Chapitre septième. La terre et les hommes de Sainte-Marie-Majeure
p. 211-243
Texte intégral
1Les documents conservés du Moyen Âge central nous font retrouver d’une manière très vivante et proche des faits l’histoire de la basilique en ce temps. Nous voyons en effet de quoi est constitué et comment est administré son patrimoine, quels hommes la desservent et composent son chapitre, quels sont ses amis, ses bienfaiteurs et ses dirigeants, à quelles familles et milieux ils appartiennent, et comment elle s’insère de cette manière dans le tissu économique et social de la Ville et dans le jeu complexe du gouvernement de l’Église locale et universelle. C’est l’objet du présent chapitre de mettre en évidence ces différents aspects de son histoire temporelle au cours du Moyen Âge central1.
I. – LE PATRIMOINE DE LA BASILIQUE
2Même si le patrimoine de Sainte-Marie-Majeure n’a pas été le plus important des basiliques romaines, il avait cependant au cours du Moyen Âge une consistance suffisante pour constituer la base sur laquelle le rôle de la basilique s’est affirmé et consolidé avec le temps dans la Ville et l’Église de Rome.
1. La bulle de Célestin III (4.1.1192)
3La bulle Pie postulatio du 4 janvier 1192, par laquelle Célestin III confirma les possessions et les revenus de Sainte-Marie-Majeure et concéda au chanoines l’usage perpétuel du palais attenant à la basilique, contient la liste la plus complète et la plus ancienne de ses biens et jette une lumière précise sur l’état dans lequel se trouvait son patrimoine à la fin du xiie siècle.
A. Le document
4Le pape confirma les biens de la basilique sur requête du chapitre, lequel avait fourni aux bureaux du Latran la documentation consistant en un inventaire et sans doute des pièces justificatives. L’ordre dans lequel les biens sont énumérés n’est pas celui d’une classification raisonnée, mais reflète sans doute la constitution de dossiers variés et successifs, comportant des retouches et des retours en arrière. La bulle fut adressée à Roland, archiprêtre de Sainte-Marie-Majeure, après avoir été rédigée par Gilles, cardinal-diacre de Saint-Nicolas in Carcere Tulliano, et signée par le pape et douze cardinaux. L’original était conservé aux archives libériennes avant d’être transféré dans le fonds de Sainte-Marie-Majeure à la Bibliothèque Vaticane, où il porte aujourd’hui la cote Cart. 64, perg.22. Il fut publié plusieurs fois partiellement, en entier par G. Ferri en 19042. Cette dernière édition, qui est mentionnée dans notre Régeste XXXIX et qui a été revue sur le manuscrit, servira à notre analyse et à la description topographique du patrimoine de Sainte-Marie-Majeure, mais au préalable à la description générale du document.
5Après les formules de protocole, sont indiquées diverses sortes de biens. Les biens immobiliers sont énumérés tout au long. Sont précisées les offrandes faites à l’occasion de fêtes déterminées. Le palais de Clément III, contigu à la basilique, est mentionné expressément. La liste commence par les biens proches de la basilique : « le cloître, avec les jardins, vignes et arbres, la pente de la montagne, les cryptes au-dessus de la fontaine et toutes les maisons voisines » (5).
6Suivent les quatre églises des monastères de Saint-Côme-et-Damien, Saint-André in Assaio, Saint-Laurent-Saint-Hadrien et Saint-André in massa Iuliana, qui entrèrent, avec leurs propres biens, dans le patrimoine de la basilique, quand leurs moines furent remplacés par des chanoines pour y assurer la prière des heures3. Ces biens, comme ceux de la basilique, se trouvaient à l’intérieur et à l’extérieur de l’enceinte urbaine. Parmi ceux de Saint-André in Assaio, figurent les « caminate »4 du temps où ses moines menaient la vie commune.
7Arrivé à ce point, le rédacteur de l’acte n’indique pas où cesse l’énumération des biens de Saint-André in Assaio et retourne implicitement à ceux possédés directement par la basilique. En effet, quand est mentionnée pour la deuxième fois l’église Saint-André (11), ce n’est pas pour continuer l’énumération de ses biens, mais pour donner un repère topographique de la chenevière5 occupée par Pierre Mancini. C’est pourquoi nous supposons que l’énumération des biens propres de la basilique reprend au paragraphe 11.
8De là au paragraphe 15, les biens sont indiqués sans ordre apparent à l’intérieur comme à l’extérieur de l’enceinte Aurélienne. Certains lieux-dits se trouvent sûrement hors les murs : ainsi l’Acqua Bullicante (12) ; d’autres, sûrement à l’intérieur, comme le « champ de Saint-Vit » et le « Cembro » (14). Avec la porte Majeure (15), le rédacteur mentionne deux autres portes, en dehors desquelles sont situés quelques biens, à savoir la porte de Saint-Pancrace et la porte Salaire (15-16).
9Il retourne ensuite en ville pour y citer une vingtaine de maisons (16-19), dont l’emplacement est souvent précisé par un anthroponyme : Petrus Leonardi, Petrus bubulcus, Nicolaus diaconus, Romanus Tiniosus, Paparones, Ionathas, Saxo de Duce, Paulus de Berta, Teofilattus, Elperinus de Surrentino, Vero, Petrus de Berardo, Iohannes de Mazzetto. D’autres le sont par des toponymes : in Subura, in Tribus Ymaginibus, in pede Silicis, in capite Silicis, iuxta claustrum S. Susanne, in trivio Mannarino.
10Avec le castellarium Salonis (19), nous sommes de nouveau dans la Campagne romaine le long de toutes les voies qui y conduisent depuis la Ville, mais il n’est pas toujours facile de localiser exactement les propriétés (19-28).
11De toute façon, après l’énumération des biens immobiliers et stables, le rédacteur passe aux revenus occasionnels. Il signale expressément les collectes des grandes fêtes de la Nativité et de la Résurrection du Sauveur. De ces offrandes, toutefois, le pape exclut expressément celles qui lui sont faites personnellement à l’offertoire de la messe et spécifie qu’il faut entendre par offertoire le temps qui suit la proclamation de l’Évangile et se termine au moment où il retourne à l’autel. En sont exclues aussi les redevances dues à certains officiers de la Curie aux mêmes festivités (29-30). Ces offrandes sont traditionnellement réservées (quod ibidem hactenus est servatum). Les autres sont donc pour la basilique.
12Avant les habituelles formules finales, sanctionnant les décisions des prédécesseurs, la dernière partie dispositive du document est réservée au palais construit par Clément III, qui a été, semble-t-il, l’occasion immédiate de l’acte pontifical de confirmation. Ultimum in executione quod primum in intentione, est un adage scolastique contemporain que le pape a ici respecté. Clément III (1187-1191) avait construit le palais quand il était encore évêque de Palestrina6. C’est pourquoi il semble avoir été l’objet d’un litige entre le nouvel évêque de Palestrina et le chapitre de Sainte-Marie-Majeure. Célestin III (1191-1198) intervint pour confirmer la décision de son prédécesseur qui avait déjà interdit aux évêques de Palestrina de se prévaloir « de tout droit » sur le palais et l’avait laissé aux chanoines « pour qu’ils en usassent librement pour toujours de la même manière qu’ils possédaient aussi leurs autres maisons » (31)7.
13Dans la même partie finale, est ratifiée une décision de Clément III. Celui-ci, des douze onces d’or offertes au Siège apostolique, en avait attribué trois à la basilique Vaticane et une à Sainte-Marie-Majeure. On peut penser que ce fut pour couvrir les dépenses occasionnées par les travaux qu’il avait fait faire dans le portique de la basilique libérienne8. Avec la confirmation de Célestin III, la concession occasionnelle de Clément III devient traditionnelle et constitue un droit pour Sainte-Marie-Majeure.
B. Le patrimoine
14On peut faire une première observation sur les biens stables de la basilique, tels qu’ils sont énumérés dans la bulle de Célestin III. Si l’on compare son texte avec celui du Liber Pontificalis où est reproduite la dotation de la basilique au ve siècle, quand elle fut consacrée par Sixte III, aucun bien de l’Antiquité Tardive n’est reconnaissable dans le document médiéval. Cela ne veut pas dire qu’aucun bien du temps de sa fondation ne soit resté à la basilique pendant le Moyen Âge, mais signifie seulement que nous ne pouvons pas les identifier. En sept siècles, les appellations ont pu changer, non seulement d’orthographe, mais aussi de fonction, autant dans la Ville que dans la Campagne romaine. C’est selon cette même distinction que les biens de la basilique sont énumérés dans la bulle de Célestin III.
Le noyau des origines
15Le noyau primitif des possessions est formé en ville par les biens qui entouraient la basilique à ses origines. Les rues qui la cerclent de toute part aujourd’hui n’existaient pas alors et l’édifice cultuel n’était accessible, d’un côté, que par le vicus Suburanus qui tournait autour de Sainte-Praxède et se repliait vers la façade de Sainte-Marie-Majeure, de l’autre côté, par l’escalier (ad gradatas) voisin de l’abside. La fontaine et les cryptes devaient aussi se trouver là où, du plateau méridional de l’Esquilin, descendait la « pente abrupte du mont » (costa eiusdem montis). On y accédait moyennant cet escalier. Au nord, en revanche, se trouvait le cloître avec les jardins, les vignes, les arbres qui pouvaient s’étendre jusqu’à l’endroit où était située au xvie siècle la villa Montalto, résidence privée du pape Sixte V9.
Les monastères
16Les monastères desservants de Sainte-Marie-Majeure l’entouraient en forme de couronne : Saint-André in massa Iuliana se trouvait entre la basilique et Saint-Vit, Saints-Côme-et-Damien à l’angle nord-ouest de la basilique, Saints-Laurent-et-Hadrien sur son flanc méridional, Saint-André in Assaio sur la place de l’obélisque à l’ouest10.
17Les biens qui leur avaient été assignés devaient se trouver dans la même zone environnante. Nous savons que les jardins dépendant des Saints-Laurent-et-Hadrien étaient in regione tertio11 et ceux de la massa Iuliana commençaient au clivus Suburanus et s’étendaient vers Saint-Vit12. Or, tout le quartier abondait en jardins, vignes, chenevières, arbres et présentait un aspect champêtre qui s’est conservé dans les fresques de la Bibliothèque Vaticane en 1585-159013. Des champs semblables s’étendaient du côté des thermes de Dioclétien. De même le Castro Pretorio était devenu un vaste espace planté de vignes, avec une petite église en l’honneur des Quarante martyrs de Sébaste14. D’autres vignes sont signalées sur l’antique Merulana, qui de l’angle sud-ouest de piazza Vittorio (Cembro au Moyen Âge) allait droit vers Saint-Jean de Latran ; de même dans le carrefour (trivium Mannarinum) qui conduisait à Porta Pia. Près de Saint-Vit s’étendait le champ homonyme sur le lieu de l’antique campus Esquilinus. Sainte-Marie-Majeure n’était donc plus dans la zone densément peuplée de l’Antiquité Tardive, mais était habitée au Moyen Âge surtout par des moines et des moniales.
Maisons et terres voisines
18Peu nombreuses sont les maisons de la basilique, signalées dans son voisinage. Sont nommées celle de Spizzatus non identifiée ; trois petites maisons avec bain au-delà de Saint-Vit15 en direction de l’enceinte ; une autre avant d’arriver à piazza Vittorio ; une autre encore près de la tour de Pierre Rubei ou Rossi (14)16 ; les trois maisons des Paparoni qui se trouvaient à l’emplacement de la place de SainteMarie-Majeure devant la façade de la basilique. Plus nombreuses étaient les maisons libériennes des bas quartiers de la Ville. Dans la Subure, le quartier le plus proche de la basilique, sont expressément localisées par la bulle pontificale quatre maisons de grands aristocrates romains : Paul de Berta, Théophylacte, Elperin de Surrentino17. D’autres, Saxo de Duce, Pierre [fils] de Bérard, habitaient là, au pied et en haut de la via dei Selci qui allait de la Subure à Sainte-Marie-Majeure. La maison des Trois Images, qui appartenait à Jonathas, se trouvait sur la pente nord de la hauteur de S. Pietro ai Vincoli (18)18. Plusieurs fois est aussi nommé le Mons super Aves ou super Avium (6. 7)19, dont l’appellation est très probablement une déformation de Super Agium20, lieu-dit où la légende de la Neige marque l’emplacement de la basilique.
La Campagne romaine vers l’est
19En revanche, les biens de la Campagne romaine sont généralement plus dispersés. On en donnera une idée générale selon les quatre directions astronomiques. Là cependant où ils se concentraient davantage, c’était en dehors des portes de l’enceinte les plus voisines de la basilique. De la porte Tiburtine ou Saint-Laurent bifurquaient les voies Tiburtine et Collatine, de la porte Majeure ou Labicane, les voies Prénestine et Labicane. Nous commençons par ces routes notre tour dans la Campagne romaine à la recherche des biens libériens.
20Ils étaient nombreux sur la Tiburtine, mais n’y formaient pas de grandes propriétés. Mont Saint-Hippolyte était la hauteur sous laquelle avait été creusée la catacombe homonyme et sur laquelle Sainte-Marie-Majeure possédait un terrain à vigne (12)21. À proximité étaient situés les lieux-dits Aqua Tutia et Bacculi, mentionnés dans la bulle de 1192. L’Aqua Tutia figurait déjà dans des actes de 987-999, Mons Hippolyti en d’autres de 1184-1198, Bacculi en d’autres encore, de 987 à 147522. La Mola Barbara23 était aussi dans le secteur de la Tiburtine. C’est une des propriétés qui reparaît le plus souvent dans l’acte de Célestin III (7.11.1226) à propos des biens de Saint-André in Assaio, de Saint-André in massa Iuliana et de ceux qui dépendaient directement de la basilique. Elle figure dans les actes depuis 950. Dans l’un d’eux, du 8 octobre 1396, Mola Barbara est placée au voisinage immédiat du ruisseau Aqua Bullicans24, qui courait du sud au nord avant de se jeter dans l’Aniene. Entre l’Aqua Bullicans et la Mola Barbara, Célestin III mentionne un ruisseau et des chenevières ad Formellum (12). Au VIIe mille se trouvait le casale Silva Maior, qui comportait une église en l’honneur de Saint-Jean : Célestin III signale l’une et l’autre (14.15)25. Dans le territoire de Tivoli (Tibur) enfin se trouvait un lieu nommé Africanus, déjà mentionné dans les actes de Sainte-Bibiane du xie siècle et qui finira par être incorporé aux biens de Sainte-Marie-Majeure26.
21Le long de la voie Collatine s’étendait la propriété la plus importante de Sainte-Marie-Majeure. Elle s’appelait Salone et se trouvait au VIIIe mille avant d’arriver à Lunghezza27. Elle avait une superficie de 1103,98 ha. et correspondait à l’antique fundus Lucullianus. Frontin le cite comme lieu des sources qui confluaient dans le rivus Herculaneus et fournissaient les aquae Virgo, Appia et Augusta. On traversait le ruisseau d’Hercule pour arriver là où s’élève aujourd’hui le casale Salone et à l’aqueduc appelé pont de Nona28. L’aqueduc portait l’eau au-dessus de la vallée. Une seule fois, Salone reçoit un nom alternatif, mons Incantatus (7). Le « Mont Enchanté » faisait partie du latifondo et a donné occasionnellement son nom à l’ensemble. La bulle de Célestin III y situe : « le castellare29 de Salone avec la montagne où s’élevait la tour des fils de Pierre Arcione..., le Cerqueto qui descendait vers Salone, de l’autre côté de la route la « pedica »30 Crunialetum, la vallée de Sassa, le mont Seculorum avec la vallée Ortiano31, la tour neuve avec la terre de Porcile32, la vallée Majeure » (1922 passim). Un document antérieur y ajoute la « pedica » de Bella Monaca33, que Sainte-Marie-Majeure acquerra le 7 mai 1219. Plus tard, le 21 mars 1298, Boniface VIII concéda à Sainte-Marie-Majeure la possession de ce que le cardinal Jacques Colonna, déposé par lui, possédait à Salone et qu’il avait l’intention de laisser à la basilique par testament34.
22Or, en 1123, c’était Sainte-Marie du Transtévère qui possédait encore 25 parts du domaine. C’est donc dans les trois derniers quarts du xiie siècle qu’ils passèrent à Sainte-Marie-Majeure. Salone fut donné en fief, au moins partiellement, aux Arcioni qui y édifièrent une tour à leur nom. C’est pourquoi il fallut entre eux et la basilique un compromis, signé le 3 mars 1176, sur la division des revenus35. Plusieurs années auparavant déjà, la « pedica » Crunialetum avait été prise en location par leur aïeul Étienne. Plus tard, Jean Arcione désigna la basilique par testament du 27 mars 1288 héritière partielle des droits qu’il y possédait (Reg. L, 2).
23La porte Majeure figure dans le document de Célestin III comme repère du lieu intra-urbain dit Chamarti (14) et de la tour voisine Castellum (15). Hors les murs, à Tor dei Schiavi sur la Prénestine, s’élève un monument funéraire antique qui donna son nom à une importante famille romaine, dont un membre, Léon de Monumento, joua un rôle dans l’élection de Clément III en 118736. Au xiiie siècle, divers biens de Sainte-Marie-Majeure sont signalés à cet endroit37. Dans des documents de 1217 et 1236 il est question de jardins dans la localité voisine Ad Quartum38. Ces jardins sont donnés en location aussi bien par Sainte-Marie-Majeure que par Étienne Paparone39. Tomassetti y localise encore un terrain dont il est question le 25 juillet 1279 au lieu-dit Cesaranum ad criptam Ciceram. Le terrain était situé entre les biens de Sainte-Anastasie, de Sainte-Marie-Majeure et le rivus Cesaranus40. Or, une cripta Ciceronis se trouve aussi dans la bulle de Célestin III (26). Ce pourrait être la cripta nommée ailleurs Cicera.
24L’imbrication des biens de Sainte-Marie-Majeure avec ceux de l’aristocratie romaine suggère non seulement des intérêts communs, quelquefois conflictuels, mais encore de continuels échanges entre eux. Ainsi Jacques, fils de feu Nicolas de Archionibus, chanoine libérien, laisse par testament des biens à la basilique dans les mêmes deux lieux41.
25Il n’est pas possible d’identifier avec l’un d’eux la possessio Marmorata, territurio Prenestino, que Sixte III avait donné en propriété à la basilique par lui inaugurée au ve siècle (Reg. II,1). Tout de suite après Subiaco pour qui vient de Rome, est située Affile où Sixte III avait donné à la basilique la possessio Celeris (Reg. II,1). On ne sait si elle était encore parmi ses biens à la fin du xiie siècle.
De la voie Casiline au Tibre
26La voie Labicane42 tire son nom de l’antique Labicum qui est à 3 km avant Valmontone. Sur son parcours se trouvent Zagarolo et Colonna, fiefs de la famille dont le nom est celui du deuxième lieu. Sainte-Marie-Majeure y possédait aussi des biens. Un des plus importants s’appelait ad Cancellatam (Reg. XXXV,1). Le nom lui venait précisément de l’enceinte de la place d’armes des Equites Singulares. L’enceinte venait jusqu’au côté gauche de la voie Latine, alors que les Equites avaient leur cimetière au iiie siècle sur la Labicane Ad duas lauros, où fut ensuite creusée la catacombe des Saints-Marcellin-et-Pierre. Déjà le 15 janvier 1153, un archiprêtre de Sainte-Marie-Majeure nommé Mathieu avait donné une terre en location perpétuelle à Romain, fils de Jean Adultérin43.
27Il est plus difficile de situer la pedica S. Angeli de la bulle (27) en raison des localités diverses du Latium méridional qui portent cet hagio-toponyme44.
28Sur la voie Tusculane, nous n’avons pas identifié de biens libériens. Au début de la voie Latine, en revanche, était le lieu-dit ad Maranam, aujourd’hui Mariana, où Sainte-Marie-Majeure possédait « une pedica et ses limites » (22). Déjà en 1153, un acte d’Étienne, fils de Pierre Arcione, mentionnait une terre in loco qui vocatur Campora sive planum de Marana45. Or, la localité de Campora est mentionnée par Célestin III parmi les biens dont la possession était confirmée à Sainte-Marie-Majeure (24). Tomassetti fait dériver le nom de Marana du fundus Marianus antique et décrit le cours du ruisseau qui prenait sa source dans la vallée Molano, mais ne prenait consistance qu’arrivé dans le bassin des Squarciarelli46, où il recevait l’apport de sources diverses comme la Giulia, et coulait ensuite dans les vallées Marciana et Preziosa de Grottaferrata en direction de Morena et de Casalotto47.
29Après cette première localité de la via Latina, on rencontre, aujourd’hui encore, celle de Quadraro, où Jacques Arcione, chanoine libérien, possédait un tiers du casale homonyme. Par testament de l’an 1309, il en prédisposa la vente pour couvrir les dépenses qu’occasionnenerait la construction d’une chapelle pour sa famille en l’honneur des SS. Jean et Jacques à Sainte-Marie-Majeure et pour subvenir à l’entretien des chapelains prévus pour dire des messes pour le repos de son âme (Reg. LIV,1).
30À première vue, il faut rapporter à la voie Appienne les biens que le document de 1192 énumère sur le territoire d’Albano. En réalité, certains se situent sur ou à proximité d’autres voies consulaires. Célestin III énumère les suivants : In territorio Albanensi in loco qui dicitur Walliscaia pedicas quattuor cum pratis, stirpariis et rivo qui vocatur Ianuarius (8)... in loco qui dicitur Cantarus petias tres vinearum (9)... in loco qui vocatur Suczanum vel Nocclanum tres petias vinearum ; in eodem territorio, [in loco] qui dicitur Silva maior octo petias vinearum ; iuxta lacum Albanensem et infra se terram quam tenent heredes Petri de Pagano (14-15). Or, si Suczanum ou Nocclanum n’ont pas été identifiés par Tomassetti, Cantharus, au contraire, est dit par lui localité du territoire de Marino entre les voies Appienne et Sévérienne, ce qui le met vers le sud, plus ou moins loin de la regina viarum48. Le mons Siccus (27-28) confirmé par Célestin III est sans doute l’actuel Monte Secco entre Albano et Velletri.
31À la place de Walliscaia, il faut lire Vallis Caia, qui se retrouve au XVIIIe mille de la voie Ardéatine. La vallée de ce nom va du nord-est au sud-ouest en direction d’Ardea et est située par Célestin III sur le territoire d’Albano (8). Un casale de l’Ardéatine, qui porte aujourd’hui le nom de Valle Caia, conserve donc le toponyme ancien49.
32Les salines de Rome se trouvaient des deux côtés de l’embouchure du Tibre au terme des voies d’Ostie et de Porto. Leur exploitation est ancienne et le commerce du sel avec les peuples de l’intérieur de la péninsule donna son nom à la voie Salaire50. C’est là qu’il faut chercher celles qu’indique l’acte de Célestin III parmi les propriétés de Sainte-Marie-Majeure, l’une in campo Salinarum où se trouvait la « pedica » Cannapare (27), l’autre in Baccari (28) ou in Baccani, comme on lit dans des documents du xie siècle. La basilique y possédait un campus maior51. Le même « champ majeur » est aussi appelé pedica Samaritana ou fila Salinaria52 dans les premières décennies du xiie siècle. Dans un acte du 1er de l’An 1168, la pedica Baccaris est située in campo Ostiensi53.
Au nord du Tibre jusqu’à la voie Nomentane
33Sur la voie Aurélienne et en dehors de la porte Saint-Pancrace une vigne de Sainte-Marie-Majeure était localisée près de l’église homonyme du saint et une autre iuxta Pipinam (15). Ce dernier toponyme n’a pas été identifié.
34Dans la région comprise entre les voies Aurélienne et Cassia, la bulle de Célestin III situe d’autres propriétés libériennes. Tout de suite au nord de Castel di Guido, sur la route qui va de Maccarese à Sainte-Marie de Galeria, se trouvent les deux localités de Testa di Lepre di Sopra et di Sotto où la basilique possédait quatre « maggesi » (27)54. Selon Tomassetti, les deux domaines avaient ensemble une superficie de 1546 ha, qui étaient en grande partie propriété des Normanni55. A l’écart de la route qui unit Bracciano à Cerveteri, Castel Giuliano est appelé castrum Iullanum dans notre document (27). À en juger d’après les dix « roubles »56 de production agricole par semestre que la terre rendait en 1200, Tomassetti estimait sa population à environ 800 âmes57. La basilique de l’Esquilin y possédait douze maisons prises en location à un membre de la famille de Tusculum (27). À moitié chemin entre la Cassia et la Flaminia, près de Malianum Pecoraricium, aujourd’hui Magliano Romano, se trouvait le fundus Anzanus, qui appartenait à la basilique (27)58. Dans la localité de Rotuli, que Tomassetti localise entre Sutri et Nepi59, Sainte-Marie-Majeure possédait, outre la Silva Fossarum, une « pedica » répartie en trois unités appelées Cerquetus, Murata et Saccus, plantée de vignes (22-23).
35Sur le lac de Bracciano, une charte libérienne du xie siècle situait « une grande vigne dans le territoire de Castello », dont une note peut-être contemporaine, inscrite au verso du feuillet, précise qu’elle était « d’Anguillara ». En 1060, Étienne Paparone la prend en location ; en 1163, les ayant-droit la restituent à l’abbesse de Sainte-Bibiane60, avant qu’elle entre dans le patrimoine libérien sous Eugène IV (1431-1447)61.
36Pour achever le tour de la Campagne romaine, il faut parcourir le secteur nord-est où passent les voies Flaminienne, Salaire et Nomentane. Sur la Flaminia, à Grotta Rossa, anciennement Saxa Rubra, s’élevait l’église Saint-Leucius. Celle-ci desservait un grand domaine laissé par testament au pape Hadrien (772-795) qui en fit une domusculta, c’est-à-dire une grande exploitation agricole62. À une date inconnue Sainte-Marie-Majeure y eut droit à deux « maggesi » de produits de la terre (25). Non loin du Tibre et de la Salaria, se trouve le site perché de Stimigliano. Selon Célestin III, Sainte-Marie-Majeure possédait sur son territoire « une maison, des jardins, des chenevières et des oliveraies, exploités par Odon de Stimigliano » (20). En 1258, Alexandre IV donna en fief les biens et les droits que l’Église y avait à Pietosus et à ses fils, qui jurèrent fidélité au Saint-Siège en 127863.
37Enfin, sur la voie Nomentane, entre le IIIe et le IVe mille, il y avait, d’une part le tenimentum casalis S. Marie Maioris qui dicitur S° Basileo64, d’autre part le casale quod vocatur Fresclari, sur lequel Jacques Arcione avait des droits qu’il laissa par testament à la basilique65. Puis, au VIIe mille, c’est-à-dire près de la catacombe de Saint-Alexandre, dans un lieu dont le nom a partiellement disparu dans le parchemin par suite de l’usure et dont on lit encore Aug..., se situait un bien libérien malheureusement inidentifiable66. Un peu plus loin, à Monte Gentile, Jean Capocci Mezzopane laissa à la basilique un revenu annuel de vingt roubles de grain67.
2. Quelques observations générales
38La localisation de ces biens sur la carte est suffisamment assurée pour donner lieu à quelques observations sur leurs caractéristiques que nous résumons.
39Il faut en répéter une qui a déjà été faite au cours de l’analyse. Il n’a pas été possible de retrouver sûrement dans la bulle de Célestin III les biens attribués à la basilique par Sixte III. D’autres en revanche ont pu être identifiés avec certains de la donation de Flavia Xanthippè, que nous avons signalés en passant : les ff. Orcianus, Casa Porcinare, Casa Basili. S’il donc la continuité dans le patrimoine libérien est vérifiable pour des biens du viie au xiie siècle, il se peut qu’elle existe aussi pour d’autres où la vérification n’est pas possible. Quoi qu’il en soit, il reste à faire quelques autres observations découlant uniquement de l’analyse interne et concernant la nature des produits agricoles et les divers types de propriétés.
40Dans la bulle se rencontre le terme de ferraginalia qui désigne les terres cultivées alternativement pour la production du grain d’hiver (froment, seigle, orge) et les légumineuses de printemps (vesces, gesses, ers, orobe)68. Ce qui n’exclut pas qu’il y en ait aussi là où le document parle seulement de petia ou de pedica terrae.
41Prédominante était au contraire la vigne, qu’elle fût en pleine production (il était alors question de vinea) ou temporairement en jachère (dans ce cas elle est appelée vineale). La vigne était partout présente, en ville comme à la campagne. Effectivement, Toubert a relevé son omniprésence dans le Latium médiéval69. Nous pouvons ajouter qu’elle l’était aussi en ville. Une observation analogue peut se faire au sujet des jardins. Il y en avait à l’intérieur et en dehors des murs, pourvu qu’il y eût de l’eau. Ils sont explicitement mentionnés près de Sainte-Marie-Majeure, mais aussi dans la Subure, près des rues in Selci et Merulana. Il y a encore des champs de chanvre que la basilique possédait plutôt en ville qu’à la campagne. Le document de Célestin III les signale avec les jardins des Saints-Côme-et-Damien, parmi les biens de Saint-André in Assaio et de Saint-André in massa Iuliana, parmi ceux que Sainte-Marie-Majeure avait dans les thermes de Dioclétien, ad Formellum, près du cloître de Sainte-Susanne, puis à la campagne à Stimigliano et Acqua Bullicante. Sont en revanche exceptionnelles les oliveraies : il y en a dans les biens de Saint-André in massa Iuliana et dans ceux de Sainte-Marie-Majeure à Stimigliano.
42Il s’agit donc d’une agriculture assez diversifiée selon qu’elle était en ville ou en dehors. La culture du grain convenait aux propriétés d’une certaine importance qui se trouvaient à la campagne, surtout à cause du rapport généralement bas de la production proportionnellement à la surface cultivée. Une pièce de vigne, au contraire, semble avoir fait partie de n’importe quelle propriété, petite, moyenne ou grande, à l’intérieur ou à l’extérieur des murs70. On en conclura que les propriétés urbaines étaient généralement petites et que les grandes étaient rurales. La règle n’exclut pas de grandes propriétés en ville et de petites à la campagne. En effet, il y avait des quartiers entiers de la ville qui étaient aux mains de familles déterminées de même que hors les murs il y avait place pour des propriétés de petites dimensions, souvent données en location. Dans la région ad Quartum les jardins mitoyens étaient loués à des locataires différents et la tendance existe de les multiplier par division et non pas de les regrouper par achat ou échange. Toutefois, les très grands domaines sont exceptionnels parmi les biens de Sainte-Marie-Majeure. Nous ne pouvons en identifier que deux avec plus ou moins de certitude : Salone à l’est et le fundus Anzanus au nord de Rome. Pour le premier, nous en sommes sûrs, car nous en connaissons la superficie ; nous le supposons pour le second à Magliano Pecoraricio, aujourd’hui Magliano Romano.
43La coexistence, dans le patrimoine libérien, de propriétés grandes, mais exceptionnelles, et de nombreuses petites propriétés nous suggère une première hypothèse sur leur origine. Les petites proviennent de donations et legs, parfois d’échanges et achats. Nous l’apprenons à l’occasion. Nous avons rencontré le cas de Saint-Leucius71 qui appartenait à Saint-Pierre et où Sainte-Marie-Majeure avait quelques intérêts. Or, à ce propos nous lisons l’information suivante dans le Liber Pontificalis :
Au temps du pape Hadrien, le primicier Mastallus, du consentement de ses héritiers, laissa au pape [par testament] les terres, les maisons et l’église de Saint-Leucius, situés au Ve mille de la via Flaminia... [Le pape] en fit une domusculta qu’il attribua à Saint-Pierre, après l’avoir agrandie avec l’héritage d’un certain Pascal qu’il échangea avec les héritiers d’une certaine Lucie72.
44Les intérêts de Sainte-Marie-Majeure y étaient limités à « deux terrains en jachère avec leurs confins » (25). Dans ce cas donc, encore que l’usufruitier principal en soit resté Saint-Pierre, une parcelle avait été détachée du fonds à l’usage de la basilique libérienne, le propriétaire du tout étant de toute façon le Siège apostolique. Il se peut donc que les deux latifundia libériens ait eu une origine semblable à celle de Saint-Leucius et proviennent de donateurs défunts qui avaient laissés leurs biens à l’Église romaine. L’hypothèse, étant donné la donation de Flavia Xanthippè, n’est pas une fantaisie.
45À ce premier problème que nous ne sommes pas en mesure de résoudre, nous en ajoutons un second que nous nous contentons pareillement de formuler. Quelle était la situation juridique des biens de Sainte-Marie-Majeure ? En avait-elle le ius utendi et abutendi que le droit romain attribuait au propriétaire ou en avait-elle seulement l’usufruit ? Si la basilique n’en était qu’usufruitière, le Saint-Siège en était le propriétaire juridique. Quelle que soit la situation exacte de ces biens, de ce deuxième problème en naît un troisième, puisque la basilique n’exploitait pas directement son patrimoine, mais à travers des personnes qui en louaient les parties par des contrats de durée variable. Nous connaissons le cas d’Étienne Paparone qui avait traité pour deux contrats successifs de chacun dix-neuf ans en 1217 et 123673. Ce sont des contrats de durée relativement courte, en comparaison de l’emphytéose dont avaient bénéficié les Paparoni à Salone et qui les avaient fait agir, par la construction d’une tour, en quasi-propriétaires. Il fallut alors un long processus (car nos documents ne parlent pas de procès) de récupération74. Nous savons aussi, comme nous l’apprennent les statuts capitulaires75, que la subsistance des chanoines était assurée en principe par l’exploitation des terres qui leur étaient attribuées au sort par roulement. De cette manière, ces divers types de gestion pouvaient conduire à long terme à une expropriation de fait. C’est une caractéristique du système féodal auquel Sainte-Marie-Majeure n’échappa point.
II. – LES HOMMES DE SAINTE-MARIE-MAJEURE
46Caelum caeli Domini, terram autem dedit filiis hominum, chantaient aux vêpres dominicales les chanoines de Sainte-Marie-Majeure76. Ils absolvaient ainsi leur devoir religieux pour le bon fonctionnement de la basilique. Mais qui étaient ceux qui assumaient la gestion temporelle de leurs terres ? L’étude du patrimoine nous a aussi mis en présence de ces hommes. Les uns sont directement chargés de cette gestion ; d’autres, en gérant leur propre patrimoine, entrent en contact, parfois en conflit, avec les intérêts de la basilique ; d’autres encore contribuent à l’enrichir par leurs dons et leurs legs. La proximité des biens a pour conséquence le croisement des intérêts et la multiplication des relations humaines. Nous chercherons à en débrouiller le chassé-croisé avec une prosopographie de Sainte-Marie-Majeure.
1. Le clergé de Sainte-Marie-Majeure
47Les premières données prosopographiques concernent le clergé de la basilique.
A. Origine du chapitre libérien et données statistiques
48Comme dans les autres basiliques romaines, le service religieux de Sainte-Marie-Majeure était assuré par un clergé relativement nombreux. Avec le temps, il est vrai, l’organisation de ce clergé avait subi des modifications. À l’origine, le pape y présidait en personne les offices stationnaux, alors que les prêtres des titres voisins y assuraient l’administration des sacrements aux jours nonstationnaux et les moines des monastères voisins y récitaient la prière des heures.
49Les capitulaires carolingiens avaient réformé et règlementé de diverses manières la vie commune du clergé. Mais peu après se fit jour et se développa un processus inverse et complémentaire de cléricalisation des moines et de régularisation du clergé qui fut à l’origine des chapitres des cathédrales et des autres églises importantes. Cette évolution n’est pas toujours saisissable à ses débuts.
50C’est le cas particulier de Sainte-Marie-Majeure où l’existence d’un chapitre n’est documentée qu’à partir du xiie siècle à travers la personne de ses membres et au xiiie grâce aux statuts capitulaires qui nous sont heureusement parvenus. L’étude de ces derniers est réservée au chapitre suivant, alors que dans le présent nous nous limitons aux documents d’archives qui nous ont servi à l’examen des biens de la basilique.
51Grâce à eux, il est possible de mettre en évidence aux xiie et xiiie siècles l’émergence du chapitre dans la vie de la basilique et la personne de ses membres les plus importants. Pour la clarté de l’exposé, les membres connus du chapitre sont d’abord présentés en tableau synoptique, avant que certains soient ensuite l’objet d’un traitement particulier.
B. Les archiprêtres
52Les données que fournissent les documents sont discontinues dans le temps et incomplètes quant aux fonctions. En tenant compte de ces lacunes, les archiprêtres de la basilique sont attestés à partir de 1153, souvent par les seules chartes libériennes, quelquefois autrement. Les chartes de la basilique nous donnent les noms de Mathieu en 1153, de Rainier avant 1176, de Roland en 1192, d’Aston en 1244, de Romain en 125878.
53Le cas de Rainier, il est vrai, peut être l’objet de perplexités. Il est appelé quondam archipresbyter (feu archiprêtre) dans le document du 3 mars 1176, par lequel les frères Silvestre, Étienne et Jean Arcione restituent à Sainte-Marie-Majeure, représentée par Paul Scolari, alors archiprêtre, la terre de Crunialeto posita in Salona. Or, les trois frères, placés sous la tutelle de Jean de Pier Leone de Rainerio, sont mineurs et orphelins, car non seulement ils avaient pour aïeul le défunt Étienne, mais ils avaient aussi perdu leur père Pierre, décédé au temps de l’acte. Il en résulte que l’archiprêtre Rainier avait traité avec leur aïeul vers le milieu du xiie siècle. Si Rainier était alors archiprêtre de Sainte-Marie-Majeure, il ne doit pas être identifié avec un des cardinaux de ce nom connus en 1178-1183. Le seul qui pourrait être pris en compte serait un cardinal-diacre de Saint-Eusèbe en 1165. Mais cette possibilité n’est confirmée par aucun des documents dont nous disposons et reste donc une pure hypothèse, d’autant plus, comme nous le verrons incessamment, que vers le milieu de ce siècle aucun des archiprêtres libériens ne porte le titre de cardinal.
54La situation de l’archiprêtre Roland est la même, quand Célestin III lui confirme les biens de Sainte-Marie-Majeure le 4 janvier 1192 et qu’il figure dans deux autres actes libériens du 16 janvier et du 12 décembre 119379. Il ne peut s’agir en sa personne de Roland, cardinal-diacre de Sainte-Marie in Porticu, qui souscrit divers actes pontificaux en 1185-1187 et meurt en 1187, ni à plus forte raison de celui qui est cardinal-diacre des Saints-Côme-et-Damien et intervient dans les années 1150-115480.
55Qu’il y ait eu effectivement des archiprêtres de Sainte-Marie-Majeure qui au xiie siècle n’ont pas été cardinaux, nous est confirmé par le cas de Paul Scolari auquel, en sa qualité d’archiprêtre de la basilique, est restituée en partie la terre de Salone et avec lequel nous abordons la catégorie des archiprêtres attestés aussi en dehors du cartulaire libérien.
56Paul Scolari naquit à Rome dans le quartier de la Pigna et fut éduqué à Sainte-Marie-Majeure. Nous l’apprenons d’une bulle que, devenu pape sous le nom de Clément III, il adressa au chapitre : son texte ne nous est pas parvenu, mais nous en conservons la notice dans un inventaire de 1480. Le pape rappelle en effet qu’il avait été « nourri dans la basilique » et qu’en conséquence il lui laisse en usage perpétuel le palais attenant qu’il avait fait construire, ainsi qu’une once sur douze des offrandes faites à Saint-Pierre81. Célestin III s’y référa en 1192, quand il confirma les biens libériens82. Lorsque la terre de Salone fut restituée à Sainte-Marie-Majeure, les auteurs de la restitution s’adressent à lui en ces termes : vobis domno Paulo, S. Romane ecclesie subdiacono et archipresbitero venerabilis ecclesie S. Marie Maioris83. Un des intérêts de la restitution est donc de nous faire savoir, en passant, que Paul était alors « sous-diacre de la S. Église romaine et archiprêtre de Sainte-Marie-Majeure » et qu’il n’était ni prêtre ni diacre ni cardinal. Il ne fut créé cardinal qu’en 1179 au titre de la diaconie des Saints-Serge-et-Bacchus. Apparaît ainsi en pleine lumière un fait que nous pouvions supposer de Mathieu, Rainier et Roland, Aston et Romain, à savoir qu’aux xiie et xiiie siècles les archiprêtres libériens n’étaient pas prêtres ni tous cardinaux.
57Revenons à Paul Scolari. Il fut fait évêque de Palestrina par Alexandre III en 1180/81, mais ce fut auparavant, durant son archipresbytérat, qu’il entreprit d’édifier sa résidence à côté de la basilique. Or, si son successeur comme évêque de Palestrina émit des prétentions sur la propriété du palais, cela semble signifier que celui-ci fut terminé pendant l’épiscopat palestrinien de Paul Scolari et peut-être avec des revenus du diocèse suburbicaire. Ceci étant, on ne peut dire qu’étant encore archiprêtre de Sainte-Marie-Majeure, puis évêque de Palestrina, Paul Scolari avait destiné le nouvel édifice à servir de résidence pontificale ou on lui prête alors des ambitions ou une préscience sur son avenir qu’aucun autre indice ne nous permet de lui attribuer84.
58Il est vrai que, déjà avant l’élection de Grégoire VIII, pape du 21 octobre au 17 décembre 1187, Paul Scolari aurait été élu à la place de celui-ci, si Aubri de Trois-Fontaines, évêque d’Albano, n’avait été farouchement opposé à toute forme d’accommodement avec le patriciat romain en vue de ramener à Rome la Curie que les désordres de la Ville en avaient éloignée. Si Paul Scolari fut élu après Grégoire VIII, la raison en fut double. D’abord, Aubri, légat en France, était absent de Pise où les cardinaux étaient réunis en conclave. L’était pareillement Paul Scolari lui-même, tombé malade chez les moines de Saint-Paul à Ripa d’Arno près de Pise. En deuxième lieu, ce dernier eut un partisan efficace et capable dans la personne de Léon de Monumento, représentant du patriciat romain, préoccupé de ramener les Romains à de meilleurs sentiments par l’élection d’un pape disposé à la conciliation. Tel était effectivement, au jugement des Epistulae Cantuarienses, Paul Scolari qui prit le nom de Clément III :
Il est incorruptible, bien que romain. Animé par un grand souci de justice, il ne précipite jamais ses sentences et frappe seulement après avoir examiné la cause à la lumière de la raison et découvert la solution la plus juste85.
59Effectivement, l’élection de Clément III facilita le retour pacifique de la Curie à Rome.
60Pierre de Saxo, en latin Petrus Saxo ou de Saxonis, était originaire d’Anagni. Comme archiprêtre de Sainte-Marie-Majeure, il reçut des recteurs de la Romana Fraternitas confirmation du paiement annuel de huit sous de Provins, au titre de presbyterium, pour la participation du chapitre libérien aux Litanies Majeures du 25 avril86. Encore sous-diacre et chapelain pontifical, il avait été envoyé par Innocent III au début du xiiie siècle à Terracina pour y rétablir la paix dans les esprits. Cardinal-prêtre en 1205/06 du titre de de Sainte-Pudentienne, il signa divers actes pontificaux et remplit plusieurs fonctions et légations pontificales du 4 mai 1206 au 31 mai 1219. En 1217 il fut aussi vicaire du pape à Rome. Il mourut fin mai 121987.
61Sur Ottobon Fieschi, qui devint pape sous le nom d’Adrien V en 1276, nos disposons de renseignements beaucoup plus fournis. Génois de naissance et descendant des comtes de Lavagna, il était neveu d’Innocent IV qui le créa cardinal-diacre de Saint-Hadrien. Clément IV l’envoya légat en Angleterre en 1265-1268 pour apaiser les dissentiments entre Henri III et ses barons, recueillir les décimes et prêcher la croisade. Il fut élu pape à Rome le 16 juillet 1276 grâce à l’appui de Charles d’Anjou, mais mourut prématurément à Viterbe un mois plus tard, le 18 août, sans avoir été ni ordonné ni couronné.
62Plus intéressantes sont les informations que nous fournissent sur lui les archives libériennes, négligées dans la plupart de ses biographies et concernant son activité d’archiprêtre. En effet, ces archives conservent trois documents de 1262, 1266 et 1271 relatifs aux statuts du chapitre88, qui sont une première rédaction de ceux-ci, leur confirmation pontificale avec la précision d’un point particulier et leur rédaction définitive. Leur importance vient du fait qu’ils contiennent les plus anciens renseignements sur l’institution capitulaire à Sainte-Marie-Majeure. Ils feront l’objet d’une étude spéciale dans le prochain chapitre. Ils trahissent l’intérêt plus grand que portait l’archiprêtre aux aspects institutionnels et spirituels qu’à ceux, matériels, de la vie des chanoines au service de la basilique.
63Jacques et Pierre Colonna89 se succédèrent presque pendant un demi siècle comme archiprêtres de Sainte-Marie-Majeure, excepté pendant les huit ans où ils furent déposés du cardinalat par Boniface VIII avant d’être réhabilités par Clément V et où le premier fut remplacé par François Orsini. Ils appartenaient à la branche la plus puissante de la famille, les Colonna de Palestrina.
64Jacques était en excellents rapports avec les Franciscains90, dont il connaissait quelques-uns personnellement : Jacques Torriti, Philippe Rusuti, les mosaïstes qui travaillèrent à Sainte-Marie-Majeure, Iacopone de Todi, Ange Clareno, qui prirent part à la lutte contre Boniface VIII et dont le premier signa le manifeste de Lunghezza et mourut en prison, excommunié par le pape. Le cardinal dut aussi partager jusqu’à un certain point les idées particulières des spirituels franciscains et fut très lié avec sa sœur, la bienheureuse Marguerite, dont la plus ancienne vie fut écrite par Jean Colonna, son frère, la seconde par une religieuse de San Silvestro in Capite, sœur Stéphanie91. On ne sait quel rôle Jacques joua auprès de sa sœur durant sa vie, mais il n’a pas dû rester à l’écart du procès de sa béatification. La vocation et le destin de la religieuse jette un rayon de lumière inespéré sur une famille connue surtout pour ses démêlés avec Boniface VIII.
65Créé cardinal-diacre du titre de Sainte-Marie in via Lata et archiprêtre de Sainte-Marie-Majeure en 1278, Jacques fut en relation avec le franciscain Jérôme d’Ascoli, devenu cardinal en même temps que lui et ensuite évêque de Palestrina (1280-1288). Il atteignit l’apogée de sa carrière quand l’évêque de Palestrina fut élu pape et prit le nom de Nicolas IV (1288-1292). C’est alors qu’en 1289 Jacques offrit à la basilique un reliquaire en argent garni de reliques92 et qu’il collabora étroitement avec le pape au renouvellement architectural et artistique de Sainte-Marie-Majeure : la mosaïque absidale les représente tous les deux en position symétrique de commanditaires de l’ouvrage. La mosaïque extérieure de la façade, dans l’actuelle loggia, où n’est représenté que la colonne, emblème des Colonna, doit être daté pour cette raison après la mort de Nicolas IV (4.4.1292) et avant celle du cardinal Pierre Colonna (1326). Ayant retrouvé la dignité cardinalice grâce à Clément V (1306), Jacques récupéra aussi l’archiprêtrise de Sainte-Marie-Majeure et la garda jusqu’à sa mort. Mais comme il résidait alors habituellement à la cour d’Avignon, il n’eut pas l’occasion d’exercer ses fonctions romaines dans la dernière partie de sa vie.
66Il dicta son testament l’avant-veille de sa mort, le 12 août 1318, exprimant la volonté d’être mis en terre à Sainte-Marie-Majeure93.
67Cette requête de simplicité n’est pas commune aux grands de l’époque. Elle est une marque de l’influence franciscaine sur l’esprit du cardinal. Sa tombe fut effectivement placée dans le pavement, mais l’emplacement choisi pour elle devant l’autel majeur est sans doute le fruit d’une interprétation du testament par ses exécuteurs.
68Bien différente est la figure de son neveu, le cardinal Pierre. Il était fils de Jean qui fut plusieurs fois sénateur de Rome et rédigea la première Vie de sa sœur Marguerite. Pierre était de la trempe de ses frères dont Étienne organisa le coup de main sur le trésor de Boniface VIII. Aidé par ses frères Agapit, Étienne et Jacques Sciarra, il fut le protagoniste de la lutte contre le pape et partagea le sort de son oncle, fut déposé et réhabilité comme lui. Il devint aussi archiprêtre de Sainte-Marie-Majeure après l’oncle et y élut sépulture en 1326. À l’opposé de celle de l’oncle, sa tombe fut solennelle, placée dans le chœur des chanoines qui devint de ce fait la chapelle de la famille, et pourvue d’une inscription versifiée où l’on jouait sur le nom patronymique du défunt94.
69François Orsini, archiprêtre intérimaire pendant les huit ans où les cardinaux Colonna demeurèrent privés du cardinalat (1297-1305), ne laissa que dans son testament, fait à Pérouse en 1304, une preuve de son passage à Sainte-Marie-Majeure. Parmi ses dernières volontés figure en effet le legs, fait à la basilique, de 200 livres provinoises pour la célébration de l’anniversaire de sa mort et des ornements liturgiques de couleur blanche, d’une valeur de 150 florins d’or95.
70Dans la série des cardinaux-archiprêtres de Sainte-Marie-Majeure, deux noms sont douteux. Ciacconio en effet, suivi par De Angelis, y introduisit Pierre Capocci et Henri. Le premier fut cardinal-diacre de Saint-Georges au Vélabre, mourut le 20 mai 1259 et fut enseveli à Sainte-Marie-Majeure96. Sa présence dans la liste archipresbytérale nous paraît injustifiée, même si son nom se lit dans les chartes libériennes, car Pierre n’y figure jamais au titre d’archiprêtre. Une autre difficulté surgit à propos du texte d’un acte du 28 mai 1258 où paraît un nommé Henri. Ferri lut le texte : d. magistro Henrico, cardinali dicte basilice, mais dans l’original est écrit : d(omi)no mag(ist)ro Henrico can(onico) p(re)no(m)i(n)ate basi(lice)97. En réalité, à cette date, il n’y a pas de cardinal Henri, alors qu’un Henri chanoine intervient dans les actes de Sainte-Marie-Majeure plusieurs fois en 1266 et 1267. Ce Henri doit donc être compté, non parmi les cardinaux, mais parmi les chanoines de la basilique.
C. Les chanoines de Sainte-Marie-Majeure
71Parmi les charges canonicales, les chartes de Sainte-Marie-Majeure signalent l’économe et le prieur. Jean Perhorcinus est l’économe qui, en 1224, intima à celui de Sainte-Pudentienne l’ordre de restituer à la basilique libérienne l’hôpital et l’église de Saint-Albert98. Quelques bulles papales mentionnent le prieur du chapitre. Avec ce titre paraissent Pierre de Saxo en 1258, Pierre Garonus en 1266, Jacques Colonna en 1288 et Jean de Biagio des Fuschi en 130099. Le titre désigne le chanoine le plus ancien de nomination, qui de ce fait opte et opine en premier lieu dans les séances du chapitre et a droit de préséance dans les processions et au chœur. Il est en revanche curieux que dans les chartes il ne soit jamais question du vicaire, du sacriste et d’autres officiers du chapitre.
72Un des intérêts majeurs des chartes est de faire entrevoir l’origine sociologique des chanoines. La majeure partie d’entre eux appartient en effet à l’aristocratie de la Cité et de la Campagne romaines. Dans l’acte de Célestin III nous avons déjà eu l’occasion de relever quelques noms de personnes d’un certain rang100. Il convient de les reprendre pour les confronter avec ceux des chanoines de la basilique.
73Des trois chanoines connus en 1192, le premier, Adelmar, pourrait appartenir à la famille des Adelmari, connue depuis un siècle et qui possédait une tour, aujourd’hui disparue, dans la via Lata101.
74Un Léonard, chanoine, est nommé en 1266, dans la bulle de confirmation du statut capitulaire et paraît comme témoin d’un acte de 1267102 ; on ne sait cependant pas s’il était en relation de parenté, et laquelle, avec Petrus Leonardi, c’est-à-dire Pierre fils de Léonard (16).
75Le nommé Saxo de Duce, dont est mentionnée « la maison au pied de la via in Selci » (18), est-il de la même famille ou non que les Pierre de Saxo, dont un était archiprêtre, l’autre chanoine libérien ? Nous ne savons. Mais une famille homonyme figure parmi les feudataires de la Campagne romaine dont Tomassetti a établi la liste103.
76Toussaint (Omniasanctus) des Fuschi de Berta paraît comme chanoine libérien en divers actes de 1273104. Il est sans doute le même Omniasanctus de 1266 et 1267105. En outre, on connaît un nommé Gilles, fils d’Ange, de la même famille, qui est procurateur d’Étienne, fils d’André Paparone, en 1273106. Un second chanoine des Fuschi de Berta est ce Jean, prieur du chapitre, qui élut sépulture à Sainte-Marie-Majeure et y fut enseveli le 4 octobre dans le premier tiers du xive siècle107. Les Fuschi de Berta sont eux aussi feudataires dans la Campagne romaine108.
77Chanoines de Sainte-Marie-Majeure sont aussi Ange des Tedallini et Ange des Veneranieri. Le premier est attesté en 1296, le second en 1291, les deux appartiennent à l’aristocratie fieffée de la Campagne romaine109.
78Une famille très liée à la basilique Esquiline fut celle des Arcioni. En 1176, les fils de Pierre Arcione restituèrent à l’archiprêtre Paul Scolari le fief de Salone, en s’y réservant la terre de Crunialetum110. Au xiiie siècle, deux de ses membres furent chanoines de Sainte-Marie-Majeure et ils se prénommèrent tous les deux Jacques. Le premier est mentionné en 1266 et 1267111, le second en 1309 et 1310112. Il s’agit probablement de l’oncle et du neveu ou du grand-oncle et du petit-neveu. Les laïcs de la famille sont aussi très présents dans les actes libériens comme témoins, procureurs et donateurs113.
79Des Capocci il a déjà été question à propos du « tabernacle Capocci et du cardinal Pierre114. Or, en 1208 déjà, un Jean Capocci céda une terre à ses frères Cencius et Romain115. En 1257, un frère du cardinal, le sénateur Jacques et sa femme Vinia fondèrent dans la basilique l’autel des reliques116. En 1258 et 1266, un autre Jean est attesté parmi les chanoines libériens117, et en 1285 il est question d’un Paul, probablement fils d’un troisième Jean118. Est-ce ce dernier qui est témoin en 1263 et appartient à une autre branche de la famille, appelée les Falconini119, ou s’agit-il d’un troisième Jean, surnommé Mezzopane120 ? Puissante famille romaine, les Capocci avaient, sur l’Esquilin, leur château qui « s’étendait de l’actuelle église Saint-Martin jusqu’à l’arc de Gallien... La tour qui se dresse toujours devant l’église (susdite)... suggère la puissance que devait avoir le château au Moyen Âge »121. Un Arcione Capocci, comte de Tivoli et membre d’une branche latérale, avait laissé son prénom au lieu-dit Castell’Arcione, qui se trouve au 19,5 km de la voie Tiburtine et qui était au xiiie siècle un point-clé du territoire entre la Nomentane et la Tiburtine122.
80Les Paparoni, qui possédaient trois maisons sur l’actuelle place de Santa Maria Maggiore (tres domos in foro quas tenent Paparones ante ecclesiam), étaient une autre famille de pointe, très liée à Sainte-Marie-Majeure. En 1060, Sc... (probablement Scotus), fils de Paparone, signa un acte conservé parmi les chartes libériennes123. Vers la moitié ou le troisième quart du xiie siècle, Scotus et Jean Paparone, qui étaient père et fils et, semble-t-il, parents d’Alexandre III, commanditèrent au moins partiellement le pavement cosmatesque de la basilique et s’y firent représenter à cheval et en armes à l’entrée de celle-ci124. Au xiiie siècle, de nombreux actes les concernent. Étienne Paparone loua pour dix-neuf ans en 1217 et 1236 des terres situées ad Quartum et mitoyennes avec d’autres terres de Grégoire Paparone et de Sainte-Marie-Majeure125. En 1259, un Jean Paparone est chanoine de la basilique126, alors que le 8 juin 1272 Pierre Paparone est simplement dit « de l’église de Sainte-Marie-Majeure »127. Cette expression nous semble difficilement explicable pour un Paparone d’une autre fonction que de celle de chanoine libérien. Le 2 octobre 1273, un Étienne Paparone intervient comme juge dans un acte libérien128. L’année suivante, divers Paparoni, l’un nommé Étienne, une autre Andreozza, fille de feu André, paraissent en compagnie de certains Arcioni dans une charte de la basilique, pour régler les affaires de cette Andreozza, encore mineure à la mort de son père129.
81Aux chanoines qui le sont pour ainsi dire par droit de naissance s’ajoutent au xiiie siècle ceux qui le sont devenus par nomination pontificale et qui appartiennent aux milieux curiaux et judiciaires. Le dit expressément Alexandre IV dans la bulle de nomination de Jacques, fils de Pierre Nicolas Bonifazi130. Parmi eux, il y en a qui portent le titre de magister : ainsi Henri en 1258 et 1266, Pandolphe en 1291131 : ils ont pris leurs grades à l’Université. Maître Pandolphe ne peut être le même que l’homonyme sous-diacre et camérier pontifical, qui fut aussi légat pontifical en Angleterre et mourut en 1266132. Est-il au contraire Pandolphe Savelli qui chargea Guidocco Pisano de refondre une cloche de Sainte-Marie-Majeure en 1288 ?133 Rien ne s’oppose apparemment à l’identification, mais contentons-nous de laisser la question posée. Un exemple de ces universitaires qui ont fait une carrière ecclésiastique, s’il ne se trouve pas parmi les chanoines de Sainte-Marie-Majeure, nous est fourni en revanche par le fameux Hostiensis. Ce canoniste du xiiie siècle, théoricien de la suprématie pontificale, après avoir enseigné le droit et accompli quelques missions au nom du pape, devint d’abord archevêque d’Embrun, puis fut créé par Urbain IV cardinal-évêque d’Ostie134, titre qui explique son surnom. Les nominations pontificales ne donnent pas directement naissance à une aristocratie, car les chanoines et les fonctionnaires de Curie ne sont pas mariés et ne font pas souche. Mais c’est dans le monde laïc des universitaires et des hommes de droit que se forme une aristocratie du savoir et de la fonction dont le meilleur exemple est fourni par les légistes français du temps.
2. Les amis de Sainte-Marie-Majeure
82Les chartes de Sainte-Marie-Majeure fournissent quelques indications sur ses amis. Mais comme pour le clergé libérien, le dossier des seconds doit être complété grâce aux sources de caractère plus général, regardant l’histoire de la Ville et de l’Église au Moyen Âge, car dans la personne de ses amis la basilique ressent parfois les contre-coups des conflits dans lesquels ils sont entraînés. Pour la clarté de l’exposé, nous le ferons précéder par un autre tableau synoptique des personnes et des familles liées à Sainte-Marie-Majeure.
83Ces familles appartiennent presque toutes à l’aristocratie foncière de Rome et de la Campagne romaine et avaient fourni des chanoines à la basilique libérienne. Elles comptent aussi parmi ses bienfaiteurs et leurs membres aiment s’y faire enterrer. Dans le chapitre précédent ont été utilisés les témoignages épigraphiques et archéologiques de leurs tombes. Il faut les compléter par les documents d’archives.
84Notons pour commencer qu’au début du xiiie siècle les hauts dignitaires ecclésiastiques semblent avoir donné le branle à la mode d’élire sépulture à Sainte-Marie-Majeure. L’impression est cependant inexacte, car l’exemple le plus anciennement connu est celui de Scot Paparone dont l’épitaphe est connue. Mais cette tombe est la seule du xiie siècle. L’exception s’explique sans peine par la munificence du bienfaiteur envers la basilique dont il a financé, au moins en partie, le pavement cosmatesque. Au xiiie siècle fut déterminant l’exemple des ecclésiastiques, suivi par les laïcs dans la deuxième moitié du siècle.
85Les chartes nous apprennent un autre fait. Dans leurs dispositions testamentaires, les défunts ne fondent pas seulement leur tombeau, mais commencent aussi à édifier la chapelle destinée à l’abriter, stipulent les messes à y célébrer à leur intention et donnent les fonds nécessaires à la construction de la chapelle et à l’entretien des chapelains qui assurent les messes. Cette « comptabilité de l’au-delà »136 est encore relativement simple à l’époque où nous sommes, mais elle prendra des formes beaucoup plus précises et minutieuses dans le cours du temps. Elle est l’indice d’une préoccupation également croissante de s’assurer, par l’intercession de la Madonne et des saints titulaires des chapelles funéraires, la clémence divine dans l’attente du « juste juge » (iuste iudex ultionis), pour qu’il « épargne l’homme coupable au jour du jugement » (iudicandus homo reus, huic ergo parce Deus)137. Chartes et épitaphes libériennes témoignent de cette évolution des mentalités.
86Elles permettent surtout de compléter, renforcer et agrandir le réseau des relations de famille qui se sont tissées avec le temps autour de Sainte-Marie-Majeure. Parmi ces familles, nous connaissons déjà celles qui ont fourni des papes et des cardinaux à l’Église de Rome, des archiprêtres, des chanoines et des bienfaiteurs à la basilique libérienne. Aux noms déjà connus s’en ajoutent d’autres, nouvellement signalés, sinon d’importance récente : les Fuschi de Berta, les Normanni, les Stimigliani, les Tedallini, les Veneranieri138. Quelques-uns sont possessionnés dans la campagne romaine : les Normanni possédaient le fief de Castel Testa di Lepre139 ; Odon de Stimigliano porte le nom du lieu où s’élevait son château ; les Fuschi, les Tedallini et les Veneranieri figurent dans la liste des emphytéotes ou feudataires que Tomassetti a dressée. Ils eurent aussi des tours et des maisons à Rome. C’est le cas des fortifications des Savelli sur l’Aventin et près du théâtre de Marcellus et de la tour des Veneranieri qui se trouvait sur la place Sciarra au Transtévère140 et de celle des Capocci près de Saint-Martin-au-Mont.
87Il s’en faut d’ailleurs que cette noblesse soit entrée en contact avec Sainte-Marie-Majeure à la même époque. Cela se fit en vagues successives que nous pouvons approximativement et schématiquement fixer. Nous ne savons pas grand chose des amis de la basilique au xie siècle : l’unique famille alors attestée est celle des Paparoni qui maintinrent leur présence à Sainte-Marie-Majeure pendant tout le Moyen Âge central. La fréquence des rapports qu’entretinrent avec elle au xiie siècle les Capocci et les Arcioni nous donne à penser qu’ils étaient des amis aussi anciens que les Paparoni. La supposition est d’ailleurs confirmée par le voisinage de leurs tours et les liens de mariage noués par leurs occupants. Une deuxième vague atteint la basilique au xiiie siècle avec les Fuschi, les Normanni, les Tedallini, les Veneranieri141. Mais pendant tout ce temps, il s’agit de contacts capillaires dont nous ne pouvons pas toujours préciser ni l’apparition ni le mode. Les liens de famille, en particulier les mariages, ont dû jouer un rôle non négligeable dans la vie de la basilique, mais ils n’empêchèrent pas, en cas de conflit, des regroupements partisans.
***
88L’étude des chartes de Sainte-Marie-Majeure nous a conduits à des résultats appréciables. Non seulement nous connaissons par elles le patrimoine de la basilique, sa consistance, sa localisation, mais nous apprenons encore quelles furent les personnes à son service ou à sa dévotion. Bien plus, elles nous enseignent quelle place le sanctuaire occupait dans la vie économique du temps, quelles relations de famille entretenaient ses archiprêtres, ses chanoines et les autres prêtres à son service avec la société romaine et latiale de l’époque, avec l’Église de Rome et l’Église universelle. La puissance économique de Sainte-Marie-Majeure, qui n’est pas la plus riche des églises de Rome, n’a heureusement pas constitué un danger pour la basilique ; ce sont d’autres facteurs qui entraînèrent son archiprêtre à s’opposer au pape. Nous reviendrons plus tard sur le conflit qui opposa les Colonna à Boniface VIII.
Notes de bas de page
1 Une première esquisse de ce chapitre se trouve dans notre contribution au volume collectif S. M. M. de Poletti, p. 92-99.
2 G. Ferri, Le carte dell’archivio Liberiano, n. 21, p. 451-456 ; mentionné dans Reg. XXXIX. Au cours du présent chapitre, les références au document se limiteront au numéro d’ordre donné aux paragraphes par Ferri. P. ex. (5).
3 Sur les quatre monastères, voir le ch. VI : La basilique libérienne et ses annexes, III : Les monastères desservant la basilique.
4 « Caminate » : grandes salles communes, comme les dortoirs, réfectoires, etc, munies de cheminées pour les chauffer, qui datent peut-être du temps carolingien où les monastères sont attestés pour la première fois. Voir Du Cange, II, p. 52 ; P. Sella, Glossario latino-italiano, p. 106.
5 « Cannapina », terre cultivée en chanvre. Les chenevières occupaient habituellement des lieux humides. Voir Du Cange, II, p. 91 ; P. Sella, p. 110 ; P. Toubert, Les structures du Latium, p. 217-218.
6 Voir ch. précédent : Les vicissitudes du complexe libérien, p. 208-209, et ci-dessous le § consacré à Paul Scolari.
7 J. Coste, Il fondo medievale, p. (5-77) 28 n. 1 : « Bulla Clementis Tertii quo asserit se nutritum in hac Basylica. In qua bulla suscipit hanc Basylicam sub protectione sua et Beati Petri, exprimendo et recipiendo sub eadem protectione omnes et singulas possessiones prefate Basylice, ac etiam donando eidem palatium suum quod fecerat fabricari prope eandem Basylicam. Item donat in eadem bulla unam unciam omnium oblationum altaris S. Petri, id est duodecimam partem ».
8 La bulle citée dans la note précédente est perdue et nous n’en conservons que le résumé qu’en fait la bulle de Célestin III du 4 janvier 1191 que nous analysons dans le présent chapitre. La notice citée dans la note précédente « a le mérite de confirmer que la concession à Sainte-Marie-Majeure d’une once des offrandes faites à Saint-Pierre était une initiative de Clément III et non d’Eugène III, comme l’avaient cru Jaffé et Kehr (Italia Pontificia, I, p. 56, n. 7), lesquels se fondaient sur une fausse interprétation de l’ipse de la ligne 34 de la bulle de Célestin... Par conséquent le n. 7 de Kehr, I, p. 51-56, doit être tout bonnement supprimé de la liste des diplômes pontificaux en faveur de Sainte-Marie-Majeure » (J. Coste, art. cit., p. 29, n. 80).
9 Krautheimer, Corpus, III, p. 15 et fig. 7.
10 Voir ci-dessus n. 2.
11 C’est-à-dire dans le quartier de Sainte-Marie-Majeure. Voir Ferri, n. 9, p. 190 ; Régeste, XXIX.
12 Gnoli, Topografia, p. 157.
13 Krautheimer, Corpus, III, p. 17, 20, 21, fig. 11, 15, 17.
14 Adinolfi, II, p. 267-268 ; M. Armellini-C. Cecchelli, Le chiese di Roma, p. 1021.
15 Il faut distinguer la diaconie de Saint-Vit (14 : post sedem venerabilis diaconiae S. Viti ; est-elle identique à l’actuelle église paroissiale San Vito ?) du monastère homonyme, dit aussi Saint-Vit-Majeur (9 : in campo S. Viti). Voir Armellini-Cecchelli, Chiese, p. 1472.
16 Tour non mentionnée par Fr. Tomassetti, Le torri medievali di Roma.
17 Sur les Paparoni, les Fuschi di Berta et les autres membres de la haute aristocratie de Rome au temps de Célestin III, voir ci-dessous le paragraphe consacré aux familles liées à la basilique. Théophylacte, Elpérinus de Surrentino semblent descendre des deux grandes familles auxquelles appartinrent les papes du xe siècle, les Théophylactes et les comtes de Tusculum.
18 Gnoli, Topografia, II, p. 336.
19 Voir aussi Ferri, n. 23 (16.1.1193).
20 L’identification nous semble justifiée par la charte du 12. 12. 1193 (Ferri, n. 24), car en elle paraissent les mêmes personnages que dans l’acte n. 23 de Ferri, cité dans la note précédente. Super Agium est le nom médiéval de l’ancien remblai (agger) du mur d’enceinte Servien de la Ville : voir ch. I : La région de l’Esquilin, p.12, n. 4, et ch. XI : L’hagiographie libérienne, p. 375-376.
21 « Vineale », terrain apte à la culture de la vigne, mais temporairement en friche (Du Cange, VIII, p. 340).
22 G. Tomassetti, La campagne romana, VI, p. 532-534.
23 Son nom dérive en partie du moulin (mola) en partie de l’église Sainte-Barbe, aujourd’hui disparue, qui se trouvaient tous les deux dans les parages. Le toponyme subit diverses transformations orthographiques : Mola Barbara, Mala Barbara, Mala Barba. Voir Tomassetti, La campagna romana, VI, p. 534-536. Il est aussi mentionné dans une note manuscrite ajoutée au codex de la Regula pastoralis de Grégoire le Grand et mentionnant des « vignes sises à Mola Barbara » (43, f. 9v, marg. inf.) : voir Ap. VIII, p. 579.
24 Le nom est conservé dans la toponymie actuelle. Acqua Bullicante est le nom d’une localité de la Prénestine immédiatement avant le Grand Raccord Anullaire. Les toponymes comportant le mots Aqua, Formellum, Mola désignent une région abondamment irriguée par les cours d’eau naturels et des canaux artificiels.
25 Tomassetti, La campagna romana, VI, p. 567 et n. 1 ; II, p. 596 n. c.
26 Ferri, nn. 4, 16, p. 180, 441-442.
27 Lunghezza est l’antique Collatia qui avait donné son nom à la route qui y conduisait, Collatina. La localité faisait partie des biens de la famille des Colonna de Palestrina. Voir A. Rehberg, Die Kanoniker, p. 44-46.
28 Thomas Ashby, p. 100, n. 73.
29 « Castellarium », vaste terrain clôturé et fortifié. Voir Du Cange, II, p. 210.
30 « Pedica », mesure agraire de superficie, mais aussi vallée ou dépression de terrain. Voir Du Cange, VI, p. 245 ; P. Sella, p. 423 (mesure agraire).
31 Voir la donation de Flavia Xanthippè, f. Orcianus, lin. 18.
32 Ibid., f. Casa Porcinare, lin. 12.
33 Tomassetti, La campagna romana, III, p. 560. Le nom de Bella Monaca est une déformation du nom de ses anciens propriétaires, les Monaci ou Monachi.
34 Sur Salone, voir J. Coste, Il fondo medievale, p. 30, n. 2 et nn. 85-87 ; Reg. LIII, 10.
35 Ferri, n. 21, p. 448-451 ; Reg. XXXVII.
36 Un casale « Monumento » est attesté sur la Tiburtine. Voir Tomassetti, La campagna romana, VI, p. 546, 547. La différence des noms de la route médiévale nommée, Tiburtine ou Prénestine, tient sans doute aux possibilités d’accès du ca-sale pendant le Moyen Âge.
37 Tomassetti, La campagna romana, III, p. 548-549.
38 On peut estimer que l’expression Ad Quartum désigne le lieu en référence au IVe mille de la voie romaine. Dans le ms de Sainte-Marie-Majeure 4, dern. f. de garde, se trouve une énumération des jardins du lieu : « Hi sunt orti de Quarto » (xiiie-xive siècle).
39 Ferri, nn. 27, 36, p. 25, 31 ; Régeste XLI, 1, XLII, 2 ; Tomassetti, La campagna romana, III, p. 549-550.
40 Tomassetti, La campagna romana, III, p. 549.
41 Tomassetti, ibid. Au Moyen Âge tardif, les chapelains de Sainte-Marie-Majeure possédaient des biens au départ de la Tiburtine au lieu-dit Pietralata. Voir Tomasetti, VI, p. 538-545.
42 La voie porte ce nom en ville et en dehors sur un certain parcours, après lequel elle prend le nom de Casiline.
43 Ferri, Le carte, n. 18, p. 444-445 ; Reg. XXXV, 1.
44 P. ex. S. Angelo Romano entre Monterotondo et Palombara Sabina, Ca-sale S. Angelo près de Tivoli, S. Angelo et le mont homonyme entre Tivoli et S. Gregorio da Sassola, S. Angelo près de Casape, et Castel S. Angelo, aujourd’hui Castel Madama.
45 Ferri, Le carte, n. 15, p. 200-202 ; Reg. XXXIV, 2.
46 Squarciarelli est encore le nom d’un pont et d’un important carrefour au sud-est de Grottaferrata.
47 Tomassetti, La campagna romana, IV, p. 151-156.
48 Tomassetti, La campagna romana, II, p. 259, IV, p. 178, n. 1.
49 Tomassetti, La campagna romana, II, p. 516-517.
50 Saxer, Santi e santuari, p. 245-246.
51 Ferri, n. 8, p. 185-187.
52 Ferri, nn. 13-14, p. 197-200. Fila Salinaria pourrait aussi se comprendre, non comme terme topographique, mais comme expression commune pour désigner une saline.
53 Tomassetti, La campagna romana, V, p. 338.
54 P. Sella, p. 341, définit une maiesicatura ou « maggese » une culture dont les fruits se ramassaient en mai.
55 Tomassetti, La campagna romana, II, p. 607.
56 « Rublum, rublus », désigne une ancienne unité de mesure de poids, utilisée en Italie avant l’introduction du système métrique, dont la valeur oscillait de 7,851 à 9,222 kg. C’était aussi une unité de mesure agraire, en usage dans la campagne romaine, pour désigner une superficie de 18,480 m2. Voir Du Cange, VII, p. 229, 231 ; P. Sella, p. 492.
57 Tomassetti, La campagna romana, II, p. 652-653.
58 Tomassetti, La campagna romana, III, p. 348-350.
59 Tomassetti, La campagna romana, III, p. 207, 245.
60 Ferri, n. 11, p. 194-195.
61 J. Coste, Il fondo medievale, p. 31, n. 93.
62 LP I, p. 509, 521, n. 103 ; II, p. 141. On reviendra au cas de S. Leucius.
63 Tomassetti, La campagna romana, II, p. 607.
64 Tomassetti, La campagna romana, VI, p. 205-206 ; J. Coste, Il fondo medievale, p. 30, [3] et n. 88 ; donation de Fl. Xantippè, f. Casa Basili, lin. 15.
65 Tomassetti, La campagna romana, VI, p. 187-188. Fresclari désigne les Prati Fiscali d’aujourd’hui.
66 Ferri, Le carte, n. 4, p. 180.
67 Tomassetti, La campagna romana, VI, p. 220.
68 P. Toubert, Les structures du Latium, p. 215.
69 Ibid.
70 Ibid.
71 Saint-Leucius est situé sur la voie Flaminienne à Tor di Quinto. Ce dernier toponyme vient des restes d’une tour au Ve mille de la voie consulaire. Voir Tomassetti, La campagna romana, III, p. 321-323.
72 LP I, p. 509.
73 Ferri, Le carte, nn. 27-29, 36, p. 25-27, 31 ; Reg. XLI, 1, XLII, 2.
74 Ferri, Le carte, n. 21, p. 448-451 ; Reg. XXXVII.
75 Voir Ch. VIII, 3e partie : Les Statuts du chapitre libérien au xiiie siècle, p. 20.
76 Ps 113b, 16.
77 Carapelle est une localité des Abruzzes près de L’Aquila. Voir A. Rehberg, Die Kanoniker, p. 418.
78 Mathieu, 15.1.1153 : « Ego quidem Matheus divina gratia archipresbyter ecclesie S. Marie Maioris que ponitur ad Presepe » (Reg. XXXV,1 ; Ferri, Le carte, n. 18, p. 444).
Rainier, 3.3.1176 : « Salva tamen locatione quam Raynerius quondam archipresbyter vestre ecclesie fecit quondam Stefano Arcionis avo nostro » (Reg. XXXVI ; Ferri, Le carte, n. 21, p. 450,27-28).
Roland, 4.1.1192 : « Celestinus episcopus... Rolando archipresbitero S. Marie Maioris » (Reg. XXXIX ; Ferri, Le carte, n. 22, p. 451,1).
Aston, 19.3.1244 : « Innocentius Astoni archipresbitero ecclesie S. Marie Maioris » (Reg. XLIII,1 ; Ferri, Le carte, n. 45, p. 34).
Romain, 28.5.1258 : « D. Romano archipresbitero basilice S. Marie Maioris » (Reg. XLIV,5).
79 Voir la note précédente au nom de Roland.
80 E. Kartusch, Das Kardinalskollegium in der Zeit von 1181 bis 1227, p. 382-384.
81 Reg. XXXVIII, 4 ; J. Coste, Il fondo, p. 29, n. [1] et ci-dessus n. 6.
82 Reg. XXXIX ; Ferri, n. 22, p. 455,33.
83 Reg. XXXVII ; Ferri, 21, p. 448,4-5.
84 On lit en DHGE, XII, 1953, col. 1097 : « Qu’il ait eu dès lors le désir de ramener la papauté à Rome ne paraît pas douteux : la construction qu’il entreprit à cette époque, de ses propres deniers, d’un palais résidentiel attenant à Sainte-Marie-Majeure en est une confirmation ». La preuve du caractère douteux, voire non fondé, de cette affirmation est dans le fait que le palais fut laissé, non au Siège apostolique, mais à Sainte-Marie-Majeure.
85 Epistulae prioris et conventus Cantuariensis tempore Baldewini et Huberti archiepiscoporum, Ep. CXCIV (av. 26.1.1188) : « Hic est quem corruptelae munerum, licet a Romanis traxerit originem, nunquam potuerunt hactenus suffocare, qui nunc etiam manus suas excutit ab omni munere, nisi a sincerae liberalitatis fonte sibi gratuito donationis titulo conferatur. Hic est qui, iustissima licet motus ratione, sententiam praecipitare, vel aliquem severius, nisi causa cognita, nequaquam hactenus visus est promulgare, sed secundum merita causarum quilibet, prout iuris ordo discernit, suam aequa lance reportat aequitatem » (Chronicles and Memorials of the reign of Richard I, vol. I, p. 178.
86 « Rectores Romane Fraternitatis... domno Petro Saxonis archipresbitero... basilice s. Marie Maioris » (Reg. XL, 2 ; Ferri, n. 26, p. 24-25).
87 E. Kartusch, op. cit. (voir n. 75), p. 355-357. Un autre Pierre de Saxo figure en qualité de prieur du chapitre, dans la bulle de Clément IV du 19 mars 1258. Voir BAV, Fonds SMM, Cart. 66, nn. 61-62. Il est neveu ou mieux petit-neveu de l’archiprêtre. Sur la famille, voir A. Rehberg, Die Kanoniker, p. 415 (M 126).
88 BAV, Fonds SMM, Cart. 64, perg. 58, Cart. 66, perg. 61-62 et 67, et cod. 83, f. 61-103 : 1° lettre d’Ottobon « au prieur et au chapitre de l’église », de 1262, qui commence ainsi : « Si debitorum nostrorum memoriale perlegimus » : 2° confirmation du statut par Clément IV en 1266, qui commence par les mots : « Desideriis vestris », 3° seconde lettre d’Ottobon en 1271, avec le même incipit que la première et quelques adaptations de celle-ci.
89 L. Mohler, Die Kardinäle Jakob und Peter Colonna. Ein Beitrag zur Geschichte des Zeitalters Bonifaz’ VIII, coll. Quellen und Forschungen aus dem Gebiete der Forschung, XVIII, Paderborn 1914.
90 Salimbene degli Adami, Chronicon, a écrit sur Jacques Colonna la note suivante : « Le second cardinal de la famille fut seigneur Jacques de Colonna, qui est tout à fait l’ami de l’Ordre des Frères Mineurs » (MGH. SS. XXXII, p. 169).
91 O. Oliger, B. Margherita Colonna.
92 Reg. L,13 ; Forcella, Iscrizioni, XI, p. 11, n. 5.
93 « Expresse inhibens ne in sepultura sua fiat quomodolibet hedificium ali-quod, set sepeliatur in terra plana in pavimento ecclesie prelibate » (A. Paravicini Bagliani, I testamenti dei cardinali del xiii secolo, p. 424.
94 Forcella, Iscrizioni, X, p. 16, n. 19 ; Reg. LIV, 6. Compléter ces données biographiques sur les Colonna par le ch. précédent : Les vicissitudes du complexe libérien, p. 206-207, où il est question de leur tombeau à Sainte-Marie-Majeure.
95 A. Paravicini Bagliani, I testamenti, p. 345, 349. Voir aussi P. De Angelis, Descriptio, p. 32.
96 P. De Angelis, Descriptio, p. 31-32.
97 Reg. XLIV,4 ; Ferri, Le carte, n. 55, p. 119 ; voir en revanche BAV, Fonds SMM, Cart. 66, perg. 55, 3e acte.
98 Reg. XLI,7 ; Ferri, Le carte, n. 33, p. 28-29.
99 Reg. XLVI,1 ; L,3.4.5.8 ; LIII,16.
100 Voir ci-dessus n. 16.
101 Ferri, Le carte, n. 24, p. 459 ; F. Tomassetti, Le torri medievali, p. 15-16.
102 Bullaire libérien, I, f. 84 ; Reg. XLV,3.
103 Tomasetti, La campagna romana, I, p. 115.
104 Reg. XLVIII,2.3.4 ; Ferri, Le carte, n. 70, p. 127-129 ; n. 71, p. 129. Sur les Fuschi de Berta, voir A. Rehberg, Die Kanoniker, p. 438-439.
105 Bullaire libérien, I, f. 84 ; Reg. XLVI,3 ; Ferri, n. 65, p. 124.
106 Reg. XLVIII,4 ; Ferri, n. 70, 3e acte, p. 129.
107 Reg. LIII,16. A. Rehberg, Die Kanoniker, p. 361-362, propose un arc chronologique de 1300-1334. Mais le problème est de savoir si les actes du xive siècle, dans lesquels paraît ce Jean des Fuschi de Berta, désignent le même que celui de la pierre tombale, selon lequel il est prieur du chapitre, c’est-à-dire le plus ancien de prise de possession de sa stalle. Cela lui ferait une longévité remarquable mais peu probable.
108 Tomassetti, La campagna romana, I, p. 115.
109 Reg. LIII,3 ; XLIX,17 ; Tomassetti, La campagna romana, I, p. 115 ; A. Rehberg, Die Kanoniker, p. 444-445, 446-447.
110 Reg. XXXVII ; Ferri, Le carte, n. 21, p. 448.
111 Bullaire libérien, I, f. 84 ; Reg. XLVI,3.
112 Reg. LIV,1.3.
113 Reg. XLIII,6 ; XLIV,4 ; XLVI,3 ; XLVIII,3 ; L,2.21. Voir A. Rehberg, Die Kanoniker, p. 436.
114 Voir ci-dessus p. 234, et ch. précédent, p. 205.
115 Reg. XL,1.
116 Voir ch. précédent, p. 201.
117 Reg. XLIV,4.5 ; Bullaire libérien, I, f. 84.
118 Reg. XLIX.
119 Reg. XLV,4. Voir A. Rehberg, Die Kanoniker, p. 256.
120 Ibid. Ce Jean Capocci Mezzopane n’est sans doute pas identique à un second Jean Capocci, donateur d’une vigne en 1309. voir Reg. LIV,2, et S. Carocci, I baroni di Roma, p. 340.
121 F. Tomassetti, Le torri medievali, p. 126. Voir A. Rehberg, Die Kanoniker, p. 431-432.
122 Thomas Ashby (cit. n. 27), p. 42-43, n. 20.
123 Reg. XXX,2 ; Ferri, Le carte, n. 11, p. 195. Le nom, que Ferri avait lu seulement Sc..., doit être complété en Scotus en raison de l’homonyme qui offrit au moins une partie du pavement cosmatesque de la basilique. Voir ch. précédent, p. 181-182. A. Rehberg, Die Kanoniker, p. 370, date vers 1200 le pavement donné par Scot et Jean Paparone sans dire sur quoi il s’appuie. Leur parenté avec Alexandre III lui a échappé et ils vivaient sans doute au xiie siècle.
124 C. Cecchelli, I mosaici di S. Maria Maggiore, pl. LXIII ; S. Maria Maggiore e Roma, p. 97. Voir ch. précédent, p. 186.
125 Reg. XLI,1.2.3 ; XLVIII,1.2.3 ; Ferri, Le carte, nn. 27-29, p. 25-27.
126 Reg. XLIV,5 ; Bullarium Romanum, I, p. 142 ; Jaffé 17883 ; Ferri, Le carte, n. 55, p. 95.
127 Reg. XLVIII,1 ; Ferri, Le carte, n. 68, p. 126.
128 Ferri, n. 70, 1er acte, p. 127.
129 Reg. XLVIII, 2.3.4 ; Ferri, n. 70, p. 127-129.
130 Reg. XLIV,1 ; Ferri, Le carte, n. 54, p. 39.
131 Reg. XLIV,4 ; L,17 ; Ferri, Le carte, n. 55, p. 119 ; n. 91, 1°, p. 138-139.
132 Lexikon des Mittelalters, VI, 1993, col. 1653.
133 Reg. L,10.
134 C. Lefèvre, Hostiensis, en DDC, V, 1953, col. 1211-1227.
135 Nous renvoyons de manière générale à S. Carocci, Baroni di Roma, pour l’identification des personnages appartenant aux familles aristocratiques romaines, en faisant toutefois observer que l’auteur ne s’est pas servi des chartes libériennes.
136 H. Chiffoleau, Comptabilité de l’au-delà.
137 Ce sont les paroles du Dies irae. La séquence, déjà attestée par un manuscrit du xiie siècle, ne peut être de Thomas de Celano († vers 1255). Elle a cependant connu une diffusion rapide grâce aux Franciscains dans le missel de la Curie romaine au cours du xiiie siècle. Voir A.G. Martimort, L’Église en prière, II, p. 171.
138 S’y ajoutent les Caetani qui ne figurent pas dans les chartes libériennes.
139 S. Carocci, Baroni di Roma, p. 381-385.
140 F. Tomassetti, Le torri medievali di Roma, p. 463-464.
141 Les Caetani qui sont de la même vague ont pris pied à Saint-Pierre.
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