La science moderne, ses enjeux, ses pratiques et ses résultats en contexte catholique
Réflexions romaines1
p. 3-44
Texte intégral
« Quelle étrangeté que d’enclore l’idée d’empire universel dans un nom de ville ! et de l’y laisser oubliée depuis quinze cent ans. Il y a une atmosphère de déshérence distraite qui est propre à Rome. On se promène dans ses rues, on est retenu par l’échelonnement démesuré au long des siècles des souvenirs monumentaux, par la prolifération des édifices insignes, par l’entassement des œuvres d’art – cependant que le sentiment diffus d’une absence, d’une vacance centrale se fait jour. Comme si on parcourait les salles d’un palais où le maître fabuleux de céans, par quelque lubie incompréhensible, se fait celer et n’y est plus personne ».
Julien Gracq, Autour des sept collines, Paris, 1988, p. 108.
1Ce volume offre une première synthèse d’un travail collectif au long cours, engagé voici huit ans. Les contributions présentées au colloque La culture scientifique romaine à l’Époque moderne, tenu à l’École française de Rome, en octobre 20051 constituaient la rencontre conclusive d’un programme de recherche inauguré cinq ans plus tôt2, devenu ensuite une Action Concertée Incitative, financée par le Ministère de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de la technologie : Genèse de la culture scientifique européenne : Rome de la Contre-Réforme à la Révolution (xvie-xviiie siècles). Pendant cinq ans, elle a permis à un groupe de treize chercheurs, Jean-Marc Besse, Andrea Carlino, Antonio Clericuzio, Maria Conforti, Silvia De Renzi, Luisa Dolza, Maria Pia Donato, Pascal Dubourg Glatigny, Federica Favino, Luce Giard, Laurent Pinon, Giovanni Pizzorusso, et la coordinatrice du programme, de se rencontrer à échéances régulières, d’effectuer des missions de travail à Rome ou ailleurs, de publier partiellement leurs résultats, de discuter leurs hypothèses avec d’autres chercheurs, une cinquantaine au total3. Pendant cinq ans le groupe a fonctionné sur la base d’un double régime de l’échange : avec d’autres membres de la communauté scientifique, dans le cadre de tables rondes où étaient confrontés des résultats partiels et des hypothèses ; en interne, dans le cadre de réunions de travail où était défini l’agenda de la recherche et où les problèmes de méthode rencontrés par les uns et les autres faisaient l’objet de discussions fermées. C’est donc comme une conséquence logique du mode de fonctionnement établi que l’on présente un recueil de textes émanant des membres du groupe – le résultat de leurs travaux dans le cadre du programme – ainsi que d’autres chercheurs, interlocuteurs occasionnels ou intermittents. L’hybridité du volume rend ainsi compte du caractère ouvert d’une démarche commune placée sous le signe de l’échange : les dix-sept textes qui le composent présentent des travaux engagés ou non dans le cadre du programme4.
2Cette introduction voudrait rendre compte de la genèse du projet et de ses conditions d’énonciation, ainsi que des choix mis en œuvre dans la constitution du volume. C’est une tentative, au singulier, pour rendre compte d’une expérience collective : elle ne vise ni à l’exhaustivité, ni à l’objectivité – ainsi elle ne prétend pas reparcourir l’ensemble des débats ouverts durant les séances de travail, pas plus qu’elle n’a la prétention de dire, au nom du groupe, ce qu’est l’histoire des sciences et comment elle se fait. Elle éclairera dans un premier temps les motivations d’un ancrage historien du projet. Elle s’arrêtera dans un second temps sur l’objet même du projet, la science dans le monde catholique de la première modernité, qu’elle cherchera, dans un troisième temps à inscrire dans Rome, avant d’introduire, dans un dernier temps, les textes qui suivent. Même si j’en assume l’entière responsabilité intellectuelle, je sais aussi que, de même que le projet n’aurait pas été possible sans les membres du groupe qui ont accepté de répondre à mon invitation d’un travail à faire en commun, ce texte, et mon travail sur Rome en général n’auraient pas été ce qu’ils sont, sans leurs compétences, leurs générosités et leurs styles scientifiques singuliers.
Entre histoire et histoire des sciences
3Comme le texte du projet rédigé pour la demande de financement en porte la trace, il s’agissait de s’inscrire dans une tradition de recherche franco-italienne, dans le cadre d’un questionnaire centré sur l’Italie, à partir d’une collaboration entre les communautés savantes des deux pays. Double configuration institutionnelle et intellectuelle, qui a marqué le projet initial, dans un espace de contrainte réduit. C’est sur ce premier point que je voudrais insister d’abord, avant de signaler les différents autres horizons intellectuels auxquels, dans la durée même de son déroulement, ce programme s’est confronté et a trouvé à s’enrichir.
4L’hébergement du programme par l’École française de Rome signifiait, outre le centrage de la recherche sur l’Italie et dans un dialogue étroit avec l’historiographie italienne – en conformité avec la vocation même de l’institution – l’inscription dans une tradition d’étude correspondant à l’histoire culturelle. À bien des égards, ce nouveau projet s’inscrivait dans la continuité de celui qui venait à peine de prendre fin au sujet des milieux intellectuels italiens de l’époque moderne, dans une perspective comparative pour laquelle trois villes italiennes avaient été prises comme échantillons, Florence, Naples et Rome5. À bien des égards, il trouvait certains de ses antécédents dans les journées d’étude consacrées aux académies, à la culture savante, à la papauté comme agent de promotion culturelle6.
5Plus fondamentalement, ce programme entendait revendiquer son inscription dans un champ historien ouvert aux autres disciplines, en s’appuyant sur une tradition plus récente dans les programmes de l’École française de Rome, celle d’une « histoire historienne des sciences », pour reprendre la formule antérieure de Jacques Roger, à la fortune finalement si limitée dans l’espace français et si peu recevable d’une certaine manière dans l’espace italien, comme j’essaierai de l’indiquer plus loin7. Le palais Farnèse, cette forteresse des études sur l’Antiquité et l’archéologie, avait en effet déjà manifesté un timide intérêt pour cette discipline proche, et cependant si lointaine, depuis les années 80 du siècle passé : les traces de cette attention, certes fragile et toujours restée en dehors des axes de recherche ou des programmes d’étude jusqu’à celui dont on présente ici les résultats, sont repérables dans le recrutement des membres de la section d’histoire moderne et contemporaine ou dans celle d’histoire médiévale, dans l’organisation de certaines manifestations, parmi lesquelles le colloque Sciences et religions de Copernic à Galilée (1560-1610), tenu en 1996 et publié trois ans plus tard, a marqué un tournant8. Depuis cette date, outre les résultats partiels du programme « Rome et la science moderne » accueillis pas les MEFRIM9, d’autres volumes ont paru qui ont renforcé la visibilité de la discipline au sein des programmes de l’École française de Rome10.
6Pourquoi une telle volonté d’enraciner ce programme du côté de l’histoire ? Les termes mêmes du projet tel qu’il est présenté à l’expertise des agents du MESRT sont de nature profondément historique :
En se centrant sur la Rome pontificale de l’époque moderne (xvie-xviiie siècles), ce projet, interdisciplinaire et international, cherche à saisir les fondements d’une identité européenne qui se définirait à partir d’une culture scientifique spécifique. En effet, entre Renaissance et Révolution, l’Europe est le théâtre et l’espace de constitution d’une mutation épistémologique qui place la « science » au cœur du processus de compréhension du monde. De cette mutation, nos cultures actuelles sont encore largement les héritières et c’est pourquoi il est nécessaire de l’interroger. Rome représente un espace unique pour étudier cette mutation et sa genèse : susceptible de revendiquer un statut de capitale universelle pendant presque deux millénaires (capitale d’abord de l’Empire romain, puis de la Chrétienté, puis de la Catholicité), elle présente des structures sociales et intellectuelles, particulièrement entre Renaissance et Révolution, d’une richesse exceptionnelle, qui ont permis l’accumulation des livres, des instruments, des inventaires d’un monde en expansion. Or, la connaissance qu’on en a aujourd’hui est presque totalement inexistante, tant l’histoire des sciences a été soumise aux exigences d’une discipline historienne enfermée dans des logiques nationalistes, ou hagiographiques (qui ont privilégié les hauts lieux ou les grands hommes de la science), tant l’historiographie des sciences s’est construite sur un terreau anti-clérical, qui a longtemps interdit l’analyse du rapport entre sciences et religion.
En engageant des travaux sur des fonds inédits, à la croisée de différentes approches historiographiques et épistémologiques, le groupe de travail qui anime ce projet entend donc rendre à cet espace paradoxal qu’est la Rome pontificale, son rôle de laboratoire d’une nouvelle culture scientifique européenne en constitution11.
7On retiendra ici la formule « culture scientifique » qui offrait la possibilité de prendre les distances nécessaires vis-à-vis des outils traditionnels de l’analyse tels que les historiens des sciences les avaient proposés jusqu’alors, en particulier celui de « révolution scientifique », donnée comme coupure et résultat plus que comme processus. L’expression a suscité, au sein du groupe de recherche, une série d’échanges féconds qui n’ont pas nécessairement cherché à en donner une définition précise, mais qui ont permis d’indiquer plus nettement la spécificité du travail engagé, et son rapport à l’histoire des sciences en général et à certaines traditions historiographiques en particulier. Ainsi, le fait d’inviter dans ce travail collectif un ensemble de collègues aux compétences différentes et susceptibles de couvrir un large spectre de savoirs faisait directement écho au choix de l’expression « culture scientifique » plutôt que « science » tout court dans le libellé du projet. En effet, si la physique ou les mathématiques sont traditionnellement considérées comme des disciplines relevant clairement de l’histoire des sciences, elles n’ont pas été les deux seuls centres d’ancrage du programme : on pourra même reprocher au volume ici présenté de les avoir marginalisées. Des enquêtes sur la médecine, l’alchimie, la culture visuelle, la géographie ou les instruments scientifiques ont été non seulement sollicitées, mais certaines se sont révélées centrales pour la compréhension de la Rome moderne : elles ont pu montrer, on y reviendra, que la souplesse de l’expression « culture scientifique » était une invitation à interroger les pratiques et les conceptions de l’époque étudiée, plutôt que celles fondées sur la base de nos définitions contemporaines.
8On notera, dans le texte de présentation de 2001, l’importance accordée aux sources, ces fonds inédits qui doivent contribuer à l’invention de corpus, selon les protocoles d’un acte historiographique enfin décrit et analysé par Michel de Certe au dans les années 197012. On évoquera enfin le souci d’interdisciplinarité, lié à l’exigence de rendre compte de la complexité des configurations non seulement intellectuelles, mais aussi sociales et politiques qui sont mobilisées dans l’analyse historique en général, et dans le cas de Rome en particulier. L’expérience à peine achevée sur les milieux intellectuels faisait mesurer combien on avait à gagner d’une forte « mise en contexte » dès lors qu’on prenait Rome pour objet13. Mais non pas Rome comme cas unique, Rome comme paradigmatique du lieu dans lequel on produit : cette manière de faire me paraissait davantage relever du savoir-faire des historiens que de celui des historiens des sciences ou d’une science. À l’inverse, que les historiens de la culture aient du mal à trouver leurs objets sur les terrains « scientifiques » était également limitatif : l’interrogation sur les formes et les pratiques ne parvenait pas toujours à rendre compte des produits eux-mêmes. D’où l’idée de réunir des experts de formations différentes et d’horizons problématiques distincts mais complémentaires. Le groupe tel qu’il a été constitué représentait l’histoire avec Maria Pia Donato, Giovanni Pizzorusso, et Antonella Romano, l’histoire de la philosophie et des mathématiques avec Luce Giard, l’histoire de la géographie avec Jean-Marc Besse, l’histoire de la médecine avec Andrea Carlino, Maria Conforti et Silvia De Renzi, l’histoire de l’art avec Pascal Dubourg Glatigny, l’histoire de la zoologie et des sciences naturelles avec Laurent Pinon, l’histoire des techniques avec Luisa Dolza, l’histoire des sciences physico-mathématiques avec Federica Favino et l’histoire de l’alchimie ave Antonio Clericuzio14. Le groupe était ainsi totalement franco-italien, les compétences chronologiques s’étalaient sur l’ensemble de la période considérée, avec une surreprésentation des spécialistes du xvie siècle. Chacun acceptait le jeu de l’interdisciplinarité et la variété des traditions intellectuelles représentées, chacun savait aussi être plus ou moins loin de ses propres terrains d’enquête au moment où l’on jetait l’ancre dans les eaux romaines. Il s’agissait bien de tenter l’expérience, sans résultats garantis, avec le seul sentiment partagé que les enjeux du programme étaient intéressants et qu’il y aurait à apprendre.
L’équipe impliquée dans le projet a été constituée à partir d’une double exigence : mixité du point de vue des appartenances nationales (l’équilibre entre France et Italie se trouve totalement respecté) et complémentarité des compétences : on reviendra dans la présentation du projet sur l’importance de ce critère. On peut d’ores et déjà souligner qu’il s’agit d’un choix épistémologique fort, lié à l’observation du champ de l’histoire des sciences tel qu’il fonctionne aujourd’hui (une grande hétérogénéité des horizons épistémologiques et une profonde diversification des questionnements, qui permettrait de parler d’une « nouvelle histoire des sciences » en émergence depuis une dizaine d’années en France comme en Italie) et qui invite à travailler dans le souci de la plus grande ouverture possible en termes de référents théoriques, de choix méthodologiques et d’objets de la recherche15.
9Il est moins question ici de revendiquer l’audace d’un questionnaire portant sur la « culture scientifique » qui a cherché à réunir les termes attendus d’un des oxymores les plus vivaces de l’histoire des sciences des trois derniers siècles « Rome capitale scientifique », que de chercher à rendre compte – avec la distance rendue possible par l’achèvement du programme, l’évolution de la recherche dans une communauté scientifique toujours plus internationale et la publication de certains résultats du programme entre 2001 et 200516 – des conditions institutionnelles, intellectuelles et épistémologiques de production d’un programme de ce type, afin de le situer, c’est-à-dire de le rendre lisible aujourd’hui, mais aussi éventuellement demain.
10Sous-jacente aux motivations individuelles se trouvait l’idée que le moment était propice, historiographiquement, méthodologiquement : aussi aventurière qu’elle soit, une entreprise n’est jamais le fruit du hasard, mais de son temps, et pour la France comme pour l’Italie, de nouveaux horizons se dégageaient. De quelle « nouvelle histoire des sciences » s’agissait-il ? Quelle « nouvelle histoire des sciences » devenait possible ?
11On remarquera, dans le choix de cette formule, la référence à la nébuleuse des Annales, référence implicite dans le texte susmentionné, mais qu’il est peut-être nécessaire d’expliciter aujourd’hui. Dans la décennie qui a précédé la mise en œuvre de ce programme, décennie qui a aussi été celle de la formation de la plupart des membres du groupe de recherche, les évolutions en cours étaient perceptibles, mais les instruments pour les lire et les analyser étaient rares : le dialogue, quand il existait, se déroulait entre ceux des générations antérieures. Il n’est pas de ma compétence de rendre compte de celui qui a pu occuper l’Italie, même si un indicateur des tensions idéologiques et méthodologiques en cours, peut être constitué par la réception du livre de Pietro Redondi sur Galilée. Sans revenir ici sur le virulent article que M. Firpo et V. Ferrone lui ont consacré dans la Rivista storica italiana, avant de le mettre en circulation dans une version abrégée dans l’espace anglophone17, on signalera plutôt, en guise de caractérisation du panorama italien, que l’année 1983 voit en même temps paraître ce Galileo eretico (dans la collection « Microstorie » du fameux éditeur turinois Einaudi), et le volume collectif édité par P. Galluzzi, Novità celesti e crisi del sapere, qui réunit les « galiléens » patentés de la communauté internationale18. Ce volume, ainsi que les différentes contributions, principalement italiennes, accueillies dans la revue Nuncius, elle-même doublée depuis peu par la non moins éloquente Galileiana, permet sans doute de saisir au mieux la tradition italienne pour l’histoire des sciences, caractérisée par sa plus grande spécialisation sur la première modernité et sa focalisation sur Galilée. Dans Novità celesti, l’effort de contextualisation, même s’il n’est pas formulé comme tel, mais plutôt inscrit dans la tradition de Eugenio Garin19, à l’école de laquelle la plupart des contributeurs italiens du volume ont été formés, pour être remarquable, n’en est pas moins limité, ou du moins à sens unique : comme s’il ne revenait qu’à l’historien des sciences de produire le discours légitime sur l’histoire, et en particulier sur l’histoire culturelle de cette période, alors même qu’une section entière du volume s’y arrête – les quatre sections s’occupant respectivement des écrits de Galilée, de l’optique et de sa théorie de la lumière, des contemporains de Galilée, et de la postérité de la cosmologie galiléenne. Les contributions de C. Vasoli ou de C. Schmitt garantissent l’ouverture du côté de l’histoire intellectuelle et le thème du patronage fait son apparition dans un des textes les plus innovateurs, dû à R. Westfall. À l’inverse l’organisation thématique du volume rappelle combien l’histoire des sciences se pensait alors en termes d’histoire des disciplines scientifiques, largement dominée encore à cette date par les disciplines physico-mathématiques.
12Pourtant, l’histoire des institutions scientifiques, comprise dans une perspective plus large d’histoire des institutions culturelles, avait ouvert la voie à un échange fructueux entre historiens du héros national de la science moderne et historiens plus généralistes, comme l’attestent les deux numéros thématiques des deux revues historiennes, tous deux parus en 1980 : la revue phare du débat historiographique en Italie, Quaderni storici, consacrait un numéro entier, sous la triple direction de P. Galluzzi, C. Poni et M. Torrini, aux Accademie scientifiche del ’60020. Dans un contexte intellectuel différent, la même année, L. Boehm et E. Raimondi éditaient, dans les Annali dell’Istituto storico italo-germanico in Trento, le volume consacré aux Accademie e Società scientifiche in Italia e in Germania dal Cinquecento al Settecento21. Si l’objet, à peine abordé en France à la même époque, pouvait s’offrir comme patrimoine commun aux deux communautés savantes, il allait cependant peu servir à renouveler l’approche des milieux romains dans une perspective de mise en contexte de Galilée : le centrage des travaux sur des groupes institutionnalisés, le rejet massif de l’ensemble du travail de P. Redondi qui avait cependant montré la voie à une approche plus « culturelle » de l’affaire galiléenne, le contexte polémique ouvert et nourri par les travaux de la commission pontificale établie par Jean-Paul II en vue de « réviser » le procès de Galilée22, tout cela constituait l’horizon des années 1990, au fond peu propice à la collaboration entre historiens des sciences et historiens, parmi lesquels nombreux étaient ceux dont la chaire concernait l’histoire de l’Église. Dans le même temps, l’historiographie sur Rome commençait à offrir de nouvelles perspectives de recherches, mais le temps n’était pas encore à la convergence, on y reviendra plus loin.
13Pour la France, et sans prétendre à l’exhaustivité, on insistera sur le changement de paradigme lié à l’introduction des travaux en provenance du Royaume Uni, caractéristique des années 1990 : si jusqu’alors c’est autour de la Revue de synthèse – héritière des ponts entre histoire, philosophie et épistémologie, tels que les générations des années 1920 les avaient construits – qu’il fallait chercher les acteurs et les institutions d’un possible dialogue23, parmi les indicateurs du changement de perspective dans la décennie suivante, on pourrait signaler d’une part la traduction française et les débats suscités par la réception en France du livre de S. Shapin et Schaffer, Leviathan et la pompe à air, et d’autre part, dans la même lignée le débat sur l’histoire des sciences organisé autour de l’École des hautes études en sciences sociales24. Entre les deux moments et les deux milieux, tout s’écrivait sous le signe de la discontinuité : la proposition sociologique, originaire de l’école d’Edinburgh et de David Bloor, revendiquée au début des années 1990 comme référence théorique pour une histoire des sciences alternative et ouverte aux exigences des sciences sociales, se dissolvait, quelques années plus tard, dans une série de références plus éclectiques, où se croisaient différentes historiographies d’origine anglophone, hâtivement réinscrites dans un agenda des Annales lui-même déjà en pleine reconfiguration, selon la vocation de ses origines25. Ainsi en l’espace de quelques années, l’agenda de l’histoire des sciences de l’époque moderne ne devait plus s’écrire qu’à l’aune des protocoles expérimentaux ou des stratégies courtisanes : l’impératif de modélisation importé des science sociales produisait de nouvelles références, qui rendaient enfin l’histoire des sciences attractive et lisible, et qui permettaient enfin d’inscrire l’objet science dans un programme de recherche partagé 26.
14À cet égard, que de chemin parcouru depuis le moment où L. Febvre, voici cinquante ans, se proposait, à l’occasion d’un même compte-rendu, de réunir deux livres majeurs, celui de R. Lenoble sur Mersenne et celui de R. Pintard sur le libertinage érudit27, pour constater que, tout en choisissant deux angles d’approche radicalement différents et qui s’ignoraient mutuellement, l’histoire des sciences et l’histoire intellectuelle, ces deux textes ne faisaient qu’aborder un même et unique problème :
Il s’agit d’un passage. A l’un des bouts, la pensée des hommes du xvie siècle (…). Donc, à l’un des bouts, le bouillonnement du siècle d’Érasme, de Luther, de Copernic ; et aussi de Pomponazzi, de Lefèvre d’Etaples, d’Ignace de Loyola, de Rabelais, d’É tienne Dolet, de Jean Calvin finalement. À l’autre bout, cet ordre, cette régularité : Descartes et le cartésianisme ; Bérulle et l’Oratoire ; Arnauld et Port-Royal ; Pascal. Une nouvelle philosophie, une science nouvelle, de nouvelles formes de religion. Bref, un changement de style radical. Un nouveau climat. Presque un nouveau monde. En tous cas, une étonnante révolution dans les façons d’être, de penser, de croire28.
15Les propositions surgies en France au milieu des années 1990 bousculaient une communauté historienne enracinée dans la recherche empirique et cumulative, et qui, depuis Febvre, avait eu du mal à trouver une place pour les sciences dans ses programmes de recherche : l’histoire des idées avait pris sa part du fardeau comme le signalait justement le compte-rendu que l’on vient de citer ; l’histoire culturelle aussi, et c’est sans doute ce qu’on aurait tendance à oublier aujourd’hui en ne cherchant qu’outre-manche ou outre-atlantique des modèles d’analyse ou des « maîtres-étalons ». Que ce soit sur le versant des pratiques sociales et des formes de la sociabilité telles que Daniel Roche les a reconstituées puis analysées dans son œuvre pionnière sur les académies de province29, que ce soit sur le versant de l’histoire de l’imprimé, du livre et des pratiques de lecture telle qu’elle a été mise en œuvre par H.-J. Martin et R. Chartier30, les historiens ont eux aussi apporté leur contribution qui a permis d’enrichir le questionnaire et de rendre la formule « culture scientifique » non seulement pertinente, mais susceptible d’être intégrée dans un tableau d’ensemble sur les sociétés européennes et leurs mutations tout au long de la période moderne.
16Surtout, et sans que ceci ait véritablement été noté et commenté par les uns et les autres, les historiens de la culture rendaient possible, et sans doute de manière infiniment plus explicite que les science studies, la « dépanthéonisation » de l’histoire des sciences qui n’avait plus besoin d’être uniquement recherchée du côté des savants reconnus : l’histoire des pratiques culturelles et de la culture scientifique ne concerne pas seulement les pratiques identifiées a posteriori comme savantes et relevant d’une communauté préétablie, elle appartient à tous, elle peut aussi s’écrire par le bas, ou du moins elle n’est plus à chercher d’emblée du côté de ceux que l’historiographie des sciences a reconnus comme les siens. Non seulement elle a rendu possible l’historicisation même de la catégorie de science, mais elle a aussi permis de prendre ses différentes configurations comme objet de ses recherches, sans pour autant renoncer à travailler sur des sources, à produire des données quantitatives et factuelles.
17La situation des deux historiographies française et italienne, dans les deux dernières décennies est assurément loin de se réduire aux quelques traits que l’on vient de mentionner, mais leur évocation invite à rappeler la profonde recomposition en cours dans le champ, recomposition aux enjeux institutionnels et intellectuels profonds, dans une période de forte internationalisation de la recherche et de multiplication des revues spécialisées, de langue anglaise, qui ont massivement porté le mouvement d’externalisation de l’histoire des sciences. Elle rappelle aussi un autre point : le poids encore fort lourd du paradigme national dans la configuration de ce champs historiographique31. Le projet sur Rome et la science cherchait aussi à poser d’autres cadres d’analyse pour regarder autrement : ici la ville devait permettre d’introduire la notion d’échelle en mettant au centre des travaux la question de la production locale des savoirs et des jeux d’échelles dans lesquels cette production se trouvait prise, question qui à son tour devait, dans les années suivantes, susciter un ensemble de formulations plus précises32.
18Tel qu’il a été esquissé en 2000, le projet romain prenait acte, à sa manière empirique et expérimentale, de tous ces changements. Il cherchait ainsi à s’inscrire dans un débat devenu international, principalement celui qui relevait des rapports entre science, société et religion, un débat sous-jacent à l’analyse de la « révolution scientifique ».
Science, société et religion
19Il n’est pas nécessairement utile de reprendre ici les termes du débat sur la « révolution scientifique », ses évolutions et mises en question récentes, on renverra à la littérature disponible sur la question33. C’est cependant dans ce contexte que le thème « science et religion » a principalement trouvé à se déployer autour du double éclatement de la chrétienté entre catholiques et protestants et de la construction des savoirs entre tradition et modernité. Que l’époque moderne ait été, pour l’Europe, le moment de la production d’un savoir sur le monde et sur l’homme distinct de celui dont la théologie avait été jusqu’alors la pourvoyeuse est une proposition communément admise. Que le processus de distinction des sphères, des agents et des modes de la communication qui a porté ce changement de paradigme ait provoqué des situations conflictuelles n’est pas non plus à discuter : « l’affaire Galilée », brièvement évoquée plus haut, a sans aucun doute contribué à donner à ce thème plus qu’une légitimité particulière, une véritable dimension dramatique, fondée sur une tradition textuelle née dès la seconde moitié du xviie siècle. L’incompatibilité essentielle entre science moderne et catholicisme était définitivement admise sous la plume de l’un des pères fondateurs de la science historique, Jules Michelet :
Le xvie siècle, dans sa grande et légitime extension, va de Colomb à Copernic, de Copernic à Galilée, de la découverte de la terre à celle du ciel. L’homme s’y est révélé à lui-même. [...] Les mathématiciens, sérieux au xiie siècle du temps de Fibonacci et de l’école de Pise, sont des sorciers au xive, des faiseurs de carrés magiques. Charlemagne avait une horloge qu’il avait reçue du calife ; mais saint Louis qui revient d’Orient, n’en a pas et mesure ses nuits par la durée d’un cierge. La chimie, féconde chez les Arabes d’Espagne, et prudente encore chez Roger Bacon, devient l’art de perdre l’or, de l’enterrer au creuset pour en tirer de la fumée. La reculade que nous notions en philosophie, en littérature, se fait plus magnifique encore et plus triomphante dans les sciences. Copernic, Harvey, Galilée sont ajournés pour trois cents ans. Une nouvelle porte solide ferme le passage au progrès, porte épaisse, porte massive, la création d’un monde de bavards qui jasent de la nature sans s’en occuper jamais34.
20À l’inverse, le constat de l’essor de la modernité scientifique dans le cadre protestant35, puis on analyse, ont notamment été faits par le sociologue états-unien Robert K. Merton. Selon sa propre expression :
From the middle of the seventeenth century, science and technology claimed an increasing need of attention. No longer an errant movement finding faltering expression in occasional discoveries, science had become accredited and organized. To this the establishment of the Royal Society bears some witness. [...] But all this was no spontaneous generation. It had its antecedents rooted deep in the culture which fathered it and assured its further growth ; it was the child of a long period of cultural incubation. And [...] the specific sources of this newly expressed vitality of Science, of this new-won prestige, they must be sought among these cultural values. If it be true that science, just as any other activity, attracts followers to its ranks to the extent that it is regarded with favor by society, then the marked increase in the number of scientists which occurred during the seventeenth century is a symptom of the changing temper of the time. [...] Puritanism, evoking and shaping the sentiments which pervaded every phase of human action in this period ; was the religious movement which notably incorporated dominant cultural values. As such, it provided a measuring rod for the worth of various social activities. What, then, were its relations to science ? Did Puritanism, as so often we are told, involve that sort of fervid fanaticism which brooks nothing but its own religious goals ? And, if so, what of the cultural implications of such an attitude ? What were the consequences for the new science of the powerful motivations, which derived from Puritanism ? In short, we are concerned with the complex modes of interaction between a religious ethic and science, not as these appear to apologists of the two camps, but as they occurred in the course of actual’ social development36.
21La proposition a connu une grande postérité, qui a culminé avec l’œuvre de Charles Webster, The Great Instauration. Science, Medicine and Reform, 1626-166037. À partir de cet ouvrage fondateur de Webster, la référence à Merton n’a pas cessé d’être mobilisée et, plus précisément, à propos du milieu puritain et du cercle de Hartlib comme terreau sur lequel s’est développée la Royal Society. Depuis le compte-rendu élogieux qu’en faisait Roy Porter peu après sa publication jusqu’aux recensions bien plus nuancées de la nouvelle édition parue en 200238, les travaux d’inspiration « websterienne » n’ont cessé de préciser un rapport entre puritanisme et science moderne dont on pourra toujours continuer à nuancer l’articulation, mais qui n’a pas été remis en cause depuis. En d’autres termes, on suit, sur le versant anglo-américain de l’historiographie des sciences à propos de la révolution scientifique et de la première modernité, le fil d’un questionnement toujours présent. On mesure en outre les enjeux méthodologiques et épistémologiques de l’intervention des sociologues sur le thème « science et religion », à travers l’introduction d’un troisième terme « société » dans l’articulation des débats. Ce n’est donc pas un hasard si la revue Science in Context39 consacrait la première livraison de son troisième volume à After Merton : Protestant and Catholic Science in Seventeenth Century. À travers cette évocation, on veut aussi indiquer l’effet d’entraînement sur le versant catholique produit par ce filon de la recherche. C’est en effet à l’aune de ces références que le monde catholique, sur le versant de l’histoire des sciences, a pu bénéficier, par des voies détournées, d’un certain renouvellement historiographique40.
22Mais ce serait le résultat d’une lecture partielle et anglo-centrée que de rendre compte de ce renouvellement du questionnaire sur la science et ses pratiques en milieu catholique en considérant cette seule généalogie. Le volume mentionné de Science in Context propose sur le monde catholique des textes presque exclusivement consacrés aux jésuites. Une telle concentration sur la Compagnie me paraît signaler, outre les intérêts propres des éditeurs du volume41, une attention croissante portée à cet acteur central dans la vie culturelle et intellectuelle du monde catholique de la première modernité. À cet égard, la décennie suivante, de laquelle il m’a déjà été donné de rendre compte, a été d’une fécondité exceptionnelle42. On relèvera trois éléments saillants de cette belle saison, et dans une perspective uniquement limitée à la science : le caractère international de la recherche, avec deux types de productions, qui prenaient le parti du cadre institutionnel ou du cadre politique ; l’importance du filon d’études galiléennes comme point de départ de nombreuses recherches ; un centrage massif sur la période de la fondation. Ainsi la production a été d’une grande diversité, dans ses méthodes, ses thèmes et ses objectifs aussi, mais toujours basée sur la « découverte » des potentialités offertes par les archives jésuites pour l’histoire des sciences, dans un moment où la Compagnie elle-même déployait un effort considérable pour les rendre accessibles à une communauté savante laïque43. La parution, en 1999, du volume The Jesuits : Cultures, Sciences, and the Arts, 1540-1773, venait confirmer un intérêt qui n’était pas prêt de s’essouffler et la place qu’occupent les questions scientifiques dans le processus de désenclavement de l’histoire jésuite44.
23Il confirmait en outre deux types de mutations : d’une part, un déplacement progressif des interrogations du centre romain vers la périphérie sans que, parallèlement, les travaux sur le centre romain aient jamais vraiment pris de front la question de la romanité, le plus souvent confondue avec la centralité romaine45 ; d’autre part, l’intégration à part entière de la Compagnie dans la production scientifique de son temps, et sa saisie à travers les outils généraux d’une histoire culturelle ou intellectuelle des sciences : d’une certaine manière la Compagnie était réintégrée dans la République européenne des Sciences et des Arts46. Cette mutation du paysage historiographique autour de la Compagnie n’a pas peu contribué à remettre le cap sur Rome. Le glissement depuis « Rome centre institutionnel » pour l’ordre religieux fondé par Ignace de Loyola et ses compagnons à « Rome, capitale politique et religieuse, espace social complexe » avec l’interaction entre acteurs institutionnels, individuels, communautés nationales, professionnelles, etc. devenait dès lors possible, pensable, voire nécessaire, d’une part pour procéder à une mise en contexte de la Compagnie de Jésus47, d’autre part pour tester, à une échelle plus générale, les résultats qui se profilaient à travers l’étude du laboratoire jésuite48.
Rome, un paradigme pertinent ?
24Le choix de Rome pour y baser un programme de recherche sur la science moderne du point de vue de la catholicité pouvait donc devenir pertinent. L’argumentaire du projet rédigé en 2000, sans pouvoir être trop précis, l’indiquait cependant clairement :
La « révolution scientifique » en tant qu’elle se donne comme le point de départ de la science moderne et contemporaine constitue proprement un facteur de l’identité européenne, non seulement au plan scientifique mais aussi en ce que la domination européenne (politique, économique, technique) sur le monde est aussi domination de la science européenne sur le monde ; à ce titre, elle a généré un type particulier de rapport entre science et société, entre scientifiques et citoyens, comme en témoigne l’attention portée actuellement par les pouvoirs publics à la formation universitaire en histoire des sciences. Interroger les fondements de la culture scientifique européenne revient donc à s’offrir les outils d’une meilleure compréhension des besoins actuels d’un monde confronté à des questions scientifiques aux enjeux de plus en plus complexes et lourds de conséquences.
Rome représente un espace unique pour étudier cette genèse : susceptible de revendiquer un statut de capitale universelle pendant presque deux millénaires (capitale d’abord de l’Empire romain, puis de la Chrétienté, puis de la Catholicité), elle présente des structures sociales et intellectuelles, particulièrement entre Renaissance et Révolution, d’une richesse exceptionnelle, qui ont permis l’accumulation des livres, des instruments, des inventaires d’un monde en expansion. Or, la connaissance qu’on en a aujourd’hui est presque totalement inexistante, tant l’histoire des sciences a été soumise aux exigences d’une discipline historienne enfermée dans des logiques nationalistes, ou hagiographiques (qui ont privilégié les hauts lieux ou les grands hommes de la science).
Le moment est venu de (re)prendre le dossier de la culture scientifique européenne de l’époque moderne, sous l’angle de Rome du fait du renouveau historiographique actuellement en cours tant dans le champ de l’histoire des sciences, que sur le terrain des études romaines : l’abondance des sources disponibles, l’importance des infrastructures intellectuelles concentrées dans la capitale pontificale, les spécificités de la société romaine apparaissent comme autant d’indices d’une « culture scientifique » rien moins que marginale. Le programme proposé dans le cadre de l’ACI vise à en déterminer les principales caractéristiques, à partir d’un questionnaire serré et transdisciplinaire des sources manuscrites et imprimées.
On ne peut qu’insister ici sur le caractère pionnier de la démarche dans le contexte international actuel : les travaux d’histoire des sciences sur l’époque moderne ont été profondément renouvelés, dans les vingt dernières années, grâce notamment à l’apport de l’école anglaise de sociologie des sciences et à ses successeurs américains. Les travaux ont principalement porté sur l’Europe du nord-ouest, et plus spécifiquement sur les espaces qui paraissaient porteurs de la « modernité » scientifique (Londres et Paris). Si, dans le sillage de ce renouveau, on a pu voir se mettre en place de nouveaux questionnaires (sur les institutions du savoir, sur les procédures de certification et d’administration de la preuve, sur les acteurs de la « République des sciences », etc.), dont certains ont pu être appliqués à des villes italiennes comme Bologne ou Milan, il n’en demeure pas moins que non seulement Rome est restée à l’écart de ce regain historiographique, mais qu’en outre, aucune entreprise collective ne s’est saisie de ces nouveaux questionnements. Il est désormais nécessaire d’interroger Rome, ne serait-ce que parce qu’elle fut capitale pluriséculaire de la seule science qui fût, avant la « révolution scientifique », digne de ce nom : la théologie49.
25Le choix de Rome prenait donc tout son sens dans le contexte historiographique dont héritait le programme : on pourrait résumer celui-ci en prenant appui sur la revue qui s’est fait l’étendard du renouveau historiographique en cours, Roma moderna e contemporanea50, ou sur le texte de synthèse qui ouvrait la partie consacrée à Rome dans le volume Florence, Rome, Naples51.
26Il est donc inutile d’y revenir plus longuement, sauf pour rappeler qu’à l’instar d’une longue tradition d’étude, l’image d’une absence de vie culturelle, ou pour le moins d’une vie culturelle obsolète ou décadente selon les cas, dans la Rome de l’époque moderne est tenace : comme si la ville avait jeté ses derniers feux à l’âge de l’humanisme, offrant à Montaigne le privilège d’une ultime brillante description52, et qu’avec l’avènement de nouvelles tendances culturelles, elle devait rester figée dans les pas d’une Antiquité qui la muséifiait et par là même l’empêchait d’aller de l’avant. La recherche sur Rome a assurément pâti du poids littéraire d’un tel topos érigé presque en vérité historique53. Quant au poids du topos artistique et visuel, il suffit de penser aux vues de Rome qui, avant comme après le védutisme, remplissent les musées du monde entier, pour s’en convaincre, de Poussin à Corot pour rester dans le domaine français54. La possible existence d’une Rome savante était donc quasiment impensable. De fait, l’article de W. E. Knowles Middleton, écrit voici plus de trente ans, pouvait servir de conclusion à une entreprise qui n’avait pas lieu d’être :
At no time in the seventeenth century was Rome a center of scientific progress. The Church offered the only employment to men of talent in the city, apart from the medical profession or the artists, and even the artists lived almost entirely on the patronage of Popes and Cardinals. Whatever interests in science these dignitaries displayed was likely to be no more than idle curiosity, and we have few records even of this sort of activity55.
27C’est sans doute par le biais des nouvelles approches sur l’état pontifical que l’histoire culturelle de Rome a pu se frayer un nouveau chemin, dès lors que ces nouvelles approches, après avoir abordé la question de la modernité de ses structures et de ses réformes, dans le sillage de l’entreprise au long cours de Paolo Prodi, ou celle de la confessionalisation, selon des axes de recherche constitués autour de l’historiographie allemande, a pu à la fois passer d’une histoire institutionnelle à une histoire sociale des institutions romaines, et d’une histoire doctrinale du disciplinement post-tridentin à une histoire culturelle des pratiques mises en œuvre dans ce cadre56. À mesure que se sont multipliées les études à caractère biographique ou prosopographique, les spécificités mêmes de l’état pontifical apparaissaient avec plus de netteté et de nuances : les caractères contradictoires de la Réforme catholique laissaient le champ libre à des analyses centrées sur la diversité des politiques culturelles. Dès lors, comme pour les autres états de l’Italie, l’approche de Rome en termes de « politique de la science » trouvait sa raison d’être57. C’est dans cette perspective que la recherche consacrée par M. P. Donato au pontificat de Benoît XIV établissait des ponts entre des historiographies jusque là plutôt éloignées : l’histoire sociale des pratiques culturelles, l’histoire des Lumières, l’histoire de la Rome pontificale58.
28À mesure que s’esquissait toute la richesse des configurations politiques, sociales et culturelles offertes par Rome, la question des délimitations spatiales de l’étude s’imposait. Le statut spécifique de la ville, à la fois cité, capitale des états pontificaux, siège de la communauté catholique est assurément facteur d’explication de la richesse de l’activité intellectuelle qui s’y déroule et des modalités propres de son évolution. Les acquis historiographiques qu’on vient d’indiquer en faisaient un objet pertinent dans le cadre d’un autre type d’agenda intellectuel, en cours de définition sur les espaces urbains et la science59, mais aussi dans celui qui concerne le local, la localisation, la production située60.
29Ainsi, les hommes étudiés dans le cadre du programme sont rarement des Romains. Beaucoup d’entre eux vivent dans l’Urbs pendant de nombreuses années, selon des logiques de mobilité et d’insertion dans telle clientèle aristocratique ou cardinalice, et ils appartiennent à des réseaux scientifiques localisés à Rome et/ou ailleurs, dans d’autres villes italiennes (Venise, Florence ou Naples, qui sont en outre des pôles scientifiques actifs de la péninsule à l’époque moderne), ou européennes (dans le sillage d’ambassades en particulier). C’est le cas des médecins, ou du clergé régulier, dont la mobilité répond à des logiques propres aux ordres religieux, et en particulier l’adhésion au vœu d’obéissance61. Aussi s’il convient de penser Rome intra muros, il apparaît qu’à bien des égards, en tant que capitale des états pontificaux, elle fonctionne comme partie intégrante du binôme Rome-Bologne, notamment sous l’effet de la politique de Benoît XIV, qui vise clairement à mettre en place, à l’échelle de l’espace dont il assure la gestion temporelle, deux pôles savants actifs et spécialisés dans des domaines distincts62. De même, en tant que centre de la catholicité, Rome doit être saisie dans une perspective d’histoire globale, dès lors qu’on cherche à analyser sa prétention à l’universalisme. Ainsi, le choix explicite d’une perspective non comparative ne signifie pas le repli de l’analyse sur un horizon local : le comparatisme a tout son sens à l’échelle de la péninsule italienne où, tout au long du xviie siècle, s’établit un rapport de concurrence politique et culturel avec Florence, comme l’instrumentalisation de Galilée par la Toscane en témoigne, non seulement du vivant de Galilée, mais aussi et sans doute davantage dans l’entreprise de captation de l’héritage galiléen autour de l’Accademia del Cimento63. À l’échelle européenne, ce sont les capitales des grandes puissances, principalement catholiques, Madrid, Vienne, Paris, qui entrent dans cet horizon comparatif64. Avec ces grandes capitales et les puissances séculières de l’époque, la perspective dépasse l’horizon européen, là où projet de conversion universelle et programmes impérialistes se superposent65. L’enquête dans son ensemble, comme ce volume, n’a pas restreint son horizon à la seule ville de Rome, mais a cherché à tirer parti de la richesse de ce terrain en termes de sources disponibles et d’infrastructures intellectuelles66, d’autant plus que peu de travaux de synthèse sont encore disponibles sur ces infrastructures.
30En revanche le caractère pluridimensionnel de l’objet Rome, où se combinent donc trois échelles d’analyse, locale, « italienne », globale (traduction spatiale du concept d’universalisme tel qu’il est mobilisé dans le discours pontifical ou dans celui des ordres religieux par exemple), constitue l’une des principales clés de lecture que l’on soumet ici à la discussion. On notera en particulier que la prise en compte systématique de ces différentes échelles permet d’éclairer en retour la sociologie de la configuration scientifique romaine : ses agents peuvent en effet faire l’objet d’une approche différenciée en fonction des différentes échelles avec lesquelles ils interagissent, depuis l’artisan fabricant d’instruments, engagé au plan local, voire du quartier, ou l’imprimeur mobilisé aussi à l’échelle régionale et éventuellement péninsulaire, jusqu’au savant impliqué conjointement aux trois niveaux.
31À l’emboîtement des échelles, s’ajoute, pour Rome, celui des chronologies : c’est à dessein que le titre du volume ne reprend pas les expressions qui marquaient la périodisation dans le titre du projet initial, en particulier, celle de « contre-réforme », mais qu’en revanche il réintroduit, en contrepoint à l’organisation même du volume – la remarque vaudrait pour l’ensemble des rencontres organisées –, des catégories historiographiques aussi contraignantes que celles de « Renaissance » ou « Lumières ». On partira d’une première remarque empirique : le programme s’est délibérément installé dans ce que, en traduisant littéralement les catégories temporelles anglophones, on pourrait appeler la première modernité(early modern period) ; ce choix cherchait principalement à inscrire l’analyse dans une perspective processuelle pour mieux se dégager des différents types de contraintes dont les bornages chronologiques, synonymes de catégories historiographiques, sont porteurs67. Ainsi à inscrire le projet sous l’étendard de la « contre-réforme » ou de la « réforme catholique » on rabattait a priori les enjeux majeurs de la problématique sur les politiques de l’état pontifical, entendues elles aussi a priori dans un sens conservateur ou libéral68. On sait d’autre part combien le concept de « Renaissance », construit par opposition à une vision négative, voire obscurantiste du Moyen Âge, est peu stabilisé chronologiquement selon qu’on l’applique à l’art, à la politique ou à la science69. Quant aux « Lumières », elles ont fait, dans ces dernières années, les frais d’une telle révision qu’elles incluent même des tendances conservatrices dont on ne parvient plus à voir ce qu’elles partagent avec les paradigmes kantiens ou de l’Encyclopédie70. En outre, ces différentes catégories, favorisant des approches plus partielles, polarisées sur des moments plus brefs, se sont affirmées comme autant de formes de spécialisation historiographique, qui s’excluaient mutuellement.
32Autant d’éléments qui ont milité en faveur d’une approche au plus long cours, qui irait au-delà des spécialisations et qui a permis d’identifier, on y reviendra, des débats et des lignes de fracture qu’on peut suivre sans discontinuer entre le milieu du xvie siècle et la fin du xviiie siècle : on pense ici au débat sur la composition de la matière, ou à la persistance de la posture philologique dans l’organisation du travail savant.
33Ce qui implique, en particulier en fonction du contexte romain, de se départir d’une définition trop limitative du mot « science » : le programme a cherché à être particulièrement attentif à une saisie des pratiques, plutôt qu’à une vérification des données telles qu’elles ressortent des tableaux proposés dans les histoires de la science européenne à l’époque moderne. Mais c’est à l’appui d’une clarification sur les significations historiques du mot « science » : le travail effectué par L. Giard dans le texte qui suit, va dans ce sens et, s’il se situe sur le seuil du volume, ce n’est pas pour éviter de porter l’ambiguïté du mot dans le corps du texte mais, au contraire, pour signaler la pleine conscience qu’on en a dès lors qu’on choisit de l’utiliser. Et si la quête du sens s’arrête sur le seuil de la première modernité, c’est moins pour indiquer un renoncement qu’une polysémie, une démultiplication des sens et des usages que seule une histoire rétrospective des sciences a pu effacer de ses narrations, par une association simplifiée de science et progrès.
Rome savante, mode d’emploi
34Le volume, pour être hybride, n’en a pas moins ses cohérences, soulignées par la division en cinq parties intitulées : « Circulations », « Des mots et des images : l’édition scientifique », « L’empreinte de l’antique », « Dans et hors les institutions : pratiques romaines de la science », « Orthodoxies et débats intellectuels ».
35Les deux premières parties du volume portent sur Rome comme espace de la mise en circulation des savoirs, directement dans la première, autour de l’objet livre dans la seconde. Toutes deux mettent en question le caractère pluridimensionnel de la ville et mobilisent les différentes échelles d’analyse dont Rome peut être l’objet. Elles déclinent la construction de Rome comme centre de ressources documentaires en premier lieu, comme centre éditorial en second lieu. Au-delà du cas d’étude choisi par L. Giard et A. Romano, en l’occurrence les lettres du mathématicien jésuite Clavius, dans le dernier quart du xvie siècle, c’est le rôle des correspondances71 qui est souligné ici, dans une double perspective. Il s’agit d’abord, dans le cadre général de l’écriture de l’histoire des sciences à l’époque moderne, de leur fonction nouvelle dans le processus non seulement de constitution de la communauté savante à partir de l’idéal humaniste de l’échange, mais aussi comme espace de production des savoirs – les lettres sont le lieu de résolution de certaines questions mathématiques ou de confrontation d’observations des phénomènes naturels ou physiques72. Il s’y ajoute un rôle particulier dans le contexte romain, marqué par les fonctions de commandement de la ville sur des espaces périphériques étendus jusqu’aux confins de la catholicité. À cet égard, les ordres religieux, et tout particulièrement les jésuites ont construit Rome comme centre de ressources, dans le cadre de stratégies institutionnelles – on pense ici à la mise en imprimé des lettres de la mission qui a permis à la Compagnie de travailler à son image d’ordre missionnaire triomphant – ou individuelles, comme le cas de Kircher, presque un siècle après Clavius, en fera la démonstration spectaculaire – on pense ici à l’usage qu’il fait du réseau missionnaire pour ses propres travaux sur la Chine et sur les sciences antiquaires, naturalistes ou mathématiques73.
36Mais si les correspondances – et ici on pourrait renvoyer à la densité des échanges épistolaires dans la Rome des astronomes décrite par A. Del Prete dans un autre texte publié dans ce volume –, font identifier Rome comme un nœud de communication74, cela ne constitue qu’un aspect de son identification à une ville-monde75. Le texte de Giovanni Pizzorusso, Tra cultura e missione : la congregazione de Propaganda Fide e le scuole di lingua araba nel xvii secolo, constitue le dernier volet d’une enquête au long cours sur la vocation universaliste de la politique mise en œuvre par Propaganda Fide, la nouvelle congrégation créée en 1624 pour servir la volonté pontificale de reprendre en main la politique missionnaire76. Un des effets les plus importants de cette reprise en main politique réside dans la transformation de Rome en capitale, unique tout au long de la première époque moderne, qui agit à la fois comme centre de formation international (et la dimension linguistique de cette formation n’en est que la plus spectaculaire), et comme centre d’accumulation des « savoirs missionnaires ». Le complexe culturel constitué par le collège de Propaganda Fide et l’imprimerie polyglotte inscrit définitivement Rome au cœur d’une histoire globale77.
37Un troisième élément de ce dispositif institutionnel et intellectuel est constitué par la circulation des hommes78, dont le voyage savant représente une des figures paradigmatiques : le cas présenté par Gilles Montègre, Un pas vers la mesure du monde. Le voyage scientifique français à Rome et la quête de l’antique dans la seconde moitie du xviiie siècle, est d’autant plus intéressant qu’il invite à reprendre à nouveaux frais le dossier d’une Rome visitée, à l’époque des Lumières, par les seuls artistes nostalgiques et les antiquaires79. Il indique l’inscription de Rome dans le jeu de l’échange intellectuel européen, à travers la circulation des savants de toutes origines : le long séjour romain de l’orientaliste suédois J. Akerblad offrirait un complément intéressant à celui de La Condamine évoqué par G. Montègre, en particulier pour le spectre d’activités scientifiques dont Rome peut être le centre80. D’une manière plus générale il fait écho à un axe de recherche substantiel susceptible de clarifier le cosmopolitisme de la culture scientifique romaine, comme l’une des tables rondes organisées dans le cadre du programme en avait posé les premiers jalons81.
38La deuxième partie du volume parcourt les mêmes thèmes, mais d’un autre point de vue, en mobilisant aussi une autre historiographie et d’autres types de méthodes : elle interroge Rome comme centre de ressources en prenant littéralement la mesure de l’activité éditoriale romaine dans le domaine scientifique. Les textes présentés dans le volume constituent le complément, voire parfois le commentaire d’un travail empirique réalisé dans le cadre du programme sur l’initiative de Laurent Pinon : la constitution d’une base de données accessible en ligne et recensant tous les ouvrages scientifiques produits à Rome, entre 1527 et 165082. La présentation de ces textes, La culture scientifique à Rome au miroir des livres (1527-1650). Apports et limites de l’approche bibliographique, est suivie de deux études qui, chacune à sa manière, mettent à contribution les données disponibles grâce à la base83. Dans Dedicare libri di medicina. Medici e potenti nella Roma del xvi secolo, Elisa Andretta s’appuie sur les dédicaces des livres de médecine pour étudier les logiques du patronage romain en rapport avec le milieu médical universitaire : les dédicaces sont alors utilisées comme le miroir des stratégies individuelles non seulement en termes de carrières, mais aussi en fonction d’une organisation politique propre à l’état pontifical et aux enjeux spécifiques des questions de santé qu s’y posent, ce qui justifie des formes d’éclectisme épistémologique84. On voit ici comment l’étude des contenus scientifiques s’articule sur une réflexion où le caractère attractif de Rome est mis en évidence en fonction de la perception de la ville comme centre de ressource y compris pour les médecins85. Quant à l’étude de Sabina Brevaglieri, Editoria e cultura a Roma nei primi tre decenni del Seicento : lo spazio della scienza, elle met en évidence, pour les premières décennies du xviie siècle, les vives tensions entre l’investissement pontifical massif dans le domaine de l’édition – dans une perspective d’enracinement romain de la reconquête catholique – et la nécessité de son contrôle en fonction de l’impulsion contre-réformiste qui caractérise sa politique. Il s’agit, à travers cette enquête toute en nuances de substituer à une image traditionnelle d’opposition frontale entre des groupes antagonistes, celle des « relations asymétriques » qui se nouent entre culture, pouvoir et instances de contrôle.
39Les trois parties suivantes interrogent les acteurs, leurs pratiques et leurs productions. On a d’abord cherché, avec l’ensemble « Dans et hors les institutions : pratiques romaines de la science », à étudier les lieux de savoirs et les groupes professionnels qui, selon les disciplines et les périodes considérées, présentent des formes diverses d’organisation et d’institutionnalisation. Ici encore, nulle prétention à l’exhaustivité, ni même à la représentativité. L’hôpital, l’académie et l’université sont au nombre de ces lieux romains du savoir au même titre que les bibliothèques, les jardins botaniques, les observatoires86. Mais les différentes contributions donnent à voir le caractère polymorphe de la participation des différents milieux professionnels romains aux débats qui définissent et animent la communauté savante prise dans un horizon européen.
40On a en outre privilégié l’enquête sur les milieux les moins connus et travaillés : Maria Conforti et Silvia De Renzi se sont concentrées sur l’anatomie, non pas telle qu’elle s’enseigne à l’université87, mais telle qu’elle est pratiquée dans les hôpitaux. Leur contribution Sapere anatomico negli ospedali romani : formazione dei chirurghi e pratiche sperimentali (1620-1720) suit sur un siècle l’évolution de cette pratique anatomique hospitalière à travers deux textes issus du milieu hospitalier, une table anatomique publiée en 1617 dans le milieu de Santo Spirito et l’œuvre de Pacchioni, qui rendait compte de ses recherches à l’hôpital Santa Maria della Consolazione. À sa manière, chacun de ces deux textes témoigne de l’importance des hôpitaux non seulement comme lieux d’application, mais comme véritables espaces d’expérimentation où s’élaborent de nouveaux savoirs, où s’engendrent de nouvelles formes de légitimation des professions médicales. Le déplacement de perspective ouvre la voie à une étude renouvelée des professions médicales et de leurs rapports avec la société urbaine.
41L’enseignement des sciences physico-mathématiques à la Sapienza n’avait pas encore été reconsidéré – selon une vieille tradition d’histoire de l’université peu encline à s’interroger sur les disciplines scientifiques pour l’époque moderne, et dans la lignée d’une historiographie plus récente qui a cherché les hérauts de l’innovation scientifique en dehors des institutions soumises à la tradition scolastique88. La contribution de Federica Favino, Università e scienza. La « grande riforma » della Sapienza di Benedetto XIV, constitue le second volet d’une enquête dont le premier a été publié à l’issue d’une des précédentes journées d’étude89 et elle met non seulement en lumière les oscillations des programmes scientifiques de réforme en fonction des pontificats et de leurs propres ambitions en matière de politique de la science, mais aussi la variété des positions dogmatiques et épistémologiques face à la science moderne, en fonction des obédiences religieuses. C’est l’appartenance des uns et des autres à des congrégations religieuses aux références théologiques distinctes qui ouvre l’espace du conflit, mais aussi de la négociation. En ce sens, ce travail complète le dossier ouvert avec la collaboration de Pascal Dubourg Glatigny sur les Minimes de la Trinité des Monts et dont les résultats ont fait l’objet d’une publication distincte. On veut souligner ici le choix délibéré de ne pas travailler l’espace jésuite, en partie pour répondre au déséquilibre historiographique décrit dans la deuxième partie de cette introduction90. On ne considère pas le Collège Romain comme le paradigme de la culture scientifique romaine de la première modernité, ni la Compagnie de Jésus comme le seul agent de formation scientifique. À l’inverse on mesure la présence des savants jésuites dans les débats astronomiques auxquels Huygens se trouve mêlé grâce à la contribution de Antonella Del Prete sur Gli astronomi romani e i loro strumenti : Christiaan Huygens di fronte agli estimatori e detrattori romani delle osservazioni di Saturno (1655-1665), comme on les rencontre dans presque tous les autres débats dont les différentes contributions rendent compte. De la même manière qu’il ne fait qu’évoquer les jésuites, ce chapitre fait référence en passant aux académies, comme le font aussi d’autres textes du volume. On a délibérément écarté du programme l’étude des académies, notamment parce qu’elles ont été au centre des recherches sur les milieux intellectuels italiens à l’époque moderne et des travaux de Maria Pia Donato dans les dix dernières années, sans compter que les Lincei ont fait l’objet de différentes publications récentes91.
42D’autres types de savoirs que ceux pris traditionnellement comme objet de l’histoire des sciences, se trouvent conjointement mobilisés à Rome : s’ils portent la trace de leur localité – on y reviendra – la question qu’ils soulèvent, plus fondamentale, est celle de leur capacité à engendrer des modèles épistémologiques non seulement spécifiques, mais surtout susceptibles de contaminer les autres champs du savoir. Les savoirs antiquaires marquent Rome, comme Rome marque les savoirs antiquaires92. On peut décliner ce rapport dialectique, cette « empreinte de l’antique » de différentes manières, et les contributions de cette partie en proposent différents éclairages, sans chercher ni à proposer une interprétation homogène de ce rapport, ni à en faire l’unique clé de lecture de la « science romaine »93. La référence fondamentale aux travaux de A. Momigliano94 indique combien l’identification de ce thème n’est pas propre à notre groupe de recherche. Mais, comme le rappelle A. Car-lino dans Nel solco di Roma tra filologia e autopsia : note su scienza e antiquaria nel Cinquecento, cette référence suggère un premier déplacement de la recherche en termes d’objets interrogés : car elle concerne moins les sciences physico-mathématiques, généralement au cœur des travaux de l’histoire des sciences, que la médecine, l’histoire naturelle et les sciences de la nature, dont les liens avec la science antiquaire reposent sur le partage de protocoles d’analyse dont les racines sont à situer dans la philologie humaniste. On passe ainsi, second déplacement, d’une éthique commune de la recherche telle que Momigliano l’avait identifiée comme un héritage commun aux antiquaires et aux historiens, à une épistémologie commune, qui s’appuie aussi sur l’évidence de l’analyse sociale : ce sont les mêmes hommes qui s’occupent de ces objets distincts. C’est pourquoi la contribution de I. Baldriga sur les Lincei trouve tout son intérêt dans cette section, en mettant en lumière les racines de cette culture philologique et humaniste au cœur de l’institution la plus traditionnellement considérée comme l’un des bastions romains de la science moderne, avant le retournement de conjoncture des années 1630. Lo sgomento della morte di Plinio : la ricerca dei primi lincei tra Roma ed Europa interroge, dans un horizon européen, les fondements philosophiques du programme scientifique élaboré dans la première période des Lincei, avec, en particulier, les recherches botaniques, le collectionnisme qui s’y pratique et la culture visuelle qui y est mobilisée. Dans la lignée des suggestions de A. Carlino, la collection et l’image sont les deux points forts de la culture scientifique propre à ce milieu. L’œuvre de Jacopa Strada, étudiée par L. Dolza s’inscrit dans le même filon philologique : « Historia che tace e dimostra il vero ». Monete, disegni e macchine « autour » di Roma retrace les contours d’une culture technique, artistique et philosophique en relation avec la numismatique. Ici les liens, en termes de milieux sociaux et de sociabilités savantes, sont confirmés, de même que l’importance du collectionnisme et de la curiosité, la haute valeur méthodologique de l’image et de la représentation. Ace propos, c’est l’hypothèse même de la centralité de l’image pour la culture scientifique romaine que Jean-Marc Besse et Pascal Dubourg Glatigny ont voulu tester tout au long du programme de recherche. Cartographier Rome au xvie siècle (1544-1599) : décrire et reconstruire cherche à travailler sur les représentations de Rome, au double sens que l’on peut attribuer à ce terme : son sens technique et instrumental (de quels outils et concepts dis-pose-t-on au xvie siècle pour cartographier en particulier l’espace urbain95 ?), son sens allégorique (quelle idée de la ville de Rome veut-on donner ?). En combinant l’analyse de ces deux niveaux, ils ont cherché à montrer comment la représentation symbolique de la centralité romaine s’appuie sur un rapport à l’antique, non seulement lié à la topographie de Rome, mais aussi à la culture antiquaire commune aux milieux romains de l’imprimerie et de l’illustration96. Il est certain que la quatrième partie de ce volume, presque totalement centrée sur le xvie siècle, pourrait laisser entendre que le paradigme de l’antique va en se diluant au fur et à mesure que d’autres paradigmes, en particulier celui de la science expérimentale, prennent le dessus dans le monde romain. En guise de réponse sommaire on pourra d’abord rappeler les travaux présentés lors de la journée d’étude de juin 2004, qui faisait place à des présentations sur les xviie et xviiie siècles ; on pourrait en outre convoquer une littérature de plus en plus abondante sur le thème « science antiquaire, science moderne ». Pour Rome, et dans le cadre de ce volume, son importance est attestée dans la première et la seconde partie, notamment à propos de l’activité éditoriale. Assurément, les pistes ouvertes doivent être approfondies, l’une d’entre elles, s’agissant de Rome, pourrait concerner les « antiquités chrétiennes »97. Il importe en effet de souligner que, contrairement à d’autres cités antiques, Rome qui s’offre comme reliquaire de l’antiquité païenne, celle-là même qui a tant fasciné les humanistes, devient aussi, avec le développement de l’érudition sacrée, un nouvel espace d’investigation pour les savants, le plus souvent membres d’ordres religieux, occupés d’antiquité chrétienne : les catacombes sont alors soumises au même régime d’analyse que les temples païens et là encore, entre xviie et xviiie siècles, ce sont les mêmes savants qui travaillent sur ces deux types d’objets98.
43Pour terminer, à Rome, la science antiquaire n’échappe pas plus que les autres sciences aux contraintes d’une pratique savante sous surveillance. Cette dimension de la vie scientifique romaine est abordée dans la dernière partie du volume, « Orthodoxies et débats intellectuels » : serait-ce pour la renvoyer aux marges de la réflexion, voire pour en minimiser le poids ? Qui voudra lire l’architecture du volume en ce sens pourra le faire sans doute aisément, comme on pourra plus largement lire notre programme de recherche tout entier comme une entreprise de type « révisionniste ». Est-il besoin, pour cette partie comme pour les autres, de rappeler la masse des travaux récemment produits ou en cours sur l’Inquisition romaine et la science moderne, sur le Saint Office et la censure, dans le sillage notamment de l’ouverture des archives de cette dernière institution à la fin des années 199099 ? Les travaux présentés dans cette dernière partie émanent de certains des principaux spécialistes de la censure. Dans son texte, L’héliocentrisme à Rome, à la fin du xviie siècle : une affaire d’étrangers ? Aspects structurels d’un espace intellectuel, Francesco Beretta apporte une nouvelle contribution sur l’un des dossiers les plus documentés dans l’histoire des rapports entre Inquisition et science moderne, celui de l’héliocentrisme100 : il y a fait le choix d’une histoire par le bas, au lieu des savants débats des théologiens et mathématiciens des grandes institutions du savoir, en considérant presque un cas de justice ordinaire, pour analyser les pratiques du disciplinement social et culturel au quotidien, rapportées à la figure du théologien consulteur, aux tensions qui parcourent institutions curiales et ordres religieux. Cela permet sans doute d’expliquer que mieux vaut être étranger pour [pouvoir] parler d’héliocentrisme à Rome encore à la fin du xviie siècle. Un autre cas de justice ordinaire pour les tribunaux du Saint Office, est celui de la sainteté, comme dès la fin du xvie siècle les procès de canonisation d’Ignace de Loyola et Filippo Neri l’ont indiqué101. La recherche de critères de sainteté, avec la mise en place de protocoles de certification, est étudiée par E. Brambilla, dans Manuali d’esorcismo, canoni di santità e nuova scienza (fine ’600 – primo ’700). Dans la lignée de travaux qui ont permis de considérablement renouveler cette question, le dossier présenté ici ajoute de nouveaux éléments : il s’agit en effet de relier la culture scientifique des cardinaux du Saint Office – traversée par les conceptions anti-aristotéliciennes de l’âme qui se développent dans la seconde moitié du xviie siècle à la suite de Descartes notamment – à la mise en œuvre d’un nouveau répertoire d’instruments et de preuves, qui affecte le jugement porté sur la sainteté d’un personnage. Ici, comme dans le texte de F. Beretta, c’est la question de la culture des acteurs, plus que celle du Tribunal comme institution, qui permet de renouveler l’approche de la censure romaine et de mieux en situer les contradictions. Celles-ci sont au cœur du dernier texte de ce volume, la puissante et ambitieuse relecture de la question atomiste saisie dans un long xviie siècle, par Maria Pia Donato, dans une entreprise qui combine histoire intellectuelle, sociale et institutionnelle. Le point d’observation choisi, comme dans les deux autres cas, est constitué par les congrégations romaines et l’objet retenu est l’atomisme. Autant dire que Atomi in Sant’Uffizio. La questione atomista nelle congregazioni romane e la cultura scientifica a Roma 1626-1727 entend reprendre à nouveaux frais, et sur des bases fortement documentées, le débat ouvert par le livre de P. Redondi, déjà cité. Ce n’est pas un des moindres intérêts de ce travail que d’offrir une vue en coupe de ce qui se présente désormais comme l’une des lignes de fracture parmi les plus fortes au sein de la culture scientifique romaine, celle qui porte sur la structure de la matière102.
44La présentation du volume aura été longue car elle a cherché non seulement à rendre compte de la richesse de chaque contribution, mais aussi à restituer la cohérence – et les limites – d’une réflexion élaborée au cours de cinq années de discussions, sans que le groupe de recherche n’ait jamais souhaité s’approprier un objet qui apparaît au cœur de bien des travaux, comme la bibliographie qui court au bas de ces pages, et celle qui clôt le volume, en témoignent. Il s’est encore moins agi de proposer une lecture harmonieuse et linéaire de nos travaux, mais bien d’ouvrir des pistes, d’établir des convergences, de susciter d’autres recherches et d’inviter à de nouveaux débats.
Remerciements
45Ils émanent de l’équipe qui a été l’animatrice de ce programme à mes côtés. De la dimension collective de ce projet, la responsable financière du Centre Alexandre Koyré, Madeleine Dietrich, et la secrétaire de la section d’histoire moderne et contemporaine de l’École française de Rome, Catherine Garbin, ont eu la responsabilité pendant plus de quatre ans et c’est à leurs soins et à leur compétence, ainsi qu’à leur indulgence éclairée, que ce projet doit largement sa réussite. Qu’elles soient considérées ici comme partenaires à part entière de l’équipe et qu’elles reçoivent l’expression de nos remerciements et de notre affection. Avec discrétion et énergie, elles ont assuré l’organisation des séances de travail qui ont pu prendre des formes scientifiques variées (colloques ou tables rondes), ainsi que des missions qui ont permis à un groupe de treize personnes non seulement de travailler ensemble, mais aussi d’effectuer des séjours de travail dans différents lieux d’archives ou des bibliothèques entre Rome, Paris et Londres principalement.
46Les institutions qui ont contribué à l’existence de cette entreprise ont déjà été nommées : le MESRT, l’École française de Rome, avec ses deux directeurs A. Vauchez et M. Gras, et les deux directrices des études, C. Brice et B. Marin, qui ont suscité ce programme, pour la première, accueilli, soutenu et discuté ses différentes phases, pour la seconde, le Centre Alexandre Koyré (CNRS-MNHN-EHESS), le Centro italiano di cultura de Paris, quand son directeur était Pietro Corsi, le Warburg Institute et tout particulièrement C. Hope et J. Kraye, l’Institut universitaire européen.
47Une reconnaissance particulière va aux collègues qui, outre les contributeurs à ce volume, ont accepté de discuter avec nous : Renata Ago, Davide Armando, Domenico Bertoloni Meli, Didier Bessot, Martine Boiteux, Marie-Noëlle Bourguet, Paolo Broggio, Massimo Bucciantini, Marina Caffiero, Cristina Càndito, Harold Cook, Elisabetta Corsi, Pietro Corsi, Lucia Dacome, Maarten Delbeke, Ivano Del Prete, Simon Ditchfield, Germana Ernst, Paula Findlen, Irene Fosi, Elisabeth Garms, David Gentilcore, Hiro Hirai, Charles Hope, Robert Iliffe, Pascal Julien, Jill Kraye, Pamela Long, Marianne Le Blanc, Emmanuel Lurin, Brigitte Marin, Silvia Marinozzi, Daniel Nordman, Katherine Park, Renato Pasta, François de Polignac, Gianna Pomata, Daniel Roche, Giovanni Salmeri, Catherine G. Santing, Simon Schaffer, Nancy Siraisi, Daniel Stolzenberg, Maurizio Torrini, Carlo Travaglini, Francesco Trevisani, Ginette Vagenheim, Klaas Van Berkel, Stéphane Van Damme, Laurent-Henri Vignaud, Jonathan Woolfson.
48Merci enfin à Valentina Sebastiani, doctorante à l’IUE, qui, à mes côtés, a pris en charge la mise en forme du manuscrit et le contrôle de la bibliographie et à Sabina Brevaglieri qui s’est occupée de l’élaboration de l’index des noms.
Notes de bas de page
1 Colloque financé par l’École française de Rome, le Département d’histoire et civilisation (Institut universitaire européen), Florence, le Centre Alexandre Koyré (CNRS-MNHN-EHESS), Paris, avec la collaboration du CROMA (Università degli studi di Roma Tre). Les contributions ont été remises entre juin 2006 et juillet 2007.
2 Ce programme s’est ouvert par une première rencontre, qui s’est tenue les 18 et 19 décembre 2000 à l’École française de Rome et s’intitulait Premières réflexions sur les lieux romains de la science.
3 Les autres rencontres se sont tenues selon le calendrier suivant : Premières réflexions sur les hommes de science à Rome (xvie-xviiie siècles), 6-7 avril 2001, Rome, École française de Rome ; La culture scientifique romaine à l’époque moderne, 7-8 décembre 2001, Paris, Institut culturel Italien ; Savants étrangers et cosmopolitisme de la culture scientifique romaine, 9-10 juin 2003, Rome, École française de Rome ; Scientific culture in early modern Rome, 10-11 octobre 2003, Londres, Warburg Institute ; Science et antiquaria : acteurs, paradigmes, reconfigurations disciplinaires, 11-12 juin 2004, Rome, École française de Rome.
4 Les membres du groupe ont indifféremment fait le choix de recherches individuelles ou collectives, mais toutes ont été discutées dans le cadre de présentations et de discussions antérieures. Les contributions des membres externes au groupe sont celles de I. Baldriga, E. Andretta, S. Brevaglieri, E. Brambilla, A. Del Prete, F. Beretta, G. Montègre. Parmi les autres collègues présents à la rencontre de Rome, on remerciera G. Pomata, R. Ago, E. Lurin, pour leurs belles contributions qui n’ont pas pu donner lieu à un texte écrit, R. Pasta, M. Caffiero, B. Marin, G. Ernst, C. Travaglini, pour leurs présidences, M. Bucciantini, E. Corsi, P. Corsi, S. Van Damme, pour leurs remarques conclusives.
5 J. Boutier, B. Marin et A. Romano (dir.), Naples, Rome, Florence : une histoire comparée des milieux intellectuels italiens (xviie-xviiie siècle), Rome (Collection de l’École française de Rome, 355), 2005. Sur ce projet lui-même voir, l’introduction, p. 1-31.
6 On pensera ici à certains volumes de collection de l’École française de Rome, comme par exemple M. A. Visceglia et C. Brice (dir.), Cérémonial et rituel à Rome (xvie-xixe siècles), Rome, 1997 (Collection de l’École française de Rome, 231), ainsi qu’à certaines livraisons des MEFRIM, t. 108, 2, 1996, le dossier Des Académies aux Instituts (1796-1799), p. 627-798, avec notamment D. Roche, Académismes et Académies : le modèle français au xviiie siècle, p. 643-658 ; Id., Trois académies parisiennes et leur rôle dans les relations culturelles et sociales au xviiie siècle, dans MEFRIM, t. 111, 1, 1999, p. 395-414.
7 J. Roger, Pour une histoire historienne des sciences, dans Id., Pour une histoire des sciences à part entière, Paris, 1995, p. 43-74.
8 On notera que certains des partenaires de ce colloque ont ensuite été mobilisés dans le programme « Rome et la science ». On remarquera en outre que le parti pris disciplinaire oscillait entre histoire des sciences et histoire intellectuelle, comme le suggèrent les analyses de L. Giard, « S’il faut conclure ou comment l’histoire intellectuelle de la Renaissance est encore à écrire », dans Sciences et religions de Copernic à Galilée (1560-1610), Rome, 1999 (Collection de l’École française de Rome, 260), p. 491-522, à lire en parallèle avec l’avant-propos, par C. Brice et A. Romano, p. 1-4.
9 Voir La culture scientifique à Rome à la Renaissance, dans MEFRIM, 114, 2, 2002, p. 467-605, avec les contributions de A. Romano, A. Carlino, L. Dolza, P. Dubourg Glatigny, L. Pinon ; Les lieux de la République romaine des sciences, dans MEFRIM, 116, 2, 2004, p. 397-498, avec les contributions de A. Romano, J.-M. Besse, F. Favino et G. Pizzorusso ; La Trinité-des-Monts dans la République romaine des sciences et des arts, dans MEFRIM, 117, 1, 2005, p. 7-218, avec les contributions de A. Romano, P. Dubourg Glatigny, F. Favino, D. Bessot, P. Julien, C. Càndito, M. Le Blanc, L.-H. Vignaud.
10 Outre les deux volumes de la BEFAR, A. Romano, La contre-réforme mathématique. Constitution et diffusion d’une culture mathématique jésuite à la Renaissance (1540-1640), Rome, 1999 (BEFAR, 306), et M. Nicoud, Les régimes de santé au Moyen Âge, Rome, 2007 (BEFAR, 333), on insistera sur le recrutement de nouveaux membres, notamment en histoire médiévale, travaillant sur des questions d’histoire des sciences et de la médecine, comme J. Chandelier, promotion 2005-2008.
11 Texte présenté en réponse à l’appel d’offre du Ministère : ACI Jeunes Chercheurs n° 67122, mai 2001, document non publié, rédigé par A. Romano.
12 M. de Certe au, L’écriture de l’histoire, Paris, 1975, p. 20 : « Est « scientifique », en histoire comme ailleurs, l’opération qui change le « milieu » – ou qui fait d’une organisation (sociale, littéraire, etc.) la condition et le lieu d’une transformation. Dans une société, elle bouge donc, en l’un de ses points stratégiques, l’articulation de la culture sur la nature. En histoire, elle instaure un « gouvernement de la nature » sur un mode qui concerne la relation du présent au passé – en tant que celui-ci n’est pas un « donné », mais un produit ».
13 Sur le monde romain comme laboratoire social, la synthèse consacrée à Rome, dans le volume comparatif avec Naples et Florence, fait le point : voir M. Caffiero, M. P. Donato et A. Romano, De la catholicité post-tridentine à la République romaine : splendeurs et misères des intellectuels courtisans, dans Naples, Rome, Florence... cit., p. 171-208. Publié en 2005, ce texte avait été présenté et discuté dans sa première et presque définitive version en décembre 1998, lors du colloque de clôture du programme du même nom. C’est pourquoi on se permet d’y renvoyer comme à une réflexion qui a nourri le programme sur Rome et la science moderne.
14 Chacun a pris la place qu’il a souhaité, s’investissant régulièrement ou moins jusqu’à donner plusieurs contributions dans les différentes publications mentionnées ci-dessus, ou publier ailleurs, ou ne pas contribuer à ce volume, prenant en charge des initiatives plus spécifiques dans le cadre du programme collectif, depuis le partage de la coordination de certaines des journées d’étude, jusqu’à la responsabilité d’un sous-programme ou d’une publication complémentaire. Ainsi le projet de mise en ligne de la base de données sur le livre scientifique romain a été coordonné par Laurent Pinon, avec l’aide de Maria Conforti, puis le soutien de deux collègues extérieures au groupe, Elisa Andretta et Sabina Brevaglieri. La publication parallèle et complémentaire à celui-ci, sous la direction de M. P. Donato et J. Kraye, d’un volume intitulé Conflicting Duties. Science, medicine and religion in Rome (1550-1750) dans les collections du Warburg Institue, constitue un autre important résultat de notre recherche collective.
15 A. Romano, ACI Jeunes Chercheurs n° 67122, s.p.
16 Outre les publications mentionnées ci-dessus, n. 9 et 14, on signalera le numéro thématique Roma e la scienza, secoli 16-19, de la revue Roma moderna e contemporanea, VII, 1999/3, p. 347-605, qui lançait ce programme. Je me permets de renvoyer, dans ce numéro, à A. Romano, Roma e la scienza. Figure, istituzioni, dibattiti, p. 347-368, ainsi qu’à Ead., Il mondo della scienza, dans Storia di Roma, vol. 4, Giorgio Cucci (dir.), Rome, 2002, p. 273-303.
17 Voir V. Ferrone et M. Firpo, Galileo tra inquisitori e micro-storici, dans Rivista storica italiana, vol. 97, 1985/1, p. 177-238, trad anglaise From Inquisitors to Microhistorians : A Critique of Pietro Redondi’s Galileo eretico, dans The Journal of Modern History, 58, 2, 1986, p. 485-524. Les faiblesses de l’argumentation de Redondi ont été soulignées par tous ses lecteurs, et par Firpo et Ferrone en premier lieu. Mais, dans ce long article, les auteurs allaient plus loin : ils mettaient non seulement en question la référence méthodologique à la micro-histoire – telle que les historiens regroupés autour des Quaderni storici cherchaient à la mettre en œuvre, en s’affrontant sur de nombreux points – mais aussi la thèse même du livre qui au total pouvait être lu, dans un contexte politique précis de volonté vaticane d’ouverture vers le monde laïc, comme une prise de position en faveur de l’Église romaine.
18 Florence, 1984.
19 Lui-même présent dans le volume avec un texte d’introduction, Il caso Galileo nella storia della cultura moderna, p. 5-14.
20 Volume 16, 3, 1981.
21 Atti della settimana di studio, 15-20 settembre 1980, Quaderno 9, 1981.
22 C’est dès le début du pontificat de Jean-Paul II, à l’occasion du 350e anniversaire du procès, en 1983, que se dessine un projet romain de « réhabilitation » de Galilée. Mgr Poupard, entré à la curie en 1981 et nommé, depuis cette date, à la tête de la commission chargée de réexaminer le procès de Galilée, au sein de l’Académie pontificale des Sciences, publie dès 1983 : Galileo Galilei, 350 ans d’histoire (1633-1983), ouvrage collectif sous la direction de Mgr Poupard, Tournai, 1983. Le discours prononcé par Jean-Paul II devant cette même académie, le 31 octobre 1992, peut en être considéré comme la conclusion. Il est accessible en ligne sur le site du Vatican : http://www.vatican.va/ .
23 Sur le milieu du Centre international de synthèse, on renverra au volume collectif A. Biard, D. Bourel et E. Brian (dir.), Henri Berr et la culture au xxe siècle : histoire, science et philosophie. Actes du colloque international, 24-26 octobre 1994, Paris, 1997, ainsi qu’au travail de E. Castelli Gattinara, Les inquiétudes de la raison : épistémologie et histoire en France dans l’entre-deux-guerres, Paris, 1998. Quant aux contributions, elles tournent autour de Jacques Roger : J. Roger, Histoire des mentalités : les questions d’un historien des sciences, dans Revue de synthèse, vol. 104, 1983, p. 269-276 ; Id., History of Science : Problems and Practices. History of Science(s), History of Mentalities, Micro-History, dans Nuncius, vol. 13, 1993/1, p. 3-26 ; Id., Pour une histoire des sciences à part entière... cit.
24 Le livre, Leviathan and the air-pump : Hobbes, Boyle and the experimental life, Princeton, 1985, est traduit en français en 1993. Voir entre autres le compte-rendu de R. Chartier dans le Monde des Livres, du 28 janvier 1994. Dans la foulée de ce travail pionnier, D. Pestre, Pour une histoire sociale et culturelle des sciences. Nouvelles définitions, nouveaux objets, nouvelles pratiques, dans Annales, HSS, vol. 50, 1995/3, p. 487-522, qui avait été précédé d’une publication au caractère plus confidentiel, L’étude sociale des sciences. Bilan des années 1970 et 1980 et conséquences pour le travail historique. Journée d’étude du 14 mai 1992. Textes réunis et présentés par D. Pestre, Centre de recherche en histoire des sciences et des techniques, Cité des sciences et de l’industrie, Paris, 1992, 94 p. Dans la mouvance, C. Licoppe, La formation de la pratique scientifique. Le discours de l’expérience en France et en Angleterre (1630-1820), Paris, 1996. Dans la continuité du débat organisé à l’EHESS, F. Hartog et R. Guesnerie (dir.), Des sciences et des techniques, un débat, Paris, 1998.
25 Sur les Annales, dans J. Revel, Un parcours critique. Douze exercices d’histoire sociale, Paris, 2006, voir outre la reproduction de Les paradigmes des « Annales », p. 28-55 (publié pour la première fois en 1979), la présentation du volume, p. 9-27.
26 On soulignera ici l’importance prise par la publication, dans les mêmes Annales, l’année où était publié l’article de D. Pestre, cité supra n. 24, de l’article de M. Biagioli, qui introduisait le prestigieux label du MIT dans le milieu et qui mettait à la disposition du public français une version simplifiée de son travail sur la société de cour et la science moderne : Le prince et les savants. La civilité scientifique au xviie siècle, dans Annales HSS, vol. 50, 1995/6, p. 1417-1453, reprenant l’un des thèmes développés dans Galileo, Courtier. The Practice of Science in the Culture of Absolutism, Chicago-Londres, 1993. Alors que dix ans auparavant, R. Chartier avait introduit la sociologie de N. Elias dans le panorama de l’histoire culturelle française – voir N. Elias, La société de cour, trad. française, Paris, 1985, avec une introduction de R. Chartier, qui avait quelques années auparavant mis en circulation la référence à Elias. Voir Id., « Norbert Elias interprète de l’histoire occidentale », Le débat, 5/1980, – c’est à M. Biagioli que revient d’avoir rendu la référence commune aux historiens des sciences, qui n’avaient pas été préoccupés jusque là de tels questionnaires et qui, parallèlement, n’avaient pas pris garde à ce que les travaux sur la sociabilité, qui avaient pourtant profondément renouvelé les problématiques d’histoire politique, entre M. Agulhon et D. Roche, pouvaient avoir de stimulant pour leur discipline. On renverra ici au Bulletin de la Société d’histoire moderne et contemporaine, sept. 1997, consacré aux sociabilités scientifiques. À l’inverse les instruments dont M. Biagioli se dotait pour analyser le système des cours de l’Italie moderne étaient peu pertinents pour rendre compte de la situation romaine, qui ne trouve aucune place dans le schéma qu’il offre à ses lecteurs. Il est remarquable qu’aucune critique n’ait été formulée sur le fond même de sa proposition et sur la base d’une analyse précise du contexte romain en particulier.
27 R. Lenoble, Mersenne ou la naissance du mécanisme, Paris, 1943 ; R. Pin-tard, Le libertinage érudit dans la première moitié du xviie siècle, Paris, 1943.
28 L. Febvre, Aux origines de l’esprit moderne : Libertinisme, Naturalisme, Mécanisme, dans Au cœur religieux du xvie siècle, Paris, 1957, p. 337-338.
29 Le siècle des Lumières en province. Académies et académiciens provinciaux, 1680-1789, Paris-La Haye, 1978, 2 vol. Voir en outre les remarques supra, n. 26.
30 On pense ici au livre majeur de H. J. Martin, Livre, pouvoirs et société à Paris au xviie siècle, Genève, 1971, 2 vol., au travail collectif sur l’histoire de l’imprimé, R. Chartier et H. J. Martin (dir.), Histoire de l’édition française, t. 1 : Le livre conquérant : du Moyen Âge au milieu du xviie siècle, Paris, 1983 ; t. 2 : Le livre triomphant : 1660-1830, Paris, 1984.
31 On notera, à cet égard que la consécration du cadre national comme cadre d’analyse historienne, promue par la collection « ... in national context », a aussi atteint la discipline : R. Porter and M. Teich (dir.), The Scientific Revolution in National Context, Cambridge, 1992. La « naturalisation » du cadre national qui en découle est non seulement historiquement hautement problématique, dans la mesure où le national building process est postérieur au phénomène analysé, mais aussi du fait de la fixation implicite de l’échelle d’analyse qui exclut d’autres échelles, plus petites ou plus grandes, et rend difficile l’approche de la circulation des acteurs, des modèles, ainsi que des obstacles à cette circulation qui ne seraient pas de type politique. Que faire alors des barrières confessionnelles ? Que dire des rivalités locales dans une zone comme l’Italie fragmentée et morcelée du 17e siècle ?
32 Voir infra, p. 22-31.
33 Voir les remarques de L. Giard, sur Duhem et Koyré, dans L. Giard (dir.), Les jésuites à la Renaissance. Système éducatif et production du savoir, Paris, 1995, p. XXVII-XLV. Parmi les principaux jalons de cette histoire : A. Rupert Hall, The Scientic Revolution, 1500-1800. The Formation of the Modern Scientific Attitude, Londres, 1954 ; A. Koyré, From the Closed World to the Infinite Universe, Londres, 1957 ; T. Kuhn, The Copernican Revolution. Planetary Astronomy in the Development of Western Thought, Cambridge, 1957 ; H. Butterfield, The Origins of Modern Science, Revised Edition, New York, 1997 (première édition 1957). Pour les remises en perspective, à partir des années 1990, on renverra à D. C. Lindberg et R. S. Westman (dir.), Reappraisals of the Scientific Revolution, Cambridge, 1990 ; S. Shapin, The Scientific Revolution, Chicago, 1996 ; M. J. Osler (dir.), Rethinking the Scientific Revolution, Cambridge, 2000 ; P. Dear, Revolutionizing the Sciences : European Knowledge and its Ambitions, 1500-1700, Houndmills, 2001. Pour une présentation de cette historiographie, H. F. Cohen, The Scientific Revolution : A historiographical inquiry, Chicago, 1994.
34 J. Michelet, Histoire de France. xvie siècle. La Renaissance, t. 7, Paris, 1876, p. 6, 48.
35 Ici c’est sans doute à Francis Bacon et à sa postérité qu’il faudrait consacrer une analyse précise, mais on se contentera de renvoyer à l’une de ses pièces maîtresses, Two books of the proficience and advancement of learning human and divine, Londres, T. Homes, 1605.
36 Science, Technology and Society in Seventeenth Century England, dans Osiris, vol. 4, 1938, chap. IV, « Puritanism and cultural values », p. 414-415. Pour une introduction à Merton, voir P. Sztompka, Robert K. Merton, dans G. Ritzer (dir.), Blackwell Companion to Major Contemporary Social Theorists, Londres, 2003, p. 12-33.
37 Londres, 1975 (nouvelle édition, Berne, 2002).
38 Voir en particulier The Historical Journal, vol. 19, 1976/4, p. 1026-1030 ; Notes et Records of the Royal Society of London, 57, 2003/3, p. 345-352.
39 On lira avec intérêt la présentation de cette revue : « Science in Context is an international journal edited at The Cohn Institute for the History and Philosophy of Science and Ideas, Tel Aviv University. It is devoted to the study of the sciences from the points of view of comparative epistemology and historical sociology of scientific knowledge. The journal is committed to an interdisciplinary approach to the study of science and its cultural development – it does not segregate considerations drawn from history, philosophy and sociology. Controversies within scientific knowledge and debates about methodology are presented in their contexts ».
40 Une autre voie détournée, en cours de formation, est celle qui a trouvé ses cadres conceptuels dans les « areas studies », invitant pat là même non seulement à poser la question en termes généraux de catholicité, mais aussi en termes géopolitiques d’états pontificaux et de monarchies catholiques. On renverra ici aux remarques de J. Cañizares-Esguerra, Iberian Science in the Renaissance : Ignored How Much Longer ?, dans Perspectives on Science, 12, 1, 2004, p. 86-124, qui, malgré leur superficialité, ont rendu sensible une situation de déséquilibre historiographique en anglais fortement prononcée, malgré les travaux nombreux en espagnol, et toujours plus importants dans l’espace anglophone. Parmi les exemples les plus récents : J. Pimentel, The Iberian Vision. Science and Empire in the Framework of a Universal Monarchy, 1500-1800, dans R. MacLeod (dir.), Nature and Empire : Science and the Colonial Enterprise, Osiris, 15, 2000, p. 17-30 ; L. M. Carolino, Scienza, politica ed escatologia nella formazione dello « scienziato » nell’Europa del XVII secolo : Il caso di Manuel Bocarro Francês – Jacob Rosales, dans Nuncius, 19, 2, 2004, p. 477-506.
41 On pense ici aux travaux de R. Feldhay, dont le livre Galileo and the Church. Political Inquisition or Critical Dialogue ?, Cambridge, 1995, était en préparation, mais qui livrait dans ce numéro deux articles définissant ses objets et questions : Knowledge and Salvation in Jesuit Culture et, en collaboration avec M. Hey, The Discourse of Pious Science, p. 109-142.
42 Je me permets de renvoyer ici au numéro thématique de la Revue de Synthèse, Les jésuites dans le monde moderne. Nouvelles approches historiographiques, t. 120, 1999/2-3, p. 247-491, coordonné en collaboration avec P.-A. Fabre : voir en particulier, l’introduction, p. 247-260 et la note de synthèse sur les sciences, p. 439-448, à compléter par Ead., I gesuiti e le scienze in età moderna : fonti, storia, storiografia, dans Annali di storia dell’esegesi, 19, 2, 2002, p. 437-44, et Ead., Les jésuites dans la culture scientifique française du xviie siècle. Bilans et perspectives, dans G. P. Brizzi et R. Greci (dir.), Gesuiti e Università in Europa (secoli xvi-xviii). Convegno internazionale, Parma, 13-15 dicembre 2001, Bologne, 2002, p. 435-452. Voir enfin les deux volumes édités par M. Feingold, Jesuit Science and the Republic of Letters, Cambridge-Londres, 2003, et The new Science and Jesuit Science : Seventeenth Century Perspectives, Dordrecht-Boston-Londres, 2003.
43 Parmi les travaux qui ont marqué cette décennie, on signalera, par ordre chronologique et sans prétention à l’exhaustivité : A. Krayer, Mathematik im Studienplan der Jesuiten : die Vorlesung von Otto Cattenius an der Universität Mainz, 1610/1611, Stuttgart, 1991 ; U. Baldini, Legem impone subactis. Studi su filosofia e scienza dei Gesuiti in Italia, 1540-1632, Rome, 1992 ; Christoph Clavius, Corrispondenza. Edizione critica a cura di U. Baldini e P.-D. Napolitani, pré-print de l’Université de Pise, Département de mathématique, 7 vol., 1992 ; R. Gatto, Tra scienza e immaginazione. Le matematiche presso il collegio gesuitico napoletano (1552-1670 ca.), Florence, 1994 ; J. Lattis, Between Copernicus and Galileo. Christoph Clavius and the Collapse of Ptolemaic Cosmology, Chicago-Londres, 1994 ; R. Feldhay, Galileo and the Church... cit. ; L. Giard, Les jésuites à la Renaissance... cit. ; U. Baldini (dir.), Christoph Clavius e l’attività scientifica dei Gesuiti nell’età di Galileo. Atti del Convegno Internazionale (Chieti, 28-30 aprile 1993), Rome, 1995 ; D. Aricò, Scienza, teatro e spiritualità barocca. Il gesuita Mario Bettini, Bologne, 1996 ; A. Romano, La contre-réforme mathématique... cit.
44 John W. O’Malley, S.J., Gauvin Alexander Bailey, Steven J. Harris, T. Frank Kennedy, S.J. (dir.) Toronton, Buffalo, Londres, 1999. Ce volume consacre en outre l’intérêt que les historiens généralistes de la Compagnie portent à son rôle dans l’histoire des sciences : on retiendra en effet la présence de contributions émanant des principaux acteurs du renouvellement signalés dans la note qui précède, ainsi que l’arrivée d’une nouvelle génération de jeunes chercheurs : R. Feldhay, The Cultural Field of Jesuit Science, p. 107-130, M. J. Gorman, From « The Eyes of All » to « Usefull Quarries in Philosophy and Good Literature » : Consuming Jesuit Science, p. 170-189, S. J. Harris, Mapping Je-suit Science : the Role of Travel in the Geography of Knowledge, p. 212-240, F. Hsia, Jesuits, Jupiter’s Satellites, and the Académie Royale des Sciences, p. 241257, A. Simmons, Jesuit Aristotelian Education : The De anima Commentaries, p. 522-537, M. Hellyer, Jesuit Physics in Eighteenth-Century Germany : Some Important Contunuities, p. 538-554. La parution en 2006 d’un deuxième volume témoigne de ce que la situation reste globalement inchangée, avec l’introduction de travaux émanant de jeunes chercheurs européens. Le nouveau paradigme de la mission comme cadre de l’activité savante, attire un nombre croissant de chercheurs : on signalera à ce propos le numéro thématique des Archives internationales d’histoire des sciences : Sciences et mission : le cas jésuite, numéro thématique coordonné par A. Romano, vol. 148, 2002, p. 71-228.
45 Sauf sans doute dans certains travaux sur Kircher : on renverra notamment à P. Findlen (dir.), Athanasius Kircher. The Last Man who Knew Everything, New York-Londres, 2004, et en particulier à A. Romano, Epilogue : Understanding Kircher in Context, p. 405-419.
46 Ces nouvelles perspectives de recherche se sont plus nettement confirmées dans les dernières années. Voir supra, n. 44 et 41.
47 Quant à la faiblesse des recherches sur les autres acteurs, notamment les autres ordres religieux, elle est à peine démentie par l’article historique de M. Bucciantini, Eredità galileiana e politica culturale medicea : il caso degli scolopi, dans Studi storici, XXX, 1989, 2, p. 379-399. En ce sens, les travaux engagés sur les minimes, parallèlement aux activités du groupe de recherche, ont joué un rôle non négligeable dans la mise en évidence d’un tel déséquilibre. On renverra, en outre, aux recherches en cours de F. Favino.
48 Sur l’idée de la compagnie comme laboratoire, cf. P.-A. Fabre-A. Romano, Les jésuites dans le monde moderne... cit., p. 247 s.
49 A. Romano, ACI Jeunes Chercheurs n° 67122, s.p.
50 La revue a été fondée en 1993. On trouvera les tables des volumes sur le site http ://host.uniroma3.it/centri/croma/rmc/riviste.asp
51 Art. cit.
52 « C’est merveilleux combien de par ce collège tient en la Chrétianté ; et croi qu’il ne fut jamais confrérie et cors parmi nous qui tint un tel ranc ny qui produisit enfin des effaicts tels que fairont ceus ici, si leurs desseins continuent. Ils possèdent tantost toute la Chrétianté : c’est une pépinière de grands hommes en toute sorte de grandeur. C’est celui de nos mambres qui menasse le plus les hérétiques de notre tamps », dans Journal de Voyage, éd. L. Lautrey, Paris, 1906, p. 254. Il faudrait aussi citer, en contre-point à Montaigne, mais comme puissant topos littéraire, Joachim Du Bellay : « Nouveau venu qui cherches Rome en Rome / Et rien de Rome en Rome n’apperçois, / Ces vieux palais, ces vieux arcz que tu vois, / Et ces vieux murs, c’est ce que Rome on nomme.
Voy quel orgueil, quelle ruine : et comme / Celle qui mist le monde sous ses loix / Pour donter tout, se donta quelquefois, / Et devint proye au temps, qui tout consomme.
Rome de Rome est le seul monument, / Et Rome Rome a vaincu seulement, /Le Tybre seul, qui vers la mer s’enfuit,
Reste de Rome. O mondaine inconstance ! / Ce qui est ferme, est par le temps destruit, / Et ce qui fuit, au temps fait resistence », Les antiquités de Rome, III.
53 Parmi les témoignages littéraires du xviie siècle, on mentionnera, dans la lignée de Du Bellay, les Diverses Poesies de Iean Regnault de Segrai gentil-homme normand, Paris, chez A. de Sommaville, 1658, p. 173-174. Dans une ode adressée à Ménage « Pour l’inciter d’aller en Suede », en l’année 1651, on lit : « Mais pour quoy sur les bords du Tybre / Choisis-tu de te retirer, / Sans pouvoir ailleurs esperer / La tranquilité douce, et libre ? / Ah ! Ce n’est plus dans ces beaux lieux / Peuplez iadis de Demy-Dieux / Qu’on trouve la haute Science ; / Malgré son triste aveuglement / La presomptueuse Ignorance / Y triomphe superbement.
Non, ce n’est plus, docte Menage, / Aux bords du grand fleuve Latin / Qu’on trouve le riche butin / Qui des Ans surmonte l’outrage : / A peine y vas-tu rencontrer / Quelqu’un qui puisse te montrer, / Que dans cette belle Province / Jadis à l’ombre des Ormeaux / Le celebre Pasteur de Mynce / Accorda ses doux Chalumeaux.
Les doctes Filles de memoire / Ne trouvent par tout que mépris ; / Par tout a le Vice entrepris / De prophaner leur sainte Gloire : / Cristine leur unique Appuy / Leur offre un Asile aujourd’huy / En ces Regions peu prisées ; / Mais ou malgré les froids du Nord / Vit comme en des Champs Elisées : L’innocence du siècle d’Or... ». On pourrait tracer le parcours littéraire de l’obsolescence romaine dans une littérature qui nous porterait jusqu’à nos jours et à cette page de J. Gracq mise en épigraphe de ce texte : pour ne rester que dans le domaine français, à la citation attendue de Stendhal, il ne faudrait pas manquer d’ajouter celle de Zola dont le roman Rome offre une vision « naturaliste » de la Ville Sainte à l’heure de la crise moderniste qui n’est pas sans lien avec l’image d’une Rome anti-scientifique qui circule parmi les historiens de sciences du temps, notamment dans le milieu positiviste. À ce propos, il convient de rappeler les liens de Zola avec Claude Bernard.
54 G. Labrot, Image de Rome : une arme pour la Contre-Réforme, 1534-1677, Seyssel, 1987.
55 W. E. Knowles Middleton, Science in Rome, 1675-1700, and the Accademia fisicomatematica of Giovanni Giustino Ciampini, dans The British Journal for the History of Science, 29, VIII, 1975, p. 138-154, p. 139.
56 De l’œuvre de P. Prodi, on retiendra particulièrement pour notre propos, Il sovrano pontefice. Un corpo e due anime : la monarchia papale nella prima età moderna, Bologne, Il Mulino, 1982. De l’historiographie allemande, C. Weber, Kardinäle und Prälaten in der letzten Jahrzehnten des Kirchenstaates. Elite-Rekrutierung, Karriere-Muster und soziale Zusammensetzung der kurialen Führungsschicht zu Zeit Pius IX (1846-1878), Stuttgart, 1978 ; W. Reinhard, Freunde und Kreaturen : « Verflechtung » als Konzept zur Erforschung historischer Führungsgruppen Römische Oligarchie um 1600, Münich 1979. Accessibles en français, W. Reinhard, Papauté, confessions, modernité, trad. française, Paris, 1998 (en particulier La Contre-Réforme : une forme de modernisation ? Prolégomènes à une théorie du temps des confessions, p. 155-169 ; Papauté et réformes entre Renaissance et Baroque, p. 99-115). On rappelera l’importance des travaux germano-italiens : P. Prodi et C. Penuti (dir.), Disciplina dell’anima, disciplina del corpo e disciplina della società tra Medioevo ed età moderna, Bologne, 1994 ; P. Prodi et R. Wolfgang (dir.), Il Concilio di Trento e il moderno, Bologne, 1996 (Annali dell’Istituto storico italo-germanico) ; pour la bureaucratie et le patronage, R. Ago, Carriere e clientele nella Roma barocca, Rome-Bari, 1990, A. Gnavi, Carriere e curia romana : l’uditorato di rota (1472-1870), dans MEFRIM, 106, 1994, p. 161-202, M.-A. Visceglia, Burocrazia, mobilità sociale e patronage alla corte di Roma tra cinque e seicento. Alcuni aspetti del recente dibattito storiografico e prospettive di ricerca, dans RMC, III, 1995/1, p. 11-55, G. Signorotto et M.-A. Visceglia (dir.), La Corte di Roma tra Cinque e Seicento. « Teatro » della politica europea, Rome, 1998, I. Fosi, All’ombra dei Barberini. Fedeltà e servizio nella Roma barocca, Rome, 1997, I. Fosi (dir.), Amici, creature, parenti : la corte romana osservata da storici tedeschi, dans Dimensioni e problemi della ricerca storica, 2, 2001 ; M. A. Visceglia (dir.), La nobiltà romana in età moderna. Profili istituzionali e pratiche sociali, Rome, 2001 et à leurs bibliographies. I. Fosi, La giustizia del Papa. Sudditi e tribunali nello stato pontificio in età moderna, Rome, 2007. Pour la bibliographie générale sur Rome, voir Storia d’Italia. Annali 16. La città del papa. Vita civile e religiosa dal Giubileo di Bonifacio VIII al Giubileo di papa Wojtila, L. Fiorani et A. Prosperi, Turin, 2000 ; G. Cuccio (dir.), Roma moderna, Storia di Roma, vol. 4, Rome, 2002.
57 Pour plagier le titre du volume collectif consacré à Florence, G. Barsanti, V. Becagli et R. Pasta (dir.), La politica della scienza. Toscana e stati italiani nel tardo Settecento, Florence, 1996.
58 M. P. Donato, Accademie romane. Una storia sociale (1671-1824), Naples, 2000. Ead., Le strane mutazioni di un’identità : il « letterato » a Roma, 1670-1750, dans B. Salvemini (dir.), Gruppi ed identità sociali nell’Italia di prima età moderna. Percorsi di ricerca, Bari, 1998, p. 275-314.
59 S. Dierig, J. Lachmund et A. Mendelsohn (dir.), Science and the City, dans Osiris, 18. On renverra en outre, pour Paris, à S. Van Damme, Paris, capitale philosophique de la Fronde à la Révolution, Paris, 2005, ainsi qu’au programme qu’il coordonne, à la Maison française d’Oxford, depuis 2003, sur le thème « Savoirs et capitales européennes ». Dans le cadre français, voir le numéro thématique de la Revue d’histoire moderne et contemporaine, Sciences et villes-mondes : penser les savoirs au large (xvie-xviiie siècle), 2008, 2, coordonné par S. Van Damme et A. Romano. Plus lointains mais non moins stimulants, dans le sillage des travaux qui portent sur science et empire, K. Raj, Relocating Modern Science. Circulation and the Construction of Knowledge in South Asia and Europe, 1650-1900, New York, 2007.
60 Dans le cadre des réflexions du groupe, voir J. M. Besse, Le lieu en histoire des sciences : hypothèses pour une approche spatiale du savoir géographique au xvie siècle, dans MEFRIM, 116, 2004, p. 401-422.
61 Sur les médecins, voir, pour le xvie siècle, la thèse de E. Andretta, Le Scalpel de Pierre. Médecines et médecins à Rome entre Renaissance et Contre-réforme, thèse de l’École des hautes études en sciences sociales et de l’Università degli studi di Roma-La Sapienza, soutenue en décembre 2007. Sur les membres du clergé régulier, à propos des jésuites, voir A. Romano et S. Van Damme, Penser, structurer et contrôler la mobilité intellectuelle dans la catholicité post-tridentine : les enseignants jésuites et l’espace méditerranéen, dans MEFRIM, 2007, p. 185-206.
62 Le livre de M. Cavazza, Settecento inquieto. Alle origini dell’Istituto delle Scienze di Bologna, Bologne, 1990, reste fondamental.
63 Sur cette question au temps de Galilée, voir les ouvrages de P. Redondi et M. Biagioli, cités supra. Sur la période postérieure, voir P. Galluzzi, L’accademia del Cimento : « gusti » del principe, filosofia e ideologia dell’esperimento, dans Quaderni storici, XVI, 1981, 48, f. III, p. 788-844 ; Id., Il mecenatismo mediceo e le scienze, dans C. Vasoli (dir.), Idee, istituzioni, scienza, ed arti nella Firenze dei Medici, Florence, 1980, p. 189-219 ; Id., Il dibattito scientifico in Toscana (16661686), dans Niccolò Stenone e la scienza in Toscana alla fine del ’600. Mostra documentaria e iconografica, Florence, 1986, p. 113-129.
64 Sur les relations avec l’Espagne, voir A. Carlino, Tre piste per l’Anatomia di Juan de Valverde : logiche d’edizione, solidarietà nazionali e cultura artistica a Roma nel Rinascimento, dans MEFRIM, 114, 2, 2002, p. 513-541 ; T. Dandelet, The Spanish Foundations of Late Renaissance and Baroque Rome, dans P. Findlen, M. M. Fontaine et D. J. Osheim, Beyond Florence. The contours of the medieval and early modern Italy, Stanford, 2003, p. 209-232, et plus généralement Id., Spanish Rome, 1500-1700, New Haven-Londres, 2001. Pour les relations avec la France, voir F. Waquet, Le modèle français et l’Italie savante. Conscience de soi et perception de l’autre dans La République des Lettres 1660-1750, Rome, 1989 (Collection de l’École française de Rome, 117). Pour les relations avec le monde germanique, voir les travaux en cours de S. Brevaglieri, cités dans ce volume.
65 Sur ce point, voir A. Prosperi, Tribunali della coscienza. Inquisitori, confessori, missionari, Turin, 1996. Plus ancien et toujours suggestif, P. Prodi, Nuove dimensioni della Chiesa : il problema delle missioni e la « conquista spirituale » dell’America, dans Problemi di storia della Chiesa nei secoli xvi-xvii, Naples, 1979, p. 267-293.
66 En centrant notre première rencontre sur la question des lieux, notre objectif était double : il s’agissait tout à la fois de commencer un inventaire des lieux romains de la science, et d’engager la réflexion sur la spécificité de Rome, par rapport à d’autres villes, du point de vue de son rapport aux sciences. C’est pourquoi les communications étaient volontairement hétérogènes, les unes proposant une étude monographique classique (la nouveauté portant sur les informations mises à disposition des autres), les autres abordant des lieux épistémologiques (les sciences sacrées) ou des institutions qui n’avaient pas vocation à produire ou à accumuler de la connaissance scientifique, mais qui ont été amenées à le faire (Propaganda Fide). Cette hétérogénéité des approches était sous-tendue par une réflexion théorique sur la question des lieux et des espaces en histoire des sciences, susceptible de nourrir la réflexion générale engagée dès la première rencontre.
67 Le point de départ de cet ensemble de remarques est constitué par le point « Une approche globale des xviie et xviiie siècles », de l’introduction du volume, Naples, Rome, Florence... cit., p. 25. Pour une analyse d’ensemble de l’historiographie de l’Italie moderne, cf. S. Bertelli, Appunti sulla storiografia italiana per l’età moderna (1985-1995), dans Archivio storico italiano, 156, 1998, p. 97-154
68 Voir sur les appellations divergentes, J. O’Malley, Trent and all that. Renaming Catholicism in the Early Modern Era, Cambridge, 2000.
69 À propos de Rome, le volume dirigé par A. Pinelli, Roma nel Rinascimento, Rome-Bari, 2001.
70 On pense ici aux travaux sur les « Lumières conservatrices » selon l’expression forgée par J. G. A. Pocock, Conservative Enlightenment and Democratic Revolutions : The American and French Cases in British Perspective, dans Government and Opposition, 24, 1, 1989, p. 81–105, et dont une présentation critique est proposée dans le cadre de la synthèse de J. Robertson, The Case for the Enlightenment, Cambridge, 2005, notamment dans l’introduction, p. 1-51. Dans le domaine italien, les « Lumières catholiques » ont été vigoureusement défendues par M. Rosa, Settecento religioso : politica della ragione e religione del cuore, Venise, 1999, alors que le mouvement des « Lumi » était devenu, à partir des années 1960, la préoccupation centrale des historiens du xviiie siècle italien. Dans la lignée des travaux de Franco Venturi, auteur d’un monumental Settecento riformatore resté inachevé, de nombreux historiens se sont engagés dans l’histoire intellectuelle en vue d’une meilleure compréhension de l’histoire politique ; ils ont lié étroitement l’histoire des idées à celle des réformes et des pratiques politiques, et par là même certains ont pu faire le lien avec l’histoire des sciences : on renverra ici à V. Ferrone, Scienza, natura, religione. Mondo newtoniano e cultura italiana nel primo Settecento, Naples, 1982 ; Id., I profeti dell’Illuminismo : le metamorfosi della ragione nel tardo Settecento italiano, Rome-Bari, 1989. Dans une lignée proche, on notera les stimulantes perspectives ouvertes par le livre de A. Tram-pus, I gesuiti e l’Illuminismo. Politica e religione in Austria e nell’Europa centrale (1773-1798), Florence, 2000, qui analyse le passage des jésuites à la maçonnerie, à partir de la suppression de la Compagnie, dans les dernières décennies du xviiie siècle, comme le résultat d’un processus d’appropriation par ces derniers des formes les plus modernes de la sociabilité des Lumières.
71 Le choix des correspondances, plutôt que des journaux, répond principalement au souhait de couvrir certaines lacunes historiographiques. Les journaux romains, et notamment ceux qui s’occupent de sciences, ont fait l’objet de différentes études, parmi lesquelles on signalera J.-M. Gardair, Le « Giornale de’ letterati » de Rome (1668-1681), Florence, 1984, et M. Caffiero et G. Monsagrati (dir.), Dall’erudizione alla politica. Giornali, giornalisti ed editori a Roma tra xvii e xx secolo, Milan, 1997 qui accueille entre autres les trois contributions de M. Caffiero, Le Efemeridi letterarie di Roma (1772-1798). Reti intellettuali, evoluzione professionale e apprendistato politico, p. 65-103, M. P. Donato, Gli « strumenti » della politica di Benedetto XIV : il Giornale de’ Letterari (1742-1759, p. 39-61 et A. Romano, I problemi scientifici nel Giornale de’ Letterati (1668-1681), p. 17-38.
72 Outre les références générales qu’on trouvera dans l’article de L. Giard et A. Romano, voir le numéro thématique de la Revue de Synthèse, vol. 81-82, 1976, Les correspondances : leur importance pour l’historien des sciences et de la philosophie. Problèmes de leur édition, et notamment, R. Taton, Le rôle et l’importance des correspondances scientifiques aux xviie et xviiie siècles, p. 7-22 ; P. Dibon, Les échanges épistolaires dans l’Europe savante du xviie siècle, p. 31-50. En outre, G. Olmi, « Molti amici in varij luoghi » : studio della natura e rapporti epistolari nel secolo xvi, dans Nuncius, 6, 1991, p. 3-31 ; H. J. M. Nellen, La correspondance savante au xviie siècle, dans xviie siècle, 178, 1993, p. 87-98 ; A. Johns, The ideal of scientific collaboration : the « man of science » and the diffusion of knowledge, dans H. Bots et F. Waquet (dir.), Commercium litterarium : la communication dans la république des lettres, 1600-1750. Conférences des colloques tenus à Paris 1992 et à Nimègue 1993 = Forms of communication in the republic of letters, 1600-1750, Amsterdam, 1994, p. 3-22 ; D. S. Lux et H. J. Cook, Closed circles or open networks ? Communicating at a distance during the scientific revolution, dans History of Science, 36, 1998, 179-211 ; P. Findlen, The formation of a scientific community : natural history in sixteenth century Italy, dans A. Grafton et N. Siraisi (dir.), Natural Particulars. Nature and the disciplines in Renaissance Europe, Cambridge-Londres, 1999.
73 Voir L. M. Carolino, « Lux ex Occidente ». Un regard européen sur l’Inde au xviie siècle. Athanase Kircher et les récits des missionnaires jésuites sur la science et la religion indiennes, dans Archives internationales d’histoire des sciences, 52, 2002, p. 102-121.
74 Sur le réseau postal et la circulation, la thèse de J. Delumeau, Vie économique et sociale de Rome dans la seconde moitié du xvie siècle, 2 vol., Paris, 19571959, reste une référence.
75 On renvoie ici au dossier de la Revue d’histoire moderne et contemporaine, 2008/2, cité supra n. 59, et en particulier à A. Romano, Construire les savoirs de la catholicité post-tridentine : le chantier romain entre Renaissance et Lumières.
76 G. Pizzorusso, Per servitio della Sacra Congregatione de Propaganda Fide : i nunzi apostolici e le missioni tra centralità romana e chiesa universale (1622-1660), dans D. Frigo (dir.), Ambasciatori e nunzi. Figure della diplomazia in età moderna, dans Cheiron. Materiali e strumenti di aggiornamento storiografico, XV, 1998, 30, p. 201-227 ; Id., Agli antipodi di Babele : Propaganda Fide tra immagine cosmopolita e orizzonti romani (xvii-xix secolo), dans Storia d’Italia, Annali 16... cit., p. 477518 ; Id., I satelliti di Propaganda Fide : il Collegio Urbano e la Tipografia Poliglotta. Note di ricerca su due istituzioni culturali romane nel xvii secolo, dans MEFRIM, 116, 2004, p. 471-498 ; Id., La Congregazione de Propaganda Fide e gli ordini religiosi : conflittualità nel mondo delle missioni del xvii secolo, dans Cheiron, 43-44, 2005, p. 197-240 ; Id., Il papato e le missioni extra-europee nell’epoca di Paolo V : una prospettiva di sintesi, dans A. Koller (dir.), Die Außenbeziehungen der römischen Kurie unter Paul V. Borghese (1605-1621), Tübingen, 2008, p. 367-390.
77 Dans la perspective ouverte par G. Pizzorusso, on pourra renvoyer aux travaux en cours sur l’orientalisme naissant à Rome, dès la première moitié du xviie siècle, avec des arabisants comme Abraham Ecchselensis, notamment étudié par D. Stolzenberg, Egyptian Oedipus : Antiquarianism, Oriental Studies and Occult Philosophy in the Work of Athanasius Kircher, doctoral dissertation, Stanford University, 2003.
78 C’est évidemment à D. Roche que l’on doit d’avoir fait de cette pratique l’un des thèmes fondateurs de la modernité européenne : D. Roche, Humeurs vagabondes. La circulation des idées et des hommes, Paris, 2003.
79 On renverra ici à la thèse soutenue par G. Montègre, Rome capitale culturelle au siècle des Lumières. Présence française et constructions des savoirs dans la Ville éternelle au temps de l’ambassade du cardinal de Bernis (1769-1791), thèse de l’Université de Grenoble 2 et de l’Università degli studi di Roma – La Sapienza, décembre 2006.
80 Sur Akerblad, voir la thèse en cours de F. Thomasson, département d’histoire et civilisation, Institut Universitaire Européen, Florence.
81 « Les savants étrangers à Rome, entre Contre-Réforme et Lumières », Rome, 9-10 juin 2003. Tels étaient les attendus de la rencontre : « Particulièrement travaillée par les historiens de l’art, l’historiographie sur les étrangers à Rome est aussi ancienne qu’abondante, le thème se trouvant au cœur de toute analyse sociale ou culturelle de l’Urbs. La rencontre organisée par le groupe de recherche « La culture scientifique à Rome à l’époque moderne », en prenant appui sur cette historiographie et les réflexions portant plus largement sur ce thème dans l’Europe moderne, vise un objectif principal : y apporter une première contribution, à partir des milieux, des objets et des pratiques scientifiques. Le choix de ce thème d’étude est lié à deux constats simples : l’importance du phénomène du point de vue des milieux intellectuels romains en général, qu’il s’agit de mieux articuler avec l’universalisme revendiqué de la cité ; l’absence de travaux consacrés à cet aspect de la question, qu’on voudrait mettre en œuvre dans le cadre d’une réévaluation plus large des activités et des milieux scientifiques romains de l’époque moderne.
Il sera donc moins question de poursuivre des discussions sur des thèmes tels que la notion d’étranger, ou les nations présentes à Rome, que de contribuer, par des études de cas inscrites entre xvie et xviiie siècle, à une connaissance plus fine des milieux savants romains en étant spécialement attentifs à la question de la circulation internationale des savoirs et des hommes qui sont concernés par notre enquête. En ce sens, cette rencontre cherchera à déployer la réflexion sur le cosmopolitisme savant et scientifique de Rome, trop souvent négligé par une historiographie des sciences qui a fait de la Contre-réforme le point de départ de la provincialisation de la culture scientifique romaine ». Parmi les travaux récents, G. Montègre, François de Paule Latapie. Un savant voyageur français au cœur de la Rome des Lumières, dans MEFRIM, 117, 2005, p. 371-422, ainsi que sa thèse mentionnée supra, n. 79.
82 L’adresse électronique est la suivante : http ://www.hstl.crhst.cnrs.fr/bibliorome/.
83 Dans M. P. Donato et J. Kraye (dir.), Conflicting duties... cit., voir l’article complémentaire de M. Conforti, The Biblioteca Lancisiana and the 1714 edition of Eustachi’s plates, sous presse.
84 On trouvera une autre analyse sur les rapports entre livre scientifique et édition dans M. P. Donato et J. Kraye (dir.), Conflicting duties... cit. : L. Pinon, Roman Church and Scientific Patronage : Ulisse Aldrovandi celebrating Cardinal Montalto and other cases, sous presse.
85 Plus généralement, sa thèse en cours d’achèvement, offre une analyse nouvelle et particulièrement richement documentée, des modalités de configuration, sur le long xvie siècle, d’une médecine romaine marquée par le paradigme de la preuve de la sainteté. Dans M. P. Donato et J. Kraye (dir.), Conflicting duties... cit., E. Andretta : Anatomie du Vénérable dans la Rome de la Contre-réforme. Les autopsies d’Ignace de Loyola et de Philippe Neri, sous presse.
86 Voir M. Caffiero, M. P. Donato et A. Romano, op. cit. supra, n. 13.
87 Sur l’anatomie vésalienne, voir A. Carlino, La fabbrica del corpo. Libri e dissezione nel Rinascimento, Turin, 1994.
88 On ne peut rendre compte ici de l’ensemble des travaux qui portent sur l’histoire de l’université et de la faiblesse de la part qui est faite aux enseignements scientifiques pour l’époque moderne. Pour la question science moderne / université, voir H. De Ridder-Symoens, A history of university in Europe, vol. 2 : Universities in early modern Europe (1500-1800), Cambridge, 1996, et en particulier, Porter Roy, The scientific revolution and universities, p. 531-564 ; pour les jéuites, voir Gesuiti e Università in Europa (secoli xvi-xviii), op. cit. supra, n. 42 : The New Science and Jesuit Science op. cit. supra, n. 42 : M. Feingold et V. Navarro-Brotons (dir.), Universities and Science in the Early Modern Period, Dordrecht, 2006.
89 Voir n. 9, supra. F. Favino, Matematiche e matematici alla « Sapienza » romana (xvii-xviii secolo), dans MEFRIM, 116, 2, 2004, p. 423-469, qui complète Ead., Matematiche e Matematici alla « Sapienza » tra ’500 e ’600. Un’introduzione, dans RMC, 7, 1999, p. 421-462. On doit y ajouter Ead., Minimi in Sapienza. François Jacquier, Thomas Le Seur e il rinnovamento dell’insegnamento scientifico allo Studium Urbis, dans MEFRIM, 117, 1, 2005, p. 159-187 ; Ead., Scienza ed erudizione nei collegi degli ordini religiosi a Roma tra Sei e Settecento, dans Cheiron, 1, 2006, p. 84-98. D’une manière plus générale, l’attention portée aux ordres religieux comme acteurs d’un processus plus complexe qu’on ne l’a décrit jusqu’à présent, est particulièrement représentée dans le volume, M. P. Donato et J. Kraye (dir.) Conflicting duties... cit. avec les contributions de S. Montacutelli, Da Galileo a Borelli e oltre : la filosofia naturale delle Scuole Pie a Roma nel Seicento ; A. Romano, Mathematics and philosophy at Trinità dei Monti : Emmanuel Maignan and his legacy between Rome and France in the second half of the 17th century ; P. Findlen, The Jesuit Antonio Baldigiani between Kircher and Galileo.
90 En ce sens, il croise une nouvelle tendance de la recherche telle qu’elle est promue par les chercheurs de la nouvelle génération qui ont lancé des entreprises de type comparatif entre les différents ordres religieux, sur la base d’une même volonté de se départir de l’exclusivisme jésuite. On signalera à ce sujet le numéro thématique des Quaderni storici, 119, a. XL, 2005, 2, Ordini regolari, a c. di Simona Feci, Angelo Torre, ainsi que Religione, conflittualità e cultura. Il clero regolare nell’Europa d’antico regime, numéro théatique de Cheiron, nn. 43-44 (2005), dirigé par M. C. Giannini
91 Dans le volume, Naples, Rome, Florence... cit., on renverra non seulement à la synthèse romaine, mais aux différentes contributions du dossier romain : A. Romano, À l’ombre de Galilée ? Activité scientifique et pratique académique à Rome au xviie siècle, p. 209-242, M. Caffiero, Accademie e autorappresentazione dei gruppi intellettuali a Roma alla fine del Settecento, p. 277-292, M. P. Donato, Le due accademie dei Concili a Roma, p. 243-255. Dans M. P. Donato et J. Kraye (dir.), Conflicting duties... cit., voir F. Favino : « Marvelous conjuncture ? » The Academy of Maurizio di Savoia of Rome between politics and « new science ». La référence pour le xviiie siècle a déjà été mentionnée, M. P. Donato, Accademie romane... cit. Pour les Lincei, on renverra à I. Baldriga, L’occhio della Lince, Rome, 2002 ; D. Freedberg, The Eye of the Lynx : Galileo, his Friends and the Biginnings of Modern Natural History, Chicago, 2003 ; M. Biagioli, Galileo Courtier. The Pratice of Science in the Culture of Absolutism, Chicago, 1993 ; S. Brevaglieri, Il cantiere del Tesoro Messicano tra Roma e l’Europa. Pratiche di comunicazione e strategie editoriali nell’orizzonte dell’Accademia dei Lincei (1610-1630), dans Sul Tesoro Messicano e alcuni disegni del Museo Cartaceo di Cassiano del Pozzo, Rome, 2007,. 1-68.
92 Parmi les travaux disponibles sur la science antiquaire, voir notamment J.-L. Ferrary, Onofrio Panvinio et les antiquités romaines, Rome, 1996 (Collection de l’École française de Rome, 214) ; I. Rowland, The Culture of the High Renaissance : Ancients and Moderns in Sixteenth-Century Rome, Cambridge, 1998 ; C. Robertson, Il Gran Cardinale : Alessandro Farnese, Patron of the Arts, New Haven, 1992 ; I. Herklotz, Cassiano Dal Pozzo und die Archäeologie des 17. Jahrhunderts, Munich, 1999 ; W. McCuaig, Carlo Sigonio : The Changing World of the Late Renaissance, Princeton, 1987).
93 L’importance du thème est telle qu’il a fait l’objet d’une des tables rondes du programme de recherche : « Sciences et antiquaria : acteurs, paradigmes, re-configurations disciplinaires », Rome, 11-12 juin 2004. Elle proposait l’agenda suivant : « La dernière table ronde vise à interroger un autre aspect (qui ne serait pas le dernier) du riche dossier de la science romaine. La question de l’antiquaria occupe dans l’Urbs une place fondamentale, désormais bien connue, grâce aux travaux menés principalement par les historiens de l’art et les spécialistes de l’Antiquité. Les rapports constants entre ce champ et celui des sciences incitent à en interroger plus systématiquement les relations. On fera en effet l’hypothèse que, entre les deux domaines, ne se croisent pas seulement des hommes intéressés en même temps aux médailles et à la philosophie de la nature par exemple, mais se recoupent aussi des méthodes, voire des paradigmes épistémologiques. Peu de travaux sont actuellement susceptibles de valider cette hypothèse, du fait des partages disciplinaires contemporains qui établissent des frontières presque étanches entre les spécialistes qu’une telle approche engage. C’est pourquoi la rencontre proposée visera principalement à l’établissement d’un dialogue entre les différentes communautés impliquées, moins en vue d’établir un bilan qu’un véritable agenda de recherche commun. La spécificité de Rome, capitale internationale de l’antique, rend nécessaire une expérience de ce type ». La rencontre a bénéficié des contributions de Ginette Vagenheim, Pirro Ligorio (env. 1512-1583) et les fouilles à la Villa d’Hadrien : naissance de l’archéologie au xvie siècle ; Nancy Siraisi, Medical Antiquarianism in 16th Century Rome : Antiquity in the Writings of Girolamo Mercuriale and Andrea Bacci ; Daniel Stolzenberg, Catholic cosmopolis : antiquarian and oriental studies in seventeenth century, François de Polignac, Logiques de classification dans l’archéologie du début du xviiie siècle, Gilles Montègre, Vers la mesure du monde ? Le voyage scientifique à Rome et la quête de l’antique, en plus des contributions des membres du groupe lui-même, dont les textes sont publiés dans cette section.
94 A. Momigliano, Sui fondamenti della storia antica, Turin, 1984.
95 Voir dans M. P. Donato et J. Kraye (dir.), Conflicting duties... cit., L. Pi-non, Roman Church and Scientific Patronage : Ulisse Aldrovandi celebrating Cardinal Montalto and other cases, J.-M. Besse, La naissance de l’atlas moderne : Rome, Lafréry, Ortelius.
96 Sur ce dernier point voir la thèse d’E. Lurin, consacrée à Étienne Dupérac, graveur, peintre et architecte (vers 1535 ?-1604). Un artiste-antiquaire entre l’Italie et la France », soutenue à l’université de Paris IV, le 11 décembre 2006, ainsi que sa communication L’illustration des traités d’antiquités à Rome au xvie siècle : construction et fonctions d’une catégorie d’images scientifiques, lors du colloque d’octobre 2005.
97 On pense ici aux bollandistes et à leurs liens avec les jésuites de Rome, ainsi qu’aux visites effectuées dans la ville sainte par les clercs érudits, tel Bernard de Montfaucon, de la congrégation de Saint Maur.
98 S. Ditchfiled, Text before Trowel : Antonio Bosio’s Roma Sotteranea Revisited, dans Studies in Church History, 3, 1997, p. 343-360.
99 Voir, parmi les ouvrages les plus récents, L’apertura degli archivi del Sant’Uffizio romano. Giornata di studio, Roma, 28 gennaio 1998, Rome, 1998 ; C. Stango (dir.). Censura ecclesiastica e cultura politica in Italia tra Cinquecento e Seicento. Atti del convegno, 5 marzo 1999, C. Stango (dir.), Censura..., Florence, 2001 ; G. Fragnito (dir.), Church, censorship and culture in early modern Italy, Cambridge, 2001 ; A. Borromeo (dir.), L’inquisizione. Atti del simposio internazionale, Città del Vaticano, 29-31 ottobre 1998, Cité du Vatican, 2003 ; G. Fragnito, Proibito ca-pire. La Chiesa e il volgare nella prima età moderna, Bologne, 2005. Dans M. P. Donato et J. Kraye (dir.), Conflicting duties... cit., S. Brevaglieri : Science, Books and Censorship in the Academy of the Lincei. The cultural mediation of Johannes Faber.
100 Outre la bibliographie déjà citée dans ces pages d’introduction, on renverra aux différentes contributions du volume J. Montesinos et C. Solis (dir.), Largo campo di filosofare. Eurosymposium Galileo 2001, La Orotava, 2001.
101 Voir E. Andretta sur le versant médical de cette question, art. cité supra, n. 85.
102 Cette recherche avait été jalonnée par la publication de Ead., L’onere della prova. Il Sant’Uffizio, l’atomismo e i medici romani, dans Nuncius. Annali di storia della scienza, 18, 2003, p. 69-87. Voir en outre dans M. P. Donato et J. Kraye (dir.), Conflicting duties... cit., Ead., The Mechanical Medicine of a Pious Man of Science : Pathological Anatomy, Religion and Papal Patronage in Lancisi’s De subitaneis mortibus (1707).
Notes de fin
1 Je remercie Luce Giard pour sa lecture attentive et minutieuse de ce texte.
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