Chapitre 8
De l’activité à la profession musicale : les signes de la professionnalisation
p. 429-474
Texte intégral
1Les musiciens eux-mêmes étaient conscients de changements qui ont marqué le siècle, comme le montrent les divers témoignages étudiés dans le chapitre précédent. Ils faisaient par de leurs jugements de façon plus ou moins explicite et tranchée. Dans ce chapitre, les évolutions qui regardent la structuration et l’organisation de la vie musicale romaine seront examinées à partir de l’exploitation d’archives institutionnelles. La documentation produite par la Congregazione dei musici di Santa Cecilia, par les ensembles musicaux du Campidoglio et de la chapelle musicale pontificale révèle en effet la mise en œuvre de processus de professionnalisation et de disciplinarisation qui contribuent à donner une place nouvelle aux musiciens. Les trois institutions au centre de cette étude tentaient de protéger les intérêts de leurs membres et de réguler la pratique musicale. Comme l’a observé la sociologue Nathalie Heinich dans son étude sur les peintres, ce type de structure « instituait ainsi une référence identitaire collective, procédant, comme tout opérateur d’identité, d’un double mouvement : identification par assimilation aux modèles, et distinction par différenciation à l’égard des repoussoirs1 ».
2À partir de l’examen de documents qui portaient sur la régulation de la pratique musicale, il s’agira de s’interroger sur le fonctionnement de ce type d’adhésion à des codes professionnels rigoureux, sur l’adoption de comportements professionnels collectifs, sur les formes de qualifications internes produites dans ce milieu et sur les conséquences de leur reconnaissance par les acteurs. Dans un premier temps, on analysera les signes de l’affermissement des exigences et du contrôle des qualités musicales qui passaient notamment par l’organisation d’examens de compétences. La seconde et la troisième partie de ce chapitre présenteront ensuite des moments de rupture et de conflits au sein des institutions, qui remirent en question les solidarités internes du milieu et son identité. Comme l’indique Dinah Ribard dans son étude sur les métiers de l’enseignement, l’analyse de ces épisodes est précieuse pour l’historien, « chacun de ces événements, à son échelle, a agi sur le statut du magistère2 ». Les crises institutionnelles qui ont pu être observées au sein de la chapelle musicale pontificale et de la Congregazione dei musici di Santa Cecilia permettent en effet d’approcher la définition du groupe, son niveau de compacité, et d’éclairer l’image qu’il avait de lui-même. Les conflits révèlent des changements sociaux et des évolutions culturelles qui ont pu avoir un impact sur les destins des praticiens de la musique. Les formes de cohésion ou de tension observées dans les institutions, à ces moments spécifiques, permettent finalement de mieux cerner le statut et la condition sociale des musiciens.
Le renforcement du contrôle des compétences musicales dans les institutions romaines
3Progressivement au cours du XVIIIe siècle, l’habileté et la technique des musiciens qui exerçaient dans le domaine de la musique sacrée et de ceux qui étaient au service des autorités communales, firent l’objet d’une surveillance étroite et de contrôles plus fréquents. L’exploration des archives des ensembles musicaux au service du Campidoglio, de la Congregazione dei musici di Santa Cecilia et de la chapelle pontificale ont permis de mettre en lumière l’attention accrue portée aux capacités musicales des musiciens, non seulement pour les procédures d’admission, mais aussi pendant certaines étapes de leur carrière au sein l’institution. Cet effort de professionnalisation passa notamment par l’usage plus systématique et répété des examens de compétences. Comment se mirent-en place ces procédures d’examen dans ces trois institutions musicales urbaines ?
De nouvelles pratiques dans les ensembles au service de la Commune de Rome
4J’ai précédemment observé, au sujet des conditions de recrutement des musiciens au service de la Commune de Rome, que la circulation d’informations orales sur les potentiels candidats était généralement la norme3. La recommandation constituait la principale voie de recrutement, et la référence essentielle pour les autorités. Les liens familiaux jouaient un rôle fondamental aussi bien pour l’apprentissage que pour l’accès à l’emploi, ce qui explique la présence de plusieurs familles de musiciens dans ces ensembles. Pourtant, dans la seconde moitié du siècle, on vit apparaître les signes d’un contrôle accru sur les capacités musicales, dénotant une certaine insatisfaction vis-à-vis du système traditionnel de distribution des postes.
5Depuis le 26 juin 1760, les titulaires et les surnuméraires de l’ensemble des Trombetti del popolo devaient se soumettre à un examen de compétence (esperimento di idoneità), mentionné dans tous les contrats rédigés après cette date4. En outre, à la fin du siècle, les membres du Concerto capitolino devaient passer une audition pour que soit contrôlé leur niveau musical. Une audition de ce type fut par exemple organisée dans le palais du Campidoglio le 29 novembre 1786 à 17 heures, devant notaire et en présence des conservateurs et de Giovanni Cari, le maître de chapelle de l’ensemble5. Treize musiciens furent conviés à y participer mais quatre d’entre eux ne se présentèrent pas, soit pour raison de santé, soit à cause de leur âge trop avancé. Au terme de l’audition, Vincenzo Freddi fut finalement admis dans l’institution comme joueur de cornet titulaire.
6Cette nouvelle pratique de vérification collégiale des capacités musicales des instrumentistes introduisait un élément supplémentaire de jugement pour l’attribution des emplois qui, sans nécessairement limiter le poids des recommandations, pouvait se révéler décisif en tant que critère de sélection ultime.
Perfectionner l’habilité des musiciens dans la Congregazione dei musici di Roma
7L’étude des comptes rendus d’assemblée de la Confrérie des musiciens de Rome révèle que les responsables de l’institution accordèrent progressivement, au cours du XVIIIe siècle, une plus grande attention au niveau musical de ses membres. Plusieurs décisions furent prises dans le but d’améliorer le fonctionnement de l’examen au sein de l’institution, ce qui va dans le sens d’une professionnalisation accrue de l’activité musicale, par le contrôle de la formation et de la qualité du travail.
Vers un examen plus rigoureux des maîtres de chapelle
8Dans les statuts de la confrérie validés en 1716 par le pape Innocent XI, la question de l’organisation des examens d’entrée dans l’institution était très peu développée. On spécifiait seulement dans deux articles, de façon sommaire, que tout musicien qui souhaitait exercer dans les chapelles musicales devait avoir été obligatoirement « habilité et approuvé pour ce faire » par quatre maîtres de chapelle élus tous les ans6. Rien n’était cependant précisé sur le contenu et le déroulement des examens. Lors de l’assemblée du 14 octobre 1716, on choisit en effet les quatre examinateurs qui devaient juger les prétendants dans la catégorie des maîtres de chapelle7.
9La règle concernant cet examen d’entrée ne fut pourtant pas facilement acceptée par tous. Dans le compte rendu d’assemblée du mois de juillet 17418, on apprend que plusieurs maîtres de chapelle exerçaient sans avoir pourtant passé l’examen d’admission. En réponse, on décida que les maîtres non habilités obtiendraient la patente à titre gracieux, mais qu’à l’avenir, tous les futurs candidats devaient se soumettre à l’examen de contrepoint et de chant ecclésiastique.
10Le 21 avril 1746, les membres de la confrérie s’occupèrent également de statuer sur la fonction d’examinateur. Ils prirent notamment des mesures pour la rendre plus efficace et pour faciliter la procédure de désignation à cette charge. Cet intérêt témoignait du plus grand soin accordé à l’examen d’entrée. C’était en effet sur les examinateurs que reposait la responsabilité des nouvelles admissions des maîtres de chapelle qui souhaitaient exercer dans les différentes institutions religieuses. Ces examinateurs, au nombre de cinq, quatre maîtres de chapelle et le gardien en fonction, devaient occuper leur charge pendant l’année entière. En cas d’absence, l’assemblée devait élire un remplaçant9.
11En 1747, Girolamo Chiti expliquait à Padre Martini le déroulement de l’examen pour devenir maître de chapelle à Rome, information qu’il tenait de son collègue Giuseppe Ottavio Pitoni10. Les candidats devaient composer une antienne11 en cantus firmus. G. Chiti défendait cette façon de faire qu’il savait à présent critiquée par les compositeurs napolitains, lesquels la jugeaient « superflue ». G. Chiti rappelait que c’était une règle de composition donnée par Palestrina et confirmée par les observations d’Antimo Liberati (1617-1692)12 qui jouissait d’un grand crédit au XVIIIe siècle chez les défenseurs de la Scuola Romana. L’avis en faveur de l’examen formulé par Chiti se fondait sur une connaissance de l’histoire de la profession, et des contributions apportées par certains prédécesseurs parmi les plus réputés. Cette revendication d’une sorte de tradition professionnelle est un élément qui doit être porté à l’actif de la construction d’une certaine idée de la profession, à laquelle G. Chiti se déclare attaché13.
12En 1776, un autre maître de chapelle, Giovanni Battista Casali, décrivait cet examen avec une attention minutieuse :
L’examen de composition se fait ainsi, et on dit qu’il est trop facile puisque le candidat peut choisir, avant l’ouverture de l’antiphonaire, la partie de droite ou la partie de gauche. Puis le surveillant ouvre le livre au hasard, et une fois ouvert le pose devant le candidat ; et lorsqu’on lui a indiqué la nature de l’exercice auquel il devra répondre, le candidat choisit donc, dans la partie qu’il a définie auparavant, quatre parties [musicales] qu’il doit délimiter, travailler, mettre en paroles et dont il doit donner au moins trente mesures : vous voyez bien que ce n’est pas grand-chose, mais il doit cependant le faire en présence des maîtres dans la même pièce. Une fois cela fait, on lui fait signer son travail, puis il est renvoyé dehors. Les examinateurs évaluent sa composition, rappellent le candidat dans la salle pour lui annoncer soit qu’il a été accepté, soit qu’il est ajourné14.
13L’examen avait donc lieu dans une seule et unique pièce. Les candidats, attentivement surveillés pas les maîtres de chapelle qui avaient le rôle d’examinateurs, devaient composer au moins trente mesures sur un thème au hasard. En fonction de la qualité de la composition, ils étaient admis ou pas.
14Malgré les initiatives répétées des membres de la confrérie pour faire respecter l’admission obligatoire et le passage de l’examen, les différents rappels qui apparaissent dans les comptes rendus d’assemblée révèlent que, pendant le siècle entier, des musiciens continuèrent d’exercer sans avoir obtenu la patente, donc sans avoir suivi les règles d’admission dictées par la confrérie15.
15Par ailleurs, un certain nombre de compositeurs bénéficièrent de la patente sans avoir passé l’examen. En 1753, Girolamo Chiti se lamentait par exemple d’une admission gracieuse accordée à un jeune musicien16. Selon lui, l’inconnu avait seulement été admis grâce à son emploi préalable comme maître de musique de l’épouse de l’ambassadeur de la République de Venise et aux recommandations que cette situation lui permettait d’obtenir. Ce témoignage, qui rappelle la puissance du système des protections, pointe également la déconsidération (me la rido) dans laquelle certains musiciens tenaient ces modalités d’entrée dans le groupe et, en contrepartie, la valeur positive accordée aux examens, jugés plus justes et plus sérieux.
16D’après le registre comptable des années 1746-180517, on sait qu’au moins douze compositeurs furent admis au sein de la confrérie grâce à l’intervention du pape Benedetto XIV, sans passer l’examen (tab. 50).
Tab. 50 – Maîtres de chapelle admis par grâce papale à la Congregazione dei musici di Roma.
Année d’admission | Noms et prénoms des musiciens |
1752 | Niccola Jommelli |
1757 | Giovanni Borgo |
1762 | Pietro Crispi |
1770 | Giovanni Valentini ; Giovanni Masi ; Giuliano Lusini |
1771 | Gasparo Simoni ; Francesco Carroni ; Michelangelo Alessandria |
1772 | Girolamo Lorazi |
1773 | Girolamo Mango |
1774 | Giuseppe Heiberger |
17À la fin du siècle, en septembre 1793, on voulut mettre fin à cette pratique jugée peu régulière, source de discrédit :
Un recours a été fait, puisque certaines personnes, en raison de quelque conflit d’intérêts extérieur, voudraient presque extorquer de force le billet d’approbation aux examinateurs, et ainsi entrer, pour ainsi dire en toute discrétion, dans notre congrégation. Leur incompétence fait alors naître des scandales dans les églises, qui ont pour conséquence le dénigrement et la déconsidération de toute notre congrégation, et plus particulièrement de nombreux professeurs particuliers, et encore plus des examinateurs eux-mêmes, qui sont parfois obligés, sous la pression, soit d’accepter des personnes incompétentes, soit de se faire des ennemis18.
18Ainsi, des candidats pouvaient obtenir la patente par des moyens détournés. Leur inaptitude, remarquée dans les églises où ils exerçaient, décrédibilisait les examinateurs et déconsidérait la confrérie. La dignité du corps tout entier reposait sur la bonne pratique de chacun. Soucieux de préserver l’image publique de la confrérie, plusieurs membres présentèrent des propositions variées, avant de convenir ensemble d’une procédure. L’examen devrait avoir lieu deux fois par an, aux mois d’avril et de septembre. Le jour de l’examen devait être fixé en veillant à ce qu’aucune fonction musicale n’ait lieu au même moment, ce qui permettait à tous les candidats de se présenter. Les gardiens et les examinateurs de chaque catégorie devaient tous être présents et les candidats étaient examinés un à un. Ainsi, l’attention portée à la bonne tenue des examens et à leur caractère équitable, encouragée à l’intérieur même de la profession, fut plus soutenue dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, pour déboucher sur des règlements précis destinés à inscrire de façon stable ces procédés dans les pratiques de la confrérie à la fin du siècle.
La mise en place des examens pour les instrumentistes
19Les membres de la confrérie, dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, tentèrent aussi de mieux contrôler les capacités des interprètes. Certains membres se plaignaient régulièrement de l’incompétence d’instrumentistes récemment recrutés, lesquels se montraient incapables de déchiffrer les partitions. Ainsi, le 5 novembre 175519, pour ne plus compter parmi ses membres des musiciens dont le niveau musical était jugé trop bas, l’institution décida la mise en place d’un examen validant le savoir-faire des instrumentistes. L’examen d’admission était organisé en présence du gardien de la catégorie des instrumentistes et de deux autres examinateurs approuvés par la confrérie. En 1776, Giovanni Battista Casali mentionnait l’existence d’un examen d’entrée pour des instrumentistes comme pour des chanteurs, dans une lettre adressée à G. B. Martini20. D’après le compositeur, un maître de chapelle examinateur devait se joindre au gardien des instrumentistes pour la conduite de l’examen. En revanche, les comptes rendus d’assemblée de la Congregazione dei musici ne mentionnent pas d’examen organisé pour les chanteurs.
Améliorer la qualité des prestations dans la chapelle pontificale
20L’histoire de la chapelle pontificale a fait l’objet de plusieurs travaux, lesquels portent surtout sur les XVIe et XVIIe siècles, plus rarement sur le XVIIIe siècle21. Les sondages que j’ai effectués dans les archives de l’institution permettent de mettre au jour des évolutions importantes relatives à la professionnalisation au cours de la période étudiée.
21Sous le protectorat d’Alessandro Albani (1740-1779), lequel se distingua pour ses activités de mécène et de collectionneur22, plusieurs mesures furent prises en vue d’améliorer le fonctionnement de l’institution et de mieux contrôler le niveau musical de ses membres.
22Le 22 janvier 1744 et le 14 mars 1745, des règlements furent établis pour perfectionner l’organisation de l’institution. Le premier règlement fixait tout d’abord des règles pour la gestion et la conservation des œuvres musicales composées pour les différents offices ou les autres services célébrés dans la chapelle. Les modifications, les changements et les copies des compositions déjà écrites, mais aussi les nouvelles, devaient être contrôlées par le Collège pontifical, notamment par le biais d’un « compositeur de musique sacrée » qui figurait parmi ses membres23. Le règlement concernait aussi le service des chanteurs à la retraite, les giubilati, qui devaient assister le maître de chapelle si nécessaire. On rappelait qu’en l’absence du maître de chapelle, c’était le chanteur retraité le plus âgé qui devait le remplacer, non pas un chanteur en activité, car ce dernier ne pouvait alors plus assurer sa partie. Cette disposition visait donc à ne pas affaiblir l’ensemble vocal prévu24. Le second règlement, celui de mars 174525, rappelait l’importance de respecter les jours de service pour servir la messe selon le style pratiqué par tradition, et mettait en place des mesures de surveillance de l’assiduité des membres. Ainsi, à la fin de chaque mois, le puntatore devait établir une note de présence aux services. En outre, les périodes de congé ne pouvaient être décidées sans l’autorisation préalable du cardinal protecteur.
23L’intérêt nouveau porté au contrôle des compétences musicales dans la chapelle est également perceptible dans le décret du 11 août 1748, émis par le cardinal protecteur26. Le cardinal Albani avait relevé les capacités insuffisantes de trois jeunes chanteurs pontificaux récemment admis, dont l’instruction musicale avait été jugée trop faible « pour servir correctement les offices sacrés de la chapelle » : deux basses, Antonio Vellucci (admis le 28 juin 1735) et Domenico Melchiorri (admis le 24 mars 1748), ainsi que le castrat Andrea Spadoni (admis le 18 janvier 1747)27. Afin de rendre plus effectifs leurs services dans la chapelle, on décidait qu’ils devaient suivre les enseignements d’un chanteur pontifical expérimenté de leur choix. Si aucun chanteur n’acceptait de les instruire, ils suivraient les leçons du professeur Francesco Ciampi à son domicile28. Les chanteurs devaient prendre ces cours aussi longtemps que le Collège des chanteurs pontificaux le jugeait utile. Le décret prévoyait ainsi la création d’une véritable « école » de chant29. Sous ordre du cardinal protecteur, tous les chanteurs dont les capacités musicales avaient été jugées trop limitées par le Collège pontifical, sans exception, devaient obligatoirement se perfectionner dans cette école. En cas de contestation, on devait s’en remettre directement au protecteur. Pour imposer une stricte discipline, on décidait que les enseignants des chanteurs devaient fournir chaque mois au maître de chapelle et au puntatore un certificat appelé attestato ou fede pour garantir l’assiduité, l’étude et le progrès des chanteurs. Dans la seconde partie du décret, on prévoyait d’améliorer les prestations de la chapelle musicale. Des répétitions anticipées devaient avoir lieu, aussi souvent que nécessaires, pour les messes, les psaumes et les antiennes qui composaient le service régulier des chanteurs30. Le maître de chapelle et le puntatore devaient veiller à ce que ces répétitions soient organisées suffisamment à l’avance. Si les prestations musicales n’étaient pas jugées satisfaisantes, le cardinal protecteur pouvait imputer cet échec au maître de chapelle en fonction, lequel aurait dû prévoir un plus grand nombre de répétitions.
24Quelques mois plus tard, le 18 décembre 1748, le nouveau décret promulgué allait encore plus loin. Il modifiait, pour les emplois stables, l’organisation des successions qui prévalait jusqu’ici au sein de la chapelle, par la mise en place d’un examen de contrôle des compétences obligatoire pour les chanteurs surnuméraires31. Dorénavant, lorsqu’un poste de titulaire se libérait, le chanteur surnuméraire le plus ancien ne lui succédait plus de façon automatique. Pour occuper le poste, les surnuméraires devaient désormais faire valoir leurs savoir-faire et leur habileté au cours d’un examen organisé en présence du maître de chapelle, du chanteur au poste de decano, du camerlingue, du puntatore et de deux chanteurs pontificaux expérimentés. L’examen se concluait par un vote à bulletin secret. Si le surnuméraire le plus ancien n’avait pas été jugé idoneo e capace (« apte et compétent »), c’était le chanteur qui suivait, selon l’ancienneté, qui pouvait alors occuper le poste.
25La disposition qui suivait était encore plus sévère avec les chanteurs surnuméraires32. Ceux à qui l’on avait demandé de suivre des leçons privées devaient produire, tous les six mois, des attestations remplies par l’enseignant, et se présenter à l’examen prédéfini. Les attestations et les résultats de l’examen étaient alors confrontés. Les chanteurs surnuméraires dont on jugeait qu’ils n’avaient pas suffisamment étudié ou fait un minimum de progrès au cours des six mois précédents, ne pouvaient plus percevoir d’émolument occasionnel (incerto), ce que leur conférait pourtant ce statut. Le cardinal protecteur s’accordait enfin le droit de décider de mesures supplémentaires visant à améliorer les compétences musicales des chanteurs surnuméraires.
26L’étude des documents institutionnels relève donc la détermination des autorités à tenter d’améliorer les capacités musicales par le biais d’examens ou de concours. On notera que les règlements propres à chaque institution coïncident d’un point de vue chronologique. Ils remontent tous aux années 1740-1760, et concernent aussi bien les compositeurs que les interprètes. À côté des autres modalités de reconnaissance des musiciens, qu’il s’agisse des recommandations aristocratiques, de celles des maîtres de chapelle reconnus pour leurs autorités ou d’autres intermédiaires, ou encore du succès remporté auprès du public sur les scènes des théâtres, ces examens introduisaient une nouvelle certification, cette fois collégiale et interne aux institutions musicales concernées.
27D’un côté, ces concours constituaient une nouvelle ressource dont pouvaient se saisir les musiciens pour tenter de faire reconnaître leurs talents en s’appuyant sur le jugement d’experts qui exerçaient dans le même lieu, et, éventuellement, d’accélérer leurs carrières en obtenant un poste fixe sans avoir à attendre leur tour derrière les plus anciens. Ce système favorisait certainement les protections internes, et plaçait les surnuméraires dans un strict rapport de dépendance vis-à-vis des membres examinateurs. De l’autre, ces procédures entraient nécessairement en tension avec des façons de construire et de gérer les itinéraires professionnels en usage, solidement ancrés dans la société et la culture romaine. Comment réagirent les premiers intéressés, face à la mise en place de ces concours ? Les sources manquent pour répondre aisément à cette question. Une recherche fouillée dans les archives de ces ensembles, croisée avec d’autres sources, en particulier des correspondances, permet cependant, sur la base de quelques dossiers significatifs, de mieux saisir l’ampleur des conséquences de cette évolution dans la structuration des milieux professionnels musicaux romains.
L’examen : un révélateur des conflits d’autorité
28Des conflits autour de l’examen d’entrée de la Congregazione dei musici di Santa Cecilia pour les postes de maître de chapelle ont ponctué le XVIIIe siècle, surtout dans la seconde moitié du siècle33. Leur étude se révèle riche d’intérêt dans la mesure où ils mettent en scène des figures d’autorité dans le milieu musical, lesquels interagissent, se comparent et s’affrontent. J’étudierai ici deux exemples précis. Le premier, autour de la candidature de Giuseppe Heiberger qui souhaitait intégrer la chapelle de San Giovanni in Laterano en 1775, sera étudié en mobilisant la documentation conservée dans les archives de cette institution. Le second conflit, qui éclata dans les années 1780, sera éclairé par un ensemble de lettres échangées entre trois musiciens impliqués dans l’affaire.
La candidature de Giuseppe Heiberger à un poste de coadiutore
29En 1775, Giuseppe Heiberger se présenta au poste de coadiutore de Giovanni Battista Casali, maître de chapelle de San Giovanni in Laterano34. Les archives de la chapelle musicale conservent cinq documents relatifs à cette requête, qui n’ont jamais été étudiés jusqu’à présent : une lettre de candidature de la main de G. Heiberger, une lettre d’argumentation dans laquelle il détaillait ses expériences professionnelles, une lettre de soutien de Gregorio Ballabene, son professeur de contrepoint, la patente de l’Accademia filarmonica di Bologna, et un document anonyme intitulé Memoria per il maestro Giuseppe Heiberger.
30Ce dernier document, qui se rapporte, dans un style incisif, à l’examen des maîtres de chapelle de la Congregazione dei musici di Santa Cecilia mérite d’être pris en considération pour l’éclairage qu’il apporte sur les mécanismes de sélection en œuvre dans l’institution. Le Memoriale se présentait comme une réponse à Giovanni Battista Casali qui avait écarté G. Heiberger de ce poste d’assistant35. L’auteur anonyme indiquait que Giovanni Battista Casali avait refusé de reconnaître les compétences de Giuseppe Heiberger, dont l’activité se déployait pourtant avec succès aussi bien dans les théâtres que dans les églises de Rome, au seul motif qu’il avait préféré demander l’admission à la Filarmonica di Bologna plutôt que de passer l’examen de la Congregazione dei musici di Santa Cecilia36. La défense d’Heiberger était construite autour de quatre arguments qui expliquaient son choix.
31L’auteur anonyme indiquait tout d’abord que les maestri en fonction avaient utilisé la Congregazione pour exercer un monopole dans le milieu musical, alors qu’eux-mêmes n’avaient jamais passé aucun examen. Ils se réservaient ainsi exclusivement le choix des musiciens à promouvoir, sans autre consultation externe37.
32Le second argument avancé portait sur le déroulement même de la procédure. Selon l’auteur, l’examen était arbitraire et partial38. Les élèves des membres qui avaient des responsabilités dans la Congregazione (les capi) et les musiciens qui bénéficiaient d’une protection particulière avaient été recrutés avec grande facilité. Le concours organisé pour le poste d’organiste à San Giovanni in Laterano était pris en exemple. Sur les dix concurrents qui se présentèrent, quatre étaient déjà membres de la congregazione, comme maestri di cappella, mais ne parvinrent pas à écrire correctement la « réponse » d’une fugue39, ce qui était une compétence attendue de tout compositeur. Pour l’auteur de cette note, les examinateurs étaient bien plus tolérants avec les candidats qu’ils soutenaient, ce qui témoignait du caractère irrégulier et arbitraire de l’examen. La procédure du concours venait en quelque sorte masquer les véritables ressorts des recrutements, à savoir les liens tissés entre les maestri de l’institution et leurs protégés ; il s’agissait d’une simple cooptation. Pour appuyer son argumentation, il prenait l’exemple de deux musiciens de renom, Niccolò Jommelli et Antonio Borroni. Ces derniers, qui n’avaient pas passé l’examen de la confrérie, avaient pourtant pu occuper le poste de maestro di cappella de San Pietro in Vaticano40. L’auteur qualifiait l’examen de « ridicule » et précisait qu’aucun des maestri les plus connus d’Italie ne s’y étaient soumis, et qu’il y avait même là quelque risque de ternir une réputation bien établie par l’expression d’un jugement partial et non fondé sur une réelle appréciation de l’habileté musicale, sans recours possible, ce qui ne pouvait qu’éloigner les meilleurs talents. L’auteur donnait en effet l’exemple d’un autre « très bon professeur » qui n’avait pas obtenu la patente, bien qu’il eût été accueilli dans d’autres académies41. En fin de compte, l’admission au sein de la confrérie pouvait donc fragiliser la réputation du compositeur en raison des abus et des injustices qui avaient lieu.
33G. B. Casali était nommément accusé de faire preuve, à l’égard de la réussite publique de G. Heiberger, d’une défiance telle qu’il l’aurait sans doute examiné avec partialité, profitant en quelque sorte de la situation pour entamer sa renommée.
34Au-delà de l’avis de cet auteur anonyme, qui prend la défense d’Heiberger dans des termes vifs, ce memorial invite le chercheur à reconsidérer l’usage que les membres de l’institution faisaient de l’examen. La rigidité dont faisait preuve la Congregazione dei musici di Santa Cecilia pour les examens d’entrée des compositeurs peut être interprétée autrement que par la seule volonté de relever le niveau de qualification des musiciens, et par une nouvelle attention aux exigences de la profession. Elle devient aussi un moyen de limiter la concurrence et, pour certains musiciens, comme Casali, d’occuper une place d’autorité dans le milieu local en tenant fermement en main l’accès à l’emploi au profit d’élèves fidèles. Un signe de fermeture, donc, plutôt que d’ouverture sur un recrutement élargi et de qualité par l’adoption de normes et d’exigences propres à la profession.
35Ces éléments sont aussi observables dans un autre conflit né en 1784, autour de l’examen d’entrée de deux candidats.
Une controverse autour de l’examen des élèves de L. A. Sabbatini (1784)
36La correspondance de Padre Martini avec l’un de ses anciens élèves, Luigi Antonio Sabbatini, maître de chapelle de l’église des Santi Dodici Apostoli à partir de 1772, met au jour l’enjeu majeur que pouvait recouvrir l’examen d’entrée à la confrérie : asseoir sa position et son autorité dans le milieu musical.
37Afin de comprendre les enjeux cristallisés autour de ce conflit, il est nécessaire de restituer les principales étapes de l’affaire42. Le 9 juin 1784, L. A. Sabbatini informait Padre Martini que deux de ses élèves, Giovanni Antonio Ambrosini et Giovanni Francesco Schito, avaient soutenu, un mois plus tôt, l’examen de maître de chapelle de la Congregazione dei musici di Santa Cecilia. G. B. Casali, qui faisait partie des examinateurs, avait cependant jugé que les deux candidats avaient échoué dans l’une des épreuves : la réponse de la fugue n’avait pas été écrite dans la bonne tonalité. L. A. Sabbatini contestait ce jugement et avait tout d’abord réagi en adressant une note (Informazione sopra alle opposizioni fatte dal Sig. Casali) adressée au cardinal protecteur de la confrérie Giovanni Francesco Albani, et à son neveu, Monseigneur Giuseppe Andrea Albani (1750-1834), prefetto de la Congregazione. Pour soutenir son jugement, il demandait à Padre Martini d’examiner les compositions de ses élèves et de lui communiquer son opinion :
Que vous me pardonniez si je vous dérange par la présente, mais je suis très soucieux pour ma réputation […]. Voilà pourquoi je souhaiterais […], si j’ai raison, que vous me donniez une réponse claire afin que je puisse la montrer à monsieur le Cardinal et à son neveu ; si j’ai tort, je vous prie de bien vouloir m’expédier votre réponse ou de me la retourner de quelque manière que ce soit […] pour me permettre de garder ma dignité, tandis que ce même monsieur Casali parcourt les places de Rome en affirmant que l’affaire va très mal, et que cette rumeur se répand dans Rome, aussi bien parmi la profession que parmi le public, et que l’on ne parle de rien d’autre que de ce sujet43.
38Alors qu’on débattait ardemment de cette affaire à Rome aussi bien dans le milieu professionnel, que sur la place publique, L. A. Sabbatini comptait donc sur la contre-expertise de Padre Martini, dont les compétences étaient reconnues. L’avis de ce spécialiste lui permettrait de construire sa défense. L’emploi du mot professione témoigne de la ferme conscience, désormais, que les musiciens formaient une communauté d’appartenance reposant sur le partage à la fois d’un savoir-faire, d’une technicité et d’une reconnaissance.
39L. A. Sabbatini avait aussi montré les compositions à d’autres maîtres de chapelle, tels Gaetano Carpani et Gregorio Ballabene, afin qu’ils lui fassent part de leurs avis. Tous avaient donné leur approbation. Sabbatini pointait ici le fait qu’une seule opposition était donc formulée, celle de G. B. Casali, ce qui remettait en cause l’aspect collégial de l’examen, procédure qu’il défendait par ailleurs. Le mécontentement du professeur était d’autant plus grand que c’était la seconde fois que G. B. Casali refusait de donner la patente à un de ses élèves44. L’admission avait effectivement été refusée à Benedetto Alimenti. Dans sa réponse datée du 16 juin 1784, Padre Martini indiquait qu’il acceptait de se charger de l’affaire et annonçait qu’il écrirait sans tarder à G. B. Casali à ce sujet45.
40Le 25 juin 1784, L. A. Sabbatini s’entretint en personne avec G. B. Casali pour tenter de résoudre le différend, mais la tentative tourna court46. L. A. Sabbatini indiquait que la situation s’envenimait, notamment à cause de la position d’autorité qu’exerçait G. B. Casali dans le milieu romain :
Ici, à Rome, la Profession est dirigée par un coquin, qui joue double jeu dans toutes les affaires, et qui veut que les choses soient faites à sa manière, avec grande perfidie. J’ai appris de source sûre ce matin qu’il a fait circuler dans Rome un papier à tous les maîtres afin qu’ils le signent ; j’ignore ce que contient le papier […]. Ici à Rome, ils le prennent pour un oracle, et il s’en est rendu compte, c’est pour ça qu’il fait le malin ; ce serait l’occasion de le ridiculiser et de guérir un peu cette teigne, déjà que Rome en est pleine et que l’on ne parle de rien d’autre47.
41G. B. Casali avait donc pris des dispositions pour contrer les initiatives de Sabbatini en faisant adhérer les maîtres de chapelle à sa cause. En réaction, L. A. Sabbatini demandait expressément à Padre Martini de lui envoyer son jugement sur les compositions, afin d’affaiblir les prétentions de G. B. Casali. L’examen de la Congregazione dei musici di Santa Cecilia apparaissait comme un moyen, pour Casali, d’affirmer une position d’autorité sur le milieu professionnel local.
42Après avoir reçu la lettre de L. A. Sabbatini datée du 9 juin 1784, Padre Martini exprimait son intention d’écrire à G. B. Casali au sujet de l’affaire. Padre Martini, après avoir approuvé les fugues composées par les candidats, rappelait à G. B. Casali qu’il l’avait soutenu lorsque ce dernier s’était présenté à l’examen de l’Accademia filarmonica di Bologna. Il évoquait la confiance qu’il lui avait accordée dans le passé, et Casali, sous-entendait-il, lui en était débiteur. II revenait ensuite sur l’affaire :
J’ai appris qu’on souhaite que je prenne la défense des candidats, et que je fasse voir au public le tort que vous leur avez fait. Très estimé Monsieur Casali, être juge et examinateur, est une chose en soi honorifique, et respectable, mais à bien y penser, les qualités que doit avoir qui doit vraiment juger sont trop nombreuses, […] parce que le juge doit être informé de toutes les opinions qui se trouvent dans son Art, alors que le candidat a le droit de résister à n’importe quelle sentence, à moins qu’elle ne soit universellement interdite ou condamnée, et l’art de la fugue est complexe, et les façons d’y répondre sont nombreuses. Dans cette affaire, vous avez perdu la cause, et vous perdrez encore votre honneur et votre dignité, si bien que je vous conseille de vous retirer de votre engagement de ne pas vouloir accepter les candidats, de prendre le risque de les accepter et sauver ainsi votre dignité. Parce que je vous assure que vous ferez mauvaise figure en étalant cette controverse par la presse dans toute l’Europe48.
43La lettre de Padre Martini associait marques d’autorités et conseils amicaux. Juger était un honneur et devait contribuer à la dignité de la profession. Mais il indiquait à son correspondant qu’un examinateur devait être capable d’écouter les remarques d’autres experts, que l’art de la musique comportait des manières diverses de montrer ses capacités, que les candidats avaient le droit de contester une décision qui n’avait pas été prise de façon collégiale. Padre Martini soulignait combien un musicien, de l’autorité de Casali, pouvait mettre en jeu son honneur et son crédit en s’entêtant dans une position contraire à l’avis de l’ensemble de la profession, parce que ces controverses étaient désormais relayées dans le monde des arts et des lettres par le biais des périodiques.
44Au sujet de cette affaire, seule une lettre de réponse G. B. Casali à Padre Martini datée du 7 juillet 1784 nous est parvenue49. Le maître de chapelle romain mentionnait tout d’abord les compositions d’examen des deux candidats et les problèmes qu’elles contenaient dans l’écriture de la fugue. Il disait leur avoir proposé de revenir le vendredi suivant pour ajuster les réponses de leurs fugues. Les deux candidats s’étaient pourtant présentés chez lui dès le lendemain et, sur un ton arrogant et méprisant, avaient réclamé les copies d’examen que souhaitait voir le Maestro Sabbatini50. Il leur répondit qu’il n’était pas question de leur restituer les compositions et les encouragea à ne pas revenir le vendredi. G. B. Casali jugeait l’attitude de Padre Sabbatini irréfléchie51. Il reprochait aussi au cardinal protecteur de ne pas lui avoir envoyé lui-même le memoriale rédigé par L. A. Sabbatini. G. B. Casali signalait que l’affaire avait créé une grande confusion à Rome, notamment à cause de la témérité d’un des élèves, des insultes et des paris qui circulaient et compromettaient la réputation des maîtres de chapelle52. Il revenait ensuite sur le cas de l’élève de Sabbatini, Benedetto Alimenti qui, selon lui, avait suivi une voie plus convenable. En effet, Alimenti53, déjà membre de l’Accademia filarmonica di Bologna, avait dû passer l’examen de la Congregazione dei musici di Roma, bien qu’il ait auparavant adressé une demande circonstanciée au pape pour en être exempté. Il avait échoué à un premier examen organisé par Casali, et avait finalement dû passer, selon les formes, celui de la Congregazione huit ou neuf mois plus tard, se soumettant ainsi aux normes qui confortaient la centralité de cette institution, à Rome, dans le contrôle de la profession54.
45Le compositeur expliquait que son refus n’était pas lié à une attitude conservatrice ou protectrice55. Il défendait les règles de composition de la fugue qui figurait dans les statuts de la Congregazione et cherchait à les faire respecter. Dans la fin de sa lettre, sur un ton acerbe presque menaçant, Casali tentait de dissuader Padre Martini de toute intervention :
Par ce conseil en tant que bon Ami, je vous éviterais la fatigue des documents à préparer pour cette défense, car vous serez perdant, parce que vous aurez une réponse de six ou sept lignes ; si vous la publiez, nous aussi ; si vous la diffusez en Europe, moi je corresponds avec La Havane en Amérique, à Lima au Pérou, à Séville, dans les Flandres, en Allemagne, à Turin, à Venise. […] vous montrerez votre savoir, mais vous ne servirez pas l’intérêt des candidats parce qu’un décret d’Assemblée générale sera émis pour que ceux-ci ne puissent plus jamais se présenter à l’examen56.
46G. B. Casali avertissait Padre Martini qu’il saurait se défendre dans le cas d’une attaque directe. Il précisait le réseau international dont il disposait pour faire valoir son autorité, qui s’étendait jusque dans l’Amérique espagnole, qu’il jugeait supérieure à celle de Padre Martini, limitée, selon lui, à l’échelle européenne. Pour clore cette affaire, il proposait que les deux candidats repassent l’examen.
47Dans sa réponse datée du 14 juillet, Martini conseillait à Casali, sur un ton amical et respectueux, de mettre fin à la controverse à l’amiable, notamment en cherchant un médiateur compétent et connaisseur capable de régler le conflit57. Parallèlement, le maître de chapelle bolonais continuait d’exprimer son soutien à L. A. Sabbatini et condamnait l’obstination de G. B. Casali :
J’apprends par votre courrier du 3 juillet que monsieur Casali tergiverse, puisqu’il voudrait même gagner cette controverse, et encore y parvenir avec honneur ; mais d’après ce que je comprends, il ne fait que s’embrouiller et se déshonorer davantage […]. Il finira par être vu comme un homme de bien peu de bonne foi, et sans aucun jugement. J’ai préparé tous les éléments pour le confondre et montrer au public son manque de connaissances pour être juge58.
48Pour contrer G. B. Casali, Padre Martini proposait trois solutions à L. A. Sabbatini. Ce dernier devait choisir la plus pertinente à ses yeux59. Les trois propositions de G. B. Martini portaient toutes préjudice à G. B. Casali. Il proposait des citations à comparaître (I et III) ou un recours auprès du pape (II).
49Dans une lettre datée du 10 juillet, Sabbatini donnait plus de détails à Padre Martini. Le document que faisait circuler G. B. Casali indiquait que la réponse de la fugue composée par les étudiants n’était pas tonale. Casali avait fait signer le document par tous les maîtres de chapelle que L. A. Sabbatini avait précédemment consultés pour valider les compositions. Le musicien, déçu du revirement des maîtres de chapelle, décrivait la position hégémonique60 qu’occupait G. B. Casali et l’influence sans bornes qu’il exerçait :
En entendant les mots de Casali, ils ont tous baissé la tête dans l’espoir d’être nommés coadjuteur dans ses églises, ou alors parce qu’ils ne savaient pas répondre à ses arguments. Casali s’est sacré roi du domaine musical ici à Rome, et tout le monde dépend de lui, si bien qu’à ce moment-là certains se sont tournés avec l’air de se demander : que veut dire Martini ? Veut-il donner son propre avis contre les arguments de Casali ? Alors même que le même Martini, lorsqu’il eut pour ambition de faire jouer sa musique ici à Rome, alla d’abord voir Casali. Vous voyez donc dans quelle estime ils vous tiennent, et quel monarque fait celui-ci ; ce n’est pas pour autant qu’ils se privent de le traiter de coquin à certaines occasions61.
50L. A. Sabbatini expliquait s’être renseigné pour savoir si les statuts de la confrérie mentionnaient les compositions des fugues, dans lesquelles se trouvaient les différentes entrées du "thème" et de sa "réponse". Tous les maîtres de chapelle lui assuraient qu’aucun document ne précisait cette règle, mais aucun d’eux ne voulait signer d’attestation à ce sujet. Le musicien indiquait aussi qu’il savait que dans les archives de l’institution figuraient des "réponses" atonales. La version des faits présentée par G. B. Casali était également remise en cause.
51Padre Martini, dans des lettres datées du 17 et du 28 juillet adressées à L. A. Sabbatini, indiquait que G. B. Casali semblait même ne plus reconnaître les règles d’écriture musicale fixées par Pier Luigi Palestrina, considéré comme le père fondateur de la musique sacrée et dont l’autorité constituait l’une des valeurs partagées dans la communauté musicale :
Soyez bien assuré, Père Sabbatini, que je ne reculerai jamais […]. Palestrina, non seulement à Rome, mais encore dans toute l’Europe, a toujours été considéré comme le meilleur Maître de tous les compositeurs, et à ce que je sache, il n’a jamais été critiqué par personne. Monsieur Casali, qui se fait juge suprême à Rome, n’est-il pas obligé de reconnaître l’écriture et le style de Palestrina ? C’en est trop62 !
52Dans une lettre du 21 juillet 1784, L. A. Sabbatini informait qu’il avait pris la décision de faire un recours contre Casali et qu’il l’avait annoncée au cardinal Albani :
Quant à moi, pendant ce temps, puisque j’avais prévu qu’il ne voudrait pas envoyer les diplômes – et en effet on m’a confirmé ce matin même qu’il a affirmé ne pas vouloir les donner –, je me suis déjà assuré auprès de monsieur le Cardinal Albani d’avoir la permission de le faire comparaître afin qu’il s’explique sur ses raisons […]. Si bien que maintenant, j’attends sa confirmation, et aussitôt après je le ferai comparaître : des trois points que vous m’indiquez, celui-ci me paraît être le plus efficace63.
53L. A. Sabbatini envoya le 24 juillet 1784 les copies des compositions d’examen de certains candidats admis bien qu’elles ne fussent pas tonales, ce qui était une autre preuve de la partialité de G. B. Casali pour l’admission64.
54Dans sa dernière lettre du 31 juillet 1784, Padre Martini – qui s’éteignit quelques jours plus tard – exprimait son désir de voir juger Casali, en rappelant qu’il avait déshonoré la profession par sa conduite :
Je suis et je serai toujours d’avis qu’il faut convoquer monsieur Casali, en s’élevant contre son jugement nul et non avenu, et demander à l’Excellentissime monsieur le Cardinal Albani de nommer un tiers […]. J’ai alors été ébahi et stupéfait de voir les compositions approuvées par le même Casali : pauvre Rome, à quel état déplorable a-t-elle été réduite ! je ne l’aurais jamais cru capable d’un tel excès. Je joins ici une attestation qui approuve les compositions de vos élèves, afin que, si vous le jugez utile, vous la présentiez à son Excellence pour qu’elle constate la faiblesse de monsieur Casali. Passion, malice et ignorance sont les bases qui fondent sa conduite65.
55Padre Martini se montrait donc intransigeant quant au sort qui devait être réservé à G. B. Casali. Son incapacité et ses fourberies devaient, selon lui, être rendues publiques.
56Après la mort de Padre Martini, Luigi Antonio Sabbatini persista dans son désir de poursuivre G. B. Casali pour faire invalider son jugement. Il mentionnait l’affaire dans la correspondance entretenue avec Stanislao Mattei, musicien et assistant de Padre Martini à Bologne. Dans une lettre datée du 25 décembre, Sabbatini exprimait clairement le souhait que les membres de l’Accademia filarmonica attestent de la validité des compositions. Cette affaire lui tenait à cœur car la querelle avec le maître de chapelle romain engageait aussi bien sa réputation que celle de l’institution bolonaise dont il était membre66.
57Ce conflit, reconstruit à partir des témoignages des trois principaux protagonistes de l’histoire, révèle les principaux enjeux qui se déclinaient autour de la pratique de l’examen. Ce moyen de sélection semble approuvé de tous. Il apparaît bien comme un signe de professionnalisation, en permettant aux maîtres de chapelle de juger collégialement, en interne et selon des critères techniques, du niveau de pratique des postulants. En revanche, le différend portait sur la façon dont il devait être conduit pour garantir cette fonction, bénéfique à la profession. Le monopole de G. B. Casali était fortement contesté par Padre Martini et L. A. Sabbatini. Pour ces derniers, la mise en œuvre collégiale du déroulement de l’examen et de la prise de décision devait être strictement respectée pour éviter toute position hégémonique.
58Les compositeurs, en affirmant publiquement leur capacité à juger de la validité ou non de l’examen, manifestaient leur autorité dans l’univers professionnel auquel ils appartenaient. Le jugement autour de l’examen leur donnait ainsi l’occasion de renforcer leur rôle prépondérant, et de construire leur réputation, dans le milieu musical et en dehors de cette sphère, en se signalant comme de puissantes références pour qui voulait entreprendre ce type de carrière. On observe que G. B. Casali se vantait de pouvoir faire jouer ses protections à l’échelle internationale, en dehors même d’Europe, alors que les fondements de son jugement étaient contestés localement.
59L. A. Sabbatini, quant à lui, indiquait aussi que la résolution de la controverse en sa faveur était essentielle pour sa propre réputation. Les candidats écartés étaient ses élèves, et son crédit en tant que maître de musique se trouvait donc fortement engagé dans cette affaire. La pratique de l’examen qui, à première vue, pouvait se présenter comme un mode de sélection juste, car reposant sur des démonstrations objectives de compétences, modifiait en réalité le jeu des protections et des recommandations sans les neutraliser.
60Les tensions nées de cet examen d’entrée mettent également en évidence le système de valeurs sur lequel reposait la cohésion de la profession musicale. Pier Luigi Palestrina était une référence pour la musique religieuse, le fondement d’une tradition, d’une représentation partagée de l’histoire de la musique67. La majorité des musiciens entretenait le mythe autour de sa personne.
Crises institutionnelles et définition des identités professionnelles
61À partir des archives des institutions urbaines qui opéraient un contrôle sur la pratique de la musique, on peut esquisser une image spécifique du milieu musical romain. La documentation permet d’éclairer une identité collective de la profession, les étapes de sa construction et les éléments qui la définissaient.
62L’analyse des épisodes de conflits et de tensions au sein des institutions permet non seulement de saisir la façon dont le groupe professionnel se représentait et se définissait, mais aussi de mettre au jour les réactions des individus devant les évolutions qui traversaient le milieu musical. C’est à deux crises institutionnelles majeures que je m’intéresserai ici.
La querelle des maîtres de chapelle autour de la « liberté dans la profession de la musique »
63La Congregazione dei musici di Roma, rappelons-le, reconnaissait et autorisait l’activité des musiciens dans les églises de Rome, mais elle offrait aussi une assistance mutuelle à ses membres68. Les nouveaux statuts de 1716 avaient non seulement un rôle réglementaire, puisqu’ils rendaient l’admission obligatoire pour pouvoir exercer dans les lieux de culte, mais ils avaient aussi une portée symbolique : ils définissaient de façon plus précise la profession musicale et contribuaient à la valoriser dans la société romaine, de façon décisive.
64Au cours du XVIIIe siècle, la communauté des musiciens exprima un besoin de reconnaissance et de considération, qui passait par une plus grande attention portée à la valorisation et à la défense d’une identité professionnelle. Cette tendance est visible à travers un conflit, né en 1747, autour d’une pratique touchant à l’organisation du monde professionnel.
65Dans le compte rendu de la séance du 14 avril 1747, les maîtres de chapelle titulaires de postes fixes dénonçaient « un grave préjudice » les concernant69 : d’autres maîtres de chapelle, également membres de la confrérie, leur confisquaient une partie des fonctions musicales dont ils avaient habituellement la charge dans leurs églises. Ces sortes d’« accapareurs de musiques » offraient souvent leurs services à un prix inférieur à celui qui était normalement pratiqué, ce qui constituait un préjudice financier pour les maîtres de chapelle ainsi détrônés. En outre, cette pratique remettait en cause la hiérarchie établie entre les maîtres de chapelle occupant des postes fixes et les autres. Ceux qui se trouvaient ainsi lésés dénonçaient cet abus qui, selon eux, mettait à mal l’existence même de la profession, « puisque le prix des compositions diminue chaque jour, il devient alors impossible pour les professeurs d’en vivre70 ». Aussi décida-t-on de prendre des mesures pour mettre fin à un abus qui tendait à « détruire entièrement toute la profession71 ».
66Trois résolutions furent prises pour tenter de régler ce différend. La première interdisait à tout maître de chapelle de « battre la musique » dans les églises où se trouvait déjà un maître de chapelle en fonction, sous peine de ne plus pouvoir exercer la musique pendant un an, voire pour une durée plus longue si l’assemblée secrète le décidait. Une exception était faite : on pouvait faire appel à un maître de chapelle qui n’était pas en poste dans l’église si la musique était payée par un commanditaire privé, un dévot ou un religieux qui n’exerçaient pas la profession de musicien. Par ailleurs, si un maître de chapelle avait déjà pris en charge la fonction musicale dans ce lieu, on devait obligatoirement faire appel à lui72. Il s’agissait finalement de rappeler l’importance de l’ancienneté pour éviter les conflits et régler les problèmes de concurrence.
67La seconde disposition visait à fixer le montant des émoluments versés aux musiciens qui participaient aux musiques dont se chargeaient les maîtres de chapelle et à contrôler leur distribution. Lorsque la dépense musicale était de soixante scudi, le maître de chapelle devait rémunérer les chanteurs du premier chœur à hauteur de 5 giuli, puis les chanteurs du second chœur et les instrumentistes pour 4 giuli. En revanche, ils distribuaient à tous 4 scudi lorsque la dépense globale était inférieure à 60 scudi. En cas de manquement au service, les maîtres de chapelle et les musiciens devaient payer une amende de 3 scudi au bénéfice de la Congregazione. Une amende de 3 scudi était aussi fixée si les musiciens ne se présentaient pas à leur poste, ou s’ils acceptaient d’être moins payés dans le but d’empêcher les maîtres de chapelle récalcitrants de proposer de faire de la musique à un moindre coût. Ces décisions répondaient à double objectif : celui de « soutenir le décorum de la profession, et pour que le professeur puisse vivre décemment73 ».
68Enfin, la troisième résolution obligeait le maître de chapelle à rémunérer rapidement les musiciens qui s’étaient produits. Si le maître de chapelle ne se présentait pas, on décidait de lui retirer sa licence (patente). Il n’était plus habilité à exercer et toute la profession devait en être rapidement informée. Une amende de 3 scudi était fixée pour les chanteurs ou les instrumentistes qui exerceraient sous la direction d’un maître de chapelle privé de sa fonction, toutes les fois que ce dernier enfreindrait la règle.
69Afin que le décret soit connu et observé de tous, on décida de l’envoyer dans toutes les chapelles dites de turno et de l’enregistrer dans les archives de la confrérie.
70Malgré les efforts de contrôle de la confrérie, la pratique dénoncée ne cessa pas. La période qui va de 1765 à 1770 fut particulièrement agitée. Remo Giazotto et Bianca Maria Antolini ont déjà mentionné l’existence du conflit qui traversa l’institution ces années-là74. Pour ma part, je souhaite étudier les faits au regard de la profession et de son évolution au cours du siècle.
71En 1767, on fit appel au primicier de la confrérie, Francesco Chigi, pour qu’il convoque une assemblée en septembre 1767. Un décret fut émis pour mettre fin à cet abus en proposant trois articles, dont voici le premier :
Qu’à l’avenir aucun Maître de chapelle ne puisse prendre illégalement les musiques d’un autre, et encore moins proposer de jouer ces musiques à un prix inférieur à celui habituellement pratiqué pour ces œuvres, ni intriguer pour empêcher d’autres maîtres de chapelle de jouer les musiques dont ils ont habituellement la charge, en particulier dans les églises où ils sont présents de façon régulière ; et dans le cas d’une violation de ces principes, le Maître de chapelle responsable devra être condamné à la suspension de sa licence pendant un an ainsi qu’à d’autres peines librement déterminées en fonction de la faute75.
72Un second article réglait l’organisation des fonctions musicales en cas de maladie ou d’absence des professori (chanteurs ou instrumentistes) habituellement engagés. On faisait en sorte que ce soit toujours lui qui s’occupe du remplaçant et qu’il reste le maître de chapelle référent. Enfin, le troisième point interdisait aux instrumentistes et aux chanteurs de jouer sous la direction du maître de chapelle non titulaire.
73Dans les mois qui suivirent, le climat régnant au sein du milieu musical ne connut pas d’apaisement. Le décret fut vivement contesté au cours des assemblées suivantes76. Pendant la séance du 1er décembre 1768, l’organisation de la fête de Santa Cecilia ne put avoir lieu en raison de la scission née du décret entre les musici (chanteurs) et les maîtres de chapelle77. Pour aplanir le tumulte, on proposa que chaque parti mette par écrit ses réflexions et ses arguments, des documents qui ne nous sont malheureusement pas parvenus. Finalement, le 18 juillet 1770, le cardinal protecteur Giovanni Francesco Albani, prit la décision de révoquer le précédent décret au motif qu’il constituait « une nouveauté préjudiciable à la liberté de la profession musicale et, par conséquent, porteuse de quelque inconvénient78 ». On exhortait les musiciens à observer scrupuleusement les anciens statuts et à exercer cette liberté en respectant l’équité, la foi et la charité fraternelle79.
74En janvier 1775, une assemblée générale fut de nouveau organisée pour mettre fin aux abus. On voit alors clairement se dessiner un débat d’ordre générationnel. Les maîtres de chapelle les plus anciens se plaignaient de l’attitude de leurs nouveaux collègues. Ils adressèrent une supplique au pape Pie VI dans laquelle ils contestaient les actions de jeunes maîtres de chapelle admis à titre gracieux dans la confrérie, c’est-à-dire sans avoir passé l’examen. Une partie des fonctions musicales des églises où ils étaient titulaires était faite par cette jeune et nouvelle génération qui les proposait à moindre coût. Ils demandaient de mettre un terme à cette pratique illégale, et légitimaient leur action en précisant qu’ils agissaient dans l’intérêt de tous les musiciens, protestant contre des manœuvres concurrentielles qui remettaient en cause une distribution des émoluments conforme aux principes de l’ancienneté et du positionnement acquis dans la hiérarchie de la communauté80.
75Le pape demanda par écrit au cardinal protecteur Giovanni Francesco Albani de régler le problème81 ; aussi, celui-ci, lors de l’assemblée générale du 10 septembre 1775, promulgua-t-il un décret pour apaiser le tumulte. Le cardinal protecteur, confirmait et ratifiait à nouveau le décret du 14 avril 174782. La mesure fut néanmoins insuffisante, ce dont témoignent les comptes rendus d’assemblées des années postérieures qui soulignent l’inefficacité du décret83.
76Des évolutions, qui concernent l’exercice de la musique dans les églises, apparaissent néanmoins dans les nouveaux statuts promulgués en 1794. L’article XVI mentionne en effet le problème de la dépossession de certains maîtres de chapelle des prestations qui leur étaient précédemment accordées84. Il était décidé que les maîtres de chapelle ne pouvaient pas se substituer aux titulaires en poste dans les églises ; mais qu’en cas d’impossibilité ou d’un âge trop avancé, le maître de chapelle empêché devait choisir un remplaçant de son choix avec lequel il partagerait son émolument. Il était également précisé que lorsque le maître de chapelle se chargeait d’une fonction musicale dont le prix était abaissé, il devait exclure en premier les musiciens les plus récemment admis ou les moins nécessaires, promettant de les engager à nouveau pour d’autres fonctions musicales pour des Triduum (trois jours) ou des fêtes de saints.
77L’article XXVII précisait enfin que les instrumentistes engagés par recommandation ou proposés par les organisateurs de la fonction musicale étaient obligés de verser 12 paoli aux musiciens qui d’ordinaire remplissaient la fonction, jusqu’à ce qu’ils soient remis à leur poste. Cette précision laisse entendre que certaines chapelles musicales disposaient donc d’instrumentistes permanents, au moins de façon tacite.
78Ce conflit met ainsi au jour un marché saturé dans le milieu des chapelles musicales. Le compte rendu d’assemblée du 10 septembre 1775 cité plus haut signale, du reste, que ces « désordres » étaient dus à la moltiplicità, c’est-à-dire du grand nombre des maîtres de chapelle. On imagine aisément que l’attitude des plus jeunes, qui se proposaient pour des exécutions musicales « au rabais », là où opéraient quotidiennement leurs aînés, s’expliquait par la difficulté de trouver suffisamment d’engagements pour pouvoir vivre de la musique. Nous pouvons approcher là une caractéristique du marché du travail romain difficile à appréhender par le chercheur qui n’a pas directement accès aux motivations des contrevenants, puisque les sources éclairent surtout les revendications des maîtres de chapelle les plus anciens. Cette concurrence avait certainement des raisons économiques, et la documentation indique en effet que les revenus ainsi captés de façon « abusive » par les plus jeunes venaient à manquer à certains maîtres de chapelle parvenus au sommet de la stabilité professionnelle offerte par les institutions urbaines. Cette pratique pouvait donc saper l’ordonnancement auquel veillait la Congrégation, qui associait revenus et hiérarchie interne. Il n’est pas exclu que cette volonté, de la part des jeunes maîtres de chapelle, de se produire à toute force dans les chapelles romaines, ait eu comme finalité, en plus des bénéfices économiques, celle de se faire connaître dans le milieu musical comme du public. Ces engagements leur permettaient de construire et d’asseoir une réputation sur la scène urbaine, une source de rétributions matérielles et symboliques.
79Un aspect particulièrement intéressant de ce dossier est la mention en 1770, par le cardinal protecteur Albani, de la « liberté de la profession de la musique », au nom de laquelle était révoqué le décret de 1767, jugé trop contraignant. Les autorités de la Congrégation elles-mêmes défendaient donc cette « liberté » sur le marché du travail romain, et se refusaient à régler son accès de façon trop rigoureuse. Cette position était cohérente avec la promotion d’une profession fondée sur le talent et la maîtrise de l’art, dont la dignité se serait trouvée entamée par des liens de dépendance trop serrés. Aussi le cardinal Albani en appelait-il à une autre composante de la « profession » pour régler les comportements : le sens de l’intérêt commun, le respect mutuel et la solidarité. Le haut niveau d’offres compétitives qui caractérisaient le milieu musical dans ces années-là rendait néanmoins cet équilibre difficilement réalisable.
Les controverses au sujet des recrutements dans la chapelle musicale pontificale en 1761
80Le conflit qui opposa en 1761 le cardinal protecteur de la chapelle pontificale, Alessandro Albani, aux chanteurs pontificaux surnuméraires, a produit un vaste massif documentaire. Les archives de la chapelle musicale pontificale conservent plusieurs documents qui se rapportent à cet épisode : le Diario sistino de l’année 176185, un volume intitulé Controversia fra alcuni cappellani della cappella pontificia e il Card[inale] Protettore, che finì con la constituzione di Clemente XIII in data 31 agosto 176286, un carton contenant les Scritture di una causa fra il cardinale Alessandro Albani Protettore e Prefetto della cappella dei cappellani cantori di detta cappella87, et la documentation nominative du cardinal Alessandro Albani88. D’autres documents sont conservés dans des fonds d’archives qui ne sont pas directement liés à l’institution pontificale. Un registre intitulé Causa de’ Cantori Pontifici, lequel regroupe un certain nombre de documents juridiques imprimés en 176189 se trouve à la Biblioteca del Liceo Musicale di Bologna, tandis qu’un memoriale de l’affaire datée de la même année, signé de l’avocat Biagio Maria Fioravanti90 est conservé à l’Archivio di Stato di Roma.
81Il ne s’agit pas, dans le cadre de ce chapitre, de proposer une description détaillée du conflit qui pourrait, à lui seul, faire l’objet d’une monographie, mais de déterminer ce qu’il donne à voir du milieu de la musique, en fonction des questions posées sur les dynamiques sociales qui modifient progressivement les structures professionnelles. La vaste documentation présentée au préalable permet d’éclairer les motifs et le déroulement de cette discorde et de saisir, à travers son étude, deux éléments essentiels se rapportant à l’évolution du milieu musical au cours du siècle. Le premier concerne, comme je l’ai déjà illustré plus haut, la mise en place de mécanismes de contrôle autour de la qualification des musiciens. L’attention accrue portée aux compétences musicales se révèle être en effet le marqueur d’une professionnalisation en cours dans le milieu musical romain. Le critère de l’ancienneté qui, jusque là, prévalait dans l’évolution des carrières à l’intérieur de l’institution musicale est minoré, voire discrédité, par l’importance accrue accordée à l’habilité et aux qualités musicales des individus. L’étude de cet épisode spécifique met aussi en lumière les transformations du marché musical, en particulier la nouvelle structuration de l’emploi.
82L’origine des dissensions au sein de la chapelle musicale remonte au mois d’avril 1761, à l’occasion du décès du chanteur titulaire Giulio Mastrangeli91. Ses successeurs suivant l’ordre d’ancienneté, les chanteurs surnuméraires Andrea Spadoni92 et Domenico Melchiorri93, s’attendaient à recevoir la « portion vacante » du défunt, en se reportant au chapitre quinze des décrets du Collège pontifical confirmés par le pape Innocent XII dont le pontificat s’étendit de 1692 à 1700. Le cardinal protecteur Albani refusait pourtant d’accorder cette « portion vacante » aux deux chanteurs en raison de leur incompétence, se montrant résolu à faire appliquer les deux décisions qu’il avait arrêtées en 1748 au sujet de la succession des postes. L’épisode est relaté en détail dans le Diario sistino de l’année 1761, non sans impartialité94.
83La déception et la colère des deux chanteurs surnuméraires étaient grandes. Ils jugeaient l’attitude du cardinal « insolite et arbitraire ». Ils étaient d’autant plus affectés qu’on racontait que le cardinal pensait accorder le poste de titulaire à un chanteur forestiero, c’est-à-dire non originaire de Rome, et qui n’était pas membre de la chapelle pontificale95. En réaction, les chanteurs surnuméraires s’unirent et décidèrent de saisir la justice. L’avocat Domenico Lopez di Barrera fut choisi pour se charger de leur défense96.
84En réaction, Alessandro Albani émit un billet le 14 avril 1761 dans lequel il justifiait sa décision :
Ayant été obligés d’admettre dans la Chapelle Pontificale de nombreux chanteurs surnuméraires, puisque le nombre des chanteurs en service a été fortement réduit, étant donné que nombre d’entre eux sont retraités ; et ayant malheureusement constaté que les chanteurs surnuméraires en question, après avoir obtenu un poste sûr, n’étudient plus, ni ne font aucun progrès, et que le service de la Chapelle ne se fait plus avec le décorum qui lui est dû. […] nous ordonnons et décrétons donc que, lorsqu’une paye devient vacante, il est nécessaire, avant de l’attribuer, d’examiner rigoureusement en notre présence l’habileté, les connaissances et le profit qu’en auraient les chanteurs surnuméraires, pour que nous puissions donner la paye vacante à celui que, parmi eux, nous aurons jugé le plus habile et qui sera selon nous le plus utile au bon service de la Chapelle97.
85Grâce à cette affaire, nous apprenons que le recrutement de plusieurs surnuméraires avait été nécessaire pour compenser le mauvais équilibre existant entre les chanteurs à la retraite, bien trop nombreux, par rapport aux chanteurs en service. Ce recrutement plus massif qu’à l’ordinaire avait eu pour effet, semble-t-il, de devoir se satisfaire de chanteurs médiocres qui, une fois dans l’institution, selon le cardinal Albani, ne s’exerçaient plus et ne faisaient aucun progrès dans leur art. L’incompétence attribuée à plusieurs surnuméraires discréditait grandement la chapelle pontificale, ne lui permettant plus de tenir son rang et sa réputation. Cette évolution justifiait donc la mise en place d’un examen permettant de contrôler leurs aptitudes avant de leur concéder un poste de titulaire.
86Le mécontentement soulevé par les considérations du cardinal protecteur portait donc sur le développement des carrières au sein de la chapelle musicale. La réaction des chanteurs surnuméraires apparaissait assez conservatrice. Ils défendaient en effet le critère de l’ancienneté sur lequel reposait le processus de recrutement traditionnel. La chapelle pontificale était alors perçue comme une ressource locale ; chacun pouvait y évoluer en fonction des années de service passées en son sein. Ce mécanisme offrait à tous la même garantie et la même prévisibilité d’obtention d’un poste stable.
87La vision du cardinal Albani était plus pragmatique et circonstancielle. Elle visait aussi à maintenir la place de la chapelle pontificale dans la hiérarchie des lieux de la pratique musicale qui étaient habituellement pris pour modèle, à l’échelle de la ville, mais aussi au-delà, d’autant plus qu’au prestige de cette chapelle était attaché celui du pape lui-même. Pour redresser le niveau musical de l’institution, il était ainsi nécessaire, selon le cardinal Albani, de choisir les meilleurs chanteurs par le moyen d’un examen rigoureux et obligatoire. Il introduisait une importante dimension concurrentielle dans ce système qui privait les surnuméraires de l’assurance conférée par le seul critère de l’ancienneté.
88On observe que le mouvement de contestation des chanteurs surnuméraires se trouvait conforté par un esprit de corps, convoqué dans les déclarations et les attestations produites au cours du conflit. Prenons comme exemple le discours prononcé le 24 mai 1761 par le maître de chapelle Giacomo Cossa. Il insistait sur deux principes : l’« union » et la « concorde »98. Face à la division qui régnait dans le Collège pontifical, il appelait tous les chanteurs à s’unir autour de valeurs communes, notamment celles qui se rapportaient à la morale religieuse. L’orateur invitait chacun des membres à défendre de façon permanente les textes réglementaires qui avaient été promulgués par les précédents souverains pontifes. Dans une déclaration du 10 juillet 1761, les chanteurs confirmaient leur union pour protéger l’institution et son règlement99. Ceux qui s’opposaient à sa défense et à son fonctionnement séculaire étaient présentés comme des « ennemis du bien public », portant aussi bien atteinte à la liberté qu’aux privilèges du Collège pontifical.
89De son côté, le cardinal protecteur, pour défendre ses propositions qui modifiaient le fonctionnement interne de la chapelle, fit appel à des autorités du monde musical. Parmi elles figurait Giuseppe Santarelli, membre de la chapelle pontificale depuis 1749, mais qui occupait un poste de titulaire depuis 1753100.
90À la demande du protecteur Alessandro Albani, le chanteur pontifical avait publié un mois avant le début des oppositions, en mars 1760, un opuscule sur l’histoire de la chapelle pontificale101. Dans la préface, G. Santarelli précisait que son initiative répondait à deux demandes du cardinal protecteur. Il donnait, dans un premier temps, des informations sur la naissance de la chapelle pontificale, sur ses membres et sur son évolution dans le temps. Dans un second temps, il proposait un règlement pour remédier aux abus et aux désordres introduits dans la chapelle afin que le protecteur puisse en entreprendre la réforme. Le chanteur jugeait en effet qu’il était nécessaire de mettre en place des transformations et que la Bulle pontificale de Sixte V soit modifiée sur certains points. Parmi les réformes proposées dans cet opuscule figurait l’augmentation des salaires des chanteurs, notamment dans le but de les fidéliser plus durablement à l’institution102. Selon G. Santarelli, une augmentation des salaires pouvait éviter que les chanteurs pontificaux ne participassent à d’autres fonctions musicales organisées dans la ville de Rome, en dehors du cadre institutionnel de la chapelle. Bien que l’auteur ne précise pas la nature de ces engagements, on peut se douter qu’il pensait aux divertissements donnés dans les palais ou les résidences de la noblesse comme dans des théâtres publics. Selon Santarelli, la participation des chanteurs à un répertoire musical aussi éloigné de celui entretenu dans la chapelle pontificale ruinait leurs voix et portait atteinte à la qualité des exécutions.
91En outre, G. Santarelli insistait sur la nécessité qu’un des chanteurs soit également investi des fonctions de professeur pour améliorer le niveau musical de l’institution, tout en transmettant la technique vocale et le style musical qui avaient été privilégiés depuis sa création103. On retrouvait donc ici, sous la plume du chanteur, la proposition du cardinal protecteur qui, par les décrets émis en 1748, avait déjà affirmé la nécessité d’instituer une école de chant. Son ambition était bien de maintenir une « école » et un « style », qui avaient fait la réputation de la Chapelle pontificale, et qui menaçaient de se perdre. Le chanteur rappelait aussi l’importance du respect des précédentes Costituzioni visant à régler le fonctionnement de la chapelle et précisait qu’il était nécessaire que le service des chanteurs pour les offices religieux quotidiens (officiatura quotidiana) soit rigoureusement suivi.
92À la fin de son opuscule, G. Santarelli proposait deux autres mesures à envisager pour la mise en œuvre de cette réforme. La première visait à créer six ou sept postes salariés supplémentaires accessibles aux surnuméraires, tout en précisant que la Reverenda Camera Apostolica risquait de ne pas accorder cette demande et refuserait de substituer la Bulle de Sixte V. Une autre solution était d’ouvrir le concours d’admission au poste de titulaire à des musiciens étrangers à la chapelle musicale, proposition qu’il soumettait au protecteur et à ses compagnons du Collège pontifical104.
93Cet opuscule de G. Santarelli visait à une plus grande professionnalisation des chanteurs de la chapelle pontificale : augmentation des salaires, limitation des interventions hors de l’institution, spécialisation dans un style porté à un haut niveau par ce corps, formation tout au long de la carrière. Il donnait ainsi du crédit à la réforme proposée par le cardinal protecteur. Si le chanteur se montrait prudent dans ses déclarations, il argumentait autour de propositions nouvelles et innovantes sur lesquelles pouvait s’appuyer Alessandro Albani.
94Au cœur de la controverse, le cardinal Albani sollicita aussi l’expertise de l’Accademia dei Filarmonici di Bologna, en particulier sur les deux décrets de l’année 1748 à l’origine du différend. Le protecteur de la chapelle pontificale expliquait sa démarche dans une lettre de remerciement adressée à Padre Martini le 29 juillet 1761. L’avis des figures d’autorité dans le monde musical comme celui des membres de la Filarmonica di Bologna, qualifiés « d’hommes aussi savants et experts dans l’art musical » permettait de justifier le bien-fondé de sa démarche105. L’attestation de l’institution musicale bolonaise, datée du 22 juillet 1761 et signée par deux maîtres de chapelle, Giovanni Battista Martini et Giuseppe Maria Carretti, approuvait les décrets promulgués par le cardinal Albani. Les signataires bolonais, au nom de l’Accademia filarmonica, validaient ces décrets comme étant « justes, avantageux et nécessaires106 », reconnaissant que l’institution musicale romaine avait connu une période de déclin dont elle pourrait se relever grâce à ces dispositions. Il fallait défendre la pratique vocale exercée au sein de la chapelle pontificale, notamment le plain-chant (musique vocale monodique et a cappella) et le canto figurato (chant en contrepoint) qui participaient à la réputation de l’institution.
95Finalement, en septembre 1762, une Costituzione du souverain pontife Clément XIII confirmait les décrets du cardinal Albani. Par décision papale, l’examen des surnuméraires devenait donc être obligatoire pour l’obtention d’un poste de titulaire107.
96Les motivations du cardinal protecteur Alessandro Albani étaient liées à une transformation réelle du marché de l’emploi dans le milieu musical. Dans le memoriale imprimé adressé aux cardinaux Merlini, Castelli et Colonna, les raisons de cette réforme étaient clairement exposées. La justification du cardinal protecteur présentait d’abord les problèmes internes à l’institution108. Il exprimait sa volonté de relever le niveau musical de l’institution dont le prestige avait décliné depuis plusieurs années. Les difficultés conjoncturelles de l’institution étaient rappelées : elle avait souffert d’une pénurie de chanteurs en activité due à la mise à la retraite de vingt chanteurs, aux décès de deux jeunes excellents sopranistes, Bernardo Niccolini (1750) et Giovanni Battista Fedeli (1759)109, et au départ successif de sept bons chanteurs au Portugal110. Un certain nombre de chanteurs surnuméraires avaient dû être recrutés pour les remplacer, mais leur niveau musical était insuffisant. Le cardinal avait donc pris des mesures pour faire face à cette difficulté. Les chanteurs surnuméraires qui avaient réussi le concours devaient fréquenter l’école de chant mise en place en 1748 et repasser un autre examen pour espérer obtenir un poste de titulaire. Dans ce cas, le contrôle des compétences musicales s’imposait donc comme une réponse directe au déficit de bons chanteurs.
97Pourtant, des conditions externes avaient également fragilisé le fonctionnement de l’institution :
Et si par la suite, malgré cela, on constate des abus dans la Chapelle Pontificale, il faudra en imputer la responsabilité aux nombreux Théâtres et aux Princes qui, de partout en-deça et au-delà des Monts, invitent les chanteurs de Rome et de l’Italie pour des salaires exorbitants, si bien que ceux-ci ne s’occupent plus de la Chapelle Pontificale111.
98Les nouvelles règles du marché musical mettaient en difficulté la chapelle pontificale qui ne jouissait plus du même degré d’attractivité que par le passé. Le déclin de l’institution était en partie dû aux salaires plus rémunérateurs qu’offraient les théâtres publics et les familles princières, en Italie mais aussi à l’étranger. Les chanteurs de Rome, et d’Italie, en général, lorsqu’ils connaissaient leurs talents, ne considéraient plus la chapelle pontificale comme une ressource suffisamment estimable. Ils ne faisaient alors plus cas de cette institution, préférant offrir leurs services à d’autres intermédiaires, en s’engageant dans une mobilité dont j’ai montré plus haut la forte incidence dans les carrières réussies. La chapelle pontificale était davantage devenue une ressource urbaine locale, que les musiciens sédentaires défendaient à tout prix pour la stabilité de l’engagement qu’elle présentait.
99Quelques années plus tard, le théoricien Charles Burney dressait un constat concordant au sujet du déclin de la chapelle :
En effet, j’avais entendu dire, avant mon arrivée à Rome, par un de mes amis qui y avait résidé dix-neuf ans, que je ne devais pas m’attendre à trouver la musique de la chapelle pontificale supérieure au reste de l’Italie, alors qu’elle l’était jadis, avant qu’on n’eût inventé les opéras et accordé des salaires aussi considérables aux premiers chanteurs qui s’y produisent. Comme alors les musiciens du pape étaient les mieux payés, ils devaient sans doute avoir plus de mérite que ceux qui étaient employés ailleurs ; mais ce n’est plus le cas, et les conséquences s’en font ressentir. Leur situation est en quelque sorte semblable à celle de nos choristes en Angleterre, dont le salaire est resté ce qu’il était lors de l’établissement des églises : l’exécution du chant en est elle aussi demeurée au même point ; la vie est devenue plus chère, l’argent perd de sa valeur, on en donne davantage ailleurs ; pour vivre, les chanteurs sont obligés d’exercer une seconde profession, et la musique d’église, fatalement, périclite, tandis que celle des théâtres se perfectionne de jour en jour grâce à des récompenses plus élevées112.
100Ainsi, selon Charles Burney, les écarts des salaires, qui reflétaient la transformation de l’offre d’emplois due en partie à la multiplication des commanditaires et des lieux d'exercice, jouait un rôle considérable dans la qualité musicale de l’institution et dans son rang au sein des lieux de musique urbains. Puisque les salaires des chanteurs pontificaux étaient nettement moins élevés que les gains offerts par les théâtres publics, l’on pouvait s’attendre à ce que ceux qui s’employaient soient moins talentueux, et que les meilleurs musiciens se dirigent plutôt vers des pôles plus attractifs compte tenu des ressources qu’ils distribuaient. La valorisation salariale devenait un gage de qualification musicale.
101À travers la documentation institutionnelle exploitée, il a été possible de mettre au jour les évolutions profondes qui ont touché le milieu musical romain au cours du XVIIIe siècle.
102Un processus de professionnalisation a pu être observé dans les principales institutions romaines. Il se révèle notamment par la pratique plus fréquente et mieux partagée de l’examen pour contrôler les compétences des musiciens. Les autorités des institutions étudiées se montraient en effet plus attentives aux capacités de leurs membres. Le milieu musical romain était marqué par une forte concurrence et cette caractéristique eut un effet direct sur les mesures visant à renforcer le contrôle de la pratique musicale dans les institutions, ce que Gérard Labrot a également pu observer pour la communauté des peintres113.
103Les conflits nés autour des examens d’admission ont également mis en évidence la façon dont les musiciens les plus reconnus jouaient et usaient de leur autorité. La nouveauté de l’examen et l’attachement progressif des musiciens à ce mécanisme de certification et de sélection modifiaient les rapports d’autorité et d’influence dans le milieu.
104Enfin, les crises institutionnelles qui ont marqué l’histoire de la chapelle musicale pontificale comme la Confrérie des musiciens de Rome ont révélé les actions et les mesures prises pour gérer ou réagir devant les transformations de l’offre et de la demande dans le milieu musical. Les deux institutions représentaient et défendaient l’offre de la musique sacrée. Les crises institutionnelles qu’elles durent gérer sont à mettre en lien avec les transformations de l’emploi, causées notamment par l’affirmation de l’offre théâtrale. Si l’historiographie avait déjà observé le déclin de la chapelle pontificale, l’étude des tensions internes à partir des archives institutionnelles éclaire autrement le phénomène. Le déclin de cette chapelle n’a pas seulement pour cause l’évolution de la production musicale et la désaffection du public pour la musique sacrée. L’analyse sociale de l’institution montre que les chanteurs eux-mêmes la délaissent, attirés par d’autres lieux de la pratique musicale où ils étaient souvent mieux rémunérés – en particulier les théâtres et les palais aristocratiques –, participant ainsi directement à la perte de prestige de la chapelle musicale.
105Le monde musical local a été observé à travers deux axes d’études, qui, à la manière d’un dialogue, permettent de mieux comprendre l’évolution de la pratique musicale et le statut professionnel des musiciens au cours du siècle.
106Les dynamiques internes qui traversent ce milieu professionnel ont pu être appréhendées à partir des descriptions et des observations faites par les protagonistes principaux de la vie musicale romaine, au plus près de leur quotidien. Les témoignages décrivent un système devenu particulièrement compétitif et tendu dans toutes ses composantes, en suivant néanmoins des logiques différentes dans chacune d’entre elles. Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, le milieu des chapelles musicales apparaît comme saturé et concurrentiel. Il peine cependant à conserver, même dans ses segments les plus élevés, sa place éminente en termes de réputation et d’honneur à l’échelle de la ville, et par conséquent également sur le plan du rayonnement italien et international, devant le dynamisme et le succès de l’activité théâtrale urbaine.
107Les musiciens ont parfois perçu eux mêmes cette recomposition du milieu musical romain. Leurs réactions face aux changements du siècle prirent des formes variées. Certains adhéraient pleinement aux nouvelles perspectives du métier, se saisissant de toutes les opportunités, même risquées, de se faire reconnaître pour leurs talents par les différents commanditaires, cherchant à en cumuler les revenus comme les bénéfices symboliques pour élever leur condition. D’autres, au contraire, restèrent attachés à un style, « l’école romaine », à ses valeurs et à ses codes de comportement, dans une perspective plus conservatrice et de défense d’une tradition professionnelle fondée sur le primat de la musique sacrée. Ainsi, certains compositeurs revendiquèrent une posture conservatrice et se firent les champions des précédentes règles de l’exercice de la musique. D’autres contribuèrent, au contraire, aux nouvelles œuvres, en diversifiant leur production musicale et en répondant ainsi à la demande croissante pour les spectacles d’opéra.
108Les archives de certaines institutions musicales ont également permis de mieux saisir certaines évolutions relatives à l’exercice de la musique. Plusieurs signes d’un processus de professionnalisation ont été repérés, notamment une pratique des examens et des concours qui s’accroît. Les crises institutionnelles observées, aussi bien dans la Congrégation des musiciens de Rome que dans la chapelle musicale pontificale, se présentent comme des réactions à la restructuration du paysage musical urbain. Le développement du système théâtral, et la nouvelle hiérarchie salariale qu’il mettait en place, fragilisait le milieu traditionnel des chapelles musicales. Ces institutions, plus conservatrices, étaient défendues par certains musiciens qui, le plus souvent, tendaient à protéger leurs intérêts dans le milieu, mettant en avant le respect des traditions qu’ils présentaient comme un élément essentiel de la dignité de la profession.
Notes de bas de page
1 Heinich 1993, p. 24.
2 Ribard 2010, p. 95.
3 Voir supra, chap. 5.
4 Vessella 1935, p. 261.
5 ASR, 39 Notai Capitolini, Ufficio 39, vol. 70, fol. 93r : « Tutti li musici Tromboni fatti per mezzo del Custode della Curia di Camp[idogli]o a dovere per questo giorno all’ore 17 intervenire nel Palazzo di residenza dell’E[ccellentissimi] Loro per doversi avanti li med[esim]i C[onservatori] C[apitolini] loro fare l’esperimento dell’abilità de’med[esim]i musici Tromboni a giudizio però dal Sig. Gio[vanni] Cari M[estr]ro di Cappella a tal’effetto dalla med[esim]a C[amera] C[apitolina]. » Le document est cité par Alessandro Vessella pour dénombrer les membres du Concerto capitolino. Voir Vessella 1935, p. 112.
6 Statuts de la Congregazione dei musici di Santa Cecilia (1716) dans ANSC-AS, Carteggio, Serie II : « Capitolo XXI. Inerendo al decreto fatto sotto il 13 gennaro 1686, come nel libro de Decreti approvati dalla Congregatione Generale e sottoscritti dall’Em[minentissi]mo Protettore in quel tempo, si è stabilito, e nuovamente decretato, che in avvenire non sia più lecito ad alcun Musico, o Istromentista di qualsiasi sorte di far Musiche nelle Chiese di Roma senza essere stato prima abilitato, et approvato per idoneo dalli quattro Maestri di Cappella che a quest’effetto si eleggeranno dalla Congregatione ogni Anno […]. Capitolo XXII : […] per l’avvenire non si sarà più licenza a persona alcuna, se prima non saranno abilitati, ed approvati dalli signori Mastri di Cappella a tal effetto Deputati, come si è detto sopra. »
7 ANSC-AS, Atti delle congregazioni, Registro 4, 14 octobre 1716 : « Furono stabiliti li esaminatori per abilitare quelli vorranno esercitare la carica di Maestro di Cappella in avvenire e sono li signori Ottavio Pitoni, Giuseppe de Rossi, Pompeo Cannicciari et il Guardiano pro tempore ».
8 ANSC-AS, Atti delle congregazioni, Registro 4, 18 juillet 1741 : « Per togliere ogni ulterio difficoltà, e far cosa grata alli Sig[no]ri Maestri di cappella, che attualmente si trovano in possesso di detto impiego, senza esser stati prima esaminati, ed approvati, vogliamo e comandiamo che si abbiano per esaminati, ed approvati, e possino liberamente continuar nel detto loro impiego di maestro di cappella con riceverne però la patente dalla detta Cong[regazio]ne, che gli sarà conceduta gratis ; ma per l’avvenire, e dalla data della presente congreg[azio]ne chiunque vorrà esercitare il sudetto impiego di Maestro di cappella dovrà essere esaminato nel contrapunto, e canto ecclesiastico nella forma stabilita in detta dichiarazione ed ampli azioni ».
9 ANSC-AS, Atti delle congregazioni, Registro 4, 21 avril 1746 : « Che in avvenire non si debbino più in alcun tempo mutare ; e levar d’officio li infrascritti esaminatori, che sono quelli a punto che furono deputati la prima volta dopo messi in osservanza i nostri statuti, e così continuare cinque per anno, come in appresso, con che debba il guardiano maestro di cappella anche esso essere per quinto esaminatore, e nel caso che qualchuno venga a mancare in tal caso debba la Cong[regazio]ne deputare altro in sua voce ».
10 Rostirolla et al. 2010, p. 295, lettre de Chiti à Martini, 6 septembre 1747 : « Io so di certo da Pitoni, e per antica inalterabile consuetudine, che Roma nell’esaminare li mastri di cappella in specie, e li concorsi fatti in Roma, è caminata e caminerà sempre con la proposta d’un’antifona in canto fermo, per vedere se l’esaminato conosce il suo dovere ; regola dataci dal Palestrina sì per le osservazioni d’Antimo Liberati, etc., etc., etc. Adesso questi signori napolitani vorriano abolire dicendo questo modo superfluo ; io devo in tutti li conti sostenerlo ».
11 La définition de Rousseau de l’antienne est la suivante : « Sorte de Chant usité dans l’Église Catholique. […] Aujourd’hui, la signification de ce terme est restreinte à certains passages courts de l’Ecriture, qui convienne à la Fête qu’on célèbre, & qui précédant les Psaumes & Cantiques, en réglant l’intonation » (Rousseau 1768, p. 32).
12 Les écrits théoriques d’Antimo Liberati, chanteur et compositeur né à Foligno, défendaient notamment la place de Palestrina et le qualifiaient de « sauveur » de la polyphonie.
13 Sur la place de la théorie et de l’historiographie de l’art dans les processus de professionalisation, voir Kempers 1997.
14 Bc, Carteggio di Padre G. B. Martini, I.021.037, Giovanni Battista Casali à Padre Martini, 22 décembre 1776 : « L’esame di compositore si fà così si dice, che à troppo agevolezza, al approvando se aprendo il libro dell’antifonario da che parte uno sceglere, se à destra, o sinistra, il guardiano apre dove gli pare, apperto si posa il libro e da quella parte che hà detto prima, in quella facciata sceglie dunque fatta la risposta di quel che gli tocca deve tirare a 4 parti qual tal soggetto e circolarlo, e lavorarlo, porci le parole e farne almeno trenta battute, che lei ben vede che non è gran cosa, deve però farle stando nella stessa camera li detti maestri fatto gli si fà sottoscrivere, poi si manda fuori allora l’esaminatori, l’esaminano la compositione, si richiama dentro l’approvando, e allora o si approva, ò gli si dice redeat ».
15 Pour les rappels de l’obligation d’admission, voir les comptes rendus suivants : 22 septembre 1750, 23 novembre 1762, 16 novembre 1764. ANSC-AS, Atti delle congregazioni, registri 4 et 5.
16 Rostirolla et al. 2010, p. 698-699, lettre de Chiti à Martini, 16 et 17 novembre 1753 : « Qui si vedono gran cose : esser passato, dichiarato maestro di cappella da Nostro Signore, con spedirle la patente, un giovine senza esame, perché maestro della moglie de’ l’ambasciator veneto, raccomandato dal maggiordomo eminentissimo. Io però me la rido e lascio correre ».
17 ANSC-AS, Contabilità, Registro 7, Libro nel quale si registrano tutte le entrate della venerabile Congregazione, cc. 240 ; 1746-1805. Les registres des années antérieures ne distinguent malheureusement pas les admissions accordées à titre gracieux.
18 ANSC-AS, Atti delle congregazioni, Registro 5, Assemblée du 7 septembre 1793, Foglio fatto dal nostro curiale per il buon regolamento dell’esame : « Essendosi fatto ricorso, che alcuni per qualche dipendenza vogliano quasi per forza carpire dalli esaminatori il biglietto di approvazione e così entrare furtivamente per così dire nella nostra congregazione, per cui per la loro incapacità ne nascono delli scandali nelle chiese, attesi li quali ne resta denigrata la stima della nostra cong[regazio]ne particolarmente più quella di tanti professori individui, e molto più quella delli stessi esaminatori, che qualche volta son per dipendenza obligati, o a passare persone inatte, o farsi delle inimicizie : Per scanzo adunque di simili inconvenienti, e per togliere cosi detti esaminatori da ogni impegno, sono ricorsi in questo giorno, accio la cong[regazio]ne pensi di toglierli di mezzo da tali inciampi ».
19 ANSC-AS, Atti delle congregazioni, Registro 5, Assemblée du 5 novembre 1755 : « Per essere stati approvati tra gl’istrumenti alcuni principianti non ancora habili a potere eseguire a prim’occhio le composizioni, e perché in avvenire non succedesse più un tal disordine fu decretato nella detta congreg[azio]ne segreta, che non fosse più ammesso per Fratello alcuno degl’Istrumentisti, e in particolare di Violino, se prima fosse esaminato dal guardiano pro tempore istrumentista, e da due altri esaminatori approvati dalla congregazione ».
20 Bc, Carteggio di Padre G. B. Martini, I.021.037, Giovanni Battista Casali à Padre Martini, lettre du 22 décembre 1776 : « All’esame di un musico, overo istromentista, oltre il guardiano di quel genere ci deve esser uno dei maestri di cappella esaminatori perpetui che siamo quelli della basilica ».
21 À titre d’exemples, voir Sherr 1987 ; Rostirolla 1994a ; Annibaldi 2011.
22 Sur la figure d’Alessandro Albani comme protecteur de musiciens, voir Oriol 2017, p. 360-362 ; Borchia 2019, p. 383-389.
23 BAV, Cappella Sistina, vol. 671, fol. 47r (22 janvier 1744) : « Perciò abbiamo creduto in primo luogo di espressamente proibire e ordinare, che in avvenire non si possiano diminuire, mutare, o inqualunque modo alterare le composizioni musicali della me[esim]a cappella e molto meno introdurne delle nuove. Siccome ancora, che non si facciano trascrivere libri, o composizioni, né si accomodino, o si abbrevino cantilene, senza l’approvazione del Collegio, il nostro ordine in scriptis. In oltre vogliamo che quando vi sia il bisogno di far composizioni nuove, o di mutare, o accommodare quelle, che vi sono se ne dia l’incombenza ad un Perito e accreditato Compositore di Canto ecc[lesias]tico dello stesso Collegio ».
24 Ibid. : « Che in mancanza del med[esim]o Maestro sia incombenza del più anziano de’ giubilato presenti supplire le sue veci, […] anche perché cosi non si verrà a sminuire il numero delle voci, come accade quando uno de’ Cantori non Giubilati è chiamato ad assistere, e perciò non può cantare in sieme con gl’altri e mancare al proprio uffizio, e alla sua parte ».
25 Ibid., fol. 55 : « Abbiamo perciò stimato di ordinare espressamente come ordiniamo, e vogliamo, che non si cambi, o si alteri in conto veruno lo stile finora praticato di cantar la messa ne comuni, e ne feriali entro la sud[ett]a Cappella in quei giorni, e settimane, che non siano impedite […] E benché non dubitiamo, che cio’ sia per osservarsi, nulla di meno per averne un riscontro più sicuro vogliamo, che alla fine di ciaschedun mese il Puntatore porti a noi la nota distinta, di quei giorni, ne quali si è fatto il servigio nel detto mese […] proibendo al Collegio il determinare di propria autorità le vacanze per una intiera settimana, quando non siano quelle settimane, nelle quali o non si può, o non è stato solito esservi il servizio senza aver fatto prima à Noi sapere li ragioni per le quali intendono di esentarsi dall’andare in cappella poiché quando saranno trovate sussistenti e ragionevoli sarà nostra cura il prendere quelle resoluzioni ».
26 Ibid., fol. 63r, 11 août 1748 : « Essendosi riconosciuto, che alcuni de’ Cantori Pontificj Giovani Sopranumerrarj, non sono bastevolmente istruiti nella Musica per ben servire nelle Sacre Funzioni della Cappella, abbiamo risoluto, e col presente Decreto determiniamo, che i due Cantori Bassi Melchiorri, e Vellucci, ed il Contralto naturale Spadoni ; come altresì ogn’altro Cantore Pontificio, che dal Mastro di Cappella pro tempore, e dal Collegio sarà stimato bisognoso d’imparare maggiormente la Musica debba trovarsi, e sciegliere a suo arbitrio un Cantore Anziano della stessa Cappella, e capace, che l’istruisca, e gl’insegni, e quando mai non trovassero alcun Cantore, che volesse prendersi questa Cura e deputiamo in quel Caso per loro Maestro il Signor Ciampi, dal quale dovranno portarsi a studiare, ed a farsi maggiormente istruire nella Musica, corrispondendo al medesimo a conto loro quella mesata, ed emolumento, che sarà stimato conveniente, fintanto, che dal Collegio saranno creduti a sufficienza istruiti, e capaci a cantare sicuramente in Cappella ».
27 Pour l’identification des chanteurs et leur date d’admission au sein de la chapelle pontificale, voir Celani 1909, p. 95, 100, 101.
28 Francesco Ciampi a été croqué par P. L. Ghezzi en février 1735. Voir Rostirolla 2001, n. 171, p. 362 : « Signor Ciampi compositor di musica che è fatto l’opera del Metofonte [!] in Tordinona il dì 4 febbraro 1735, che alli 4 cominciò la sua opera [Aggiunta :] Alli 15 di marzo 1748 fu fatto maestro di cappella di San Giacomo de’Spagnoli ».
29 BAV, Cappella Sistina, vol. 671, fol. 63v : « Che se per qualche differenza si dovesse correre il bussolo sopra di quei Cantori, che il Collegio credesse bisognosi della Scuola, e che questi vincessero il partito di non doverci andare, in quel caso i Signori maestro di Cappella, e Puntatore si compiaceranno di darne subito a Noi avviso, acciò colla nostra Autorità possiamo prendere quelle misure, che credermo più opportune per farli andare alla sudetta Scuola : incaricando infine strettamente i Signori Maestro di Cappella, e Puntatore sudetti d’invigilare per l’esatta osservanza del presente Decreto con riportare ogni Mese dai rispettivi Maestri di quei Cantori Sopranumerarj, o altri, che dal Collegio saranno stati destinati d’andare alla Scuola, l’Attestato, o’ fede della frequenza, e dello Studio, e profitto, che averanno fatto, affinché quanto più sia possibile si rendino idonei, e Capaci al necessario, e buon servizio della Cappella Pontificia ».
30 BAV, Cappella Sistina, vol. 671, fol. 64r : « Ordiniamo inoltre col presente Decreto, che si debbano far le prove anticipate, allorché si crederanno necessarie, dai Cantori dei Componimenti, cioè Messe, Salmi, ed Antifone, che debbono cantarsi nelle funzioni della Cappella ad ogetto, che rieschino con quella perfezzione, che si richiede nel Culto Divino, del che incaricchiamo il maestro di Cappella, ed il Puntatore, che se seguiranno sbagli essenziali nel Cantare I sudetti Componimenti a cagione di non averli preventivamente provati, oltre le solite puntature ci riserviamo di penare ad arbitrio nostro il Mastro di Cappella pro tempore, nel caso, che avesse trascurato di farne le dovute prove anticipate ».
31 Ibid., fol. 65 : « Considerando noi esser necessario, che I Cantori Sopranumerarj della Cappella Pontificia si rendino abili, e capaci a ben servire nel Canto la stessa Cappella siamo venuti nella determinazione di fare il presente Decreto, col quale ordiniamo, e stabiliamo che in avvenire, quando per morte di qualche Cantori si faccia luogo, che i Sopranumerarj suddetti, o queli per anzianità dovrebbe spettare, entrino in Paga, non possino averla, e goderla, se prima non saranno stati esaminati, & approvati a Voti segreti, che siansi abilitati nel Canto, o possino lodevolemnte esercitare il loro Officio, dal Maestro di Cappella pro tempore, dal Decano, Camerlengo, Puntatore, e da’ due anziani di ciascheduna parte, e quando il Sopranumerario, al quale appartenesse di entrare in Paga, non fosse ritrovato idoneo, e capace, dichiariamo, & ordiniamo, che debba salire, e subentrare il più Anziano dopo quello, che restasse escluso, quando però questi sia ritrovato capace, e venga approvato nella maniera da noi sopra descritta, riservando sempre però a noi l’arbitrio di approvare la Risoluzione, che nell’esame avranno pigliata I suddetti Cantori da noi deputati ».
32 Ibid., fol. 65. : « Ordiniamo inoltre, e decretiamo, che ogni sei mesi da cominciare dal giorno della Data del presente, quei Sopranumerarj, a’quali sarà ordinate di studiare, e di abilitarsi, siano obbligati di produrre le Fedi dello Studio, che averanno fatto, e del Maestro, che averanno tenuo, come anche di sottoporsi all’Esame avanti ai Cantori da noi sopranominati, e deputati, i quali dovranno poi portarci le Fedi suddette, e riferici il risultato dell’Esame, che averanno fatto, mentre se in quei sei mesi conoscerà, che non abbiano studiato, & applicato al Canto, e non abbiano fatto profitto alcuno, gli saranno sospesi tutti gli Emolumenti incerti, che godono nel grado di Sopranumerarj, sino che in un nuovo Esame si sarà ritrovato, che abbino fatto il necessario profitto, e secondo l’informazione, che ci daranno i suddetti Cantori deputati, riserbandoci pero’sempre l’arbitrio di prendere anche altre misure, che stimaremo ate, e convenienti, affinchè i Sopranumerarj attendino ad istruirsi, e rendersi abili alservigio di Dio, e del Principe a seconda dell’obbligo, che gliene corre ».
33 Voir supra, chap. 7.
34 La carrière de ce compositeur est peu connue. Son nom figure néanmoins dans les journaux et les périodiques de l’époque. L’un des ses opéras a fait par exemple l’objet d’une critique positive dans la Gazetta universale du 18 février 1777. Voir Piperno 1992, p. 71.
35 ASVR, Capitolo di San Giovanni in Laterano, Urbis = Cappella Pia Lateran (1766-1866), Urbis 13, O LXXXIX, fol. 3, Urbis 1775, Memoria per il maestro Giuseppe Heiberger : « Non avendo altre ragioni il Sig. M[aest]ro Casali di condannare l’abilità di Giuseppe Heiberger contro tutti gli esperimenti dati nel Teatro, e nelle Chiese di Roma, che quella desunta dal non essersi presentato all’esame della Romana Congregazione ; è questi in obbligo di accennare per difesa i motivi, che l’hanno persuaso di cercare piuttosto l’accademicato filarmonico in Bologna, che questa qualificazione in Roma ».
36 Le mécontentement de G. B. Casali au sujet de l’admission d’Heiberger à l’Accademia filarmonica di Bologna a été déjà été évoqué dans un précédent chapitre. Voir supra, chap. 7.
37 « 1° La Congregazione Romana nacque dalli Maestri attualm[ente] viventi, che tentarono di farsi una Privativa. Dal che se ne ricava principalm[ente] ch’essi non sono stati esposti ad alcuno Esame, e perciò il Sig. Casali med[esim]o è privo di quel Requisito, che richiede negli altri ».
38 « 2° Questo Esame è stato poi sempre arbitrario, e parziale. Quindi si sono sempre veduti ammessi gli scolari di questi Capi di Congregazione con una grandissima facilità, e coloro che godevano qualche particolare Protezione. Il Concorso all’Organo di S. Giovanni in Laterano n’è una dimostrazione ; giacché fra dieci concorrenti essendovi quattro Maestri la maggior parte approvati dalla Congregazione di Roma, restarono tutto indietro, avendo sbagliato nella risposta della fuga, che è appunto dove il Maestro deve dar conto della sua capacità : e l’organo fu dato al Sig. Ballabene ».
39 La fugue commence par l’exposition d’un thème, appelé « sujet », suivi de la « réponse », qui est le sujet répété dans une autre tonalité, soit de la dominante, soit plus rarement de la sous dominante.
40 « 3° Questa parzialità per i suoi, è stata sempre sbilanciata con altrettanto rigore, e soverchieria cogli altri : che perciò il celebre Iomelli non volle mai presentarsi a questo esame ; ed il sig. Borroni è stato creato M[aest]ro di S. Pietro a pieni voti senza neppure fare menzione di questo ridicolo esame a cui non è stato soggetto mai alcuni de’ più famosi Maestri d’Italia ».
41 « 4° Il dispiacere che ha provato il sig. Casali di quel pubblico plauso riportato dell’Heiberger prova dagli effetti che nell’esaminarlo vi sarebbe concorsa ogni soverchieria, da cui era impossibile l’appellarsi ; come lo fù ad un’altro bravissimo Professore, che fu condannato violentem[ente] in quell’esperimento medesimo, che da tutte l’estere rinnomate Accademie era stato lodato, ed approvato ; dicendosi, che il giudizio Romano era privativo. Per queste forti ragioni non si deve avventurare la riputazione di un Maestro ; e si rende quasi inosservabile la legge di questa Romana Congregazione ».
42 Les étapes du conflit peuvent être reconstruites grâce à la correspondance de L. A. Sabbatini et Padre Martini. Les lettres écrites par Padre Martini ont été partiellement retranscrites dans Della Valle 1785, p. 120-134. Dans cet ouvrage, G. B. Casali est surnommé « il Signor N ». Les lettres des deux correspondants (lettres de Sabbatini et minutes de G. B. Martini) sont conservées dans le Carteggio de Padre Martini. Voir Bc, Carteggio di Padre G. B. Martini, Luigi Antonio Sabbatini à Padre Martini.
43 Bc, Carteggio di Padre G. B. Martini, L.117.108.005, Luigi Antonio Sabbatini à Padre Martini, 9 juin 1784 : « Scuserà se l’incomodo con la presente, perché sono molto agitato della riputazione, e perciò sono qui per sentire il suo oracolo sopra la qui acclusa composizione […]. Sicché […] se ò ragione che mi dia una risposta ostensibile per mostrare al Sig. Cardinale, e suo nipote, e se non ò ragione, la prego postarla, o raggirarla in qualche maniera (che a lei non manca, avendo il sì, ed il nò nelle sue mani come vuole adoprarlo) per sostenere il mio decoro, mentre il d[etto] sig. Casali in tutte le piazze di Roma va spergendo che la cosa và assai male, e vi è un sussurro per Roma, si nella professione, che fuori di essa che non v’è altro discorso, che sopra questo soggetto ».
44 Ibid. : « Io hò portato le dette composizioni al Sig. Carpani, Ballabene, ed altri, i quali tutti anno detto che vanno beniss[imo], ma il med[esim]o Casali questa è la seconda che fà alli miei scolari, mentre anche al Sig. Alimenti fece lo stesso, ma poi vi ramase cornuto ».
45 Della Valle 1785, p. 131 : « Le dico che stia di buon animo, e lasci la cura a me per diffenderla insieme a suoi scolari. Ho risoluto di scrivere al Signor N. Amichevolmente avvisandolo a ritirarsi dal suo strano impegno ».
46 Bc, Carteggio di Padre G. B. Martini, I.029.010, Luigi Antonio Sabbatini à Padre Martini, 26 juin 1784.
47 Bc, Carteggio di Padre G. B. Martini, I.029.005, Luigi Antonio Sabbatini à Padre Martini, 3 juillet 1784 : « Nella Professione, qui in Roma viene tenuto per un birbo, ed in tutte le cose mostra avere due faccie, e vuole cose a suo modo con una perfidia incredibile. Questa mattina ò saputo di certo che manda un foglio per Roma da tutti li maestri per farlo sottoscrivere ; cosa contenga il foglio non lo sò ; ma sò per altro, che in luogo ove era presente un religioso scolopio, e due cavaglieri a detto assolutam[ent]e che fino lui sarà vivo questi non saranno passati […]. Qui in Roma lo tengono per un’oracolo, e lui se n’è accorto, e per questo fà il gallo ; questa sarebbe l’occasione di mortificarlo e levarle un poco di quella tigna che à in testa, giacchè ne à ripiena Roma, che non d’altro si discorre, e a dirle la verità mi rincresce un poco ».
48 Bc, Carteggio di Padre G. B. Martini, L. 117-108, minute de la lettre de Padre Martini à Giovanni Battista Casali, non datée (1784) : « Sento, come vogliono obbligarmi alla difesa dei Postulanti, e che faccia vedere al pubblico il torto, che ella loro fà. Stimatissimo Sig. Casali, il far da Giudice, e da esaminatore è cosa per se onorifica, e decorosa, ma a bene pensarsi sono troppo le qualità che deve avere per onestamente Giudicare […] deve il giudice essere informato di tutte le opinioni, che si trovano nell’Arte, quandoché l’esaminando ha ius di tenere qualsisia sentenza, purchè universalmente non sia proibita e condannata e l’arte delle fughe è piena, e innumerevoli sono le maniere di rispondere. Ella di questa cosa hà perduta la causa, e ci perderà ancora il suo onore e decoro sicche la consiglio ritirarsi dell’impegno di non voler approvare gli esaminati, procurando di approvarli, e salvar il di lei decoro. Perché s’assicuri che ella farà una brutta comparsa spandendosi con le stampe per tutta l’Europa questa controversia ».
49 Bc, Carteggio di Padre G. B. Martini, L.117.108.005a, G. B. Casali à Padre Martini, 7 juillet 1784.
50 Ibid. : « Il giorno dopo vengono in casa mia questo due scolari con due altri abbati per testimoniare, e con somma temerità e roganza mi dicono [ci manda il Padre Maestro che lei ci renda le nostro compositioni che le vole mandar fuori à farle giudicare, e far vedere cosa capiscono i maestri di Roma], ci mancò poco che io gli dassi due calci ».
51 Ibid. : « Il Padre maestro imprudentemente và à trovare alcuni maestri e gli dice se andava bene questa loro risposta, e questi dissero che come risposta reale poteva passare, e lui fà un memoriale al Cardinale Protettore contro noi, e mette che era una nostra soverchieria mentre cinque e sei altri avevano detto che stavano bene ; il Cardinale questo Memoriale ne anche cel’hà mandato ; il Padre Maestro doveva ò scrivermi un viglietto, ò venir lui ».
52 Ibid. : « Se ne è fatto per Roma un ciarlo che non può figurarsi questo temerario continuamente dice che siamo una mucchia d’asini, ci sono corse scommesse, ed io mi vergognerei tenere certi scolari, sappia che uno di questi si chiama Antonio Ambrosini, e tutti lo chiamano il Conte Tinozza ».
53 La carrière de Benedetto Alimenti est peu connue. Le compositeur fut reçu à l’Accademia di Bologna en 1780. La composition de l’antienne et de la fugue du compositeur est conservée dans les archives de l’institution.
54 Bc, Carteggio di Padre G. B. Martini, L.117.108.005a, Giovanni Battista Casali à Padre Martini, 7 juillet 1784 : « Gli dirò per sua regola che un certo Alimenti scolaro del Padre Sabbatini si fece con compositione mandata patentare Accademico Filarmonico, fece il memoriale al Papa presente che stante questa Patente fosse dispenzato dall’esame in Roma, ebbe il rescritto rimesso al Cardinal Protettore, mi mandò questo memoriale in venerazione del quale lo feci scrivere in casa mia qualche cosa, e non lo passai, tanto che doppo otto o nove mesi bisognò che venisse alla solita esame alla quale passò ».
55 Ibid. : « Qui non si opera per passione, o per timore testor Deum come succedeva in persona mia in Bologna. Perché oltre le trè chiese mensuali, servo anche cinquanta altre chiese delle Principali, e per grazia di Dio dentro il Paese hò concetto tale che non hò neppure per ombra paura che queste figure mi levino le musiche ».
56 Ibid. : « Per mio consiglio da buon Amico lo risparmieri di fare questa fatica di fogli di difesa, perché lei ne resterà di sotto, perché qui sarà una risposta di sei, ò sette righe, se lei farà stamparla, anche noi, se si spargerà per l’Europa, io hò corrispondenze alla Vana in America, a Lima nel Perù, in Siviglia, in tutta la Fiandra per la Germania, Torino, Venezia. E per tutto hanno carte mie ; lei mostrerà il suo sapere, mà in questo caso lei non gioverà agl’esaminati perché ne nascerà un decreto di Congregazione generale che questi non possino mai più presentarsi all’esame. Il P[adr]e Sabbatini già finche seguiterà stare in Roma manderà continuamente bocconcini amari, la chiavetta la sò altro che io, mà si tenga à mente queste parole, il tempo gli farà vedere se gli dico la verità ».
57 La lettre adressée à G. B. Casali a été transcrite par Padre Martini dans une lettre envoyée à L. A. Sabbatini. Bc, Carteggio di Padre G. B. Martini, I.029.005a, Padre Martini à Luigi Antonio Sabbatini, 14 juillet 1784 : « Avrei molto piacere, e lo desidero efficacemente, che questa controversia terminasse amichevolmente, e ritrovare un mediatore capace e versato nella materia di cui si tratta ».
58 Bc, Carteggio di Padre G. B. Martini, I.029.005b, Padre Martini à Luigi Antonio Sabbatini, 10 juillet 1784 : « Sento dalla sua lei 3 luglio, che il Sig. Casali và tragiversando perché in questa controversia vorebbe pur trionfare, e riuscirvi con onore ; ma per quanto sento egli sempre più s’imbroglia e si disonora […] In ultimo farà una cattiva comparsa come uomo di poca buona legge, e incapace di far il Giudice. Io ho preparata tutta la materia per confonderlo, e far conoscere al pubblico la sua mancanza di cognizione per fare il giudice ».
59 Ibid. : « I. Io lo citarei dichiarando nullo il suo giudicio, perche non ha in se quelle qualità, che richiedarsi in un giudice, oltre di che egli è doloso, e di mala fede. II. Io darei un Memoriale al Papa esponendole il torto che il Sig. Casali a questi due Giovani, col non volerli approvare senza cagione, e per solo mallanimo, e se, mai stimasse opportuno che io facessi un attestato in favore dei due esaminati, il quale si mettesse sotto gli occhi del Papa, sono pronto. III. Citarei il Casali, obbligandolo a dirla ragione perché non vuole approvare i due postulanti ».
60 Selon Remo Giazotto, le caractère despotique de G. B. Casali fut également décrit en 1830 par Luigi Rossi, élu comme secrétaire de l’Accademia di Santa Cecilia. Voir Giazotto 1970, vol. 2, p. 39 : « Non fece mai riunire la Congregazione né in sessione generali, né in particolari, lo che durò fino alla di lui morte, accaduta l’anno 1792 ».
61 Bc, Carteggio di Padre G. B. Martini, I.029.008, Luigi Antonio Sabbatini à Padre Martini, 10 juillet 1784 : « Ora alle parole del Casali anno tutti bassato la testa colla speranza di poter avere la coadjutoria delle sue chiese, oppure, perché non sapeano rispondere alle ragioni del Casali ; il quale si è costituito da se qui in Roma un Regno sopra la musica, e tutti da lui dipendono, di modo che vi è stato qualcuno che in questa circostanza, e girato al segno di dire, cosa vuol dire il Martini ? Che vuol dare il giudizio contro alle ragioni di Casali ? Quandoche il Martini stesso prema di battere la sua musica qui in Roma andiede prima da Casali. Ora vede in che stima la tengono, e che monarca è questo, ma non per altro tralasciono di darle del birbo nelle occasioni ».
62 Della Valle 1785, p. 134. Rappelons que G. B. Casali est appelé Signor N : « Stia sicurissimo P. Sabbatini, che io non darò mai addietro […] non manchi di appellarsi legalmente dal giudizio del Signor N […]. Il Palestrina non solamente in Roma, ma per tutta l’Europa è sempre stato riconosciuto per il Maestro massimo di tutti i compositori, e che per quanto mi è noto non è mai stato criticato da alcuno. Il Signor N. che fa da Giudice supremo in Roma non è forse obbligato a conoscere il carattere, e lo stile del Palestrina ? Questo è troppo ! ».
63 Bc, Carteggio di Padre G. B. Martini, I.029.019, Luigi Antonio Sabbatini à Padre Martini, 21 juillet 1784 : « Io frattanto avendo preveduto che non vuole questo spedire le patenti, ed in fatti questa mattina appunto sono stato assicurato, che si è espresso di non volerle dare, mi ero già assicurato del Sig. Cardinal Albani della licenza per farlo citare a darne le ragioni, ed il Sig. Cardinale mi ringraziò dell’attenzione, e rispetto per quest’atto, e mi disse che facevo bene, mentre l’è un birbo, che anche a lui gle ne à fatte molte, ma essendo vecchio gli le à passate. Sichè ora stò attendendo la sua conferma, e subito lo fò citare, mentre dei tre punti che lei mi significò, questo mi pare lo più espediente, perché andando per la parte del Papa, possono allora spacciare che sia per grazia, e non per giustizia ».
64 Bc, Carteggio di Padre G. B. Martini, I.029.011, Luigi Antonio Sabbatini à Padre Martini, 24 juillet 1784.
65 Bc, Carteggio di Padre G. B. Martini, I.029.011a, Padre Martini à Luigi Antonio Sabbatini, 31 juillet 1784 : « Sono e sarò sempre costante nell’opinione, che si debba citare il Sig. Casali, protestando di nullita del suo giudizio, e di progare l’E[ccellentissi]mo Sig. Card[inale] Albani a determinare un terzo, che esaminerei le due composizioni, e faccia costare che a torto, marcio il sig. Casali non vuole approvare le composizioni dei due di lei discipoli. Sono poi restato fuor di modo maravigliato, e sopreso nel vedere le composizioni dallo stesso approvate : Povera Roma, in che stato deplorabile ella si è ridotta ! non credevo mai un eccesso di questa fatta. Quì annesso le trasmetto un attestato di mia approvazione delle suddette composizioni de’ suoi scolari, affinchè se ella stima bene, lo presenti sotto gli occhi di sua E[ccellen]za accioché egli veda la stanchezza del Sig. Casali. Passione, malignità, e ignoranza sono la base sopra della quale è fondata la sua condotta ».
66 Bc, Carteggio di Padre G. B. Martini, I.029.006, Luigi Antonio Sabbatini à Stanislao Mattei, 25 décembre 1784 : « Nell’ultima mia gli raccomandai la controversia che passa fra me, ed il Sig. Casali, onde la prego di quanto le scrissi circa cotesti Sig. Accademici di Bologna, e perciò li preghe a mio nome acchioché mi faccino alle due composizioni dei miei scolari l’approvazione che meritano, ed acciò convenghino con quella del nostro Padre Maestro Martini gle ne trasmesso la copia […]. Padre Mattei, mio carissimo questa cosa molto mi preme, non tanto per gli giovani, quanto per la mia riputazione ; e quella della nostra scuola, e di questo sentimento dovrebbero esser ancora cotesti signori Accademici ».
67 Sur le mythe de Palestrina qui naquit au XVIIe siècle, voir Bianconi 1982, p. 115-117.
68 Voir supra, chap. 2.
69 ANSC-AS, Atti delle congregazioni, Registro 4, Assemblée du 14 avril 1747 : « Riconoscendosi ogni giorno più sensibile il grave pregiudizio che apporta, non solo a maestri di cappella, ma altresi a tutta l’intera professione la cattiva maniera insopportabile d’alcuni maestri di cappella, quali non contenti di esercitare la loro professione nelle loro chiese, cercano introdursi nelle altre, con impegni, e raccomandazioni, e più di sovvente con offerirsi pronti a dare la musica per onorario molto minore del convenuto col primo, dal che poi ne nasce, che non potendo soccombere alle spese che si ricercano, non sodisfano, e non corrispondono alli signori virtuosi si cantori che istromentisti il loro dovere ».
70 Ibid. : « Poiche ogni giorno diminuendosi li prezzo alle musiche, resta poi impossibile a professori poter più vivere ».
71 Ibid. : « Un abuso che tende a distruggere tutta l’intera professione ».
72 Ibid. : « Primo : Che per l’avvenire non sia lecito a qualunque maestro di cappella, sotto quale protesto, causa o colore di far musiche, e molto meno di procurare impegni, e raccomandazioni per farle, in quelle chiese, o siano di regolari o confraternite, o di qualunque altro luogo pio, nelle quali si sia il maestro di cappella fisso, patentato, sotto pena di restar privo per un anno di esercitare più la professione, e ricadendo possa la congregazione segreta stendersi a penarlo per maggior tempo, o d’ignorar la presente risoluzione ; toltone il solo caso nel quale un devote o un altra persona pia, che non fosse de ceto di quella professione, o confraternita, o luogo pio facesse fare à sue spese la musica, nel quale caso celebrandosi la funzione a spese della chiesa e suoi ministri, possa ogni Maestro di cappella patentato farla, a riservassero che la tal musica fosse già data, o fosse darsi a qualcuno dei maestri di cappella patentati, non possa un altro offrirsi all’altro ».
73 Ibid. : « Ciò per sostenere il decoro della professione, e perché possa il professore vivere decentemente ».
74 Giazotto 1970, vol. 2, p. 35-38 ; Antolini 2011a, p. 336-337.
75 ANSC-AS, Atti delle congregazioni, Registro 5, Assemblée du 10 septembre 1767 : « Che per l’avvenire nessun Maestro di cappella potesse togliere all’altro le musiche con modi illeciti, e molto meno offerirsi a far le musiche a minor prezzo del consueto di quella tal musica, ne far maneggi per togliere alli med[esi]mi quelle musiche, che sono stati soliti da fare, particolaremente nelle chiese fisse che hanno ; ed in caso di contravenzione debba il Maestro di cappella che a mancato esser condannato alla sospenzione della patente per un anno ed altre pene ad arbitrio ».
76 ANSC-AS, Atti delle congregazioni, Registro 6, séance du 1er septembre 1768 : « Fu in ultimo parlato circa della difficoltà del Decreto fatto dà sua Ecc[ellen]za Monsig[no]re Ill[ustrissi]mo R[everendissi]mo Primicerio, mà senza alcuna risoluzione ».
77 ANSC-AS, Atti delle congregazioni, Registro 5, Assemblée du 1er décembre 1768 : « Fu parlato di far la festa di Santa Cecilia ma non potè determinarsi atteso le scissure nate tra i musici e maestri di cappella a cagione del decreto fatto dall’Ecc[ellentissi]mo […] Monsignore Chigi della Congregatione Particolare tenuta il di 10 settembre 1767 ».
78 ANSC-AS, Atti delle congregazioni, Registro 5, Assemblée du 18 juillet 1770 : « Una novità pregiudizievole alla libertà nella professione della Musica ed in conseguenza sogetta a qualche incoveniente […] noi sentite le parti ed esaminato maturamente l’affare abbiamo stimato bene anche per evitare novi inconvenienti e litigi di sospenderlo per ora riserbandoci la facoltà di confermarlo e di moderalo secondo che ci sembrerà più espediente ed opportuno attese le circostanze le conseguenze e condotta delli stessi professori ».
79 ANSC-AS, Atti congregazioni, Registre 5, Assemblée du 18 juillet 1770 : « Nello tempo stesso esortiamo tutti li professori all’osservanza delli antichi statuti senza abbusarsi della libertà in pregiudizio dell’equità, della buona fede e della fraterna carità che sono fondamenti di ogni buon regolata società ».
80 Memoriale transcrit dans le compte rendu d’assemblée du 26 janvier 1776. Voir ANSC-AS, Atti delle congregazioni, Registro 5 : « B[eatissi]mo Padre. Li maestri di cappella più anziani di Roma, […] le rappresentano d’esser di continuo molestati, e pregiudicati dalli insolenza de i novelli maestri, ed in specie da quelli, i quali non solo con estorti rescritti ottennero la patente di grazia, col pretesto del rigorismo negl’Esaminatori, quasi che non si fossero potuti appellare tanto in Roma, che fuori, detta qualunque loro ingiusto decreto ; ma di più cercano ben spesso di scavalcare gli Or[ator]i, con esibirsi di fare le musiche a minor prezzo nelle chiese, delle quali dà moltissimi anni sono gl’Or[ator]i in possesso, e sono già fissi, ad onta ancora d’un decreto fatto dalla Congregazione de Musici nel 1747 & per riparare a simili inconvenienti, in virtù delle confermate costituzioni come ne resta appieno informato l’E[ccellentissi]mo Protettore supplicano per tanto l’innata clemenza, e pari giustizia della santità vostra, affinché voglia degnarsi d’inibire simili sconcerti pregiudiziali non solo all’estimazione degl’or[ator]i, ma pure anche all’interesse di tutti li professori, con inculcare l’osservanza del sopracitato decreto. Che della grazia ».
81 ANSC-AS, Atti delle congregazioni, Registro 5, Assemblée du 10 septembre 1775 : « Al cardinale Protetttore con tutte le facoltà di dare agl’esposti inconvenienti opportuno, ed efficace riparo ».
82 ANSC-AS, Atti congregazioni, Registro 5, Assemblée du 10 septembre 1775 : « Vedendosi alla giornata che nascono disordini, e sconcerti prodotti, e dalla molteplicità de Maestri di cappella, e dalla inconsiderata avidità, che anno li maestri giovani di levar le musiche alli più anziani, o con maneggi importuni, o con esibirsi a prezzi minori, e tutto questo contro le costituzioni della Congregazione de Musici, e segnatamente contro il decreto dell’E[ccellentissi]mo, e R[everendissi]mo Signore Cardinale Orsini stato protettore di essa Cong[regazio]ne sotto il di 14 ap[ri]le 1747 […] Espressamente comanda, che il detto decreto del 14 aprile 1747 sia in pieno vigore, ed osservanza, al quale effetto lo conferma, e lo rattifica pienamente in tutte le sue parti ».
83 Voir notamment les comptes rendus suivants : 15 avril 1779, 26 octobre 1792, 8 février 1793, 13 mars 1793, 16 mars 1793, 14 juin 1793, 7 septembre 1793. Voir ANSC-AS, Atti delle congregazioni, Registro 6.
84 Statuts promulgués en 1794. Chap. xvi : « Che li signori Maestri non possino levare le Musiche alli Professori già soliti servire nelle Chiese, quando non vi sia alcun demerito, ed in caso d’impotenza, o per essere abbandonati dall’età avanzata, allora sia obbligato il Maestro ricevere altro professore a suo arbitrio in cambio, con dargli la metà del denaro, e l’altra metà al Proprietario, il quale debba sempre riconoscersi, ed in caso, che il Maestro gli venga minorata la Musica, allora il Maestro volendo privarsi di qualche Professore, dovrà levare li più Novizj, o meno necessarj, finchè la musica ritornerà al suo primiero prezzo, nel qual caso tutte le cose debbano ritornare, come erano antecentemente in detta musica, e tali professori debbano essere reintegrati dal sudetto Maestro presentandoglisi l’occasione di qualche altra musica nuova, cioè Triduo, o pure Titolo, o Sagrestane, ed in mancanza sia penato ad arbitrio della Congregazione Segreta ».
85 BAV, Cappella Sistina, Diari, vol. 178 (1761).
86 BAV, Cappella Sistina, Capella pontificia, vol. 669.
87 BAV, Cappella Sistina, Romana Iuridizione, vol. 614.
88 BAV, Cappella Sistina, Albani Alessandro, vol. 671.
89 Bc, Catalogo Gaspari, fol. 99.
90 ASR, Camerale II, Arti e mestieri, Musicanti, b. 25.
91 Le chanteur ténor Giulio Mastrangeli, membre de la chapelle pontificale depuis 1720, décéda le 5 avril 1761. Voir Celani 1909, p. 86.
92 Andrea Spadoni, castrat, entra dans la chapelle comme surnuméraire le 18 janvier 1747. Voir Celani 1909, p. 100.
93 Domenico Melchiorri, chanteur basse, fut admis le 24 mars 1748 dans la chapelle pontificale. Voir Celani 1909, p. 101-102.
94 BAV, Cappella Sistina, Diari, vol. 178 (1761), fol. 51-52 : « Essendo questa condotta dell’E[ccellentiss]mo Protettore insolita, ed arbitraria, fù caggione di qualche rammarico alli due mensionati sopranumeri, gli caggionò afflizione maggiore perché non aspettavano questa novità in persona di essi, stante il merito, e la diligenza, colla quale avevano adempito a propri doveri del servizio della Cappella pontifica. Aumentava il loro dolore la voce, che prima si era sparsa, che ad un cantante forastiere, e non del grembo, sarebbesi conferita la vacante porzione, del che si persuadevano ; stante l’operato di sua E[ccellentissi]ma in persona loro. Giunta questa notiza a tutti gl’altri compagni, si possero in costernazione, e la città in scandolo per l’ingiustizia pertanto credei, che fosse, mio dovere d’interpormi appresso l’E[ccellentissi]ma Sua anche ex. officio, acciochè spedisce il biglietto, secondo il solito, accioché si leggesse presente il cadavere ; ma fummi riposto, che il sig. Cardinale non avea prescia ».
95 Le prétendant à ce poste était le chanteur Ferdinando Mazzanti. Ibid., fol. 59.
96 BAV, Cappella Sistina, Diari, vol. 178 (1761), fol. 55.
97 BAV, Cappella Sistina, Diari, vol. 178 (1761), fol. 61-62 : « Essendo noi stati obligati di ammettere nella Cappella Pontificia molti sopranumeri per esser ridotti a pochi i Cantori inservienti per esservi molti giubilati ; et avvendoci pur troppo fatta conoscere l’esperienza, che i sud[ett]i sopranumeri doppo assicurato il posto non studiano più, ne fanno alcun profitto, e che il servizio della Cappella non si fà più, con il dovuto decoro, quindi è, che inerendo, e confermando altro nostro consimil Decreto fatto, che si amette, ordiniamo, e decretiamo, che vacando una paga debba farsi prima di conferirla un rigoroso esame in nostra presenza dell’abilità, e dello studio, e profitto, che averanno fatto i sopranumerari, per poscia darsi da noi la paga, che sarà vacata a quello de sudetti sopranumeri, che sarà da noi giudicato più abile, e che sarà più utile al buon servizio della Cappella. Ordiniamo poi, che il presente nostro Decreto sia publicamente letto nella prima adunanza de servizi Pontificii, e registrato nell’Archivio della Cappella, acciò sia in avvenire esattamente osservato ».
98 BAV, Cappella Sistina, vol. 671, fol. 97v-98r : « Ma siccome vi sono alcuni Compagni, li quali invidiando la nostra felicità, e nemici del publico bene del nostro Collegio vanno seminando discorde, e befeggiandosi del nostro attacamento, ed intenzione all’osservanza delle costituzioni ; Perciò, Signori miei, dico a tutti in commune, et in particolare, che essendo intenzione, e zelo di N[ost]ro Signore, come Pastore, e Padre, che da tutti gl’Ecclesiastici si conduca una vita esemplare, e morigerata, molto più vuole, e desidera, che da noi si viva con esempio, et ecclesiastica disciplina essendo suoi famigliari. […] Per conseguire questa unione, e concordia, è necessario che rinovando il giuramento, che ciascuno ha fatto nella sua ammisione in Collegio, ci protestiamo tanto in commune, che in particolare, di voler difendere in qualunque tempo, occasione, contingenza, l’osservanza delle mensionate Costituzioni, e Bolle Pontificie, ed insieme ancora tutti li diritti, raggioni, jussi, e privileggi concessi da sommi Pontefici a favore del n[ost]ro Collegio ».
99 BAV, Cappella Sistina, vol. 614, fol. 74r (n° 5. Dichiarazione, e protesta de’ Cappellani Cantori fatta ddi comun consenso di accettare, e ubidire il Decreto di Monsignor Maggiordomo) : « Dichiariamo di voler difendere, sostenere, e promovere li Privilegj, Dritti, Jussi, e ragioni del Collegio suddetto in qualunque occasione, contingenze, e liti, particolarmente nella presente Causa a tenore della commune determinazione, e protesta fatta da tutto il notro Collegio in corpo a di 24 del mese di maggio del presente anno alla quale determinazione, e protesta sonosi opposti, e contro ogni buona fede, si propongono alcuni de’nostro Compagni, dichiarandosi nemici del publico bene, e della libertà, e privilegi del nostro Collegio ».
100 Celani 1909, p. 101-102.
101 Santarelli 1761.
102 Ibid., fol. 8-9 : « La provvisione accresciuta, tanto a i Cantori Numerarj, che ai Sopranumerarj, farebbe si, che non avrebbero più gl’uni, e gl’altri necessità di andar tutto il giorno girandolando, dirò cosi, per le musiche della città, contro lo spirito delle nostre sante, ed antiche Costituzioni, e segnatamente contro i Capitoli XIV. e XVI. delle medesime, e rovinarsi per tal via la voce, come vediamo pur troppo farsi da alcuni, col cantare di continuo fuori della Cappella una musica fratta, e diminuita, e diametralmente opposta a quello stile maestoso, e devoto, che noi professiamo ex officio ».
103 Ibid., fol. 9 : « Una delle ventuna paghe, che si dasse a un valente Maestro, il quale fosse insieme Maestro, e Cantore, giusta la prescrizzione della sopra riferita Bolla §.II. conferirebbe mirabilmente a rimettere in piedi le ormai affatto perdute Scuole del nostro canto, qual perdità è pur troppo una delle primarie cagioni della decadenza della Pontificia Cappella ; e conferibbe moltissimo anche a sottrarre dall’ultimo imminente naufragio quella pietra preziosa, e rara chiamata Stile¸ tanto, e con tanta raggione raccomandato dal Cap. XLII ».
104 Ibid., fol. 9 : « È vero, che vi sarebbe un’altro piano da intraprendersi assai più dolce per gli odierni Cantori, e sarebbe per avventura quello d’impetrare, che la Reverenda Camera Apostolica condiscendesse a creare intanto sei, o sette paghe di più, senza pregiudizio delle molte altre da crearsi in appresso, per cosi formare lo stipendio a que’ Sogetti di cui la Cappella sarebbe per aver di bisogno per le sue reclute ; mà è pur troppo altresi vero, che succedendo di non potersi ciò ottenere, ne volendosi andare alla Bolla di Sisto ; altro partito non rimarrà pigliarsi, e non se quello, che il Reverendo Collegio de Musici si unisca per la commune riputazione, a supplicare l’Eminentissimo Protettore pro tempore a volere aprire il Concorso in occasione della vacanza delle paghe, per distribuire le medesime a que’ Professori, che di fuori verreberro ad ajutarci ; il qual provvedimento se fosse, o non più profittevole alla Cappella, ed al Collegio de Musici, ei quello sia l’andare alla Bolla di Sisto, ed all’osservanza delle noste antiche Costituzioni, lo sottometto al rettissimo Giudizio dell’Eminenza Vostra, e de’ medesimi miei riveritissimi Signori Compagni ».
105 Bc, Carteggio di Padre G. B. Martini, I.015.049, Alessandro Albani à Padre Martini, 29 juillet 1761 : « Ho trovata la fede amplissima, che unitamente à cotest’Accademia filarmonica si è compiaciuta di fare approvando i Decreti da me fatti per il buon servizio, e regolamento di questa cappella Pontificia, i quali prenderanno certamente maggior’ vigori dalla testimonianza d’uomini cosi dotti, e periti nell’arte della Musica e ringraziandola cordialmente ».
106 BAV, Cappella Sistina, vol. 614, fol. 28v (Num[ero] 9. Parere, e attestato dell’Accademia de’Filarmonici sopra la necessità, & utilità de’soprascritti Decreti) : « Noi sottoscritti definitori perpetui di questa nostra Accademia de’Filarmonici, a’quali spetta per uffizio proprio la finizione delle controversie, che ad essa propongonsi, e specialmente ancora dalla medesima deputati per le cose infrascritte avendo maturamente considerati i due Decreti, che sin dall’anno 1748 gli 11 agosto e il 18 decembre furono emanati […] Attestiamo […] cotesti due Decreti degnissimi di tutta l’approvazione, e di somma lode, perchè giusti, e vantaggiosi, e necessarj alla conservazione, & al decoro della medesima Cappella Pontificia ; E perché ancora coerenti, & uniformi alla mente, & alla istituzione del Santo Pontefice Gregorio Magno, che a riferire dei Giovanni Diacono […] Che se i suddetti due Decreti fossero stati finora con esattezza osservati, non v’ha dubbio, che la Cappella Pontificia conservato avrebbe quel decoro e quella stima, in cui da tutto il Mondo è stata sempre tenuta e commendata, come la Maestra, e la sorgente, da cui è reicata la norma, e la vera direzzione dell’Ecclesiastico Canto fermo, e figurato, né si sarebbe in essa Cappella perduto affatto, come pur troppo accaduto da pochi anni in quà il Contrapunto alla mente fatto sopra il Canto fermo, uno de’pregi più singolari, e decorosi, che ella avesse. Per le quali ragioni non solo approviamo, ma comandiamo i due lodati Decreti come utili, e necessari al mantenimento del decoro della Cappella Pontificia. In fede di che abbiamo sottoscritta di propria mano la presente ».
107 Bullarium Magnum romanum summorum Pontificum Clementis XIII, Clementis XIV, Pii VI, Pii VII, Leonis XII et Pii VIII constitutiones […], Tomus Secundus, Romae, Typographiae Reverendae Camerae Apostolicae, 1837, p. 309. Les examens étaient réglés dans les paragraphes 14 et 15.
108 « La giustificazione di Sua Eminenza si fà nel num[ero] 16, del Sommario stampato, in cui si è fatto vedere, che oggi all’armonia della Cappella non basta quel numero di voci, che prima si credeva, & era sufficiente ; che la dura necessità di vedere tutti ad un tratto giubilati venti, e più musici ammessi in Cappella Pontifizia dal fù Cardinale Ottoboni, di piangere rapiti dall’inesorabile morte nel fiore degl’anni due ottimi Soprani Nicolini, e Fedeli, e deplorare la partenza dalla nostra Cappella Pontifizia a quella Reggia di Portogallo sette bravi soggetti scelti prima dal Signor Cardinal Protettore ; questa dura necessità è stata che ha fatto deviare in qualche maniera dall’antiche regole a solo fine pero di provedere al servizio della Cappella Pontifizia della maniera migliore, che si è potuto. E se si parla dell’abilita delli Musici ammessi, di questi se n’è fatta la scelta colla approvazione de Musici anziani del Collegio col previo esame, e colla legge imposta di frequentar la Scuola del Canto, e di subire un nuovo esame in tempo della paga vacante ».
109 Celani 1909, p. 101 et 105.
110 Sur l’émigration des chanteurs au Portugal, voir supra, chap. 6.
111 ASR, Camerale II, arti e maestieri, vol. 25, Nella controversia nata nel Collegio de’ Musici Pontifizj, Rimessa da nostro Signore All’Eminentissimi Signori Cardinali Merlini, Castelli, e Marc’Antonio Colonna, Ad referendum voto, Nella stamperia della Reverenda Camera Apostolica, in Roma, 1761, § 23 : « Che se poi, ciò non ostante, si vedono alcuni abusi nella Cappella Pontificia, la colpa pure deve ancora attribuirsi alla moltiplicità di Teatri, e de Prencipi, che di quà, e di là ne Monti con strabocchevoli stipendi invitano li Musici di Roma, e dell’Italia, li quali percio non curano la Cappella Pontificia ».
112 Burney 1992, p. 178.
113 Labrot 2010, p. 354 : « La compétition encouragea et hâta largement la professionnalisation ».
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