Les hommes et femmes illustres sous presse
Éditions et reprises du genre dans l’imprimerie européenne (v. 1470-v. 1530)
Résumés
Le genre des panthéons d’hommes et de femmes illustres connaît une postérité imprimée certaine à l’époque incunable et jusqu’au début du xvie siècle. Cependant, pour beaucoup de ces textes, le passage du manuscrit à l’imprimé n’allait pas de soi. Les imprimeurs cherchent à anticiper la vente de leurs éditions, ce qui influence largement leurs choix éditoriaux. De plus, le changement de média ne provoque pas immédiatement des changements de mise en page et de mise en livre. Ces modifications se font progressivement, en lien avec le public visé par les imprimeurs et éditeurs. Les textes de Plutarque et de Boccace connaissent ainsi un réel succès, qui en transforme progressivement les usages et les lectures au fil des éditions et rééditions, tandis que les Vies des hommes illustres de Pétrarque, difficiles à catégoriser par les imprimeurs, ne font l’objet qu’une seule édition incunable.
The beginning of European printing did not overlooked the collections of biographies of illustrious men and women. However, for many of these texts, the passage from manuscript to print was not self-evident. Printers were trying to anticipate the sale of their editions, which largely influenced their publishing strategies. Moreover, the medium change did not immediately induce transformations into the mise en page and mise en livre. These changes happened gradually, in relation to the public aimed by each printer and publisher. On the one hand, Plutarch’s or Boccacio’s work were real successes in the printing industry ; their reception in print progressively changed the way they were read and used. On the other hand, Petrarch’s Lifes of famous men knew only one incunabula edition, probably due to its difficult categorization.
Entrées d’index
Mots-clés : imprimerie, mise en page, humanisme, Plutarque, Pétrarque, Boccace
Keywords : printing, layout, humanism, Plutarch, Petrarch, Boccaccio
Texte intégral
1De nombreux travaux ont souligné l’importance de la réception du genre littéraire des hommes et femmes illustres dans l’Europe de la Renaissance. Son adaptation par les humanistes et poètes du xvie siècle, la redécouverte de l’œuvre de Plutarque puis sa reprise dans des contextes divers au cours du xve siècle témoignent de la vitalité et de la plasticité de cette forme d’écrit. L’imprimerie a joué un rôle important dans ce processus, contribuant à la diffusion et à la transformation de certaines de ces œuvres.
2Il s’agit ici de penser les modifications de sens et de fonction qu’induit, pour les livres étudiés, le passage par l’imprimé, en prêtant attention aux modifications ou aux continuités formelles par rapport au manuscrit, et en s’intéressant aux adaptations des éditions dans les contextes locaux ou régionaux. Le type du recueil de biographies illustres reçoit une forme nouvelle à travers l’imprimerie, une forme adaptée à ses publics. Celle-ci influence en retour, et de façon circulaire, la manière dont ces ouvrages sont reçus et appropriés par les lecteurs. L’objet-livre peut ainsi être vu comme le témoin de négociations et de stratégies de divers acteurs : l’auteur parfois, l’éditeur scientifique, l’éditeur commercial, l’imprimeur et le lecteur. De ce point de vue, les éditions considérées témoignent des permanences et des ruptures observables plus généralement entre la transmission textuelle manuscrite et imprimée ; elles permettent de réfléchir à la manière dont les acteurs de l’imprimerie construisent un corpus de textes, des habitudes de mise en page et donc de lecture1.
3L’analyse générale du succès du genre dans l’imprimerie européenne incunable, puis l’analyse rapprochée de certaines œuvres spécifiques et de leur mise en livre font ressortir les fortunes diverses et parfois paradoxales de ces textes, au prisme du nouveau système économique de diffusion, qui se construit avec le développement de l’industrie du livre2. L’étude de la réception de ces recueils dans l’imprimerie permet, d’une part, d’évaluer la diffusion imprimée des différents avatars des vies d’hommes et de femmes illustres. Ces œuvres peuvent servir, d’autre part, d’études de cas pour les débuts de l’imprimerie européenne, afin de mieux comprendre la manière dont imprimeurs et éditeurs se saisissaient d’écrits pour les transformer en produits commerciaux.
Des hommes et femmes illustres, mais lesquels ?
4Avant de rentrer dans le détail de stratégies éditoriales, il semble nécessaire de proposer un panorama général de la fortune éditoriale du genre en Europe. Alors que les recueils de vies illustres étaient déjà bien implantés dans la culture manuscrite, il s’agit de comprendre quels sont les textes qui passent dans la culture imprimée – ce qui ne veut évidemment pas dire qu’ils cessent d’être diffusés sous forme manuscrite. Un aperçu de ce type est facile à obtenir grâce à l’Incunabula Short Title Catalogue, qui recense de façon quasi systématique les éditions parues avant 15003.
5De façon assez attendue, les Vies de l’Antiquité connaissent un grand succès dans les débuts de l’imprimerie européenne. Parmi les titres les plus fréquemment édités, on trouve dix-huit éditions des Vies et sentences des philosophes de Diogène Laërce, dix-huit éditions des Hommes illustres d’Aurelius Victor, quinze éditions des Douze Césars de Suétone, dix des recueils de vies de Plutarque. La très grande majorité de ces éditions sont réalisées en Italie, dès 14704. Les imprimeurs prennent le relais d’une diffusion manuscrite importante – on compte par exemple plusieurs centaines de manuscrits du xve siècle contenant diverses sélections des Vies de Plutarque traduites en latin, principalement dans la péninsule italienne5. Il est à noter en revanche que les textes chrétiens de l’Antiquité tardive sont très peu présents dans les presses européennes : les Vies de Jérôme sont éditées seulement deux fois dans la période incunable, à Augsbourg et à Cologne. On peut s’étonner de cette absence d’intérêt pour les recueils de vies patristiques, alors même que la tradition manuscrite était encore très dynamique au xve siècle6. On ne trouve d’ailleurs aucune édition des compilations de Gennadius ou d’Isidore, qui reprenaient le modèle de Jérôme, ni d’aucune autre compilation avant celles du xive siècle, et ce malgré le succès de certains recueils médiévaux.
6On recense ensuite un nombre assez important d’éditions correspondant au grand retour des recueils de biographies au xive siècle7. Les principaux textes imprimés de ce type sont les vies des hommes et des femmes illustres de Boccace, et les vies de philosophes du pseudo Walter Burley. Très peu de ces éditions sont dues à des imprimeurs italiens et on note la quasi-absence des Vies de Pétrarque dans les presses avant 15008. Les seize éditions du De casibus virorum illustrium ou du De claris mulieribus de Boccace en Europe avant 1500, sont toutes dues à des imprimeurs allemands, français, espagnols, anglais ou flamands, avec des textes issus de traduction en vernaculaire. Enfin, les éditions des Vies de philosophes scolastiques attribuées à Walter Burley sont très majoritairement imprimées dans les villes allemandes, pour un public très certainement universitaire9. Ce dictionnaire, traduit dès le xive siècle en cinq ou six langues, est un énorme succès manuscrit mais semble peu intéresser en dehors de l’espace germanique, peut-être en raison de l’influence de l’humanisme italien qui utilise de moins en moins les collections de vies de philosophes comme preuve d’une filiation intellectuelle.
7Dernière étape de ce panorama, les recueils du xve siècle connaissent un succès largement tributaire des contextes régionaux, dont dépend d’ailleurs leur écriture elle-même. Antoine Vérard imprime à Paris la première édition de la Cité des Dames de Christine de Pizan en 149710 ; des imprimeurs espagnols éditent les Vies des hommes illustres de Castille de Hernando del Pulgar11 ; à Mayence, on imprime le catalogue des hommes illustres allemands du bénédictin allemand Johann de Tritheim12. De même que les vies écrites au xve siècle tendent de plus en plus à célébrer les grands hommes de la patrie, voire les dynasties au pouvoir, les presses publient des Vies qui ont un intérêt local13.
8Ces tendances se retrouvent pour les éditions du xvie siècle, si l’on en croit notamment l’Universal Short Title Catalogue14, mais il reste difficile d’esquisser une vue d’ensemble en raison des lacunes des inventaires généraux. En plus des auteurs déjà bien représentés dans les catalogues du xve siècle, les presses du xvie siècle vont également publier des recueils de vies d’auteurs contemporains, illustrés de portraits sous l’influence notamment de Paolo Giovio. Ces ouvrages jouent un rôle important dans la célébration nationale ou confessionnelle dans le cadre des Guerres de Religion15.
9Ce tour d’horizon permet d’ores et déjà de souligner que le genre des biographies de personnages illustres n’a en aucun cas été reçu de façon homogène, et qu’un succès dans la tradition manuscrite ne signifie pas automatiquement un succès imprimé. Même pour les textes mis sous presse, les publics visés peuvent être très variables. Pour le comprendre, nous allons suivre le parcours d’œuvres de trois auteurs : Plutarque, Pétrarque et Boccace. Tous trois ont rédigé des recueils de vies d’hommes et de femmes illustres à vocation historique et morale, lus dans la première moitié du xve siècle dans les cercles lettrés, humanistes et princiers. Les textes considérés relatent les vies d’hommes politiques antiques dans le cas de Plutarque ; de héros bibliques, mythiques et antiques dans le cas de Pétrarque ; et d’hommes et de femmes ayant subi un retournement de fortune, issus de l’histoire biblique, antique et mythologique, et de l’époque de l’auteur, dans le cas de Boccace. Ces œuvres ont connu des fortunes éditoriales très diverses ; elles nous ont semblé pertinentes à analyser car elles permettent d’éclairer des rapports différents des acteurs du livre au genre étudié ici. La manière dont Pétrarque s’est saisi des possibilités offertes par le recueil, et la redécouverte des Vies de Plutarque par les humanistes ont été largement étudiées par l’historiographie. L’œuvre de Boccace, quant à elle, a été retenue comme contrepoint à celle de Pétrarque, les deux textes étant souvent comparés l’un à l’autre malgré, comme on l’a vu, un très grand décalage éditorial. Ces œuvres ont été considérées comme des jalons importants dans le mouvement de réorganisation des panthéons abritant, en pensée, les personnages que la Renaissance se choisissait comme exemples. Il s’agit donc de comprendre comment de tels écrits ont été reçus et appréhendés dans le passage du manuscrit à l’imprimé.
Plutarque, entre humanistes, éditeurs et libraires
10Les Vitae illustrium virorum de Plutarque ont été des succès de librairie, particulièrement en Italie16. Une première édition latine paraît à Rome en 1470. Giovanni Antonio Campano y a compilé plusieurs traductions du grec en latin, dues à des humanistes italiens, ainsi que des Vies rédigées par des auteurs issus de la scolastique ou des studia humanitatis17. L’ouvrage sert de base aux éditions ultérieures qui, peu à peu, le réaménagent : ainsi l’édition de Venise par Nicolas Jenson en 147818 ; puis celle de Brescia par Jacomo Britannico en 1499 avec un nouveau travail éditorial réalisé par Pilades Brixianus19 ; puis, encore, celle de Paris par Josse Bade, élaborée par Gerardo Vercellano en 151420. Parallèlement, les Vies de Plutarque sont éditées en grec à Florence en 151721 ainsi qu’à Venise par les héritiers d’Alde Manuce et d’Andrea Torresani en 151922, avant une révision majeure opérée par Simon Grynaeus dans les années 153023. Ce parcours éditorial, qu’a retracé Vito Giustiniani24, permet d’observer la mise en place rapide d’un corpus de référence très vite adopté mais presque immédiatement contesté pour ses erreurs philologiques, repris à la marge avec l’ajout et le retrait de certains textes. La forme du livre imprimé permet de fixer la forme et le contenu de ce recueil tout en laissant une certaine latitude aux imprimeurs et éditeurs.
11Si l’édition princeps sert de point de départ à la plupart des travaux postérieurs, on aurait cependant tort de mettre l’ensemble de ceux-ci sur le même plan. La mise en page et la mise en livre de ces recueils révèlent les publics visés et donc, au moins en partie, l’évolution de la réception des œuvres. La manière dont les premiers imprimeurs ont conçu leurs propres versions des Vitae illustrium virorum permet de mieux comprendre le sens qu’ils donnaient au recueil de Plutarque. La mise en page de la première édition romaine, en 1470, est une reprise directe des manuscrits humanistes du xve siècle, que ce soient les manuscrits des Décades de Tite-Live, étudiés par Henri-Jean Martin, ou les recueils de vies d’hommes illustres25. Cette présentation des textes classiques évoque les épigraphies antiques et les manuscrits carolingiens. Cela se traduit notamment par l’adoption d’une présentation en « pavés », c’est-à-dire en longues lignes et avec très peu de paragraphes. Ces choix formels visent à rendre compte de la pureté originelle attribuée au texte. Le public visé est constitué des lecteurs lettrés, cherchant à retrouver un texte antique à méditer, des bibliophiles, voire des lecteurs des milieux princiers et curiaux26. Ces éditions présentent une œuvre, elles la conservent pour la célébrer. Si cette conception reste longtemps en vigueur dans l’imprimerie européenne, on constate cependant que ce modèle est inadapté aux usages scolaires et universitaires. Certains acheteurs ont bien utilisé ces imprimés comme des manuscrits de luxe en les faisant enluminer27, mais d’autres ont cherché à pallier l’absence d’aide de paratexte, et la densité du texte, par des annotations marginales plus ou moins détaillées, certaines aidant dans la progression de la lecture28.
12L’élargissement du public de l’imprimerie a entraîné un relatif éloignement du modèle manuscrit humaniste, pour favoriser la lisibilité du texte et son étude active. Les formes de paratextes présents dans les manuscrits universitaires et scolastiques sont réadaptées dans le cadre des éditions imprimées. Cela est bien visible avec les choix réalisés à Brescia en 1499, qui affirment très nettement la volonté de proposer un outil de travail avec l’ajout de notes marginales, d’intertitres et de titres courants, ainsi que d’un index particulièrement fourni réalisé par l’éditeur Pilades Brixianus29. L’édition, de grand format et décorée par des initiales gravées devait néanmoins être coûteuse. Ce type de présentation se généralise au xvie siècle30. Le lectorat ciblé par les imprimeurs et éditeurs est cette fois celui des hommes de lettres, secrétaires et autres professionnels de l’écrit, qui ont besoin de pouvoir circuler dans le texte et d’en retirer des éléments précis. La lecture est moins contemplative et davantage active, sur le modèle des manuscrits d’étude. Par ce changement de mise en page, les Vies de Plutarque rentrent ainsi dans le canon des textes nécessaires à l’étude des lettres.
13Malgré ces transformations prenant en compte l’élargissement et les nouveaux besoins du public du livre, la forme imprimée donnée aux Vies de Plutarque reste très fortement imprégnée par le modèle humaniste italien, ne serait-ce que par les caractères romains qui sont systématiquement utilisés dans ces éditions, comme d’ailleurs pour toutes celles de textes classiques publiés en Italie. Néanmoins, certains éditeurs tentent d’autres formules. L’imprimeur vénitien Giovanni Ragazzo propose en 1491 une version plus ornée, mais sans que cette tentative ne connaisse de lendemain31. Une autre édition est imprimée à Séville la même année par une compagnie d’imprimeurs allemands (Paul de Cologne, Johann Pegnitzer, Magnus Herbst et Thomas Glockner), cette fois dans la traduction castillane d’Alfonso de Palencia32. Le texte est mis en page d’une manière radicalement différente, sur deux colonnes et en caractères gothiques. Il s’agit d’une forme familière au public castillan, très éloignée des standards alors en vogue auprès des humanistes italiens33.
14Les Vies des hommes illustres de Plutarque semblent au départ être un creuset d’une identité humaniste cristallisée en Italie dans la deuxième moitié du xve siècle34. Son succès éditorial est immédiat mais il conduit à une modification de la forme du livre au fil des éditions. Du livre comme conservatoire des lettres antiques au livre comme outil de travail, les imprimeurs et éditeurs adoptent progressivement une mise en page plus adaptée à l’étude. Afin de toucher d’autres publics, le texte n’en est pas moins proposé avec des types variés de mise en page, sans que ceux-ci ne parviennent pourtant à s’imposer. L’implication des éditeurs humanistes dans les éditions de Plutarque aux xve et xvie siècles contribue à faire de cette œuvre un texte majeur des études classiques au xvie siècle dans un contexte universitaire et savant.
Pétrarque mal aimé
15Les Vies de Plutarque pouvaient facilement se fondre dans le moule des mises en page des textes antiques, qui, formalisées avant l’imprimerie, évoluent ensuite sous l’influence du nouveau média, de ses acteurs et des usages des lecteurs. Les choses sont moins évidentes pour des textes au statut plus hybride : des textes d’auteurs humanistes contemporains, qui se réclament de cette tradition antique et sont destinés à un public lettré, mais qui ne sont pas totalement considérés à l’égal des autorités classiques ni, pour la plupart, enseignés à l’université ou dans les écoles.
16On a déjà noté l’absence quasi totale de Pétrarque dans les éditions des recueils de Vies aux xve et xvie siècles. Son De viris illustribus a fait l’objet d’une seule édition, à travers une traduction italienne imprimée en 1476 à Pojano, à côté de Vérone. Cette traduction est réalisée très peu de temps après la mort de l’auteur et, les deux versions, latine et vernaculaire, circulent toutes les deux modérément mais de façon équivalente sous forme manuscrite, si l’on en croit les témoins conservés. L’édition de 1476 paraît sous la direction de Felice Feliciano, dit Antiquarius, et sous les presses d’Innocente Ziletto35.
17En dépit des qualités du texte et de la célébrité de son auteur, le volume imprimé à Pojano ne trouve pas son public. Sans doute est-ce en raison des ambiguïtés et des paradoxes de cette édition, que Lilian Armstrong a bien mis en lumière. L’objet se présente comme élaboré puisqu’il intègre des bordures gravées individualisées dans lesquelles des portraits manuscrits pouvaient être réalisés. Suivant l’usage déjà bien établi, les imprimeurs ont également laissé de l’espace pour des initiales réalisées à la main. Cependant, les caractères employés sont peu élégants et Armstrong souligne le placement étrange de certaines gravures ainsi que la disposition parfois chaotique du texte et des bois. La forme et la matérialité de l’ouvrage ont pu rebuter les bibliophiles et le public lettré. On peut imaginer alors que les imprimeurs souhaitaient toucher un public plus large, ce que le choix de la version italienne peut encore laisser croire. Cependant les espaces importants laissés pour une personnalisation manuscrite s’adressaient plutôt à un public riche et habitué des ouvrages copiés à la main, alors même que la qualité générale n’était pas suffisante pour ce type d’acheteurs. Cette édition bancale envoyait des signaux contradictoires vers des publics différents, pour un texte déjà relativement peu lu au regard du reste de la production pétrarquéenne36.
18On peut ajouter un second élément à l’analyse de Lilian Armstrong. Les manuscrits du De viris illustribus de Pétrarque, même dans la version latine du texte, avaient tendance à être richement enluminés, avec une mise en page en deux colonnes et une écriture gothique, ce qui en faisait des ouvrages d’agrément dans un contexte curial37. Or ici les imprimeurs ont cherché à se rapprocher du modèle des textes classiques en choisissant une organisation par blocs de texte associée à des caractères romains, ce qui rendait formellement le texte voisin des textes classiques, telles les Vies de Plutarque dans ses versions imprimées. Le changement du support manuscrit au support imprimé était radical mais inadapté : l’auteur n’est pas une autorité antique ; la langue du texte n’est ni le latin ni le grec mais le vernaculaire. Sans doute la stature de Pétrarque et le genre de l’œuvre ont-ils encouragé les imprimeurs à adopter une mise en page rappelant les manuscrits humanistes. Les choix qu’ils firent pour l’élaboration de l’objet-livre n’en provoquèrent pas moins, semble-t-il, un malentendu avec les lecteurs dont les attentes du moment étaient autres.
19L’entreprise paraît donc avoir été un échec commercial et on ne connait pas d’autre édition isolée de ce texte, que ce soit en latin ou en italien. Plus généralement, le texte a peu intéressé les humanistes : quand Johann Amerbach publie en 1496, à Bâle, les œuvres latines complètes de Pétrarque éditées par Sebastian Brant, il n’imprime qu’une version courte du De viris illustribus38. Au moment où se fixe le canon des œuvres latines de l’humaniste, avec une édition soignée et clairement pensée pour l’étude, ce sont de très loin ses écrits philosophiques qui sont préférés. En vernaculaire, on préfèrera ses poésies lyriques, éditées notamment par Pietro Bembo et imprimées par Alde Manuce en 150139.
20Des travaux ont montré que le De viris illustribus de Pétrarque avait engagé un renouveau de ce genre littéraire. L’œuvre a été vue comme un moment essentiel dans la redécouverte de l’Antiquité, dans la mise en place d’une nouvelle conception de l’histoire et dans l’importance donnée à l’auteur qui prend en charge l’écriture de celle-ci40. Si ce constat est sans doute vrai au tournant du xive siècle, il est frappant de constater le désintérêt des imprimeurs pour ce texte, et aussi, pourrait-on dire, leur malaise face à une composition de nature ambiguë, tirant à la fois vers l’érudition et vers la littérature d’agrément. À l’inverse de la situation concernant Plutarque, le passage à l’imprimé a été complexifié par la difficulté de catégoriser le texte et son public, et donc de donner au livre une forme qui réponde aux attentes des lecteurs. Force est de constater que le texte de Pétrarque, peu copié et peu imprimé, ne constitue pas la référence principale pour le genre des hommes et des femmes illustres qui se développe à la fin du xve et au cours du xvie siècle.
Boccace l’Européen
21Contrairement aux vies écrites par Pétrarque, celles composées par Boccace connaissent une fortune éditoriale florissante dans les premières presses occidentales. On compte seize éditions incunables au total, dont quatre en latin : sept pour le De casibus virorum et neuf pour le De claris mulieribus. Les deux œuvres semblent faire partie d’un programme éditorial européen qui dépasse largement le genre des vies des hommes ou femmes illustres. La popularité de ces textes précédait l’imprimerie. L’importance des dédicataires féminins et des milieux aristocratiques dans la production et la réception du De claris mulieribus – ou de ses traductions – a été soulignée41 ; cette œuvre était très présente dans les bibliothèques de femmes proches du pouvoir42, même si de façon plus générale, les manuscrits de Boccace pouvaient se retrouver, au xve siècle, aussi bien dans des collections de bibliophiles que dans des bibliothèques moins fournies43. Les rééditions nombreuses de ces textes incitent à se pencher sur le public auquel ils étaient adressés, au-delà des cercles curiaux.
22Le parcours éditorial de Boccace commence dans l’espace germanophone. À Ulm, en 1473, Johann Zainer imprime coup sur coup deux éditions du De claris mulieribus, l’une en latin44, l’autre en allemand45 (rééditée en 1475), avec des mises en page quasi identiques. Ce sont des ouvrages de grand format, en longues lignes, composés en caractères gothiques, et illustrés par de nombreux bois gravés. À Strasbourg, deux ans plus tard, Husner imprime quant à lui successivement le De casibus virorum et le De claris mulieribus avec des mises en page semblables mais sans illustration. Le vernaculaire prend ensuite rapidement le pas : seule une autre édition latine est imprimée au cours de la période incunable. Dans sa version allemande, Boccace semble être une valeur sûre et aisément exploitable pour les presses germanophones dans le contexte du développement des romans en prose en allemand. Zainer à Ulm édite un grand nombre de traductions d’œuvres antiques ou italiennes : Ésope, le Décaméron, ou encore l’Histoire d’Apollonius de Tyr46. Ces versions allemandes, tout comme celle de Boccace, sont réalisées par Heinrich Steinhöwel qui entretient des liens très étroits avec l’imprimeur47. Leur mise en page est d’ailleurs très similaire et offre une sorte d’identité graphique à ces textes. L’imprimé participe ici de façon décisive à la diffusion et à l’identification de nouvelles œuvres dans le contexte allemand, ce qui permet d’observer la manière dont le passage sous presse transforme l’appropriation des textes et leur portée dans le lectorat.
23Peu de temps après, ce sont des traductions françaises de Boccace qui sont imprimées, à Bruges48, à Lyon49 puis à Paris50. Réalisées au début du xve siècle, elles avaient tout d’abord connu une grande diffusion en France. Carla Bozzolo a relevé une forte augmentation de la production des exemplaires manuscrits de ces versions dans le troisième quart du xve siècle, avant que l’imprimé ne prenne le relais51. Comme en Allemagne, de telles éditions s’inscrivent alors dans un paysage littéraire où se développe, depuis la deuxième moitié du xive siècle, la rédaction d’œuvres de fiction en vernaculaire et la traduction d’œuvres latines52. Certains imprimeurs parisiens puisent dans ce corpus pour étoffer leur catalogue. Antoine Vérard fait ainsi imprimer, outre un Décameron mis en français en 148553, une version traduite des Fables d’Ésope vers 149354. La diffusion de l’œuvre de Boccace à travers ses traductions se poursuit, avec un De casibus en anglais imprimé à Londres en 149455, et d’autres en castillan, imprimés successivement à Saragosse en 149456 et à Séville en 149557
24Il s’agit d’un véritable programme éditorial cohérent, commun à de nombreux imprimeurs à travers l’Europe tant sur le contenu que sur la forme des livres élaborés. Ces derniers présentent bien des similarités. Ce sont d’abord des in-folios en caractères gothiques. La majorité de ces éditions, ensuite, sont illustrées, les producteurs entendant répondre à ce qui semble être une attente du public. Antoine Vérard met en œuvre un programme iconographique développé, bien que répétitif58. Paul Hurus reprend, à Saragosse, en 1494, les bois qui avaient été utilisés pour l’édition d’Augsbourg de 147959 : les imprimeurs saragossiens sont allemands ce qui a sans doute favorisé la circulation de ce matériel. Les gravures sont parfois très directement inspirées (voire plagiées) les unes sur les autres, et on observe par exemple des parentés très fortes entre les éditions d’Augsbourg en 1479, de Strasbourg en 1488 et de Louvain en 148760. Louis-Gabriel Bonicoli a souligné l’importance de l’horizon d’attente du manuscrit de luxe pour le développement de l’illustration incunable : il est clair que les premiers livres imprimés illustrés jouent ainsi sur le prestige de l’image, mais aussi et surtout sur la variété de ses formes et de ses techniques. Ces ouvrages peuvent être tout à la fois enluminés et décorés de motifs ou de scènes imprimés, et ce façon personnalisée comme le sont certains exemplaires des éditions de Vérard61.
25Pour tous ces ouvrages, il s’agit de placer nettement les textes de Boccace du côté de la littérature d’agrément, pour un riche public de l’élite urbaine. Les professionnels de l’écrit, les humanistes, les philologues, qui auraient pu être tentés par les éditions latines, sont rapidement délaissés pour les patriciens ou les bourgeois. Ce sont à ces derniers que sont proposés des volumes en vernaculaire au prix élevé, de grand format et abondamment illustrés de gravures qui restent moins onéreuses que les enluminures. Il ne s’agit en aucun cas de textes « populaires » au sens sociologique du terme62.
26Boccace est donc inscrit dans les stratégies plus larges d’imprimeurs désireux d’étendre leur marché au public urbain aisé, auquel ils offrent des livres de prestige, liés à la culture de cour par leur contenu comme par leur aspect. Les textes choisis, leur impression et leur mise en livre contribuent ainsi à la construction d’une culture urbaine élitiste à l’échelle européenne.
Conclusion
27Les imprimeurs se lancent dans la fabrication d’ouvrages, en fonction de l’espace social qu’ils pensent être celui où leurs livres seront reçus, et que, ce faisant, ils contribuent à façonner. Frileux et conservateurs, ils cherchent à anticiper, avec plus ou moins de succès, la demande du public. En tant que genre multiforme et plastique, le recueil de vies d’hommes et de femmes illustres peut alors être réinvesti au cours des xve et xvie siècles par toute une variété de groupes, des philologues des universités italiennes aux patriciens des villes allemandes en passant par les bourgeois de Paris.
28Le livre imprimé reste cependant très profondément influencé par les formes des manuscrits passés et contemporains, il exploite largement les attentes des lecteurs fondés sur ce support, avant d’être adapté grâce aux particularités offertes par l’imprimerie. L’édition ambiguë du texte de Pétrarque montre combien il était important de catégoriser clairement l’œuvre et son public, comme l’ont été rapidement les œuvres de Plutarque et de Boccace. Toutes deux disposaient de terrains favorables à leur diffusion : l’intérêt pour les lettres grecques, d’une part, et, de l’autre, le développement de la littérature vernaculaire, notamment celle traduite d’œuvres antiques. Par ailleurs, en ajustant la forme de leurs livres à ces différents domaines, les acteurs de l’imprimerie contribuent aussi à modifier la lecture et les usages de ces ouvrages à une échelle européenne. Reprenant des titres ayant connu un fort succès à travers leurs copies manuscrites, ils concourent à en élargir et à en préciser le public, ainsi qu’à en réorienter – voire à en rigidifier – la lecture. La large circulation des livres et des acteurs du livre participe à la définition de certaines de ces œuvres, au fil des adaptations éditoriales, comme des jalons de cultures européennes lettrées et urbaines, qui se détachent progressivement de la culture princière.
Bibliographie
Archives
BE 597 = Miscellanea, Modène, Biblioteca Estense, Ms. Lat. 597, consulté le 13 décembre 2019, http://bibliotecaestense.beniculturali.it/info/img/mss/i-mo-beu-alfa.n.5.8.html.
BH 26 = Pétrarque, De viris illustribus, València, Biblioteca Històrica, Ms. 0026, consulté le 13 décembre 2019, http://0-hdl-handle-net.catalogue.libraries.london.ac.uk/10550/16005.
BNF Lat 6069I = Pétrarque, De viris illustribus, Paris, Bibliothèque nationale de France, Ms. Lat. 6069I, consulté le 13 décembre 2019, ark:/12148/btv1b84477727.
Ouvrages à caractère de source
Éditions et exemplaires consultés des Vies de Plutarque :
Plutarque 1470 (BM) = Plutarque, Vitae illustrium virorum, Rome, Ulrich Han, 1470, Venise, Biblioteca Marciana, Inc. 0097, consulté le 13 décembre 2019, http://www.internetculturale.it/jmms/iccuviewer/iccu.jsp?id=oai%3A193.206.197.121%3A18%3AVE0049%3AVEAE126402&mode=all&teca=marciana.
Plutarque 1471 (BUS)= Plutarque, Vitae illustrium virorum, Strasbourg, Adolf Rusch, après 1470-1471, Séville, Biblioteca Universitaria de Sevilla, Inc. 190, consulté le 13 décembre 2019, ark:/13960/t1jh91h6n.
Plutarque 1478 (BSB) = Plutarque, Vitae illustrium virorum, Venise, Nicolas Jenson, 1478, Munich, Bayerische Staatsbibliothek, Ink P-626, consulté le 13 décembre 2019, urn:nbn:de:bvb:12-bsb00060043-1.
Plutarque 1478 (BM) = Plutarque, Vitae illustrium virorum, Venise, Nicolas Jenson, 1478, Venise, Biblioteca Marciana, Inc. V.024, consulté le 13 décembre 2019, http://www.internetculturale.it/jmms/iccuviewer/iccu.jsp?id=oai%3A193.206.197.121%3A18%3AVE0049%3AVIAE036924&mode=all&teca=marciana.
Plutarque 1491a (BSB) = Plutarque, Vitae illustrium virorum, Venise, Giovanni Ragazzo pour Lucantonio Giunta, 1491, Munich, Bayerische Staatsbibliothek, Ink P-627, consulté le 13 décembre 2019, urn:nbn:de:bvb:12-bsb00060045-2.
Plutarque 1491b (BUSa) = Plutarque, Vitae illustrium virorum, Séville, Compañeros alemanes (Paulus de Colonia, Johann Pegnitzer, Magnus Herbst and Thomas Glockner), 1491, Salamanque, Biblioteca Universitaria de Salamanca, BG I7 et BG I8, consulté le 13 décembre 2019, http://0-hdl-handle-net.catalogue.libraries.london.ac.uk/10366/82471.
Plutarque 1499 (BCL) = Plutarque, Vitae illustrium virorum, Brescia, Jacobo Britannico, 1499, Lugano, Biblioteca cantonale de Lugano, Inc. 64, consulté le 13 décembre, http://www.tectel.services/dbook/BibliotecaLugano/Incunaboli/556081_00/Index_Pc.html#p=1.
Plutarque 1514 (SSA) = Plutarque, Vitae illustrium virorum, Paris, Josse Bade et Jean Petit, 1514, Augsbourg, Augsburg, Staats- und Stadtbibliothek, 2 LG 273, consulté le 13 décembre 2019, urn:nbn:de:bvb:12-bsb11199342-1.
Plutarque 1519 (BC) = Plutarque, Parallela en biois, Venise, dans l’atelier d’Alde Manuce et Andrea Torresani, 1519, Madrid, Biblioteca Complutense, BH DER 1980, consulté le 13 décembre 2019, https://0-hdl-handle-net.catalogue.libraries.london.ac.uk/2027/ucm.5317948423.
Plutarque 1531 (BSB) = Plutarque Vitae illustrium virorum, Bâle, Johann Bebel, 1531, Munich, Bayerische Staatsbibliothek, 037/2 LG 276, consulté le 13 décembre 2019, urn:nbn:de:bvb:12-bsb11199344-3.
Éditions et exemplaires consultés des Hommes illustres de Pétrarque :
Pétrarque 1476 (BUL) = Pétrarque, Libro degli uomini famosi, Pojano, Felice Feliciano et Innocente Ziletto, Liège, Bibliothèque universitaire de Liège, XV. B.181, consulté le 13 décembre 2019, http://0-hdl-handle-net.catalogue.libraries.london.ac.uk/2268.1/2334
Pétrarque 1496 (UBEN) = Pétrarque, Opera latina, Bâle, Johann Amerbach, 1496, Erlangen, Universitätsbibliothek Erlangen-Nürnberg, H62/INC 1527, consulté le 13 décembre 2019, urn:nbn:de:bvb:29-bv035906640-0.
Éditions et exemplaires consultés des Femmes illustres et de la Chute des hommes et femmes illustres de Boccace :
Boccace 1473 (BSB) = Boccace, De claris mulieribus, Ulm, Johann Zainer, 1473, Munich, Bayerische Staatsbibliothek, Ink. 559, consulté le 13 décembre 2019, urn:nbn:de:bvb:12-bsb00029099-3.
Boccace 1474 (BSB) = Boccace, Von etlichen frowen, Ulm, Johann Zainer, 1474, Munich, Bayerische Staatsbibliothek, Ink. B-561, consulté le 13 décembre 2019, urn:nbn:de:bvb:12-bsb00025586-9.
Boccace 1479 (BSB) = Boccace, Von etlichen frowen, Ausgbourg, Anton Sorg, 1479, exemplaire de Munich, Bayerische Staatsbibliothek, Ink. B-562, consulté le 13 décembre 2019, urn:nbn:de:bvb:12-bsb00025587-4.
Boccace 1487 (BULou) = Boccace, De claris mulieribus, Louvain, Egidius van der Heerstraten, 1487, Louvain, Bibliothèque universitaire de Louvain, Inc. 241, consulté le 13 décembre 2019, http://depot.lias.be/delivery/DeliveryManagerServlet?dps_pid=IE10686517.
Boccace 1488 (ULBD) = Boccace, Von etlichen frowen, Strabourg, Johann Prüss, 1488, Darmstadt, Universitäts- und Landesbibliothek Darmstadt, Inc. III 61, consulté le 13 décembre 2019, urn:nbn:de:tuda-tudigit-7914.
Boccace 1493 (BNF) = Boccace, Les nobles et cleres dames, Paris, Antoine Vérard, 1493, Paris, Bibliothèque nationale de France, Réserve des livres rares, Velins 1223, consulté le 13 décembre 2019, ark:/12148/btv1b8626778b.
Boccace 1494a (BUL) = Boccace, De la Ruine des Nobles hommes et femmes, Paris, Antoine Vérard, 1494, Liège, Bibliothèque Universitaire de Liège, XV.A31, consulté le 13 décembre 2019, http://0-hdl-handle-net.catalogue.libraries.london.ac.uk/2268.1/1635.
Boccace 1494b (BUS) = Boccace, Las mujeres illustres, Saragosse, Paul Hurus, 1494, Saragosse, Biblioteca Universitaria de Zaragoza, BG I306, consulté le 13 décembre 2019, http://0-hdl-handle-net.catalogue.libraries.london.ac.uk/10366/84383.
Études
Abed 2009 = J. Abed, Femmes illustres et illustres Reines : la communication politique au tournant des xve et xvie siècles, dans Questes. Revue pluridisciplinaire d’études médiévales, 17, 2009, consulté le 12 décembre 2019, https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/questes/1662.
Allés Torrent 2008 = S. Allés Torrent, Alfonso de Palencia y la traduccion de las Vidas de Plutarco (nuevos datos en torno al texto de partida), dans Quadernos de Filologia Clasica. Estudios Latinos, 28-2, 2008, p. 99-124.
Allés Torrent 2013 = S. Allés Torrent, Il genere biografico degli umanisti e la ricezione nella penisola iberica nel Quattrocento: appunti per una revisione, dans Quaderns d’Italià, 18, 2013, p. 201-215.
Armstrong 2016 = L. Armstrong, Petrarch’s famous men in the early Renaissance, Londres, 2016.
Bertelsmeier-Kierst 2019 = C. Bertelsmeier-Kierst, Erzählen in Prosa. Einflüsse des Medienwandels auf die Textkultur im 15. Jahrhundert, intervention prononcée aux journées d’études Cultures du texte, cultures du livre, organisées par Ch. Kempf, Heidelberg, 25 avril 2019.
Blons 2018 = P. Blons, « D’armes et d’amour » : édition et publication de « romans de chevalerie » chez le marchand-libraire Antoine Vérard à la fin du Moyen Âge, mémoire de master 2, université de Versailles Saint-Quentin, 2018.
Bonicoli 2015 = L.-G. Bonicoli, La production du libraire-éditeur parisien Antoine Vérard (1485-1512) : nature, fonctions et circulation des images dans les premiers livres imprimés illustrés, thèse de doctorat, université Paris Nanterre, 2015.
Bozzolo 1973 = C. Bozzolo, Manuscrits des traductions françaises d’œuvres de Boccace, Padoue, 1973.
Brockstieger 2019a = S. Brockstieger, Sprachpatriotismus und Wettstreit der Künste: Johann Fischart im Kontext der Offizin Bernhard Jobin, Berlin, 2019.
Brockstieger 2019b = S. Brockstieger, « Lebendige Bilnusse ». Zur Materialität von Bildnisvitenbüchern im 16. Jahrhundert, intervention prononcée aux journées d’études Cultures du texte, cultures du livre, organisées par Ch. Kempf, Heidelberg, 26 avril 2019.
Buridant 1978 = C. Buridant, Les problèmes de traduction du latin en français au xiiie siècle à partir de l’histoire de France de Charlemagne à Philippe-Auguste, thèse de doctorat, université Lille 3, 1978.
Legrand – Castellani 2016 = S. Legrand, M.-M. Castellani (dir.), Les Neuf Preux, numéro de Bien dire et bien aprandre. Revue de Médiévistique, 31, 2016.
Cerquiglini-Toulet 2001 = J. Cerquiglini-Toulet, À la recherche des pères : la liste des auteurs illustres à la fin du Moyen Âge, dans Mod Lang Notes, 116-4, 2001, p. 630-643.
Chaigne-Legouy – Salamon 2009 = M. Chaigne-Legouy, A. Salamon. Les Hommes illustres : introduction, dans Questes. Revue pluridisciplinaire d’études médiévales, 17, 2009, consulté le 12 décembre 2019, https://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/questes/466.
Costil 1937 = P. Costil, Les humanistes et la tradition manuscrite des textes grecs, dans Revue des études grecques, 50-235, 1937, p. 240-258.
Donato 1985 = M. M. Donato, Gli Eroi romani tra storia ed « exemplum ». I primi cicli umanistici, dans S. Settis (dir.), Memoria dell’antico nell’arte italiana, II, I generi e i temi ritrovati, Turin, 1985, p. 95-152.
Eichel-Lojkine 2001 = P. Eichel-Lojkine, Le siècle des grands hommes. Les recueils de Vies d’hommes illustres avec portraits du xvie siècle, Louvain, 2001.
Galderisi – Agrigoroaj 2011 = C. Galderisi, V. Agrigoroaej (dir.), Translations médiévales. Cinq siècles de traductions en français au Moyen Âge (xie- xve siècles). Étude et répertoire, Turnhout, 2011.
Giustiniani 1961 = V. R. Giustiniani, Sulle traduzioni latine delle Vite di Plutarco nel Quattrocento, dans Rinascimento, 1-3, 1961, p. 3-62.
Huijbers 2013 = A. Huijbers, De Viris illustribus ordinis praedicatorum. A « classical » genre in Dominican hands, dans Franciscan Studies, 71, 2013, p. 293-324.
Leroy 1999 = B. Leroy, La mémoire politique de la Castille au xve siècle : une galerie des hommes illustres, dans J. Kerhervé, A. Rigaudière (dir.), Finances, pouvoirs et mémoires : mélanges offerts à Jean Favier, Brest, p. 301-312.
MacLeod 1991 = G. MacLeod, Virtue and Venom. Catalogs of women from Antiquity to the Renaissance, Manchester, 1991.
Martin 2000 = H.-J. Martin, La naissance du livre moderne : mise en page et mise en texte du livre français, xive-xviie siècles, Paris, 2000.
Ornato 1997 = E. Ornato, Les conditions de production et de diffusion du livre médiéval (xiiie- xve siècles). Quelques considérations générales, dans La Face cachée du livre médiéval. L’histoire du livre vue par Ezio Ornato, ses amis, ses collègues, Rome, 1997, p. 97-116.
Pade 1992 = M. Pade, The Latin translations of Plutarch’s Lives in fifteenth century Italy and their manuscript diffusion, dans C. Leonardi, B. Munk Olsen (dir.), The classical tradition in the Middle Ages and the Renaissance, Spolète, p. 169-183.
Revest 2013 = C. Revest, La Naissance de l’humanisme comme mouvement au tournant du xve siècle, dans Annales. Histoire, Sciences Sociales, 68-3, 2013, p. 665‑696.
Rouse – Rouse 1986 = R. H. Rouse, M. A. Rouse, Bibliography before print: the medieval De viris illustribus, dans P. F. Ganz (dir.) The Role of the book in medieval culture, Turnhout, 1986, p. 133-154.
Winn 1997 = M. B. Winn, Anthoine Vérard, Parisian publisher (1485-1512), prologues, poems and presentations, Genève, 1997.
Notes de bas de page
1 Ces questionnements sont nourris par des traditions de recherche diverses, qu’il n’est pas possible de citer exhaustivement ici. On mentionnera néanmoins les travaux de codicologie présentés à l’IRHT, ainsi que ceux, de codicologie quantitative, développés au LAMOP et à l’université de Namur. Les enquêtes autour des pratiques de l’écrit au Moyen Âge et à l’époque moderne, dans le sillage de Roger Chartier en particulier, ont permis d’apporter des éclairages majeurs sur les changements induits par l’imprimé dans la transmission des textes, littéraires notamment. En dehors de la France, la material bibliography anglaise ainsi que les travaux germaniques autour du Medienwandel sont particulièrement dynamiques.
Pour des raisons de droits d’utilisation, nous ne pourrons joindre les reproductions des éditions commentées : nous nous efforçons de renvoyer systématiquement aux numérisations en ligne. La liste complète des versions utilisées figure en bibliographie.
2 Ornato 1997.
3 Incunabula Short Title Catalogue, désormais ISTC [en ligne].
Nous n’abordons pas ici les recueils hagiographiques, qui nécessiteraient une étude à part entière.
4 Dix-huit éditions des Vitae et sententiae philosophorum de Diogène Laërce : dix-sept en péninsule italienne, une dans l’espace francophone ; quinze éditions du De Viris illustribus d’Aurelius Victor : quatorze en péninsule italienne, une dans l’espace francophone ; quinze éditions des Vitae XII Caesarum de Suétone, toutes en péninsule italienne ; neuf éditions des recueils de vies de Plutarque, sept en péninsule italienne (dont deux éditions du De claris mulieribus ou De mulierum virtutibus), une dans l’espace germanique, une en péninsule ibérique.
5 Pade 1992, p. 177.
6 On recense ainsi 250 manuscrits médiévaux du De viris illustribus de Jérôme, dont 80 copiés au xve siècle : Rouse – Rouse 1986, p. 134.
7 À l’exception des ouvrages liés aux Neuf Preux : on ne connaît qu’une seule édition d’un texte se rattachant directement cette tradition que les Vœux du paon de Jacques de Longuyon contribuèrent à formaliser au début des années 1310. Il s’agit du Triumphe des neuf preux, imprimé à Abbeville par Pierre Gérard en 1487 (no ISTC : it00458000). Sur les Neuf Preux, notamment, Legrand – Castellani 2016.
8 Parmi les œuvres de Pétrarque imprimées avant 1500 pouvant s’apparenter au genre, on compte une édition du Libro degli uomini famosi, à Pojano en 1476, des vies de papes et d’empereurs romains attribuées à Pétrarque, à Florence en 1478-1479, une vie de Jules César, à Strasbourg en 1473, et les œuvres latines complètes éditées par Sebastian Brant, à Bâle en 1496.
9 Dix éditions du recueil du pseudo Walter Burley sont imprimées dans l’espace germanique, contre deux dans l’espace francophone et une dans l’espace flamand.
10 No ISTC : ic00473300.
11 No ISTC : ip01128950.
12 No ISTC : it00433000.
13 Parmi de nombreuses études, Cerquiglini-Toulet 2001 ; Eichel-Lojkine 2001 ; Huijbers 2013 ; Leroy 1999 ; ainsi que la mise au point très utile Chaigne-Legouy – Salamon 2009.
14 Universal Short Title Catalogue, désormais USTC [en ligne].
15 Notamment Eichel-Lojkine 2001 ; Brockstieger 2019a et 2019b.
16 Nous ne traiterons pas ici des deux éditions du De claris mulieribus.
17 No ISTC : ip00830000.
18 No ISTC : ip00832000.
19 No ISTC : ip00835000.
20 No USTC : 186783.
21 No USTC : 849957.
22 No USTC : 849958.
23 No USTC : 185259.
24 Costil 1937 ; Giustiniani 1961.
25 Pour un exemple de miscellanées de Vies écrites par des humanistes, voir le manuscrit BE 597. Pour l’édition de Rome de 1470 : Plutarque 1470 (BM).
26 Martin 2000, p. 11-27.
27 Par exemple Plutarque 1470 (BM) ou Plutarque 1478 (BSB)
28 Ainsi l’exemplaire de l’édition vénitienne de 1478 ayant appartenu à Giovanni Calfurnio Plutarque 1478 (BM), ou Plutarque 1471 (BUS), en particulier fol. 2v (n° ISTC : ip00831000).
Ces éléments ont été en particulier travaillés avec les étudiants de licence 3 de l’université de Versailles Saint-Quentin dans le cadre d’un cours d’initiation à la recherche au deuxième semestre de l’année 2018-2019. Je dois beaucoup aux discussions qui ont suivi leur travail sur les éditions des Vies des Plutarque. Qu’il me soit donc permis de les citer ici nommément : Clotilde Bardet, Léa Berthonneau, Anaïs Brasier, Aurélie Cadet, Romane Chadrin, Morgane Clermonte, Maxime Dubousset, Élise Garnery, Dmitrijs Gorbacs, Élodie Goupilleau, Vincent Lecointe, Laurelyne Mathaly, Mathieu Pezzotti, Cynthia Pourreau et Marine Roblin.
29 Plutarque 1499 (BCL).
30 L’édition de Josse Bade à Paris en 1514 reprend la même forme : Plutarque 1514 (SSA). L’édition de Simon Grynaeus imprimée par Johann Bebel à Bâle en 1531 adapte également cette présentation (n° USTC : 701520) : Plutarque 1531 (BSB). Cependant, certaines éditions continuent à promouvoir le modèle humaniste traditionnel et prestigieux, comme l’édition grecque des héritiers d’Alde Manuce à Venise en 1519, qui présente le texte en blocs compacts (n° USTC : 849958) : Plutarque 1519 (BC).
31 No ISTC : ip00833000 : Plutarque 1491a (BSB), en particulier fol. 1r.
32 No ISTC : ip00837000 : Plutarque 1491b (BUSa).
33 Allés Torrent 2008 ; Allés Torrent 2013.
34 Revest 2013.
35 N° ISTC : ip00415000. Armstrong 2016, chapitre 1.
36 Armstrong 2016, chapitre 5. Pétrarque 1476 (BUL), en particulier fol. 3r-4r.
37 Par exemple, le manuscrit BH 26 ; ou le manuscrit original du De Viris illustribus pour Francesco I da Carrara, réalisé à Padoue, entre 1365 et 1400 : BNF Lat 6069I.
38 No ISTC : ip00365000 : Pétrarque 1496 (UBEN), p. 703-709.
39 N° USTC : 847779.
40 Donato 1985.
41 Abed 2009.
42 MacLeod 1991.
43 Bozzolo 1973, p. 43-44.
44 No ISTC : ib00716000 : Boccace 1473 (BSB).
45 No ISTC : ib00720000 : Boccace 1474 (BSB).
46 No ISTC : ia00116000 ; ib00730000 ; ia00925000.
47 Bertelsmeier-Kierst 2019.
48 No ISTC : ib00711000.
49 No ISTC : ib00712000
50 No ISTC : ib0071300, ib0071900, ib0071400.
51 Bozzolo 1973, p. 37.
52 Sur ces questions, voir les travaux de Claude Buridant, notamment Buridant 1978, et de Claudio Galderisi, notamment Galderisi – Agrigoroaej 2011.
53 No ISTC : ib00728800 ; Winn, 1997 ainsi que Blons 2018.
54 No ISTC : ia00109000.
55 No ISTC : ib00710000.
56 No ISTC : ib00723000.
57 No ISTC : ib00715000.
58 Voir l’édition des Nobles et cleres dames imprimé en 1493 par Antoine Vérard à Paris (no ISTC : ib00719000) et l’exemplaire Boccace 1474 (BSB) ; ainsi que l’édition de La Ruine des nobles hommes et femmes (no ISTC : ib00714000) et l’exemplaire Boccace 1494a (BUL).
59 Pour l’édition d’Augsbourg de 1479 (no ISTC : ib00721000), voir l’exemplaire Boccace 1479 (BSB), en particulier fol. 9r. Pour l’édition de Saragosse de 1494 (no ISTC : ib00723000), voir l’exemplaire Boccace 1494b (BUS), en particulier fol. 5r.
60 Pour l’édition d’Augsbourg de 1479 (no ISTC : ib00721000), voir l’exemplaire Boccace 1479 (BSB), en particulier fol. 10r. Pour l’édition de Strasbourg de 1488 (no ib00722000), voir l’exemplaire Boccace 1488 (ULBD), en particulier fol. 8v. Pour l’édition de Louvain de 1487 (no ISTC : ib00718000), voir l’exemplaire Boccace 1487 (BULou), en particulier fol. 4r.
61 Bonicoli 2015.
62 Bertelsmeier-Kierst 2019.
Auteur
Université de Versailles Saint-Quentin – DYPAC – catherine.kikuchi@uvsq.fr
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Le Thermalisme en Toscane à la fin du Moyen Âge
Les bains siennois de la fin du XIIIe siècle au début du XVIe siècle
Didier Boisseuil
2002
Rome et la Révolution française
La théologie politique et la politique du Saint-Siège devant la Révolution française (1789-1799)
Gérard Pelletier
2004
Sainte-Marie-Majeure
Une basilique de Rome dans l’histoire de la ville et de son église (Ve-XIIIe siècle)
Victor Saxer
2001
Offices et papauté (XIVe-XVIIe siècle)
Charges, hommes, destins
Armand Jamme et Olivier Poncet (dir.)
2005
La politique au naturel
Comportement des hommes politiques et représentations publiques en France et en Italie du XIXe au XXIe siècle
Fabrice D’Almeida
2007
La Réforme en France et en Italie
Contacts, comparaisons et contrastes
Philip Benedict, Silvana Seidel Menchi et Alain Tallon (dir.)
2007
Pratiques sociales et politiques judiciaires dans les villes de l’Occident à la fin du Moyen Âge
Jacques Chiffoleau, Claude Gauvard et Andrea Zorzi (dir.)
2007
Souverain et pontife
Recherches prosopographiques sur la Curie Romaine à l’âge de la Restauration (1814-1846)
Philippe Bountry
2002