durant, suscite évidemment nombre de questions. Il faudrait d’abord savoir s’il y a eu ou non solution de continuité dans cette occupation. L’exemple, aujourd’hui fameux, de la grande cabane trouvée sous la cella du temple de Mater Matuta à Satricum a en effet inauguré un débat qui n’est pas clos : s’agit-il d’une pure coïncidence, en l’occurrence difficile à admettre tant est évident le désir des constructeurs du temple archaïque d’enserrer véritablement la cabane dans les limites de la cella427, ou de la première forme d’un lieu de culte ? Sur le Monte Cavo, l’imprécision topographique des trouvailles de 1977 tout comme l’incertitude quant à l’existence effective d’un temple ne permettent évidemment pas de poser la question dans les mêmes termes. Pour autant, cette problématique « prétemplaire », vigoureusement défendue par M. Torelli, G. Colonna et, pour le sommet albain, par A. Guidi428, mérite d’être prise en considération, ne serait-ce qu’à titre d’hypothèse de travail. D’ailleurs, d’autres sites albains, Lanuvium et Velletri, fournissent, semble-t-il, une séquence analogue. Sur le Monte Cavo, la grande fragilité des données d’ordre archéologique se trouve pour ainsi dire compensée par l’apport, via l’épigraphie, d’une donnée rituelle de première importance : la présence, dans les Fastes historiques des Féries Latines, de Cabenses dits montis Albani429.Dans ces conditions, l’on peut être tenté d’établir, au vu de ces trouvailles – si incomplètes soient-elles –, un parallèle entre le site pan-latin du Monte Cavo et un autre site, qui fut lui aussi, sous d’autres cieux, un centre sacré et international, le sanctuaire de Delphes. À Delphes, également, des fouilles récentes ont mis en lumière l’existence d’un habitat remontant à l’âge du Bronze, en l’occurrence la période mycénienne, ce qui pose la double question de la continuité d’occupation du site et de son caractère, simplement « laïque » ou déjà religieux430, problématique qui nous semble pouvoir être transposée au Monte Cavo.
Vigna Trovalusci et Palazzolo (pl. 10)
132Parmi les objets de la collection De Rossi parvenus au Musée Pigorini figurent quatre poteries et une pointe de lance, dont la provenance, d’après l’inventaire, est une vigne Trovalusci431 située près de Palazzolo, et qu’il ne faut pas confondre avec une autre du même nom se trouvant près des Frattocchie432. Comme le note Gierow, De Rossi ne dit mot de cette trouvaille faite en 1868 : était-ce parce que son emplacement eût pu être utilisé comme argument par tous ceux qui voulaient localiser Albe à Palazzolo ? Bien plus vraisemblablement, ces quelques objets dispersés ne lui ont pas paru présenter beaucoup d’intérêt, et ce silence est significatif de ce qui a souvent dû se passer ailleurs. Le résultat, en tout cas, en est qu’on ne sait si ce matériel, dont la bonne conservation suggère qu’il provient de tombes, se trouvait dans une sépulture à incinération ou à inhumation. Sa chronologie, qu’on a fixée naguère à la période III433, fait pencher pour la seconde hypothèse.
133Reste le problème de l’habitat correspondant à cette ou ces tombes, peut-être isolée(s). S’il faut renoncer, bien entendu, à placer Albe à Palazzolo, comme le voulaient les antiquaires du temps jadis, s’il est vrai également que la configuration du site doit beaucoup à un agrandissement qui, ainsi que le remarquait déjà Pie II, fut effectué par les constructeurs de la villa romaine, ensuite propriété impériale comme le révèle la toponymie (le nom Palatiolis indiquant l’existence d’un Palatium antique)434, il est néanmoins peu plausible que les Anciens Latins aient délaissé un lieu bien défendu qui, à l’ombre de leur montagne sacrée, formait une espèce de plate-forme naturelle pourvue d’un important point d’eau. Présentant, sur une surface plus réduite, les mêmes caractéristiques, mais un peu plus en hauteur, le site voisin de Maleaffitto (ou Malafitto), occupé à l’époque médiévale par une forteresse, fut, lui aussi, habité durant la protohistoire, puisqu’on y a identifié un fond de cabane de la période latiale435.
Notes de bas de page
1 Le Mémoire du duc, féru d’Antiquité et traducteur de Mommsen, fut, après le si long et si curieux silence qui avait pesé sur les découvertes de 1816 (c’est une date possible des toutes premières découvertes) -1817, silence que nous avons tenté d’expliquer supra p. 22 et s., l’une des premières étapes vers l’entrée des trouvailles de Marino dans le débat scientifique sur l’histoire des primordia. Peu après sa communication, lue à la Société impériale des Antiquaires de France, dont il était alors le Secrétaire, les 1er et 8 juin 1864 (communication dont on trouve mention aussi dans le Bulletin de la Société, 1865, p. 48 ; voir aussi ib., p. 195, et 1862, p. 84), Blacas fit présenter son Mémoire à l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres le 20 janvier 1865 par le baron de Witte (CRAI, 2e s., 1, p. 15), associé étranger de l’Académie, qui avait publié en 1861, dans la Gazette des Beaux-Arts (p. 51), une note sur les découvertes de 1817. À noter que le Mémoire, malgré les apparences, n’était pas la première contribution scientifique en langue française sur la question. Les urnes-cabanes albaines prennent en effet place dans l’Histoire romaine à Rome d’Ampère, dès 1862 : « Des urnes funéraires très anciennes, trouvées près du mont Albain, et qu’on voit au musée étrusque du Vatican, mettent sous nos yeux ce qu’étaient ces habitations primitives du Latium, dont la cabane de Romulus conserva le type » (1, p. 343). Pour trancher la question controversée de la position stratigraphique et de la datation des urnes-cabanes, Ampère fait état du témoignage de Rosa, d’où il ressort que ce dernier expliquait la présence d’une couche de lave dure au-dessus des urnes par le fait qu’elles avaient été déposées en contrebas à partir d’une route dominée par la pente ; or, on peut voir que Blacas connaissait lui aussi « M. le chevalier Rosa », « archéologue distingué » (p. 96), et que ce dernier avait eu l’idée de son explication non pas, comme on pourrait le croire, en recueillant des témoignages oraux sur place quarante ans après, mais par ses propres « fouilles » le long de la voie du Monte Cavo sur les côtés de laquelle il avait trouvé « plusieurs cryptes du même genre ». Si la conclusion, juste, des déductions de Rosa, dont profite aussitôt Ampère, est que les vases albains doivent être dissociés de toute manifestation d’un volcanisme tardif, on ne peut s’empêcher de noter que cette vérité naît elle-même d’une erreur et que le raisonnement qui la fonde est fantaisiste. La réalité des découvertes de Rosa ne doit pas cependant être mise en doute : sans les connaître, F. Di Gennaro et M. Pacciarelli l’ont authentifiée lorsqu’ils ont identifié une tombe latiale à dolium, au bord de la route du Monte Cavo : cf. Arch. Laz., 1, 1978, p. 86, n. 18. Par ailleurs, la description d’Ampère datant de 1862, on ne saurait écrire, à propos d’une publication de 1879, que « il primo a riconoscere i rapporti indiretti tra le capanne laziali e le urne a capanna dell’età del ferro fu G. B. De Rossi, che nella prefazione alla sua raccolta delle antiche piante di Roma, pone a confronto l’urna fittile di Campofattore colle notizie tramandate sul tempio di Vesta e le capanne di Romolo » (G. Bartoloni, in Le urne a capanna rinvenute in Italia, 1987, p. 8 ; cf. aussi ib., p. 135, n° 1). Comme le prouvent les lignes de l’Histoire romaine à Rome que nous avons citées, c’est en réalité au brillant Ampère qu’il convient de reconnaître la paternité d’un rapprochement devenu classique.
2 Cf. The Iron Age Culture of Latium, 2. Excavations and Finds, vol. 1 (seul paru), The Alban Hills, Lund, 1964 ; le t. 1 parut en 1966, sous le sous-titre Classification and Analysis. Nous citerons désormais cet ouvrage en employant l’abréviation IAL 2 pour le vol. de 1964 et IAL 1 pour celui de 1966.
3 Cf. notre Fondation de Rome, p. 33 et s. ; et aussi « Les noces de Philologie et d’Archéologie ou comment lire Tite-Live pour l’histoire des Primordia », in Présence de Tite-Live, Tours, 1993, p. 79 et s. Cf. déjà J. Poucet, Les Origines de Rome, 1985, p. 116 et s.
4 Cf. par ex. M. Pallottino, Origini 1993, p. 47.
5 CIL, 14, 1887 (H. Dessau) : nombreux exemples dans l’Index auctorum, p. XI et s. ; pour Riccy, inscriptions n° 165 à 168 des « Falsae ». Voir infra, p. 274 et s. et p. 319, les informations apportées par son ouvrage.
6 En 1923, il avait déjà effectué des fouilles au lieu-dit Riserva del Truglio, dans le Pascolaro de Marino, où, en 1928, il entreprit une nouvelle excavation dans les terrains Costa et Marroni, qu’il ne publia pas, mais sur laquelle il laissa quelques notes, conservées dans les archives du Musée Pigorini, où Gierow put les consulter : cf. infra, p. 249 et s. Depuis cette date, on a fait, bien sûr, nombre d’autres trouvailles sur le territoire albain ; comme on le verra, elles se multiplient même depuis quelques années, mais il s’agit de trouvailles ponctuelles ou du produit de ce qu’on appelle l’archéologie de surface : il faudra ensuite attendre l’exploration du site de Colle della Mola dans les années 1970 pour qu’il y ait une nouvelle fouille dans l’aire des Colli Albani.
7 In Alba Longa 1996, p. 7.
8 Il ne servirait à rien d’aligner ici les références bibliographiques et nous nous contenterons de rappeler que les principales étapes de cette découverte archéologique du Latium des primordia ont été marquées par les grandes expositions Civiltà del Lazio primitivo (Rome) en 1976 (que nous abrégeons en CLP), puis Enea nel Lazio. Archeologia e mito (Rome) en 1981, ainsi que par la publication, assurée par S. Quilici-Gigli, de rapports préliminaires rassemblés, de 1978 à 1992, dans les Quaderni del centro di studio per l’archeologia etrusco-italica à l’occasion d’un « incontro di studio » organisé chaque année, du moins en principe, par le « comitato per l’archeologia laziale » appartenant au « Consiglio Nazionale delle Ricerche ». Sous le titre Archeologia Laziale, douze numéros ont paru. Depuis 2002, et après une interruption d’une dizaine d’années, le principe de ces colloques annuels a repris, sous le titre Lazio e Sabina. Citons également le mémorable colloque (Rome, juin 1977) « La formazione della città nel Lazio », dont les Actes ont été publiés par la revue Dialoghi di Archeologia, n.s., 2 vol., 1980, p. 125-232, et auquel nous nous référerons désormais sous le sigle DdA, 1980.
9 En 1977 : Relative and Absolute Chronology of the Iron Age Culture of Latium in the Light of Recent Discoveries, Lund, 1977. En 1983 : « I Colli Albani nel quadro archeologico della civiltà laziale », in O. Rom., 14, p. 7-18.
10 Cf. P. Grimal, Italie retrouvée, p. 77-78.
11 Dont on aura un aperçu en consultant la rubrique « Methode und Grundsatzfragen » de l’Archäologische Bibliographie publiée annuellement par le Deutsches Archäologisches Institut de Rome jusqu’en 1993, maintenant accessible sur la banque informatique de données Dyabola.
12 Point bien mis en lumière par Gierow, IAL 1, p. 3.
13 « Alcune osservazioni sul popolamento dei Colli Albani in età protostorica », in RdA, 6, 1982, p. 31-34.
14 C’est en 1955, en effet, que F. Castagnoli et L. Cozza débutèrent leurs investigations sur le site : cf. Enea nel Lazio, 1981, p. 166.
15 Sur les nouvelles problématiques de fouilles dans ce domaine, on verra : New developments in Italian landscape archaeology, P. Attema éd., Oxford, 2002.
16 Voir par exemple le lieu-dit « Osteria le Capanne di Marino » à 3 km avant les Frattocchie, sur l’Appia.
17 Cf. supra n. 6.
18 Citons par ex. le cas de la tombe Andreoli : cf. infra p. 354.
19 On consultera utilement, sur ces fonds, l’article de D. Tamblè, « Fonti documentarie per la storia dell’archeologia nell’archivio di stato di Roma », in Archeologia e informatica, Quaderni dei DdA, 4, Rome, 1988, p. 55-67.
20 Cf. le volume dirigé par A. Caracciolo, Il Lazio, p. 188-191. Les rendements de la viticulture par rapport à la traditionnelle céréaliculture sont décuplés ; le nombre des ceps plantés à l’hectare passe de 6 000 à 12 ou 15 000 ; pour le détail des techniques de culture, renvoi à R. de Felice, Aspetti e momenti della vita economica di Roma e del Lazio nei secoli xviii e xix, Rome, 1965.
21 En raison de l’histoire particulière du site, le cas romain ne peut fournir un terme de comparaison valable. Il n’y a bien sûr aucune stratigraphie pour les objets dépareillés qui forment la très grande majorité du fonds albain colligé par Gierow, à l’exception des fouilles réalisées par Antonielli à la Riserva del Truglio : là, les tombes furent trouvées à une profondeur allant de 85 cm à 1,85 m (cf. IAL 2, p. 133). À l’Osteria dell’Osa, bien que quelques rares tombes aient été trouvées à près de 3 m de profondeur, la plupart étaient à un niveau de quelques dizaines de centimètres sous la surface du sol actuel : voir Necropoli Osa, passim, l’indication « quote » pour chaque tombe.
22 Voir par ex. le cas des découvertes récentes énumérées par P. Chiarucci, in Alba Longa 1996, p. 332-333.
23 Avant tout grâce aux recherches de R. Lanciani : la Storia degli scavi di Roma, dont seuls les quatre premiers volumes parurent du vivant de l’auteur, a fait l’objet d’une récente réédition par les soins de l’Istituto Nazionale di Archeologia e Storia dell’Arte, sept volumes, parus de 1989 à 2002. On a pu d’autant plus oublier ou minorer l’importance de cette archéologie antéscientifique en Latium qu’il n’existe pas encore pour la Campagne romaine d’enquête comparable à celle de Lanciani, qui se révèle néanmoins précieuse même de ce point de vue, comme le souligne F. Castagnoli, « Forma Italiae : ricerche nel Lazio arcaico », in Quaderni dell’Istituto di Topografia antica della Università, 6, Ricognizione archeologica e documentazione cartografica, Rome, 1974, p. 39-42 : c’est par exemple à Lanciani qu’est dû le premier signalement de la nécropole de Castel di Decima (p. 42).
24 Cf. Tomassetti, C.R., 4, p. 175. Le caractère quelque peu contradictoire de ces deux prescriptions indique bien que les fouilles étaient en réalité très nombreuses et étaient le fait de chaque fermier. Sur une même clause pour le territoire de Rocca di Papa, cf. ib., p. 474.
25 Ib., p. 175.
26 On en trouvera bien des exemples dans les pages qui suivent. Voir aussi, in Tomassetti, C.R., 4, p. 182, la lettre révélatrice adressée en 1646 au cardinal Girolamo Colonna par l’un de ses intendants, à propos de fouilles à faire entreprendre pour trouver de la « robba bona » : « Laudarebe di fare pratica con quelli che cavano antichità », formule qui implique, à bien y regarder, l’existence d’une véritable « corporation » spécialisée d’« archéologues » se consacrant à la recherche de la « robba bona »... La preuve en est d’ailleurs fournie par un contrat, daté de février 1568, entre le prince Marcantonio Colonna et un certain « Bartolomeo Velli cavatore » (ib., p. 186). Ajoutons que les archives Colonna révèlent par ailleurs l’ouverture, dès le xvie siècle, de fouilles sur le Monte Cavo (ib., p. 510) ; en 1747, le peintre anglais Parker y fut arrêté sur le soupçon, infondé selon toute apparence, d’y vouloir « cavar tesori » (ib., p. 490), épisode tardif qui en dit long sur la réalité et l’ancienneté de pratiques dont le résultat est, la plupart du temps, demeuré dans l’obscurité. Au début du xxe siècle, Tomassetti peut ainsi encore écrire, à propos de Velletri : « Non dico poi delle iscrizioni, e di marmi decorativi che ogni contadino trova sempre in occasione di lavori campestri, che neppure gli occhi d’Argo basterebbero a sorvegliare » (2, p. 352).
27 Ce primat absolu accordé par les amateurs d’antiquités aux statues, aux xvie et xviie siècles, est un fait bien connu, mais dont on ne saurait sous-estimer l’importance pour notre propos : une bonne illustration en est fournie par les contrats ou les « ordres de mission » conclus par la famille Colonna au sujet des fouilles exécutées sur leurs terres de Marino, qu’on pourra lire in Tomassetti, C.R., 4, p. 186.
28 On verra une illustration de ce peu de valeur accordé aux terres cuites en tout genre à propos du Monte Cavo (infra p. 278).
29 Cf. par ex. IAL 2, p. 39, n. 2 (citant De Rossi) et p. 354.
30 Sur l’Abbé Barthélémy (1716-1795), on consultera le Dictionnaire de Biographie française, sous la dir. de M. Prevost et R. d’Amat, t. 5, Paris, 1951, p. 666-668 (V. L. Saulnier). Il séjourna en Italie de 1755 à 1757.
31 C’est ce Mémoire dont il dit, dans une lettre au comte de Caylus datée de mai 1756 : «...je viendrai toutes les semaines passer quelques jours à Rome, vérifier ce que j’aurai étudié à Frescati [sic]. J’y mettrai aussi mes papiers en ordre, et je tâcherai d’y composer quelque Mémoire pour l’académie ; ce ne sera pas sans peine. J’ai beaucoup de petites observations, mais rien de bien piquant » (in A. Sérieys, Voyage en Italie de M. l’Abbé Barthélémy, Paris, 1802, p. 139 ; le Mémoire est reproduit aux pages 335-389 de cet ouvrage, où l’on apprend également que le Voyage d’Anacharsis fut d’abord placé en Italie et pensé comme « la relation d’un voyage entrepris dans ce pays vers le temps de Léon X, et prolongé pendant un certain nombre d’années », cf. p. 397).
32 Ib., p. 353-354.
33 Ib., p. 351. Pie II y faisait déjà allusion dans ses Commentarii (1463) : cf. l’éd. Van Heck, 2, p. 708.
34 Voir une reproduction in Enea nel Lazio, 1981, p. 151.
35 À l’exemple de celui de la via Appia, qui fut trouvé en 1726 et publié un an plus tard par F. Bianchini. Cette découverte fournit du reste une éloquente illustration du sort qui attendait trop souvent les objets autres que statues et médailles : à l’exception des inscriptions et des sculptures sauvées du saccage grâce à la générosité du cardinal Albani, l’hypogée et les innombrables urnes qu’il contenait furent détruits sans rémission ; sur cet épisode et d’autres analogues, voir F. de Polignac, « La ‘fortune’ du columbarium », in Eutopia, 2, 1, 1993, p. 41-63.
36 Urnes-cabanes carrées : cf. G. Bartoloni et alii, Le urne a capanna... : n°75 à 77 (Tarquinia) ; n° 84 (Véies) ; n° 129 et 135 (Osteria dell’Osa) ; n° 153 (Marino) ; n° 176 (Pratica di Mare).
37 Voir par ex. dans les Oeuvres diverses de J.J. Barthélémy, t. 2, an 6 (1798), p. 156-168, la relation faite par l’Abbé d’un « Voyage à Tusculum et à Palestrine » : on y apprend qu’il alla voir en juillet 1756 l’émissaire du lac d’Albano et que, le 18 de ce mois, il gravit le Monte Cavo dont il fait une exacte description (p. 160-161).
38 C’est ainsi que des aménagements modernes dans le site des anciens jardins Torlonia, à Castel Gandolfo, ont permis d’identifier des restes de tombes latiales déjà détruites : cf. Chiarucci 1978, Colli Albani, p.85 et s. et p.150 et s.
39 Cf. P. Grimal, Italie retrouvée, p. 278.
40 Sur tout ceci, voir supra p. 23 et s.
41 Cf. IAL 2, p. 130.
42 Ib., p. 132, à propos de Lanciani in NSA, 1884, p. 108 et s.
43 Ib., p. 112 et n. 4, à propos de Pinza, Mon. prim., col. 344.
44 Ib., p. 232, n. 2.
45 Voir infra p. 477 et s.
46 Cf. infra p. 287 et s.
47 Voici par exemple les lignes, d’autant plus révélatrices qu’elles sont antérieures à cet épisode, qu’écrivait l’Abbé Barthélémy sur des trafics qu’il connaissait bien : « Il est difficile de trouver ce qu’on souhaite. Je courus l’autre jour pour avoir une douzaine de petites figures de terre cuite, vilaines et mal conservées. On m’en a demandé six sequins ; devois-je les prendre ? Il faudroit aller à la place Navone : outre que je n’en ai pas le temps, les paysans ne sont pas assez sots aujourd’hui pour porter en cet endroit ce qu’ils découvrent ; ils ont leurs marchands qui leur en donnent peu de chose, et le vendent ensuite énormément » (A. Sérieys, Voyage en Italie de M. l’Abbé Barthélémy, o.c., p. 222). On se souviendra également que Goethe, séjournant en août 1787 à Castel Gandolfo, logeait chez « un Anglais, M. Jenkins, riche marchand d’ouvrages d’art » (cf. Voyages en Suisse et en Italie, trad. J. Porchat, Paris, 1862, p. 422).
48 Comparer IAL 2, p. 335, fig. 201, n. 14, et G. Bartoloni et alii, Le urne a capanna..., t. 43, fig. c, et p. 103, n° 167, où est indiquée comme provenance : « Castel Gandolfo. Montecucco ». Il convient toutefois de remarquer que le seul élément qui semble sûr est l’appartenance première de cette urne au fonds Carnevali, Bonstetten l’ayant achetée au marchand Depoletti, qui l’avait lui-même acquise auprès de la veuve du découvreur de 1817 : voir le document mentionné in IAL 2, p. 316, n. 6, et cité in G. Bartoloni, o.c., p. 6, n. 6. Pour le reste, cette indication ne résout rien et ne fait que renvoyer aux incertitudes et aux obscurités qui entourent les découvertes de 1816-1817, sur lesquelles on verra la rubrique qui leur est consacrée infra p. 283 et s.
49 Lettera..., in Atti dell’Accademia Romana di Archeologia, 1, 2, 1823, p. 320 : indication dont Gierow, qui la cite (IAL 2, p. 313), a justement montré l’imprécision et la quasi-inutilité scientifique.
50 On y ajoutera même l’épisode obligé du faux, en l’occurrence l’urne-cabane conservée au Metropolitan Museum de New York et que des analyses récentes ont révélé n’être qu’une imitation moderne : cf. G. Bartoloni, o.c., 1987, p. 265-266, et ib., p. 142, n. 21, pour une urne récemment apparue dans une exposition de Linz. Cela dit, le grand désintérêt qui, au xixe siècle, a entouré rapidement les découvertes de 1816-1817, et le peu de valeur accordé conséquemment au matériel latial ont ici limité à l’extrême ce type de phénomènes.
51 Voir infra, p. 283 et s., ce que nous écrivons des découvertes de 1816-1817.
52 Conséquence d’une loi de financement exceptionnel votée en 1981. Les premiers résultats en furent publiés dans l’ouvrage dirigé par A. M. Bietti Sestieri, Preistoria e protostoria... (partic. p. 11-74) ; à paraître : M. Angle, C. Belardelli, Repertorio dei siti protostorici del Lazio. Provincia di Roma.
53 Qu’il nous suffise de renvoyer ici aux observations d’H. Delporte, Archéologie et réalité, Paris, 1984, et d’A. Galley, L’Archéologie demain, Paris, 1986.
54 Ce point a été bien mis en lumière par A. M. Bietti Sestieri, in « I dati archeologici di fronte alla teoria », DdA, 4, 1986, p. 249-263.
55 Date de publication d’IAL 2.
56 Où l’on voit que l’histoire de l’archéologie albaine est d’abord faite de silences et d’oubli : de 1816 aux années 1860 d’abord (cf. notre premier chapitre) ; de 1925 (qui n’est, de plus, qu’un épisode isolé) aux années 1970 ensuite.
57 Toutes ces localités figurent sur la carte au 25 000e de l’IGM qui porte le n° 150, hormis Ariccia, Lanuvio et Velletri qui appartiennent au feuillet 158. On pourra se référer aux cartes reproduites ici en fin de volume : planches I à V. Pour une liste et une cartographie récentes des sites, se reporter à : B. Amendolea (sous la dir. de), Un repertorio bibliografico per la Carta Archeologica della Provincia di Roma, Rome, 2004, 2 vol. (I : texte ; II : cartes).
58 Voir A. M. Bietti Sestieri, A. De Sanctis, Protostoria dei popoli Latini, Rome, 2000, p. 6. Bien entendu, cette nouvelle chronologie est elle-même appelée à évoluer au fil des découvertes et des recherches à venir.
59 Bibliographie : NSA, 1902, p. 115 (L. Savignoni) ; IAL 2, p. 26 ; G. Ghini et A. Guidi, « Colonna : nuove acquisizioni per l’età del ferro », in Arch. Laz., 6, 1984, p. 63-75. Pas de rubrique à ce nom dans la BTCGI. Le nom du village n’a sans doute pas de rapport avec le lieu-dit Columen, mentionné par Tite-Live (3, 23, 6). Selon Tomassetti, il serait dû au fait que les comtes de Tusculum, suzerains du lieu, demeuraient à Rome près de la Colonne Trajane, dont ils tirèrent leur patronyme : cf. C.R., 3, p. 413. Selon Nibby (Analisi..., 2, p. 121), il est né de la présence de ruines. S. Del Lungo donne plutôt raison à ce dernier, en fonction de documents antérieurs à 1100 et à l’arrivée des seigneurs homonymes : cf. Top. Arch., 1, p. 171, n. 16.
60 Sur cet aspect, cf. supra p. 70 et l’existence d’un proche Laghetto. Encore que le cas de ce toponyme doive être examiné avec précaution : cf. en effet dans le catalogue de l’exposition Thomas Ashby. Un archeologo fotografa la Campagna Romana tra 800 e 900, Rome, 1986, p. 119, la photographie du « Laghetto della Colonna », qu’il démontra (in Rend. Linc., 7, 1898, p. 109 et s.) ne pouvoir être le lac Régille, puisqu’il ne s’agissait que d’une carrière romaine, ce qui interdirait évidemment du même coup d’y voir un lac protohistorique. Nibby, quant à lui (réf. in o.c.), avait mis en rapport cette carrière avec la construction de la via Labicana. Cela dit, il est possible que les entrepreneurs antiques aient utilisé le site d’un lac à variations périodiques, car on a relevé aussi la présence d’une source et d’un emissarium. Voir aussi Tomassetti, C.R., 3, p. 443. De toute façon, les relevés faits à l’occasion des fouilles récentes semblent bien confirmer l’existence d’un environnement lacustre à Colonna : cf. Arch. Laz., 6, o.c., p. 71-72.
61 Sur l’importance de ce tracé, cf. S. Quilici-Gigli, « La Valle del Sacco nel quadro delle comunicazioni tra Etruria e Magna Grecia », in SE, 38, 1970, p. 365 et s., et P. Sommella, « Per uno studio degli insediamenti nelle valli del Sacco e del Liri in età preromana », ib., 39, 1971, p. 393 et s. La découverte (ou plutôt la recomposition) récente d’une riche tombe du VIIIe s. à Rocca di Papa a illustré l’importance et la précocité de cette voie de trafics : cf. infra p. 266 et s.
62 Cf. supra p. 193 et s. Réf. in Arch. Laz., o.c., p. 63, n. 7.
63 Cf. G. Ghini et A. Guidi in Arch. Laz., 6, o.c. Voir aussi : Roma, città del Lazio, S. Rizzo éd., Rome, 2002, s.v. Colonna, (p. 57-63), et S. Bozzato et alii, « L’area funeraria di Pian Quintino », in Atti XL Riunione sc. I.P.P., 2007, 2, p. 900-904.
64 Il s’agit de quatre fragments répertoriés sous le n° 142 in G. Bartoloni et alii, Le urne a capanna... (p. 89) ; cf. aussi ib., fig. 66. Datation : II A.
65 Cf. L. Bologna et alii, « Intervento archeologico in località Pasolina (Colonna) », Lazio e Sabina, 1, J. Rasmus Brandt éd., Rome, 2003, p. 159-162.
66 Réf. o.c., p. 68, n. 13.
67 Sur ce problème, voir l’article maintenant classique, « Un aspetto oscuro del Lazio antico. Le tombe del vi-v sec. a.C. » in PP, 32, 1977, p. 131-165 (à compléter par id., « L’ideologia funeraria e il conflitto delle culture », Arch. Laz., 4, 1981, p. 229-232), suivi par C. Ampolo, « Il lusso funerario e la città arcaica », AION, Arch. St. Ant., 6, 1984, p. 71-102.
68 Cf. Pro Planc., 23 : Nisi forte te Labicana aut Gabina aut Bouillana uicinitas adiuuabat, quibus e municipiis uix iam qui carnem Latinis petant reperiuntur, « À moins que toi, peut-être, tu n’aies été aidé par le voisinage de Labicum, de Gabies ou de Bovillae, tous municipes où l’on trouve à peine assez de monde pour aller, aux Féries Latines, réclamer leur part de viande. » (Trad. P. Grimal, CUF, 1976, p. 72.)
69 Cf. OGR, 17, 6, et Diod. ap. Eus., Chron., 1, 287 Sch.
70 In Arch. Laz., 6, o.c., p. 73 ; cf. aussi F. Arietti in Alba Longa 1996, p. 34. Localisation adoptée par le Barrington Atlas of the Gr. a. R. World, R. Talbert éd., Princeton, 2000, carte 43.
71 Voir Necropoli Osa, p. 50 et s., à propos de deux groupes de tombes (nord et sud), dont les spécificités ne peuvent s’expliquer par la seule chronologie.
72 Cf., déjà, Fustel de Coulanges, La Cité antique, livre 2, chap. 10, et J. C. Richard, Origines..., p. 155, n. 67, sur les gentilicia sacra. Ce même savant remarque que la thèse fustélienne « de la préexistence de la gens par rapport à la cité est aujourd’hui admise par la majorité des historiens et des juristes » (ib., p. 151, n. 56, avec bibl.).
73 Cf. supra p. 173.
74 Sur ce type de tombes, on lira les importantes remarques d’A. Bedini à propos de « Due nuove tombe a camera presso l’abitato della Laurentina : Nota su alcuni tipi di sepolture nel vi e v secolo a.C. », in Arch. Laz., 5, 1983, p. 28-37 ; et également celles de G. Colonna, dans sa contribution « Urbanistica e architettura », au volume collectif Rasenna. Storia e civiltà degli Etruschi, Milan, 1986, p. 371-530 (partic. p. 396 et s.).
75 À ce propos, on doit mentionner le problème posé par l’inscription CIL, 14, 2772, qui fait état d’un speculum Dianae pour ce qui semble être pourtant une délimitation purement locale. Or le lac de Nemi, auquel on rapporte communément cette appellation, est loin de Colonna ; Mommsen, dans un premier temps, avait résolu la difficulté en lisant, non pas ab speculo Dianae mais af specu Ludiane, leçon qu’il mettait en rapport avec le culte mithriatique, attesté à proximité. Mais comme il le reconnut lui-même par la suite, cette lecture n’était pas recevable (réf. in CIL, ib.). Il reste donc possible que l’expression ici attestée ait désigné autre chose que le lac de Nemi : un lac près de Colonna (Montefalcone, cf. Tomassetti, o.c., p. 412) ou, un peu plus loin, un des lacs qui s’étendaient autour de Frascati. Il faut rappeler en effet que l’expression, en droit au moins, est dissociable du seul lac de Nemi ; car son origine est, non pas esthétique (le poli du miroir des eaux de Nemi), comme on le dit trop souvent, mais théologique : la déesse, identifiée à l’astre lunaire, apparaissant dans les eaux qui la reflètent (cf. supra p. 72), cette « épiphanie » peut valoir, non seulement à Nemi, mais pour tout lac, ou du moins pour tout lac auprès duquel un culte de Diane était établi. Or nous avons vu (cf. supra p. 103) que c’était le cas, non loin de Frascati, du lac dit Cornufelle, et ce pouvait être le cas ailleurs.
76 A. Guidi (Arch. Laz., 6, p. 72) signale des analogies de la barquette de la tombe 10 avec des objets villanoviens. Cf. aussi S. Quilici-Gigli, in Il Tevere e le altre vie d’acqua del Lazio antico (= Arch. Laz., 7, 2), 1986, p. 71-89 (partic. p. 85) pour de nombreux autres exemples (Tarquinia, Véies, notamment). On verra dans ce travail que l’interprétation la plus courante exclurait, il est vrai, toute valeur symbolique pour ces objets : il s’agirait seulement d’une représentation miniaturisée des activités réelles du défunt, et, à Colonna, puisque la tombe est celle d’un enfant, d’un jouet (Arch. Laz., 6, p. 72). L’aspect symbolique, cependant, nous paraît difficilement pouvoir être éliminé : une trouvaille, conservée aujourd’hui dans une collection privée suisse, et provenant d’Italie centrale, irait du reste en ce sens, s’il est vrai qu’elle associait barquette et statuette : cf. L’Art des peuples italiques, catalogue d’exposition, Paris, 1994, p. 23, n. 22.
77 Bibliographie : T. Ashby, in PBSR, 5, 1910, p. 354 et s. ; Tomassetti, C.R., 4, p. 351-387 (partic. p. 371) ; IAL 2, p. 30 ; M. Angle, A. Guidi, « Il popolamento del territorio di Grottaferrata in età pre e protostorica », in Doc. Alb., s. II, 1, 1979, p. 43-66 ; L. Quilici et S. Quilici-Gigli, « Ricerca topografica a Tusculum », in Arch. Laz., 10, 2, 1990, p. 205-225 ; id., « Sulle fortificazioni di Tusculum », Arch. Laz., 11, 1993, p. 245-269 ; voir aussi X. Dupré Raventós, « Il foro repubblicano di T. alla luce dei recenti scavi », Lazio e Sabina, 1, 2003, p. 163-168 ; M. Valenti, Ager Tusculanus, Florence, 2003. Signalons aussi un colloque tenu à Rome en 2000 sur T. et qui sera publié par F. Arietti et A. Pasqualini. L’Escuela Española de Historia y Arqueología en Roma a fouillé le site, de 1994 à 2002. Les résultats des campagnes menées de 1994 à 1999 sont publiés par X. Dupré (et alii) sous le titre, Scavi archeologici di T. : rapporti preliminari delle campagne 1994-1999, Rome, 2000. Dès 1994 a été trouvée au théâtre antique une inscription gravée, au milieu du Ier s. av. J.-C., sur la base d’une statue équestre en l’honneur de Cn. Domitius Ahenobarbus Imperator, sans doute le consul de 122 av. J.-C. ; la présence d’un tel monument à T. s’expliquerait par la légende de l’ancêtre mythique des Ahenobarbi auquel les Dioscures auraient annoncé la victoire du lac Régille (Suét., Ner., 1) : cf. J. Arce et alii, « Cn. Domitius Ahenobarbus en Tusculum », in Chiron, 27, 1997, p. 287-296.
78 Voir les réserves de G. Mc Cracken, auteur de plusieurs travaux de fond sur Tusculum (bibl. in Quilici, Arch. Laz., 10, p. 205, n. 10) et dont la notice in R.E., A, 7, 1, 1939, col. 1463-1491 (ici 1463) mérite d’être lue avec soin.
79 Voir les suggestives photographies données par T. Ashby, o.c., pl. 31, fig. 1 et 2 (visibles aussi sur la Toile, site Vrbs, s.v. Tusculum) ; et in Arch. Laz., 11, p. 268, fig. 44.
80 Le site de l’arx proprement dite fut fouillé pour le Prince Borghèse en 1835-1836 : cf. Ashby, o.c., p. 355 ; auparavant, Lucien Bonaparte avait fait réaliser d’autres fouilles par Canina : voir l’article d’A. Pasqualini, « Gli scavi di L. Bonaparte alla Ruffinella e la scoperta dell’antica Tusculum », in Xenia, 1, 1992, p. 161-186.
81 Sur cet aspect, voir L. Quilici, S. Quilici-Gigli, P. Petraroia, Il patrimonio archeologico e monumentale della XI Comunità Montana del Lazio, Rome, 1984.
82 M. Angle et A. Guidi, « Il popolamento... », o.c. Sur les pentes n.e. de l’arx, fragments allant du Bronze récent jusqu’à la phase IV, avec, au lieu dit Ciufoli, un tesson retrouvé récemment (2000), de la phase II ; sur les pentes s.e., nombreux tessons (I à IV) et, récemment, un holmos intact (viie s.), provenant donc sans doute d’une tombe : cf. M. Valenti, o.c., n. 826-7 p. 362 et n. 873-4 p. 377.
83 L. et S. Quilici, in Arch. Laz., 10, p. 209 : « Alcuni frammenti d’impasto sulla rocca ci sono parsi riferibili già all’viii secolo a.C. ». Sur cet aspect, voir, déjà, D. Giorgetti, « Cenni preliminari sulla cultura del ferro in area tuscolana : materiali di superficie dalla rocca e dalle pendici di Tuscolo », in Atti del Convegno Gruppi Archeologici del Lazio, Tolfa, 1976, p. 5-12. Une tasse d’impasto de la phase III a été trouvée sur les pentes n.o., sur le lieu (dit Camposanto) d’une nécropole en usage jusque sous l’Empire : cf. M. Valenti, o.c., n. 839 p. 369.
84 Voir notre Fondation de Rome, passim.
85 Réf. in Tomassetti, o.c., p. 400.
86 Liv., 26, 9 ; Sil. Ital., 12, 350.
87 In Arch. Laz., 11, o.c., p. 257 : « Pare plausibile già una datazione al v secolo a.C. »
88 Ib. et n. 18. En réalité, il faut noter, avec G. Lugli, que l’emploi de cette unité de mesure n’est, en principe, pas habituel à Rome (cf. La tecnica edilizia Romana, 1, 1957, p. 193) : sans doute serait-il excessif d’en déduire que les murailles de Tusculum ont été conçues par des techniciens venus d’ailleurs.
89 O.c., p. 257 : mais une même technique peut avoir été en usage sur une longue période. En fait, le fortin est du ive s. : cf. M. Moltesen (éd.), Excavations at La Giostra : a midrepublican fortress outside Rome, Rome, 1994.
90 Voir la suggestive photographie in Ashby, o.c., fig. 1.
91 Voir ce qu’en dit D.H., A.R., 10, 20, 7, à propos des Èques qui ont conquis Tusculum (459 a.C.) et contre lesquels marche le consul Fabius : τῶν δ’ oἱ μὲν πλείους ἀπεληλύθεσαν ἤδη διηρπακότες τὴν πόλιν, ὀλίγοι δέ τινες ὑπέμενον φυλάττοντες τὴν ἄκραν - ἔστι δὲ σφόδρα ἐχυρὰ καὶ οὐ πολλῆς δεομένη φυλακῆς - τινὲς μὲν οῦν φασι τοὺς φρουροὺς τῆς ἄκρας ἰδóντας ἐξιοῦσαν ἐκ τῆς Ῥώμης τὴν στρατιάν (εὐσύνοπτα γάρ ἐστιν ἐκ μετεώρου τὰ μεταξὺ χωρὶα πάντα). Ces lignes mettent bien en relief le double rôle de château fort et de belvédère joué par l’acropole de Tusculum.
92 Cf. F. Di Gennaro, M. Pacciarelli, « Rinvenimenti d’età pre – e protostorica a Grottaferrata e a Monte Cavo », in Arch. Laz., 1, 1978, p. 84-86 (trouvailles de l’apenninique au lieu Colle Celli) ; F. Di Gennaro, « Topografia dell’insediamento della media età del bronzo nel Lazio », in Arch. Laz., 2, 1979, p. 148-156 (partic. p. 150). Voir aussi DdA, 1, 1980, p. 65. Ce site est mentionné sous le nom de Palozza par P. Chiarucci, in Alba Longa 1996, p. 5. À noter que le site est pourvu d’une source, dite Fontanile di Pilozzo (Tomassetti, C.R., 4, p. 463).
93 La colline s’élève à 451 m d’altitude ; elle est située à 25 km de Rome. Le nom ancien du village, « Monte Porzio », est sans doute dû à la présence médiévale d’élevages de suidés, plutôt qu’à la gens Porcia, originaire de Tusculum (Plut., Cat. M., 1, 1) où Caton aimait séjourner (Cic., Rep., 1, 1). Le nom de « Catone » fut ajouté à « Monte Porzio » par décret en 1872. Voir Ashby, PBSR, 5, 1910, p. 379, et Tomassetti, C.R., 4, p. 459 et p. 464 : le toponyme mons Porculus est attesté dès le xie siècle et peut-être même dès le viiie (massa Porculi). Suggestives photographies du site in Ashby, o.c., pl. 33, fig. 1, et in Tomassetti, C.R., 4, p. 460, fig. 64. Sur le site et sa soufrière, cf. supra p.109 ets.
94 Ashby, o.c., p. 379 ; Tomassetti, o.c., p. 459.
95 Cf. supra p. 171. Cf. aussi M. Bonanno, G. Ghini, « La villa di Matidia all’Osservatorio Astronomico di Monte Porzio Catone », Lazio e Sabina, 2, 2004, p. 179-186.
96 Cf. C.R., 4, p. 462 : «...Monte Ciuffo, sul quale fu pure veduto nel 1907 un sepolcreto, forse arcaico, poi distrutto ».
97 Ib., p. 460 pour le tracé de cet itinéraire, et Ashby, o.c., p. 379.
98 Cf. NSA, 1902, p. 171, au sujet de jarres ovoïdes (« ollette ovoidali ») de la Villa Cavalletti, que les auteurs comparent avec des exemplaires analogues provenant de Boschetto, Marino, Velletri et « della vigna Giammaria in contrada Selve di Fontana Candida a Monte Porzio », ajoutant en note (n. 3) : « Le ollette, conservate insieme con altri vasetti di questa necropoli nel Museo Archeologico di Frascati, sono inedite ». Ashby (o.c., p. 384, n. 1) reproduit la note telle quelle (« Prehistoric tombs of the iron age have been found in the Vigna Giammaria in the district of Fontana Candida : the vases are preserved in the archælogical museum at Frascati, and are unpublished », à propos de vestiges identifiés par lui à Fontana Candida, comme une statue drapée et quelques antéfixes de terre cuite). Ces vases, conservés jadis au Musée du Palazzo Vescovile de Frascati, existent-ils encore ?
99 Bibliographie : Ashby, in PBSR, 5, 1910, p. 222 et s. ; Tomassetti, C.R., 4, p. 279-346 ; IAL 2, p. 31-109 (avec bibl. antérieure) ; F. Di Gennaro, M. Pacciarelli, « Rinvenimenti... », in Arch. Laz., 1, 1978, p. 84-86 ; M. Angle, A. Guidi, « Presenze preistoriche nel territorio di G. », Doc. Alb., 1, 4, 1977, p. 29-34, et A. Guidi, ib., 2, 1, 1979, p. 43-66. Pour les restes romains trouvés à l’abbaye de S. Nilo, cf. M. Valenti, Ager Tusculanus, 2003, p. 326 et s. L’actuel couvent « delle Monache », situé non loin au n., fut construit au début du xxe s. dans un lieu occupé par deux terrasses de villas antiques, et où avaient été retrouvées dès le xviiie s. plusieurs belles statues : cf. M. Valenti, ib., p. 300-315, avec une attribution du site aux Iulii Aspri.
100 La remarque est de Tomassetti, o.c., p. 305 : cf. les lieux-dits Le Querce, Selvotta, Boschetto, etc.
101 Ce n’est pas à vrai dire l’hypothèse la plus probable ; le toponyme pourrait provenir de traces de barreaux trouvées dans le bâtiment romain (cryptoportique) sur lequel l’abbaye et son clocher ont été construits ; il pourrait aussi s’expliquer par la clôture grillagée en usage dans les églises de rite grec, comme l’est Gr. : sur tout cela, cf. Tomassetti, o.c., p. 296-297 et p. 318.
102 Cf. Tomassetti, o.c., p. 330. On ne sait pas quand a commencé l’exploitation de ce gisement.
103 Voir notre article « La via Appia... », p. 201 et s.
104 Cf. supra p. 69 et s. Le site est occupé dès le néolithique : M. Valenti, o.c., n. 606 p. 291.
105 Cf. IAL 2, p. 32 (et fig. 7, point 2). Sur la Sorgente Preziosa comme aqua Tepula, cf. Ashby, o.c., p. 222. On y a retrouvé des tessons du ixe et du viie s. av. J.-C. : cf. M. Valenti, o.c., n. 611 p. 292, et d’autres à la proche Villa Maldura (ib., n. 612).
106 IAL 2, p. 33 (et fig. 8). On a proposé depuis une datation latiale ; deux pointes de lances de la phase IV (viie s.) ont été trouvées non loin à Castel Savelli : cf. M. Valenti, o.c., n. 576 p. 281 et 577 p. 282.
107 Cf. A. Guidi in Arch. Laz., 1, p.84, et DdA, 1980, p. 65.
108 A. M. Bietti Sestieri, in DdA, 1980, p. 67.
109 Ib., p. 66. De fait, d’autres fragments remontent au Bronze moyen : cf. M. Valenti, o.c., n. 610 p. 292.
110 Ce qui peut contribuer à expliquer une légère erreur de localisation commise par P. Seccia, l’éditeur de la tombe (NSA, 1903, p. 202-204), erreur analysée par Gierow in IAL 2, p. 33-34. Sur le toponyme Castel de Paolis, cf. Top. Arch., 1, p. 123 et 2, p. 208. Cf. aussi M. Valenti, o.c., n. 615 p. 292.
111 Ce dont P. Seccia se félicitait en ces termes : « Nel territorio laziale è questo il primo dolio che viene alla luce intero, e formerà uno degli oggetti più importanti del piccolo Museo cittadino, da poco costituito per mia iniziativa » (o.c., p. 203). Mais tant il est vrai que l’histoire ne s’arrête pas, quarante et un ans après la publication de ces lignes, dolium et musée étaient détruits par des bombardements aériens.
112 Cités par P. Seccia, o.c.
113 Cf. Tomassetti, C.R., 4, p. 179 ; Ashby, o.c., p. 271 ; Top. Arch., 2, p. 29 pour le nom de Valle dei Morti ; voici le texte de la notice de Pinza, la source la plus complète : « Più presso Marino, nella località « Santi Apostoli » dovevano esistere altri sepolcri, dai quali proviene : Un cinerario troncoconico con quattro anse verticali a nastro, oggi in possesso del prof. Seccia, il quale ricorda che il vaso medesimo si ritrovò pieno di ossa combuste » (in Mon. prim., p. 332). Pinza n’a pas numéroté ces tombes, dont visiblement ni la chronologie ni le nombre exact ne lui étaient connus : c’est ce qui peut expliquer l’oubli de Gierow, d’autant que, comme on le sait, la monographie de Pinza suit en principe une énumération linéaire. Il y a du reste une erreur sur le numéro de la tombe qui suit cette notice et il faut corriger l’indication « CC » en « CXCI ». L’oubli de Gierow a pu passer d’autant plus inaperçu, qu’il est très probable que Seccia avait ensuite donné le vase décrit par Pinza au Musée de Marino, qu’il avait lui-même créé, et que ce musée, comme on l’a vu, devait être détruit en 1944. Ou bien Gierow a-t-il considéré ces vestiges comme préhistoriques et donc ne relevant pas de son enquête ? C’est peu plausible, la description de Pinza ne disant rien de tel. L’ossuaire décrit par Pinza évoque d’ailleurs très fortement des exemplaires trouvés sur le site de la Villa Cavalletti : cf. IAL 2, p. 49, fig. 1, ou peut-être ib., p. 95, fig. 1, et NSA, 1902, p. 150, fig. 30 ; c’est le type 1a in Dda, 1980, p. 72. Ce parallèle suggérerait une datation en I/II A. La trouvaille ne semble pas mentionnée non plus par M. Valenti, o.c.
114 Tomassetti, C.R., 4, p. 180, renvoyant à Lanciani, Bull. Archeol. Com., 1884, p. 192 ; Ashby, o.c., p. 267.
115 Lib. Col., p. 233 Lach. : munitum lege Sullana.
116 Voir la démonstration d’Ashby, o.c., p. 264-266 ; cf. aussi Tomassetti, o.c., p. 181, et Richter, « Sopra alcuni segni di scarpellino scoperti sulle mura di Tindari, Cuma, Anagni e Castrimoenium », in Bull. Inst., 1885, p. 185 et s. (p. 190) ; il semble qu’il s’agit en réalité du mur du château médiéval : cf. M. Valenti, o.c., p. 293 (n. 828).
117 Cf. « Rapporto... », in Ann. Inst., 39, 1867, p. 53. Voir les 4 l. in IAL 2, p. 35 : « No further details are known of the discovery, which has thus a purely topographic interest ». Ni Tomassetti ni Ashby n’en font état.
118 Cf. A. Guidi in Arch. Laz., 1, 1978, p. 86, n. 8.
119 À la bibliographie ancienne indiquée par Gierow, IAL 2, p. 35, on rajoutera G. Pinza, « Necropoli laziali della prima età del ferro », in Bull. Com., 28, 1900, p. 161 et s. ; cf., aussi, M. Angle, A. Guidi, « Il popolamento... », o.c., p. 65, et F. Di Gennaro, M. Pacciarelli, in Arch. Laz., 1, 1978, p. 84-86 ; M. Valenti, o.c., p. 326 (n. 955), corrige vers le s.o. la localisation de Gierow.
120 À droite (est) selon les fouilleurs de la toute proche Villa Cavalletti (cf. NSA, 1902, p. 135, fig. 1), Pinza (Mon. prim., p. 351, « nella Vigna Giusti, a destra della via che da Grottaferrata sale all’ Osteria del Fico ») ; à gauche (ouest), selon l’assurance formelle d’Ashby (PBSR, 5, p. 251), suivi par Gierow.
121 Cf. Ashby, o.c., p. 253-254 ; Tomassetti, C.R., 4, p. 288.
122 Ce qui explique les contradictions entre Ceselli et De Rossi, sur lesquelles on verra IAL 2, p.35, n.2.
123 IAL 2, p.39, n.2.
124 Numérotée 196 par Pinza (o.c.).
125 Répertoriée sous le n° 143 dans le recueil de G. Bartoloni et alii, Le urne a capanna..., p. 90 ; voir aussi ib., p. 125, p. 198 et p. 203. À noter que, si l’urne-cabane en question se voit datée de la « fase laziale II A, prima metà ix sec. a.C. » à la p. 90, elle est dite appartenir aux « sepolture della fase più antica (x secolo a.C.) » à la p. 198 du même ouvrage. Tombe datée en I B par A. M. Bietti Sestieri in DdA, 1980, p. 62 et p. 69.
126 Davantage visibles in Bartoloni, o.c., tav. 35(a) et fig. 67, que dans IAL 2, p. 40, fig. 12.
127 Du type « serpeggiante ad occhiello » répandu en Etrurie (Véies) et datable au ixe siècle. Pour un modèle similaire, trouvé à Poggio Selciatello près de Tarquinia, voir le catalogue Civiltà degli Etruschi, Florence, 1985, p. 51.
128 G. Bartoloni, o.c., p. 203.
129 Voir M. Angle, A. Guidi, « Il popolamento... », o.c.
130 On tiendra compte, toutefois, des réserves de Gierow, o.c., p. 39.
131 A. Guidi, Subiaco. La collezione Ceselli nel Monastero di Santa Scolastica. Materiali dell’età del bronzo e del ferro, Rome, 1980.
132 Cf. IAL 2, p. 368, n. 1 : cette publication a révélé également que, contrairement à ce qu’on avait cru jusque-là (ib., p. 37), le Musée Pigorini de Rome ne conserve pas la totalité du matériel de la Vigna Giusti.
133 Cf. Ashby, o.c., p. 251, n. 1 : « Stevenson (cod. cit., 24, 24v) refers more than once to the discovery, on the N. side of the road close to Il Fico, of archaic pottery by Pasquale Antini, a native of Frascati (now dead) to whom he owed much information. This was found in a natural ( ?) cavity in a pozzolana quarry » ; cf. aussi IAL 2, p. 37, n. 1. Cf. M. Valenti, o.c., n. 703 p. 324.
134 Cf. NSA, 1902, p. 136 : « La vista si spinge fino alla foce del Tevere e fino a Roma che apparisce a nord-ouest, sullo sfondo dell’ampio orizzonte ».
135 « Necropoli di Villa Cavalletti », in NSA, 1902, p. 135-198 ; Pinza, Mon. prim., p. 352-370 (tombes 197 à 204) ; IAL 2, p. 45-98. Voici les équivalences entre la numérotation de Pinza (P.) et celle de Gierow (G.) : la tombe 197 (P.) = 2 (G.) ; 198 = 1 ; 199 = 3 ; 200=4 ; 201=5 ; 202=6 ; 203=7 ; 204=8.
136 Voir ainsi la place qu’il occupe, symétriquement, in Müller-Karpe, Vom Anfang Roms, in DdA, 1980, passim, et encore dans le livre de M. Betelli, Roma. La città prima della città : i tempi di una nascita (Rome, 1997), critiqué pour cette raison (et d’autres) par M. Bietti Sestieri et A. De Santis dans leur c.r., in Arch. Class., 49, 1997, p. 519-529.
137 O.c., p. 45-46.
138 Cf. Mon. prim., p. 369 : « La grande maggioranza del materiale raccolto a villa Cavalletti proviene da tombe disfatte, sui corredi delle quali non si hanno notizie precise » ; cf. aussi sa Storia della civiltà latina dalle origini al sec. V a.C., 1924, p. 14, où il souligne la généralité du phénomène, observant à ce propos que : « I dati su parecchie altre necropoli si riducono pur essi frequentamente ad un catalogo degli oggetti raccolti in ciascuna tomba ; non è possibile quindi ricostruire nè l’aspetto originario delle deposizione, nè la storia delle singole tombe, nè quella generale della necropoli », ni, pourrait-on ajouter, celle des habitats.
139 Voici les extraits les plus significatifs du rapport des NSA, que nous citons parce qu’ils sont emblématiques d’une situation qui se retrouve alors partout sur les monts Albains (et ailleurs) : «... nello scorso inverno si eseguì un profondo scassato per piantagione di viti. Durante l’escavazione furono messe in luce parecchie tombe a cremazione. Informato di ciò il Ministero della Pubblica Istruzione, c’incaricò di recarci sul luogo per assistere ai lavori e prendere in esame il materiale archeologico scoperto [...]. Il terreno era già coltivato a vigna, ma i sepolcri nella maggior parte, per quanto ci fu riferito, erano rimasti intatti, perchè le fosse, in cui anteriormente si piantarono le viti, erano state scavate a poca profondità e ad una certa distanza l’una dall’altra. Quando ci recammo sul luogo, il lavoro dello scassato era finito [...]. Pertanto quasi l’intero sepolcreto, e certo la parte più importante e che meglio si prestava ad uno scavo sistematico e ad osservazioni rigorose, era stato esplorato prima del nostro arrivo » (p. 136).
140 Sur les raisons, qui sont d’ordre épistémologique, et non anecdotique, d’un tel malentendu, cf. supra p. 22 et s.
141 CLP, 1976, p. 73, « sette tombe intatte » : chiffre vraisemblablement repris à Pinza – o.c. supra n. 135 – qui, s’il précise effectivement que la t. 203 est « incomplète », est cependant loin de dire que les autres ne l’étaient pas, déclarant même (p. 352) « di una sola si hanno dati completi » ; d’autre part, Gierow comptabilise dix tombes, en reprenant la description des NSA (3+3+ 4), mais il prend soin, à chaque fois, d’indiquer qu’il ne s’agit que de trouvailles partielles. Seule une lecture trop rapide de ses têtes de rubrique a pu faire croire le contraire ; dans la notice consacrée au site in DdA, 1980, p. 48 (G. Bergonzi et A. M. Bietti Sestieri), il est question de « nove tombe intatte » : ce chiffre surprenant vient très probablement du fait que dans la table des matières d’IAL 2 a été oubliée la t. 7, qui figure pourtant dans le texte du volume, à la p. 63...
142 O.c., p. 139 : « Un terzo sepolcro si scoprì vicino e a monte del primo, ma trovandosi sotto le piantagioni che fiancheggiano il viale, non fu possibile condurvi uno scavo sistematico e non si potè nemmeno metterlo per intero all’aperto[...]. Gli oggetti estratti dagli operai, in pezzi... ».
143 Ib., p. 142 : « Ci fu assicurato dai lavoratori che [...] si erano pure scoperte altre tre tombe [...]. Ci furono mostrati, come provenienti da esse, un ossuario » ; et p. 143 : « E stato impossibile accertare se veramente... Devesi quindi accettare la notizia con molte ri-serve ».
144 O.c., p. 145 : « Il materiale archeologico scoperto prima del nostro arrivo e accuratamente conservato a villa Cavalletti, comprende il corredo di quattro tombe probabilmente completo, o quasi [...]. L’impossibilità di determinare in qual modo il maggiore numero di questi oggetti si trovasse associato, ha fatto perdere ad essi molto del loro valore ».
145 Ce point a été souligné par A. M. Bietti Sestieri, in « I dati archeologici... », o.c. Quant à la définition typo-chronologique de la phase I (xe siècle), elle n’a longtemps reposé, elle, que sur quelques tombes, une dizaine selon G. Bartoloni, in Le urne a capanna..., p. 198, une vingtaine selon J. C. Meyer, Pre-Republican Rome, liste p. 41.
146 Cf. supra n. 141.
147 Voir par ex. le cas de la tombe 6, datée d’abord en I B (cf. DdA, 1980, p. 62), puis en II A (ib., p. 69) ; id. pour la t. 3 qui est passée de I B (o.c., p. 62) à II B (ib., p. 80), ce qui représente tout de même un « déplacement », si l’on peut dire, d’un siècle, voire de deux (la fluctuation résultant de la marge d’incertitude qui affecte la définition de chaque période) en trois ans, c.à.d. entre la rédaction des contributions pour le colloque (1977) et celle de l’« aggiornamento » dont elles ont été pourvues pour la publication (1980).
148 Voir G. Bartoloni, Le urne a capanna..., 1986, n° 144-146 (avec la bibliographie antérieure).
149 Cf. IAL 2, p. 86-88. Cette tombe a le n° 204 dans le recueil de Pinza, Mon. prim., p. 363. Sur le caractère exceptionnel de cette tombe 8, cf. DdA, 1980, p. 57 et p. 63, à propos de la présence de fusaïoles.
150 Cf. Le urne a capanna..., planche 35 et fig. 67 (où la fenêtre a été oubliée). À propos de cette rangée de trous, voici ce qu’en écrivait Pinza : « La gronda è poco inclinata ; vi si osserva intorno una serie di forellini destinati certamente al passaggio di anelli, probabilmente metallici, destinati alla suspensione di pendagli, la cui natura ci è sconosciuta, mancando completamente oggi così questi come quelli. » (Mon. prim., p. 364) ; cf. aussi IAL 2, p. 86. Pour une interprétation de cette particularité, cf. infra p. 381.
151 Elles n’apparaissent pas in Le urne a capanna... (fig. 69 et planche 36, b) et ne sont guère visibles non plus in IAL 2, p. 88, fig. 44 ; il faut se référer aux NSA, 1902, p. 157, fig. 45b.
152 Avec huit urnes-cabanes pour seulement six vases à couvercle en toit de cabane, on ne saurait donc dire, comme le fait G. Bartoloni, que « l’olla con coperchio a tetto appare il tipo di ossuario preferito nella necropoli di Villa Cavalletti » (in Le urne a capanna..., p. 202 ; contredite d’ailleurs par la juste observation d’A. De Santis, ib., p. 263) ; on ne saurait non plus, comme le fait A. De Santis, affirmer qu’il s’agit de deux rites exactement contemporains (o.c.), s’il est vrai que les deux seuls exemplaires de couvercles qui soient datables, à la Villa Cavalletti (ib., p. 256 et p. 257, t. 5 et 6 : fg. 17 et18), sont à placer à la période II A, c’est-à-dire au début du ixe siècle.
153 Cf. NSA, 1902, p. 189, fig. 102 (qu’on préférera aux photographies données in IAL 2, p. 97, fig. 48, n. 39) et p. 192.
154 « Gli scudi bilobati dell’Italia centrale e l’ancile dei Salii », in Arch. Class., 43, 1991, p. 55 et s. (cf. aussi DdA, 1980, p. 56) ; pas d’interprétation chez Gierow.
155 Cf. Liv., 1, 27, 7.
156 Cf. par ex. G. Bergonzi et A. M. Bietti Sestieri in DdA, 1980, p. 59 : « In base ai datifinora in nostro possesso il ruolo dell’artigianato del bronzo... non sembra esser stato mol-to rilevante dal punto di vista economico, almeno durante il I periodo ».
157 Cf. NSA, 1902, p. 145 : « La mancanza quasi completa di oggetti metallici in questi corredi funebri offre motivi ragionevoli a dubitare ch’essi non siano completi. » Ainsi, en 1817, les objets de bronze furent récupérés et fondus pour faire des outils (cf. infra p. 292). Et nombreux sont les cas où M. S. De Rossi fait état d’une abondance de vestiges de bronze, dont il ne reste rien : cf. infra p. 255, 278, 339.
158 Cf. NSA, 1902, p. 144 : « Il materiale conservato dal marchese Cavalletti appartenne certamente a non meno di 30 tombe. Ma i sepolcri scoperti dovettero essere in numero molto maggiore, perchè al nostro arrivo lo scassato della vigna era cosparso sulla superficie di cocci di vasi rotti durante i lavori e che per questo motivo non furono conservati [...]. Siccome il terreno si estende pianeggiante e uniforme oltre i limiti dello scassato testè eseguito ed anche a sinistra dello stradone che conduce alla villa, così è da supporre che anche quivi si allargasse più o meno il sepolcreto ». À noter que l’estimation récente d’un total de quarante à cinquante tombes pour la Villa Cavalletti est fondée uniquement sur le matériel publié et ne tient pas compte, par conséquent, des observations qui précèdent : cf. DdA, 1980, p. 48. La nécropole devait donc être encore plus importante.
159 Des tessons de phases I et II A ont été identifiés sur les pentes s.o. du site : cf. M. Valenti, o.c., n. 702 p. 324.
160 Cf. Tomassetti, C.R., 4, p. 291, et Ashby, in PBSR, 5, 1910, p. 252.
161 Cf. Ashby, o.c., p. 386 et s.
162 1, 9 : cf. Lanciani, I Commentarii di Frontino intorno le acque e gli acquedotti, in Mem. Linc., 3 s., 4, 1880, p. 296 ; cf. aussi l’éd. de P. Grimal, 1944, p. 71, n. 21. Voir Ashby, o.c., p. 227, pour d’autres références.
163 Cf. A. Pasqui, « Tomba arcaica scoperta nella località Boschetto », in NSA, 1900, p. 405-409. Il n’est pas sans intérêt, croyons-nous, d’insister encore une fois sur les conditions concrètes dans lesquelles se fit cette découverte, qui date de fin août 1900 : « Detta tomba venne casualmente in luce pei lavori di sterro intorno ad una cava di selci. Quindi, non presentandosi in apparenza oggetti di valore, fu tagliata via la tomba, ne fu spezzato un vaso grande che conteneva ossa cremate, e furono messi a parte soltanto alcuni piccoli vasi. Fortuna volle che s’imbattesse sul luogo, poco tempo dopo la scoperta, il sig. E. Panizza. [...] Egli ebbe cura di riunire quella parte di corredo che fu risparmiata a caso dai cavatori di selci, e fu per ciò che il prof. Tomassetti ebbe modo di segnalare la scoperta al Ministero della pubblica Istruzione [...] e recatomi quindi al Boschetto, e interrogati gli ope-rai che fecero la scoperta, ne ebbi la conferma colla narrazione dei fatti seguenti » (p. 405). On constate donc, au vu de cette description, que la trouvaille de Boschetto offre les caractéristiques habituelles de la plupart des anciennes découvertes albaines, à savoir : 1) le caractère fortuit et de la découverte et de la publication (« Fortuna volle... ») ; 2) l’absence de stratigraphie et une topographie assez vague ; 3) la destruction complète de tout vestige en place (« fu tagliata via la tomba ») ; 4) l’intervention tardive, a posteriori, des archéologues professionnels ; 5) le mélange du matériel trouvé et sa probable incomplétude (« furono messi a parte soltanto alcuni vasi ») ; 6) l’absence de toute recherche ultérieure sur le terrain.
164 Cf. Ashby, o.c., p. 257.
165 Dans ses « Bemerkungen zur Vorgeschichte Etruriens », in SE, 12, 1938, p. 31, article qui, tant du point de vue chronologique que géographique, ne saurait être repris tel quel aujourd’hui : y est appelé en effet « préhistoire » (Vorgeschichte) ce qui ressortit désormais à la protohistoire, tandis que l’étude de l’archéologie albaine et latiale est considérée comme un simple développement de l’étruscologie. Pour une première définition de ce groupe, cf. déjà Pinza, Mon. prim., p. 324 et s.
166 Voir les indications données par J. C. Meyer, Pre-Republican Rome, p. 23, p. 25 et p. 41. Cf. aussi A. M. Bietti Sestieri in CLP, p. 79.
167 Voir DdA, 1980, p. 62, p. 68 et p. 69, d’où il ressort que la Villa Cavalletti ne fait plus partie du groupe, auquel appartiennent Anzio (t. 14), Campofattore, t. Andreoli, S. Lorenzo Vecchio, l’arc d’Auguste (t. 1 à 4), Pratica di Mare (t. 7, 18, 21 et 24) ; Meyer, o.c., p. 41, y inclut encore les t. 9 et 10 de la Villa Cavalletti.
168 Cf. DdA, 1980, p. 48.
169 Cf. NSA, 1900, p. 406 : « I lavori di sterro, essendo progrediti soltanto di qualche metro dall’orlo del fosso, non hanno in conseguenza messo allo scoperto nessun altro seppellimento. Ma sono di opinione che il trovarsi un sepolcro in quel punto non possa costituire un fatto isolato. [...] E se un centre abitato deve ricercarsi attorno a quel luogo, io indicherei quella stessa spianata a capo delle Capanne di Grottaferrata, tra la via di Frascati ed il Boschetto, in continuità cioè della parte più depressa dove estenderebbesi, a parer mio, il sepolcreto. » Autre hypothèse : « Si potrebbe ricercare la località abitata nelle prossime alture di Villa Schiboni e dell’Abbadia. » Signalons aussi la découverte, à 150 m au n.o., de nombreux tessons latiaux : cf. M. Valenti, o.c., n. 761 p. 336.
170 Cf. Ashby, in PBSR, 5, p. 251 ; Tomassetti, C.R., 4, p. 287 et p. 292.
171 Cf., pour la Villa Cavalletti, Celini et Mengarelli in NSA, 1902, p. 197, et, pour Boschetto, A. Pasqui, ib., 1900, p. 406, n. 1.
172 Cf. DdA, 1980, p. 47-48 ; cf. aussi ib., p. 49, p. 61 et p. 71.
173 « Alba Longa », in The Journal of Philology, 27, 1901, p. 37-50.
174 Cf. NSA, 1902, p. 114-115 (L. Savignoni), dont les premières lignes valent d’être citées : « Finchè non s’intraprenda un’esplorazione sistematica dei Colli Albani (che ormai s’impone assolutamente dopochè i rinvenimenti fatti testè in Roma stessa, ci hanno fatto sentire più imperiosa la necessità di addentrarci nella conoscenza della vita dei prisci Latini, nelle loro sedi primitive), è bene che siano raccolti e fissati subito tutti quei dati di fatto, che possano gittare qualche nuovo sprazzo di luce nel buio di quell’età remotissima ». Furent retrouvés, à l’occasion de l’ouverture d’une carrière, un vase d’impasto conique à bord rentrant, contenant des fragments d’os, et une pointe de flèche en silex, teinte au cinabre. Cf. M. Valenti, o.c., n. 758 p. 336 ; à quelques centaines de m. au s.o. (Valle Violata), et aussi à l’o. (Valle Marciana), a été récupéré du matériel latial IIB : ib., n. 741 et 756.
175 Cf. supra n. 160.
176 G. Mancini, « Grottaferrata. Antichità rinvenute nel territorio del Comune », in NSA, 1914, p. 188-189.
177 IAL 2, p. 100-101 ; M. Valenti, o.c., n. 895 p. 382 et 911 p. 384.
178 Cf. NSA, o.c. : « Al colle delle Streghe, facendosi la scoperta di una cava di tufo percostruzioni di proprietà del sig. D. Tiberi, si scoprì, a m 1,10 di profondità, la massicciata di un’antica strada, in direzione da nord-est a sud-ouest, larga m 2,70. A destra di questo tracciato, ed alla stessa profondità, si rinvenne un gruppo di vasi di tipo laziale... ».
179 Il est vrai que G. Mancini parle d’une « massicciata », que Gierow traduit par « ancient road pavement » ; la largeur de la route en question, 2,70 m, fait aussi penser à un tracé romain.
180 Cf. A. Bedini, « Un compitum di origine protostorica a Tor de Cenci », in Arch. Laz., 10, 2, 1990, p. 121-133.
181 Cf. Arch. Laz., 1, p. 84-86.
182 Réaménagé dans les années 1980 : cf. M. L. Veloccia Rinaldi in Arch. Laz., 7, 1985, p. 13.
183 Voir IAL 2, p. 101-109.
184 On en suivra les épisodes, multiples et mouvementés, en lisant les pages 174 à 214 du vol. 4 de la C.R. de Tomassetti.
185 Cf. Tomassetti, o.c., p. 217.
186 Cf. supra n. 115.
187 Cf. F. Coarelli, Dintorni di R., p. 113 : « Tutto fa propendere per la zona di villa Galassini, sul colle Cimino ». Par ailleurs, n’ont été retrouvés sur cette aire que des restes de constructions privées et des inscriptions funéraires, dont celle de L. Scribonius Libo, consul en 16 (CIL, 14, 2502), probablement le propriétaire de la villa : cf. Ashby, PBSR, 5, 1910, p. 267, et Tomassetti, ib. Cette hypothèse a son origine dans la publication par O. Richter, en 1885, de deux restes de mur d’enceinte situés, l’un dans la Vigna Ingami, et l’autre dans la Vigna Galassini (mais qu’Ashby ne réussit pas à identifier) : enceinte considérée comme un remploi médiéval par Ashby (PBSR, 5, p. 263-264) et Tomassetti (o.c., p. 180) : cf. supra n. 116.
188 Tout le problème vient de ce que l’on ignore l’emplacement exact de la Vigna Settimi, où sont localisées plusieurs importantes découvertes épigraphiques faites au xviie siècle, notamment celle de la pierre CIL, 14, 2466, trouvée en 1632 et où se peut lire la mention d’une aqua Albana (cf. supra p. 112). Si Dessau localisait Castrimoenium au Colle Cimino, c’est parce que, induit en erreur, comme l’a montré Ashby, par la présence en ce lieu de l’inscription CIL, 2474, il avait cru devoir y placer la Vigna Settimi. Mais cette dernière, selon Ashby, ne fait qu’une avec la Vigna Bevilacqua et sans doute aussi avec la Villa Bel Poggio, où doit donc être placé le forum de la cité syllanienne : cf. Ashby, o.c., p. 263-266. On notera cependant que Tomassetti, revenant sur une précédente affirmation (o.c., p. 181), soulignait in fine (ib., p. 270) qu’il convenait de distinguer la Villa Bevilacqua de la Villa di Belpoggio (sic) : de toute façon, ces deux toponymes se trouvant dans la zone dite Costagnagni, au nord-ouest de Marino, on reste à l’extérieur du Colle Cimino, aussi bien que du Bel Poggio, même si on n’en est pas loin. Bref, une nouvelle recherche, tant archivistique qu’archéologique, paraît nécessaire. Voir, pour l’instant, M. Valenti, o.c., p. 293 (n. 828) et p. 295.
189 Cf. supra p. $171 et s.
190 Nous empruntons cette expression au chroniqueur Piazza : cf. Tomassetti, C.R., 4, p. 175.
191 Sur cet aspect, cf. infra p. 431 et s. Voir Top. Arch., 1, p. 142 pour l’étymologie de la v. Cavona, dont le nom viendrait ou des percées réalisées dans le tuf pour sa construction (Ashby), ou plutôt (Tomassetti), des fossés (cavones) qui la bordaient. Aux xviiie et xixe s., la voie est dite Marittima ou Doganale, en raison de son utilisation pour la transhumance.
192 Pr. Mil., 31, 86 ; cf. aussi Asconius, ad Mil. (p. 61 Hild.), ad Bovillas in cauponulam quandam.
193 Cf. Tomassetti, C.R., 2, p. 121-127 : le nom de Frattocchie (comme celui de Frascati) proviendrait des cabanes construites sur les ruines.
194 IAL 2, p. 112.
195 Voir De Rossi, « Secondo Rapporto sugli studii e sulle scoperte paleoetnologiche nel bacino della Campagna Romana del cav. Michele Stefano De Rossi. Luglio 1868 », p. 96-141 du Giornale Arcadico, t. 58 della nuova serie, Rome, 1868 (mais la page de couverture porte le millésime 1869) ; ce tome correspond au fasc. 203 de l’ancienne numérotation. C’est après avoir décrit les découvertes faites à Monte Porzio, puis au Monte Crescenzio, et enfin à Castel Gandolfo (S. Sebastien), que l’auteur fait état de trouvailles près de Bovillae, dans les lignes suivantes que nous retranscrivons intégralement : « Inoltre dal ch. Indes mi è stato communicato un vaso della famiglia laziale ed un frammento di un altro con un pezzo di bronzo trovati profondamente sotterra nello scavare le fondamenta di un casale presso Bovillae. Dal Monte Crescenzio a Castel Gandolfo ed alla via Appia, e forse anche fino a Boville, si estendeva dunque la necropoli, di che ragioniamo ? Non oso affermarlo ; ma veggo ad evidenza che l’area, nella quale sono sparse le tombe di questa specie, è immensa e richiama perciò in vita un popolo numerosissimo ». On doit tout de même remarquer que De Rossi dissocie dans cette notice la zone de la via Appia proprement dite et celle du site de Bovillae ; or, en localisant la trouvaille du sieur Indes aux Frattocchie mêmes, c’est-à-dire le long de la via Appia, Gierow a assimilé deux lieux que De Rossi tenait apparemment à distinguer. C’est pourquoi il est possible que la découverte ait été faite, non pas aux Frattocchie ou immédiatement au sud de celles-ci, mais quelque part aux abords, par exemple à gauche de l’Appia, où Silvio Piccolomini localisait déjà Bovillae (cf. Comment. XI, p. 307). Dans ce cas, on pourrait être encore plus près du Monte Crescenzio ou du Casale Liscia, dont le sous-sol a révélé d’importantes découvertes (cf. infra p. 231). Reprenant la localisation de Gierow, G. De Rossi propose, quant à lui, de mettre en relation cette trouvaille avec les trafics assurés par la via Cavona : cf. Bovillae, 1979, p. 288.
196 Cf. NSA, 1884, p. 108, dans des lignes qui valent la peine d’être citées, tant elles sont exemplaires de l’histoire de l’archéologie albaine, une histoire qui a eu des conséquences scientifiques non négligeables : « Marino : sepolcro di tipo laziale scoperto nella vigna Batocchi. Traversando per caso la vigna del sig. Batocchi, posta tra la via romana e la contrada Selve, mi sono trovato presente ad una notevole scoperta. Nel fare lo scassato del terreno, gli operai hanno trovato ed inconscientemente manomesso un sepolcro arcaico, fatto con ciottoli di peperino irregolari, col piano profondo circa m 1,50 sotto quello della vigna. [...] Quando ho lasciato il luogo, non era ancora compiuta la scoperta del sepolcro... ». Combien de tombes et de vestiges ont dû ainsi être « inconsciemment » détruits, sans même qu’un Lanciani fût là pour s’en apercevoir ! Assurément, il n’est pas inutile de se souvenir de ce genre d’anecdote, avant de tirer de savantes conséquences de la constatation d’un vacuum archéologique ici ou là...
197 IAL 2, p. 112.
198 Cette hypothèse nous semble renforcée par le fait que la présence en ces lieux de Lanciani à ce moment précis était due, semble-t-il, à la récente découverte d’une tombe importante au Monte Crescenzio, près de Marino, sur laquelle l’archéologue souhaitait avoir des renseignements complémentaires, comme il l’écrit précisément à la même page des Notizie (cf. infra n. 244). Or, la route directe de Rome au Monte Crescenzio passe le long des Selve Vecchie.
199 Ib., n. 4 ; l’erreur de Pinza est visiblement due à une confusion avec la tombe du Monte Crescenzio décrite par Lanciani à la même page (108), et rapportée, elle aussi indûment, sous la rubrique Castel Gandolfo : il s’agit donc d’une erreur au carré.
200 Lanciani, Cod. Vat. Lat., 13045, f. 360v. cité par G. M. De Rossi, Bovillae, 1979, p. 290. Curieusement, la fiche de Lanciani a échappé à G. Prosperi Valenti, qui ne la mentionne pas dans son intéressante étude, « I Loca Albana nei manoscritti di Rodolfo Lanciani alla Biblioteca Vaticana », in Alba Longa 1996, p. 67-99.
201 Comme il appert d’une fiche conservée dans les archives de la Surintendance du Latium pour Marino : cf. De Rossi, ib., n. 633.
202 Pour tout ceci, voir De Rossi, ib., p. 300-304 : les hauteurs du Casale Liscia sont à 3/400 m du Monte Crescenzio (la distance indiquée n. 691, p. 303 de cet ouvrage, semble erronée au regard de la carte fig. 503) et à 7/800 m de l’Appia.
203 Voir la carte in IAL 2, p. 111, fig. 55, n. 12. Sur les découvertes faites sur le site, ib., p. 114-119. La relation entre les deux sites est posée par G. M. De Rossi, o.c., p. 290.
204 « Basti l’avvertire che il terreno, nel quale fu trovato il dolmen, era già stato rotto e posto a coltura : cosicchè lo strato di peperino superficiale era stato rimosso da gran tempo, e lo strato inferiore era ridotto già a terra vegetale ; per conseguenza i monumenti della antica necropoli ivi esistenti erano stati altra volta scoperti, rotti e dispersi. I nostri dolmen soli erano quivi sfuggiti alla devastazione. Delle altre tombe disfatte ho trovato in parte le tracce sul luogo, in parte la memoria » : « Nuove scoperte nella necropoli arcaica albana e l’aes grave fra le rocce vulcaniche laziali. Quarto Rapporto paleoetnologico del cav. prof. Michele S. De Rossi », in Ann. Inst., 1871, 43, p. 239-263 (ici p. 243). Sur le matériel acheté à Frascati en 1878, et à notre avis provenant des tombes vidées vues par De Rossi, cf. L. Nardoni, « Oggetti laziali scoperti a Campofattore », in Bull. Pal. Ital., 5, 1879, p. 64.
205 Niée par Pinza, cette particularité, qui évidemment n’est pas sans intérêt pour la question du culte funéraire, a été créditée par Gierow d’un parallèle avec ce qui a été observé depuis à Allumiere par R. Peroni : cf. IAL 2, p. 114, n. 2.
206 Voir le résumé des controverses in G. Bartoloni, Le urne a capanna..., p. 9.
207 Sur ce point, voir P. Grimal, Italie retrouvée, p. 324, et A. Grandazzi, Fondation de Rome, p. 140-141.
208 O.c., n. 2, p. 245-246, se fondant sur Visconti, ce qui impliquerait selon lui que les découvertes de Carnevali (dont Visconti ne fut que l’éditeur) se seraient étendues jusqu’au Campofattore. En fait, l’une et l’autre assertion ne sont pas liées, et demanderaient d’autre part à être vérifiées.
209 Cf. supra n. 1, p. $182.
210 De Rossi, qui avait présenté l’urne au Congrès international d’Anthropologie et Archéologie préhistoriques, dont la Cinquième Session s’était tenue à Bologne l’année même de sa découverte (voir les Actes du Congrès, 1873, p. 505-506), en fit faire plusieurs copies en plâtre dont l’une fut acquise par le Musée de Bologne et une autre par celui de Reggio Emilia, qui la répertoria, avec une copie d’une urne de Castel Gandolfo, sous une rubrique commune, « Albalonga » : cf. Le urne a capanna..., p. 9, n° 27.
211 Ib., p. 14, n. 84.
212 Ib., p. 94, n. 152.
213 Ib., p. 263 ; contra, cf. supra nos remarques, n. 152.
214 D’autant que, si la comparaison avec les fonds de cabanes du Palatin faite pour les vestiges de Casale Liscia par Lanciani, observateur averti s’il en fût, doit être pleinement validée, elle tendrait à étendre jusqu’au viiie siècle la durée de vie de cet habitat, et sans doute aussi de la nécropole mitoyenne de Campofattore ; c’est en effet à cette période que remontent certains des fonds de cabanes découverts sur la colline romaine : cf. Scavi del Palatino, 1, p. 94.
215 Voir les observations de Pinza, Mon. prim., col. 332.
216 Nous ajoutons ce toponyme à l’inventaire de Gierow, de manière à mieux faire ressortir l’unité topographique des rubriques qui suivront : Vignes Meluzzi, Limiti, Pavoni, Testa, Tomassetti, Riserva del Truglio.
217 Trouvant sur place, en 1819, l’épitaphe (en grec) d’un certain Λ Пοστουμίου Kρήσκεντος, Nibby supposa aussitôt qu’elle était à l’origine du nom Crescenzio : cf. Analisi..., 1, 1849, p. 521 et IG 14 (Kaibel), 1890, n° 1958 pour le texte de l’inscription, qui permet de corriger la leçon fautive « M. Pompeius C. », donnée tant par Ashby (PBSR, 5, p. 290) que par Tomassetti (C.R., 4, p. 189). S. Del Lungo n’exclut pas que l’inscription ait pu donner son nom au mont, dans la mesure où, si elle était visible au haut Moyen Âge, elle a pu être lue par des moines de l’abbaye de Grottaferrata toute proche : cf. Top. Arch., 1, p. 211-212.
218 Cf. Tomassetti, C.R., 2, p. 153 et 4, p. 272, récusé in Top. Arch., o.c.
219 O.c., col. 332.
220 « Gli Albani e il loro territorio nell’viii e vii secolo a.C. », in Alba Longa 1996, p. 29-48 (partic. p. 38 et s.).
221 Bibliographie in IAL 2, p. 119-125.
222 Voir E. Meyer, Heinrich Schliemann : Kaufmann und Forscher, p. 248-249 et p. 395, qui éclaire le contexte de cet épisode : la recherche albaine de Schliemann est contemporaine d’autres sondages faits en Sicile (Ségeste, Himera, Camorina) ; elle se place après la première campagne à Hissarlik (1871-1873) et la première tentative à Mycènes (1874). Le problème scientifique qui se pose alors à Schliemann est la connaissance de l’âge de pierre ; c’est le moment où il reçoit un accueil enthousiaste à Londres. Arrivé en Italie, on peut voir que c’est sur la recommandation de son ami L. Pigorini qu’il s’adresse à Fiorelli. L’affaire se conclut par un constat d’échec adressé en bonne et due forme à ce dernier en novembre 1875 et, dès le mois d’août 1876, ce sera la découverte de Mycènes.
223 Le topographe Gilbert qualifiait ainsi en 1883 la polémique de « sehr lebhaft » : cf. Gesch. u. Topographie der St. Rom im Altertum, 1, Leipzig, p. 5, n. 2.
224 Il faut lire dans sa correspondance l’histoire de cette brève quête albaine : cf. H. Schl. Briefwechsel, éd. E. Meyer, 1 (1842-1875), Berlin, 1953, p. 290-296. Schliemann résume l’affaire par une unique lettre, en date du 7/10/1875, dont il rédige trois versions (italienne, anglaise, allemande). On y voit que sa recherche, dès le début, est déterminée par la problématique de la « Pompéi préhistorique » dont il va démontrer l’inexactitude. Sa conviction était formée apparemment avant même qu’il ne commence à fouiller, par des arguments qu’on peut dire « externes » : le temple de Jupiter Latial étant au milieu de la zone volcanique, les éruptions sont antérieures à l’homme ; même chose pour l’émissaire du lac Albain, car, sinon, la tradition aurait dû conserver le souvenir d’inondations postérieures à sa construction. Arrive alors la conclusion, que la fouille (argument interne) n’aura plus qu’à vérifier : « Dunque l’antica Alba Longa non può essere coperta d’una eruzione ». On apprend que les sondages dans la vigna de Carlo Meluzzi ont duré quatre jours, pendant lesquels il résidait à Albano. Schliemann n’hésite pas à dater très tard les objets qu’on lui montre, et en cela il se trompe (cf. infra n. 230) ; il reste d’autre part très sceptique sur la valeur des témoignages recueillis par De Rossi : « Ognuno che trova un oggetto antico nella terra pretende averlo trovato sotto la rocca per centiplicarne il valore ». Au total, cette expérience albaine lui fera écrire à Pigorini : « Impossibile che Elle avesse potuto raccomandare un lavoro più ingrato che questa » (sic), et le 3 décembre 1875, il envoie de Naples une lettre à Burnouf, où il tire, pour ce qui le concerne, la leçon des événements : « Je crois que je devrais rester dans l’époque préhistorique et continuer les fouilles dans l’Asie Mineure » (p. 302, cf. n. 459, p. 359-360, lettre du 27 nov. à Fiorelli : « Rimanere tutta la mia vita scavando nelle epoche preistoriche perché là potro essere utilissimo alla scienza... »). Immédiate fut en tout cas la réplique de De Rossi (qui n’allait cependant pas tarder lui non plus à se consacrer à d’autres recherches), publiée dans le premier numéro du Bullettino di Paletnologia Italiana, 1875, 1, p. 186-190 sous le titre « Sugli studi e sugli scavi fatti dallo Schliemann nella necropoli albana ». C’est par Pinza, Materiali..., 1, p. 71, que l’on apprend que le sondage de Schliemann faisait à peu près 20 m2 (réf. indiquée in Le urne a capanna..., p. 6, n. 9).
225 C’est ainsi que De Rossi, dans le passage de son « Secondo Rapporto... » qui est consacré au Monte Crescenzio, écrit : « Inoltre raccogliando le memorie dei trovamenti m’avveggo, che nella parte settentrionale della necropoli i dolii rinvenivansi pieni di molto vasellame con la capanna cineraria nel centro ; il tutto d’argilla e d’arte indigena » (o.c., p. 121).
226 Cf. infra n. 297.
227 Voir sa lettre du 7/10/1875 indiquée supra n. 224 : pour lui, Albe ne pouvant être ni au sud du lac ni entre « San Gandolfo (sic) e il Convento dei Capuccini » (c.à.d. sur le versant occidental), elle se trouve à Albano : « Rimane dunque per il sito d’Alba Longa, in tutti i contorni d’Albano, il sito d’Albano stesso, e non esito un instant d’identificare l’uno coll’altro, tanto più che l’accumulazione dell rottame è qui molto considerevole ed ascende in alcuni luoghi sino a 10 metri » (o.c., p. 291).
228 Par ex. in Alba Longa 1996, p. 12 et 332. Cf. aussi A. Carandini, Remo e Romolo, Turin, 2006, p. 44.
229 Cf. Mon. prim., col. 389 et 391 (tombe numérotée 211 = III Gierow ; les deux autres, 209 et 210 P = I et II G.) ; cf. aussi IAL 2, p. 124.
230 Cf. IAL 2, p. 119 : « Of the finds made in 1867, we do not know anything ». S’ajoutent cinq tombes à puits et à dolium trouvées en 1868, dont le mobilier n’est plus repérable. Or Schliemann écrit en 1875 que Meluzzi lui a montré des objets trouvés dans sa vigne sept ou huit années auparavant, ce qui correspond donc exactement à 1867 et 1868 : « Ma fra tutti questi oggetti non vi è che una urna etrusca grossolane ornamente dipinti, che potueremmo forse far rimontare al principio del 4° sec. a.C., tutto il resto è romano e molto posteriore » (o.c., p. 291). Ce n’est sans doute pas un hasard si ce sont précisément ces objets qui ont disparu, et on peut imaginer que les dédains de Schliemann ne sont pas étrangers à leur perte...
231 Cf. aussi bien IAL 2, p. 120, que DdA, 1980, p. 125 : les différentes chronologies (Gierow, i.e. Gjerstad, et Müller-Karpe-Peroni, avec modifications récentes) se rejoignent sur la période finale. Au total, donc, si le matériel conservé ne se répartit pas sur plus de trois tombes, on peut estimer que le nombre de sépultures précisément et indiscutablement identifiées à la Vigna Meluzzi atteint la dizaine, soit : une tombe en 1864 (= I Gierow), une autre en 1866 (II G.), avec en outre un cratère de bucchero révélant sans doute une tombe supplémentaire, cinq en 1868 ; ajoutons à cela les découvertes, perdues et inconnues, de 1867, sur lesquelles le témoignage de Schliemann nous semble jeter quelque lumière (cf. supra n. 230), indiquant la présence d’au moins une tombe. Ce calcul exclut les urnes-cabanes, qui, au témoignage de De Rossi, furent trouvées en grand nombre dans toute la zone (cf. supra n. 225), mais qui ne sont pas autrement connues.
232 Il s’agit de la t. I Gierow (p. 121-123) ; voir DdA, 1980, p. 48, p. 54 (pour le plateau miniature à trois pieds) et p. 56 (datation en I B).
233 Cf. IAL 2, p. 125, se référant au rapport publié en 1867 par De Rossi.
234 Cf. IAL 2, p. 125-126 (avec bibl. préc.) ; voir aussi DdA, 1980, p. 98. Sur la lance comme signe distinctif, voir supra p. 138. On peut donc évaluer à un total minimum de trois tombes, dont on ne peut dire si elles étaient à incinération ou à inhumation, le gisement archéologique de la Vigna Limiti.
235 Voir son « Secondo Rapporto... », partic. p. 120-121 (trouvailles faites à l’occasion de travaux agricoles en fév. 1867 et fév. 1868).
236 Cf. IAL 2, p. 127, fig. 69. Le couteau, à la phase III, se retrouve aussi bien dans les tombes masculines que féminines : cf. DdA, 1980, p. 110-111.
237 IAL 2, p. 120.
238 Il est curieux de constater que dans cette tombe furent trouvées à la fois une fibule pourvue d’anneaux incisés et une pointe de lance en fer, dans la mesure où ce type d’anneau serait absent des tombes féminines (DdA, 1980, p. 102 et p. 122), les lances caractérisant les tombes masculines (ib., p. 110).
239 Cf. Pinza, Mon. prim., col. 335-337, et IAL 2, p. 126-128. Dans ce panorama, la présence d’une amphore à corps globulaire décorée par des lignes incisées, d’un modèle reconnu généralement comme typique de la période II B (voir DdA, 1980, p. 93, fig. 1a), étonne : mais il ne faut pas oublier qu’entre la fin de la période II B et le début de la période III, il n’y a que l’épaisseur d’une définition théorique, qui n’est jamais autre chose qu’une hypothèse ou plutôt, que le résultat d’une série d’hypothèses, et qui doit rester toujours susceptible d’ajustements. D’autre part, la présence d’une lance miniature constitue également un indice en faveur d’une datation antérieure à la phase III. Quant au chiffre de trois/quatre tombes, il s’obtient en additionnant la tombe Garrucci, et en considérant que les trouvailles dispersées telles que l’amphore ci-dessus mentionnée, une lance miniature, une pointe de lance, indiquent à chaque fois la présence d’une tombe, avec la possibilité que l’amphore ait appartenu à l’une d’elles.
240 Cf. IAL 2, p. 129 : la vigne est située au sud-est (et non au nord-est) du Monte Crescenzio, le long de la route côtière Castel Gandolfo-Marino, et du côté du lac. Il faut se référer à Pinza, Mon. prim., col. 333-334, pour voir que des tranchées furent ouvertes en trois endroits différents. Même si la quantité de matériel recueilli fut sans aucun doute très inférieure aux attentes de Carnevali, il est probable, nous semble-t-il, qu’il se composait d’un peu plus que des deux vases et quelques tessons mentionnés par Gierow.
241 O.c., in Alba Longa 1996, p. 38-42.
242 Cf. IAL 2, p. 129-133, mentionnant aussi la trouvaille de quelques tessons par Ashby, à l’ouest de la route Marino-Castel Gandolfo : cf. J. Ph., 1901, p. 47.
243 Ces objets disparates provenant du Monte Crescenzio furent longtemps répertoriés indûment sous la rubrique « Castel Gandolfo » dans les réserves du Musée Pigorini de Rome : cf. IAL 2, p. 129-133, partic. p. 130, dont la restitution nous semble la plus probable ; on observe la même erreur dans l’attribution par Lanciani à Castel Gandolfo d’une tombe trouvée au sommet du Monte Crescenzio (cf. infra). Ce dernier cas montre clairement que le mécanisme de la faute n’est pas d’ordre matériel (distraction ou inversion de fiches, par ex.), mais intellectuel : il procède de la conception du site d’Albe comme un site urbain unitaire.
244 Cf. NSA, 1884, p. 108-109 : « Castel Gandolfo. Avendo avuto notizia di un singolare scoperta avvenuta nelle vicinanze di Castel Gandolfo, mi sono recato sabato 22 cor-rente a prendere maggiori informazioni sul posto, ma non sono riuscito pienamente nello intento a cagione della tempesta violentissima. I fatti accertati sono questi. Un contadino piantando le viti, in un terreno posto vicino alla sommità di Monte Crescenzio, ha scoperto un sepolcro laziale. La suppellettile funebre era richissima, contandovisi fra le altre cose un monile ed un collana d’oro. Io ho visto ed esaminato il solo monile. E` una spirale di lamina d’oro di m. 0,029 di diametro, lunga sviluppata m. 0,27 ». La table des matières de ce fascicule des NSA parle à ce propos de « sepolcro antichissimo », ce qui rend peu vraisemblable que la tombe ait été, comme on l’a parfois proposé, d’époque républicaine. Au vu de cette description de Lanciani, on ne peut donc dire si la tombe en question était à incinération (à dolium) ou à inhumation (à fosse).
245 La « tombe du guerrier » est en effet datée vers 730-720 : cf. les catalogues d’expositions, Civiltà degli Etruschi, Florence, sous la dir. de M. Cristofani, 1985, p. 46, et Gli Etruschi di Tarquinia, sous la dir. de M. Bonghi Jovino, Modène, 1989, p. 216. Voir aussi Les Étrusques et l’Europe, Paris, 1992, p. 127, n. 94, et p. 249, n. 247 (« vers 700 »).
246 Voir l’éloge des travaux et de la méthode d’Antonielli in CLP, p. 58 et 60 (S. Quilici Gigli). C’est encore une fois l’installation d’un vignoble qui provoqua la découverte au printemps 1923 : Antonielli précise qu’à cette occasion « si era imbattuto più volte in materiale ceramico, di bronzo e di ferro », parlant d’un « copioso materiale fortuitamente rinvenuto » (o.c. infra n. 247).
247 Cf. V. Antonielli in NSA, 21, 1924, p. 429-506 : « Marino. Sepolcreto laziale della « Riserva del Truglio » nel Pascolaro » ; IAL 2, p. 133-232 (cf. en partic. les pages 138-139 qui apportent des compléments et des précisions d’importance ; on y trouvera également des illustrations beaucoup plus nombreuses que dans les NSA).
248 La lecture de ses rapports, publiés par les NSA au début du siècle, montre en effet que Boni appliquait non seulement les principes de la stratigraphie dans ses fouilles, ce qui est bien connu, mais aussi qu’il avait recours, dans le détail de ses recherches, à beaucoup d’autres techniques dont l’usage ne s’est véritablement répandu que bien plus tard : ainsi fait-il procéder à une étude géomorphologique des terrains qu’il explore, soumettant les poteries qu’il découvre à une analyse de paléomagnétisme, les ossements étant confiés à des médecins anthropologues ; parallèlement, il fait fabriquer artisanalement des pièces analogues aux céramiques latiales, recourant pour en expliquer l’usage à des exemples pris dans l’observation ethnographique. On sait que tout cela a cours aujourd’hui sous des noms divers, ethno-archéologie, archéologie expérimentale, etc. (un bon exemple des méthodes de Boni est fourni par son rapport in NSA, 1902, « Scoperta di una tomba a cremazione nel Foro Romano », p. 96-111).
249 Sur cet aspect, voir A. Grandazzi, « La notion de légende... ».
250 Réfutation publiée par V. Antonielli, in Bull. Pal. Ital., 44, 1924, p. 174 et s., sous le titre « Appunti di paletnologia laziale » ; cf. aussi NSA, 1924, o.c., p. 438-439, et IAL 2, p. 135 ; sur l’ensemble du problème, cf. supra p. 21 et s.
251 NSA, o.c., p. 429 et p. 435 ; IAL 2, p. 133 et s. ; CLP, p. 85-98. L’ensemble comprenait vingt-sept tombes à fosse simple, deux étant pourvues d’un loculus latéral, plus une tombe double superposée ; cinq autres tombes, également à fosse, furent identifiées en octobre 1923.
252 Il faut étaler dans le temps la datation trop resserrée proposée par Antonielli qui parlait de la fin du viie siècle-début du vie siècle (o.c., p. 505) ; Gierow place la plupart des objets trouvés à la Riserva del Truglio à sa période IV (o.c., p. 138). G. Colonna, en 1974 (p. 306), semblait dater la tombe 30 de la période III et les t. 1, 12, 13, 28 et 30 de IV B (ib., p. 310), plaçant l’ensemble de la nécropole entre la fin du viiie s. et la fin du viie s. ; en 1988, il n’attribue plus à la période IV B que trois tombes, et vingt-sept à IV A, chiffres qu’on trouve aussi in DdA, 1980, p. 125 et p. 165. M. Cataldi Dini, in CLP (p. 86), fixe la chronologie du site de la fin du viiie s. au début du vie s.
253 C’est ainsi que les t. 3 et 19 contenaient à la fois une pointe de lance et de nombreux objets d’ornement (une fusaïole dans la t. 19) ; la t. 20 intégrée par Antonielli comme féminine est considérée comme masculine in IAL (p. 182) en raison de la présence d’une pointe de lance.
254 C’est le cas des t. 3, 23 et 29, qui pourraient bien, du reste, avoir été toutes les trois des tombes féminines, relation qui ne semble pas avoir été remarquée ; le signalement de la tombe par un cippe semble également en liaison avec le statut de sa destinataire, tant il est vrai que les t. 3 et 29 sont parmi les plus riches de la nécropole ; la t. 23 n’est sans doute qu’une exception apparente à la règle, car elle fut détruite avant d’être étudiée (IAL 2, p. 190) ; pour le cippe qui la signalait, G. Colonna citait en 1974 des exemples de Caere (p. 314), et pour les amas de pierres, Antonielli renvoyait aux t. B et P du Forum.
255 Cf. NSA, o.c., p. 441-442 ; IAL 2, p. 148 et p. 164 (entre t. 11 et 12, en relation avec un cippe) et p. 188.
256 Cf. NSA, o.c., p. 440 ; contra, IAL 2, p. 138, n. 1.
257 Cf. IAL 2, p. 139-141 et p. 144 : c’est ce qui justifie la présence du site dans le panorama de ces périodes dressé in DdA, 1980 (p. 48, 52, 53, 55 et 56). Il s’agit notamment d’une petite amphore, de tasses à anse bifore, d’un rasoir carré et d’une lance, tous deux de forme miniature, d’un petit disque en bronze (bouclier miniature ?).
258 Voir le plan d’Antonielli, o.c., p. 433 (plus lisible que sa reproduction in IAL 2, p. 134). On aurait ainsi une disposition analogue à celle qui a été observée à l’Osteria dell’Osa par A. M. Bietti Sestieri et A. De Santis : « Indicatori archeologici di cambiamento... », in DdA, 3, 1985, p. 35-45, partic. p. 35-38, et Necropoli Osa, p. 49. Mais, importante différence : les tombes ne sont pas ici contemporaines entre elles. Pour Antonielli, c’est d’abord la dureté de la couche superficielle de tuf et la pente du terrain qui expliquent la répartition irrégulière des sépultures (o.c., p. 435).
259 Cf. G. Hölbl, Beziehungen der ägyptischen Kultur zu Altitalien, Leiden, 1979, 1 : Texteil, p. 106, 185, 213 et 214 ; II : Katalog, p. 160-161, n° 629-631 (la datation indiquée est celle de Gierow). Il s’agit de scarabées de faïence (qui ont apparemment disparu du Musée Pigorini où ils étaient conservés) d’un type correspondant à des modèles trouvés sur les sites de Perachora (Sicile) et Lindos (Rhodes). Un autre scarabée se trouvait parmi les objets trouvés sur le site, sans que leur provenance exacte soit connue : cf. IAL 2, p. 230, n. 104, et Hölbl, o.c., n° 632. La plupart des auteurs attribuent à ces objets une origine phénicienne, éventuellement localisée à Rhodes : cf. par ex. CLP, p. 95, et DdA, 1980, p. 140. Or, il convient de préciser que si, d’après G. Hölbl, le centre de production de ces scarabées était vraisemblablement situé à Lindos, dans l’île de Rhodes (cf. p. 213), cette hypothèse est incompatible selon lui avec celle d’une médiation phénicienne (o.c., p. 214). En tout état de cause, et comme le souligne l’auteur lui-même, la question reste ouverte.
260 Cf. G. Colonna : « Eccezionale la presenza, nella tomba 29 della Riserva del Truglio, di una fibula asianica (con arco piatto decorato a bottoncini), che è l’unica del genere rinvenuta in Occidente, assieme alle due della t. 118 di Pitecussa, ed ha quindi un posto non trascurabile nel quadro dell’orientalizzante italiano » (1974, p. 313-314) ; est avancée ensuite l’hypothèse d’une médiation gréco-orientale (Ionie asiatique). Voir aussi G. Bartoloni et M. Cataldi Dini in DdA, 1980, p. 140, pour la discussion de la provenance possible de la fibule : Pithekussai ou une importation phénicienne, deux hypothèses qui ne sont peut-être pas incompatibles entre elles (ib., p. 141). Datation entre 675 et 625 in CLP, p. 95, et première moitié du viie s. in DdA, 1980, p. 149. Pour d’autres exemples d’objets exotiques dans les nécropoles latiales, cf. G. Colonna, 1988, p. 470. À noter que cette tombe 29 est la plus grande de toutes celles de la nécropole (et l’une des plus riches) et qu’elle semble s’être trouvée dans une situation nettement excentrée par rapport aux autres (signe que la femme qui y était enterrée était d’origine « étrangère » ? La délimitation artificielle de la fouille, qui passe juste à côté de la tombe, ne permet pas de conclusion sûre).
261 Autrement dit de la fin des clans qui avaient caractérisé, semble-t-il, les premières phases. Il s’agit de la t. 27-28, pour laquelle a été proposée une interprétation en termes de différenciation sociale : cf. C. Ampolo, « Su alcuni mutamenti sociali nel Lazio tra l’viii et il v secolo », in DdA, 1970-1971, p. 50 et p. 94 (R. Peroni) : la superposition des deux inhumations indiquerait que l’épouse du défunt a été sacrifiée lors des funérailles, rite qui, on en conviendra, ne pouvait aisément être étendu à toute la population ! Il nous semble cependant qu’on ne saurait exclure la possibilité d’une double mort simultanée, due à un agent infectieux. Pour d’autres exemples de sépultures doubles, cf. CLP, p. 160 (site de La Rustica et de Decima).
262 Cf. DdA, 1980, p. 148. Voir la reproduction du vase in IAL 2, p. 184, fig. 107. Pour prendre des termes de comparaison connus, on dira que ce monogramme est donc plus ancien que le Lapis niger (vers 600-580) et contemporain de la fibule de Préneste, au cas où cette dernière serait authentique. Sauf erreur de notre part, il semble avoir échappé à l’attention d’Antonielli, qui n’en faisait pas état.
263 Tombe 482 de l’Osteria dell’Osa. Edition princeps par A. La Regina, A. M. Bietti Sestieri et A. De Santis : « Elementi di tipo cultuale e doni personali nella necropoli laziale di Osteria dell’Osa », Sc. Ant., 3-4, 1989-1990, p. 65-88. Voir aussi D. Ridgway, « Greek Letters at Osteria dell’Osa », O. Rom., 20, 1997, p. 97. Pour la communis opinio qui a longtemps régné en ce domaine, cf. R. Ogilvie in CAH, 2e éd., 7, 2, 1989, p. 11.
264 Ce signe est plus ancien que toutes les inscriptions rassemblées par G. Colonna in Lapis Satricanus, a c. di C. M. Stibbe, 1979, p. 53-69, plus ancien même que l’inscription « conviviale » trouvée dans la t. 115 de l’Osteria dell’Osa, qui date, elle, de la fin du viie s. (cf. A.M.B.S., Necropoli Osa, p. 843). Les t. 115 et 482 étant toutes deux celles de femmes, on n’a pas manqué d’en tirer des conséquences sur le rôle de ces dernières dans la diffusion de l’écriture : on remarquera cependant que la t. 20 de la Riserva del Truglio est masculine. Par contre, le caractère modeste de la sépulture correspond tout à fait aux observations de G. Colonna (1974, p. 314, et o.c., p. 69) sur le niveau social des utilisateurs de l’écriture à l’ère archaïque. Comme nous l’a fait remarquer un jour ce savant, ce vase constitue aussi un point de référence précieux, qui pourrait atténuer le caractère d’unicum de la fibule de Préneste (première moitié viie s.).
265 Voir les références indiquées supra n. 261, ainsi que CLP, p. 87.
266 Sur cet aspect, cf infra p. 396 et s.
267 Voir les observations de Gierow tendant à montrer que la tombe à laquelle faisait allusion Helbig était contemporaine de la nécropole de la Riserva del Truglio (IAL 2, p. 132). Il s’agissait d’une « grande tombe a fossa recentemente rinvenuta sul pendio occidentale dei monti albani », à propos de laquelle Helbig notait : « Disgraziamente non mi è concesso per ora di comunicare notizie più particolareggiate sopra tale interessante scoperta » (in Ann. Inst., 1884, p. 126). Une discrétion sur laquelle il est permis de s’interroger...
268 Cf. supra p. 245. Dans le même sens, on notera les deux ceinturons de la tombe 30, alors les premiers du genre trouvés sur les Colli (avant ceux de Velletri, en 1934), datant du début du viie s. et qui marquent selon Colonna (1974, p. 306) un retour des influences villanoviennes ; il s’agit ici d’imitations. On citera aussi l’aiguille entourée par un fil de cuivre, provenant sans doute d’Etrurie (cf. L’Etruria mineraria, Florence, 1985, p. 39), de la t. 27-28. De même évoque-t-on aussi Caere à propos des vases de la t. 19 (in DdA, 1980, p. 138).
269 Voir J. Heurgon, « Les Pénestes étrusques chez Denys d’Halicarnasse », in Latomus, 18, 1959, p. 715 et s. = Scripta Varia, Bruxelles, 1986, p. 313-322, et, plus généralement, M. Torelli, Storia degli Etruschi, 19903, p. 79 et s.
270 Cf. infra p. 397.
271 IAL 2, p. 173.
272 Cf. DdA, 1980, p. 285. Cf. supra p. 235 et s.
273 En ce sens, M. Cataldi Dini in CLP, p. 87.
274 Sur le site, cf. Ashby, in PBSR, 5, p. 278.
275 Ce qui ne veut pas dire « indifféremment » : dans le domaine archéologique, le choix de l’une ou l’autre de ces appellations vaut déjà interprétation...
276 Voir IAL 2, p. 232, n. 1 : on peut penser aux objets dépareillés conservés dans les fonds de la Riserva del Truglio ou dans ceux du Terreno Marroni.
277 Ib., p. 232-234.
278 Voir Le urne a capanna..., p. 94-95, n° 153, définie comme appartenant au type 5 variante C1 (p. 127) ; pour la datation, ib., p. 205, n. 67 (G. Bartoloni). Cette urne est interprétée comme un archaïsme in DdA, 1980, p. 64.
279 Cf. V. Bianco Peroni, I rasoi nell’Italia continentale, Munich, 1979, p. 48, n. 229 (pris comme paradigme d’une typologie « rasoi bitaglienti tipo Marino »), p. 49 pour la datation à la fin du xe s. Des rasoirs du même genre ont été trouvés dans les Abruzzes, dans le sud de la péninsule et en Sardaigne. Le rasoir n’était pas nécessairement placé dans l’urne (ib., p. 183), mais sa bonne conservation nous fait supposer qu’il l’était au moins à l’intérieur du dolium contenant celle-ci et dont il ne reste plus trace.
280 Serv., Aen., 1, 448 ; Macr., 5, 19, 13 ; Lyd., de mens., 1, 31. L’interprétation de cette obligation rituelle par le recours aux usages de l’âge du Bronze est classique : cf. R.E., 6, 1909, s.v. Flamines (Samter), col. 2489.
281 Sur cette vente, qui eut lieu en 1846, cf. Le urne a capanna..., o.c., p. 6.
282 Sur tout cela, cf. infra p. 287 et s.
283 Elle fut même dite avoir été trouvée à Castel Gandolfo ; c’est à Gierow qu’on doit de connaître sa véritable localisation : cf. IAL 2, p. 232.
284 Ce P. Costa a-t-il un rapport avec le L. Costa, fouilleur amateur, actif vingt ans auparavant, du côté de San Rocco, au nord-est de Marino ? (cf. IAL 2, p. 263).
285 Voir IAL 2, p. 235, fig. 135 ; cf. DdA, 1980, p. 140, et G. Hölbl, o.c. supra n. 259, vol. 1, p. 106 (nombreux ex. de ce type en Etrurie) et vol. 2, p. 159, n. 628. À côté de ces objets, on a relevé la présence, à la Riserva, d’un pendentif à forme de cheval et cavalier (IAL 2, p. 159, n. 14), d’un autre en forme de bident (ib., n. 13) ou de bullae de bronze comme celles des t. 29 et 30.
286 O.c., p. 236. Le site est traité aux p. 235-244.
287 Proposé généralement : cf. DdA, 1980, p. 80 (A. M. Bietti Sestieri) et récemment par F. Arietti, in Alba Longa 1996, p. 39.
288 Gierow, o.c., p. 236 et p. 285.
289 Parmi ceux-ci, on relèvera une pointe de lance en bronze (IAL 2, p. 244, n. 3), indiquant la présence d’une tombe masculine (à fosse ?), ainsi qu’un couteau à profil ondulé, d’un modèle bien attesté en Italie centrale : cf. V. Bianco Peroni, I coltelli nell’Italia continentale, Munich, 1976, p. 62, n. 290 ; datation : « fase conclusiva dell’età del bronzo finale » (p. 63 ; xe s. ?, cf. n. 290). Il est possible selon l’auteur de cette monographie que ce type d’instrument ait été pourvu d’une valeur symbolique (p. 98).
290 Voir IAL 2, p. 238, fig. 136, à comparer avec DdA, 1980, p. 73, fig. 5 et p. 75, fig. 16b.
291 IAL 2, p. 239, et Le urne a capanna..., p. 95, n° 154 et fig. 71. L’urne est d’un modèle fréquent au Monte Cucco tout proche (4 ex.) et à l’Osteria dell’Osa (6 ex.) : cf. p. 123.
292 Cf. V. Bianco Peroni, I rasoi nell’Italia continentale, Munich, 1979, p. 61, n. 310 (mais le doute sur l’appartenance de la chaufferette à la tombe n’est pas justifié : cf. Le urne a capanna..., o.c., p. 95). Datation proposée : I ou II A (p. 63).
293 Cf. DdA, 1980, p. 80. D’autre part, des notes prises par Antonielli à l’occasion de sa fouille et restées inédites se trouvent dans les archives du Musée Pigorini. C’est le cas aussi d’un carnet écrit par Seccia à propos du site de San Rocco ou encore d’une correspondance entre Antonielli et Lugli au sujet des trouvailles de la Vigna Mora. L’accès à ces documents ne fut pas consenti à Gierow (IAL 2, p. 236, n. 2, p. 262, n. 1, p. 288, n. 1) ; voir maintenant, M. Angle et alii « ‘Le necropoli del Pascolare’ : nuova documentazione e rilettura critica dei dati », in Atti XL Riunione sc. I.P.P., Florence, 2007, 2, p. 882-886.
294 Pour une description du site, voir le « Secondo Rapporto... » daté de 1868, par De Rossi, p. 125-126, ainsi que Tomassetti, C.R., 4, p. 189, et Ashby in PBSR, 5, p. 278.
295 Comme l’a montré Gierow, IAL 2, p. 245, n. 1.
296 Voir son « Rapporto... » lu à la séance du 14 déc. 1866 de l’Institut de correspondance archéologique et publié dans les Annales de cette institution en 1867 (t. 39), p. 5-72, partic. p. 41 où il parle d’une manière générale de la « pianura fra Marino e Rocca di Papa » et de la fontaine dite « Capo d’Acqua » qu’en accord avec les doctrines du temps il identifiait avec le caput aquae Ferentinae. La référence (p. 42) aux objets qui y furent trouvés et leur description donnée plus loin (p. 52) indiquent qu’il s’agit de « vasi rinvenuti sotto il peperino nella cenere » : ce dernier mot renvoie à la théorie de la « Pompéi préhistorique ». En fait de cendre, il s’agissait d’une terre noirâtre, dont la couleur pourrait provenir, selon ce que Gierow a suggéré (o.c., p. 247), de la décomposition de sarcophages de bois, un usage bien attesté ailleurs en Latium (cf. supra p. 139 et s.). La légende de la page 52 indique que le lieu de trouvaille des vases se situait « al prato della Corte [...], dal sig. Sigismondo Zelinetti e Paolo Caracci i quali me li hanno cortesemente donati, perchè li publicassi ». L’identification de la dizaine de vases décrits par De Rossi a été établie, dans la mesure du possible, par Gierow dans la notice qu’il a consacrée au site : cf. IAL 2, p. 245-260. Les précisions sur la date (1860), la surface (1125 m2) de l’aire explorée et le nombre de vases (soixante) se trouvent dans le rapport de 1867, p. 42 ; celles sur les fouilles de mars 1868 dans le « Secondo Rapporto... » de 1868. Pour l’inscription mentionnée ci-dessus et trouvée en 1871, cf. CIL, 14, 2489.
297 Cf. Ann. Inst., 1867, 39, p. 42.
298 Nombreux exemples in R. Étienne, La Vie quotidienne à Pompéi, Paris, 1966, p. 38-44.
299 Citons, entre autres, la découverte de la Maison du Squelette, qui remonte à 1830-1831.
300 Comme le montre notamment sa curieuse Introduzione geomorfologica alla storia della civiltà latina dalle origini al sec. v a.C., Rome, sans date (mais probablement 1924), p. 44 et s.
301 Cf. « Necropoli laziali della prima età del ferro », in Bull. Com., 28, 1900 ; Gierow, in IAL 2, p. 246.
302 Italische Gräberkunde, 1, p. 394 ; cf. IAL 2, l.c.
303 Cf. IAL 2, p. 260. Il convient de souligner l’intérêt de cette découverte, l’un des seuls acquis nouveaux (sinon le seul) de l’archéologie albaine entre la fin des fouilles d’Antonielli (1928) et la reprise de la prospection de surface sur le terrain à partir du début des années 1970.
304 C’est ainsi qu’en 1867 (« Rapporto... »), faisant la liste des nouveautés archéologiques surgies du sol albain, il commence ainsi : « Enumererò le armi della forma preistorica dell’epoca del bronze senza darne disegni non avendo veruna di esse forme ignote ». À plusieurs reprises (ib., p. 37, p. 41 et surtout p. 45 ; voir aussi p. 51 à 53), il renvoie à un « speciale rapporto » auquel il déclare réserver les détails, de provenance et de typologie, concernant la céramique trouvée au Prato della Corte et ailleurs. Cependant, le second rapport de 1868 (1869) n’est pas plus circonstancié que le précédent, et il semble qu’il n’ait pas mis son intention à exécution. Après 1882, il se détourne d’une question, dont l’avait intéressé surtout l’aspect vulcanologique ; dans ces conditions, il faudrait rechercher, et s’ils existent, publier les notes et dessins inédits laissés par De Rossi et auxquels Pinza eut peut-être accès : cf. IAL 2, p. 252.
305 Cf. « Rapporto... », p. 41 pour la première citation (où la même formule est employée quelques lignes plus haut à propos des terrains de la Valle Marciana), et p. 42 pour la seconde. Il semble que ce matériel de surface soit encore observable : cf. F. Arietti, o.c., p. 41, n. 9.
306 On en jugera par le passage suivant : « Altri trovamenti sono stati fatti nel prato della Corte ; e fra gli altri [on appréciera la précision] vi si è rinvenuto sotto il peperino, un deposito di figure in terra cotta e di animali e di uomini ; ma di tutto ragionerò nel detto speciale rapporto » (« Rapporto... », p. 53). La composition du dépôt fait penser à une fauissa de type latial. L’information est absente des travaux d’Ashby, de Tomassetti, et ne figure pas dans les études ultérieures. Dans un sens inverse, la localisation récente par Hölbl d’un cruchon de faïence (aryballe) sur le terrain Caracci (cf. Beziehungen..., 2, p. 159, n. 627) résulte d’une erreur de lecture : la référence donnée au texte des Mon. prim. de Pinza (p. 402) montre clairement qu’il s’agit en fait d’une trouvaille faite près de Pratica di Mare.
307 « Secondo Rapporto... », p. 128 ; dans ce même rapport, faisant allusion aux découvertes éparses des années 1860 et à sa publication de 1867, il écrivait : « Già dimostravi l’anno scorso essere stati trovati a gruppi molti vasi in terra cotta ed oggetti in bronzo sotto gli strati vergini del monte ».
308 Mon. prim., 15, 1905, col. 385.
309 Faisant allusion en 1867 à un objet par lui affecté d’un numéro et décrit, et à lui donné par les propriétaires du terrain du Prato della Corte, De Rossi indiquait : « Il 64 serviva ad uso di lucerna, delle quali mi dicono aver trovato grande numero » (« Rapporto... », p. 53). Cf. aussi IAL 2, p. 246 et fig. 141(1). Les archéologues préfèrent parler aujourd’hui de « vases-barquettes » : cf. DdA, 1980, p. 54 et p. 76 (n. 29c).
310 Voir la datation de ce site in DdA, 1980 : p. 48 pour les premières phases, p. 98 pour la période III et p. 125 pour IV A (fin viiie, début viie s.). M. Angle remonte l’occupation du site au Bronze final : « Il popolamento del sistema montuoso dell’Artemisio durante la pre e protostoria », Lazio e Sabina, 1, 2003, p. 139-150 (p. 142).
311 Fin 1961, à l’occasion de travaux de voirie vers le haut de la pente : cf. IAL 2, p. 260, et photographies aériennes p. 258-259. Il est possible, mais non prouvé, que l’habitat ait existé antérieurement.
312 Voir De Rossi, « Secondo Rapporto... », p. 125, et IAL 2, p. 261.
313 Cf. Pinza, Mon. prim., 1905, p. 331, qui emploie le pluriel et date la découverte de 1862.
314 Cf. DdA, 1980, p. 48, p. 52 et p. 54 (n. 29c). Période placée aujourd’hui au xe s.
315 Cf. IAL 2, p. 262-270. Voir aussi Pinza, Mon. prim., col. 329 à 331, et NSA, 1908, p. 356-357 (P. Seccia).
316 Cf. Pinza, col. 329 pour 1898 et NSA, o.c., p. 357 pour la découverte d’une tombe à puits, contenant quatre petits vases, trois fibules et un anneau, à la fin du mois de mars 1908 : il faut sans doute corriger cette date et lui substituer celle de 1907 (ce que fait Gierow) dans la mesure où le rapport des NSA n’est que la reprise de celui paru un an auparavant dans le Bull. Pal. Ital.
317 O.c., col. 329.
318 Ce sont les objets a à k décrits col. 330 et 331 ; la démonstration de l’erreur commise par Pinza est faite par Gierow, o.c., p. 263 et 264 : il a raison, nous semble-t-il, de supposer que dans une première rédaction, Pinza avait décidé d’attribuer au groupe des poteries vendues au Musée Pigorini par le nommé Costa, un numéro d’identification, qu’il a ensuite utilisé pour les deux tombes de Campofattore. On corrigera toutefois le chiffre donné par l’érudit suédois (p. 263), en CLXXXVII.
319 Cf. supra p. 108. Parfois encore ceux du xxie s. ! Ainsi F. Severini, Via Appia II, (Antiche strade del Lazio), Rome, 2001, p. 89.
320 IAL 2, p. 270, fig. 164 et 165.
321 Cf. supra n. 305 ; en 1868, dans son « Secondo Rapporto... », il note, à propos du Valle Marciana (territoire de Grottaferrata) et du lieu qu’il identifie comme le caput aquae Ferentinae : « In entrambe le regioni si sono in quest’anno moltiplicate le scoperte e tanto estesa è divenuta l’area, dalla quale vengono in luce siffatti monumenti, che potrò appena accennare le cose principali » (p. 120).
322 Pour l’interprétation des vestiges du Prato della Corte comme traces d’habitats, cf. « Rapporto... », 1867, p. 42 et supra n. 296 ; voir aussi le « Secondo Rapporto... » de 1868, p. 124 : « Ho raccolto e ricuperato in grande parte il vasellame recentemente rinvenuto, ed ho veduto coi miei occhi i luoghi precisi delle scoperte, le quali assegnano alla stazione del c. aq. ferentinae l’estenzione di una vera grande città ». Pour la localisation d’Albe au Capo d’Acqua, cf. ib., p. 129.
323 O.c., p. 124 et 125.
324 IAL 2, p. 270 et s., qui démontre en outre que la localisation de Pinza et d’Antonielli, fondée sur l’interprétation de « Colli » comme nom propre, est de toute façon erronée, ce toponyme ayant changé de place dans la nouvelle édition des cartes du lieu, par rapport à celle dont disposait De Rossi.
325 O.c., p. 125. Au lieu-dit Cave (s. de Marino), fond de cabane identifié par Chiarucci, Colli Albani, p. 158 et s.
326 Cf. W. Gell in Ann. Inst., 2, 1830, p. 124, et id., Topography of Rome..., p. 28-38 ; contra, Ashby, in PBSR, 5, p. 277 (qui donne son nom au site, ce que Gell ne faisait pas) et Tomassetti, C.R., 4, p. 189.
327 Qui écrivait (o.c. supra) : « There are no traces of early walls or early pottery of any sort on the hill of Coste Caselle ».
328 IAL 2, p. 271-273 : ce sont probablement ces tessons qui ont poussé G. Bergonzi et A. M. Bietti Sestieri à inclure le site des Coste Caselle dans leur étude des périodes I et II A (DdA, 1980, p. 48) ; car pour le vase publié par Gierow (o.c., p. 271, fig. 166), sa forme l’apparenterait plutôt aux « brocs globulaires » à col évasé et à anses de la période II B : cf. ib., p. 93, n. 3a. Pour l’ensemble de ces vestiges, on ne saurait dire s’il s’agit d’un matériel d’habitat (c’est le plus probable néanmoins pour les tessons) ou de tombes.
329 Sur tout ceci, voir Tomassetti, C.R., 4, p. 468-506. La distance de Rome à Rocca di Papa est de vingt-sept kilomètres.
330 Tomassetti, o.c., p. 476 : la première mention du nom moderne apparaît dans un contrat d’échange conclu en 1170 entre le comte de Tusculum, auquel appartenait jusqu’à cette date la « Roccam de monte Gavo », et les partisans du pape. Pour que la démonstration de Tomassetti fût pleinement assurée, il faudrait être sûr toutefois que le document n’a pas été antidaté.
331 On le voit clairement lorsque Pie II, faisant le récit du voyage qu’il y fit en 1463, l’appelle arx Papae (cf. Tomassetti, C.R., 4, p. 482).
332 Ashby comme Tomassetti restaient également prudents, l’un dans l’hypothèse, l’autre dans la réfutation : comparer PBSR, 5, p. 393, et C.R., 4, p. 475. Pour les autres raisons qui confortent cette identification (déjà proposée aussi par Nibby), cf. notre étude « Arx Albana. Note d’épigraphie religieuse », in Aere perennius. Hommage à H. Zehnacker, J. Champeaux, M. Chassignet éd., Paris, 2006, p. 197-212.
333 Longtemps, les antiquaires des xviie et xviiie siècles identifièrent ce site avec l’Algide des textes antiques (cf. Tomassetti, o.c., p. 496, n. 1).
334 Voir la photographie in PBSR, 5, 1910, pl. XXXI (Ashby).
335 Au vu de la page que Gian Battista De Rossi consacra au site en 1873, Tomassetti, qui avait d’abord rapporté à la Rocca elle-même des découvertes décrites par le frère de Michele Stefano, admit qu’elles concernaient en fait les Campi d’Annibale : voir « Ricerche archeologiche... », in Ann. Inst., 45, 1873, p. 169, et Tomassetti, C.R., 4, p. 473, citant Ashby, o.c., p. 394.
336 IAL 2, p. 276.
337 Dans le Bull. Pal. Ital., n. 4, 1940, p. 177 et s. (non vidi).
338 O.c., p. 276-279.
339 On corrigera donc en ce sens l’indication « S. Lorenzo Vecchio, presso Rocca di Papa », donnée par M. Pallottino dans Origini 1993, p. 46. Le site de S. Lorenzo V. se trouve à un point de jonction entre les territoires de Marino, Rocca di P. et Grottaferrata.
340 Justement souligné par A. M. Bietti Sestieri in CLP, p. 82.
341 Sur la tombe de Boschetto (Grottaferrata), cf. supra n. 163 ; interprétation de S. Lorenzo V. comme tombe isolée : cf. DdA, 1980, p. 48 (A.M.B.S.).
342 Sur cette décoration, cf. IAL 2, p. 276 ; Colonna, 1988, p. 445.
343 Cf. G. Bartoloni et alii, Le urne a capanna..., p. 96, n° 155 ; ill. : fig. 72 et tav. 37 (a etb) et IAL 2, p. 278, fig. 169, 2.
344 Ib., p. 129. En 1974, G. Colonna la comparait avec l’urne-cabane de la tombe 112 de l’Esquilin (p. 289) : depuis, on a découvert que cette urne était un faux (cf. A. De Santis, in Le urne a capanna..., p. 186 et 187).
345 Alors que Giglioli, suivi par R. Peroni et H. Müller-Karpe, la datait du iXe siècle, Gierow la place dans sa seconde période, soit le viiie siècle (IAL 2, p. 277, avec réf. n. 1).
346 Voir l’analyse anthropologique in Le urne a capanna..., p. 234 (P. F. Cassoli et A. Tagliacozzo).
347 Cf. « Secondo Rapporto... », p. 125 : « Finalmente i molti frantumi del noto vasellame, che si estraggono dalle macerie di alcuni antichi pozzi d’acqua nel luogo appellato Pozzo Carpino, distano almeno altrettanto [i.e. 1 km] verso mezzodi dal sito medesimo [i.e. caput aquae = Vigna Caracci] ». Ashby (PBSR, 5, p. 288) parle d’un lieu nommé « Pozzo Calverino » ou « Pozzo Calvino » : est-ce le même ? Les tessons dont il fait état (p. 480), supposant des « tombes archaïques », ne sont peut-être pas à référer au même endroit.
348 O.c., p. 279.
349 Voir o.c., p. 275, fig. 168, point 32 et ici pl. 9. La seule indication est celle fournie par De Rossi (supra n. 347), situant le lieu de trouvailles à environ 1,5 km vers le sud de la Vigna Caracci : en réalité, Pozzo Carpino est au sud-est du caput aquae. Un léger déport vers l’est correspondrait mieux et à l’orientation, assez vague au demeurant, et au toponyme indiqués par De Rossi.
350 Cf. supra p. 70.
351 Sur tout ceci, cf. Tomassetti, C.R., 4, p. 503-505, et Ashby, PBSR, 1910, p. 394. Le site était notamment connu pour ses puits à neige, en usage depuis au moins le xvie s.
352 Voir Storia d’Italia, a c. di R. Romano et C. Vivanti, le vol. Annali 2, vol. 1, L’immagine fotografica 1845-1945 (C. Bertelli et G. Bollati), 1979, fig. 65 : « Campi d’Annibale. L’esercito pontificio par Gioacchino Altobelli, 1868 » et ici pl. 17.
353 Liv., 26, 9, 9. Le rapprochement développé infra, avec 7, 24, 8, était déjà suggéré par les éditeurs du texte livien, Weissenborn et Müller (1880), ad loc.
354 Liv., 7, 24, 8 : quod editissimum inter aequales tumulos occurrebat oculis, arcem Albanam petunt (trad. G. Baillet, p. 41) ; pour le commentaire de ce passage, ainsi que de 7, 39, 8, cf. infra p. 462 et s.
355 Sur la durée du séjour albain des diverses bandes gauloises, d’incertaine identification, cf. Liv., 7, 25, 3 et le commentaire de J. Bayet, éd. L. VII, CUF, 1968, p. 106-107, qui remarque, à propos de cet établissement albain des Gaulois, qu’« il ne semble pas, en effet, qu’ils aient été tentés par la vie urbaine » (p. 106, n. 4). Peut-on dire qu’ils faisaient de nécessité vertu ? Peut-être, mais on remarque que l’entrée dans certaines villes leur était possible (ils font alliance avec Tibur). N’est-ce pas plutôt qu’ils trouvaient dans les coteaux albains, riches en forêts et en hameaux dispersés, un type de paysage et d’habitat qui leur était familier ? En tout cas, il est clair que le contrôle gaulois des monts Albains a duré plus longtemps que ne veut bien le dire Tite-Live : et pour que cette présence ait été si durable, il faut nécessairement que les principaux lieux stratégiques du massif aient été occupés par l’envahisseur, et, avant tout, le Monte Cavo et ses abords, qui est comme le donjon de cette forteresse albaine.
356 Qu’on en juge par cette rapide notation, relevée en 1867 par M. S. De Rossi, mentionnant « una freccia nella macchia di Rocca di Papa, dove sono tanto frequenti che servono di giuoco ai bambini » (« Rapporto... », p. 49) ; en 1873, son frère Gian Battista évoquait à propos des mêmes « prati oggi detti d’Annibale » ce qu’on pouvait y trouver : « notabile numero d’armi in pietra, molte neolitiche, con un’ascia bellissima di giadeite e con relitti ed indizi certi di officina di ustensili di pietra... » (Ann. Inst., p. 169).
357 En 1873, G. B. De Rossi fait ainsi état de « vasi d’etrusca officina » (trouvés dans la tombe dont il est question ici, infra n. 361) que l’on peut, avec Gierow (IAL 2, p. 280), interpréter comme la description de vases archaïques. Par contre, lorsque le même De Rossi mentionne un peu plus loin « un frammento di vaso della famiglia arcaica laziale », nous pensons qu’eu égard à la terminologie en usage à l’époque, la formule renvoie plutôt à un tesson datant des premières périodes latiales.
358 La remarque est de Gierow, o.c., p. 281 ; ce dolium correspond au modèle classé 1c in DdA, 1980, p. 72 pour les périodes I et II A : l’absence de cordon au bas du col indique peut-être, nous semble-t-il, une datation de cet exemplaire en I.
359 Elles sont mentionnées par Ashby (in PBSR, 5, p. 395, n. 1 ; cf. A. Erman, « Anticaglie di stile egizio trovate a’piedi del Monte Cavo », in Bull. Inst., 1885, p. 182-183) et furent trouvées, suite à une averse, au bord sud des Campi d’Annibale et au nord du Monte Cavo : c’est l’une d’entre elles que nous supposons avoir été publiée par Gierow (o.c., p. 281, n. 2) dans la rubrique qu’il consacre à ce lieu ; l’autre a sans doute été perdue. Aucune, de toute façon, n’est publiée par Hölbl dans ses Beziehungen..., 2, p. 159 et s.
360 O.c., p. 394. G. B. De Rossi y cherchait les traces de l’établissement des antiques Cabenses : « In un taglio delle macchie, che cingono i prati oggi detti d’Annibale, cratere dell’estinto vulcano di Monte Cavo, presso il margine di quel cratere è stato visto e in parte demolito un tratto di antica cerchia di mura di grandi massi quadrilunghi di pietra locale, e ne è stata ravvisata l’interruzione ed il vano della porta » (in Ann. Inst., 1873, p. 169). Toutefois, la formule « presso il margine del cratere » n’indiquerait-elle pas plutôt que ce mur se situait au bas de la pente ? On aimerait aussi savoir quelles sont les « rovine » dont la carte d’état-major au 1/25 000e fait état (à côté du mot « Campi ») : cf. pl. 8.
361 C’est du moins la localisation proposée par Gierow (o.c., p. 275, fig. 168, points 33 et 34). Selon G. B. De Rossi, la tombe à fosse n’était pas loin (o.c., « Indi poco lungi il mio fratello Michele Stefano ha rinvenuto un arcaico loculo quadrato ») de la muraille décrite n. préc. Or, selon Pinza, les deux tombes furent trouvées ensemble, mais plus au sud, au pied du Monte Cavo : « Nel pianoro a sud di Rocca di Papa, al limite dei campi di Annibale presso la via che costeggia il Monte Cavo e nelle pendici del monte stesso, si ritrovarono casualmente due tombe » (Mon. prim., col. 393). Si elles sont exactes, ces indications obligent à remettre en cause la localisation faite par Ashby de la muraille, et donc de la tombe à fosse, sur le Colle Molare, localisation qui, après tout, semble n’avoir été de sa part qu’une hypothèse (o.c., p. 394 : « probably »). Dans ce cas, il faut corriger aussi le plan de Gierow et mettre les deux tombes au pied du Monte Cavo lui-même, en relation peut-être avec les autres tombes que nous avons déjà restituées (supra n. 1), de telle sorte que l’on pourrait parler d’une véritable nécropole.
362 Sur ces cippes trouvés du côté de Pentima Stalla à partir de 1872, cf. M. S. De Rossi, o.c., p. 170 et s., pensant à un aqueduc au cours orienté vers la via Latina ; pour Lancia-ni, il s’agit au contraire d’un dispositif construit par Domitien à l’usage de sa villa albaine : cf. CIL, 14, 2567, et Diz. ep. Ant. Rom. (De Ruggiero), 1, 1895, p. 568.
363 Cf. Pinza, Mon. prim., col. 35 (renvoyant à Montelius) ; IAL 2, p. 281. Il s’agit d’un modèle à douille et à anneau, aux bords légèrement surélevés. Toutefois, si Gierow l’a inclus dans son recueil, c’est qu’il le datait de l’âge du Fer. Cette hypothèse semble maintenant erronée : spécialiste de ce type d’objets, G.L. Carancini, Arch. Laz., 2, 1979, p. 177, date en effet l’exemplaire en question de la fin du Bronze ancien (voir aussi ib., A. Guidi, p. 138, n. 42). Le modèle est alors présent en Etrurie méridionale (Allumiere, Tolfa) et sur le site de Rome.
364 Cf. infra p. 316, et I. Angelini et alii, « Il Villaggio delle Macine », in Lazio e Sabina, 3, 2006, p. 157-168 (p. 162).
365 Cf. F. Arietti, B. Martellotta, G. Ghini, « Recupero di una tomba orientalizzante presso Rocca di Papa », in Arch. Laz., 8, 1987, p. 208. Les deux premiers de ces auteurs ont publié depuis une monographie, La tomba principesca del Vivaro di Rocca di Papa, Rome, 1998 : voir p. 113-120 pour la topographie de la zone.
366 Cf. Tomassetti, C.R., 4, p. 540 : voir la discussion o.c. n. préc. (p. 210, n. 6). Sur les toponymes ici mentionnés, cf. Top. Arch., 1, p. 133 et 141, et 2, p. 36.
367 Parmi ceux-ci, une pièce d’attelage, en bronze, évoque de près un objet analogue trouvé dans la tombe 101 de Castel di Decima, et dont la décoration (homme aveuglé par deux oiseaux, femme allaitant un nouveau-né, oiseaux) avait été interprétée par son découvreur, A. Bedini, comme une illustration du mythe d’Anchise et d’Aphrodite, ici dompteuse de chevaux, ce qui en ferait la plus ancienne attestation sur le sol italien du mythe d’Enée : cf. « L’ottavo secolo nel Lazio e l’inizio dell’Orientalizzante antico », in PP, 1977, 32, p. 274 et s. (p. 297-303) ; mais l’idée d’une Aphrodite allaitant n’est pas aisée à admettre (F. Coarelli et M. Pallottino, in PP, 36, 1981, p. 24 ; toutefois, cf. G. d’Anna in o.c. infra n. 369, p. 242, n. 22, sur le thème de l’aveuglement d’Anchise). L’hypothèse n’a donc pas été retenue, à l’exception d’A. Carandini, Nascita..., p. 41 : par ex., G. Colonna, 1988, p. 467-468 et p. 470, n’en fait pas état. L’objet de Vivaro représente une rangée de silhouettes humaines aux bras levés surmontée par une file d’oiseaux : signe de bon augure et allusion aux jeux organisés pour un mariage, selon F. Arietti et B. Martellotta, La tomba principesca del Vivaro..., o.c., p. 60 et s.
368 C’est le cas notamment d’une série de coupes en bronze, de probable fabrication nord-syrienne. Voir les illustrations in Colonna, 1988, fig. 371-373 ; le matériel de la tombe Vivaro est conservé maintenant au Musée de l’abbaye de Grottaferrata.
369 Son éditeur, A. Bedini, la compare ainsi aux tombes de l’acqua Acetosa Laurentina ; F. Zevi, avec la tombe de « l’héroon » de Lavinium, dans son premier état : cf. L’epos greco in Occidente, Tarente, 1979 (G. Pugliese-Carratelli éd.), 1989, p. 281.
370 Sur cet aspect, voir infra p.508 et s.
371 Voir supra p. 146, sur le lucus du sommet.
372 Avec ses 949 m., le Monte Cavo le cède en effet au Monte Faete voisin qui atteint, lui, 956 m.
373 Cf. P. Finocchi, « Il ’templum’ di Iuppiter Latiaris sul mons Albanus », in Arch. Laz., 3, 1980, p. 156-158 ; C. Cecamore, p. 20 de l’o.c. infra n. 384 : « Le fonti non sono del minimo aiuto ».
374 Sur ce point, voir infra p. 462.
375 Pour démontrer l’existence d’un arbre sacré : cf. supra p. 135.
376 Err., 26,2 : Latiaris templi. On notera que cette précision constitue un ajout par rapport à Tertullien, Apol., 9, 5, et Minuc., Oct., 30, 4, considérés comme des sources de ce passage. Sur la vie de Firmicus Maternus, voir l’éd. du De errore par R. Turcan, Paris, CUF, 1982, p. 7-28.
377 D. W. Packard, A Concordance to Livy, 1968, p. 912-914. Cas où templum est employé au sens augural : 1, 6, 4 et 1, 18, 10 ; 2, 56, 10 ; 8, 14, 12 ; 41, 18, 8 et 45, 12, 10 ; en 10, 37, 16 apparaît la différence entre aedes et templum. Occurrences où le sanctuaire du Jupiter Capitolin est désigné par le mot templum : 1,10, 5 ; 1, 55,1, 3 et 6 ; 2, 5, 4 ; 7, 3, 8 et 7, 13, 10 ; 21, 63, 8 ; 22, 37, 12 ; 38, 56, 13. Voir en partic. 1, 55, 2 où est soulignée la différence entre area et t. Iouis quod inaedificaretur. Autres ex. de templum-édifice pour d’autres sanctuaires : 40, 2, 3 ; 42, 3, 2 et 7. À noter enfin, pour un site où l’existence d’un édifice ne fait pas de doute (le temple de Iuno Sospita à Lanuvium) : lapidibusque circa id templum pluit (23, 31, 15).
378 Luc., Phars., 1, 198 : et residens celsa Latiaris Iuppiter Alba. Cf. Volpi, Uetus Latium, vol. 7, 1737, p. 35.
379 C’est ainsi qu’à propos des fouilles entreprises en 1876, M. S. De Rossi précisait que « la ricerca di questi fasti delle ferie latine è stata lo scopo primario delle escavazioni dall’Istituto ordinate » (« Scavi e studi nel tempio di Giove Laziale sul Monte Albano », in Ann. Inst., 1876, 48, p. 314).
380 G. Giovannoni, « Monte Cavo. Esplorazioni nell’area del tempio di Giove Laziale », in NSA, 1912, p. 382-384 ; G. Lugli, « Saggi di scavo per la ricerca del tempio di Giove sulla vetta di Monte Cave » (1930), repris in Studi Minori di topografia antica, 1965, p. 359-367. L’hypothèse d’une aire sacrée à l’air libre avait été formulée par M. S. De Rossi (o.c., p. 317), en désaccord sur ce point avec son frère G. B., partisan quant à lui d’un temple tarquinien (« Ricerche archeologiche... », o.c., p. 162).
381 Voir respectivement, de G. Lugli, I santuari celebri del Lazio, 1932 ; de F. Castagnoli, « Les sanctuaires du Latium archaïque », CRAI, 1977, p. 460-476 ; de F. Coarelli, Santuari...
382 Cf. IAL 2, p. 281, n. 2. Voir aussi G. Colonna, 1974, p. 296 ; le même auteur ne reprend pas cette précision dans sa synthèse de 1988.
383 J. A. de Waele, in Arch. Laz., 4, 1981, p. 326 ; M. S. De Rossi notait lui-même en 1876 (in Ann. Inst., p. 328) à propos du M. Cavo que « anche oggidì i giorni piovosi sono lassù più frequenti che altrove ». Sur l’intensité de la pluviométrie sur le sommet albain, cf. supra p.159 ets.
384 Voir « Il santuario di Iuppiter Latiaris sul Monte Cavo : spunti e materiali dai vecchi scavi », in BCACR, 95, 1993, p. 19-44, et « Nuovi spunti sul santuario di Iuppiter Latiaris attraverso la documentazione d’archivio », in Alba Longa 1996, p. 49-66, abrégés respectivement Cecamore 1993 et Cecamore 1996.
385 Ainsi Tomassetti, C.R., 4, p. 515.
386 R.E., 1, 1893, s.v. Albanus mons, col. 1310.
387 Cf. PBSR, 5, 1910, p. 398 ; il s’agit de Chaupy, Découverte de la maison d’Horace, t. 2, 1767, p. 114. Le passage de Volpi dont Chaupy, comme souvent, « s’inspire » sans le citer, est : Vetus Latium, 7, 1732, p. 36-37.
388 C.R., 4, p. 506-515, à compléter maintenant par Cecamore 1996.
389 Cf. les textes cités par Cecamore 1993, p. 41, n. 1.
390 O.c., p. 37 ; la date de 1714 est celle qu’indique Volpi, alors qu’en 1993, C. Cecamore (o.c., p. 41) parlait de 1723, date que permet de corriger la Chronique du couvent du Monte Cavo retrouvée et citée par elle depuis (1996, o.c., p. 53) : cela confirme la fiabilité des indications données par Volpi, conclusion qui est loin d’être négligeable.
391 Bibliothèque Vaticane, cote Barb. Lat. 1871, f. 38, ed. princeps in De Rossi, « Scavi... », Ann. Inst., 1876, pl. Q ; voir aussi Cecamore 1993, p. 23, fig. 3, et ead. 1996, p. 66. À noter que le f. 39 du même manuscrit donne une vue panoramique du lac et du M. Cavo qui confirme le relevé du f. 38 pour le sommet albain.
392 Contra, Cecamore 1993, p. 20, et ead. 1996, p. 55, à comparer avec la déclaration de M. S. De Rossi : « Le memorie raccolte sul luogo dalla bocca di coloro che hanno scavato più volte su quel monte essendo sempre vaghe, incerte e spesso contradittorie, sembravano per me provare soltanto che in molti punti dell’area monumentale erano stati trovati i frammenti dei fasti recentemente venuti in luce ». (« Scavi... », o.c., p. 319).
393 Pie II Commentarii, éd. Van Heck, 2, p. 709 : « Hunc (collem) pontifex ascendit. in cacumine planitiem reperit stadium aut amplius paulo in circuitu complexam -antiqui per ambitum muri fundamenta extant et saxa ingentia ferro expolita et sacellum in medio dirutum, super cuius ruinis Dalmata quidam heremitorium sibi construxit congestis sine calce lapidibus ». Rappelons que la visite du pontife date de 1453.
394 L. Alberti, Descrittione di tutta l’Italia (1ère éd., Bologne, 1550) : « Egli è questo monte [Albano] alto, et in lungo giunge all’Artemisio [...] havendo la sommità molto aspera, come dimostra Strabone. Era nè tempi antichi quivi il tempio di Giove Latiale fabricato per commandamento di Tarquinio Prisco, ove ogn’anno si raunavano i Latini alle Ferie Latine. Ora quivi veggonsi gran pezzi di edifici ornati, et massimamente del detto tempio, et molte sepolture. Egli è al presente quivi un picciolo castello, fuori di cui appare un gran sepolcro alla destra della via con cinque piramidi congiunte insieme, cioè una per ciascun cantone, et la quinta nel mezzo, essendo le quattro piu basse di quella. Intorno a questo castelletto veggonsi sopra quei collicelli, et massimamente verso Alba » (qu’Alberti localise à Castel Savello) ; « belle et vaghe vigne, con fruttiferi alberi. In vero sono tutti questi luoghi ameni, et dilettevoli, et fruttiferi, et perciò non è meraviglia se erano tanto habitati » (ici éd. de Venise, 1581, p. 143). Sur Alberti (1479-1552), voir la notice que lui consacre G. Grayson in Diz. Biogr. degli Italiani, 1, 1960, p. 699-709. La description d’Alberti s’appliquerait parfaitement aux cinq cônes du monument d’Albano, mais, vu sa précision (cf. « intorno à questo castelletto »), on a peine à croire à une telle approximation.
395 Cluver, dans son Italia antiqua (1624), n’avait, comme on le sait, fait que colliger les sources littéraires, sans souci de les référer à une réalité archéologique ; ce que fit L. Holstein, dans son commentaire Annotationes in Italiam antiquam Cluverii..., Rome, 1666, ici p. 179 à propos de la localisation par Cluver du temple de Iuppiter Latiaris sur le M. Cavo : « Idemque apparet ex uestigiis antiquitatum. Nam uia antiqua silicibus strata usque ad summum iugum perducit, in quo ueteris templi uestigia apparent, tum cisternae ex uiuo saxo excisae... » ; il évoque ensuite les « vestigia maxima » épars sur la « tota planities » du sommet. Le jésuite Athanase Kircher, auteur du Latium idest noua et parallela Latii tum ueteris tum noui descriptio (Amsterdam, 1671), évoquait, quant à lui, les édifices religieux albains mentionnés par Cicéron (dans le Pro Milone), « quorum rudera etiamnum in ipso uertice montis saepius me spectasse memini » (p. 36).
396 Sur cet ordre d’architecture, voir Les Etrusques et l’Europe, cat. d’exp. Paris, 1992, p. 224 et s. (G. Morolli). Cette gravure est reproduite infra pl. 19.
397 Ainsi P. Finocchi, « Il ‘templum’... », in Arch. Laz., 3, 1980, p. 156-158.
398 Voyage en Italie (« fait dans les années 1765 et 1766 »), 2e éd. 1786, t. 6, p. 370 (cf. aussi p. 342). Voir aussi les seize tambours de colonnes trouvés sur les pentes sud par G. Giovannoni (NSA, 1912, p. 382).
399 Antonio Riccy, Memorie storiche dell’antichissima città di Alba Longa e dell’Albano moderno, Rome, 1787 ; cf., notamment : « I PP. Trinitari nel secolo nostro [...] rovinaron da questa parte [i.e. le sud] un grand’arco, che formava in parte l’atrio » (p. 68) ; à propos des chapiteaux, « uno di essi di verde antico, fu scoperto da un carbonaro mentre travagliava per far la sua piazza a carbone » (p. 69) ; « intorno a questo sontuoso tempio v’eran delle edicole di figura rotonda ; il pavimento di una di esse fu osservato di triplice ordine, il primo, cioè, di musaico, il secondo di pietruzze bianche, ed il terzo di quadrelli » (p. 69, ce qui est la description « naïve » d’une stratigraphie) ; cf. encore : « si dice, che vi [i.e. sur la partie du sommet qui regarde Rome] fosse trovata tempo fà, una cucina intera, fornita di tutto il necessario per tale officina ; io però non vidi neppure un’olla » (ib.). Récemment, J. Scheid a supposé, sans référence aux vestiges archéologiques, l’existence sur le mont Albain de « bâtiments et de(s) thermes permettant aux officiants de passer la nuit dans des conditions décentes » : « Sanctuaires et thermes sous l’Empire », in Les Thermes Romains (table ronde EFR), Rome, 1991, p. 205-216 (p. 212). Voir aussi F. Giorni, Storia di Albano, p. 13, 24 et 26.
400 Iul. Obseq., 163, 21 : Albanus mons nocte ardere uisus. Aedicula et signum de caelo tacta. La liaison des deux termes permet-elle d’imaginer un auvent protégeant la statue ?
401 CIL, 14, 2233 : cur(ator) aed(is) s(acrae) (cf. Cecamore 1993, p. 20), qu’on peut aussi lire au pluriel c. aed(ium) s(acrarum) comme le proposait De Rossi, 1876, p. 330. À noter que Dessau (CIL, 14, p. 213) référait, quant à lui, ces aedes à Rome, ce qui n’est pas très vraisemblable.
402 F. Giorni, o.c., p. 25 ; De Rossi, 1876, p. 318.
403 Cf. Tomassetti, C.R., 3, p. 365 et s.
404 Voir le Monasticon Italiae, 1. Roma e Lazio, Cesena, 1981, sous la dir. de F. Caraffa, p. 148.
405 « Scavi... », o.c. (1876), p. 331 : « Osservo soltanto che la serie delle monete che continua fino a’secoli del medio evo ed anche ai moderni, dimostra quel luogo non essere forse giammai rimasto del tutto abbandonato e disabitato ». À peu près au même moment, Lanciani constatait la même chose : cf. la fiche décrite par G. Prosperi Valenti in Alba Longa 1996, p. 88.
406 Cf., sinon F. Giorni, o.c., p. 13, Cecamore 1993, p. 20 et p. 42, n. 9, et ead. 1996, p. 52.
407 Et semble-t-il inaperçu : il s’agit de la mention, par Lugli, de la trouvaille de « frammenti di tegole di tipo arcaico » (Stud. Min., o.c., p. 365).
408 On comparera J. Poucet, Les Rois de Rome, p. 231, et A. M. Sommella, « ’La Grande Roma dei Tarquini’. Alterne vicende di una felice intuizione », in BCAR, 101, 2000, p. 7-26.
409 « Scavi... », o.c., p. 325 et s. À noter que des citernes avaient déjà été décrites sur le mont Albain par L. Holstein, Annotationes, o.c., p. 179.
410 Sur le sens « hydraulique » de fauissa, voir Jordan, « L’Atrio di Vesta », in Bull. Inst., 1884, p. 96 et s., et T. Hackens, « Favisae », in Études étrusco-italiques, Louvain, 1973, p. 71-99.
411 CIL, 14, 2233-2235 = 15, 7808-7810 ; De Rossi, « Scavi... », p. 329, met en rapport la date consulaire indiquée (11 av. J.-C.) avec une loi attestée par Frontin (99) ; cf. Ashby, in PBSR, 5, p. 400. Cf. aussi J. Scheid, o.c., p. 211, n. 51, qui cite l’exemple des citernes des temples d’Afrique. Sur le sommet du M. Cavo, il semble qu’il y ait eu au moins cinq citernes : cf. Cecamore 1996, p. 53, citant la Chronique du couvent.
412 Car ce nom, qui apparaît dans les Régionnaires et la Table de Peutinger, est celui d’une voie qui se situait du côté des v. Aurelia et Claudia (cf. CIL, 14, 3610) : cf. Radke, in R.E., S. XIII, 1973, col. 1480.
413 Voir Tomassetti, C.R., 4, p. 506 et s.
414 CIL, 14, 4211 : le N apparaît sept fois, le V cinq ou six.
415 Analisi..., 1, p. 114-115.
416 En face de la lecture numinis uia (Volpi, Chaupy, Giorni), voir Riccy, o.c., p. 70 pour la lecture n. uotum.
417 Cf. C. Hülsen, « Die Fasten vom Tempel des I. Latiaris », in MDAI(R), 5, 1890, p. 70.
418 « La via trionfale a Monte Cave e il gruppo stradale dei Colli Albani », in MPAA, Memorie, 1, 1, 1923, p. 251 et s. (p. 266-267) ; Ashby, in PBSR, 5, 1910, p. 396, citait néanmoins toujours l’explication de Nibby.
419 De Rossi, « Scavi... », p. 323-324 pour une localisation de ce dépôt près de l’édifice où furent trouvés aussi la plupart des fragments des Fastes des Féries (i.e. vers le n.o. du sommet, semble-t-il). Il est vrai que l’utilisation de ces pages reste de toute façon problématique, comme le montre leur conclusion : « L’esame di tutti gli altri avanzi di costruzioni e di tutti gli altri piccoli oggetti in terra cotta, e bronzo, ed oro rinvenuti nei descritti scavi e sopratutto delle monete, quantunque potrebbe dar qualche risultato non privo di interesse, non mi sembra opportuno intraprenderlo qui nel fine di un già lungo discorso » (p. 331)...
420 Voir Tomassetti, o.c. : la première licence connue de fouilles date de 1573 ; voici, par ex., le commentaire - désappointé – auquel donnent lieu des fouilles entreprises en 1790 : « Non si trovano che voti ed altre cose di terra cotta ; jéri 4 del corrente però furon trovati due idoletti di metallo [...] li voti si sono trovati e si vanno trovando in Monte Cavo » (cité p. 510).
421 Cf. Cecamore 1993, p. 19, citant un document d’archive daté de 1758 où il est question de la trouvaille de « diversi idoli di metallo di finissimo lavoro dalla lunghezza di mezzo palmo, tutti con qualche attributo di Giove e per lo più fulminante, i quali furono dati a diversi dilettanti... », ainsi que de « rottami di statuette, fantocci si di uomini che di donne e di bestie », et d’autres fragments comme un doigt de bronze « più che gigantesco », d’un piédestal de statue, et de « molte, molte medagli ». Pour l’aes rude, voir les poids indiqués à la p. 34 de cet article.
422 Cf. De Rossi, « Scavi... », p. 323, qui fait état aussi de terres cuites et de bronzes votifs « di ogni età ». La faïence égyptienne du type « Vschebti » restituée par Gierow au M. Cavo (Pinza, Mon. prim., col. 451, ne parlant que de « l’esemplare dei colli albani ») n’a pas été incluse par Hölbl dans son catalogue du t. 2 de ses Beziehungen..., mais il souligne, au t. 1, p. 277, qu’elle constitue un quasi-unicum en Latium, sans qu’on puisse savoir le sens qui était donné à ce type d’offrande (un autre exemple provient des fouilles de S. Omobono).
423 Cf. Cecamore 1993, p. 34.
424 Voir J. G. Szilágyi, « Zu den Anfängen der anthropomorphen Bronzeplastik in Mittelitalien », in Stips votiva. Papers Presented to C.M. Stibbe, éd. M. Gnade, Amsterdam, 1991, p. 217 et s. (non mentionné par C. Cecamore). Il s’agit d’une figurine de 8,23 cm, conservée à Budapest et acquise à Rome entre 1855 et 1860 par le peintre hongrois A. Haán ; pour cet objet qu’il considère comme votif, l’auteur propose une datation à la seconde moitié du ixe s. et y décèle une influence sarde, qu’elle soit directe ou indirecte. La provenance du Monte Cavo n’est qu’une hypothèse, en l’absence de toute indication d’origine. Voir cependant le témoignage cité supra n. 420.
425 Cf. F. Di Gennaro et M. Pacciarelli in Arch. Laz., 1, 1980, p. 84-87 (référence absente des travaux de C. Cecamore). Le mont est même fréquenté dès l’énéolithique : cf. P. Chiarucci, « Insediamento montano di sommità e tombe a grotticella sul gruppo del M. Albano (M. Cavo) », Doc. Alb., s. II, 4-5, 1982-1983, p. 25. On ne peut que souhaiter, avec Renato Peroni, que des fouilles soient entreprises un jour sur le site : cf. Arch. Laz., 2, p. 190. Sur les découvertes de Rosa, cf. supra p. 182.
426 Sur cette question, cf. infra p. 567 et s. Pour la localisation de Cabum à Rocca di Papa, cf. notre « Arx Albana... », o.c.
427 Voir le relevé fourni par G. Colonna, 1988, p. 506, fig. 24, ainsi que la fig. 19 p. 504 pour l’exemple du Colle della Noce à Ardée.
428 In Arch. Laz., 3, 1980, p. 153 ; pour les autres sites, cf. id., « Luoghi di culto nei centri protourbani laziali », in Roma. Romolo, Remo e la fondazione della città, A. Carandini, R. Cappelli éd., Rome, 2000, p. 332.
429 Voir M. G. Granino Cecere, « Sacerdotes Cabenses e sacerdotes Albani : la documentazione epigrafica », in Alba Longa 1996, p. 275 et s. (partic. p. 275-284), et notre « Arx Albana... », o.c.
430 Voir dans les Actes du colloque P. Perdrizet, Delphes. Centenaire de la « grande fouille » réalisée par l’EFA (1892-1903), éd. par J. F. Bommelaer, 1992, l’étude de S. Müller, « Delphes mycénienne : un réexamen du site dans son contexte régional » (p. 67-83).
431 Cf. IAL 2, p. 282-283.
432 Cf. Ashby, PBSR, 5, p. 285, dénonçant une erreur de Tomassetti.
433 Cf. DdA, 1980, p. 98.
434 Sur tout ceci, cf. Tomassetti, C.R., 2, p. 159 et s. L’église était appelée Sancta Maria in Palatiolis (p. 163) ; cf. aussi Top. Arch., 2, p. 82. L’hypothèse de Tomassetti (et de Nibby) a été défendue de nouveau par M. Donderer : « Zu den Haüsern des Kaisers Augustus », in MEFRA, 107, 1995, p. 636. Sur la source du lieu, cf. supra p. 106.
435 D’autant que le site est aussi un important point d’eau : cf. Tomassetti, C.R., 2, p. 164 et IAL 2, p. 275 (Sorgente Pescaccio). Il semble que c’est là que Rosa, suivi par Ampère (Hist. r., 1, 1862, p. 278), localisait Albe. Pour la cabane, cf. P. Chiarucci, « Nuovi materiali... », in Arch. Laz., 8, 1987, p. 205 : sur une aire de 4 m × 4 m, creusée dans le pépérin, ont été reconnues les traces de solides pieux de soutènement et, unique en son genre, le départ d’une cloison délimitant deux pièces; une vasque-citerne était aménagée à l’extérieur. L’ensemble peut être daté aux viiie-viie siècles; des tessons y ont été recueillis, qui vont du ixe au viie s. Le nom de Maleaffitto vient de «male affisso» : cf. Top. Arch., 2, p. 6. Sur les restes de ce castel, cf. M. Lilli, Ariccia, Carta Archeologica, Rome, 2002, p. 326-332.
Notes de fin
1 Sans méconnaître l’insuffisance scientifique de ce terme en archéologie, nous adoptons ce titre en hommage à la publication de ce nom animée par Jacques Heurgon à Rome en 1944 et dont il nous avait souvent parlé : il a fait l’histoire de cette revue in MEFRIM, 103, 1991, p. 573-587 (p. 581 et s.) : « La réconciliation franco-italienne ».
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
De la « Cité de Dieu » au « Palais du Pape »
Les résidences pontificales dans la seconde moitié du XIIIe siècle (1254-1304)
Pierre-Yves Le Pogam
2005
L’« Incastellamento » en Italie centrale
Pouvoirs, territoire et peuplement dans la vallée du Turano au Moyen Âge
Étienne Hubert
2002
La Circulation des biens à Venise
Stratégies patrimoniales et marché immobilier (1600-1750)
Jean-François Chauvard
2005
La Curie romaine de Pie IX à Pie X
Le gouvernement central de l’Église et la fin des États pontificaux
François Jankowiak
2007
Rhétorique du pouvoir médiéval
Les Lettres de Pierre de la Vigne et la formation du langage politique européen (XIIIe-XVe siècles)
Benoît Grévin
2008
Les régimes de santé au Moyen Âge
Naissance et diffusion d’une écriture médicale en Italie et en France (XIIIe- XVe siècle)
Marilyn Nicoud
2007
Rome, ville technique (1870-1925)
Une modernisation conflictuelle de l’espace urbain
Denis Bocquet
2007