L’autocéphalie revisitée : les quêtes d’indépendance ecclésiastique dans les espaces soviétique et post-soviétique
p. 495-520
Résumés
Dans l’espace soviétique, les processus d’indépendance ecclésiastique s’inscrivent dans un triple contexte : la sécularisation forcée orchestrée par l’État athée, les relations entre les nations au sein de l’Empire soviétique et l’antagonisme géopolitique entre Est et Ouest. Après la chute de l’Union soviétique, les évolutions territoriales, la concurrence accrue entre les patriarcats de Moscou et de Constantinople, ainsi que les relations nouvelles entre l’Église orthodoxe russe et l’État ont relancé tant les processus d’autonomisation que l’affirmation de la souveraineté moscovite face au patriarcat de Constantinople. L’autocéphalie est de plus en plus devenue une notion réinterprétée au gré des conjonctures politiques, par les politiques comme par les religieux. Les Églises n’ont pas pu trouver de consensus avant le concile panorthodoxe de Crète en juin 2016. Et c’est en partie l’imprécision de la définition juridique du terme qui a provoqué l’inflation des autocéphalies auto-proclamées.
In the Soviet Union the processes of ecclesiastical independence were embedded in a threefold context: forced secularization by the atheist state, relations between nations within the Soviet Empire, and geopolitical antagonism between East and West. After the fall of the Soviet Union, territorial changes, increased competition between the patriarchates of Moscow and Constantinople, as well as new relations between the Russian Orthodox Church and the State, revived both the processes of autonomization and the affirmation of Moscow’s sovereignty over the patriarchate of Constantinople. Autocephaly has increasingly become a notion reinterpreted according to political circumstances, by politicians and by religious leaders alike. The churches were unable to reach a consensus before the Pan-Orthodox Council of Crete in June 2016. And it is partly the vagueness of the legal definition of the term that has caused the proliferation of self-proclaimed autocephalies.
Entrées d’index
Mots-clés : Patriarcat de Constantinople, Patriarcat de Moscou, autocéphalie auto-proclamée, géopolitique, indépendance politique
Keywords : Ecumenical Patriarchate of Constantinople, Patriarchate of Moscow, self-proclaimed autocephaly, geopolitics, political independence
Texte intégral
1Le théologien russe Alexandre Schmemann distingue trois paradigmes dans la tradition canonique orthodoxe : le local, l’impérial et le national, correspondant à des contextes historiques spécifiques. Les premiers siècles sont caractérisés par l’Église locale et l’absence de subordination des communautés les unes par rapport aux autres. La dépendance juridictionnelle apparaît avec l’Empire. Les Lumières et le réveil des nations donnent le jour à un autre paradigme, national.
Avec ce processus complexe émerge l’idée de nation chrétienne – ayant une vocation nationale, une sorte d’« identité » institutionnelle devant Dieu. Ce qui est important pour nous, c’est qu’à ce stade de l’histoire des Églises orientales est apparue une notion d’autocéphalie qui n’est pas, du moins dans son application si ce n’est dans son origine, un produit de l’ecclésiologie, mais un phénomène national […]. Inutile de considérer cela comme une « déviation », en des termes purement négatifs et méprisants […]. Ce qui n’est pas justifié, en revanche, c’est de conformer le développement historique à l’ecclésiologie en tant que telle et, en fait, de subordonner celle-ci à ce dernier1.
2Les contextes soviétique puis post-soviétique, l’évolution politique de l’URSS, puis de la Russie, et ses conséquences au niveau international, ont aussi transformé en partie le sens donné par les acteurs ecclésiastiques à l’autocéphalie et le rôle dévolu aux « Églises-mères » et aux « Églises-filles ». Comme le souligne une étude récente fondée sur une théorie institutionnaliste, trois facteurs contribuent à construire l’autocéphalie : « la disjonction entre les frontières politiques et ecclésiastiques, la perturbation des relations ecclésiastiques entre Église-mère et Église-fille, et l’alignement (sur les mouvements ecclésiastiques) de forces politiques2. » Dans l’espace soviétique, les processus d’indépendance ecclésiastique s’inscrivent dans un triple contexte : la sécularisation forcée orchestrée par l’État athée, les relations entre les nations au sein de l’Empire soviétique et l’antagonisme géopolitique entre Est et Ouest. Après la chute de l’Union soviétique, les évolutions territoriales, la concurrence accrue entre les patriarcats de Moscou et de Constantinople, ainsi que les relations nouvelles entre l’Église orthodoxe russe et l’État ont relancé tant les processus d’autonomisation que l’affirmation de la souveraineté moscovite face au patriarcat de Constantinople. La tradition orthodoxe est réinterprétée au gré des vicissitudes de l’histoire. Ce sont ces différentes logiques que ce chapitre tend à éclairer.
L’Église russe et l’État soviétique face aux quêtes d’indépendances ecclésiastiques
Affirmations nationales et quêtes d’autocéphalies en contexte révolutionnaire
3L’apparition et le développement, au cours du XXe siècle, d’Églises nationales autocéphales, pour une part non reconnues par la communauté orthodoxe, au cœur de l’Empire russe et soviétique, sont déjà relativement bien documentés3. Ces phénomènes dépassent largement l’espace slave. En Géorgie, les tendances autonomistes sont nées au sein du bas-clergé à la suite de révoltes agraires à l’ouest de la province ; elles ont accompagné l’émergence d’une pensée réformiste au sein de l’Église russe et la loi sur la liberté de conscience de 1905. Le concile de 1917-18 a lui aussi joué un rôle déterminant dans cette quête. La question de la langue utilisée tant dans la liturgie que dans l’enseignement dans les séminaires, ainsi que celle des fêtes religieuses inscrites dans une culture nationale en pleine découverte, ont fait partie des revendications majeures du mouvement. Pourtant, les travaux récents de Paul Werth montrent que le principe ethnique est loin d’avoir été mis en avant par les défenseurs de l’autocéphalie en Géorgie. Même si le nationalisme a pris de l’ampleur, ceux-ci ont avancé, dans un contexte pluri-ethnique, un principe avant tout territorial. Ce sont par ailleurs des conceptions ecclésiastiques qui ont encadré les conflits nationaux au sein de l’Église. Le futur catholicos Kirion aurait eu du mal à investir le principe national et considérait qu’il fallait avant tout restaurer l’indépendance ecclésiastique rompue de façon non canonique en 1811 par l’autocratie russe. Dans la mesure où il s’agissait, selon lui, de réparer une violation des canons, la déclaration d’autocéphalie a été unilatérale sans qu’aucun accord de l’Église russe ne soit demandé, et le phylétisme bulgare a été condamné dans le même mouvement. Moscou, au contraire, a allégué le caractère ethnique des revendications d’autocéphalie géorgiennes pour mieux en rejeter la demande en 1917. L’exarchat russe a été temporairement aboli lors de la période d’indépendance de la Géorgie (1918-1921), et l’autocéphalie n’a été accordée par Moscou à la Géorgie qu’en 1943, année du rétablissement du patriarcat de Moscou : l’Église russe a alors justifié sa décision au nom de l’unité territoriale de la république géorgienne au sein de l’URSS4.
4La période révolutionnaire a nourri d’autres mouvements religieux indépendantistes, cette fois dans l’espace slave. C’est ainsi qu’en Ukraine, un mouvement ecclésial formé de clercs et de laïcs réformateurs a demandé l’ukrainisation de l’Église, une administration fondée sur le principe de la conciliarité et l’autocéphalie5. Elle n’a guère trouvé de soutien auprès de l’éphémère République populaire ukrainienne (7 novembre 1917-29 avril 1918) et a été jugée avec hostilité par la hiérarchie locale de l’Église6, mais l’idée d’une Église ukrainienne indépendante a été soutenue par le Directoire qui a vu le jour le 14 novembre 1918. À partir de 1919, le mouvement s’est radicalisé, des paroisses s’ukrainisant par le bas. En octobre 1921 s’est réuni le premier concile pan-ukrainien qui comprenait des membres du clergé et des laïcs. En l’absence d’évêques, cette Église naissante a établi sa propre hiérarchie, des prêtres imposant leurs mains sur l’un des leurs : Vasyl’ Lypkivs’kyj. Elle a insisté sur l’usage liturgique de l’ukrainien vernaculaire et, dans la ligne du concile de 1917-18, sur la participation accrue des laïcs dans le gouvernement de l’Église, sur le principe électoral en son sein et a mis l’accent sur la catéchèse. Cette Église comptait trois à six millions de membres à la fin des années 1920. Elle s’est développée à Kiev et dans quelques autres villes, a trouvé un soutien auprès de l’intelligentsia, puis, par la suite, auprès des paysans. Même si elle a émergé sur fond de réveil nationaliste, l’Église orthodoxe autocéphale d’Ukraine a été fortement soutenue par les bolchéviques lors de cette courte période, où l’ont été toutes les institutions religieuses opposées à l’Église orthodoxe russe. Mais en janvier 1930, devant son succès, ceux-ci ont décidé de la dissoudre et ses membres sont entrés dans la clandestinité. En Biélorussie, une Église autocéphale biélorusse a connu un sort similaire. Établie par une assemblée ecclésiastique à Minsk en juillet 1922, elle a eu une courte existence jusque dans les années 1930, avant d’être elle aussi décimée.
5Si la très grande majorité des quêtes d’autocéphalies, et de façon générale des processus d’autonomisation ecclésiastique qui ont émergé dans les années 1920 se sont nourris des mouvements d’émancipation nationale, le contexte révolutionnaire bolchévique a provoqué un mouvement d’indépendances ecclésiastiques d’une autre nature, celui-là de durée encore plus éphémère. Ainsi, de nouvelles Églises se sont auto-proclamées en réaction au pouvoir soviétique. Autocéphalie est alors devenue synonyme d’indépendance à l’égard d’une Église inféodée au pouvoir ; le principe de l’Église locale a été réaffirmé pour quelques mois. Ainsi, après son arrestation le 12 mai 1922, le patriarche Tikhon avait transmis ses droits à Agafangel, métropolite de Iaroslavl’ ; celui-ci, ne pouvant pas entrer dans Moscou, avait incité les évêques à diriger leurs éparchies de façon autonome, en ignorant en particulier les directives de l’Église rénovationniste. La première à émerger a été l’« Église autocéphale de Pétrograd » dont la vie fut de très courte durée puisque sa direction a été décimée au printemps 19237.
Les influences des patriarcats au gré de la géopolitique
6L’histoire des autocéphalies au XXe siècle renvoie à des logiques nationales, mais aussi et surtout au rapport de forces entre Moscou et Constantinople, à des considérations géopolitiques et au déplacement des frontières de l’empire et de ses zones d’influence8. Les Églises autocéphales ont fait partie intégrante des zones frontalières au cours de l’entre-deux-guerres ; elles ont servi de « cordon sanitaire », même si « les États successeurs de l’Empire russe, Finlande, États baltes, ainsi que la Pologne recréée ou la Roumanie peinent […] à se légitimer face à Paris ou à Londres comme les forteresses de la civilisation européenne et chrétienne contre l’anarchie asiatique et athée de Moscou9. »
7La confusion ecclésiastique et les persécutions religieuses en Union soviétique ont contribué à accroître l’influence du patriarcat de Constantinople sur les anciens territoires de l’Empire russe au cours des années 1920. En Finlande et en Estonie, des Églises autonomes se sont constituées et ont demandé leur rattachement au patriarcat de Constantinople. Quant aux chrétiens orthodoxes de Pologne, ils se sont vu accorder le 13 novembre 1924 l’autocéphalie par le patriarche de Constantinople Grégoire VII, arguant du caractère non canonique de la séparation de la métropole de Kiev avec ses éparchies de Pologne et de Lituanie du patriarcat œcuménique10.
8S’agissant du patriarcat de Moscou, l’historienne Daniela Kalkandjieva souligne, dans son étude récente sur l’Église orthodoxe russe de 1917 à 1948, que :
L’histoire de l’Église orthodoxe russe au cours de la première moitié du XXe siècle révèle une politique inchangée en ce qui concerne sa juridiction et son autorité. Ni la restauration du patriarcat de Moscou en 1917, ni la chute de l’Empire russe ni l’établissement de nouveaux États dans ses marges occidentales n’ont conduit l’Église orthodoxe russe à renoncer à ses droits administratifs et pastoraux sur les communautés orthodoxes sur les anciens territoires de l’Empire russe ou dans les structures de son étranger lointain. […] L’analyse détaillée des efforts de l’administration de l’Église de Serge11 pour répandre et renforcer sa juridiction et son autorité au-delà des frontières soviétiques pendant l’entre-deux-guerres […] révèle que dans cette entreprise, l’Église ne faisait pas qu’exécuter les ordres du Kremlin, mais qu’elle poursuivait aussi ses propres intérêts12.
9Cette collusion d’intérêts politiques et religieux explique qu’en 1941, lors de l’occupation allemande de la partie occidentale de l’Ukraine, les autorités allemandes aient contribué à l’émergence d’une Église autocéphale orthodoxe ukrainienne. Après la défaite allemande, certains de ces évêques ont émigré en Amérique du Nord et établi une hiérarchie orthodoxe ukrainienne en communion avec le patriarcat de Constantinople13. En Biélorussie, le pouvoir allemand a procédé de la même façon. Les évêques de l’Église autocéphale biélorusse étaient issus du patriarcat de Moscou ; ils ont suivi les Allemands en Occident après la défaite et rejoint le Synode russe hors-frontières. Parallèlement, une Église biélorusse en exil s’est constituée en 1948, les hiérarques se référant à l’expérience de l’Église orthodoxe de Pologne qu’ils jugeaient analogue14.
10La collaboration entre le pouvoir politique soviétique et l’Église russe s’est renforcée à partir de 1943 et du rétablissement du patriarcat. Staline prévoyait notamment de faire du patriarcat de Moscou le centre institutionnalisé de la chrétienté orthodoxe en convoquant en particulier un huitième concile œcuménique ; cette tentative avorta. Dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’Église orthodoxe russe a étendu sa juridiction sur l’ensemble des territoires occupés, mais également en Transcarpathie, Tchécoslovaquie et Hongrie. En Pologne, elle a obtenu du gouvernement de Pologne qu’il démette le métropolite Dionizy de la tête de l’Église de Pologne. Celle-ci a rejeté le tomos de Constantinople de 1924 et en a demandé un nouveau au patriarcat de Moscou le 22 juin 1948. En 1951, l’Église russe a octroyé l’autocéphalie à l’Église de Tchécoslovaquie, un statut qui ne lui a longtemps été reconnu que par les pays situés derrière le Rideau de fer. L’autonomie de cette Église a été acceptée par le patriarcat œcuménique en 1960, et l’autocéphalie en 1998.
11S’agissant de l’Église orthodoxe d’Amérique, des recherches récentes d’Andrej Kostrjukov, historien et théologien, chercheur à l’Université orthodoxe en sciences humaines Saint-Tikhon de Moscou15 tendent à expliquer l’octroi par le patriarcat de Moscou en 1970, après maintes hésitations, de l’autocéphalie à la Métropole grecque catholique16 par le rapport de forces qui existait alors entre le patriarcat de Moscou et celui de Constantinople. Les premières mentions de demandes d’autocéphalie remontaient au début du XXe siècle, mais elles avaient été interrompues par la révolution. Près de trente évêques avaient fui en Amérique du Nord et en 1922, le patriarche Tikhon avait nommé le métropolite Platon Roždestvenskij à la tête de l’éparchie d’Amérique du Nord. Les relations avec Moscou, réduites au strict minimum, se détériorèrent en 1933, lorsque Platon refusa l’injonction du locum tenens Serge à cesser de prononcer des propos anti-communistes ; le concile des évêques américains déclara alors son autonomie à l’égard de Moscou. Après une certaine détente au cours de la Seconde Guerre mondiale, la volonté de Moscou de contrôler les recrutements et le refus affiché par la Métropole de ne pas intervenir contre le pouvoir communiste provoquèrent une rupture des relations en 1947. Celle-ci fut considérée comme schismatique et dans les années 1960, elle se mit à revendiquer l’autocéphalie. Dans une lettre à Alexis Ier le 3 janvier 1968, le métropolite Ireney Bekish expliquait que, dans la mesure où les Américains ne faisaient pas confiance aux communistes, ils ne le feraient pas plus à une Église soumise à Moscou ; il appelait à une Église indépendante. Devant le refus de Moscou, la Métropole se tourna vers Constantinople qui avait déjà son archevêché en Amérique du Nord. Les représentants de la Métropole grecque-catholique avaient l’habitude de concélébrer avec les membres du clergé de Constantinople ; deux évêques de Constantinople participèrent ainsi à l’ordination épiscopale de l’archimandrite Théodose Lazor le 6 mai 1967, ce qui provoqua l’ire de Moscou. Athénagoras sembla alors revenir sur ce rapprochement, déclarant que c’était à Moscou de régler le problème de la Métropole. Kostrjukov conclut que :
L’indécision politique du Siège œcuménique liée à sa situation [géopolitique] difficile poussa la Métropole d’Amérique du Nord à demander l’autocéphalie au patriarcat de Moscou. Par ailleurs, dès lors que Constantinople se mit à parler de la création de sa propre Église unifiée en Amérique [en 1968], le patriarcat de Moscou résolut très rapidement la question de l’autocéphalie américaine, oubliant les anciens désaccords.
12Il était, en effet, convaincu que si Constantinople accordait un statut d’autocéphalie à la Métropole, celle-ci s’éloignerait définitivement de Moscou, alors que dans le cas contraire, il pourrait exercer sur elle une certaine influence. La position de Moscou par rapport à Constantinople serait aussi renforcée, et le nouvel équilibre aurait des conséquences sur le dialogue œcuménique, sur lequel Moscou comptait peser. « Ceci aura pour nous une signification à la fois importante et positive sur le plan de notre politique religieuse […], écrivait ainsi Nikodim. Le conflit entre Constantinople et le patriarcat de Moscou sera utile pour refroidir les activités trop œcuméniques et trop pro-Vatican du patriarcat de Constantinople17 ». Enfin, après les mesures antireligieuses de Nikita Khrouchtchev, l’indépendance accordée à l’Église grecque catholique orthodoxe en Amérique pourrait aussi s’expliquer par la difficulté à lui trouver des cadres ecclésiastiques et par des considérations financières, l’Église de Moscou n’ayant pas les moyens suffisants pour soutenir des paroisses outre-Atlantique. Le 10 avril 1970, Alexis Ier signait un tomos lui accordant l’autocéphalie.
Les affirmations ecclésiastiques en contexte post-soviétique : Églises et nouveaux territoires
Les nouvelles vagues d’indépendances ecclésiastiques
13La disparition politique de l’URSS a provoqué à son tour d’importants bouleversements au sein de l’Église orthodoxe russe, l’émergence de nouveaux États provoquant la reconstitution d’Églises nationales. Cette situation a réactivé la concurrence du patriarcat de Moscou avec celui de Constantinople, l’étendue des territoires juridictionnels apparaissant comme un enjeu majeur pour affirmer le poids respectif de chacun dans la communion des Églises orthodoxes.
14En Moldavie, parallèlement à la métropole orthodoxe dépendant du patriarcat de Moscou, s’est recréée en 1992 celle de Bessarabie. Originellement reconnue par le patriarcat œcuménique de Constantinople, elle avait été rattachée au patriarcat de Roumanie lors de l’indépendance de la Moldavie après la révolution de 1917 pour être liquidée lorsque la Bessarabie fut envahie par les troupes soviétiques en 1940. En 1996, le patriarcat de Constantinople a réactivé le tomos d’autonomie qu’il avait accordé en 1923 à l’Église apostolique orthodoxe d’Estonie, et qui avait été suspendu en 1978 sous la pression de Moscou. Cette situation a provoqué une rupture de communion de quelques mois entre les deux patriarcats jusqu’aux Accords de Zurich en octobre 1996, qui ont entériné la coexistence des deux juridictions ecclésiastiques sur le territoire estonien. Des Églises autoproclamées « autocéphales », sans aucune reconnaissance canonique, ont resurgi au gré du développement de mouvements nationalistes. C’est le cas en Biélorussie, où est réapparu un modeste mouvement « autocéphaliste » lié à la branche canadienne de l’Église née en 192218. Mais c’est surtout en Ukraine, jusque-là dominée par l’Église d’Ukraine du patriarcat de Moscou, que la situation s’est considérablement complexifiée19. Sous l’influence de la diaspora ukrainienne, plusieurs autres Églises orthodoxes sont apparues ou réapparues à partir de la fin des années 1980, tout comme l’Église gréco-catholique qui avait été intégrée de force à l’Église orthodoxe russe en 1946. En octobre 1989, l’évêque de Žytomyr Ioann Bondarčuk a ainsi annoncé l’implantation de l’Église orthodoxe apostolique autocéphale ukrainienne, issue du concile de Kiev en 1921, dans les provinces occidentales d’Ukraine avec le soutien des autorités locales. En juin 1990, le métropolite Mstyslav Skrypnyk, neveu du leader nationaliste Petlioura (1879-1926) a été élu à la tête de cette nouvelle Église autoproclamée autocéphale. En 1992, le métropolite Filaret Denysenko de Kiev, représentant du patriarcat de Moscou en Ukraine, a annoncé l’indépendance de l’Église orthodoxe ukrainienne et, en juin de la même année, les deux Églises ont été réunies en une Église orthodoxe ukrainienne-patriarcat de Kiev20, dont le métropolite Mstyslav, absent du concile d’unification, a été proclamé patriarche : ce dernier a accepté tout en prenant de plus en plus de distance par rapport à Filaret. À sa mort le 11 juin 1993, ont été élus, à l’automne de la même année, deux patriarches, deux Églises orthodoxes cohabitant alors, sans aucun statut officiel accordé par les autres patriarcats, avec l’Église orthodoxe russe sous la juridiction du patriarcat de Moscou21. En octobre 2009, le métropolite Mefodij (Kudrjakov) de l’Église orthodoxe ukrainienne autocéphale a demandé en vain au patriarcat de Constantinople que lui soit octroyé le statut d’Église autonome22. Ces trois Églises orthodoxes, tout comme l’Église gréco-catholique ukrainienne, ont joué un rôle significatif lors des manifestations pro-européennes de l’Euromaidan, de novembre 2013 à février 2014. Les Églises « nationales » ont notamment soutenu le sentiment anti-russe et l’indépendance de l’État ukrainien23. En 2015, l’idée d’une unique Église autonome orthodoxe sous la juridiction de Constantinople a été évoquée, elle aussi sans succès. De son côté, le patriarcat de Moscou a réagi aux événements ukrainiens en confirmant l’élection d’Onufrij, évêque de Černivci, comme métropolite ukrainien, proche du patriarche de Moscou24, le 13 août 2014, en remplacement de Volodymyr Sabodan à la tête de l’Église en Ukraine. Pendant longtemps, ces luttes d’appareils ont peu intéressé les fidèles orthodoxes. Jusqu’au conflit entre la Russie et l’Ukraine, les enquêtes indiquaient une appartenance flottante des chrétiens à chacune de ces Églises, beaucoup ne sachant pas à quelle juridiction leur paroisse appartenait. Mais de 2014 jusqu’à octobre 2018, d’après Andrij Juraš, directeur du département des affaires religieuses et des nationalités au ministère de la culture d’Ukraine, près de 120 paroisses de l’Église orthodoxe ukrainienne – patriarcat de Moscou sont passées dans l’Église orthodoxe ukrainienne – patriarcat de Kiev (sur un total respectivement de 12 348 et 5 167 communautés religieuses au 1er janvier 2018)25. Dans le même temps, la guerre semble aussi avoir créé une distanciation face aux questions ecclésiastiques, puisque, d’après le Centre Razumkov, le pourcentage des croyants a baissé de 2014 à 2017 de 76 % à 67,1 %26.
15L’idée d’une Église autocéphale ukrainienne a été investie par les autorités politiques. Leonid Kravčuk a fermement soutenu la création d’une Église orthodoxe nationale, tandis que son successeur Leonid Kučma a affirmé formellement son refus d’ingérence dans les questions ecclésiales et canoniques, mais également soutenu les mouvements d’installation d’une Église nationale indépendante du patriarcat de Moscou. Lors d’une rencontre avec l’intelligentsia, Viktor Juščenko a, quant à lui, déclaré : « L’Ukraine ne pourra pas devenir un État indépendant tant que ne sera pas créée une Église locale, indépendante du patriarcat de Moscou » ; il a rendu visite au patriarche œcuménique le 8 juin 2005. Alors que le président pro-russe Viktor Janukovyč s’était opposé à cette idée, la Rada suprême d’Ukraine a adressé le 16 juin 2016 au patriarche Bartholomée Ier une demande, votée par 245 députés, afin que soit accordé à l’Église orthodoxe ukrainienne le statut d’autocéphalie. Elle affirme notamment dans sa déclaration que « le patriarcat de Moscou est actuellement trop étroitement associé au régime politique au pouvoir en Russie pour être perçu par la société ukrainienne comme une Église, et non comme un “ministère de l’idéologie” de la Fédération de Russie » et que dans le contexte de la guerre dans le Donbass, « le patriarcat de Moscou est malheureusement perçu par de nombreux citoyens de notre pays comme un complice moral de l’agression russe et d’une guerre hybride contre l’Ukraine27. » Le 6 septembre 2016, dans son adresse à la Rada, Petro Porošenko affirmait que la question religieuse était désormais une « question de sécurité d’État, dans la mesure où l’Église et les croyants sont devenus objets de manipulation par l’ennemi28. »
Mesdames et Messieurs les députés. Je tiens à vous remercier pour l’appel de la Rada au Patriarche œcuménique Bartholomée, représentant de notre Église-mère, lui demandant un tomos d’autocéphalie pour l’Église orthodoxe en Ukraine. Un tel pas était indispensable et renvoyait à la tradition selon laquelle l’avis du pouvoir séculier est très important pour le Patriarche œcuménique. Nous avons respecté la tradition et j’espère que Sa Sainteté nous entendra et prêtera attention aux sondages de l’opinion publique qui montrent qu’un nombre croissant de citoyens orthodoxes souhaitent avoir, comme cela se fait dans la majorité des pays orthodoxes, une Église unique, locale et autocéphale. Je veux également assurer que l’autocéphalie ne signifie pas l’apparition d’une Église d’État. Les principes constitutionnels concernant les relations entre l’État et les organisations religieuses ne changeront pas d’un iota, et la liberté de conscience ne sera limitée en rien, par personne, ni pour personne.
16La situation a rapidement évolué à partir du printemps 2018. En avril 2018, le président ukrainien, soutenu par le parlement ukrainien, et les deux hiérarques des Églises orthodoxes locales ont demandé au patriarche œcuménique Bartholomée de les reconnaître et de les unifier sous son autorité. Malgré la rencontre entre les deux patriarches de Moscou et de Constantinople le 31 août 2018 à Istanbul, le 11 octobre 2018, le synode du patriarcat de Constantinople a décidé d’accorder l’autocéphalie à une Église d’Ukraine unifiée et a, par la même occasion, révoqué la validité de la lettre synodale de 1686 qui rattachait l’Église de Kiev au patriarcat de Moscou29. En réaction, le patriarche Cyrille a annoncé quelques jours plus tard que son Église rompait sa communion eucharistique avec le patriarcat de Constantinople. Alors que le 3 novembre Petro Porošenko et le patriarche Bartholomée ont signé un accord sur les étapes de la reconnaissance de la nouvelle Église, le métropolite Ilarion a déclaré que les décisions de Bartholomée sortaient du domaine canonique et relevaient exclusivement du domaine politique, et il a accusé les États-Unis d’avoir influé sur la décision de Constantinople pour affaiblir l’Église russe30. Le 6 janvier 2019, Epifanij, ancien vicaire général de Filaret et nouveau primat de la nouvelle Église, a reçu à Istanbul le tomos reconnaissant l’autocéphalie de l’Église orthodoxe d’Ukraine. Alors que, pour être effective, cette décision doit être validée par les autres Églises orthodoxes locales, celles-ci, traversées par des tensions internes, peinent à prendre position31.
17Les mouvements d’indépendance ecclésiastique en Ukraine ou, dans une certaine mesure, en Moldavie pourrait expliquer les aspirations séparatistes qui se sont révélées en ex-Union soviétique, au-delà de l’espace slave. Ainsi, en dehors de la juridiction du patriarcat de Moscou, a été fondée le 15 septembre 2009, après la guerre entre la Russie et la Géorgie, une Église orthodoxe abkhaze qui s’est séparée du catholicossat de Géorgie32 ; elle n’a pas été reconnue par le patriarcat de Moscou, alors que l’indépendance de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud l’a été par l’État russe. La reconnaissance de cette Église par l’Église orthodoxe russe aurait créé un précédent alors que le patriarcat de Moscou défendait le statu quo en Ukraine. Depuis le début des années 2010, cette Église orthodoxe abkhaze s’est vue concurrencée par la « Sainte Métropole d’Abkhazie », créée en 2011 autour du monastère du Nouvel-Athos, important centre religieux réouvert en 1994, que l’Église orthodoxe russe considère comme l’un de ses hauts lieux et qui est placé sous la double juridiction des patriarcats de Russie et de Géorgie depuis un accord verbal entre les deux patriarches en 2012. Mais le Nouvel-Athos est désormais contrôlé par l’archimandrite Dorofej Dbar et un petit groupe de prêtres réformateurs, formés au Mont-Athos et tournés vers la Grèce et l’Europe, qui s’opposent à Moscou tout comme à l’Église de Géorgie, et qui ont demandé à Constantinople de reconnaître l’autocéphalie de la « Sainte Métropole d’Abkhazie ». Moscou a tenté de faire pression sur les autorités étatiques abkhazes. Celles-ci ont répondu que toutes les églises dépendaient désormais de l’éparchie dirigée par Vissarion Apliaa et qu’elles n’avaient aucun moyen d’agir. De fait, le pouvoir de Soukhoumi soutient la quête d’une Église orthodoxe autocéphale qu’il considère comme un préalable à la reconnaissance de l’indépendance politique de l’Abkhazie par les pays européens et tente de maintenir une politique de compromis avec les deux mouvements orthodoxes séparatistes33.
Du paradigme impérial de l’Église orthodoxe russe à celui de civilisation
18Tout comme le patriarcat œcuménique, l’Église orthodoxe russe est de type impérial34 et sa vision géopolitique du monde continue aujourd’hui à être très largement en adéquation avec celle du pouvoir politique. Après l’éclatement de l’Union soviétique, l’Église défend un territoire juridictionnel qui se superpose très largement au territoire de l’ancienne Union soviétique – seules la Géorgie et l’Arménie en étant exclues. Elle reconstruit ainsi un nouvel espace : celui de l’étranger proche sur lequel Moscou prétend garder une influence. Le patriarche Alexis II (1929-2008) identifiait un peuple (народ), un territoire et une Église. C’est l’existence d’un même peuple orthodoxe dans trois pays qui permettait d’affirmer, selon lui, l’identité d’une culture slave unique commune à la Russie, la Biélorussie et l’Ukraine. Selon une logique issue de l’héritage soviétique, la patrie définie par un baptême, une religion et une histoire communs supplantait la nation ; l’orthodoxie était la religion d’une patrie [отечество]. Cette vision était très éloignée de celle des Églises locales, façonnées par les anciens mouvements nationaux des XIXe et XXe siècles. Le patriarche Kirill a mis en avant, quant à lui, la civilisation orthodoxe, et insisté aussi et surtout sur la Sainte Russie et sur son cœur, Kiev : « Kiev est le lieu de naissance de la grande civilisation orthodoxe, qui unit les peuples de la Sainte Russie. Kiev est la ville d’un Baptême unique… »35. Il a comparé ailleurs la capitale de l’Ukraine à « notre Jérusalem et notre Constantinople ». Cette représentation spatiale lui a permis de surmonter les conséquences de l’effondrement de l’Union soviétique qu’il appelait, le 11 novembre 2011, une « catastrophe de la Russie historique » dont les causes seraient « la perte de conscience et de fierté nationales, l’absence de prise en compte de l’histoire dans toute son ampleur, l’incompréhension que la communauté historique a une importance majeure pour les gens, notamment pour leur épanouissement matériel et spirituel36. » Dans l’article 1 de ses statuts, adoptés en 2000, l’Église orthodoxe russe se dit multinationale37. Son article 3 indique les frontières de son territoire canonique : la Fédération de Russie, l’Ukraine, la Biélorussie, la république de Moldavie, l’Azerbaïdjan, le Kazakhstan, la République populaire de Chine, le Kirghizstan, la Lettonie, la Lituanie, le Tadjikistan, le Turkménistan, l’Ouzbékistan, l’Estonie, le Japon et toutes les personnes qui y entrent volontairement dans les autres pays. La Chine et le Japon ont été ajoutés dans les statuts amendés de 2013.
19Il n’est pas inutile ici de revenir sur les discours de la hiérarchie au sujet des frontières et de certaines notions comme la nation, le « monde russe » et la civilisation orthodoxe. Ils précisent les contours de la pensée officielle de l’Église orthodoxe russe et son mode d’exposition de notions en lien avec celle de l’autocéphalie. Les autorités ecclésiastiques, et en particulier le métropolite Ilarion Alfeev chargé actuellement du département des relations extérieures, ont maintes fois affirmé que les changements des frontières étatiques ne signifiaient pas nécessairement qu’il convenait de modifier les délimitations canoniques. Le 7 février 2005, lors d’une Conférence au symposium international de droit canonique à l’Académie théologique catholique de Budapest, le même Ilarion Alfeev redéfinissait le territoire canonique selon la tradition orthodoxe et reprenait le principe selon lequel la coexistence de plusieurs Églises sur un même territoire était contraire aux canons orthodoxes38.
20Pourtant, l’autocéphalie est mise au service du « monde russe39 » dans un contexte globalisé. Dans la diaspora, et en France en particulier, les conflits juridictionnels témoignent des distorsions canoniques dans un contexte de concurrence entre patriarcats. En 2009, Filaret Bulekov40, alors représentant de l’Église orthodoxe russe au Conseil de l’Europe, a de nouveau insisté sur la nécessité de différencier les logiques politiques et religieuses, la mission de l’Église orthodoxe devant être distinguée des objectifs de l’État. S’agissant des rapports à l’égard de la nation, il a expliqué le caractère paradoxal de l’Église, à la fois universelle et rassemblant les représentants de tous les peuples et cultures qui partagent la même foi, mais aussi composée d’Églises locales, liées historiquement et culturellement. Il ajoute que dans certains États, l’Église a une position patriotique et contribue à la cohésion de la société, mais « dans la mesure où l’Église, même une Église locale, veille sur plusieurs peuples dans plusieurs États, elle ne peut jamais restreindre sa mission à l’échelle d’un peuple ou d’un État… ». Ce double principe, universel et national, est inscrit dans les Fondements de la doctrine sociale de l’Église orthodoxe russe41 (II.2). Enfin, s’agissant de la notion de civilisation orthodoxe, il précise : « Aujourd’hui, on parle souvent de “civilisation orthodoxe”, c’est-à-dire d’une communauté culturelle et historique qui réunit les peuples et les États, où la confession dominante est l’Orthodoxie. » Mais les tensions au sein de cet ensemble montrent que cette civilisation orthodoxe est moins une réalité qui serait le fruit d’hommes politiques ou d’acteurs sociaux et culturels, qu’un objectif.
Ce serait une erreur d’identifier la « civilisation orthodoxe » avec l’Église orthodoxe universelle comme Corps du Christ. Cet organisme religieux, unissant tous les chrétiens orthodoxes, quel que soit le continent sur lequel ils habitent, est composé de personnes de langues et de traditions culturelles locales diverses. […] Afin d’actualiser la « civilisation orthodoxe », il faut prendre en compte les communautés qui ont de longues histoires et traditions, les groupes religieux et culturels constitués de différents peuples et ethnos qui vivent à l’intérieur des frontières d’un État (comme, par exemple, en Russie) et ceux qui les dépassent (pensons par exemple à l’espace pastoral de l’Église orthodoxe russe).
21Ce concept de civilisation orthodoxe permet de distinguer des communautés culturelles, mais aussi politiques, dans un monde que l’Église orthodoxe russe, tout comme l’État, veulent concevoir pluriel et multi-centré. Il dessine un périmètre de pays en affinité avec la Russie, voire sous son influence, qui s’opposent aux États libéraux et sécularisés.
Changements ecclésiastiques, tradition et mémoire
22L’histoire des indépendances ecclésiastiques et des conflits entre « Églises-mères » en contextes soviétique et post-soviétique se déroule au gré des changements territoriaux et des évolutions géopolitiques. Elle atteste de frontières religieuses fluctuantes au gré de catégories spatiales constamment redéfinies et renégociées. Le rapport des Églises à la nation est de plus en plus divers42. Alors que les relations entre pouvoirs séculiers et religieux se sont considérablement modifiées, le cadre institutionnel de l’Église orthodoxe, tel qu’il s’est formé dans l’Empire romain byzantin, semble avoir des difficultés à répondre aux évolutions politiques contemporaines qui se font rapidement et en dehors du cadre religieux ; il s’adapte mal à l’actuelle géographie politique, au contexte post-national et post-colonial. Et pourtant l’Église montre un refus de modifier ce cadre. Dans une perspective institutionnaliste, le politiste Paul Pierson identifie plusieurs raisons au changement institutionnel et avance l’hypothèse selon laquelle « toutes choses égales par ailleurs, plus une institution est ancienne, plus elle est résiliente et plus les changements sont marginaux43 ». Ce propos semble bien s’appliquer à l’Église orthodoxe, dont les décisions sont marquées par le souci de les justifier par l’inscription formelle dans la tradition canonique. Alors que les patriarcats s’opposent sur le principe de souveraineté, les institutions s’ajustent aux nouveaux contextes par une constante interprétation de la tradition tout en se fondant sur une mémoire, elle-même source de conflits.
Un conflit entre patriarcats sur la question de la souveraineté ?
23Moscou et Constantinople se divisent-elles sur la question de la souveraineté ? Selon Andrej Šiškov, chercheur de l’Institut Saints-Cyrille-et-Méthode (Moscou), consultant de la commission biblique et théologique synodale de l’Église orthodoxe russe, l’histoire de l’autocéphalie moscovite peut être analysée comme une manifestation de la souveraineté de l’Église russe, au sens donné par Carl Schmitt44. Celle-ci s’est affirmée dans un contexte d’affaiblissement de Constantinople au cours du XVe siècle et a accompagné l’apparition du mythe politique et religieux de Moscou comme Troisième Rome au début du XVIe siècle45. Comme le souligne Georges Florovsky, repris par Šiškov, « il n’était plus besoin que d’un faible développement pour marquer une rupture complète avec la tradition grecque en occultant tout souvenir du passé grec, c’est-à-dire du passé patristique. Le danger naquit alors que la tradition historique et œcuménique en devint comme obscurcie, replacée dans le cadre d’une tradition locale et nationale qui en irait jusqu’à confiner la tradition œcuménique dans le cadre des limites arbitraires de la mémoire spécifique et nationale des Russes46. » Certes, la chute de l’Empire, la destitution du tsar, défenseur de la religion orthodoxe, et les persécutions religieuses qui suivent la révolution d’Octobre, ont été des épreuves pour la souveraineté de l’Église russe, le concile de 1917-1918 et la restauration du patriarcat n’apparaissant que comme une courte parenthèse. Mais celle-ci est réaffirmée au milieu des années 1940, lorsque Staline décide de faire de l’Église orthodoxe un instrument de sa politique extérieure. Sur le plan ecclésiologique, cette réaffirmation s’accompagne de la production d’un discours théologique centré sur l’« autocéphalisme absolu ». C’est ainsi qu’à partir de 1943 la pensée du canoniste Sergej V. Troickij (1878-1972) acquiert une influence considérable, et celle-ci continue à marquer la politique du patriarcat de Moscou jusqu’à aujourd’hui. Dans un texte paru dans la Revue du patriarcat de Moscou47, le théologien tend à montrer que les relations entre Églises fonctionnent de façon analogue à celles des États. Selon lui, l’intervention d’une Église autocéphale dans les affaires d’une autre est considérée comme une atteinte à la souveraineté de cette dernière. Troickij critique ainsi le patriarcat de Constantinople pour ce qu’il considère une atteinte constante à la souveraineté des Églises autocéphales. Comme toute Église autocéphale a un pouvoir souverain et suprême, seule une organisation qui a un pouvoir suprême devrait pouvoir accorder l’autocéphalie à une Église : les apôtres, le concile de l’Église répandue sur l’univers et l’épiscopat d’une Église autocéphale.
24Le principe proclamé par l’Église russe, tout comme la tradition qui veut que, dans l’attente d’un concile, le patriarcat de Constantinople reconnaisse l’autocéphalie après avoir reçu l’assentiment de toutes les Églises, n’ont cessé d’être débattus au cours du XXe siècle, et jusqu’à aujourd’hui. De même en est-il de la question de la primauté dans l’Église. C’est ainsi qu’une discussion s’est récemment engagée au sujet de la question des dyptiques. Si la Position du patriarcat de Moscou au sujet de la primauté dans l’Église universelle datant de 201348 déclare que « la source de la primauté d’honneur au niveau de l’Église universelle est la tradition canonique de l’Église, fixée dans les saints dyptiques et reconnue par toutes les Églises locales autocéphales » et que « le contenu de fond de la primauté d’honneur au niveau universel n’est pas défini par les canons des conciles œcuméniques ou locaux », le théologien laïc Dimitar Arnaudov souligne que selon le métropolite de Bursa Elpidophoros Lambriniadis, professeur de théologie à l’université de Thessalonique, « les dyptiques de l’Église orthodoxe sont uniquement une “expression” de la primauté du patriarcat œcuménique et non la source de la primauté de cette Église – première de la taxis (l’ordre canonique des Églises) ». Il ajoute que « selon le métropolite Elpidophoros, la source de la primauté au niveau universel se trouve dans la personne du premier hiérarque “qui, en tant qu’évêque, est Primus inter pares, mais en tant qu’archevêque de Constantinople – le siège le plus ancien – est primus sine paribus”49 ». Devant les difficultés, la question de l’autocéphalie n’était pas à l’ordre du jour du concile panorthodoxe, réuni en juin 2016 en Crète. Le patriarcat de Moscou en était d’ailleurs absent50.
25Et ces débats sur la souveraineté entre les deux patriarcats prennent une coloration politique, bien au-delà de la communauté orthodoxe : la primauté ecclésiastique renvoie pour certains à la priorité qui devrait être donnée à la démocratie dans le monde. Jean-François Mayer cite ainsi des collaboratrices du Nixon Center, un think tank néoconservateur américain : « “Les Églises orientales devraient rompre avec Moscou” déclarent dans ce texte Zeyno Baran et Emmet Tuohy. Selon leur analyse, l’Église orthodoxe russe présente des traits nationalistes et se trouve fortement liée à un État […]. “En contraste, le patriarche œcuménique Bartholomée Ier, installé à Istanbul, a agi comme une voix de premier plan en faveur de la liberté et de la démocratie dans le monde orthodoxe”51. »
Le poids de la mémoire
26L’Église s’ajuste aux nouveaux contextes en se fondant sur des règles informelles. C’est ainsi par une interprétation ad hoc des normes ecclésiastiques par les hiérarchies, en particulier dans le contexte diasporique, ainsi que par des négociations menées à différentes échelles qu’évolue le paysage actuel du monde orthodoxe et que se développent les autocéphalies. Dans ces processus de négociations, le recours à l’autochtonie (« J’étais là avant ») ainsi que l’utilisation d’autres « gisements mémoriels52 » – l’éventuelle autocéphalie quelques décennies ou siècles plus tôt – jouent un rôle essentiel. Comme d’autres acteurs sociaux en Europe de l’Est, les Églises adoptent des stratégies historicisantes pour légitimer leur quête. En Ukraine, les Églises orthodoxes locales et l’Église gréco-catholique se présentent aujourd’hui comme les héritières légitimes (et souvent uniques) de la métropole de Kiev médiévale.
27Des politistes ont montré la place de cette logique de l’autochtonie dans la légitimation des droits politiques et le lien avec l’affirmation de particularismes identitaires. « Les conflits – politiques, agraires, commerciaux, voire religieux ou culturels – s’énoncent alors non plus sur le mode du “ôte-toi de là que je m’y mette”, comme dans les colonisations de peuplement classiques, mais sur celui du “ôte-toi de là que je m’y remette”53. » Sans doute pourrait-on multiplier les exemples. Cet appel de l’autochtonie résonne particulièrement dans des contextes de décolonisation, comme en Abkhazie. C’est ainsi que le prêtre Vissarion Apliaa justifiait en 2008 la quête d’indépendance abkhaze54 :
En 325, l’évêque Stratophile de l’éparchie de Pityus participe au premier Concile œcuménique de Nicée, confirmant le Symbole de notre foi. Il n’y avait alors aucune trace d’Église géorgienne et encore moins d’Église moscovite. Il y avait les patriarcats de Jérusalem, de Constantinople, d’Antioche et d’Alexandrie55.
Puis rien ne se passa. Grâce à Dieu, avec la Troisième Rome – j’entends Moscou – l’État abkhaze fut restauré. Et là où il y a un État, il y a une Église locale.
L’activité de l’Église abkhaze fut interrompue en 1795, avec la guerre russo-turque, et l’entrée de l’Abkhazie dans l’Empire russe en 1810. La Russie était alors synodale. Aujourd’hui, avec l’aide de Dieu, notre Église pourra être restaurée à travers le patriarcat de Moscou, et notre Église deviendra une Église du patriarcat de Moscou. Et si Dieu le veut, et si le peuple d’Abkhazie devient complètement orthodoxe, le patriarcat de Moscou nous octroiera peut-être un jour l’auto-administration locale, ce que nous appelons l’autocéphalie56.
28Sur le plan mémoriel, on se plaît à remonter au temps des apôtres et en particulier de saint André, sa présence étant attestée par un lieu de culte :
Parmi les témoignages indirects de la complète indépendance du catholicossat d’Abkhazie il y a la construction au IXe siècle à Pityus d’une église en l’honneur de l’apôtre saint André le premier appelé, l’installation dans la partie ouest de l’église d’une petite chapelle avec les tombes d’André et de Simon le Cananéen, mais aussi, dans la région de Pityus, d’une église en l’honneur de sainte Sophie. [Elles] témoignent de la prétention des Abkhazes à l’autocéphalie de leur Église. À cette époque, l’origine apostolique d’une Église – sedes apostolicæ – était une condition nécessaire pour obtenir l’autocéphalie. Ne pouvait devenir autocéphale qu’une Église sur le territoire canonique de laquelle un des apôtres avait prêché57.
29De façon générale, les proclamations d’autocéphalies se fondent sur des passés plus ou moins anciens d’indépendance ecclésiastique ou sur ceux des missions, ainsi que l’atteste l’histoire des autocéphalies en contexte soviétique, en particulier celle de la Métropole grecque-catholique orthodoxe russe en Amérique. Afin de justifier que ce soit Moscou qui la lui octroie, le métropolite Nikodim Rotov écrivait ainsi : « Le patriarcat de Moscou a le droit tant juridique qu’historique d’agir ainsi, puisque l’Église orthodoxe russe a formé son éparchie il y a plus de cent cinquante ans et que cette éparchie comprenait jusqu’en 1922 toute la population orthodoxe d’Amérique du Nord58. »
30
31La pratique de l’autocéphalie reste étudiée par l’Église orthodoxe elle-même sous un aspect historique très factuel et comme une notion canonique en dehors de toute contextualisation. Les théologiens analysent les conflits juridictionnels, mais la façon même d’envisager aujourd’hui l’autocéphalie, à l’aune des nouveaux défis du monde moderne, ne fait pas l’objet de leurs travaux. L’ecclésiologie reste d’ailleurs un domaine peu exploré par l’orthodoxie59. L’impossibilité d’un consensus entre les Églises avant le concile panorthodoxe autour de l’autocéphalie s’explique précisément par l’absence d’une réflexion sur la façon dont devrait, eu égard à la fois à la Tradition et au monde actuel, évoluer aujourd’hui l’organisation de l’Église orthodoxe. L’autocéphalie est de plus en plus devenue un mot-valise, un « mythe », pour reprendre la formule de Cyril Govorun60, une notion réinterprétée au gré des conjonctures politiques, par les politiques comme par les religieux. Et c’est en partie l’imprécision de la définition juridique du terme, son instabilité, qui a provoqué l’inflation des autocéphalies auto-proclamées. Le spécialiste de droit canon ne peut qu’observer les décalages, les distorsions par rapport à la conception première, elle-même relativement floue. Le politiste, quant à lui, analyse les évolutions et changements de l’organisation ecclésiale, alors même que l’Église orthodoxe n’a pas pris acte de ces mutations et qu’elle continue largement à nier les influences de l’histoire pour préférer insister sur l’immuabilité de la Tradition. Il étudie les liens entre les indépendances ecclésiastiques et les nouvelles catégories spatiales, observe les conflits mémoriels qui continuent à bouleverser le paysage ecclésial. Tout au long du XXe siècle, celui-ci a été traversé par les transformations radicales des relations entre pouvoirs religieux et politique, les changements géopolitiques et les tensions entre renaissance nationale et maintien d’un esprit impérial. Depuis la chute du Rideau de fer, l’orthodoxie connaît un nouveau défi : celui de « trouver un équilibre nécessaire et fructueux entre le global et le local dans la diversité des cultures orthodoxes d’aujourd’hui. Il ne s’agit pas d’assurer la supériorité de l’Église universelle sur l’Église locale ou l’inverse, mais d’élaborer et de mettre en valeur une stratégie qui permettrait de tenir compte des deux registres au niveau de l’ensemble de l’orthodoxie61. » Le principe de l’autocéphalie pourrait en effet être durablement ébranlé par le monde global.
Bibliographie
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L’« Église ukrainienne autocéphale » demande à être reçue dans le patriarcat de Constantinople, 12 juillet 2016, http://www.egliserusse.eu/blogdiscussion/L-Église-ukrainienne-autocephale-demande-a-etre-recue-dans-le-patriarcat-de-Constantinople_a4803.html
Абхазская православная церковь восстанавливает свою независимость, 15.09.2009, https://ria.ru/religion/20090915/185202014.html
Автокефалия Абхазской Церкви, dans Музей имени Андрея Рублева и его обитатели, http://expertmus.livejournal.com/40028.html?thread=161116
Варфоломей выполняет заказ по расчленению РПЦ, заявил митрополит Иларион, 3 ноября 2018, https://ria.ru/religion/20181103/1532097093.html
Где государственность – там и поместная Церковь. В Грузии неспособны понять суть православного вероисповедания, dans http://portal-credo.ru/, 28-08-2008, http://www.portal-credo.ru/site/print.php?act=authority&id=1028
Ежегодное послание Порошенко к Раде, 6 сентября 2016, https://112.ua/tag/ezhehodnoe-poslanye
Обращение Святейшего Патриарха Кирилла к полноте Русской Православной Церкви в связи с событиями на Украине, 21 февраля 2014 г., http://www.patriarchia.ru/db/text/3575247.html
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Рада попросила вселенского патриарха предоставить автокефалию православным Украины, 16 juin 2016, https://ru.tsn.ua/politika/rada-poprosila-vselenskogo-patriarha-predostavit-avtokefaliyu-pravoslavnym-ukrainy-649538.html
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Устав Русской Православной Церкви. Глава I. Общие положения, 5 февраля 2013 г., http://www.patriarchia.ru/db/text/133115.html
Notes de bas de page
1 Schmemann 1979, p. 98-99.
2 Wegener Sanderson 2005, p. 132.
3 Ramet 1988.
4 Werth 2006.
5 Dans sa phase initiale, le mouvement d’indépendance religieuse ukrainien est lié au mouvement slavophile russe. Voir Brüning 2016.
6 Bociurkiw 1982. Voir aussi Bociurkiw 1960.
7 Škarovskij 2003.
8 Sur la rivalité entre Moscou et Constantinople, voir Keleher 1997. Sur la question des frontières de l’Union soviétique, tant frontières idéologiques que frontières d’État, on lira avec profit Cœuré – Dullin 2007, en particulier leur introduction (p. 9-23). La question des Églises est néanmoins absente des analyses.
9 Cœuré – Dullin 2007, p. 17.
10 Voir pour plus de détails Nivière 2019.
11 L’Église orthodoxe russe fut dirigée par le locum tenens Serge de 1925 à 1943. Celui-ci en deviendra ensuite le patriarche jusqu’à sa mort en 1944.
12 Kalkandjieva 2015.
13 Bremer 2016.
14 Mayer 2002. Selon l’auteur, cette Église implantée en Amérique du Nord a connu un schisme dans les années 1980, avec une juridiction à Toronto et l’autre à New York.
15 Kostrjukov 2016. Outre les publications officielles dans Журнал Московской Патриархии et l’ouvrage de K. E. Skurat 1994, l’auteur s’est appuyé sur les informations fournies par Théodose Lazor, hiérarque à la tête de l’Église orthodoxe en Amérique dans un recueil consacré à Nikodim Rotov (Juvenalij 1998, p. 177-193), sur un article d’Alexandre Schmemann (1975), sur la revue Русско-американский вестник, sur les archives du séminaire de la Sainte-Trinité à Jordanville et celles du Département des relations extérieures du patriarcat de Moscou.
16 À ne pas confondre avec l’Église gréco-catholique ukrainienne, souvent appelée « uniate », dépendant de Rome.
17 Cité par Kostrjukov 2016.
18 L’Église a, à sa tête, Jan Spasjuk, ancien membre du clergé du patriarcat de Moscou. Hostile au président Loukachenko, elle s’est vue refuser l’enregistrement et sa situation est précaire. Le nombre de paroisses affiliées à cette Église n’est pas connu de façon certaine.
19 Kuzio 1997.
20 Le terme « autocéphale » avait disparu du nom de cette Église.
21 Le nom officiel de cette Église est « Église orthodoxe ukrainienne », ce qui a été source de nombreuses ambiguïtés, en particulier depuis 2014.
22 L’« Église ukrainienne autocéphale » demande à être reçue dans le patriarcat de Constantinople, 12 juillet 2016, http://www.egliserusse.eu/blogdiscussion/L-Église-ukrainienne-autocephale-demande-a-etre-recue-dans-le-patriarcat-de-Constantinople_a4803.html
23 Dans ce contexte, l’Église orthodoxe ukrainienne, dépendant de Moscou, a, elle aussi, cherché à affirmer son caractère national, insistant sur son statut d’Église « auto-administrée ». Certains de ses prélats se sont d’ailleurs montrés favorables à l’émergence d’une Église ukrainienne autocéphale.
24 En revanche, en décembre 2013, c’est un évêque russe qui a été placé à la tête de l’Église de Biélorussie.
25 Juraš 2018. Pour les statistiques, voir Релігійні організації в Україні (станом на 1 січня 2018 р.), 31 березня 2018, https://risu.org.ua/ua/index/resourses/statistics/ukr_2018/70440/
26 Toujours en 2017, 38,8 % se déclaraient appartenir à l’Église orthodoxe-patriarcat de Kiev, contre 17,4 % à l’Église orthodoxe-patriarcat de Moscou. Voir Gorevoj 2017.
27 Le Parlement ukrainien s’est référé dans sa demande à Bartholomée Ier à l’affirmation par le patriarcat œcuménique de son autorité sur l’Église orthodoxe en Estonie en 1996, en Bulgarie en 1998 et en Slovaquie en 2014. Par ailleurs, il a insisté, d’une part, sur l’absence de confiance des Ukrainiens à l’égard de l’Église orthodoxe russe, d’autre part sur l’indépendance politique de l’Ukraine ainsi que sur sa culture identitaire et sur l’importance numérique des croyants appartenant à cette Église, suite aux conflits et aux transferts de paroisses. Voir Про Звернення Верховної Ради України до Його Всесвятості Варфоломія, Архієпископа Константинополя і Нового Риму, Вселенського Патріарха щодо надання автокефалії Православній Церкві в Україні, dans Відомості Верховної Ради (ВВР), 2016, n° 27, ст.528, http://zakon2.rada.gov.ua/laws/show/1422-19#n9. 649538.html
28 Ежегодное послание Порошенко к Раде, dans 6 сентября 2016, https://112.ua/tag/ezhehodnoe-poslanye
29 D’après un sondage effectué du 16 au 22 août 2018 par le Centre Razumkov et la fondation « Initiatives démocratiques » auprès de 2019 personnes de toutes les régions d’Ukraine sauf de Crimée et des territoires occupés des oblasts de Donetsk et de Lougansk, 35 % des personnes interrogées soutenaient la création d’une Église orthodoxe locale autocéphale, 19 % y étaient opposées, 33,5 % affirmaient que cela ne les intéressait pas et 12 % n’avaient pas d’opinion. Voir 35% граждан Украины поддерживают создание единой Поместной Православной Церкви- Центр Разумкова, dans Религиозно-информационная служба Украины, 7 сентября 2018, https://risu.org.ua/ru/index/all_news/community/social_questioning/72529
30 Варфоломей выполняет заказ по расчленению РПЦ, заявил митрополит Иларион, 3 ноября 2018, https://ria.ru/religion/20181103/1532097093.html
31 Voir le dossier Schisme 2019.
32 Telle fut la déclaration de Vissarion Apliaa, administrateur provisoire de l’éparchie autoproclamée autonome de Soukhoumi et d’Abkhazie : « Aujourd’hui, l’Église abkhaze s’est officiellement séparée de l’Église de Géorgie, rendant ainsi justice à l’histoire. Après la guerre entre la Géorgie et l’Abkhazie, nous (prêtres orthodoxes d’Abkhazie) nous avons plusieurs fois parlé de nous et nous nous sommes adressés à toutes les instances supérieures orthodoxes, mais toutes se sont tues parce qu’elles ne voulaient pas gâcher leurs relations avec l’éparchie géorgienne. […] Dans la mesure où l’éparchie de Soukhoumi-Abkhazie fut soumise en 1943 au catholicossat de Géorgie et le territoire d’Abkhazie joint de force à celui de l’Église de Géorgie, nous pouvons aujourd’hui déclarer notre indépendance. » (Apliaa 2009). Voir Rousselet 2018.
33 Gamcemlidze 2016.
34 Zabarah 2013. À côté de ce type impérial, hérité de plusieurs siècles, il distingue les Églises qui se sont structurées selon une logique nationale au XIXe siècle, qui se sont émancipées du patriarcat de Constantinople et qui ont acquis ce que l’auteur appelle un « principe ethno-confessionnel expansionniste », souhaitant éventuellement étendre leur juridiction au-delà des frontières politiques actuelles (l’Église de Roumanie, l’Église de Serbie, et avant la Seconde Guerre mondiale, l’Église de Bulgarie) ; et les Églises nées sur l’effondrement d’empires, qui ne sont pas reconnues et sont mues par un « paradigme stato-national non expansionniste » (Église orthodoxe du Monténégro, Église orthodoxe de Macédoine, Église orthodoxe ukrainienne patriarcat de Kiev).
35 Обращение Святейшего Патриарха Кирилла к полноте Русской Православной Церкви в связи с событиями на Украине, 21 февраля 2014 г.
36 Патриарх Кирилл сожалеет о распаде Советского Союза, dans BBC Русская служба, 11 ноября 2011, http://www.bbc.com/russian/russia/2011/11/111111_russian_patriarch.shtml
37 Устав Русской Православной Церкви. Глава I. Общие положения, 5 февраля 2013 г., http://www.patriarchia.ru/db/text/133115.html
38 Hilarion 2005. Sur le rapport du métropolite Ilarion à l’autocéphalie, voir Hilarion 2010. Voir Textes canoniques de référence, dans le présent volume.
39 Pour une compréhension de la catégorie de « monde russe », voir les travaux de Mikhail Suslov, par exemple Suslov 2017.
40 Bulekov 2009.
41 Основы социальной концепции Русской Православной Церкви, https://mospat.ru/ru/documents/social-concepts/.
42 Voir Payne 2007.
43 Pierson 2004, p. 147.
44 Selon le philosophe allemand, la souveraineté est un concept paradoxal : le souverain est dans l’ordre juridique puisqu’il est la source du droit, mais aussi en dehors de celui-ci dans la mesure où il peut décider de « situations exceptionnelles » dans lesquelles il s’abstrait du droit. La souveraineté n’est pas une alternative à la loi, mais le point de rencontre de l’exception et de la loi. « [E]st souverain celui qui décide de la situation exceptionnelle » (Schmitt 1988, p. 15.). Ce concept avait déjà été repris par Dan Ioan Mureşan dans son analyse de la position de Jérémie II lors de la création du patriarcat de Moscou. Voir Mureşan 2014.
45 Šiškov 2014, p. 207.
46 Florovsky 2001, p. 16.
47 Troickij 1948.
48 Position du Patriarcat de Moscou au sujet de la primauté dans l’Église universelle 2013.
49 Arnaudov 2014, p. 341. Il cite Elpidophoros 2014.
50 Les observateurs ont, à juste titre, mis en avant la rivalité de plus en plus affirmée entre Moscou et Constantinople. Mais d’autres points peuvent expliquer l’absence de Moscou en Crète. Un analyste russe, membre de l’Église russe, a ainsi souligné que la prise de décision conciliaire risquait d’ébranler la priorité du principe national de gouvernance sur les normes fixées au niveau international, priorité affirmée par l’Église comme l’État russes. Les dissensions ecclésiastiques, en particulier après la rencontre à Cuba entre le patriarche Cyrille et le pape, rencontre qui a fortement altéré la figure du premier au sein de la communauté orthodoxe russe peu encline à une ouverture œcuménique, ont fini de convaincre Moscou de ne pas participer à ce concile au contenu assez indigent.
51 Mayer 2005, p. 9-10. Il cite Zeyno Baran et Emmet Tuohy, An Unorthodox Orthodoxy, dans National Review Online, 15 mai 2005.
52 Mink – Bonnard 2010.
53 Bayart – Geschiere 2001.
54 Comme le rappelle Thorniké Gordadzé (Gordadzé 2001) : « En Géorgie, seuls sont autochtones les citoyens ethniquement géorgiens et, inversement, tous les autochtones sont géorgiens […]. Toutefois, une exception a été admise récemment : après la défaite des troupes gouvernementales en Abkhazie, les Abkhazes sont également considérés comme autochtones (avec les Géorgiens) dans “leur” région. C’est le seul argument “raisonnable” qui permette d’accepter l’autonomie abkhaze en Géorgie. Reconnaissant la qualité d’autochtone aux Abkhazes, les autorités géorgiennes ont par là-même admis le droit de ces derniers à leur propre organisation politique : une République autonome au sein de la Géorgie. »
55 Ce qui est également faux.
56 Где государственность – там и поместная Церковь. В Грузии неспособны понять суть православного вероисповедания, dans Портал-Credo.Ru, 28-08-2008, http://www.portal-credo.ru/site/print.php?act=authority&id=1028
57 Автокефалия Абхазской Церкви, dans Музей имени Андрея Рублева и его обитатели, http://expertmus.livejournal.com/40028.html?thread=161116
58 Kostrjukov 2016. Des articles retraçant les missions de Russes orthodoxes ont été publiés dans des revues académiques. Voir Grigorieff 1972. Le premier missionnaire Hermann a été canonisé.
59 Tel est le constat de l’un d’entre eux. Voir Kalaitzidis 2013.
60 Govorun 2009.
61 Makrides 2017.
Auteur
CERI, Sciences Po, Paris
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