Introduction
p. 1-31
Texte intégral
« Mais l’expérience nous a montré que ce qu’Appius dit dans ses vers est vrai, à savoir que chacun est l’artisan de sa propre fortune ».
Salluste, Lettre à César, I, 1, 2.
« Nous savons qu’Appius Claudius avait souvent l’habitude de dire que l’activité convenait mieux au peuple romain que l’inaction, non parce qu’il ignorât combien la situation de tranquilité serait agréable, mais parce qu’il avait compris que les empires prédominants étaient générés par l’action lorsqu’elle cherche à atteindre la vertu, alors qu’ils tombent en déclin par suite d’une trop grande quiétude ».
Valère-Maxime, Faits et dits mémorables, VII, 2, 1.
De la légende à l’histoire : l’époque « médio-républicaine » à Rome
1Au moment où s’ouvre la censure d’Appius Claudius Caecus, en 312/310 av. J.-C, la République romaine a déjà deux siècles d’existence. D’après la tradition historiographique romaine, Rome aurait été dotée, dès 509/507 avant notre ère, de ses principales institutions républicaines : deux consuls annuels, élus par les comices centuriates selon les prescriptions qu’aurait laissées le roi Servius Tullius, et possédant un pouvoir coercitif contre lequel le citoyen obtint, dès la première année de la République, le droit d’appel (lex Valeria de provocatione) ; un Sénat de trois cents membres qui contrôlait l’activité de ces magistrats; et un système d’assemblées populaires définies par leurs unités de vote, qui juxtaposait déjà des comices curiates, centuriates et tributes. D’autres éléments institutionnels, ajoutés dans les premières décennies du ve siècle, auraient rapidement complété la « constitution » républicaine. Dans son traité de la République, Cicéron considérait qu’il n’y a plus eu d’innovations institutionnelles majeures après le Décemvirat et la publication de la loi des XII Tables, et un passage obscur de Polybe peut laisser supposer que pour l’historien grec également, l’essentiel des institutions républicaines étaient en place dès le milieu du ve siècle1. Cet ensemble institutionnel qui s’opposait à la monarchie et que l’on appelle « République » serait donc, aux yeux des Anciens, et implicitement encore aujourd’hui aux yeux de nombreux Modernes, apparu dans un état déjà quasi définitif dès les premières années du régime, comme Minerve serait sortie toute armée de la tête de Jupiter2. Du coup, il devenait très difficile de mesurer la portée exacte d’un certain nombre de réformes et d’innovations institutionnelles des deux siècles suivants, qui semblaient répéter en d’incompréhensibles doublets des règles ou des institutions déjà existantes.
2Un livre récent de J. Poucet sur la « Rome des rois » explique que, du point de vue des sources, le premier siècle et demi de la République (jusqu’au milieu du ive siècle environ) se trouve globalement dans la même situation de pénurie d’informations fiables et de difficultés méthodologiques que la deuxième période royale (la monarchie étrusque) : si la tradition orale, peut-être complétée dès les débuts de la République par un embryon de souvenirs écrits en milieu pontifical, a pu transmettre le souvenir confus de quelques événements historiques (comme la fin de la monarchie étrusque à Rome vers la fin du vie siècle), le détail des événements, leur chronologie exacte, les hommes et les acteurs de cette époque ne paraissent pas pouvoir avoir été transmis sans erreurs et sans inventions plus ou moins romanesques jusqu’à Fabius Pictor, le premier historien romain qui rédigea ses Annales dans les premières années de la deuxième guerre punique, soit près de trois siècles après la fin du règne de Tarquin le Superbe, et qui est la source ultime à laquelle peuvent remonter les informations contenues dans les textes historiographiques (encore plus tardifs) qui nous sont parvenus3.
3En fait, les premiers travaux historiographiques romains, que ce soit Fabius Pictor, Cincius Alimentus, Caton ou d’autres historiens du iie siècle avant J.-C, se sont essentiellement intéressés aux origines de Rome (dans le but de montrer que Rome n’était pas une cité d’origine barbare), à l’époque royale (pour montrer l’ancienneté, et donc la vénérabilité, d’un certain nombre d’institutions et de traditions) et aux premières années de la République (afin de mettre en valeur le rôle essentiel joué par quelques grandes familles dans la difficile sauvegarde de la République des premiers temps) : l’époque « médio-républicaine » ne paraît pas avoir particulièrement intéressé les premiers historiens romains, probablement parce qu’elle devait leur paraître trop proche pour pouvoir susciter un quelconque intérêt, et ne semble avoir fait l’objet de récits historiques détaillés que plus tardivement, peut-être seulement à partir de la fin du iie siècle4. Il s’ensuit que les récits sur cette période méconnue ont été dans l’ensemble recomposés ultérieurement, en s’appuyant probablement d’abord sur les traditions orales véhiculées au sein des grandes familles de l’aristocratie romaine, notamment à l’occasion des discours funèbres (laudationes funèbres) prononcés en public en plein Forum5, sur les notices transcrites en milieu pontifical dans les Annales Maximi, peut-être à partir de la tabula dealbata exposée chaque année par le Grand Pontife sur les murs de la Regia, au Forum6, mais probablement aussi sur des sources grecques contemporaines, comme Douris de Samos ou Timée de Tauromenion, dont les œuvres ont aujourd’hui presque complètement disparu, et qui se sont intéressés à la puissance émergente de Rome à l’époque des guerres samnites et de la guerre de Pyrrhus7. Mais si l’histoire des conflits politiques occupe une place privilégiée dans les premiers souvenirs historiographiques de cette époque, il n’en est pas de même de l’histoire institutionnelle : la période royale et celle des débuts de la République offraient pour cela la vision rassurante de l’ancienneté d’un certain nombre d’institutions sur lesquelles reposaient les fondements de la République romaine, et l’époque « médio-républicaine » n’a pu, dans la vision des historiens ultérieurs, qu’y ajouter des retouches de détail en respectant dans la mesure du possible le mos maiorum.
4Cette méconnaissance du rôle de l’époque « médio-républicaine » dans la longue formation des institutions de la République romaine s’est transmise aux historiens modernes. Si l’histoire des origines de Rome, de la période royale et des débuts de la République a depuis longtemps suscité un intérêt vif et parfois passionné chez certains historiens, et si le nombre des études historiques s’accroît à mesure que la République tire sur sa fin et qu’augmente la documentation disponible, l’époque « médio-républicaine » semble être longtemps restée la parente pauvre de la recherche historique contemporaine en histoire romaine, particulièrement en France. La recherche historique contemporaine s’est ainsi étrangement alignée sur l’attitude qu’avaient déjà les historiens anciens à l’égard de cette époque, négligeant de la sorte un maillon essentiel dans la constitution progressive des institutions et de l’identité républicaines à Rome. Il est vrai que les sources contemporaines, ou primaires, sont rares, voire inexistantes, ce qui rend tout travail de reconstruction historique particulièrement difficile et aléatoire, et ce qui justifie souvent la méfiance ou le scepticisme de certains historiens habitués à travailler sur des sources plus nombreuses et plus fiables, et qui se refusent par conséquent à aborder une période antérieure à la deuxième guerre punique.
5Pourtant, comme le soulignait récemment J. Poucet, un historien par ailleurs très « critique » à l’égard des informations historiques et archéologiques réellement disponibles sur la Rome des origines et celle des rois, la situation de l’époque « médio-républicaine » n’est assurément pas la même que celle de la période précédente8. Les souvenirs historiques de cette époque, plus proches dans le temps des premiers historiens romains, n’ont pas pu subir des transformations aussi importantes que pour les premiers siècles : au cours des ive et iiie siècles, les événements et les personnages sortent progressivement du domaine de l’histoire quasi légendaire pour entrer dans celui de l’Histoire véritable. Et l’un des premiers personnages de l’histoire romaine à constituer une figure véritablement historique et à avoir joué un rôle décisif dans l’évolution politique et institutionnelle d’une République déjà bicentenaire est Appius Claudius Caecus.
Appius Claudius Caecus
6Appius Claudius Caecus est probablement « la première personnalité pleinement historique dont l’activité conduit, tel un pont, des premiers siècles colorés de légendes de l’histoire romaine au terrain solide de l’évolution authentiquement historique »9. Ce personnage est en effet à l’origine d’un certain nombre d’innovations et d’initiatives spectaculaires qui ont dû frapper les esprits de ses contemporains et qui ont marqué la mémoire collective des Romains jusqu’à la fin de l’Antiquité10.
7Ainsi, il fut l’auteur du premier aqueduc et de la première route construits par les Romains, et auxquels il a donné son nom11 : bien des siècles plus tard, et jusqu’à la fin de l’Antiquité, on utilisa et on ne cessa d’entretenir et d’améliorer l’aqua Appia et la via Appia. Le Sénat romain recevait les ambassadeurs étrangers et les généraux romains disposant de l’imperium dans le temple de Bellone12, voué et consacré par Appius Claudius13, et où l’on pouvait sans doute admirer son portrait, au milieu des imagines de ses ancêtres et de ses descendants14. D’ailleurs, sa statue se dressait parmi celles des summi viri qu’Auguste a voulu honorer sur le Forum qu’il a fait construire et auxquels le premier empereur a voulu rattacher sa propre gloire15. Sous la statue d’Appius, un titulus rappelait brièvement, avec le laconisme des Fastes, les principales étapes de son cursus honorum, et un elogium évoquait, tout aussi brièvement, ses principaux hauts faits dont il convenait de se souvenir (voir infra fíg. 2 et 3, et pl. III)16 :
Appius Claudius C(ai) f(ilius) Caecus, censor, cons(ul) bis, dict(ator), interrex III, pr(aetor) II, aed(ilis) cur(ulis) II, q(uaestor), tr(ibunus) mil(itum) III, complura oppida de Samnitibus cepit, Sabi-пошт et Tuscorum exercitum fudit, pacem fieri cum [P]yrrho rege prohibuit, in censuram viam Appiani stravit et aquam in urbem adduxit, aedem Bellonae fecit.
« Appius Claudius Caecus, fils de Caius, censeur, deux fois consul, dictateur, trois fois interroi, deux fois préteur, deux fois édile curale, questeur, trois fois tribun militaire; il prit bon nombre de forteresses aux Samnites et mit en déroute l’armée des Sabins et des Étrusques; il empêcha qu’on fît la paix avec le roi Pyrrhus; au cours de sa censure, il construisit la via Appia et réalisa l’adduction d’eau vers Rome; il fit édifier le temple de Bellone ».
8Parmi ces hauts faits figure le discours qu’Appius Claudius prononça au Sénat vers 280/279 av. J.-C. pour dissuader les sénateurs d’accepter la paix de compromis que leur proposait Pyrrhus17 : « discours à tout jamais vivant dans la mémoire des hommes »18. Il prononça ce discours sans doute déjà très âgé et aveugle, et il est possible que ce soit à la suite de ce dernier coup d’éclat qu’il devint célèbre sous le nom de Caecus19. Les Romains de l’époque de Cicéron ou d’Auguste se souvenaient encore que le rejet des propositions de Pyrrhus entraîna l’expansion romaine vers l’Italie du Sud, et que le discours d’Appius fut à l’origine du processus qui permit la constitution de l’empire romain sur l’ensemble du bassin méditerranéen. Enfin, Cicéron prétendait que ce discours existait toujours de son temps, et Varron considérait d’ailleurs qu’il constituait la première œuvre en prose de la littérature latine (suggérant probablement par là qu’il s’agissait de la première œuvre non versifiée, ou de la plus ancienne, qui se soit transmise de génération en génération jusqu’à son temps)20.
9Dans les milieux érudits en effet, on reconnaissait également à Appius Claudius une importante œuvre juridique et littéraire : on lui attribuait la rédaction d’un livre De usurpationibus et la publication, par l’intermédiaire de son scribe Cn. Flavius, de legis actiones et de fasti21. Il aurait aussi rédigé des Sententiae composées en vers saturniens22 et Cicéron considérait même qu’un carmen d’Appius, déjà admiré par Panétius, ami des Scipions, lui semblait pythagoricien23. On allait jusqu’à lui attribuer une réforme de l’orthographe par l’introduction du rhotacisme et la suppression de la lettre z dans la langue latine24.
10Enfin, dans le domaine politique, son œuvre est dominée par la censure qu’il exerça à partir de 312 av. J.-C.25 : et censura clara eo anno Αρ. Claudi et С. Plauti fuit, memoriae tamen felicioris ad posteros nomen Appi, écrit Tite-Live (IX, 29, 6), non pas seulement parce que le célèbre censeur fit construire l’aqua Appia et la via Appia, mais aussi parce qu’il fut sans doute le premier censeur à prolonger la durée de sa magistrature au-delà de la durée légale des 18 mois fixés par la lex Aemilia, probablement afin de pouvoir achever les grands travaux entrepris26, le premier censeur à avoir engagé les fonds de l’État sans avoir obtenu l’autorisation du Sénat27, le premier censeur à avoir révisé la liste des sénateurs en introduisant au Sénat même des fils de libertini28, le premier censeur enfin à avoir organisé une recognitio equitum29. La tradition, du reste assez confuse, lui attribuait également une réforme des tribus et de leur mode de recrutement30. Enfin, on se souvenait plus ou moins confusément que sa censure fut à l’origine d’une réforme du culte d’Hercule à l’Ara Maxima, réforme sacrilège qui lui attira la punition de la divinité et pour laquelle il aurait été frappé de cécité31. Bref, Appius Claudius Caecus, appartenant à l’une des gentes les plus prestigieuses de la vieille aristocratie romaine, apparaissait aux yeux de la postérité comme le censeur par excellence, en tout cas celui qui avait réussi à donner tout son lustre à une magistrature qui était sans doute auparavant assez peu prestigieuse32. Aussi la multiplicité de ses activités et de ses talents33 lui permit-elle de devenir l’« une des figures de proue de la vie politique et intellectuelle de l’ancienne Rome »34.
11Une pareille figure n’a pas manqué de marquer l’imaginaire des Romains, au point de devenir un exemplum qui réapparaît fréquemment dans les discours des grands orateurs35, les œuvres historiques ou philosophiques36, les traités juridiques, rhétoriques37 ou grammaticaux, et bien sûr dans les recueils d’exempla38. La société romaine, et en particulier la société aristocratique, constituait en effet un milieu social qui avait l’habitude de règler ses comportements en fonction de situations ou de personnages exemplaires du passé : l’exemplum est ainsi devenu à Rome une évocation émotive d’une figure exemplaire du passé, qu’il fût proposé comme modèle ou comme contre-modèle; il supposait une certaine forme de consensus moral sur la façon dont la société percevait à un moment donné son propre passé, mais aussi ses valeurs culturelles et idéologiques communes39.
12De fait, Appius Claudius Caecus a pu servir d’exemple à un certain nombre de ses descendants, socialement contraints de reproduire le comportement de leur illustre ancêtre40 : c’est ainsi en tout cas qu’il faut comprendre les vœux que Cicéron adressa à Appius Claudius Pulcher en 50 av. J.-C. au moment de son accession à la censure41. Nul doute que l’urbanitas et l’appietas que Cicéron a attribuées à ce même Claudius Pulcher n’aient été des qualités, ou des défauts, qui provenaient de l’image qu’on se faisait de son aïeul42. Pour Cicéron enfin, Caecus personnifiait le « vieux Romain », gardien du mos maiorum et symbole d’une époque où la République conservait encore les antiques vertus romaines (Cic, Cat. M., 37) :
Vigebat in illa domo mos patrius et disciplina43.
« La tradition et la discipline de nos pères restaient en vigueur dans cette maison ».
13Mais cette image était aussi paradoxalement associée à celle d’un novateur, qui n’hésita pas à bouleverser la tradition des Anciens (le fameux mos maiorum précisément) pour faire entrer, le premier, des fils de libertini au Sénat ou inscrire les humiles dans toutes les tribus44, et qui, au soir de sa vie, s’opposa à un Sénat dans l’ensemble déjà acquis à l’idée d’une paix de compromis avec Pyrrhus, pour faire imposer le choix de la lutte à outrance qui amènera Rome à la conquête de l’Italie du Sud et, partant de là, à celle de l’ensemble du monde méditerranéen. Appius Claudius offrit de cette manière le premier exemple latin d’un discours en prose qui ait été conservé, et que certains orateurs de l’époque de Caton l’Ancien, un autre orateur célèbre, semblent encore avoir pris comme modèle de rhétorique. L’exemplarité d’Appius Claudius Caecus prouve en tout cas le profond enracinement de ce personnage dans la mémoire collective des Romains.
14De fait, Appius Claudius Caecus est devenu un exemplum avec de multiples facettes, parfois complètement contradictoires, car s’opposent en lui l’image de la tradition la plus conservatrice et celle de l’innovation presque révolutionnaire, en tout cas subversive : alors que chez Cicéron et Valère Maxime, il semble incarner les valeurs traditionnelles de l’ancienne Rome, chez Tite-Live, la principale source sur ce personnage, il apparaît comme un politicien ambitieux et réactionnaire, rempli de morgue aristocratique et de surcroît incompétent dans la conduite des opérations militaires. Le personnage offre ainsi à la fois l’image de l’austère sévérité de la vieille tradition romaine et celle d’un esprit ouvert aux innovations les plus étrangères à cette tradition (à l’image des aristocrates philhellènes de la fin de la République), qui semblent toutes deux se confondre pour brouiller la figure d’un personnage complexe45. Cette apparente contradiction, présente dans nos sources, montre que la figure d’Appius Claudius Caecus est devenue un enjeu idéologique dont celles-ci n’ont peut-être pas toujours eu directement conscience. Et l’image contrastée, sinon contradictoire, de ce personnage n’a pas manqué d’embarrasser l’historiographie moderne.
Le miroir des préoccupations idéologiques contemporaines
15La personnalité d’Appius Claudius Caecus attira très tôt l’attention des historiens modernes, surtout intéressés par les controverses politiques attachées à ce personnage. En effet, les sources anciennes qui évoquent cette personnalité sont relativement nombreuses, mais souvent contradictoires. Aussi laissent-elles le champ libre aux interprétations personnelles, chaque historien élaborant une image de ce personnage conforme à ses préoccupations idéologiques ou aux schémas culturels de son époque. Ainsi, l’historiographie moderne a développé trois images qui présentent, chacune, un cadre explicatif relativement cohérent pour comprendre l’activité et les objectifs politiques d’Appius Claudius Caecus : celui-ci est tantôt un patricien réactionnaire, tantôt un aristocrate démagogue aspirant à la tyrannie, tantôt un aristocrate démocrate et un réformateur « éclairé »46.
16La figure d’Appius Claudius Caecus a beaucoup intéressé l’historiographie allemande du siècle dernier. L’une des études les plus anciennes de l’historiographie moderne sur ce personnage se trouve dans l’Histoire Romaine de B. G. Niebuhr47. Pour l’historien allemand, le caractère d’Appius comporte des contradictions qui ont quelque chose d’énigmatique et qui n’auraient rien d’étonnant dans l’histoire grecque, mais qui surprennent à une époque aussi ancienne de l’histoire romaine : le célèbre « Claudien » serait à la fois, par l’étendue de sa culture et par sa volonté réformatrice, l’un des Romains les plus remarquables de son temps et un aristocrate réactionnaire, s’efforçant de lutter contre la noblesse plébéienne en favorisant les affranchis et les gens de basse condition, à la manière des aristocrates vénitiens qui se montraient familiers avec le gondolier tout en étant insolents avec le gentilhomme de terre ferme. Cet historien, marqué par la philosophie des Lumières et les idées de la Révolution française, mais aussi par les tentatives de Restauration de son époque, semblait voir dans les réformes d’Appius, un demi-siècle après les lois liciniennes-sextiennes, une tentative de restauration de l’ancien régime patricien.
17L’image que B. G. Niebuhr se faisait d’Appius Claudius Caecus a directement influencé, à des degrés divers, les travaux de W. Siebert et de Th. Mommsen. W. Siebert, qui a été le premier à consacrer une monographie complète à ce personnage, en fit le chef du patriciat et le dirigeant du parti aristocratique conservateur (« die starre Adelspartei »)48. Cet historien, qui s’appuie essentiellement sur le témoignage de Tite-Live, accepte à la lettre toute la tradition ancienne qui attribue une morgue aristocratique et des convictions anti-plébéiennes à tous les Claudii. Appius Claudius aurait par conséquent associé à la fois un égoïsme personnel et un égoïsme de classe, en adoptant les différentes mesures, prises au cours de sa censure, pour assurer son ascension personnelle et pour restaurer la domination du patriciat en écartant les plébéiens du consulat. Selon W. Siebert en effet, Appius Claudius appartenait à l’aristocratie non seulement par son nom, mais aussi par ses convictions49.
18Th. Mommsen revint à plusieurs reprises, et dans divers travaux, sur le personnage d’Appius Claudius Caecus50. Dans sa Römische Geschichte, il essaya de concilier les traditions apparemment contradictoires, en admettant qu’Appius ait pu avoir une attitude de démocrate novateur, voire de révolutionnaire, pendant sa censure, et de patricien réactionnaire au cours de sa carrière politique ultérieure. Th. Mommsen a d’ailleurs avancé une hypothèse qui permettrait de comprendre les principales mesures prises par Appius Claudius au cours de sa censure et concernant notamment la réforme des tribus et la lectio senatus : le célèbre censeur aurait été le premier, à Rome, à classer les non-propriétaires fonciers parmi les citoyens romains inscrits dans les tribus51 et à leur donner un véritable rôle politique, que ce soit aux comices tributes, aux comices centuriates ou au Sénat. Mais pour lui, Appius Claudius appartenait également « à la plus fière noblesse de Rome, et livra les derniers combats pour la défense du patriciat et de ses privilèges surannés : il inspira les derniers efforts pour écarter les plébéiens du consulat; nul ne lutta avec plus de fougueuse passion contre les précurseurs du parti populaire »52. En fait, Appius ne se serait pas mis en contradiction avec lui-même : n’étant ni aristocrate ni démocrate, il aurait porté en lui tout ensemble « l’esprit des anciens rois et des nouveaux rois patriciens, l’esprit des Tarquins et celui des Césars, auxquels il servit de trait d’union au travers d’un interrègne de cinq siècles »53. Th. Mommsen reprit et exploita l’intuition déjà formulée par B. G. Niebuhr, en affirmant qu’Appius Claudius, n’étant ni de droite ni de gauche, aurait été l’un des premiers à Rome en qui se serait incarnée l’individualité grecque et que son impertinence à l’égard des lois et des usages n’avait eu d’égale que celle d’un Athénien.
19Dans ses Römische Forschungen, l’historien allemand affina l’image qu’il se faisait d’Appius et de son œuvre. Ainsi, il rejeta l’image du patricien conservateur et réactionnaire que proposait B. G. Niebuhr : « Appius Caecus me rappelle Clisthènes et Périclès, bien plus que je ne vois en lui l’homme d’État aristocratique de Rome! »54. Au contraire, il considéra que la censure d’Appius a été la censure la plus énergiquement réformatrice qui se soit produite sous la république. En fait, il voyait désormais en lui un révolutionnaire et un démagogue décidé, précurseur des Gracques ou de César : on retrouve ainsi l’une des obsessions de l’historien allemand, à savoir « la lutte des populares contre le Sénat, des démocrates contre les Junkers », pour comprendre ce qui a été inévitable dans la marche de Rome vers la monarchie; selon lui en effet, c’est le refus par la noblesse romaine des réformes les plus justes qui a poussé les démocrates à prendre les armes et a mené au césarisme55.
20Par contre, Th. Mommsen tenta d’excuser et de justifier l’attitude réactionnaire d’Appius Claudius après sa censure, « sans quoi il aurait fini ou comme les Gracques, ou comme César »56. Ainsi, l’action d’Appius Claudius Caecus semblait lui annoncer les dérives futures, mais « ce vigoureux génie venait trop tôt ou trop tard : les Dieux frappèrent Appius de cécité à cause de sa sagesse inopportune »57. Ainsi, pour Th. Mommsen, personnalité fortement marquée par l’expérience politique de son temps, l’image d’Appius Claudius Caecus resta ambiguë, car pour lui, il est à la fois le réformateur révolutionnaire « en qui s’incarne la pensée même du progrès » et un Junker démagogue, aspirant peut-être à la tyrannie58. Il est vrai que Th. Mommsen « sait trop que les limites entre démagogie et démocratie sont – à Rome comme à Leipzig – difficiles à fixer, et que la démagogie conduit au césarisme »59. En fait, l’historien allemand sembla éprouver, pour le célèbre censeur romain, grand aristocrate réformateur et démagogue, une étrange fascination, qui reflète ses propres sentiments, partagés entre admiration et répulsion, à l’égard du chancelier Bismarck60.
21Quelques années plus tard, C. Sieke, un autre historien allemand, consacrait une nouvelle monographie à la censure d’Appius Claudius Caecus en s’inspirant beaucoup des hypothèses de Th. Mommsen61. C. Sieke s’appuya essentiellement sur le témoignage de Diodore de Sicile pour considérer que le personnage en question fut avant tout un innovateur démocratique (« ein demokratischer Neuerer ») qui favorisa les couches populaires humbles (les humiles), en particulier les classes urbaines, artisans et affranchis. Selon lui, cette attitude concorde à merveille avec le fait qu’Appius aurait également été un agent de l’influence grecque à Rome, comme semblerait le montrer le discours prononcé au Sénat contre l’envoyé de Pyrrhus62.
22La première réaction à cette série d’études consacrées à Appius Claudius Caecus et produites par l’école historique allemande vint d’Italie : un érudit italien, A.-G. Amatucci, publia vers la fin du siècle un article consacré à ce personnage63, et dans lequel il s’opposait à l’image qu’en ont donnée les historiens allemands, en particulier Niebuhr, Siebert et Mommsen. A.-G. Amatucci s’est d’abord inscrit en faux contre l’opinion de l’école historique allemande selon laquelle Tite-Live serait une source moins fiable que les auteurs grecs, et notamment Diodore. Ainsi, le récit de Tite-Live présenterait un portrait d’Appius Claudius à la fois plus complet et plus fiable que celui de Diodore : plutôt que d’un démagogue à l’image des Tarquins ou des Césars, Amatucci propose de voir en lui « l’incarnation de l’idéal politique et religieux d’un Romain cultivé et appartenant à la plus jalouse aristocratie du vè siècle de Rome »64. Amatucci refusa par ailleurs de voir en Appius toute trace d’influence grecque, mais voulut au contraire voir dans sa culture « le caractère affirmé de la romanité qui selon nous est la caractéristique de toute la vie de cet homme ».65
23En rupture avec les opinions « progressistes » des historiens allemands, A.-G. Amatucci fit au contraire l’éloge de la politique réactionnaire d’Appius qui s’est allié avec les couches sociales les plus basses pour pouvoir contrebalancer l’influence plébéienne au Sénat et aux comices : en étouffant les privilèges que la plèbe avait obtenus par des menaces et des sécessions, Appius Claudius n’aurait songé qu’à la grandeur de Rome, à laquelle auraient été liés les destins de l’aristocratie. Pour Amatucci, il s’agissait avant tout d’une politique à long terme, comme celle qu’avait suivie à une époque l’aristocratie vénitienne, ou à une époque plus récente la noblesse napolitaine sous les Bourbons. En fait, l’épisode qui a le plus marqué l’historien italien est le discours prononcé au Sénat par le vieillard Appius Claudius contre la paix honteuse que proposait Pyrrhus : pour lui, le vieux Romain semble avant tout incarner le sursaut du patriotisme italien, comme un modèle qui aurait préfiguré, à deux millénaires de distance, les grands héros du Risorgimento.
24E. Pais, par contre, accepta dans leurs grandes lignes les vues exposées par Th. Mommsen dans ses Römische Forschungen sur l’attitude politique attribuée aux Claudii66. Mais fidèle à sa méthode « hypercritique », il contesta en de nombreux points la réalité historique des réalisations attribuées à Appius Claudius Caecus : pour lui, les réformes politiques qui sont attribuées au personnage sont dans la plupart des cas des anticipations historiographiques sur des événements ultérieurs, essentiellement du iie siècle av. J.-C. Ainsi, les censures de C. Claudius en 169 et d’Appius Claudius en 136 auraient fourni la trame des principales mesures attribuées à la censure de 312. Inversement, la figure d’Appius Claudius le Décemvir aurait été modelée en grande partie à partir de celle du censeur de 312. Mais par ailleurs, E. Pais n’a pas exclu qu’Appius Claudius Caecus ait pu prendre pour modèle Denys de Syracuse ou Archytas de Tarente67.
25En rupture avec l’hypercriticisme d’E. Pais, G. De Sanctis considéra par contre qu’Appius Claudius a été un patricien démocrate (« un democratico patrizio ») qui s’est attaqué, avec son collègue à la censure, le plébéien C. Plautius, « à l’une des plus grandes injustices sociales alors sanctionnées par les institutions en vigueur », en inscrivant dans les tribus, et donc en leur donnant des droits politiques, tous ceux qui étaient alors non propriétaires terriens, c’est-à-dire les artisans, les commerçants, toute cette turba forensis dont parle Tite-Live et qui devait être en partie composée de fils d’affranchis68. Pour l’historien italien, Appius Claudius a été l’auteur d’innovations géniales et hardies, qui ne se limitèrent pas au domaine politique, mais concernèrent également les grands travaux et s’étendirent au domaine culturel et à celui de la religion. Ce sont par conséquent ses audaces qui attirèrent à Appius des haines inexpiables, et qui expliquent pourquoi sa personnalité est si controversée par la tradition.
26L’école historique française fut, quant à elle, marquée par les affrontements idéologiques du débat politique de la IIIe République qu’elle projeta sur sa perception du personnage. Ainsi pour G. Bloch, Appius Claudius aurait été un représentant de la vieille aristocratie patricienne qu’il a voulu rajeunir et raffermir en lui donnant pour tâche de prendre la tête et l’initiative du progrès, afin de « faire de Rome la reine et la maîtresse de l’Italie » : pour cela il dut s’appuyer, contre les tendances conservatrices de l’élite plébéienne, sur les classes les plus pauvres (les humiles) et « les artisans de la nouvelle vie économique » en les prenant en compte aussi bien dans l’organisation centuriate que dans l’organisation tribute, dans laquelle ils pouvaient être majoritaires non seulement en nombre mais aussi en voix; cette « tendance révolutionnaire » fit ainsi de cet aristocrate l’« un des précurseurs du mouvement démocratique » à Rome69. Après la première guerre mondiale, L. Homo précisa de manière encore plus explicite les enjeux politiques et idéologiques qui, selon lui, présidèrent aux mesures d’Appius Claudius : celui-ci n’aurait été qu’un « patricien de droite », « intransigeant » et « ennemi acharné de la noblesse patricio-plébéienne » située au centre de l’échiquier politique, contre laquelle il eut l’idée de génie de s’unir avec les « plébéiens de gauche », « et de répondre ainsi à la coalition des centres par la coalition des extrêmes »70.
27Peu avant, un autre Français, P. Lejay, publia un article71, en marge d’une Histoire de la littérature latine qu’il était en train d’écrire, dans lequel il rassembla les notes qu’il avait recueillies « sur le cas d’Appius Claudius ». P. Lejay renouvela les méthodes de la philologie classique du xixe siècle pour donner une nouvelle image du célèbre censeur, en essayant de se démarquer des travaux antérieurs. Pour lui, également influencé par le discours contre Pyrrhus, « Appius Claudius semble avoir eu un tempérament de maître dans un sénat de maîtres ». L’historien français, apparemment marqué par le jacobinisme centralisateur, a cru voir en Appius un personnage ayant « un tempérament autoritaire » et « des vues d’homme d’État » : « Dans tous ses actes, nous sentons une volonté impérieuse, le souci des intérêts publics, des vues larges avec un certain goût pour l’étatisme », bref, « il était centralisateur plutôt que démagogue »72.
28À la même époque, en l’espace de quelques pages, un autre Français, A. Grenier, a dressé un portrait admiratif du censeur de 31273. A. Grenier ne reprend qu’en partie l’analyse que Th. Mommsen avait faite de ce personnage : il en retient son sens de l’innovation, tout en refusant d’y voir une simple imitation d’éventuels modèles grecs; pour lui, le caractère « novateur » d’Appius Claudius est davantage le produit de « l’intelligence romaine » mise au service du « bien de l’État », et représente « de façon parfaite cette union de l’expérience ancienne et des tendances nouvelles ». Aussi Appius Claudius apparaît-il à l’historien français comme « un patricien romain éclairé, non un démagogue », animé d’un grand sens de l’État et d’un « patriotisme intransigeant ». Bref, Appius Claudius Caecus serait l’une des premières figures vivantes du « génie romain ».
29L’historien allemand K. J. Beloch74, expatrié en Italie, a lui aussi considéré Appius Claudius comme un patricien démocrate, chef de l’opposition à la nobilitas, mais a catégoriquement rejeté l’image du réformateur démagogue qu’avait voulu en faire Th. Mommsen : il est vrai que les deux historiens ne s’appréciaient guère! C’est ainsi que K. J. Beloch rejeta également l’historicité de la réforme des tribus par Appius, qui avait été un des points forts des théories de Mommsen75. Pour K. J. Beloch, ce qui importait avant tout à Appius Claudius, étaient ses constructions : pour les réaliser, il n’a reculé devant aucun moyen, et a obtenu un soutien populaire (en s’appuyant notamment sur les larges couches de la bourgeoisie) d’autant plus important que les fastes le montrent deux fois au consulat et une fois à la préture après sa célèbre censure.
30Tout comme G. De Sanctis, W. Schur76 considéra qu’Appius Claudius est le premier Romain dont on peut saisir la personnalité avec un certain degré de certitude. W. Schur rejeta également l’image mommsénienne du « Junker démagogue » : pour lui, Appius Claudius fut avant tout un réformateur, fondateur et dirigeant d’un « parti claudien », héritier du groupe de Q. Publilius Philo et opposé au parti conservateur de Q. Fabius Rullianus. Aussi le célèbre censeur fut-il, selon lui, un réformateur de grande envergure qui savait exploiter les circonstances et avait de la suite dans les idées.
31Après la seconde guerre mondiale, l’Italien A. Garzetti a publié un important article, véritable monographie qui reprit l’ensemble de la question sur Appius Claudius Caecus et essaya d’en donner une nouvelle approche77. Après avoir critiqué la méthode prosopographique de F. Münzer78, A. Garzetti considère qu’Appius Claudius, bien que lié au groupe politique de Q. Publilius Philo, le champion des populares contre la nobilitas, ne se rattache ni au parti nobiliaire, ni au parti populaire, et qu’au cours de sa vie publique le personnage n’a été ni un réactionnaire, ni un démagogue. En fait l’historien italien, qui note la variété des forces politiques auxquelles Appius a eu recours, en tire argument pour démontrer qu’il suivit en fait une politique personnelle, dans le cadre de la plus pure tradition aristocratique : le seul objectif d’Appius Claudius fut de se créer une solide base électorale pour les futures magistratures. Aussi estime-t-il que l’activité d’Appius s’inscrivait tout simplement dans les mœurs politiques de son temps79, et que, si sa figure est devenue si complexe, c’est parce qu’il avait compris mieux que quiconque les règles du jeu politique en donnant un rôle de premier plan à la personnalité de l’homme politique.
32Le Britannique E. S. Staveley fut le premier à tenter d’interpréter toute l’action d’Appius Claudius dans le cadre de l’expansion économique et commerciale qu’a pu connaître Rome avant la première guerre punique80. Par conséquent, les mesures censoriales d’Appius ne devraient pas être comprises dans le contexte d’une lutte des classes ou dans celui d’une lutte personnelle ou partisane pour le pouvoir, comme le pensait A. Garzetti, mais plutôt comme une tentative, peut-être prématurée, pour préparer la transformation d’une communauté jusqu’alors essentiellement agraire en une communauté où l’agriculture et le commerce auraient joué un rôle au moins égal. Ainsi, l’accès d’Appius à la censure reposerait sur un programme politique qui aurait eu pour objectifs d’accélérer la « commercialisation » de l’économie romaine et de donner une plus grande importance politique à la population urbaine dont dépend une telle économie. La quasi totalité des mesures prises par Appius au cours de sa censure, de la construction de la via Appia à la nationalisation du culte d’Hercule, s’expliqueraient par conséquent dans une perspective d’histoire économique et sociale.
33Très peu de temps après, l’Italien F. Càssola81 a réutilisé les prémices du raisonnement de Staveley pour expliquer à son tour les luttes politiques dans lesquelles était engagé Appius Claudius Caecus : celui-ci avait voulu favoriser la classe des marchands, des artisans, des publicains et des banquiers. Il appartenait par conséquent au groupe politique favorable à l’ouverture économique de Rome sur le commerce avec le monde grec et l’Italie du Sud, d’où la construction de la via Appia, et s’opposait au groupe politique conservateur dirigé par les Fabii qui s’appuyait au contraire sur la classe paysanne des petits propriétaires terriens et qui était favorable à une expansion territoriale vers le nord, c’est-à-dire les riches terres de la Sabine et de l’Étrurie. En fait, la problématique de l’historien italien reflète un débat qui agitait déjà la classe politique italienne au lendemain du Risorgimento : l’achèvement de l’unité nationale italienne avait en fait vu naître l’opposition entre une bourgeoisie capitaliste et industrieuse, mais plutôt conservatrice, qui s’appuyait cette fois sur l’Italie du Nord, et une bourgeoisie terrienne méridionale issue du Mezzogiorno, et qui s’était rangée à gauche avec les héritiers du parti démocratique82.
34L’historien hongrois E. Ferenczy, dans une série d’articles qui constituent l’une des mises au point les plus récentes sur Appius Claudius Caecus, fait de cet homme le portrait élogieux d’un grand homme d’État, courageux et clairvoyant, inspiré par l’exemple athénien et agissant par patriotisme pour la plus grande gloire de l’État romain83. Pour E. Ferenczy, Appius Claudius est « l’une des figures de proue de la vie politique et intellectuelle de l’ancienne Rome » : il s’agit en effet selon lui du « premier réformateur important de l’État et de la société romaine »84 ; il est dès lors normal que ses innovations aient suscité l’hostilité de l’ensemble de la classe dirigeante romaine, contribuant ainsi à déformer l’image qu’en ont transmise les sources : l’image d’un Appius Claudius démagogue et réactionnaire n’est donc qu’une calomnie inventée par l’historiographie romaine. À l’instar de Th. Mommsen, l’historien hongrois compare la réforme des tribus organisée par Appius au cours de sa censure à la réforme constitutionnelle de Clisthène85. D’autre part, il n’est pas contradictoire qu’Appius ait pu à la fois prendre des mesures démocratiques et adopter une attitude hostile à l’égard de la noblesse plébéienne; en fait, Appius Claudius a voulu promouvoir la population urbaine de Rome, composée de commerçants et d’artisans, afin de renforcer les capacités militaires de la République. Selon E. Ferenczy, l’objectif essentiel d’Appius était en réalité de faire de Rome une grande puissance, respectée de ses voisins. Mais les hypothèses de l’historien hongrois, à la fois à cause de leur caractère trop systématique et d’un sens critique jugé parfois insuffisant, ont en général obtenu un accueil plutôt réservé, et ont parfois même suscité quelques critiques assez virulentes86.
35L’historien B. MacBain87 a renoué avec la tradition qui vise à faire d’Appius Claudius un démagogue, dont toute l’activité politique, et en particulier ses grands travaux, avait pour objectif de gagner ou de récompenser des clients. Selon lui, Appius était pour ainsi dire un homo novus au début de sa carrière88, puisqu’avant lui la gens Claudia n’avait joué qu’un rôle secondaire. Aussi cet héritier d’une grande famille depuis trop longtemps tenue à l’écart aurait-il été contraint de se constituer une vaste clientèle personnelle pour s’assurer une place parmi les leaders de l’oligarchie romaine. Ainsi s’expliqueraient l’introduction d’alliés au sénat, les conflits permanents avec le clan des Fabii, les mesures démagogiques en faveur des affranchis et la construction de l’aqua ainsi que de la via Appia89.
36Quant à P. M. Martin, il renouvela le cliché mommsénien d’un Appius Claudius aspirant à la tyrannie : pour lui, cette « prestigieuse figure républicaine, d’une extrême complexité », présente « des aspects monarchiques affirmés », et l’historien va jusqu’à parler du « “principat” d’Ap. Claudius Caecus »90. D’une part, Appius Claudius aurait été un « aristocrate démagogue » s’opposant à Fabius, « le conservateur libéral »; d’autre part, le caractère royal de sa personnalité s’expliquerait par son « numaïsme pythagoricien » qui s’inscrit dans le renouveau du pythagorisme que connaît l’Italie du Sud depuis Archytas de Tarente91. Appius Claudius Caecus, en s’opposant au « conservatisme aristocratique romain », aurait ainsi été « le premier représentant d’une ligne culturelle philhellénique » à Rome. De même, il aurait également été le premier à briser le « consensus républicain » qui s’était instauré au sein de la classe dirigeante romaine depuis les lois licinio-sextiennes; aussi, « le “principat” de Caecus peut être considéré comme une lointaine ébauche » du principat d’Auguste.
37Conforme à l’esprit d’une époque où l’opinion se montre de plus en plus désabusée à l’égard de ses dirigeants et des grands desseins politiques, la recherche historique la plus récente tend à banaliser l’œuvre d’Appius Claudius Caecus, en ne voyant en lui qu’un politicien comme les autres, dont les défauts éventuels auraient été exagérés et « montés en épingle » par une tradition historique hostile aux Claudii92. Ainsi, R. Develin ne voit en lui qu’un « cas individuel », « membre conservateur d’un ordre conservateur » dont l’activité politique, certes habile, se limitait à « la pratique normale du jeu aristocratique »93.
38Enfin L. Loreto cède lui aussi à l’esprit de son époque en considérant que les réformes d’Appius se sont limitées à une simple « modernisation » et à une « rationalisation » des structures de l’État romain, avec l’appui d’une partie importante de l’ordre sénatorial, duquel le célèbre censeur n’aurait été que « l’homme de paille »94. Dans un travail de synthèse ultérieur dont le titre annonce « un’epoca di buon senso », l’historien italien interprète l’activité édilitaire d’Appius Claudius (construction de la via Appia et de l’aqua Appia, mais aussi édification d’un temple à Bellone...) dans une perspective purement économiste, en rapport direct avec les obsessions d’une société contemporaine touchée par le problème du chômage95 : L. Loreto voit dans cette « politique de grands travaux » une réponse à la crise économique que Rome aurait traversée dans le dernier quart du ive siècle, et dont l’abolition du nexum en 326 serait une preuve évidente; mieux encore, partant de l’indication donnée par Diodore (XX, 36, 1-2), selon qui Appius Claudius aurait vidé le trésor public pour mener à bien ses grands travaux, cet auteur considère que la « politica economica di Appio » aurait eu « un carattere anti-tesaurizzante » et aurait été « keynésienne » avant la lettre, afin de susciter un processus de réactions en chaîne à partir d’investissements publics et d’entraîner ainsi toute l’économie dans une lutte contre l’inflation (sic!) : de ce point de vue, Appius Claudius aurait été « un autentico Roosevelt del IV sec ».
39Finalement, après un siècle et demi de recherche historique, la figure d’Appius Claudius demeure encore bien « mystérieuse »96. Les nombreuses interprétations qui ont été présentées de sa personnalité et de son action politique reflètent bien souvent des préoccupations politiques ou idéologiques de circonstance, ou pour le moins des visions anachroniques, que ce soit l’aristocrate réactionnaire comme le voyait B. G. Niebuhr, le Junker démagogue de Th. Mommsen, le héros garibaldien d’A.-G. Amatucci, le « torydemocrat » d’A. J. Toynbee97, ou le « Roosevelt romain » de L. Loreto98. Une étude même superficielle de l’historiographie moderne de ce personnage informe peut-être davantage sur l’époque contemporaine que sur celle de la Rome médio-républicaine. Mais le mystère qui entoure l’activité d’Appius Claudius, malgré le nombre important des études récentes et une bibliographie imposante, tient aussi (et surtout) à la qualité des sources littéraires anciennes qui servent de point de départ à toute réflexion historique.
Objectifs et méthode
40Une étude historique sur Appius Claudius Caecus ne peut pas véritablement être une biographie : à moins de vouloir reconstituer, à l’exemple de B. G. Niebuhr, le discours que le vieil homme aurait prononcé au Sénat contre les conditions de paix que Pyrrhus cherchait à imposer à Rome et qui semblaient séduire une partie des sénateurs, toute tentative de ce genre s’aventurerait sur le terrain du roman historique99. Les lacunes et la myopie de sources littéraires dans l’ensemble bien postérieures à l’époque du personnage nécessitent un élargissement de la perspective historique : l’activité d’un personnage comme Appius Claudius peut en fait difficilement être isolée, et doit être replacée dans les évolutions d’une époque, et mise en parallèle avec les informations disponibles sur d’autres régions d’Italie, comme l’Étrurie, la Campanie ou la Grande-Grèce, dont le matériel archéologique est souvent plus riche pour cette époque que celui de Rome.
41Le problème des sources est évidemment crucial dans toute recherche historique, particulièrement pour les périodes où celles-ci sont rares, tardives et finalement peu fiables. A l’exception de l’Ineditum Vaticanum100, les sources littéraires actuellement disponibles sur Appius Claudius Caecus et la période médio-républicaine sont les mêmes qu’à l’époque de B. G. Niebuhr et de Th. Mommsen. L’archéologie de la Rome médio-républicaine, après avoir annoncé de grands bouleversements dans nos connaissances101, semble aujourd’hui marquer le pas, et il ne faut pas s’attendre à de nouvelles découvertes sensationnelles dans un avenir immédiat. Il peut dès lors paraître vain, voire présomptueux, de vouloir entamer une nouvelle recherche historique sur un personnage aussi controversé qu’Appius Claudius Caecus, et sur lequel tout et son contraire semblent déjà avoir été dit...
42La recherche historique a cependant réussi à faire progresser de façon notable nos connaissances sur les ive et iiie siècles à Rome et en Italie. La formation du système de valeurs idéologiques de la nobilitas romaine est aujourd’hui bien connue grâce aux travaux de T. Hölscher et de K.-J. Hölkeskamp, qui ont su exploiter avec profit les apports de l’archéologie, de l’histoire culturelle et de la sociologie102. Les colloques de Tarente ont permis de mieux mettre en lumière l’influence décisive de la Grande-Grèce dans le domaine des modes de représentation et des comportements politiques, sociaux et culturels des élites italiennes de cette époque. Les fouilles archéologiques entreprises dans les colonies latines les plus anciennes, à Frégelles, Alba Fucens, Cosa et Paestum, permettent aujourd’hui de se faire une idée plus précise non seulement de l’urbanisme romain contemporain, mais aussi de la fonction et de l’organisation idéologiques des principaux monuments publics du centre politique de Rome103. Bref, dans tous les domaines, la connaissance historique a pu progresser lorsqu’elle a su élargir les problématiques et s’ouvrir à un contexte plus large. C’est sur cette méthode que devrait s’appuyer toute nouvelle exploitation historique des sources littéraires rapportant les événements des ive et iiie siècles, notamment s’il s’agit d’évaluer l’œuvre d’un personnage comme Appius Claudius Caecus.
43Une meilleure prise en compte du contexte historique, élargi dans le temps et dans l’espace à l’ensemble du ive siècle et à la totalité de la péninsule italienne, est certainement une condition préalable à toute nouvelle recherche historique sur ce personnage : quelle qu’elle fût, son œuvre était certainement indissociable des grandes mutations politiques, sociales et culturelles que Rome a connues au cours du ive siècle, et qui se retrouvent à des degrés divers chez d’autres peuples ou d’autres cités d’Italie à la même époque104. Les sources littéraires, datant pour la plupart de la fin de la République ou de l’époque augustéenne, en ont sans doute gardé un souvenir plus ou moins confus, en y mêlant beaucoup ďanachronismes et d’incompréhensions : leur exploitation historique rend par conséquent nécessaire leur confrontation avec un contexte historique qu’elles ignoraient pour l’essentiel, ou qu’elles ne comprenaient plus. Or, cette « confrontation » montre que les sources littéraires ont su garder un souvenir assez exact des événements les plus marquants (comme l’existence de la censure d’Appius Claudius Caecus, la construction de la via Appia et de l’aqua Appia, l’existence d’une lectio senatus et peut-être aussi d’une recognitio equitum, une mystérieuse réforme des tribus, le discours prononcé contre Pyrrhus, etc.105), mais en les colorant de teintes anachroniques et en les analysant en fonction de préoccupations politiques et idéologiques bien plus tardives106. Autrement dit, si « l’infrastructure » historique du récit rapporté par les sources littéraires est vraisemblablement dans l’ensemble exacte, sa « superstructure » littéraire et idéologique se rapproche souvent davantage du roman historique que d’une véritable information historique107 : à l’historien moderne de faire le tri, en évitant toutefois de ne choisir dans les sources littéraires que les éléments qui intéressent sa démonstration... L’exploitation historique des sources littéraires doit en fait multiplier les approches, en s’attachant particulièrement aux éléments que les sources n’ont pas pu avoir inventés parce qu’ils ne représentaient pour elles aucun enjeu historique, qu’il fût politique, idéologique, culturel ou autre.
44En réalité, une nouvelle enquête historique sur Appius Claudius Caecus ne peut faire l’économie d’aucune source disponible, de quelque nature qu’elle soit : c’est sans doute pour avoir trop exclusivement exploité les seules sources littéraires de la tradition historiographique romaine que les historiens modernes n’ont souvent pas réussi à imaginer de nouvelles problématiques, les seules qui puissent apporter de véritables changements dans l’analyse et la compréhension historiques de ce personnage. Mais c’est parfois aussi, à la suite de Tite-Live et de l’ensemble de la tradition historiographique ancienne, une véritable méconnaissance du contexte historique général qui a pu empêcher les Modernes de saisir toute l’importance que pouvaient avoir d’autres champs disciplinaires, comme l’archéologie, l’histoire de l’art ainsi que celle de la pensée intellectuelle et philosophique, la numismatique, la sociologie, etc. Or, c’est uniquement en prenant en compte l’ensemble de l’information historique aujourd’hui disponible et en diversifiant les méthodes d’approche que l’exploitation des sources littéraires sur Appius Claudius Caecus peut encore apporter de nouvelles informations, dans la perspective de nouvelles problématiques108.
45Celles-ci peuvent notamment avoir pour objectif de mesurer l’impact sur la classe dirigeante romaine de la fin du ive siècle et sur l’activité d’Appius Claudius Caecus en particulier, de l’introduction à Rome de nouveaux concepts philosophiques, politiques et culturels venus de Grande-Grèce ou de Sicile, voire plus largement du monde hellénistique. L’histoire de l’art et l’archéologie, tout comme l’histoire sociale, révèlent en effet l’introduction volontaire de la part de la classe dirigeante romaine de cette époque de modèles culturels grecs, ou en tout cas fortement hellénisés, qui sont devenus des modes de représentation culturels et idéologiques auxquels cette nobilitas a cherché à s’identifier109.
46L’époque à laquelle se situe l’activité publique d’Appius Claudius Caecus, entre la fin du ive et le début du iiie siècles, correspond en effet à un moment essentiel de l’histoire de la Rome républicaine : c’est le moment où le vieux conflit patricio-plébéien cède la place à une forme de consensus politique qui s’est constitué autour des valeurs communes d’une nouvelle noblesse, née du partage des magistratures entre le patriciat et l’élite de la plèbe, et qui s’est renforcé avec les premiers pas de l’expansion romaine en Italie, notamment en direction de la Campanie110. Au cours de cette époque cruciale, encore souvent négligée dans les études récentes sur l’Antiquité romaine, la République romaine a connu d’immenses bouleversements à la fois internes et externes qui ont en grande partie jeté les bases de son avenir. C’est dans ce contexte que se placent les réformes institutionnelles de la censure de 312, rendues si confuses par les multiples interprétations des Anciens et des Modernes. Enfin, au moins depuis B. G. Niebuhr et Th. Mommsen, on considère généralement que le célèbre censeur a joué un rôle important dans l’introduction de l’hellénisme à Rome111 : dans quelle mesure celui-ci a-t-il pu fournir des modèles culturels ou idéologiques aux réformes alors entreprises? Appius Claudius Caecus peut ainsi devenir le point de départ d’une réflexion d’ensemble sur les institutions, la société et l’univers culturel de Rome à l’époque « médio-républicaine », et de cette manière fournir, entre les origines semi-légendaires du régime républicain et l’époque mieux connue de la République finissante, le « chaînon manquant » pour comprendre la mise en place, dans sa forme quasi définitive et accomplie, du système politique, institutionnel et idéologique de la République romaine.
Notes de bas de page
1 Cicéron arrête sa description historique de la formation de la constitution romaine au Décemvirat (Cic, De Rep., II, 61-63), tandis que Polybe considère que depuis 450 la constitution romaine n’a cessé de s’améliorer et de se perfectionner (VI, 11, 1), laissant ainsi supposer que son Archeologia Romana devait s’arrêter au décemvirat : cf. F. W. Walbank, A Historical Commentary on Polybius, I (Books I-VI), Oxford, 1957, p. 674. Toutefois, pour A. Lintott, The Constitution of the Roman Republic, Oxford, 1999, p. 2 et p. 16-27, Polybe insiste au contraire sur le caractère évolutif de la constitution de la République romaine (VI, 9, 10-14 et VI, 10, 12-14), que la classe dirigeante semble toujours avoir su adapter aux circonstances, du moins jusqu’à ce que, aux lendemains de la seconde guerre punique, celle-ci décida par conservatisme qu’il ne fallait plus rien y changer, ce qui devait entraîner sa faillite à travers les guerres civiles de la fin de la République.
2 Cf. déjà J. Heurgon, Rome et la Méditerranée occidentale jusqu’aux guerres puniques, Paris, 1969, p. 268 : « la constitution républicaine n’est pas sortie toute casquée de la tête de Jupiter ».
3 J. Poucet, Les Rois de Rome. Traditions et histoire, Louvain-la-Neuve, 2000, p. 117-129 et p. 45-47. Sur Fabius Pictor, cf. A. Momigliano, “Linee per una valutazione di Fabio Pittore”, dans RAL, 15, 1960, p. 310-320 (= Terzo Contributo, Rome, 1966, p. 55-68); Id., “Fabius Pictor et les origines de l’histoire nationale”, dans Id., Les fondations du savoir historique, Paris, 1992, p. 93-126; M. Chassignet, L’annalistique romaine, t. I, Les Annales des pontifes. L’annalistique ancienne (fragments), Paris, C.U.F., 1996, p. liv-lxxiii.
4 Cf. T. J. Cornell, The Beginnings of Rome. Italy and Rome from the Bronze Age to the Punic Wars (c. 1000-264 ВС), Londres-New York, 1995, p. 16-18.
5 Cf. W. Kierdorf, Laudatio funebris. Interpretationen und Untersuchungen zur Entwicklung der römischen Leichenrede, Meisenheim-am-Glan (Beiträge zur klassischen Philologie, 106), 1980; J. von Ungern-Sternberg, “Überlegung zur frühen römischen Überlieferung im Lichte der Oral-Tradition-Forschung”, dans G. Vogt-Spira éd., Studien zur vorliterarischen Periode im frühen Rom, Tübingen (ScriptOralia, 12), 1989, p. 11-27.
6 Cf. В. W. Frier, Libri Annales Pontificum Maximorum : The Origins of the Annalistic Tradition, Rome (P.M.A.A.R. 27), 1979.
7 Cf. E. Gabba, “Considerazioni sulla tradizione letteraria sulle origini della Repubblica”, dans Les origines de la République romaine, Fondation Hardt, Entretiens sur l’Antiquité Classique XIII, Vandœuvres-Genève, 1967, p. 135-174; Id., “Mondo ellenistico e Roma”, dans Athenaeum, 65, 1987, p. 205-210.
8 J. Poucet, Les Rois de Rome, p. 117-129.
9 E. Ferenczy, “La carrière d’Appius Claudius Caecus jusqu’à la censure”, dans AAntHung, 13, 1965, p. 379; Id., From the Patrician State to the Patricio-plebeian State, Amsterdam, 1976, p. 120; définition presqu’identique à celle qu’avait déjà donnée G. De Sanctis, Storia dei Romani, vol. II : La conquista del primato in Italia, Turin, 1907, p. 229, ainsi que W. Schur, “Appius Claudius”, dans P. R. Rohden et G. Ostrogorsky éd., Menschen die Geschichte machten, I, Vienne, 1931, p. 106. Un bon exposé de nos connaissances sur Appius Claudius Caecus à partir de nos sources se trouve dans la notice biographique de F. Münzer, s.v. Claudius (91), dans R.E., III, 2, 1899, col. 2681-2685; l’essentiel de la vulgate sur ce personnage est repris dans la récente biographie de B. Linke, « Appius Claudius Caecus », dans K.-J. Hölkeskamp et E. Stein-Hölkeskamp éd., Von Romulus zu Augustus. Große Gestalten der römischen Republik, Munich, 2000, p. 69-78.
10 Diod. XX, 36, 2 : αὑτοῦ δὲ μνημεῖον ἀθάνατον κατέλιπεν, εἰς κοινὴν εὐχρη-στίαν φιλοτιμηθείς. Cf. Β. G. Niebuhr, Histoire Romaine, trad. fr. de la Römische Geschichte par P. A. de Golbéry, t. V, Strasbourg, 1836, p. 406 : « Les nombreux monuments qu’il fonda transmirent à des milliers d’individus le souvenir de sa personne, et cette notion, bien que vague, se conserva plus longtemps que la mémoire d’aucun de ses contemporains ».
11 Diod. XX, 36, 1-2; Liv., IX, 29, 6; elogium d’Appius Claudius Caecus dans le C.I.L., I2, 1, p. 192, n° X (= I.L.S., 54; Inscr.It., XIII, 3, 79); Frontin., De aq., I, 5, 1-3; Paul. Fest., p. 23 L.; Pomp. ap. Dig., I, 2, 2, 36; Eutr., Brev., II, 9, 2; Auct. De vir. ill., 34, 6; Proc, Goth., I, 14, 6; Soud., s. ν. Ἀππία ὁδός.
12 La réunion du Sénat dans le temple de Bellone, pour attribuer au général vainqueur les honneurs du triomphe, est attestée au moins à partir de 211, pour le cas de M. Claudius Marcellus, un représentant de la branche plébéienne des Claudii (Liv., XXVI, 11, 1); pour la déclaration de guerre et l’accueil des ambassadeurs étrangers (surtout ceux des peuples avec lesquels Rome était en guerre), elle remonte probablement à l’époque de la guerre de Pyrrhus, lorsque la columna bellica fut installée devant le temple (Serv., In Aen., IX, 52), et lorsque Cinéas fut reçu par le Sénat, provoquant ainsi la réaction d’Appius Claudius qui y prononça peut-être son fameux discours : cf. E. Aust, s.v. Bellona, dans R.E., III, 1, 1897, col. 255; A. Viscogliosi, s.v. Bellona, aedes in Circo, dans L.T.U.R., I, 1993, p. 190-192; E. La Rocca, s.v. Columna bellica, dans ibid., p. 300-301.
13 Liv., Χ, 19, 17-21; elogium d’Appius Claudius Caecus dans le C.I.L., I2, 1, p. 192, n° Х (= I.L.S., 54; Inscr.It., XIII, 3, 12 et 79); Ovid., Fast., VI, 199-204. Cf. A. Ziolkowski, The Temples of Mid-Republican Rome and their historical and topographical context, Rome, 1992, p. 18-19; A. Viscogliosi, loc. cit., p. 190.
14 Plin., N.H., XXXV, 12; cf. Cic., Pro Cael, 33-34.
15 Cf. P. Zanker, Il Foro di Augusto, Rome, 1984, p. 15-16; Id., Augustus und die Macht der Bilder, Munich, 1987, p. 214-215; F. Coarelli, Roma. Guide archeologiche Laterza, Rome-Bari, 1980, p. 105-106; voir infra, p. 50-51, les figures 1-2.
16 Inscr.It., XIII, 3, 12 et 79 (cf. C.I.L., F, 1, p. 192, n° X; I.L.S., 54). Voir infra, p. 52, fig. 3.
17 Cf. Enn., Ann., VI, 202-203 V2 = 199-200 Sk.; Cic., Brut., 55 et 61; Cat. M., 16; Ined. Vat., dans F.Gr. Hist., 839, 2; Liv., Per., 13, 6; elog., dans C.I.L., I2, 1, p. 192, n° Х (= 1.Լ.Տ., 54; Inscr.It., XIII, 3, 79); Ovid., Fast.,VI, 203-204; Val. Max., VIII, 13, 5; Quint., Inst., II, 16, 7; Suet., Tib., II, 1; Plut., Pyrr., 18, 7-19, 5; Flor., I, 13, 20; App., Samn., X, 2 (= fr. 11 [n° 1] Malcovati) Amp., 19, 2; Pomp., ap. Dig. I, 2, 2, 36; Auct. De vir. ill, 34, 9; Isid., Etym., I, 38, 2; Zon. (D.C.), 8, 4.
18 Th. Mommsen, “Die patricischen Claudier”, dans Id., Römische Forschungen, I, Berlin, 1864, p. 303 (cf. Th. Mommsen, “La gens patricienne des Claudius”, tr. fr. des Römische Forschungen, dans Histoire Romaine, tr. fr. С. Nicolet éd., t. 1, Paris, 1985, p. 1091).
19 Cf. Cic, Cat. M, 16 : Ad Αρ. Claudi senectutem accedebat etiam ut caecus esset; tamen is, cum sententia senatus inclinare! ad pacem cum Pyrrho foedusque fa-ciundum, non dubitavit dicere illa quae versibus persecutus est Ennius : « Quo vo-bis mentes, rectae quae stare solebant I Antehac, dementes sese flexere viai† ? » cete-raque gravissume; notum enim vobis carmen est; et tamen ipsius Appi exstat oratio. Atque haec ille egit septimo decimo anno post alterum consulatum, cum inter duos consulatus anni decem interfuissent censorque ante superiorem consulatum fuisset; ex quo intellegitur Pyrrhi bello eum grandem sane fuisse; et tamen sic a patribus accepimus. A.-G. Amatucci, “Appio Claudio Cieco”, dans RFIC, 22, 1893-94, p. 233, a été le premier à associer le surnom de Caecus avec le discours prononcé contre Pyrrhus; cf. également P. Lejay, dans RPh, 44, 1920, p. 140. Frontin (De aq., I, 5, 1) est la seule source à lui attribuer un autre cognomen : celui de Crassus, déjà porté par son grand-père, consul en 349, et qui a certainement dû être son cognomen original. E. Pais, Storia critica di Roma durante і primi cinque secoli, vol. IV, I Sanniti ed і Galli. Pirro e Cartagine. Roma alla testa della confederazione Italica, Rome, 1920, p. 204-206, donne une interprétation assez différente du cognomen d’Appius : il rapproche celui-ci du surnom Caudex, porté par un Appius Claudius qu’Aulu-Gelle (N.A., XVII, 21, 40) considère comme un frère de Caecus, et considère que cela signifie tout simplement “le mal-voyant” ; il rapproche enfin l’épisode du discours d’Appius devant le Sénat, de l’histoire de Timoléon qui, devenu aveugle, se faisait transporter sur l’agora pour donner des conseils aux Syracusains (cf. Plut., Timol., 38, 5-7; Corn. Nep., Timol., 4, 1-2).
20 Cic, Cat. M, 16 : et tamen ipsius Appi exstat oratio. Varr., De gener. litterar., fr. 319 Funaioli (voir infra p. 63, n. 100). Sur la question du discours d’Appius Claudius et de l’opinion de Cicéron à son sujet, voir infra, p. 61-73.
21 Dans le domaine juridique, on attribuait à Appius Claudius la rédaction d’un De Usurpationibus : Pomp., Ench., ap. Dig., I, 2, 2, 36; on lui attribuait également la publication du droit public par l’intermédiaire de son scribe Cn. Flavius : Plin., N.H., XXXIII, 17; Pomp., Ench., ap. Dig., I, 2, 2, 7; enfin Tite-Live lui reconnaissait d’incontestables talents de juriste : Liv., X, 15, 12; X, 22, 6-7 (voir infra p. 41 n. 31). Cf. M. Schanz et C. Hosius, Geschichte der römischen Litteratur bis zum Gesetzgebungswerk des Kaisers Justinian, t. 1, Die römische Litteratur in der Zeit der Republik, Munich, 19794, p. 40-42.
22 Sall., Epist., I, 1, 2; Fest., s.v. Stuprum, p. 418 L.; Prisc, Institut, grammatic, VIII, 18 (H. Keil, Grammatici Latini, II, Leipzig, 1855-1880, p. 384).
23 Cic, Tusc., IV, 4 : Mihi quidem etiam Appi Caeci carmen, quod valde Panae-tius laudat epistula quadam quae est ad Q. Tuberonem, Pythagoreum videtur. Cf. M. Humm, “Una sententia pitagorica di Appio Claudio?”, dans M. Tortorelli Ghidini, A. Storchi Marino, A. Visconti éd., Tra Orfeo e Pitagora. Origini e incontri di culture nell’Antichità (Atti dei seminari napoletani 1996-1998), Naples, 2000, p. 445-462; voir infra p. 526-539.
24 Pomp., Ench., ap. Dig., I, 2, 2, 36 : Idem Appius Claudius, qui videtur ab hoc processisse, R litteram invenit, ut pro Valesiis Valerii essent et pro Fusiis Furii. Mart. Cap., III, 261 : Z vero idcirco Appius Claudius detestatur quod / dentes mortui dum exprimitur imitatur.
25 Cf. T.R.S. Broughton, The Magistrates of the Roman Republic, I, 509 B.C.-lOO B.C., New York, 1951, p. 160; d’après Diod., XX, 36, 1, la censure eut lieu en 310. Mais il est difficile et très aléatoire de vouloir établir une chronologie absolue pour cette période, aussi est-il préférable de conserver la chronologie traditionnelle établie par Varron : A. Lotti Faravelli, La censura di Appio Claudio Cieco e la questione della cronologia, Côme, 1937; A. Garzetti, “Appio Claudio Cieco nella storia politica del suo tempo”, dans Athenaeum, 25, 1947, p. 190-195; E. Ferenczy, “The Censorship of Appius Claudius Caecus”, dans AAntHung, 15, 1967, p. 34-37; Id., From the Patrician State to the Patricio-plebeian State, Amsterdam, 1976, p. 150-152; T. J. Cornell, “The Recovery of Rome”, dans C.A.H.2, VII, 2, 1989, p. 347-350.
26 Cf. Liv., IX, 29, 8 et IX, 33, 4; Frontin., De aq., I, 5, 1-3. D’après la tradition, la lex Aemilia qui limite la durée de la censure à 18 mois aurait été créée par L. Aemilius Mamercinus en 434 (Liv., IV, 24, 6) : G. Rotondi, Leges publicae po puli Romani, Milan, 1912, p. 211; J. Suolahti, The Roman Censors. A Study on Social Structure, Helsinki, 1963, p. 26-29, considère que la durée de 18 mois a été la durée initiale de la censure, mais que cette durée a eu tendance à être prolongée lorsqu’ont commencé à se développer les grands travaux publics à Rome et que le premier exemple a pu être Appius Claudius Caecus pour la construction de Vaqua Appia et de la via Appia.
27 D’après Diod., XX, 36, 1.
28 Cf. Diod., XX, 36, 3; XX, 36, 5; Liv., IX, 29, 6-7; IX, ЗО, 1-2; Liv., IX, 46, 10-11; Suet., Claud., XXIV, 3; Auct. De vir. ill, 34, 1. Voir infra, p. 219-226 pour l’interprétation probable à donner au mot libertinus pour cette époque.
29 D’après Diod., XX, 36, 5 : Καὶ κατὰ μὲν τὴν τῶν ἱππέων δοκιμασίαν οὑδενòς ἀφείλετο τòν ἵππον. Cf. С. Nicolet, L’ordre équestre à l’époque républicaine (312-43 av. J.-C), t. 1, Définitions juridiques et structures sociales, Paris, 1966 (BEFAR 207), p. 44 et p. 70.
30 Cf. Diod., XX, 36, 4; Liv., IX, 46, 10-11.
31 Cf. Liv., IX, 29, 9-11 et IX, 34, 18-19; Dion. Hal., XVI, 3, 1 (= 16 E Pittia); Val. Max., I, 1, 17; Fest., p. 270 L., s.v. Potitium; Lact., Inst., II, 7, 15; Auct. De vir. ill., 34, 2; Macr., Sat., III, 6, 12-13; Serv., In Verg. Aen., VIII, 179 et VIII, 269. Sur l’aspect légendaire des différents récits sur la cécité d’Appius, cf. Th. Mommsen, dans Römische Forschungen, I, Berlin, 1864, p. 302.
32 C’est sans doute ce qui explique le fait qu’Appius Claudius ait pu revêtir la censure avant d’avoir pu accéder au consulat; sur les six exemples connus, Appius est le premier à avoir exercé la censure avant le consulat : Th. Mommsen, Le droit public romain, II, Berlin, 1892, tr. fr. Paris, 1984, p. 207 et n. 1.
33 Cf. Pomp., Ench., ap. Dig., I, 2, 2, 36 : Appius Claudius [...] maximam scientiam habuit : hic Centemmanus appellatus est.
34 E. Ferenczy, dans AAntHung, 13, 1965, p. 379.
35 Cf. notamment Cicéron qui, dans un certain nombre de discours, a à plusieurs reprises utilisé l’image d’Appius contre Clodius ou sa sœur : Dom., 105; Har. resp., 38; Pro Cad., 33-35; Pro Mil, 17.
36 Cf. Cic, Tusc, IV, 4 et V, 112; Cat. M, 16 et 37; Sen., Ep., XIX, 114, 13.
37 Cf. Cic., Brut., 55 et 61; De orat., I, 186; Quint., Inst., II, 16, 7 et V, 11, 9; Tac, Dial., XVIII, 3-4 et XXI, 7.
38 Notamment dans les Factorum et dictorum memorabilium libri de Valère Maxime, de loin le plus important et le mieux connu des recueils à’exempla : cf. C. Bosch, Die Quellen des Valerius Maximus. Ein Beitrag zur Erforschung der Literatur der historischen Exempla, Stuttgart, 1929; W. M. Bloomer, Valerius Maximus and the Rhetoric of the new Nobility, Chapel Hill, 1992. Appius Claudius Caecus est cité trois fois par Valère Maxime : I, 1, 17; VII, 2, 1 et VIII, 13, 5; cf. M. Humm, “L’image de la censure chez Valère Maxime : formation et évolution d’un paradigme”, dans J.-M. David éd., Valeurs et mémoire à Rome : Valère Maxime ou la vertu recomposée, Paris, 1998, p. 73-93.
39 Pour une définition de l’exemplum dans l’Antiquité romaine et les références bibliographiques, cf. Rhétorique et histoire. L’exemplum et le modèle de comportement dans le discours antique et médiéval, Table ronde organisée par l’École Française de Rome (le 18 mai 1979), dans MEFRM, 92, 1980, 1, en particulier : J.-M. David, “Présentation”, p. 9-14; Id., “Introduction bibliographique. Antiquité”, p. 15-23; Id., “Maiorum exempla sequi : l’exemplum historique dans les discours judiciaires de Cicéron”, p. 67-86. Voir aussi M. Stemmler, “Auctoritas exempli. Zur Wechselwirkung von kanonisierten Vergangenheitsbildern und gesellschaftlicher Gegenwart in der spätrepublikanischen Republik”, dans В. Linke et M. Stemmler éd., Mos maiorum. Untersuchungen zu den Formen der Identitätsstiftung und Stabilisierung in der römischen Republik, Stuttgart, 2000, p. 141-205.
40 Cf. J.-M. David, dans Rhétorique et histoire, p. 82 : « l’exemplum peut pousser un individu à adopter un comportement », « la [motivation] la plus claire est celle qui poussera un homme politique romain à rester digne de ses ancêtres », « pour rester dans la continuité d’une tradition familiale, un magistrat sera donc tenté de reproduire le comportement de l’un de ses ancêtres ».
41 Cic, Fam., III, 11,5: Vale et in censura, si iam es censor, ut spero, de proavo multum cogitato tuo.
42 Cic., Fam., III, 7, 5 et III, 9, 1.
43 Cf. Cic., Pro Cael., 33 : illo austero more ас modo.
44 Nous discuterons naturellement plus loin ce qu’il faut exactement entendre par ces réformes : infra, p. 185-226 et p. 399-439.
45 Voir à ce propos ce qu’écrivit déjà G. Bloch, La République romaine. Conflits politiques et sociaux, Paris, 1913, p. 109-110 : « Il n’y a peut-être pas dans tout le cours de l’histoire romaine de figure plus curieuse, plus significative [que celle d’Appius Claudius Caecus]. Elle déconcerte au premier abord par un air énigmatique, par un ensemble de traits contradictoires qu’on a peine à concilier. C’est qu’il y avait en ce personnage singulier deux hommes, l’un hardiment tourné vers l’avenir, l’autre asservi à tous les préjugés et à toutes les rancunes du passé. »
46 Récapitulation sommaire des principales théories modernes sur la personnalité et l’activité d’Appius Claudius Caecus chez : P. Lejay, “Appius Claudius Caecus”, dans RPh, 44, 1920, p. 96-100; A. Garzetti, dans Athenaeum, 25, 1947, p. 176-177; E. S. Staveley, “The political Aims of Appius Claudius Caecus”, dans Historia, 8, 1959, p. 411-418; L. R. Taylor, The voting Districts of the roman Republic (PMAAR, XX), Rome, 1960, p. 135 n. 10; C. Nicolet, “Appius Claudius et le double Forum de Capoue”, dans Latomus, 20, 1961, p. 686-690; F. Càssola, I gruppi politici romani nel III secolo a.C, Trieste, 1962, p. 128-137; E. Ferenczy, “La carrière d’Appius Claudius Caecus jusqu’à la censure”, dans AAntHung, 13, 1965, p. 382-384; Id., dans AAntHung, 15, 1967, p. 27-34; Id., From the Patrician State, p. 122-124 et p. 144-150; J. Heurgon, Rome et la Méditerranée occidentale jusqu’aux guerres puniques, Paris, 1969, p. 315-320; E. J. Phillips, “Roman Politics during the Second Samnite War”, dans Athenaeum, 50, 1972, p. 350-354; B. MacBain, “Appius Claudius Caecus and the Via Appia”, dans CQ, 30, 1980, p. 356-360; K. J. Hölkeskamp, Die Entstehung der Nobilität. Studien zur sozialen und politischen Geschichte der Römischen Republik im 4. Jhdt. v. Chr., Stuttgart, 1987, p. 49-50; K. A. Raaflaub, J. D. Richards et L. J. Samons, “Rome, Italy, and Appius Claudius Caecus before the Pyrrhic Wars”, dans T. Hackens, N. D. Holloway, R. R. Holloway et G. Moucharte éd., The Age of Pyrrhus, Louvain, 1992, p. 13-50.
47 B. G. Niebuhr, Histoire Romaine, trad. fr. de la Rötnische Geschichte par P. A. de Golbéry, t. V, Paris, 1836, p. 406-434.
48 W. Siebert, Über Appius Claudius Caecus mit besonderer Berücksichtigung seiner Censur, Kassel, 1863.
49 Toutefois, W. Siebert, Über Appius Claudius Caecus, p. 20 et p. 108, n’exclut pas qu’Appius Claudius ait pu agir pour le bien de l’État et qu’on puisse être tenté de voir en lui de l’égoïsme là où il était peut-être inspiré par des motivations plus nobles.
50 Cf. notamment Th. Mommsen, Römische Geschichte, I, Bis zur Schlacht zur Pydna, Berlin, 18562, p. 307-308, p. 449, p. 456-457 et p. 461 (cf. Th. Mommsen, Histoire Romaine, tr. fr. de CA. Alexandre, C. Nicolet éd., t. I, Paris, 1985, p. 228, p. 331-332, p. 337 et p. 340); Id., dans Römische Forschungen, I, Berlin, 1864, p. 287-318.
51 Cette réforme des tribus, capitale pour comprendre l’interprétation que fait Th. Mommsen de la censure d’Appius Claudius Caecus, expliquerait selon lui le passage de la tribu territoriale à la tribu personnelle : cf. Th. Mommsen, Die römische Tribus in administrativer Beziehung, Altona, 1844, p. 154-157; Id., Le droit public romain, IV, Paris, 1894, p. 84-85.
52 Th. Mommsen, Histoire Romaine, I, p. 337.
53 Th. Mommsen, Histoire Romaine, I, p. 337.
54 Th. Mommsen, “La gens patricienne des Claudius”, tr. fr. des Römische Forschungen par С. A. Alexandre, dans Th. Mommsen, Histoire Romaine, p. 1092 (cf. Id., Römische Forschungen, I, Berlin, 1864, p. 306).
55 Cf. l’analyse de C. Nicolet sur la vie et l’œuvre de Th. Mommsen dans l’Introduction de l’Histoire Romaine, en particulier p. xxxii-xxxlx; C. Nicolet montre combien le libéral Mommsen fut marqué par la crise politique et morale qui ébranla l’Allemagne en 1848, où l’aristocratie terrienne et féodale fut en butte à une bourgeoisie active, avant que ne soit constitué, quelques années plus tard, l’empire wilhelmien; cf. aussi A. Heuss, Theodor Mommsen und das 19. Jahrhundert, Kiel, 1956.
56 Th. Mommsen, “La gens patricienne des Claudius”, dans Histoire Romaine, I, p. 1093.
57 Th. Mommsen, Histoire Romaine, I, p. 337.
58 Th. Mommsen a été le premier à vouloir reconnaître Appius Claudius Caecus dans le Claudius Drusus qui se serait fait élever une statue diademata à Forum Appii (Suet., Tib., II) : Th. Mommsen, Römische Forschungen, I, Berlin, 1864, p. 308-309.
59 С. Nicolet, dans Th. Mommsen, Histoire Romaine, I, p. xxxvii.
60 Sur l’opposition de Th. Mommsen à Bismarck, auquel il reprochait sa dérive vers l’autoritarisme et le militarisme, cf. C. Nicolet, dans Th. Mommsen, Histoire Romaine, I, p. xxxiv-xxxv. Voir également St. Rebenich, Theodor Mommsen und Adolf Harnack. Wissenschaft und Politik im Berlin des ausgehenden 19. Jahrhunderts, Berlin-New York, 1997, p. 333-346 : Th. Mommsen adhéra en 1861 au “Parti du Progrès” (Deutsche Fortschrittspartei) dont le programme électoral était de « défendre la constitution contre M. Bismarck et ses séïdes ».
61 C. Sieke, Appius Claudius Caecus Censor, Marburg, 1890; l’influence des théories de Mommsen sur la perception de la personnalité et l’œuvre d’Appius Claudius Caecus se retrouve à des degrés divers dans la plupart des ouvrages généraux consacrés à l’histoire romaine et publiés en Allemagne vers la fin du siècle : cf. L. Lange, Römische Alterthümer, II, 2, Staatsalterthümer, Berlin, 18793, p. 76-90; W. Ihne, Römische Geschichte, I, Von der Gründung Roms bis zum ersten punischen Kriege, Leipzig, 18932, p. 409-424, et p. 491-493; F. Münzer, s.v. Claudius (91), dans R.E., III, 2, 1899, col. 2681-2685, reprend, dans un article qui fait une rapide synthèse des connaissances qu’on avait à l’époque sur ce personnage, les principales idées de Mommsen : la réforme des tribus avec l’admission des non-propriétaires fonciers, parmi lesquels essentiellement des affranchis, la démagogie d’Appius (« ein rücksichtloser demagogischer Neuerer ») et son attitude d’aristocrate intolérant caractéristique des Claudii; par contre, F. Münzer n’aborde qu’incidemment le rôle et l’activité d’Appius dans Römische Adelsparteien und Adelsfamilien, Stuttgart, 1920; l’influence des théories de Mommsen se retrouve plus tard également en France dans l’Histoire générale publiée sous la direction de G. Glotz : G. Bloch et J. Carcopino, Histoire Romaine, t. II, La République romaine de 133 avant J.-C. à la mort de César, Paris, 1929, p. 20-21, reprennent entièrement la théorie de Mommsen sur la réforme des tribus par Appius Claudius, dont le but visé aurait été « la restauration de la caste patricienne [en] s’appuyant sur l’élément populaire »; cf. déjà G. Bloch, “La plèbe romaine”, dans Revue historique, 107, 1911, p. 30-33 : « une politique qui enrôlait la démagogie au service de la restauration patricienne », pour « faire obstacle à la poussée des hommes nouveaux ».
62 C. Sieke, Appius Claudius Caecus Censor, p. 81-82.
63 A.-G. Amatucci, “Appio Claudio Cieco”, dans RFIC, 22, 1893-94, p. 227-258.
64 A.-G. Amatucci, dans RFIC, 22, 1893-94, p. 234.
65 A.-G. Amatucci, dans RFIC, 22, 1893-94, p. 235.
66 E. Pais, Storia critica di Roma durante і primi cinque secoli, vol. IV, I Sanniti ed і Galli. Pirro e Cartagine. Roma alla testa della confederazione Italica, Rome, 1920, p. 177-219; Id., Storia di Roma dalle origini all’inizio delle guerre puniche, vol. V, Dalla resa di Napoli all’intervento di Pirro. Roma alla testa della confederazione Italica, Rome, 1928, p. 193-237; par contre, l’historien italien s’est montré beaucoup moins “hypercritique” dans d’autres ouvrages : cf. E. Pais, Storia di Roma, I, 2, Critica della tradizione dalla caduta del decemvirato all’intervento di Pirro, Turin, 1899, p. 452-463; E. Pais, Histoire Romaine, t. I, Des origines à l’achèvement de la conquête, Paris, 1926, p. 163-164.
67 E. Pais, Ancient Italy, Chicago-Londres, 1908, p. 294.
68 G. De Sanctis, Storia dei Romani, II, 1907, p. 226-230, p. 335, p. 354, p. 451, p. 506-509 et p. 524 (cf. 2e édition : Florence, 1960, p. 213-217, p. 319, p. 336, p. 429, p. 485-488 et p. 502-503).
69 G. Bloch, La République romaine, p. 109-119.
70 L. Homo, Les institutions politiques romaines de la cité à l’État, Paris, 1927, p. 71-76, en part. p. 72. G. Dumézil, Servius et la Fortune. Essai sur la fonction sociale de louange et sur les éléments indo-européens du cens romain, Paris, 1943, p. 130-131, emprunta à L. Homo les mêmes termes pour analyser l’œuvre politique d’Appius Claudius.
71 P. Lejay, “Appius Claudius Caecus”, dans RPh, 44, 1920, p. 92-141.
72 P. Lejay, dans RPh, 44, 1920, p. 124-125.
73 A. Grenier, Le génie romain dans la religion, la pensée et l’art, Paris, 1925, p. 93-99.
74 K. J. Beloch, Römische Geschichte bis zum Beginn der Runischen Kriege, Berlin-Leipzig, 1926, p. 481-483.
75 K. J. Beloch, Römische Geschichte, p. 265-268 et p. 482; cf. P. Fraccaro, “Tribules ed Aerarli. Una ricerca di diritto pubblico romano”, dans Athenaeum, 21, 1933, p. 150-172 (= Opuscula, 2, Pavie, 1957, p. 149-170) : il s’agit d’une démolition en règle de la théorie de Mommsen sur l’organisation des tribus romaines jusqu’à la censure d’Appius Claudius Caecus; selon lui, en 312, tous les citoyens romains, qu’ils fussent propriétaires fonciers ou non, étaient inscrits dans les tribus; contra : E. Gintowt, “Le changement du caractère de la tribus romaine, attribué à Appius Claudius Caecus”, dans Eos, 43, 1948-49, p. 198-210.
76 W. Schur, “Appius Claudius”, dans P. R. Rohden et G. Ostrogorsky éd., Menschen die Geschichte machten, I, Vienne, 1931, p. 106-110; voir également W. Schur, “Fremder Adel im römischen Staat der Samniterkriege”, dans Hermes, 59, 1924, p. 463-466.
77 A. Garzetti, “Appio Claudio Cieco nella storia politica del suo tempo”, dans Athenaeum, 25, 1947, p. 175-224.
78 F. Münzer, Römische Adelsparteien und Adelsfamilien, passim.
79 Dans le même sens, en faveur d’un Appius Claudius que rien ne distinguerait des autres hommes politiques de son temps, cf. E. J. Phillips, “Roman Politics during the Second Samnite War”, dans Athenaeum, 50, 1972, p. 350-351.
80 E. S. Staveley, “The political Aims of Appius Claudius Caecus”, dans Historia, 8, 1959, p. 410-433.
81 F. Càssola, I gruppi politici romani nel III secolo a.C, Trieste, 1962, p. 128-137 et p. 199-203.
82 Sur “les premiers choix économiques” après le Risorgimento, cf. S. Romano, Histoire de l’Italie du Risorgimento à nos jours, Paris, 1977, p. 61-67.
83 E. Ferenczy, “La carrière d’Appius Claudius Caecus jusqu’à la censure”, dans AAntHung, 13, 1965, p. 379-404; Id., “The Censorship of Appius Claudius Caecus”, dans AAntHung, 15, 1967, p. 27-61; Id., “The Career of Appius Claudius Caecus after the Censorship”, dans AAntHung, 18, 1970, p. 71-103; ces trois articles furent repris et intégrés, avec quelques compléments, dans E. Ferenczy, From the Patrician State to the Patricio-plebeian State, Amsterdam-Budapest, 1976, p. 120-217 (chap. 4 à 6).
84 E. Ferenczy, dans AAntHung, 13, 1965, p. 379 et 380 (cf. Id., From the Patrician State, p. 120).
85 E. Ferenczy, dans AAntHung, 15, 1967, p. 58 (= Id., From the Patrician State, p. 169); cf. Th. Mommsen, Römische Forschungen, I, Berlin, 1864, p. 306 (= Id., “La gens patricienne des Claudius”, p. 1092).
86 Cf. A. Drummond, dans JRS, 72, 1982, p. 176-177; R. Develin, dans K. A. Raaflaub éd., Social Struggles in Archaic Rome, p. 347, n. 60; K. A. Raaflaub et alii, dans T. Hackens et alii éd., The Age of Pyrrhus, p. 36-37.
87 B. MacBain, dans CQ, 30, 1980, p. 356-372.
88 Même idée déjà chez E. Ferenczy, dans AAntHung, 13, 1965, p. 391 (cf. Id., From the Patrician State, p. 128).
89 Dans le même sens déjà, quoique moins systématique, L. R. Taylor, The voting Districts of the roman Republic, Rome (P.M.A.A.R., 20), 1960, p. 132-138, pensait qu’Appius avait fait construire la via Appia afin de permettre à ses clients, qui constituaient une partie de la forensis factio évoquée par Tite-Live, de se rendre aux comices tributes qu’il venait de réorganiser.
90 P. M. Martin, L’idée de royauté à Rome, I, De la Rome royale au consensus républicain, Clermont-Ferrand, 1982, p. 382-388; même le prudent J. Heurgon, dans Rome et la Méditerranée occidentale, p. 319, va jusqu’à dire : « il y avait en lui quelque chose des tyrans de Sicile ».
91 La thèse du pythagorisme d’Appius Claudius Caecus a notamment été développée par : L. Ferrero, Storia del pitagorismo nel mondo romano (dalle origini alla fine della Repubblica) Turin, 1955, p. 152-174; J. Carcopino, Aspects mystiques de la Rome païenne, Paris, 1962, p. 196-197; J. Carcopino, La basilique pythagoricienne de la Porte Majeure, Paris, 1963, p. 182; G. Garbarino, Roma e la filosofia greca dalle origini alla fine del II secolo a.C, Turin, 1973, II, p. 224-226. Cf. M. Humm, “Appius Claudius Caecus et l’influence du pythagorisme à Rome, fin 4e - début 3e siècles av. J.-C”, dans C. M. Ternes éd., Le pythagorisme en milieu romain, Actes des sixièmes “Rencontres scientifiques de Luxembourg”, Luxembourg (“Études Luxembourgeoises d’Histoire & de Littérature romaines”, vol. 2), 1998, p. 53-80; Id., “Les origines du pythagorisme romain : problèmes historiques et philosophiques”, (II) “L’origine tarentine du pythagorisme romain”, dans LEC, 65, 1997, p. 25-42; Id., dans M. Tortorelli Ghidini, A. Storchi Marino, A. Visconti éd., Tra Orfeo e Pitagora, Naples, 2000, p. 445-462.
92 Cf. T. P. Wiseman, Clio’s cosmetics. Three studies in greco-roman Literature, Leicester, 1979, p. 57-139.
93 R. Develin, The Practice of Politics at Rome 366-167 B.C., coll. Latomus, vol. 188, Bruxelles, 1985, p. 215-224.
94 L. Loreto, “La censura di Appio Claudio, l’edilità di Cn. Flavio e la razionalizzazione delle strutture interne dello stato romano”, dans A&R, 36, 1991, p. 181-203; Id., “Sui meccanismi della lotta politica a Roma tra il 314 e il 294 a.C”, dans AFLM, 24, 1991, p. 61-76; Id., “Crescita della repubblica e struttura dell’apparato amministrativo romano a cavallo tra IV e III sec. a.C”, dans Opus, 11, 1992, p. 69-81; Id., “Aspetti dell’ideologia del ceto magistratuale-senato-rio a Roma tra il 326 e il 264 a.C”, dans AFLM, 25-26, 1992-1993, p. 329-359.
95 L. Loreto, Un’epoca di buon senso. Decisione, consenso e stato a Roma tra il 326 e il 264 a.C, Amsterdam, 1993, en part. p. 81-88.
96 A. Piganiol, Histoire de Rome, Paris, 19462, p. 70.
97 A. J. Toynbee, Hannibal’s Legacy, The Hannibalic War’s effects on Roman Life, vol. I, Rome and her Neighbours before Hannibal’s Entry, Londres, 1965, p. 342.
98 L. Loreto, dans A&R, 36, 1991, p. 185, n. 15; Id., Un’epoca di buon senso, p. 85.
99 Cf. B. G. Niebuhr, Histoire Romaine, trad. fr. de la Römische Geschichte par P.A. de Golbéry, t. VI, Strasbourg, 1837, p. 229-238.
100 Voir infra, p. 62 et n. 94, et p. 69-71.
101 Voir notamment les espoirs qu’avait fait naître la célèbre exposition sur Roma medio repubblicana, mai-juin 1973 à Rome... mais les actes du colloque qui a accompagné l’exposition n’ont jamais été publiés!
102 Cf. T. Hölscher, “Römische Nobiles und hellenistische Herrscher”, dans Akten des XIII. Internationalen Kongresses für klassische Archäologie (Berlin 1988), Mayence, 1990, p. 73-84; K.-J. Hölkeskamp, Die Entstehung der Nobilität, passim.
103 Cf. Roma medio repubblicana, passim; F. Castagnoli, “Topografia e urbanistica di Roma nel IV secolo a.C”, dans StudRom, 22, 1974, p. 425-443; F. Coa-relli, “Lo sviluppo urbanistico della città nel periodo repubblicano”, dans I. Bon-dero et P. Pensabene éd., Roma repubblicana fra il 509 e il 270 a.C, Rome, 1982, p. 19-27; Id., Il Foro romano, II, Periodo repubblicano e augusteo, Rome, 19922, en part. p. 11-21 et p. 87-149. Pour une approche méthodologique de l’utilisation de données archéologiques dans l’analyse historique de la période médio-républicaine, cf. K. A. Raaflaub, “A Comprehensive and Comparative Approach”, dans K. A. Raaflaub éd., Social Struggles in Archaic Rome, p. 12-16.
104 Cf. K. A. Raaflaub, J. D. Richards et L. J. Samons, “Rome, Italy, and Appius Claudius Caecus before the Pyrrhic Wars”, dans T. Hackens, N. D. Holloway, R. R. Holloway et G. Moucharte éd., The Age of Pyrrhus, dans Archeologia Transatlantica, XI, 1992, p. 13-50.
105 Cf. la vision très (peut-être trop?) “hypercritique” de T. P. Wiseman, Clio’s Cosmetics, p. 85-86 : « Three, perhaps four, of the acts attributed to him (Appius Claudius) are certainly historical... » ; en faveur de l’historicité des événements les plus marquants qui lui sont attribués, voir aussi K.-J. Hölkeskamp, Die Entstehung der Nobilität, p. 24.
106 La tradition annalistique romaine a ainsi certainement su transmettre un fond de vérité authentique, à travers de nombreuses déformations volontaires ou non : cf. E. Gabba, “Considerazioni sulla tradizione letteraria sulle origini della Repubblica”, dans Les origines de la République romaine, Entretiens sur l’Antiquité Classique, Fondation Hardt XIII, Genève, 1967, p. 168-174; A. Momigliano, “L’ascesa della plebe nella storia arcaica di Roma”, dans RSI, 79, 1967, p. 297-312 (= Id., Quarto contributo, p. 419-436); U. W. Scholz, “Die Anfänge der römischen Geschichtsschreibung”, dans P. Neukam éd., Vorschläge und Anregungen, Munich, 1980, p. 80-82.
107 Sur ce point de vue, cf. notamment les analyses de T. J. Cornell, “The Conquest of Italy”, dans C.A.H.2, 1989, p. 374; Id., “The Value of the Literary Tradition Concerning Archaic Rome”, dans K. A. Raaflaub éd., Social Struggles in Archaic Rome, p. 52-76, dont le contenu est discuté par К. A. Raaflaub, “A Comprehensive and Comparative Approach”, dans ibid., p. 47-51; la longue formation de la tradition historiographique romaine, qui s’est développée sur plus de deux siècles avant de parvenir à Tite-Live, empêche toutefois de l’assimiler véritablement au “roman historique” : cf. J. von Ungern-Sternberg, dans K. A. Raaflaub éd., Social Struggles in Archaic Rome, p. 99-100.
108 Cf. notamment K. A. Raaflaub, “A Comprehensive and Comparative Approach”, dans K. A. Raaflaub éd., Social Struggles in Archaic Rome, p. 9 sq. : « the ‘comprehensive approach’, meaning that all available sources must be used adequately and to their full extent. ‘All’ means not only the historiographical, epigraphical, and archeological sources but also information scattered in the works of antiquarians and lexicographers, which is often hard to discover, and the evidence provided by linguistic analysis and social, political, military, religious, and legal institutions. (...) there must be a clear understanding of what the different categories of sources can and cannot tell us, what we can expect from them, and how we can use them most fruitfully »; et p. 39 sq. : « [The method of comparison] can help us to understand the meaning of certain historical phenomena. (...) Second, the comparison may stimulate our thinking, give us ideas and suggestions, and provide possible solutions. (...) Third, closely related to its second use and sometimes almost inseparable from it, comparison can save us from mistakes and misjudgments in just about avery area we are dealing with. (...) Fourth, there is also the possibility of a ‘negative comparison’. We can learn not only from historical phenomena that are equal or similar to those we are studying, but also from those that are radically different. » Appliquée à la numismatique romaine et au problème controversé sur les origines de la monnaie à Rome, voir aussi la réflexion méthodologique proposée par L. Pedroni, Nuove ricerche sulla prima monetazione di Roma, Naples, 1996, p. 19-33 : invoquant les autorités de L. Febvre et de M. Finley, l’historien italien insiste sur le rôle primordial de l’hypothèse dans le travail de l’historien; celui-ci doit chercher à fournir un modèle interprétatif à l’ensemble des faits que les sources portent à sa connaissance : « il lavoro dello storico risiede nell’analisi di tutte le fonti disponibili cercando di ricostruire un quadro organico in cui ogni elemento abbia il suo ruolo senza la pretesa di "divinare" la verità dei fatti » (p. 32).
109 Cf T Hölscher, dans Akten des XIII. Internationalen Kongresses, p. 73-84; Id., “Die Anfänge römischer Repräsentationskunst”, dans MDAI(R), 85, 1978, p. 315-357 (= Id., Monumenti statali e pubblico, Rome, 1994, p. 17-51); F. Coarelli, “Cultura artistica e società”, dans Storia di Roma, II, 1, 1990, p. 159-185 (= Id., “La cultura artistica a Roma in età repubblicana, IV-II secolo a.C”, Revixit Ars, Rome, 1996, p. 15-84).
110 Voir récemment K.-J. Hölkeskamp, Die Entstehung der Nobilität, passim; Id., “Conquest, Competition and Consensus : Roman Expansion in Italy and the Rise of the Nobilitas”, dans Historia, 42, 1993, p. 12-39. Voir infra, p. 133-184.
111 Voir infra, p. 483-540.
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