De l’étude des élites au quotidien municipal
p. 231-236
Résumés
Cet article propose une mise en perspective historiographique du programme « EMIRE » (« Élites municipales italiennes de la République et de l’Empire »), que M. Cébeillac Gervasoni a dirigé depuis les années 1980 et jusqu’au début des années 2010. Il concerne avant tout les trois volumes issus de ce programme au cours des années 2000 et 2010 (Le Quotidien municipal dans l’Occident romain, 2008 ; La Praxis municipale dans l’Occident romain, 2010 ; Le Quotidien municipal II, 2012).
This article offers a historiographical perspective on the “EMIRE” program (“Élites municipales italiennes de la République et de l’Empire »), which M. Cébeillac Gervasoni directed from the 1980s to the early 2010. It concerns above all the three volumes resulting from this program in the years 2000 and 2010 (Le Quotidien municipal dans l’Occident romain, 2008; La Praxis municipale dans l’Occident romain, 2010; Le Quotidien municipal II, 2012).
Entrées d’index
Mots-clés : Cité, épigraphie, politique municipale, Italie, provinces occidentales, droit public, institutions.
Keywords : City, epigraphy, municipal politics, Italy, western provinces, public law, institutions
Texte intégral
1Au cours des trente années qui se sont écoulées entre 1980 et 2010, j’ai été plus d’une fois impliqué dans les rencontres organisées par Mireille Cébeillac-Gervasoni, avec laquelle j’ai entretenu, depuis le début des années 1970, des relations d’amitié. Souvent, j’ai été admiratif en constatant son efficacité, son opiniâtreté et son fort rayonnement en Italie. Un jour, je lui ai dit en plaisantant qu’elle devrait poser sa candidature à un prix de la francophonie, parce que ses thèmes de recherche sont parmi les rares sur lesquels la bibliographie en langue française est dominante. Je lui ai dit cela il y a quelques années, mais très récemment, quand je me suis replongé dans ses publications pour préparer cette contribution, j’ai été de nouveau très impressionné. C’est pourquoi j’ai décidé de m’intéresser plus particulièrement au programme « EMIRE » (« Élites municipales de l’Italie de la République à l’Empire », également appelé « Élites municipales italiennes de la République et de l’Empire »), qu’elle a dirigé sur les cités d’Italie, puis aussi sur toutes les cités de la partie occidentale du monde romain, à partir des années 1980 et jusqu’au début des années 2010. Certes, son parcours scientifique ne s’est pas limité à ce programme EMIRE1, mais celui-ci a joué, dans ses recherches et ses publications, un rôle particulièrement important : c’est la raison pour laquelle j’ai décidé de revenir sur son histoire.
2Ce programme a connu deux grandes phases. La première a duré en gros deux décennies, du début des années 1980 au tout début du siècle actuel. La seconde a commencé en 2002, et elle a en gros duré dix ans, jusqu’au début des années 2010. La contribution de G. Bandelli s’est intéressée surtout à la première phase et je ne ferai donc à son propos que deux ou trois remarques, sur des aspects de la démarche de M. Cébeillac-Gervasoni qui m’ont particulièrement frappé et intéressé. Puis, dans une autre partie, je traiterai de la seconde phase du programme, en montrant en quoi c’est une continuation de la première, et en quoi elle a représenté une réelle nouveauté
3La première des originalités de sa démarche, c’est que la plus grande partie de ses publications sont issues de colloques qu’elle a dirigés. L’habitude de réunir fréquemment, ou assez fréquemment, des colloques et tables rondes, puis de les publier, soit en livres, soit dans des tomes de revues, s’est répandue à partir des années 1970 ; elle n’existait guère auparavant dans les sciences humaines. M. Cébeillac-Gervasoni a été une des premières, ou peut-être même la première, dans nos disciplines, à le faire périodiquement et à consacrer une bonne partie de son activité à de telles publications groupées.
4La série de colloques et de tables rondes qu’elle a organisés à partir de 1981 était fondée sur quelques orientations auxquelles elle accordait beaucoup d’importance. De certaines de ces orientations, elle ne s’est jamais départie. Au contraire, sur d’autres, elle a nettement évolué au cours des années 2000. La première de ces orientations, c’est qu’elle voulait se consacrer, non pas au centre, à Rome, mais aux périphéries, ou du moins à un des aspects de ces périphéries, à savoir à la vie municipale. Et cette vie municipale, elle voulait, de manière privilégiée et presque exclusive, l’étudier en Italie et dans les provinces occidentales, parce que les recherches sur les cités de Méditerranée orientale lui paraissaient plus avancées. Elle ne souhaitait pas établir une opposition trop forte entre Orient et Occident ; mais elle pensait que les matrices des cités des deux moitiés de l’Empire n’étaient pas les mêmes, et qu’il était souhaitable d’approfondir notre connaissance de celles d’Occident2.
5Une autre originalité de sa démarche, au cours des années 1980 et 1990, c’est qu’elle nourrissait de la méfiance à l’égard du droit et du domaine juridique. Elle écrivait que ce sujet des magistratures municipales et de la vie politique des cités suscitait sans cesse des études à caractère juridique dont les résultats étaient ensuite remis en cause par de nouvelles recherches3. À ces débats qu’elle jugeait trop abstraits, elle opposait le quotidien, le concret, les hommes qui, de leur vivant, ont exercé les magistratures en question.
6D’où le primat qu’elle accordait à la prosopographie et à l’épigraphie. La prosopographie, sur laquelle le premier chapitre du livre issu de sa thèse contient de belles analyses4, permettait à son avis de mieux comprendre la profonde victoire de Rome, – victoire à laquelle elle a consacré une très belle page, au début de son livre de 1998. « La prodigieuse potentialité d’acculturation » dont a fait preuve Rome « lui a permis d’imposer certains modèles institutionnels, mais surtout un style de vie et de pensée qui ne put s’enraciner que grâce à une action sur les structures mentales. C’est sur le Latium et la Campanie que Rome a testé, avec succès, sa force de pénétration »5.
7Dans ce qu’elle a écrit de la prosopographie, on reconnaît l’influence du remarquable article que Cl. Nicolet a publié en 1970 sur les rapports entre prosopographie et histoire sociale6, – influence qu’elle a elle-même soulignée dans l’article d’hommage qu’elle a écrit sur son maître7. Dans une très longue note, Cl. Nicolet explique comment, dans les historiographies allemande et britannique, la prosopographie avait joué un rôle important pour une meilleure compréhension de la politique romaine8. En France, il est l’un des premiers, ou peut-être même le premier, à insister sur l’intérêt de la prosopographie en histoire romaine, mais il s’y intéresse en matière d’histoire sociale. En effet, à l’époque républicaine, les chevaliers n’avaient pas officiellement de rôle politique actif à jouer, ils n’occupaient ni magistratures, ni hautes fonctions administratives, mais ils formaient collectivement un groupe social. Et ce groupe social était d’autant plus intéressant à étudier qu’il s’agissait d’un ordre, et qu’il s’agissait du deuxième ordre de l’État. Or, Cl. Nicolet n’a cessé de souligner l’importance des ordres dans la société romaine, et il insistait tout particulièrement là-dessus dans les années 1960 et 1970. Dans son article de 1970, il écrivait que :
La société presque tout entière, du moins dans l’image normative qu’elle se donne d’elle-même, se modèle principalement sur la hiérarchie des ordines : si nous définissons, comme j’aurais tendance à le faire (…), la société romaine comme une société d'ordres (ou du moins une société dont la structuration dominante est celle des ordres), nous voyons que dès lors la prosopographie va devenir significative, non plus seulement pour évaluer, comme l’avait fait Fr. Münzer, les fluctuations des alliances politiques, mais, dans le moyen terme ou le long terme, la composition interne d’un ordre, ou d'un conseil comme le Sénat9.
8Certes, la notion d’ordre avait beaucoup moins d’importance pour M. Cébeillac-Gervasoni que pour son maître. Elle emploie le mot beaucoup moins souvent que lui. D’autre part, elle accorde aussi moins d’importance à « l’armature juridique » des ordres que son maître10. Mais, comme lui, elle considérait à juste titre que la prosopographie était un outil de l’histoire sociale, et pas seulement de l’histoire politique. Et, pour l’un comme pour l’autre, l’ultime objectif, c’est de comprendre devant « quelle réalité sociale » nous nous trouvons11.
9Je ne parlerai guère ici, ni des cinq colloques qu’elle a organisés au cours de la première phase de son Programme, à partir de 1981 et jusqu’au début de notre siècle, ni des tables rondes et journées de travail qui ont été publiées dans des dossiers de revues (Cahiers du Centre Glotz, MEFRA, Histoire et sociétés rurales). Comme le montre G. Bandelli dans son article, ils étaient orientés vers l’ensemble des aspects sociaux (au sens le plus large du mot), c’est-à-dire qu’ils s’intéressaient aussi aux aspects économiques, religieux et culturels de la vie des diverses cités. Dans le premier volume du Quotidien Municipal, avec ses deux associés, elle a défini de la façon suivante les thèmes auxquels elle s’était intéressée jusque-là : « la définition des élites locales, l’évolution dans le temps de la composition des groupes dirigeants et les liens qu’ils nouèrent avec le pouvoir central, les fondements économiques de la prééminence sociale des élites, la question de l’évergétisme et, plus largement, l’autoreprésentation des cercles dirigeants »12. On perçoit qu’il s’agit d’histoire sociale, économique et culturelle plutôt que d’histoire politique, et dire cela n’est pas un mince éloge, car le domaine social est très souvent le parent pauvre de l’histoire ancienne.
10Chacun de ces colloques des années 1980 et 1990 était centré sur un ou plusieurs de ces aspects, mais de façon très souple. Par exemple, le deuxième grand colloque, qui se tint à Clermont-Ferrand en 1991 et fut publié en 1996, Les élites municipales de l’Italie péninsulaire des Gracques à Néron, était à la fois consacré à la vie des élites des régions augustéennes I, II, III, V et X, aux rapports des élites avec la production artisanale et « industrielle » et à leurs rapports avec la religion, l’idéologie et l’art13. Les institutions et la vie politique n’étaient jamais au centre du sommaire des colloques ; elles n’étaient pas non plus exclues, mais elles étaient réduites à la portion congrue. Ainsi, dans le deuxième colloque, les communications de E. Lo Cascio et H. Mouritsen étaient franchement institutionnelles et politiques. En même temps, on observe, dans l’agencement des communications, un bon équilibre entre des études précises de type monographique et des synthèses thématiques.
11Comme le souligne G. Bandelli, les thèmes traités dans ces rencontres se sont peu à peu élargis, chronologiquement et géographiquement. Chronologiquement, ils se sont élargis de la République au Principat et même au IVe siècle. Géographiquement, à partir de l’Italie, les thèmes se sont étendus à la totalité de la Méditerranée occidentale, avec quelques incursions en Grèce et en Syrie. En même temps, avec les années, l’équipe et le réseau que ce programme lui permettait de constituer se sont également élargis. Entre 1995 et 1997, ce programme personnel de Mireille Cébeillac-Gervasoni sur les notables municipaux a été inséré par le Centre Glotz dans les thèmes directeurs de l’équipe14. C’est aussi depuis les années 1990 que Laurent Lamoine, de l’Université Blaise Pascal de Clermont-Ferrand, y a très activement participé. Un peu plus tard, Clara Berrendonner, après son élection à l’Université de Paris 1, en 2002, est venue s’adjoindre à l’équipe ainsi formée. Enfin, Mireille Cébeillac-Gervasoni a très tôt entretenu des relations professionnelles étroites avec les directeurs et sous-directeurs du Centre de Recherches sur les Civilisations Antiques de l’Université Blaise Pascal.
12À partir de 2002, le programme EMIRE du Centre Gustave Glotz15 s’est transformé. Il est devenu « Le quotidien institutionnel des cités de l’Occident romain ». Il a travaillé en étroites relations avec le Centre d’Histoire « Espaces et cultures » de l’Université de Clermont-Ferrand. Cette nouvelle phase de l’enquête, toujours menée par M. Cébeillac-Gervasoni, mais désormais avec deux collègues plus jeunes, Cl. Berrendonner et L. Lamoine, s’est traduite par la publication de trois gros volumes, qu’ils ont dirigés ensemble, et qui ont été publiés par les Presses Universitaires Blaise Pascal (dans la collection « Histoires croisées ») : Le quotidien municipal dans l’Occident romain (2008) ; La praxis municipale dans l’Occident romain (2010) ; et Gérer les territoires, les patrimoines et les crises, Le quotidien municipal II (2012). La longue enquête de M. Cébeillac-Gervasoni sur les élites municipales et sur les cités du monde romain occidental a pris fin avec la publication de ce troisième volume. À ces volumes se sont ajoutés, au cours de cette dernière phase de l’enquête, cinq dossiers d’articles publiés dans les Cahiers du Centre Gustave Glotz et dans les Mélanges de l’École française de Rome. Antiquité 16.
13La recherche s’orientait désormais vers le « quotidien municipal », également appelé la « praxis municipale », seconde expression qui peut être tenue pour synonyme de la première, ou encore le « quotidien institutionnel ». Ses trois leaders ont expliqué les tenants et aboutissants de cette transformation dans les introductions des trois volumes, et surtout dans celle de 200817.
14Ils partent d’une constatation qui me paraît très juste : si les élites locales se définissaient principalement par l’exercice des responsabilités publiques, « paradoxalement les contributions rassemblées dans les publications du groupe EMIRE prirent assez peu souvent pour objet les activités des magistrats et des décurions dans le cadre de leur charge »18. Cette situation s’explique par le fait que, jusque-là, l’objectif était davantage social que politique ou institutionnel.
15L’emploi du mot « quotidien » ne doit pas porter à croire qu’il s’agit de vie quotidienne, de vie au jour le jour de l’ensemble de la population. Comme l’écrivait M. Cébeillac-Gervasoni, ce mot « est commode à condition de l’utiliser avec la conscience de ce qu’il représente »19. De toute façon, à part une exception telle que celle de Pompéi, la documentation ne permettrait pas une analyse de la vie de tous les jours au niveau de l’ensemble de la cité. Et telle n’était pas non plus la préoccupation des trois leaders du programme. C’est sans doute l’expression « quotidien institutionnel » qui traduit le mieux cette nouvelle orientation du programme. Désormais, l’inspiration provient nettement moins de l’article de Cl. Nicolet sur la prosopographie que du Métier de citoyen20, – auquel l’introduction de 2008 fait d’ailleurs référence21 : une vie institutionnelle habituelle de l’ensemble de la cité, vue à travers ses institutions et à travers le rôle de ses citoyens dans les institutions. Il ne s’agit plus de s’occuper prioritairement d’une étude sociale des élites municipales, mais davantage de décrire et d’expliquer le fonctionnement des cités dans leur intégralité et dans le cadre de leurs institutions.
16De plus, au cours des années 2000, grâce au large réseau de chercheurs que M. Cébeillac-Gervasoni a regroupé au fil des années autour de son programme, les leaders d’EMIRE ont décidé de lancer un dépouillement complet des sources disponibles sur ces sujets, – des sources épigraphiques, littéraires et juridiques. M. Cébeillac-Gervasoni écrit, dans le « Propos liminal » du dossier publié dans les MEFRA en 2010, que toutes les informations fournies par les inscriptions se trouvent désormais sur un unique CD-Rom, que la collection des informations des textes littéraires est en cours, et que le groupe s’est tourné désormais vers celles des textes juridiques22. À vrai dire, aux dernières nouvelles, si le CD-Rom de sources épigraphiques a été terminé, il n’en a pas été de même pour les deux autres collections. Mais ce qui a été réuni a sûrement été très utile à la rédaction des trois derniers gros volumes, et d’autre part il est très intéressant qu’un recueil des textes juridiques ait été entrepris.
17Car, à cet égard, une remarquable évolution s’est produite : il n’est plus question de regarder le domaine juridique avec méfiance, au contraire, – car il peut éclairer les réalités locales d’un point de vue autre que celui du reste de la documentation. Les leaders d’EMIRE se sont notamment beaucoup intéressés au volume du CEDANT sur les statuts municipaux, volume publié en 2006 sous la direction de L. Capogrossi Colognesi et E. Gabba23. En octobre 2008, une journée de travail a réuni à Paris les membres de ce programme international et des juristes spécialistes du droit municipal sur le thème « Les textes juridiques et le fonctionnement institutionnel au quotidien des cités municipales : regards croisés de juristes et d’historiens ». Cette journée a été publiée en 2010 dans un dossier des MEFRA24.
18Les trois volumes les plus récents du Programme EMIRE, c’est-à-dire Le quotidien municipal volume 1, La praxis municipale dans l’Occident romain, et Le quotidien municipal volume 2, qui se nomme aussi Gérer les territoires, les patrimoines et les crises, sont-ils une excellente expression de cette évolution du programme EMIRE ? Certes, comme tous les actes de colloques, ils contiennent des articles d’inspiration et de sujets très divers. C’est ce qui les rend en partie hétérogènes, mais c’est aussi ce qui fait leur richesse. À les lire ou à les relire, j’ai été tout à fait convaincu de leur qualité. L’ampleur du réseau de chercheurs qu’a peu à peu réuni M. Cébeillac-Gervasoni et l’importance des dépouillements réalisés au cours des années 2000, contribuent, certes, à expliquer ce particulier éclat, mais elles ne suffisent pas à en rendre compte. Il faut songer aussi au fait que le groupe ne fonctionne plus seulement comme un réseau qui se réunit lors de colloques périodiques ; au cours des années 2000, il est devenu un véritable groupe de travail. Les réunions périodiques sont destinées à étudier ce qui a été fait et ce qui reste à faire, et chacun est chargé d’une certaine partie du travail que le programme s’est fixé.
19Pour terminer, je désire souligner deux autres points qui rendent ces trois volumes des années 2000 à la fois différents et complémentaires des volumes précédents, et qui leur confèrent une sorte de profondeur particulière. Premier de ces deux points : ils marquent en effet un net retour à l’institutionnel et au politique. Ce n’est pas un hasard, par exemple, si la troisième partie de La praxis municipale, « Diverses facettes du monde municipal », traite longuement de décrets des décurions, de circulation des fonds publics, de bornage municipal, etc., et si les deux premières parties du Quotidien municipal II se nomment « Gérer les territoires » et « Gérer les patrimoines civiques ». C’est ce que M. Cébeillac-Gervasoni appelait un objectif centripète, et non plus centrifuge. Avec ces volumes, on s’est éloignés de l’élite comme groupe social, comme milieu social, pour étudier la manière dont les membres de ce groupe exerçaient le pouvoir et dont les cités étaient dirigées.
20Autre point, encore plus important à mes yeux, et qui leur confère une particulière profondeur, même si, peut-être, il est moins immédiatement perceptible. Il ne s’agit plus seulement de l’analyse des fonctionnements politiques et sociaux, il s’agit aussi, dans la mesure du possible, d’une évaluation globale de ces cités (soit conquises et aménagées par Rome, soit créées par elle), d’une évaluation de leur force et de leurs faiblesses, de leur capacité à résister aux aléas de l’Histoire. Plusieurs parties de ces volumes sont caractéristiques de cette démarche, – et surtout la troisième partie du troisième volume, « Gérer les crises », qui s’installe pleinement dans les respirations majeures de la Grande Histoire méditerranéenne, des guerres civiles du Ier siècle av. J.-C. à la peste antonine et à la crise du IIIe siècle. Les objectifs de M. Cébeillac-Gervasoni et de ses deux associés ont dépassé le simple retour au politique et à l’institutionnel, pour atteindre une enquête sur la nature même des cités antiques dans leur globalité, sur « les modes de fonctionnement que l’on cherche à comprendre au plus profond », selon la formule de l’une des préfaces25. Les trois volumes des années 2000 constituent ainsi le couronnement de cette entreprise de plus de quarante ans, qui a commencé avec le séjour de Mireille Cébeillac-Gervasoni à l’École française de Rome à partir de 1969, et s’est terminée au début des années 2010.
Bibliographie
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Berrendonner – Cébeillac-Gervasoni – Lamoine 2008 = Cl. Berrendonner, M. Cébeillac-Gervasoni et L. Lamoine (dir.), Le quotidien municipal dans l’Occident romain, Clermont-Ferrand, 2008.
Capogrossi Colognesi – Gabba 2006 = L. Capogrossi Colognesi, E. Gabba (dir.), Gli Statuti municipali, Pavie, 2006.
Cébeillac Gervasoni 1996 = M. Cébeillac-Gervasoni (dir.), Les élites municipales de l’Italie péninsulaire des Gracques à Néron, Naples-Rome, 1996 (Collection du Centre Jean-Bérard, 13 ; Collection de l'École française de Rome, 215).
Cébeillac Gervasoni 1998 = M. Cébeillac-Gervasoni, Les magistrats des cités italiennes de la seconde guerre punique à Auguste, Le Latium et la Campanie, Rome, 1998 (BEFAR, 290).
Cébeillac-Gervasoni 2000 = M. Cébeillac-Gervasoni (dir.), Les élites municipales de l’Italie péninsulaire de la mort de César à la mort de Domitien : classes sociales dirigeantes et pouvoir central, Rome, 2000 (Collection de l'École française de Rome, 271).
Cébeillac-Gervasoni 2003a = M. Cébeillac-Gervasoni (dir.), Le quotidien institutionnel des cités, in CCG, 14, 2003, p. 97-225.
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Cébeillac-Gervasoni 2006 = M. Cébeillac-Gervasoni (dir.), Le quotidien institutionnel des cités : expressions du pouvoir et contrôle de l’espace public, dans CCG, 17, 2006, p. 79-211.
Cébeillac-Gervasoni 2007 = [M. Cébeillac-Gervasoni (dir.)], Le quotidien administratif et institutionnel des cités de l’Occident romain, dans MEFRA, 119-2, 2007, p. 345-443.
Cébeillac-Gervasoni 2010a = M. Cébeillac-Gervasoni (dir.), Le quotidien institutionnel des cités municipales. Regards croisés de juristes et d’historiens, dans MEFRA, 122-1, 2010, p. 5-50.
Cébeillac-Gervasoni 2010b = M. Cébeillac-Gervasoni, Propos liminal, dans Cébeillac-Gervasoni 2010a, p. 5-6.
Cébeillac-Gervasoni 2011 = M. Cébeillac-Gervasoni, L’ordre équestre et la méthode prosopographique, dans CCG, 22, 2011, p. 69-83.
Lamoine – Berrendonner – Cébeillac-Gervasoni 2010 = L. Lamoine, Cl. Berrendonner, M. Cébeillac-Gervasoni (dir.), La praxis municipale dans l’Occident romain, Clermont-Ferrand, 2010.
Lamoine – Berrendonner – Cébeillac-Gervasoni 2012 = L. Lamoine, Cl. Berrendonner, M. Cébeillac-Gervasoni (dir.), Gérer les territoires, les patrimoines et les crises : Le quotidien municipal II, Clermont-Ferrand, 2012.
Nicolet 1970 = Cl. Nicolet, Prosopographiue et histoire sociale : Rome et l’Italie, dans Annales ESC, 25, 1970, p. 1209-1228.
Nicolet 1976 = Cl. Nicolet, Le métier de citoyen dans la Rome républicaine, Paris, 1976.
Notes de bas de page
1 Voir dans ce volume la contribution de G. Bandelli.
2 Lamoine – Berrendonner – Cébeillac-Gervasoni 2010, p. 576-577.
3 Cébeillac-Gervasoni 1998, p. 1
4 Cébeillac-Gervasoni 1998, p. 9-45.
5 Cébeillac-Gervasoni 1998, p. 3-4.
6 Nicolet 1970.
7 Cébeillac-Gervasoni 2011.
8 Nicolet 1970, p. 1214, note 4.
9 Nicolet 1970, p. 1214-1215.
10 Nicolet 1970, p. 1215-1217. Cf. aussi N. Tran dans ce volume.
11 Nicolet 1970, p. 1223.
12 Berrendonner – Cébeillac-Gervasoni – Lamoine 2008, p. 11-12.
13 Cébeillac-Gervasoni 1996.
14 Cébeillac-Gervasoni 2000, p. 1.
15 Le Centre Gustave Glotz (UMR 8585 du CNRS) a lui-même connu une mutation en janvier 2010, et, à cette date, il a pris le nom de Centre ANHIMA (Anthropologie et Histoire des Mondes Anciens).
16 Cébeillac-Gervasoni 2003a ; Cébeillac-Gervasoni 2006 ; Berrendonner 2005 ; Cébeillac-Gervasoni 2007 et Cébeillac-Gervasoni 2010a.
17 Berrendonner – Cébeillac-Gervasoni – Lamoine 2008, p. 11-15 ; Lamoine Berrendonner – Cébeillac-Gervasoni 2010, p. 11-14 ; et Lamoine – Berrendonner – Cébeillac-Gervasoni 2012, p. 11-16. Ces introductions, relativement brèves, mais substantielles, sont toutes signées des trois directeurs de l’enquête.
18 Berrendonner – Cébeillac-Gervasoni – Lamoine 2008, p. 12.
19 Cébeillac-Gervasoni 2003b.
20 Nicolet 1976.
21 Berrendonner – Cébeillac-Gervasoni – Lamoine 2008, p. 13.
22 Cébeillac-Gervasoni 2010b.
23 Capogrossi Colognesi – Gabba 2006.
24 Cébeillac-Gervasoni 2010a.
25 Lamoine – Berrendonner – Cébeillac-Gervasoni 2010, p. 12.
Auteur
École des Hautes Études en Science Sociales - jean.andreau@ehess.fr
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