Chapitre 7. Réforme militaire et réforme des tribus : le dilectus, le stipendium, le tributum et la répartition par tribus
p. 375-397
Texte intégral
1La création définitive de l’armée manipulaire, en 311, n’est pas seulement liée à une profonde réorganisation du système censitaire romain, avec la création de nouvelles classes censitaires et probablement aussi l’établissement de la première échelle du cens en termes monétaires. La réforme militaire nécessita également une réorganisation complète de la répartition des charges parmi les citoyens, car la relative homogénéité sociale et économique de la phalange de hoplites, voire de l’armée prémanipulaire, a laissé la place à une très grande diversité de richesses et de statuts sociaux, désormais tous mobilisés au sein de l’armée manipulaire. Le passage d’une petite armée de 6.000 hommes environ à une armée de 18 à 27.000 hommes explique également la nécessité d’une réorganisation de la levée. D’autre part, la croissance de la population romaine et l’extension géographique du territoire romain à la fin du ive siècle rendaient plus difficile le maintien de la levée militaire par centuries ou par curies : il semble difficilement imaginable que pour chaque levée, qui n’aboutissait à la sélection que d’une petite partie des mobilisables, tous les mobilisables se fussent simultanément rendus à Rome en désertant complètement même les tribus les plus lointaines. Et de fait, s’il avait peut-être un jour existé un rapport entre le nombre de curies (30) et le nombre de centuries mobilisées (30 puis 60 centuries, pour une armée de 3 à 6.000 hommes ?), il n’existait désormais plus de rapport entre le nombre de centuries du système centuriate (170 centuries de « fantassins ») et le nombre d’hommes mobilisés pour les quatre légions manipulaires annuelles (4.800 hastati, 4.800 principes et 2.400 triarii, plus 4.800 hommes parmi les troupes légères)1. Pour toutes ces raisons, la centurie (ou la curie ?) dut être abandonnée au profit de la tribu, aussi bien comme nouveau cadre de recrutement pour la levée (dilectus), que comme cadre dans lequel allait être prélevé l’impôt destiné à financer la solde des troupes (stipendium) : le tributum2.
2Certes, E. Gabba considère que le remplacement de la centurie par la tribu comme cadre de recrutement est une évolution qui n’aboutit sous sa forme définitive qu’au cours de la première moitié du iiie siècle, tout en n’excluant pas qu’elle puisse remonter aux premières décennies du siècle3. Reprenant une hypothèse de J. Marquardt, l’historien italien estime que le dilectus par tribus doit avoir pour origine la levée en masse en cas de tumultus, car il paraît logique qu’en cas d’attaque surprise par un ennemi, on levât les troupes d’abord dans les tribus les plus exposées au danger4. La levée par tribus est évoquée par les sources pour l’année 275, où l’état d’urgence dans lequel s’est déroulée la mobilisation pourrait précisément correspondre à un tumultus, alors que le premier cas de tumultus se serait justement produit quelques années auparavant, en 281, lorsque pour la première fois, semble-t-il, des proletarii ont été mobilisés5. Toutefois, le dilectus de 275 n’est pas explicitement présenté par les sources comme un tumultus, mais indique seulement qu’à cette date, la levée par tribus était déjà devenue une pratique institutionnelle courante6. De plus, il n’est pas certain que le tumultus de 281 fût le premier, puisqu’en 296 déjà, sous le second consulat d’Appius Claudius et de L. Volumnius, le Sénat proclama un iustitium et l’on mobilisa pour la première fois des seniores et même des libertini7. D’autre part, voir dans le tumultus l’origine historique de la levée par tribus est une hypothèse qu’aucune source ne vient confirmer explicitement. Il est certain par contre que la levée par tribus rendait plus simple les opérations de la mobilisation à partir du moment où l’extension du territoire romain avait acquis une certaine importance. Autrement dit, seule la levée par tribus rendait possible l’organisation d’un tumultus sur un territoire romain étendu de l’Étrurie méridionale à la Campanie.
3En fait, la levée par tribus n’a pas pu être introduite sans qu’on donnât à la tribu un important rôle institutionnel. À la fois pour des raisons institutionnelles, techniques et chronologiques, il semble difficile de dissocier la création de l’armée manipulaire, l’organisation « servienne » des cinq classes, l’apparition du premier monnayage romain du bronze, l’introduction du stipendium et enfin celle du tributum. Ce dernier était incontestablement et dès l’origine prélevé dans le cadre de la tribu, comme l’indique l’étymologie du mot rappelée par Varron (De lingua Latina, V, 181) :
Tributum dictum a tribubus, quod ea pecunia, quae populo imperata erat, tributim a singulis pro portione census exigebatur.
« Le mot tributum (contribution) vient de tribus (les tribus) parce que cette redevance, qui était infligée аu populus, était perçue dans le cadre de la tribu (tributim) sur chacun proportionnellement à son cens »8.
4Ce rapport étymologique entre le tributum et la tribu est également perçu par Tite-Live (I, 43, 13), bien qu’il intervertisse le sens de ce rapport :
Quadrifariam enim urbe divisa regionibus collibusque qui habitabantur, partes eas tribus appellavit [sc. Servius Tullius], ut ego arbitror, ab tributo : nam eius quoque aequaliter ex censu conferrendi ab eodem inita ratio est.
« Ayant en effet divisé la Ville en quatre parties, correspondant aux régions et aux collines qui étaient alors habitées, [Servius Tullius] les appela tribus, mot tiré, à mon avis, de tributum : car le calcul de son montant selon une égalité proportionnelle au census a été introduit par ce même roi ».
5Techniquement, la création du tributum n’a pas pu être antérieure à la création du premier monnayage romain du bronze, donc à la fin du ive siècle. Sur le plan institutionnel, la création du tributum est étroitement liée à celle du stipendium, qui est lui-même lié à la création de l’armée manipulaire. Dans sa fiche technique sur l’introduction de cette nouvelle organisation tactique, Tite-Live laisse clairement entendre le lien originel entre l’introduction du stipendium et le remplacement du clipeus par le scutum, ce qui correspond précisément à la création de la légion manipulaire9. Le versement d’un stipendium au légionnaire était en effet devenu une nécessité à partir du moment où l’on commença à mobiliser des citoyens plus pauvres que ceux qui constituaient jadis la phalange primitive (la classis clipeata) et qui formèrent dès lors la première classe censitaire : dans la mesure où chaque mobilisé devait fournir lui-même son propre armement, et en même temps perdre une éventuelle source de revenus par l’abandon de son travail, la mobilisation des humiles au sein de la légion ne fut rendue possible que par le versement d’une indemnité financée par l’impôt de tous les citoyens (le populus)10.
6Nous avons vu que Tite-Live reporte la création du stipendium à l’époque de la prise d’Anxur et du siège contre Véies, à la fin du ve siècle, et explique cette mesure par la mobilisation prolongée de la plèbe11. Nous avons également vu que c’est probablement aussi à cette époque qu’il faut placer le premier accroissement important des effectifs militaires romains (avec l’augmentation du nombre des tribuns militaires) et peut-être déjà l’adoption d’une organisation militaire prémanipulaire (en même temps que la création d’une deuxième et d’une troisième classe censitaire ?)12. Mais le témoignage de Tite-Live sur la création du stipendium pose en fait un grave problème technique : sous quelle forme pouvait être versée cette indemnité près d’un siècle avant les débuts, attestés par la numismatique, du premier monnayage romain ? Certains, ont cru voir dans l’anecdote des chariots chargés des lourds lingots de bronze apportés par les citoyens riches, qui auraient ainsi contribué au versement du premier tributum, une preuve attestant l’authenticité du récit sur la première distribution du stipendium aux soldats qui assiégeaient Véies13 : le tributum aurait en effet été payé sous forme de lateres, ou de lingots d’aes signatum, et non de pièces de monnaie, ce que l’annalistique n’a pas pu avoir inventé. Cette interprétation se heurte toutefois à toute une série d’obstacles techniques : à quel usage pouvaient servir, sur un champ de bataille, ces lourds lingots de bronze ? La distribution de pareils lingots à toute une armée n’aurait-elle pas provoqué d’importants problèmes de transport ? L’évocation des chariots réquisitionnés pour transporter les lingots de bronze rappelle d’ailleurs une anecdote similaire dans la description par Tite-Live du butin de guerre ramené par L. Papirius Cursor, au moment de son triomphe sur les Samnites en 293 : par la suite, une partie fut d’ailleurs directement distribuée aux soldats, ce qui confirme ce qu’a pu être la nature du stipendium à l’origine (la distribution aux soldats d’une partie du butin)14. Or, la description du butin de 293 est probablement authentique, car elle repose sans doute sur des compte-rendus triomphaux (acta triumphalia et tabulae triumphales) qui peuvent très bien remonter au début du iiie siècle15. Enfin, l’anecdote de 406 évoque également un épisode similaire présent chez Xénophon au sujet de la monnaie spartiate créée par Lycurgue, tellement lourde qu’« il faudrait un chariot pour la transporter » : la ressemblance pourrait ainsi faire songer, à propos du témoignage de Tite-Live, à une reconstruction érudite due à quelque annaliste qui connaissait les lettres grecques16. Mais l’anecdote n offre en aucun cas une garantie d’authenticité au récit livien sur la perception du tributum et le paiement du stipendium sous forme de lingots de bronze dès la fin du ve siècle av. J.-C.
7En fait, C. Nicolet avait déjà souligné la nécessité de voir dans l’aes equestre versé aux equites equo publico et dans le stipendium versé aux fantassins deux institutions contemporaines : dans les deux cas, il s’agit bien d’une solde financée par le tributum payé par les citoyens (le stipendium n’est d’ailleurs rien d’autre qu’un aes militare, comme l’aes equestre17). « Qu’une telle institution, pour les cavaliers comme les fantassins, date de la fin du ve siècle, est peu croyable. D’abord, les expressions comme aes militare et aes equestre ne peuvent avoir de sens avant l’introduction de la monnaie de bronze à Rome : et l’on peut douter, après les études récentes, que celle-ci ait été utilisée sous une forme commode et généralisée avant la fin du ive siècle »18. D’autre part, tous les indices semblent indiquer que l’aes equestre n’a commencé à être versé aux cavaliers romains qu’après l’annexion de Capoue et l’adoption d’un « modèle campanien ». Mais l’argument le plus décisif est fourni par la numismatique : les plus anciennes monnaies de bronze à Rome ne peuvent dater, comme nous l’avons vu, que des deux dernières décennies du ive siècle au plus tôt. Or, le versement du stipendium, et le paiement correspondant du tributum, ne peuvent avoir existé sans l’usage d’une monnaie. P. Marchetti avait d’ailleurs justement remarqué que « si le stipendium avait été institué dès la fin du ve siècle, il serait inouï que la monnaie proprement dite ne fit, elle, son apparition que près de trois quarts de siècle plus tard »19.
8L’épisode de la guerre contre Véies contient d’ailleurs un certain nombre d’anticipations qui évoquent fortement des réalités de la fin du ive siècle : en 403, un Appius Claudius aurait déjà défendu, au nom de la concordia ordinum et contre l’avis des tribuns, les mérites du stipendium qui permettait de maintenir les hommes en campagne de façon prolongée (les tribuns auraient tenté de s’y opposer à cause de la levée du tributum qui en était le corollaire)20. F.-H. Massa-Pairault a relevé « la valeur “prémonitoire” de l’épisode par rapport aux mesures qui seront prises par Rome à la fin du ive siècle »21. De plus, l’Appius Claudius de 403 possède de nombreux traits qui évoquent celui de 312 : la morgue aristocratique (Liv., V, 2, 13 : vimm imbutum iam a iuventute certaminibus plebeis) ; l’autorité sur les plébéiens malgré cette morgue (V, 7, 1 : par iam etiam in contionibus erat Appius tribunis plebeis) ; le souci du rétablissement de la concordia (ordinum) (V, 3, 10 ; 7, 1 ; 7, 10). Le long plaidoyer de cet Appius Claudius en faveur du stipendium n’est pas sans rappeler, d’ailleurs, celui prêté à Servius Tullius en faveur du tributum (Dion. Hal., IV, 9, 6-7 : cf. supra p. 365, n. 66) : dans les deux cas, l’apparition du nouvel impôt a suscité une violente opposition ; mais Appius Claudius justifie la solde et l’impôt au nom de la concordia, alors que Servius Tullius justifie le tributum au nom de l’« égalité géométrique » et de la proportionnalité des droits et des devoirs. Dans les deux cas, on retrouve par conséquent des thèmes politiques et idéologiques de la fin du ive siècle22. D’autre part, « l’épisode de la guerre de Véies a également valeur d’exemple pour l’établissement de la première solde des cavaliers » (F.-H. Massa-Pairault, ibid.), ce qui, d’après Tite-Live, vit le triomphe des idées d’Appius Claudius (V, 3, 10 ; 7, 1) : or nous avons vu que la censure d’Appius Claudius Caecus, en 312, aboutit selon toute apparence à la création de 12 nouvelles centuries d’equites equo publico, auxquels on accorda (sans doute pour la première fois) une indemnité sur le modèle campanien. Enfin, l’épisode de 403 se réfère à la concordia qui n’a fait l’objet d’un véritable culte public à Rome qu’à partir de 304, lorsque l’édile Cn. Flavius lui consacra une chapelle en bronze sur le Comitium et que le censeur Q. Fabius Rullianus institua la première transvectio equitum pour les nouvelles centuries équestres23.
9L’épisode de la création du stipendium, ainsi que celle du tributum, au cours de la guerre contre Véies, doit par conséquent être considéré comme légendaire, ou en tout cas fortement anachronique24. Certes, cette légende peut s’appuyer, comme toute légende, sur un quelconque fond de vérité : le souvenir par l’annalistique des premières transformations militaires décidées à cette occasion, mais peut-être aussi de la première distribution au peuple par les patres des fruits de la victoire (les terres de l’ager Veientanus, mais aussi le butin de guerre lui-même), a pu faire reporter à la fin du ve siècle l’adoption d’une mesure qui n’a pu avoir été introduite que près d’un siècle plus tard. Chez Tite-Live (IV, 59, 9-11), le récit de la création du Stipendium commence d’ailleurs par la prise d’Anxur et son pillage. D’après Pline l’Ancien, qui s’inspire de Varron, le stipendium serait l’équivalent du stipis pondus, le poids d’une stips25 ; le mot signifie aussi, selon H. Zehnacker, « l’action de stipem pendere, de peser une stips, et le transfert qui en résulte. Quant à la stips elle-même, c’est primitivement un tas, comme le montre le verbe stipare, « entasser », et donc un tas de bronze »26 ; ce « tas de bronze » a très bien pu désigner, à l’origine, les armes prises à l’ennemi ou, d’une manière plus générale, le produit du butin dont les parts étaient pesées avant d’être partagées entre les soldats, peut-être sous forme de lingots de bronze prémonétaires27. C. Gatti supposa ainsi que le stipendium distribué en 406 avant le début de tout véritable monnayage romain, l’aurait été sous forme d’aes rude, c’est-à-dire de bronze brut pesé28. Comme l’avait noté P. Marchetti, « toute une évolution a dû se produire depuis le siège de Véies jusqu’à l’époque des guerres samnites, quand apparaissent véritablement le tributum et le stipendium, en même temps que la monnaie »29 : l’institution de la solde sous une forme monétaire a en effet pu être précédée par des distributions en nature prélevées sur le butin, à l’image des récompenses distribuées en 343 à P. Decius Mus et à ses soldats30. Mais la mutinerie, l’année suivante, de cette même armée, dont les soldats convoitaient les terres laissées aux chevaliers campaniens, tout en se plaignant du poids injuste des dettes qui accablaient le citoyen romain chargé de financer lui-même son propre armement, prouve en elle-même qu’un stipendium régulier n’avait pas encore été institué à cette date-là31. Encore une fois, un stipendium régulier qui fût autre chose qu’une simple distribution en nature du butin pris à l’ennemi n’a pu avoir été institué qu’avec la levée régulière du tributum et la création de la première monnaie romaine, vers la fin du ive siècle.
10Précisément, on a beaucoup discuté de la signification des premières plaques d’aes signatum et des premières pièces d’aes grave : certains n’ont voulu y voir que des étalons de poids destinés à évaluer la valeur des choses, et notamment les fortunes dans le cadre des opérations du census ; le nombre trop limité des exemplaires retrouvés empêcherait d’imaginer qu’ils aient pu faire l’objet d’une importante circulation, comme l’induiraient le versement d’un tributum par tous les citoyens et la distribution d’un stipendium aux soldats de la légion32. Mais il s’agit surtout d’un argument e silentio : le fait qu’il s’agisse d’une époque très reculée et que le bronze a toujours été réutilisé et refondu sous d’autres formes, peut expliquer la relative rareté des exemplaires retrouvés et n’interdit pas l’existence initiale d’un nombre bien plus important d’unités, qui ont pu avoir été destinées à une véritable circulation monétaire. De plus, comme nous le verrons plus loin, l’évaluation des fortunes par le census sous une forme monétaire est sans doute à mettre en rapport avec le paiement du tributum. Enfin, parmi les premières séries d’aes signatum, on a retrouvé plusieurs exemplaires qui représentent des éléments caractéristiques de l’armement de la légion manipulaire et qui datent des premières décennies du iiie siècle au plus tard (pl. V, a et b)33 : on y voit par exemple l’épée courte du légionnaire (le glaive), ou encore le long bouclier ovale (le scutum) présenté de face et de revers, qui correspondent tous deux à la description qu’en a faite Polybe34 ; or nous avons vu que l’adoption du scutum est intimement liée à l’introduction de la tactique manipulaire, vers la fin du ive siècle.
11La véritable raison de l’institution de la première monnaie à Rome serait donc militaire, et devrait être mise en rapport avec la création du stipendium, en relation avec la réforme manipulaire qui introduisit dans les rangs de l’armée romaine des citoyens qui n’auraient pas pu autrement financer eux-mêmes leur propre armement35. Ainsi pour P. Marchetti, « la monnaie romaine est l’instrument d’une armée qui, pas à pas, a conquis l’Italie. Parce qu’elle servait à financer le stipendium, elle était devenue indispensable dès lors que les soldats ne combattaient plus pour défendre leur patrie, mais pour étendre l’ager publicus »36.
12Si institutionnellement l’adoption de l’organisation manipulaire, la création du système « servien » des cinq classes censitaires, l’introduction du stipendium et du tributum, et l’apparition du premier véritable monnayage romain sont toutes ensemble liées entre elles, alors ces innovations doivent se rapporter chronologiquement au même moment, c’est-à-dire aux deux dernières décennies du ive siècle, autour de 311, lorsque la structure manipulaire de l’armée romaine est définitivement attestée par la création de nouveaux tribuns militaires pour quatre légions (probablement 24 en tout), et lorsque la première monnaie romaine de bronze commence elle aussi à être attestée : comme le remarquait en effet P. Marchetti, sur cette question, « réalités monétaires, politiques, militaires, censitaires, sont inséparables »37.
13Si le cadre dans lequel a été perçu le tributum a été dès le début la tribu (tributum dictum a tribubus), il est vraisemblable qu’il en allait dès lors de même pour la mobilisation de la légion manipulaire (dilectus), selon la procédure décrite par Polybe (VI, 20, 1-7) :
Γενομένης δὲ τῆς διαιρέσεως καὶ καταστάσεως τῶν χιλιάρχων τοιαύτης ὥστε πάντα τὰ στρατόπεδα τοὺς ἴσους ἔχειν ἄρχοντας, μετὰ ταῦτα καθίσαντες χωρίς ἀλλήλων κατὰ στρατόπεδον κληροῦσι τὰς φυλὰς κατὰ μίαν, καὶ προσκαλοῦνται τὴν ἀεὶ λαχοῦσαν. Ἐκ δὲ ταύτης ἐκλέγουσι τῶν νεανίσκων τέτταρας ἐπιεικῶς τοὺς παραπλησίους ταῖς ἡλικίαις καὶ ταῖς ἕξεσιν. Προσαχθέντων δὲ τούτων λαμβάνουσι πρῶτοι τὴν ἐκλογὴν οἱ τοῦ πρώτου στρατοπέδου, δεύτεροι δ’ οί τοῦ τετάρτου. Πάλιν δ’ ἄλλων τεττάρων προσαχθέντων λαμβάνουσι πρῶτοι τὴν αἵρεσιν οἱ τοῦ δευτέρου στρατοπέδου καὶ ἑξῆς οὕτως, τελευταῖοι δ’ οἱ τοῦ πρώτου. Μετὰ δὲ ταῦτα πάλιν ἄλλων τεττάρων προσαχθέντων πρῶτοι λαμβάνουσιν οἱ τοῦ τρίτου στρατοπέδου, τελευταῖοι δ’ οί τοῦ δευτέρου. Καὶ ἀεὶ κατὰ λόγον οὕτως ἐκ περιόδου τῆς ἐκλογῆς γινομένης παραπλησίους συμβαίνει λαμβάνεσθαι τοὺς ἄνδρας εἰς ἕκαστον τῶν στρατοπέδων.
« La répartition et l’affectation des tribuns une fois faites de façon à donner à chaque légion le même nombre d’officiers, ceux-ci vont alors s’asseoir en groupes séparés, par légion ; ils tirent au sort les tribus une à une, et les appellent dans l’ordre du tirage. Dans chaque tribu, ils sélectionnent quatre jeunes soldats qui ont à peu près le même âge et la même stature. On les fait approcher, et les officiers de la première légion en sélectionnent un d’abord, puis les officiers de la seconde légion, ensuite ceux de la troisième, enfin ceux de la quatrième. On fait approcher quatre autres soldats, et cette fois les officiers de la seconde légion choisissent en premier, et ainsi de suite, pour finir par ceux de la première légion. Ensuite on en fait approcher quatre autres, et cette fois les officiers de la troisième légion choisissent en premier, pour finir par ceux de la deuxième. Et le choix continuant de se faire ainsi à tour de rôle, dans cet ordre, il en résulte que le recrutement de toutes les légions est à peu près le même »38.
14La minutieuse description rapportée par Polybe est d’ailleurs confirmée par un court passage de Tite-Live (IV, 46, 1), qui place toutefois de façon anachronique ce dilectus par tribu en 418 av. J.-C.39 :
Dilectum haberi non ex toto passim populo piacuit : decem tribus sorte ductae sunt ; ex iis scriptos iuniores duo tribuni ad bellum duxere.
« On décida qu’il n’y aurait pas de dilectus en prenant de tous côtés à partir du populus tout entier, et on tira au sort dix tribus. Les iuniores qui ont été enrôlés à partir de celles-ci furent conduits à la guerre par les deux tribuns ».
15Ainsi, comme le tributum, le dilectus de la légion manipulaire se pratiquait dans le cadre de la tribu (κληροῦσι τὰς φυλὰς κατὰ μίαν, καὶ προσκαλοῦνται τὴν ἀεὶ λαχοῦσαν. Ἐκ δὲ ταύτης ἐκλέγουσι τῶν νεανίσκων τέτταρας...). Polybe rédige certes son Histoire au iie siècle av. J.-C, mais de nombreux commentateurs ont vu dans ce passage le reflet d’une source bien plus ancienne, peut-être un manuel destiné aux tribuns militaires et datant du iiie siècle40 : il s’agit en effet de la description du recrutement des soldats pour les quatre légions qui composèrent l’armée manipulaire à partir de 311, et avant que le nombre habituel de légions annuelles ne fût augmenté, à la veille de la seconde guerre punique41. D’autre part, le remplacement de la phalange de hoplites par l’armée manipulaire a logiquement entraîné une modification de la procédure de recrutement : auparavant, dans le cadre de la phalange, les citoyens étaient « appelés » ou « convoqués » par centurie (ou par curie ?) pour former la classis42 ; mais à partir du moment où il y eut une armée manipulaire, les citoyens furent « choisis » (lecti) par tribu pour former la legio (c’est-à-dire l’armée de ceux qui ont été « choisis », et non plus seulement « appelés »). Le dilectus appartient donc en propre à la structure de l’armée manipulaire, pour laquelle l’unique procédé de recrutement qui nous soit connu est celui qui est décrit par Polybe et qui se déroulait dans le cadre de la tribu, comme le tributum. Le tributum et le dilectus étaient d’ailleurs tous les deux une forme jugée équivalente de contribution des citoyens à l’effort collectif, où l’argent des uns servait à financer le stipendium des autres43. Et si le tributum a été dès l’origine prélevé dans le cadre de la tribu, le dilectus auquel il était finalement lié devait logiquement se dérouler dans un cadre identique. Autrement dit, à partir du moment où fut définitivement instituée l’armée manipulaire, sans doute en 311, la tribu a dû devenir le cadre normal dans lequel se déroulaient aussi bien le prélèvement du tributum que les opérations du dilectus.
16D’autre part, les charges aussi bien fiscales (le paiement du tributům) que militaires (le dilectus) ne pesaient pas de la même façon sur tous les citoyens : en vertu du principe de l’« égalité géométrique » qui sous-tend le système censitaire romain, les citoyens riches devaient effectivement contribuer davantage (en impôt, mais aussi en nombre de campagnes militaires) que les citoyens pauvres44. D’après Tite-Live (I, 43, 13), le tributum est un impôt calculé proportionnellement à la fortune recensée : aequaliter ex censu. La définition du tributum donnée par Varron indique expressément que celui-ci était prélevé tributim a singulis pro portione census : cela signifie que chaque contribuable versait le tributum dans le cadre de sa tribu et en proportion de son cens45. Ce principe simple a été rendu incompréhensible par les explications fractionnées et apparemment contradictoires de Denys d’Halicarnasse. Dans son exposé des réformes serviennes, l’historien grec décrit successivement deux procédures différentes de perception du tributum et d’organisation de la levée :
- IV, 14, 1-2 ; IV, 15, 2-3 : au moment de la création des quatre premières tribus et des pagi, Servius Tullius ordonna à leurs habitants de ne plus changer de domicile et d’effectuer les opérations de la levée et le paiement de l’impôt (τάς τε καταγραφὰς τῶν στρατιωτῶν καὶ τὰς εἰσπράξεις τῶν χρημάτων) uniquement dans le cadre de leur circonscription ; à la tête de chacune d’elles (tribus et pagi), il plaça un responsable (ὥσπερ φυλάρχους ἢ κωμάρχας46) ;
- IV, 19, 1-4 : après avoir réparti les citoyens en cinq classes et 193 centuries, Servius Tullius leva les troupes en fonction de la répartition des centuries et perçut l’impôt de chacun en fonction de son census (ταύτη τῇ διακοσμήσει χρησάμενος τὰς μὲν τῶν στρατιωτῶν καταγραφὰς κατὰ τὴν διαίρεσιν ἐποιεῖτο τὴν τῶν λόχων, τὰς δὲ τῶν εἰσφορῶν ἐπιταγὰς κατὰ τὰ τιμήματα τῶν βίων) ; le témoignage de Denys rejoint ainsi celui de Tite-Live (I, 42, 5), qui écrit que le cens créé par ce roi était une institution « très heureuse pour le salut futur de l’empire », car « il répartissait les charges civiles et militaires non plus par tête, comme auparavant, mais d’après la fortune » (censum enim instituit, rem saluberrimam tanto futuro imperio, ex quo belli pacisque munia non viritim, ut ante, sed pro habitu pecuniarum fierent) ; mais Denys est plus précis et propose un exemple : s’il fallait lever 10 ou 20.000 hommes, on répartissait ce nombre entre les 193 centuries, chacune devant fournir le même nombre d’hommes, soit l/193e du total ; en conséquence, tous les citoyens contribuaient en proportion de leur cens (τὸ ἐκ τῆς τιμήσεως ἐπιβάλλον) : comme les citoyens des centuries des classes les plus riches étaient moins nombreux que ceux des classes plus pauvres, mais distribués en un plus grand nombre de centuries, « ils étaient obligés de servir plus souvent sans interruption, et de payer des taxes plus importantes » (συνέβαινεν οὖν τοῖς τὰς μεγίστας ἔχουσιν οὐσίας, ἐλάττοσι μὲν οὖσιν, εἰς πλείονας δὲ λόχους μεμερισμένοις, στρατεύεσθαί τε πλείους στρατείας οὐδέποτε ἀναπαυομένους καὶ χρήματα πλείω τῶν ἄλλων εἰσφέρειν τοῖς δὲ τὰ μέτρια καὶ μικρὰ κεκτημένοις, πλείοσιν οὖσιν ἐν ἐλάττοσι λόχοις, στρατεύεσθαί τ’ ὀλιγάκις καὶ ἐκ διαδοχῆς καὶ βραχείας συντελεῖν εἰσφοράς) ; si bien que « ceux qui n’avaient pas de fortune suffisante pour leur subsistance étaient exempts de toute charge » (τοῖς δ’ ἐλάττω τῶν ἰκανῶν κεκτημένοις ἀφεῖσθαι πάντων ὀχληρῶν)47.
17L’inégale répartition des citoyens parmi les 193 centuries aboutit ainsi à une répartition des charges en fonction de la richesse, où les plus riches sont aussi les plus imposés. Mais pour P. Marchetti, Denys « a confondu deux systèmes historiquement distincts : la perception du tribut répartie sur les 193 centuries serviennes mais réalisée par tribus et la levée de contributions collectives par centuries exclusivement. Or, des deux, le second ne peut être que le plus ancien et date d’une époque où les cinq classes ne devaient pas encore exister : chaque centurie fournit en effet le même nombre d’hommes (τὸ ἐπιβάλλον) et contribue pour une part égale à la levée globale et à l’entretien »48. Cet historien rejette en fait l’idée que le tributum ex censu ait pu être un impôt de répartition, et soutient au contraire l’interprétation traditionnelle qui en faisait un impôt de quotité (selon lui, 1 % de la fortune estimée)49. La proportionnalité des charges en fonction de la fortune est pourtant l’une des caractéristiques du système « servien » sur laquelle les sources reviennent très souvent et qui a été attentivement étudiée par C. Nicolet50. Pour ce qui est du tributum, celui-ci a montré qu’« il est très peu vraisemblable qu’<il> ait été un impôt de quotité au taux fixé une fois pour toutes » : d’abord, « parce qu’un tel impôt est tout à fait étranger à la logique des fiscalités anciennes : on n’en connaîtrait aucun équivalent dans le monde grec ou hellénistique » ; de plus, « le tributum est par définition un impôt non permanent » dont le montant est variable ; enfin, « la logique même de la procédure de décision et de perception du tribut », telle qu’elle est décrite par Denys, « excluait même formellement une quotité fixe »51.
18En fait, les deux systèmes décrits par Denys ne sont pas forcément incompatibles (d’autant que l’impôt par tête « préservien » dont parlent les sources n’a en fait jamais existé52) : lors du census, après avoir évalué les données chiffrées (nombre de citoyens, classes d’âge, fortunes), les censeurs répartissaient d’abord les citoyens dans les différentes tribus, puis attribuaient à chacun sa place (ordo) dans une des 193 centuries en fonction de sa fortune et de son âge. Cette procédure est d’ailleurs présentée par Cicéron dans un passage du De legibus, peut-être inspiré des tabulae censoriae (De leg., III, 7) :
Censoris populi aevitates, suboles, familias pecuniasque censento (...), populique partis in tribus discribunto, exin pecunias, aevitates, ordines partiunto (...).
« Que les censeurs recensent dans le peuple les classes d’âge, les descendants, les serviteurs et les fortunes (...) ; qu’ils distribuent les différentes subdivisions du peuple dans les tribus, après quoi, qu’ils répartissent les fortunes, les âges et les ordres (...) ».
19Dans son plaidoyer Pro Flacco, Cicéron répète l’idée que le peuple était divisé tributim et centuriatim, « d’après l’ordre, la classe et l’âge »53. Chaque tribu pouvait ainsi comprendre un échantillon de chacune des 193 centuries : aussi la charge de l’impôt (tributum) ou celle de la levée (dilectus) pouvait-elle être prélevée au sein de chacune d’elles selon le mécanisme décrit par Denys et par Polybe54. La tribu était par conséquent devenue une circonscription fiscale du territoire romain, au sein de laquelle l’unité fiscale de base était la centurie ou la classe censitaire55 : celles-ci n’avaient donc plus comme fonction que d’indiquer à chacun la proportion dans laquelle il devait contribuer à l’effort collectif. D’ailleurs, le cadre physique dans lequel devait se dérouler la levée militaire (dilectus) et la levée de l’impôt (tributum) était désormais la tribu, et non plus la centurie ou la curie. Mais « à l’intérieur de chaque tribu, qui comprenait des classes et des centuries, la répartition se serait faite en fonction du census »56. D’après Denys (IV, 19, 1), l’opération commençait par « une estimation globale et anticipée des sommes nécessaires, c’est-à-dire l’opération qui prélude à un impôt de répartition »57. Car comme l’explique Tite-Live (V, 10, 5), le montant du tribut dépendait du nombre de soldats mobilisés, auxquels il fallait verser une solde58. Autrement dit, pour chaque levée de soldats, les autorités (le Sénat ou les consuls) fixaient à l’avance le nombre d’hommes à lever, puis la somme d’argent à réunir, et répartissaient ces charges en parts égales entre les tribus : c’est ainsi par exemple que Tite-Live présente la mobilisation organisée en 295 par le consul Q. Fabius Rullianus, précisément après un discours devant les comices tributes59. Dans chaque tribu, les tribuni militum et les tribuni aerarii60 procédaient alors au dilectus et à la levée du tributum en convoquant les citoyens selon leur classement censitaire, et en prélevant le nombre d’hommes et le montant du tribut selon la méthode décrite par Denys : chaque centurie (ou chaque classe) au sein de chaque tribu contribuait à part égale, quel que fût le nombre de citoyens qui y étaient inscrits ; « ensuite, à l’intérieur de chaque unité (centurie ou classe), ce montant se serait réparti par tête en fonction du census »61. Les deux opérations (le dilectus et le tributum) semblent d’ailleurs avoir été simultanées, puisque le tributum servait exclusivement à financer le Stipendium qui était versé à ceux qui avaient été sélectionnés dans la légion. La simultanéité des deux opérations est en fait explicitement suggérée par Tite-Live à propos d’un épisode qu’il place, là encore, à l’époque de la guerre contre Véies (V, 10, 3) :
et Romae simul dilectu, simul tributo conferendo laboratum est...
« et à Rome, simultanément, le dilectus et la collecte du tributum furent pénibles... »
20Inversement, l’absence de levée entraînait automatiquement l’absence de tributum, comme le montre Tite-Live à propos de l’année 347 (VII, 27, 4) :
Levatae maxime res, quia tributo ac dilectu supersessum.
« La situation fut grandement améliorée, parce qu’on a sursis au tributum et au dilectus ».
21Toutefois, si chaque tribu devait contribuer à part égale, il fallait que la répartition des hommes et des richesses entre chacune d’elles fût à peu près équivalente. En étudiant de près le vocabulaire utilisé par Denys, C. Nicolet a rapproché le mécanisme romain du prélèvement du tributum dans le cadre de la tribu du système athénien des symmories : là aussi, chaque symmorie devait contribuer à part égale au paiement de l’impôt (συμμορία signifie littéralement « partie solidaire »62). Or, pour décrire le mécanisme romain de la levée du tributum, Denys emploie précisément les termes de συμμορία et d’εἰοχποπά : d’abord à propos des quatre nouvelles tribus territoriales créées par Servius Tullius et qui devaient, d’après Denys (IV, 14, 2), servir de cadre à la levée et à la perception du tributum : « et, à la tête de chacune de ces tribus, il plaça un « hégémôn de la symmorie » (ἠγεμόνας ἐφ’ ἑκάστης ἀποδείξας συμμορίας), semblable à un chef de tribu (φύλαρχος) ou un chef de village, à qui il ordonna de connaître chaque maison de chaque citoyen » ; la symmorie désigne par conséquent dans ce passage la tribu (φυλὴ) ; ensuite, le mot symmorie est encore utilisé par Denys (IV, 18, 2), mais cette fois pour désigner les classes censitaires (ἐγένοντο δὴ συμμορίαι μὲν ἕξ, ἅς Ῥωμαῖοι καλοῦσι κλάσεις), ce qui confirmerait d’ailleurs une hypothèse d’E. Gabba, selon qui la répartition des charges se serait faite entre les classes plutôt qu’entre les centuries63. Les chefs de symmorie (ἠγεμὸνες συμμορίας) ou les φύλαρχοι dont parle Denys correspondent très probablement aux curatores tribuum mentionnés dans la formule de convocation des comices centuriates par les censeurs, d’après le fragment des tabulae censoriae cité par Varron64 : ce dernier indice tend encore à confirmer l’idée que la source de Denys, pour tout ce passage consacré aux institutions attribuées à Servius Tullius, a pu provenir directement de documents censoriaux qui décrivaient ces institutions dans leur forme primitive, c’est-à-dire telles qu’elles existaient au moment de leur apparition.
22Pour C. Nicolet, l’emploi par Denys de ce vocabulaire athénien n’est pas un hasard, car le mot grec symmorie semble avoir été d’un usage assez rare à l’époque hellénistique : Denys aurait par conséquent choisi ce vocabulaire, car il voulait « certainement laisser croire à son lecteur grec cultivé que le système romain des classes et des tribus ressemble au système athénien des symmories »65. La vision hellénisante de l’histoire romaine chez Denys, qui cherche il est vrai, et à toute force, de donner de Rome l’image d’une « cité grecque », pourrait effectivement sur cette question traduire une réalité historique originelle. L’apparition puis le développement du système des symmories à Athènes au ve et surtout au ive siècle auraient ainsi exercé une influence sur la mise en place du mécanisme du tributum à Rome à la fin du ive siècle. Or, ce système était le seul connu, dans l’Antiquité, qui permettait d’appliquer un impôt de répartition proportionnel à la fortune de chaque citoyen : la levée du tributum à Rome pouvait ainsi avoir pris, au moins à l’origine, la même forme que celle de l’είσφορά à Athènes où, comme l’a expliqué C. Nicolet, « chaque symmorie comportait des citoyens de fortune variable, à la fois des riches et des pauvres. À l’intérieur de chaque symmorie, ces citoyens payaient chacun proportionnellement à leur timèma (census). Le système était simple et souple ; il facilitait incontestablement les calculs »66.
23De même, la procédure du recrutement militaire romain décrite par Polybe suppose que chaque tribu comprenait, au moins à l’origine, non seulement à peu près le même nombre d’hommes, mais aussi une proportion comparable de citoyens des différentes classes censitaires. Certes, l’historien grec ne dit pas explicitement que toutes les tribus fournissaient le même nombre d’hommes, mais le principe du tirage au sort entre les tribus, où il arrivait parfois que seules certaines tribus étaient sollicitées (surtout en cas de tumultus), rendait nécessaire que chaque tribu fût capable de fournir à peu près la même quantité d’hommes et la même proportion de hastati, de principes, de triarii et de troupes légères67. Le système qu’il décrit, celui du tirage au sort entre tribus, laisse par conséquent supposer que les tribuns devaient choisir au sein de chaque tribu à peu près le même nombre d’hommes pour chacun des ordines qui composaient l’infanterie de la légion manipulaire (hastati, principes, triarii, etc.). Comme l’appartenance à chacun de ces ordines était déterminée par le cens (les principes et les triarii étaient choisis parmi les iuniores et les seniores de la première classe, et ainsi de suite), la répartition des citoyens entre les cinq classes (discriptio classium) devait être, au moins à l’origine, à peu près la même dans chacune des tribus. Certes, au dernier siècle de la République, la plus grande inégalité règnait entre les tribus, aussi bien par leur superficie que par leur population. Mais C. Nicolet suggère qu’« à l’origine, il se peut bien, au contraire, que l’on ait veillé à maintenir une égalité approximative entre ces subdivisions de la cité. Dans ce cas, chaque tribu romaine, comme chaque symmorie athénienne, aurait eu à fournir le même contingent et la même somme en cas de guerre »68.
24Le choix de la tribu comme cadre de recrutement de la légion, mais aussi comme cadre de prélèvement du tributum, rendit par conséquent nécessaire une répartition plus homogène des citoyens dans les différentes tribus : c’est sans doute dans cette perspective qu’il faut comprendre, comme l’avait d’ailleurs déjà proposé Th. Mommsen, la répartition des humiles à travers toutes les tribus par le censeur Appius Claudius Caecus, vers 312 ou 31169. Nous avons en effet vu que cette réforme coïncide avec une réorganisation du système censitaire (au moins deux nouvelles classes et l’établissement d’une première échelle censitaire sous une forme monétaire), qui est elle-même liée à la création de l’armée manipulaire. Celle-ci rendit nécessaire le paiement d’un Stipendium au légionnaire et donc l’institution du tributum, qui coïncident à leur tour au premier monnayage romain du bronze. La tribu est devenue à ce moment-là la circonscription au sein de laquelle on décida de lever les troupes et l’impôt, parce que le territoire romain était désormais devenu trop étendu et trop peuplé pour que l’on puisse continuer à organiser ces levées au sein d’une seule unité territoriale comprenant tout l’empire, ou au sein du vieux système des curies rendu obsolète par les premières expansions territoriales et l’intégration de nouveaux citoyens.
25Mais pour rendre le système de répartition efficace, il fallut commencer par équilibrer les différentes circonscriptions territoriales : les humiles, qui devaient constituer le groupe social le plus nombreux, furent alors également inscrits dans toutes les tribus, y compris les tribus rurales ; chacun fut inscrit, selon Diodore, « dans la tribu de son choix », ce qui laisse supposer que les censeurs abandonnèrent les distinctions juridiques archaïques entre propriétaires et non-propriétaires, ou entre adsidui et proletarii, et prirent en compte le lieu réel de résidence pour l’inscription dans la tribu70.
26C’est d’ailleurs ce que suggère clairement le récit de Denys sur la réforme des tribus et des pagi organisée par Servius Tullius, qui aurait fait d’eux les cadres administratifs au sein desquels s’organisaient à la fois la levée des troupes et la perception de l’impôt (IV, 14, 1-2 et IV, 15, 2-3). Le témoignage de Denys est confirmé par un fragment du Papyrus d’Oxyrhynchos (XVIII, 2088) qui attribue également l’institution de la levée des soldats par tribus (ici appelées pagi) et celle du tributum à Servius Tullius :
...]exque pagis milites conquirebantur et tributum[...
«...et les soldats étaient recrutés à partir des pagi et le tributum... ».
27Là aussi, la levée militaire ainsi que le tributum semblent avoir été organisés ensemble dans le cadre de la tribu, et ont dû tout deux avoir été institués en même temps, puisque la tradition rapporte leur création simultanée à Servius Tullius.
28De même, Tite-Live attribue à ce roi non seulement la création des tribus en rapport avec le tributum, mais aussi l’invention de l’impôt proportionnel à la fortune, ce qui n’a pu être, en tout état de cause, qu’une innovation tardive (I, 43, 13). Or, si ces récits annalistiques sont tout aussi contaminés par les événements de la fin du ive siècle que celui sur la discriptio classium et la prétendue censure de Servius Tullius71 (tradition à laquelle se rattache également le Papyrus d’Oxyrhynchos), il y a des chances pour qu’ils donnent en fait une idée assez exacte de la réforme des tribus d’Appius Claudius en 312 (on peut même légitimement se demander si le roi Servius Tullius a effectivement introduit une réforme des tribus vers le milieu du vie siècle, et si la tradition qui nous est parvenue n’est pas entièrement une projection rétrospective des réformes de la fin du ive siècle). La seule chose qui semble sûre est qu’au moment de la censure d’Appius Claudius, les citoyens furent inscrits dans toutes les tribus en fonction de leur résidence.
29Toutefois, il n’est pas certain que le lieu de résidence ait été, à la suite de cette réforme, le seul critère retenu par les censeurs pour l’inscription d’un citoyen dans une tribu : celle-ci pouvait dépendre en dernier ressort de leur pouvoir arbitraire, puisque les tribus n’avaient pas toutes la même valeur ou la même réputation (surtout après la mesure de 304), et que les censeurs pouvaient en tirer partie pour changer de tribu (tribu movere) un citoyen qu’ils voulaient flétrir par une inscription infamante72. Il est par conséquent possible qu’à l’origine, lorsque la tribu remplaça la centurie ou la curie comme cadre du recrutement militaire et qu’elle devint l’unité fiscale pour la perception du tributum, les tribus aient connu un certain équilibre démographique auquel devaient veiller les censeurs73. Tel pourrait aussi avoir été l’objectif poursuivi par Appius Claudius Caecus, et la censure de Q. Fabius Rullianus, en rejetant en 304 les humillimi dans les quatre tribus « urbaines », n’a probablement pas modifié grand chose à cet équilibre, dans la mesure où les prolétaires n’étaient concernés ni par le tributum, ni par le service militaire74.
Notes de bas de page
1 Cf. P. Marchetti, “À propos du tributum romain : impôt de quotité ou de répartition ?”, dans Armées et fiscalité dans le monde antique, Paris, 1977, p. 118, n. 2.
2 La création du stipendium a entraîné celle du tributum : cet impôt fut institué pour pourvoir exclusivement à la solde, à tel point même qu’il arrive que stipendium désigne dans nos sources aussi bien la solde que le tribut destiné à la payer ; P. Marchetti, dans Armées et fiscalité, p. 107. Cf. C. Nicolet, Tributum. Recherches sur la fiscalité directe sous la République romaine, Bonn, 1976, passim (ouvrage résumé dans Id., Censeurs et publicains, p. 71-77).
3 E. Gabba, “Istituzioni militari e colonizzazione...”, dans RFIC, 103, 1975, p. 151-152 ; Id., “Assemblee ed esercito...”, dans Roma tra oligarchia e democrazia, 1989, p. 53-54 ; de même L. Loreto, dans A&R, 36, 1991, p. 194, qui s’appuie sur les travaux d’E. Gabba pour affirmer tranquillement que jusqu’aux opérations menées en Sicile pendant la première guerre punique, les cadres de la levée avaient été les centuries et non les tribus ; or c’est à la fois méconnaître les mécanismes sur lesquels repose l’organisation de l’armée manipulaire et ne pas tenir compte des arguments chronologiques bien plus nuancés avancés par E. Gabba.
4 J. Marquardt, De l’organisation militaire chez les Romains (Manuel des Antiquités romaines XI), Paris, 1891, p. 82-83 ; E. Gabba, “Leva per tribu e censo equestre”, dans Esercito e società, 1973, p. 147-149.
5 Pour le dilectus de 275 : Varr., Men., fr. 195 Cèbe (ap. Non., p. 28 L.) : Manius Curius consul, Capitolio cum dilectum haberet пес citatus in tribu civis respondisset, vendidit tenebriorem. Liv., Per., 14, 3 ; Curius Dentatus cos., cum dilectum haberet, eius qui citatus non responderat, bona primus vendidit. Val. Max., VI, З, 4 : Id factum imitatus Manius Curius consul, cum dilectum subito edicere coactus esset et iuniorum nemo respondisset, coniectis in sortem omnibus tribubus, Polliae, quae prima exierat, primum nomen urna extractum, citari iussit neque eo respondente bona adulescentis hastae subiecit. Quod ut illi nuntiatum est, ad consulis tribunal cucurrit collegiumque tribunorum appellavit. Tunc Manius Curius praefatus non opus esse eo cive rei publicae, qui parere nesciret, et bona eius et ipsum vendidit.
6 Cf. C. Nicolet, L’ordre équestre, 1, p. 66 ; Id., Le métier de citoyen, p. 136 ; D. Kienast, “Die politische Emanzipation der Plebs...”, dans BJ, 175, 1975, p. 87.
7 Liv., Х, 21, 3-4 : His nuntiis senatus conterritus iustitium indici, dilectum omnis generis hominum haberi iussit. Nec ingenui modo aut iuniores sacramento adacti, sed seniorum etiam cohortes factae libertinique centuriati.
8 Trad, d’après J. Collart, éd. de Varron, De lingua latina, Livre V, Paris, 1954, p. 117.
9 Liv., VIII, 8, 3 : voir texte et traduction supra p. 271. Cf. sur cette question : G. R. Watson, “The Pay of the Roman Army”, dans Historia, 7, 1958, p. 120 ; С. Nicolet, L’ordre équestre, 1, p. 41-42 ; P. Marchetti, dans Armées et fiscalité, p. 120.
10 E. Gabba, dans Armées et fiscalité, p. 19 (= Id., Del buon uso della ricchezza, p. 123) ; Id., dans Roma tra oligarchia e democrazia, p. 52.
11 Liv., IV, 59, 11 : Additum deinde omnium maxime tempestivo principum in multitudinem munere, ut, ante mentionem ullam plebis tribunorumve, decemeret senatus, ut stipendium miles de publico acciperet, cum, ante id tempus, de suo quisque functus eo munere esset. Cf. Diod., XIV, 16, 5 ; Flor., I, 6, 8 ; Zon. (D.С), 7, 20. Voir supra p. 274.
12 E. Gabba, dans Roma tra oligarchia e democrazia, p. 50-52 ; P. Marchetti, dans Armées et fiscalité, p. 117-118. Voir supra p. 275-277 et p. 289-291.
13 Liv., IV, 60, 6 : Patres bene coeptam rem perseveranter tueri ; conferre ipsi primi ; et, quia nondum argentum signatum erat, aes grave plaustris quidam ad aerarium convehentes speciosam etiam conlationem faciebant. Cf. R. M. Ogilvie, A commentary on Livy, p. 623 ; E. Gabba, dans Armées et fiscalité, p. 24 (= Id., Del buon uso della ricchezza, p. 128) ; F.-H. Massa-Pairault, dans Guerre et sociétés en Italie, 1986, p. 40-43 ; J.-C. Richard, “Réflexions sur le tribunat consulaire”, dans MEFRA, 102, 1990, p. 794-795.
14 Liv., X, 46, 5 et 15. Cf. L. Loreto, Un’epoca di buon senso, p. 89-91.
15 Cf. notamment T. Hölscher, dans MDAI(R), 85, 1978, p. 346 (= Id., Monumenti statali e pubblico, p. 41) ; K. J. Hölkeskamp, Die Entstehung der Nobilität, p. 236-238 ; E. La Rocca, “Linguaggio artistico e ideologia politica a Roma in età repubblicana”, dans G. Pugliese Carratelli éd., Roma e l’Italia : radices imperii, Milan (coll. Antica Madre), 1990, p. 353-354 ; F. Coarelli, dans Storia di Roma, II, 1, p. 171-177 (= Id., Revixit ars, p. 26-34).
16 Xénophon, République des Lacédémoniens, VII, 5-6 : « Lycurgue a établi une monnaie telle (X. songe probablement à des lingots de cuivre) que même une somme de dix mines entrant dans une maison ne saurait échapper ni aux maîtres ni aux serviteurs : elle tiendrait une grande place et il faudrait un chariot pour la transporter » (texte cité et traduit par M. Bar, dans RIN, 95, 1993, p. 286).
17 Gaius, Inst., IV, 27 : Nam et propter stipendium licebat ab eo qui distribuebat, nisi daret, pignus capere ; dicebatur autem ea pecunia quae stipendii causa nomine dabatur, aes militare. Varr., De vitapop. Rom. II, fr. 77 Riposati = 381 Salvadore (ap. Non., p. 853 L.) : stipendium appellabatur quod aes militi semenstre aut annuum dabatur. Cf. Liv., I, 43, 9 : Ad equos emendos dena milia aeris ex publico data...
18 С. Nicolet, L’ordre équestre, 1, p. 41. Voir supra p. 308-329.
19 P. Marchetti, dans Armées et fiscalité, p. 115.
20 Liv., V, 3, 1-7 ; V, 7, 1-13.
21 F.-H. Massa-Pairault, dans Guerre et sociétés en Italie, 1986, p. 42.
22 Fidèle à sa démarche, E. Gabba, dans Armées et fiscalité, p. 20 (= Id., Del buon uso della ricchezza, p. 124), estime que la présentation du problème du stipendium dans ce long discours d’Appius Claudius est marquée par des expériences bien postérieures et notamment par les polémiques qui accompagnèrent, vers le milieu du IIe s. av. J.-C, le service militaire continu loin de l’Italie, en Espagne. Toutefois, en évoquant le rapport entre service militaire prolongé, stipendium et tributum, le discours prêté à cet Appius Claudius présenterait, selon l’historien italien, le problème tel qu’il devait effectivement se poser dès la fin du Ve s. Mais en dehors de la question du stipendium et du tributum et de leurs rapports avec l’armée manipulaire et la monnaie romaine, les thèmes de la concordia et de l’« égalité géométrique » sont philosophiquement liés et sont probablement apparus à Rome dès la fin du ive siècle : voir infra p. 564-600.
23 Liv., IX, 46, 6 ; 46, 14-15 ; Plin., N.H., XXXIII, 19-20. A. Momigliano, “Camillus and the Concord”, dans CQ, 36, 1942, p. 111-120 (= Id., Secundo Contributo alla Storia degli Studi Classici, Rome, 1960, p. 95-104) ; J. Heurgon, Rome et la Méditerranée occidentale, p. 318-319 ; F.-H. Massa-Pairault, Recherches sur l’art et l’artisanat étrusco-italiques, p. 109-111. Voir infra p. 584-588.
24 Ainsi déjà C. Nicolet, L’ordre équestre, 1, p. 41 ; D. Kienast, dans BJ, 175, 1975, p. 103-104 ; P. Marchetti, dans Armées et fiscalité, p. 115-117.
25 Plin., N.H., XXXIII, 43 : (...) militum stipendia, hoc est stipis pondera (...). Cf. Varr., De ling. Lat., V, 182 : Militis stipendia ideo, quod eam stipem pendebant ; ab eo etiam Ennius scribit.
26 H. Zehnacker, dans Crise et transformation des sociétés archaïques, 1990, p. 319 ; cf. E. Peruzzi, Money in early Rome, 1985, p. 87-96.
27 Pour G. Piéri, L’histoire du cens, p. 136-137, qui s’appuie sur un texte de Festus (p. 320 L, s.v. Rodus vel raudus : in aestimatione censoria aes infectum rudus appellatar), « la stips désignait une espèce de lingots encore archaïques et était synonyme de raudus » ; il en déduit que « la solde militaire n’était pas comptée à ses origines en véritable monnaie, mais qu’elle devait consister en stipes, c’est-à-dire en lingots monétaires intermédiaires entre l’aes rude et le véritable aes signatum » (cf. aussi E. Cizek, Mentalités et institutions politiques romaines, p. 187). Cette reconstruction est élégante, mais ne s’appuie toutefois sur aucun véritable témoignage numismatique ; de plus, le texte de Festus n’établit pas formellement l’équivalence entre la stips et le raudus. Par contre, la création définitive d’un stipendium régulier et monétaire n’empêcha pas de voir continuer la pratique du partage du butin entre les soldats, qui venait ainsi se rajouter à la solde normale, comme en témoigne le récit de Tite-Live pour les années 295 et 293 (Liv., X, 30, 10 ; X, 46, 15).
28 С. Gatti, “Riflessioni sull’istituzione dello stipendium per і legionari romani”, dans Acme, 23, 1970, p. 131-135.
29 P. Marchetti, dans Armées et fiscalité, p. 120.
30 Liv., VII, 37, 1-3. Cf. P. Marchetti, dans Armées et fiscalité, p. 117. E. Peruzzi, Money in Early Rome, Florence, 1985, p. 131-149, analyse de façon identique l’épisode au cours duquel le roi Porsenna aurait présidé à la distribution de la solde à ses hommes, lorsqu’il a failli être assassiné par Mucius Scaevola (cf. Liv., II, 12, 7 : mais l’historicité de cet épisode est très douteuse).
31 Liv., VII, 38, 5-7.
32 Ainsi L. Pedroni, Nuove ricerche sulla prima monetazione di Roma, Naples, 1996, p. 39-40.
33 R.R.C., 7/1 et 8/1. Cf. R. Thomsen, Early Roman Coinage, I, p. 55-56 et fíg. 28 ; D. Kienast, dans BJ, 175, 1975, p. 103 et fig. 11.
34 Pol., VI, 23, 2-7.
35 Ainsi déjà P. Marchetti, “Numismatique romaine et Histoire”, dans CCG, IV, 1993, p. 27-28.
36 P. Marchetti, dans CCG, IV, 1993, p. 65.
37 P. Marchetti, dans CCG, IV, 1993, p. 28.
38 Trad. de R. Weil, dans Polybe, Histoires, Livre VI, Paris (C.U.F.), 1977, p. 96. Cf. W. Walbank, A Historical Commentary on Polybius, I, Oxford, 1957, p. 697-701.
39 L’anachronisme de cette levée par tribus en 418 a été attribué à l’influence de la gens Servilia par E. Gabba, dans Esercito e società, 1973, p. 148-149, n. 22.
40 E. Rawson, “The literary Sources...”, dans PBSR, 39, 1971, p. 13-23.
41 « Jusqu’en 218, Rome enrôlait normalement chaque année de guerre deux armées de deux légions chacune et pas davantage » : P. Marchetti, dans Armées et fiscalité, p. 109.
42 Ainsi Dion. Hal., IV, 18, 2 : Ἐγένοντο δὴ συμμορίαι μὲν ἕξ, ἅς Ῥωμαῖοι καλοῦσι κλάσεις, τὰς Ἑλληνικὰς κλήσεις παρονομάσαντες (ὃ γὰρ ἡμεῖς ῥῆμα προστακτικῶς σχηματίσαντες ἐκφέρομεν κάλει, τοῦτ’ ἐκεῖνοι λέγουσι κάλα, καὶ τὰς κλάσεις τὸ ἀρχαῖον ἐκάλουν καλέσεις). Le mot classis provient de calare, appeler (cf. clamare, clamor, darus...) : cf. В. Kübier, s.v. Classis, dans R.E., III, 2, 1899, col. 2630-2632 ; D. Kienast, dans BJ, 175, 1975, p. 94, n. 30 ; L. Amirante, Una storia giuridica di Roma, p. 23. D’après H. Jordan, “Quaestiones orthographicae latinае”, dans Hermes, 16, 1881, p. 56-57, calare n’était employé primitivement que par les comitia calata (= comices curiates ?), alors que pour les comices centuriates, on employait le mot vocare. Sur le rôle des curies dans le recrutement de la classis, voir infra p. 404-405.
43 Il n’est pas assuré si tous payaient effectivement le tributum, y compris ceux qui étaient enrôlés dans les légions et qui devaient percevoir ensuite le stipendium, ou si seuls le payaient ceux qui n’avaient pas été mobilisés : P. Marchetti, dans Armées et fiscalité, p. 124, estime que le tributum était payé par ceux qui n’avaient pas été mobilisés pour financer le stipendium de ceux qui étaient partis dans les légions ; C. Nicolet, dans Armées et fiscalité, p. 132, pense au contraire que les mobilisés payaient eux aussi le tributum, mais avaient l’avantage de recevoir la solde. E. Gabba, dans Armées et fiscalité, p. 19 (= Id., Del buon uso della ricchezza, p. 123) évoque toutefois un passage de Tite-Live qui suggère que le tributum était payé par « ceux qui restaient à Rome » (qui domi remanebant), alors que le stipendium n’était perçu que par les iuniores qui partaient en campagne dans les légions (Liv., V, 10, 4-5 : Omnium primum tribunis militum fuit dilectum haberi ; nес iuniores modo conscripti, sed seniores etiam coacti nomina dare, ut Urbis custodiam agerent. Quantum autem augebatur militum numerus, tanto maiore pecunia in stipendium opus erat, eaque tributo conferebatur, invitis conferentibus, qui domi remanebant, quia, tuentibus Urbem, opera quoque militari laborandum serviendumque rei publicae erat) ; mais il est vrai que ce passage n’indique pas explicitement si les mobilisés payaient ou non le tributum. Il reste un fragment obscur de Caton (ap. Fest., p. 268 L.) : Primanus tribunus apud Catonem <est, qui primae legioni tributum scribebat> : la phrase a été corrigée par Th. Mommsen (Le droit public, VI, 1, p. 218, n. 2 : Primanus tribunus erat qui primam legionem tributim scribebat), parce qu’il lui semblait qu’« un impôt fixé au profit d’une légion particulière est un non-sens » ; à moins que le texte fourni par Festus soit exact, et qu’à l’origine le tributum, payé par les non mobilisés, était immédiatement reversé aux mobilisés au moment du dilectus.
44 Cf. C. Nicolet, Le métier de citoyen, p. 133-135 et p. 210-213 ; Id., “L’idéologie du système centuriate...”, dans La filosofia greca e il diritto romano, Rome, 1976, p. 111-137 (= Id., Censeurs et publicains, p. 45-69).
45 Dans un passage corrompu et par conséquent difficilement compréhensible, Festus parle également du tributum ex censu (p. 500 L.) : Tributorum conlationem, cum sit alia in capita, illud ex censu, dicitur etiam quoddam temerarium, ut post Vrhem a Gallis captam conlatum est, quia proximis XV annis census † alius † non erat.
46 Dion. Hal., IV, 14, 1-2 : Ο δὲ Τύλλιος, ἐπειδὴ τοὺς ἑπτὰ λόφους ἑνὶ τείχει περιέλαβεν, εἰς τέτταρας μοίρας διελὼν τὴν πόλιν καὶ θέμενος ἐπὶ τῶν λόφων ταῖς μοίραις τὰς ἐπικλήσεις, τῇ μὲν Παλατίνην, τῇ δὲ Σοβοράνην, τῇ δὲ τρίτῃ Κολλίνην, τῇ δὲ τετάρτῃ τῶν μοιρῶν Ἰσκυλίνην, τετράφυλον ἐποίησε τὴν πόλιν εἰναι, τρίφυλον οὐσαν τέως· καὶ τοὺς ἀνθρώπους ἔταξε τοὺς ἐν ἑκάστῃ μοίρᾳ τῶν τεττάρων οίκοῦντας, ὥσπερ κωμήτας, μήτε μεταλαμβάνειν ἑτέραν οἴκησιν μήτ’ ἄλλοθί που συντελεῖν, τὰς τε καταγραφὰς τῶν στρατιωτῶν καὶ τὰς εἰσπράξεις τῶν χρημάτων τὰς γινομένας εἰς τὰ στρατιωτικὰ καὶ τὰς ἄλλας χρείας, ἃς ἕκαστον ἔδει τῷ κοινῷ παρέχειν, οὐκέτι κατὰ τὰς τρεῖς φυλὰς τὰς γενικάς, ὠς πρότερον, ἀλλὰ κατὰ τὰς τέτταρας τὰς τοπικὰς τὰς ὑφ’ ἑαυτοῦ διαταχθείσας ἐποιεῖτο, ἡγεμόνας ἐφ’ ἑκάστης ἀποδείξας συμμορίας, ὥσπερ φυλάρχους ἢ κωμάρχας, οἶς προσέταξεν εἰδέναι ποίαν οἰκίαν ἕκαστος οἰκεῖ : « Tullius, après avoir entouré les sept collines par un mur, divisa la cité en quatre régions qu’il nomma d’après les collines, appelant la première Palatina, la deuxième Suburana, la troisième Collina et la quatrième Esquilma. Il fit ainsi en sorte que la cité fût divisée en quatre tribus, alors qu’auparavant il n’y en avait que trois. Et il ordonna que les citoyens qui habitaient chacune des quatre régions, de même que les habitants des villages, ne devraient ni changer de domicile ni se faire enregistrer ailleurs ; les levées de troupes et les perceptions d’impôts accomplies à des fins militaires, ainsi que les autres services que chaque citoyen était tenu d’offrir à la communauté, ne se feraient plus au sein des trois tribus gentilices comme auparavant, mais au sein des quatre tribus territoriales qu’il venait d’instituer. A la tête de chaque symmorie il plaça des chefs, comme des phylarques ou des kômarques, à qui il ordonna de savoir dans quelle maison chacun habitait ». IV, 15, 2-3 : Διελὼν δ’ οὖν ὁ Τύλλιος εἰς ὁπόσας δήποτε μοίρας τὴν γῆν κατὰ τοὺς ὀρεινοὺς καὶ πολὺ τὸ ἀσφαλὲς τοῖς γεωργοῖς παρέχειν δυνησομένους ὄχθους κρησφύγετα κατεσκεύασεν, Ἑλληνικοῖς ὀνόμασιν αὐτὰ καλῶν πάγους, ἔνθα συνέφευγον ἐκ τῶν ἀγρῶν ἅπαντες, ὁπότε γένοιτο πολεμίων ἔφοδος, καὶ τα πολλὰ διενυκτέρευον ἐνταῦθα, ἄρχοντες δὲ καὶ τούτων ἦσαν, οἶς ἐπιμελές ἐγίνετο τὰ τ’ ὀνόματα τῶν γεωργῶν εἰδέναι τῶν συντελούντων εἰς τὸν αὐτόν πάγον, καὶ τὰς κτήσεις ἐν αἶς ὁ βίος αὐτῶν ἦν καὶ ὀπότε χρεία γένοιτο ἐπὶ τά ὅπλα τοὺς χωρίτας καλεῖν ἢ χρημάτων εἰσφορὰς κατ’ ἄνδρα ἐκλέγειν, οὗτοι τά τε σώματα συνῆγον καὶ τὰ χρήματα εἰσέπραττον ; « C’est pourquoi, après que Tullius eut divisé le territoire en un certain nombre de parts, quel qu’en fût le nombre, il construisit des places fortes sur des collines escarpées et élevées qui pouvaient servir de refuges aux paysans, et les appela pagi à la manière dont ces collines sont désignées par les Grecs. Là, tous les habitants y fuient en quittant leurs champs à chaque fois que se produit une attaque des ennemis, et le plus souvent y passent la nuit. Il y avait aussi des magistrats qui avaient pour fonction de connaître non seulement les noms des paysans qui étaient inscrits dans un même pagus pour payer des impôts, mais aussi les propriétés qui leur donnaient leurs moyens de subsistance. Et lorsqu’il fallait appeler aux armes les gens de la campagne, ou lorsqu’il fallait prélever l’impôt (eisphora) sur les richesses à payer par tête, ces magistrats rassemblaient tous les individus et exigeaient d’eux une somme d’argent ».
47 Dion. Hal., IV, 19, 1-2 ; trad. d’après C. Nicolet, Tributum, p. 38. Cf. aussi Dion. Hal., VII, 59, 7.
48 P. Marchetti, dans Armées et fiscalité, p. 113, n. 1 ; dans le même sens aussi E. Gabba, dans Esercito e società, 1973, p. 145-146.
49 Cf. J. Marquart, L’organisation financière de l’Empire romain, Paris, 1888, p. 211-220 ; G. De Sanctis, Storia dei Romani, III, 2, 1917, p. 624 ; P. Marchetti, dans Armées et fiscalité, p. 107-133 (passim, en particulier p. 108-111 et p. 126-129) ; également E. Gabba, “Sull’imposizione e riscossione del tributum”, dans Armées et fiscalité, p. 33 (= Id., Del buon uso della ricchezza, p. 138).
50 Voir supra note 44.
51 C. Nicolet, Le métier de citoyen, p. 213-214 ; cf. Id., Tributum, p. 39-40.
52 Liv., I, 42, 3 ; Dion. Hal., IV, 9, 7 ; IV, 43, 2. Cf. E. Gabba, “Il tributo preserviano”, dans Armées et fiscalité, p. 28-29 (= Id., Del buon uso della ricchezza, p. 133-134).
53 Cic., Pro Flac, VII, 15 : Nullam enim Uli nostri sapientissimi et sanctissimi viri vim contionis esse voluerunt ; quae scisceret plebes aut quae populus iuberet, submota contione, distributis partibus, tributim et centuriatim discriptis ordinibus, classibus, aetatibus, auditis auctoribus, re multos dies promulgata et cognita iuberi vetarique voluerunt.
54 L’hypothèse d’un mécanisme identique pour la levée des hommes de la légion et celle du tributum a déjà été avancée par C. Nicolet, Tributum, p. 40.
55 C. Nicolet, Le métier de citoyen, p. 215-216 : « Tribus et centuries, de toute manière, apparaissent donc aussi comme des unités fiscales. Cela est une fois de plus conforme à la logique du système de la cité. Dans les cités grecques comme à Rome, et sans doute pour les mêmes raisons techniques, la plupart des tâches administratives étaient le plus possible démultipliées dans des sous-unités plus restreintes au niveau desquelles (...) la responsabilité collective des citoyens pouvait être plus directement engagée. Le dilectus est mené dans le cadre de la tribu, les élections de même, souvent (...) les distributions gratuites de blé ou d’huile. Les opérations, et surtout le contrôle qu’elles impliquaient, en étaient certainement simplifiées ». Pour E. Gabba, dans Armées et fiscalité, p. 30-31 (= Id., Del buon uso della ricchezza, p. 135-136), la tribu ne pouvait avoir été qu’un cadre administratif pour la perception du tributum, et non une unité fiscale à l’intérieur de laquelle aurait dû avoir été répartie une éventuelle quote-part du montant total que les citoyens devaient payer ; d’autre part, la proportionnalité des charges ne pouvait s’appuyer que sur les classes, dans la mesure où le nombre de centuries était inégalement réparti entre elles : la première classe avec 80 centuries sur 193 aurait dû payer 40 % du montant du tributum fixé à l’avance ; ensuite chacune de ses centuries aurait payé une part égale du montant qui aurait été attribué à la première classe.
56 C. Nicolet, Le métier de citoyen, p. 217.
57 C. Nicolet, Tributum, p. 39. Contra : E. Gabba, dans Armées et fiscalité, p. 31-33 (= Id., Del buon uso della ricchezza, p. 136-138) ; toutefois, dans Id., “Ancora sul tributo a Roma”, dans Athenaeum, 57, p. 495-496 (= Id., Del buon uso della ricchezza, p. 139-141), l’historien italien pense que « nel fundamento il Nicolet abbia ragione », et que tel devait bien se présenter le système fiscal romain à l’origine : mais le système décrit par Denys aurait été ensuite assez rapidement remplacé, sans doute dès le iiie siècle, par un système plus simple, indépendant des classes, des centuries et de la répartition ; celui-ci aurait dès lors été fondé sur la déclaration du patrimoine de chaque citoyen aux censeurs, et le taux d’imposition aurait été fixé par ces mêmes censeurs en fonction de la valeur totale du patrimoine de la cité.
58 Liv., V, 10, 5 : Quantum autem augebatur militum numerus, tanto maiore pecunia in Stipendium opus erat, eaque tributo conferebatur...
59 Liv., X, 25, 1-2 : Concursus inde ad consulem factus omnium ferme iuniorum, et pro se quisque nomina dabant : tanta cupido erat sub eo duce stipendia faciendi. Qua circumfusus turba : « Quattuor milia », inquit, « peditum et sescentos equites dumtaxat scribere in animo est ; hodierno et crastino die qui nomina dederitis, mecum ducam ».
60 D’après Varron (De ling. Lat., V, 181) et Festus (Paul. Fest., p. 2 L.), les tribuni aerarii étaient d’abord chargés de distribuer la solde (Stipendium), mais il n’est pas exclu qu’ils aient également été chargés de la levée du tributum qui servait à la financer, voire qu’ils aient été obligés d’avancer l’argent nécessaire avant de le réclamer aux contribuables, à l’image des proeispherontes athéniens : cf. C. Nicolet, Tributum, p. 46-55 ; Id., Le métier de citoyen, p. 218-219. Contra : E. Gabba, dans Armées et fiscalité, p. 30 (= Id., Del buon uso della ricchezza, p. 135).
61 C. Nicolet, Tributum, p. 40.
62 C. Nicolet, Tributum, p. 40-43 et n. 75 ; Id., Le métier de citoyen, p. 216.
63 C. Nicolet, Tributum, p. 42-43 ; E. Gabba, dans Armées et fiscalité, p. 30-31 (= Id., Del buon uso della ricchezza, p. 136) (voir supra n. 55).
64 Varr., De ling. Lat., VI, 86 : (...) <equites>, pedites, armatos privatosque, curatores omnium tribuum, si quis pro se sive pro altero rationem dari volet, voca inlicium huc ad me ; cf. Th. Mommsen, Le droit public, IV, p. 37 ; Id., Le droit public, VI, 1, p. 213-214, mais l’historien allemand estimait que les curatores tribuum ne désignaient que « les chefs des groupes de centuries tribuaires », alors que les tribus auraient été présidées par les tribuni aerarii, ce qui paraît très contestable (cf. aussi L. R. Taylor, The Voting Districts, op. cit., p. 8).
65 C. Nicolet, Le métier de citoyen, p. 216 ; cf. Id., Tributum, p. 43-44 ; avec beaucoup de réserve : E. Gabba, dans Athenaeum, 57, 1979, p. 495-496 (= Id., Del buon uso della ricchezza, p. 140).
66 C. Nicolet, Le métier de citoyen, p. 216.
67 Ainsi Tite-Live fait mention d’une levée partielle (IV, 46, 1) : voir supra p. 385. J. Marquardt, De l’organisation militaire chez les Romains, p. 82, soutenait que le tirage au sort impliquait que toutes les tribus ne fournissaient pas le même nombre d’hommes, sans quoi celui-ci « n’aurait été d’aucune utilité » : mais lorsqu’on procédait à un dilectus, il fallait nécessairement lever un nombre d’hommes déterminé à l’avance, et on ne pouvait certes pas laisser le hasard décider de la plus ou moins grande quantité d’hommes qui allaient être recrutés selon les tribus que le sort aurait désignées ; il s’ensuit que l’existence du tirage au sort présuppose au contraire une certaine équivalence quantitative et qualitative entre les différentes tribus, du moins à l’époque où ce système a été mis en place.
68 C. Nicolet, Le métier de citoyen, p. 217.
69 Th. Mommsen, Le droit public, IV, p. 84, n. 2 ; Id., Le droit public, VI, 1, p. 208-209 et p. 304 : à l’origine, les tribus personnelles (créées par Appius Claudius) devaient « être à peu près équivalentes, soit quant au nombre de têtes, soit quant au rapport des biens ».
70 Pour E. Ferenczy, From the Patrician State, p. 108-110 et p. 172-173 (= Id., dans AAntHung, 15, 1967, p. 60-61), sur la base de Th. Mommsen, Le droit public, VI, 1, p. 279-282, la réforme des tribus d’Appius Claudius avait surtout eu pour objectif d’étendre le service militaire aux humiles ; contra : L. Loreto, dans A&R, 36, 1991, p. 194. Mais ce qu’aucun de ces auteurs n’avait vu, c’est que la réforme des tribus d’Appius Claudius est davantage un problème de meilleure répartition des charges civiles et militaires que celui d’une augmentation des effectifs militaires (même si la création d’une armée manipulaire de quatre légions annuelles a incontestablement provoqué une augmentation des effectifs).
71 Dans ce sens déjà : C. Nicolet, Tributum, p. 37-38.
72 Cf. Th. Mommsen, Le droit public, IV, p. 84, n. 2.
73 Cf. C. Nicolet, Le métier de citoyen, p. 217.
74 Voir aussi infra p. 437.
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