Chapitre 5
Matrices argileuses et groupes techniques
p. 41-60
Texte intégral
1La céramique à paroi fine n’est pas un groupe homogène sur le plan technique1. À Musarna, une première observation macroscopique a permis de mettre en évidence des différences dans l’élaboration des pâtes. Il s’agit seulement d’une approche préliminaire à une étude souhaitable des productions par les analyses de pâte mais qui permet d’offrir un cadre à ce groupe très hétérogène.
2Les premières observations ont été organisées autour de trois catégories de critères hiérarchisés comme tel :
- La matrice argileuse : il s’agit du critère dominant dans la distinction technique des céramiques à paroi fine. Nous avons distingué trois macro-groupes de matrices argileuses : non calcaires, calcaires et un groupe indéterminé. | ||
- Le groupe technique : à l’intérieur des trois macro-groupes de matrice argileuse, on distingue 7 « groupes techniques » définis en fonction de la granulométrie, du mode de cuisson, de l’absence ou de la présence de revêtement, de la finesse de la pâte. | ||
- Les productions : à l’intérieur des sept groupes techniques, lorsque cela a été possible, nous avons isolé des « productions », c’est-à-dire des pâtes qui sont fabriquées dans un même atelier à un moment donné. |
1. Nature de la matrice argileuse
3Comme l’ont démontré les travaux de M. Picon, repris par A. Desbat et A. Schmitt2, la couleur des céramiques permet dans de nombreux cas de caractériser la nature calcaire d’une argile et son mode de cuisson3. Ainsi les pâtes de rouge brique à brun noir sont généralement des pâtes non calcaires cuites en mode A, et les pâtes beige rose/orangé, sont généralement des pâtes non calcaires cuites en mode A. La première observation macroscopique des céramiques à paroi fine de Musarna se fonde donc sur la couleur des céramiques. Celle-ci couvre un large spectre de teintes allant du beige au gris et dans quelques cas exceptionnels de fragments blancs et noirs4.
4Trois groupes macroscopiques et chimiques ont ainsi été constitués (graph. 1) :
- Un groupe de pâtes orange à brun gris relativement grossières, interprétées comme ayant une matrice argileuse plutôt non calcaire. Dans de nombreux cas, ces pâtes semblent identiques à une partie des céramiques communes grossières découvertes sur le site. Ce groupe est de loin le plus nombreux, puisqu’il représente 76 % du NR et 80 % du NMI (graph. 1). Il donne une forte impression d’homogénéité du corpus.
- Un groupe de pâtes beige à rosée épurées et fines, interprétées comme ayant une matrice argileuse plutôt calcaire. Les surfaces de ces vases sont régulièrement revêtues d’engobes plus ou moins grésés. La préparation des pâtes de ce groupe est assimilable à celle d’autres classes de vaisselle de table, notamment la céramique à vernis noir et sigillée italique. Très peu représenté, ce groupe ne représente que 4 % du NR et 7 %du NMI (graph. 1).
- Un groupe de pâtes de couleur beige à rouge brun, généralement très fines et pour lesquelles il n’est pas possible d’interpréter la matrice argileuse. De rares exemplaires sont exceptionnellement revêtus d’un engobe, plus ou moins grésé. Ce groupe d’indéfinis représente 19 % du NR et 14 % du NMI (graph. 1).
5Les caractéristiques macroscopiques des pâtes, notamment la couleur, semblent indiquer clairement que le premier groupe correspond à des argiles non calcaires et le deuxième à des argiles calcaires, tandis que la composition des échantillons du troisième groupe est plus difficile à déterminer sans l'aide d’analyses de laboratoire. En conséquent, afin de vérifier ces distinctions établies sur la base d’une observation macroscopique et afin de déterminer la matrice argileuse des fragments indéterminés, des analyses physico-chimiques ont été pratiquées sur quatre fragments au laboratoire de céramologie de Lyon (CNRS, UMR 5138, Archéométrie et Archéologie)5. Les analyses n’ont porté que sur quatre fragments pour des raisons de financement. Les fragments sélectionnés appartiennent à des formes identifiées et semblaient au cours d’une première phase de l’étude mener à des productions locales de phases distinctes.
6Sur les quatre tessons sélectionnés, l’un d’entre eux appartient assurément au groupe dit « non calcaire » ; il s’agit d’un bord de bol hémisphérique6 (19), choisi afin de donner une référence de comparaison. Les trois autres fragments sont des bords de tasses tronconiques7 (30a), forme parmi les plus représentées dans le corpus de Musarna et la plus caractéristique de ce groupe indéterminé. Le pourcentage de CaO dans ces 4 échantillons est le suivant :
- 19 – Bol hémisphérique 648017.1305 : 4 % de CaO.
- 30a – Tasse tronconique 424014.1906 : 6,5 % de CaO.
- 30a – Tasse tronconique 635006. 44 : 7,6 % de CaO.
- 30a – Tasse tronconique 635006. 39 : 8,9 % de CaO.
7Les analyses montrent que l’argile du bol hémisphérique 648017.1305 (forme 19) avec 4 % de CaO est plutôt non calcaire. Avec 6,5 % de CaO, la tasse tronconique (forme 30a) 424014.1906 est à peine calcaire et se situe vraiment à la limite entre les deux compositions, calcaire et non calcaire. Avec 7,6 % de CaO, l’exemplaire de tasse tronconique 635006.44 (forme 30a), est un peu plus calcaire, bien que son taux de calcite reste bas. Enfin, la tasse tronconique 635006.39 (forme 30a), avec 8,9 % de CaO est nettement calcaire.
8Le taux très bas de CaO d’une partie des fragments du groupe indéterminé explique donc la difficulté à le distinguer à l’œil nu des argiles non calcaires. L’homogénéité technique et typologique du groupe, sa distinction très nette avec les deux autres, nous a néanmoins conduit à le retenir et à l’isoler en le classant dans « matrice argileuse indéterminée ». Les matrices argileuses des céramiques à paroi fine de Musarna peuvent ainsi être « non calcaires », « calcaires » ou « indéterminées ». Ce dernier terme désigne exclusivement des matrices argileuses qui se situent à la limite entre « calcaire » et « non calcaire » et non pas des fragments pour lesquels les informations sont partielles ou indisponibles, renseignées dans ce cas par « non renseignée ».
2. Groupes techniques
9Les 7 « groupes techniques » se fondent sur la granulométrie de la pâte, l’absence ou la présence de revêtement, ou encore le mode de cuisson. Le ou les critères retenus pour isoler un groupe ne sont pas toujours les mêmes : c’est celui qui apparaît le plus pertinent, c’est-à-dire, dont la différenciation est significative (graph. 2). Ils se répartissent comme suit :
10À l’intérieur des argiles non calcaires, on distingue 4 groupes techniques :
- Groupe technique 1 : matrice argileuse non calcaire, épuration moyenne à grossière, sans revêtement.
- Groupe technique 2 : matrice argileuse non calcaire, épuration fine, sans revêtement.
- Groupe technique 3 : matrice argileuse non calcaire, parois avec revêtement.
- Groupe technique 4 : matrice argileuse non calcaire, cuisson en mode B.
11Les argiles calcaires se divisent en deux groupes :
- Groupe technique 5 : matrice argileuse calcaire, parois avec revêtement.
- Groupe technique 6 : matrice argileuse calcaire, parois sans revêtement.
12Le groupe dont la matrice argileuse est indéterminée ne comprend pas de différences techniques significatives. Il n’y donc qu’un seul groupe technique :
- Groupe technique 7 : matrice argileuse indéterminée, parois sans revêtement.
13En terme de représentativité (tab. 3), il faut remarquer que plus de 71 % du NR et 72 % du NMI appartiennent au groupe technique 1, caractérisé par une matrice argileuse non calcaire, une pâte moyennement épurée et la quasi absence de revêtement. L’autre groupe significatif sur le plan quantitatif avec 19 % du NR et 13 % du NMI est celui dont la matrice argileuse est indéterminée, la pâte très fine et les parois sans revêtement. Les cinq autres groupes techniques sont très peu représentés quantitativement puisqu’ils ne comptent au total que 10 % du NR 15 % du NMI.
Tab. 3 – Représentation des matrices argileuses et groupes techniques.
Matrice argileuse | Groupe technique | NR | % NR | NMI | % NMI |
Non calcaire | 1 | 17892 | 71 | 1801 | 72 |
2 | 1021 | 4 | 148 | 6 | |
3 | 127 | 1 | 14 | 1 | |
4 | 2 | 0 | 1 | 0 | |
Calcaire | 5 | 898 | 4 | 119 | 5 |
6 | 332 | 1 | 36 | 1 | |
Indéterminée | 7 | 4833 | 19 | 337 | 13 |
Inconnu | Inconnu | 194 | 1 | 55 | 2 |
Total | 25299 | 100 | 2511 | 100 |
14Chacun des sept groupes techniques est défini plus précisément dans une fiche technique qui décrit les critères suivants : couleur de la pâte et des surfaces, composition de l’argile, dureté, traitement de surface, sensations au toucher, granulométrie des inclusions, types d’inclusions, qualité du tournage/épaisseur des parois, type de cuisson, formes associées, décors associés, production, chronologie. Elles sont réalisées à partir d'observations essentiellement faites à l'œil nu qui prennent en compte l'aspect, la texture et la composition de la pâte. La composition est observée à la loupe binoculaire, grossissement x40.
15N’étant pas en mesure de renseigner précisément la nature pétrographique des inclusions ainsi que leurs origines, nous avons choisi de nous en tenir à une description prenant en compte leur couleur, leur forme, leur quantité et leur densité.
16Le premier groupe décrit n’est pas un des sept groupes techniques à peine énoncés. Il s’agit d’une production de petits gobelets à boire (ollae), à peine antérieure à celles des céramiques à paroi fine. Elle met en lumière la spécificité des productions qui vont suivre.
a. Les “pré-paroi fine” : argile calcaire, granulométrie grossière, sans revêtement (pl. XXXII), NR 25, NMI 15
171 – Couleur de la pâte et des surfaces : beige clair.
182 – Composition de l’argile : calcaire.
193 – Dureté : dure, difficilement cassable à main nue, fracture irrégulière mais nette.
204 – Traitement de surface/ Sensation au toucher : sans revêtement, rugueuse au toucher, notamment en raison d’un fort retrait à la cuisson qui a conduit à l’affleurement des inclusions.
215 – Granulométrie des inclusions : grossière et compacte.
226 – Inclusions : inclusions visibles à l'œil nu. On distingue de nombreuses grosses et moyennes inclusions gris/noir légèrement émoussées réparties uniformément, et quelques inclusions moyennes rougeâtres émoussées également réparties uniformément. Au microscope (grossissement x40), apparaissent de manière régulière des fines inclusions blanches émoussées, et transparentes angulaires, en quantité moyenne.
237 – Qualité du tournage/épaisseur des parois : moyenne, parois épaisses.
248- Type de cuisson : mode A.
259 – Formes associées : gobelet ovoïde (3).
2610 – Décors associés : aucun.
2711 – Production : ce groupe n’appartient pas aux céramiques à paroi fines mais le préfigure, c’est pourquoi il n’apparaît pas dans les tableaux de synthèse. Il s’agit de petites ollae en céramique commune claire de Musarna8 ; l’olla au module réduit ; est une forme très populaire tout au long de la période républicaine, en Étrurie et dans le Latium9, où elle est déclinée dans de nombreux modules. À Musarna, ces vases sont attestés dans des contextes qui précèdent les céramiques à paroi fine en pâte non calcaire et disparaissent dès leur apparition. Ils préfigurent la forme du gobelet ovoïde (3) à paroi fine qui sera fabriqué avec une autre pâte. Sa distinction met en évidence le choix d’argiles non calcaires, sableuses pour la fabrication des premiers gobelets à paroi fine.
2812 – Chronologie : fin du IIIe– troisième quart du IIe siècle av. J.-C.
b. Groupe technique 1 : matrice argileuse non calcaire, granulométrie moyenne à grossière, sans revêtement (pl. XXXIII), NR 17892, NMI 1801
291 – Couleur de la pâte et des surfaces : orange, rouge, marron, gris. Quelques surfaces noircies
302 – Composition de l’argile : non calcaire.
313 – Dureté : pâte moyennement dure, facilement cassable à main nue, fracture irrégulière.
324 – Traitement de surface/ Sensation au toucher : surface lissée mais l'effet tactile est rugueux, sableux et/ou pulvérulent.
335 – Granulométrie des inclusions : d’assez fine à grossière mais le plus généralement moyennement fine. Les inclusions sont visibles à l’œil nu.
346 – Inclusions : quelques inclusions noires, plutôt plates, visibles à l’œil nu. Au microscope (grossissement x40), apparaissent quelques grosses inclusions transparentes angulaires, réparties de façon hétérogène, et de très nombreuses inclusions transparentes, blanches et grises, émoussées distribuées de façon homogène. Dans certains cas, la pâte semble être constituée pour plus de moitié d’inclusions, lui conférant un aspect sableux.
357 – Qualité du tournage/épaisseur des parois : généralement bonne qualité de tournage ; parois moyennement fines.
368 – Type de cuisson : mode A.
379 – Formes associées : gobelet fusiforme (1), gobelet piriforme (2), gobelet ovoïde (3), gobelet à panse sphérique (4), gobelet à panse cintrée (5), gobelet cylindrique (6), gobelet en tonneau (7), gobelet en pseudo-tonneau (8), gobelet tronconique (9), gobelet à panse verticale (10), gobelet en tulipe (11), gobelet à col vertical (12), gobelet en calice (13), gobelet en entonnoir haut (15), bol hellénistique à relief (18), bol hémisphérique (19), bol en cloche (20), bol à panse convexe (21a), bol à panse verticale (22a), bol à panse évasée (23a), tasse à panse trapue basse (24a), tasse à panse trapue haute (25), tasse carénée basse (27),,tasse à panse convexe (29), tasse tronconique (30a), tasse cylindrique (31) canthare à paroi rentrante (33), canthare en cloche (34), canthare en calice (35), skyphos (36), rhyton (37), cruche à col resserré (38), cruche fusiforme (39a), cruche trilobée (40), pichet (41), lagynos (42), pot (44), aryballe (45a), askos (47).
3810 – Décors associés : barbotine (perles, torsades, semis d’épines, écailles, gouttes d’eau), décors incisés (arêtes de poisson, guillochis, sillons verticaux et horizontaux, profond sillon), décor tourné (« dépression »), décor composite moulé, appliques (feuilles de palmier, pattes), décors peints (guirlandes et feuilles d’eau).
3911 – Productions : il faut d’abord souligner qu’il s’agit de la technique caractéristique des productions d’Étrurie méridionale, celle-là même qui a conduit à l’identification du groupe. À Musarna, elle concerne plus des trois quarts des fragments et des individus de céramique à paroi fine ; cependant des différences sensibles apparaissent dans les préparations et renvoient à des ateliers distincts ou des phases chronologiques différentes. Il n’est pourtant pas simple d’attribuer à une production chaque tesson, car les variations peuvent parfois être innombrables ou minimes et placent très souvent le fragment entre deux productions supposées. Trois petits groupes aux caractéristiques claires sont néanmoins apparus :
- La pâte « rouge/marron brique à gros dégraissants sableux » : elle se singularise par une pâte aux couleurs vives, riche de gros dégraissants sableux ; les parois sont relativement épaisses. À la suite de la cuisson en mode A, la réoxydation est complète et uniforme. Il s’agit d’une pâte extrêmement poreuse. Elle est par ailleurs identique à celle d’une partie des communes à feu contemporaines présentes à Musarna. Les formes qui l’utilisent sont associées dans les mêmes contextes archéologiques10 : il s’agit de gobelets fusiformes (1), de gobelets ovoïdes (3), du gobelet à panse cintrée (5), de nombreux bols hémisphériques (19), de tasses à panse trapue basse (24a) et de skyphoi (36). Cette production est attestée dans les nécropoles de Tarquinia11et trois exemplaires sont exposés au Musée de Tarquinia : une tasse carénée basse à panse conique, un bol en cloche (20) et un skyphos (36). Un exemplaire identique de shyphos est exposé au British Museum12. Un exemplaire de tasse trapue basse (24a), provenant d’Anversa degli Abruzzi est exposé au Musée civique de Sulmona. Cette production est en revanche presque totalement absente à Cosa13. En raison de sa concentration à Musarna et de sa similitude avec les céramiques communes à feu, il est très probable que ce groupe provienne d’un atelier local/régional. Les formes parmi les plus anciennes sont fabriquées avec cette pâte qui peut être datée du dernier tiers du IIe siècle av. J.-C.14.
- La pâte « à surface grise » se caractérise par une réoxydation souvent partielle des parois, leur conférant des dégradés allant du orange au gris noir. Dans cette pâte, les dégraissants sont généralement plus petits et moins nombreux. Les parois sont plus fines que dans le groupe précédent et sont souvent soigneusement lissées. Dans ce groupe, on compte principalement des gobelets fusiformes (1), des gobelets ovoïdes (3), des gobelets à panse sphérique (4), gobelets cylindriques (6), des gobelets en tonneau (7), des gobelets en pseudo-tonneau (8), des gobelets tronconiques (9), des gobelets en calice (13), des tasses carénées basses (27) et des bols à panse vertical (22b). Le décor à la barbotine au motif de torsades est caractéristique de cette production. La quantité et la cohérence du groupe, tant sur le plan technique que morphologique laisse penser qu’il s’agit d’une production locale ou régionale. Nous avons d’ailleurs pu observer que la même pâte était employée sur les mêmes formes provenant du puits 593 de Ferento. Il est possible que les vases du sous-groupe de pâte « rouge/marron brique à gros dégraissants sableux » et celui à « surface grise » proviennent d’ateliers distincts car le traitement des pâtes et le répertoire morphologique sont différents. Tous deux sont néanmoins attestés dans le territoire de Tarquinia où il faut certainement localiser ces centres de production. Le sous-groupe à « surface grise » semble par ailleurs plus récent et couvre les trois premiers quarts du Ier siècle av. J.-C.
- La pâte « orange fine » apparaît comme une petite évolution de la pâte à « surface grise ». La pâte est plus épurée bien qu’elle conserve toujours cette impression « sableuse ». La cuisson et notamment la phase de réoxydation est plus homogène. Les formes caractéristiques de ce groupe sont les mêmes que celles de celui à « à surface grise ». Cette production provient peut-être du même atelier, toujours localisé dans le territoire de Tarquinia. La production couvre les trois derniers quarts du Ier siècle av. J.-C.
- La pâte « élastique » se singularise par de faibles déformations probablement apparues au séchage, comme si, la pâte plus humide, s’était légèrement affaissée. La matrice argileuse diffère assez nettement des trois productions précédentes : à l’impression « sableuse » se substitue celle d’une matrice argileuse à « feuillet ». Il s’agit d’une caractéristique que l’on retrouve dans le groupe technique 3 avec lequel elle partage d’ailleurs, une épuration majeure et une nette diminution des inclusions visibles à l’œil nu. Les aryballes (45a) sont caractéristiques de ce sous-groupe. L’impression que donne la matrice argileuse, son association à une forme aussi singulière – que l’on retrouve presque exclusivement dans les Bains hellénistiques – et en conséquence dévolue à un contenu en particulier, laisse supposer que cette pâte est fabriquée en dehors du territoire de Tarquinia. Un exemplaire de tasse tronconique (30a) beaucoup moins soigné que ceux des groupes techniques 2 et 7 présente la même pâte « élastique ». Un fragment identique est attesté dans le corpus de Cosa auquel se rattache cette production datée de la seconde moitié du Ier siècle av. J. C.
40Le groupe technique 1 regroupe des productions diverses marquées par une diminution progressive des gros dégraissants et par l’affinement des parois. Les productions de ce groupe proviennent pour l’essentiel d’ateliers locaux ou régionaux, situés dans le territoire de Tarquinia. Seul le sous-groupe à pâte « élastique », caractérisés par les aryballes (45a) semble provenir d’ailleurs, certainement de la région de Cosa où d’autres formes présentent une pâte similaire.
4112 – Chronologie : du dernier tiers du IIe à la fin du Ier siècle av. J.-C.
c. Groupe technique 2 : matrice argileuse non calcaire, granulométrie fine, sans revêtement (pl. XXXIV), NR 1021, NMI 148
421 – Couleur de la pâte et des surfaces : orange vif, marron et gris foncé.
432 – Composition de l’argile : non calcaire, toutefois, il n’est pas impossible que nous ayons placé dans ce groupe des fragments dont l’argile se situe à la limite entre calcaire et non calcaire15. Couleur externe gris foncé et interne orange vif. Il est difficile de savoir si ces différences de couleur sont dues à la nature de l’argile ou à des effets de cuisson. La pâte est plus fine, parfois extrêmement fine.
443 – Dureté : pâte dure, fracture nette, son métallique pour les exemplaires de meilleure qualité.
454 – Traitement de surface/ Sensation au toucher : sans revêtement, surface lisse.
465 – Granulométrie des inclusions : de fine à très fine, homogène et compacte.
476 – Inclusions : invisibles à l’œil nu. Au microscope (grossissement x40), fines inclusions angulaires transparentes et légèrement émoussées, en quantité moyenne et réparties régulièrement. On trouve plus rarement des « agglomérations » d’inclusions violettes.
487 – Qualité du tournage/épaisseur des parois : de bonne à excellente qualité, parois fine à très fines.
498 – Type de cuisson : mode A. Certains vases de ce groupe sont cuits à très hautes température : une partie des surfaces externes, notamment des tasses tronconiques, ne se réoxydent pas après la cuisson et restent grises. La différence très nette de l'évolution des surfaces externes et internes (bien rouges) des tasses tronconiques au cours de la cuisson, suggère une attention particulière lors de l'empilement dans les fours de ces vases très fragiles.
509 – Formes associées : gobelet ovoïde (3), gobelet à panse sphérique (4), gobelet en tonneau (7), gobelet en pseudo-tonneau (8), gobelet en tulipe (11), gobelet à col vertical (12), gobelet en calice (13), gobelet en entonnoir haut (15), gobelet en entonnoir ondulé (16), bol hémisphérique (19), bol en cloche (20), bol à panse verticale (22a), bol à panse évasée (23a), tasse à panse trapue basse (24a),tasse à panse trapue haute (25), tasse carénée basse (27), tasse à panse évasée (28), tasse à panse convexe (29), tasse tronconique (30a), tasse carénée haute (32a), pichet (41).
5110 – Décors associés : barbotine (perles, semis d’épines, torsades), décors incisés (sillons, guillochis, arêtes de poisson, sillons verticaux).
5211 – Productions : groupe facilement identifiable grâce à la qualité de ses productions. L'argile non calcaire est ici finement épurée. Le répertoire morphologique est beaucoup plus réduit que celui groupe technique 1 et la forme des tasses tronconiques (30a) domine largement le groupe. L'excellence technique est visible dans la préparation de la pâte, la finesse des parois, l'introduction de formes plus difficiles à tourner et dans l’exécution du décor guilloché qui atteint sur les tasses tronconiques une qualité d'exécution incomparable par leur adaptation à la morphologie du vase et par leur régularité. Seul des exemplaires du groupe technique 7 atteignent une telle qualité. Nous les avons néanmoins distingués car la matrice argileuse est clairement différente. Ceci étant dit, il nous semble très probable que ces tasses soient fabriquées par les mêmes potiers, tant la qualité du tournage est unique. La question est de savoir si le même atelier a changé ses techniques de préparation de l'argile ou si les potiers se sont déplacés vers un autre centre de production contemporain.
53La matrice argileuse du groupe technique 2 nous semble proche de celle du groupe technique 1 : elle est toujours très compacte, présente une excellente tenue au séchage et aucune déformation à la cuisson. Comme pour le groupe technique 1, elle reprend des formes, sinon caractéristiques, bien attestées dans le territoire de Tarquinia dont le gobelet en tulipe (11), le bol hémisphérique (19), le bol en cloche (20) et introduit la tasse tronconique (30a). Ces indices définissent une filiation directe entre les groupes de pâte et permettent de localiser la production des céramiques à paroi fine du groupe technique 2 dans le territoire de Tarquinia. Si la qualité des tasses tronconiques (30a) les isole du reste des autres formes, leur absence en dehors du territoire de Tarquinia en fait un produit caractéristique de cette zone.
5411 – Chronologie : le nombre de formes produites avec cette pâte est réduite et sa répartition stratigraphique à Musarna concise ; cela correspond à une seule phase de production dont l'activité se situe dans la seconde moitié du Ier siècle av. J-C.
d. Groupe technique 3 : matrice argileuse non calcaire, granulométrie moyenne, avec revêtement (pl. XXXIV), NR 127, NMI 14
551 – Couleur de la pâte et des surfaces : la pâte est de couleur orange/marron.
562 – Composition de l’argile : non calcaire.
573 – Dureté : pâte assez dure, fracture irrégulière.
584 – Traitement de surface/ Sensation au toucher : les parois sont couvertes d’un engobe, plus ou moins grésé, orange, rouge, marron, gris ou noir.
595 – Granulométrie des inclusions : moyenne, assez compacte.
606 – Inclusions : rares inclusions visibles à l’œil nu. Au microscope (grossissement x40), on observe des inclusions angulaires transparentes, de taille fine à moyenne, en quantité moyenne et réparties de manière homogène. Rares inclusions noires, rondes, réparties uniformément.
617 – Qualité du tournage/épaisseur des parois : bonne qualité, parois fines.
628- Type de cuisson : mode A. Toujours cuite à très haute température cette argile semble s’affaisser légèrement au séchage.
639 – Formes associées : gobelet en tonneau (7), bol à panse verticale (22a), tasse carénée haute (32a), pot (44).
6410 – Décors associés : barbotine (feuille d’eau), décor incisé (sillons, guillochis), décor sablé.
6511 – Productions : ce groupe technique à la particularité de présenter des vases à la matrice argileuse non calcaire et aux parois couvertes d’un engobe calcaire (généralement caractéristique des productions en argile calcaire). De nombreux fragments à décor sablé sont fabriqués avec cette pâte. Comme pour la production « à pâte élastique » du groupe technique 1, la matrice argileuse n’est pas sableuse mais plutôt à « feuillet ». Ici aussi, les parois se sont légèrement déformées au cours du séchage ou de la cuisson. Un certain nombre de fragments de ce groupe, notamment ceux appartenant aux bols à panse verticale (22a) à décor sablé et aux tasses à carénée hautes (32a), appartiennent aux mêmes productions que certains parallèles observés à Cosa, où il est nettement plus représenté. Très fragmentée, sa faible quantité à Musarna peut être liée à une origine externe au territoire de Tarquinia où une chronologie plus récente, et donc à sa disparition avec les niveaux archéologiques supérieurs arasés.
6612 – Chronologie : derniers tiers du Ier siècle av. J.-C., premier tiers du Ier siècle ap. J.-C.
e. Groupe technique 4 : matrice argileuse non calcaire, granulométrie moyenne, cuisson mode B (pl. XXXIV), NR 2 ; NMI 1
671 – Couleur de la pâte et des surfaces : gris/noir
682 – Composition de l’argile : non calcaire.
693 – Dureté : assez dure, cassure irrégulière.
704 – Traitement de surface/ Sensation au toucher : sans engobe, surface polie, lisse.
715 – Granulométrie des inclusions : fine et compacte.
726 – Inclusions : pas d’inclusions visibles à l’œil nu. Au microscope (grossissement x40), on observe de grandes inclusions blanches, plus ou moins émoussées, en quantité moyenne et réparties uniformément. S’y ajoutent de rares petites inclusions noires et rondes et d’exceptionnelles inclusions noires, plates.
737 – Qualité du tournage/épaisseur des parois : bonne qualité, parois fines.
748 – Type de cuisson : mode B.
759 – Formes associées : tasse à panse trapue haute (22).
7610 – Décors associés : guillochis.
7711 – Production : cet unique fragment se distingue par son mode de cuisson. Il s’agit d’une production importée indéterminée.
7812 – Chronologie : à partir de l'époque augustéenne.
f. Groupe technique 5 : matrice argileuse calcaire, granulométrie fine, avec revêtement (pl. XXXV) NR 898 ; NMI 119
791 – Couleur de la pâte et des surfaces : la pâte est beige à rose. Les surfaces engobées sont rose, orange, rouge, marron, gris ou noir.
802 – Composition de l’argile : calcaire.
813 – Dureté : dure à très dure.
824 – Traitement de surface/ Sensation au toucher : les parois sont lisses, revêtues d’un engobe calcaire plus ou moins grésé.
835 – Granulométrie des inclusions : très fine et compacte.
846 – Inclusions : Très rares inclusions visibles à l’œil nu. Au microscope (grossissement x40), on observe en grande quantité, de petites inclusions angulaires transparentes réparties uniformément et quelques grosses inclusions blanches réparties de façon hétérogène. Rares inclusions gris/noir, plutôt rondes, très petites et réparties uniformément.
857 – Qualité du tournage/épaisseur des parois : bonne qualité, parois fines à moyennes.
868- Type de cuisson : mode A.
879 – Formes produites : gobelet ovoïde (3), gobelet cylindrique (14), gobelet à panse trapue (17), bol à panse convexe (21b), bol à panse verticale (22b), bol à panse évasée (23b), tasse à panse trapue basse (24b), tasse tronconique (30b), tasse carénée haute (32b), aryballe (45b).
8810 – Décors associés : barbotine (écaille, semis d’épines), décor incisé (guillochis, sillons horizontaux et verticaux, profond sillon), décor tourné (« dépressions »), décor sablé, éléments plastiques (anneaux).
8911 – Productions : le groupe technique 5 est en rupture totale avec les groupes précédents d’époque tardo-républicaine et augustéenne. Il se singularise par l’emploi d’argiles calcaires, similaires à celles employées pour les productions de céramiques à vernis noir et de sigillées. Ce changement radical de technique, l’engobe, les formes, est à rapprocher de l’essor des sigillées dont elles n’adoptent pas pour autant la cuisson en mode C.
90Les productions les plus anciennes de ce groupe sont d’excellente qualité et concernent principalement les bols à panse verticale (22b) et les tasses carénées hautes (32b) : la pâte et dure, les engobes répartis uniformément. Ces pâtes sont beaucoup moins représentées dans notre corpus, et pour cause, elles sont essentiellement produites aux périodes dont les niveaux sont arasés à Musarna.
91Les caractéristiques techniques du groupe 5 définissent des productions variées que nous ne sommes pas en mesure de préciser. Nous pouvons néanmoins retenir, que les exemplaires de la première moitié du Ier ap. J.-C., présentent des engobes d’assez bonne qualité et bien cuits. La pâte des exemplaires du IIe siècle ap. J.-C. présente en revanche des affinités plus grandes avec celle des céramiques communes fines, et les engobes sont généralement moins adhérents. Il est possible qu’une partie de ces vases aient été produits à Sutri16.
92La production la plus tardive regroupe presque exclusivement des gobelets à panse trapue (17) déclinés dans de nombreux modules. La même forme peut ainsi être un gobelet ou un pot à provisions en céramique commune fine. D’origine locale/régionale, le terme de céramique à paroi fine n’est d’ailleurs plus approprié pour ces productions de céramiques communes fines qui intègrent des vases de consommation des liquides. Leur production se situe entre les IIe IIIe siècle ap. J.-C.
9312 – Chronologie : Ier et IIe-IIIe siècle ap. J.-C.
g. Groupe technique 6 : matrice argileuse calcaire, granulométrie fine, sans revêtement (pl. XXXV), NR 332 ; NMI 36
941 – Couleur de la pâte et des surfaces : pâte blanche, beige à rose. Sans revêtement.
952 – Composition de l’argile : calcaire.
963 – Dureté : plutôt pâte tendre.
974 – Traitement de surface/ Sensation au toucher : surface pulvérulente au toucher.
985 – Granulométrie des inclusions : très fine.
996 – Inclusions : pas d’inclusion visible à l’œil nu. Au microscope (grossissement x40), on observe de très rares inclusions de taille moyenne, blanches et plutôt émoussées.
1007 – Qualité du tournage/épaisseur des parois : fines à moyennes.
1018 – Type de cuisson : mode A.
1029 – Formes produites : gobelet en entonnoir ondulé (16), gobelet à panse trapue (17), bol à panse évasé (23b), tasse à panse trapue haute (25b), cruche fusiforme (39b), aryballe (45b), trulla (46), couvercle à panse convexe (48), couvercle à panse évasée (49), couvercle à panse concave (50).
10310 – Décors associés : barbotine (semis d’épines), décors incisés (sillons, guillochis, arêtes de poisson).
10411 – Productions : ce groupe technique, assez hétérogène, se distingue du précédent par l’absence de revêtement. On ne peut cependant exclure que celui-ci ait disparu sur certains exemplaires. La matrice argileuse calcaire, très fine, est très proche de celle des céramiques communes fines. Comme pour le groupe précédent on peut d’ailleurs associer à Musarna17 quelques formes, notamment le gobelet à panse trapue (17) à certains pots, beaucoup plus grands mais de formes identiques, fabriqués avec la même pâte. Ce groupe marque l’appauvrissement du répertoire morphologique des vases à boire. Les pâtes étant identiques à une partie des céramiques communes fines, il est probable que ce groupe englobe des productions locales ou régionales.
10512 – Chronologie : Ier-IIe siècle ap. J.-C.
h. Groupe technique 7 : matrice argileuse indéterminée, granulométrie très fine, sans revêtement (pl. XXXVI), NR 4833 ; NMI 337
1061 – Couleur de la pâte et des surfaces : beige, orange clair et marron généralement clair.
1072 – Composition de l’argile : indéterminée.
1083 – Dureté : dure, fracture nette.
1094 – Traitement de surface/ Sensation au toucher : surface lisse ; pour les exemplaires d’excellente qualité : sensation « grasse » au toucher.
1103 – Granulométrie des inclusions : de moyennement à très fine ; compacte.
1116 – Inclusions : Rares inclusions visibles à l’œil nu. Au microscope (grossissement x40), on observe une quantité moyenne de grandes inclusions transparentes angulaires ainsi que quelques grandes inclusions noires plus ou moins émoussées. Les inclusions sont réparties uniformément.
1127 – Qualité du tournage/épaisseur des parois : parois de fines à très fines ; qualité de tournage de bonne à excellente.
1138 – Type de cuisson : mode A.
1149 – Formes associées (graph. 9) : Gobelet ovoïde (3), gobelet à panse sphérique (4), gobelet en tonneau (7), gobelet en pseudo-tonneau (8), gobelet tronconique (9), gobelet à panse verticale (10), gobelet en tulipe (11), gobelet à col vertical (12), gobelet en calice (13), bol hémisphérique (19), bol à panse verticale (22a), bol à panse évasée (23a), tasse à panse trapue basse (24a), tasse en calice (26), tasse carénée basse (27),tasse à panse évasée (28), tasse à panse convexe (29), tasse tronconique (30a), tasse cylindrique (31), cruche trilobée (40), pichet (41), bouteille à panse sphérique (43), pot (44), aryballe (45a), askos (47).
11510 – Décors associés : barbotine (écailles, semis d’épines, torsades), décors incisés (sillons, guillochis, arêtes de poisson, sillons verticaux), décor tourné (« dépressions »).
11611 – Productions : bien que la matrice argileuse soit difficilement qualifiable – sans doute peu calcaire – le groupe technique 7 n’en reste pas moins un groupe assez homogène. Les pâtes sont nettement moins sableuses, parfois « grasses » mais avec une excellente tenue au séchage. Elles diffèrent totalement des pâtes calcaires de céramiques fines contemporaines comme celles du vernis noir ou de la sigillée italique et de celles des céramiques communes fines. Ces pâtes se caractérisent par une excellente qualité de tournage : les parois sont fines, les lèvres et les fonds finement moulurés et les décors, simples, exécutés avec adresse. L’excellence de ce groupe est représentée par les tasses tronconiques (30a) qui en constituent la forme principale. En dehors des aryballes (45a), les autres formes sont nettement moins représentées, une partie d’entre elles sont déjà bien attestées chronologiquement depuis le dernier tiers du Ier s. av. J.-C. : gobelet à panse sphérique (4), gobelet en tonneau (7), gobelet en pseudo-tonneau (8), gobelet en calice (13), bol à panse verticale (22a). D’autres sont en revanche nouvelles et caractéristiques de cette pâte, bien que peu représentées : tasse à panse convexe (29), gobelet à panse verticale (10), tasse cylindrique (31), bouteille à panse sphérique (43).
117À l’intérieur du groupe technique 7, on distingue deux productions.
- La pâte « crème » est celle qui caractérise le mieux ce groupe ; elle est très légèrement sableuse et finement épurée. La forme caractéristique est la tasse tronconique (30a) qui est la forme également représentative du groupe technique 2. Malgré la différence de leur matrice argileuse, la qualité de leur exécution laisse à penser que ces tasses tronconiques (30a) sont fabriquées par les mêmes potiers. D’après les descriptions, cette pâte et attestée à Tarquinia18, et à Véies19 et d'après nos observations sur quelques fragments de Cosa20 et sur un exemplaire exposé au musée de Bologne21. Dans l’état actuel des connaissances, il est difficile de proposer une localisation pour cette production : sa concentration dans le territoire de Tarquinia pousserait à la situer dans cette région mais sans certitude. Il ne faut par ailleurs pas la confondre avec des productions ébusitaines qui présentent une pâte très semblable bien que moins « lisse » sur d’autres formes. Production d’époque augustéenne.
- La pâte « marron compacte » se distingue par une qualité inférieure à la pâte « crème ». Beaucoup moins sableuse, la matrice argileuse semble plus fine et plus compacte. Même si quelques inclusions sont visibles à l’œil nu. Cette production concerne essentiellement des aryballes (45a). Là-encore la typologie de la forme et son exécution permettent de l’associer à la pâte des aryballes (45a) de la production à « pâte élastique » du groupe technique 1, localisée aux alentours de Cosa. Elle est datée de l’époque augustéenne et tibérienne.
11812 – Chronologie : seconde moitié du Ier siècle av. J.-C./premier tiers du Ier siècle ap. J.-C. ; l’apogée de la production semble néanmoins se situer à l’époque augustéenne.
L’évolution technique des céramiques à paroi fine
119Les évolutions techniques liées au choix de la pâte des céramiques à paroi fine de Musarna montrent des caractéristiques propres à diverses phases chronologiques. On distingue tout d’abord un petit groupe d’ollae22 de petites dimensions réalisées en argile calcaire riche de gros dégraissants. Il ne s’agit pas de céramique à paroi fine, mais de céramique commune plutôt grossière de couleur beige/crème. La forme n’est pas nouvelle, bien au contraire, l’olla est parmi les plus anciennes et constantes en Italie centrale. Leur originalité réside dans la multiplication du petit module, de toute évidence liée à de nouveaux modes de consommation qui aboutiront ensuite, au groupe des céramiques à paroi fine. Les gobelets ovoïdes se multiplient également en Sicile et dans les Pouilles dans cette première moitié de IIe siècle av. J.-C.
120Les premières céramiques à paroi fine sont réalisées en argile non calcaire et ne présentent aucun revêtement (groupe technique 1), elles ont des surfaces généralement très colorées, rouge/orange parfois marron/grise. Le groupe le plus ancien (production « rouge/marron brique à gros dégraissants sableux ») présente une pâte parfois identique à celle des céramiques communes à feu. À l’intérieur du groupe technique 1, le traitement de la pâte évolue vers une épuration toujours plus importante. Cette transformation peut avoir plusieurs explications : la première indiquerait une évolution des préparations de pâte à l’intérieur d’un même atelier ; la seconde est qu’il s’agit d’une production distincte. Dans les deux cas, elle concerne des exemplaires légèrement plus récents. Le groupe technique 2 se caractérise là encore par une pâte toujours mieux épurée et des productions de très bonne qualité, aux parois très fines. La nature même de la matrice argileuse diffère peu ou prou des productions « rouge/marron brique à gros dégraissants sableux », « à surface grise » ou « orange fine » ; elle garde la même base sableuse mais on observe des différences dans son mode de préparation. Ces productions proviennent-elles pour autant du même atelier ? Cela reste très difficile à établir. On ne peut en effet nier les affinités techniques qui englobent la préparation de la pâte et la qualité du tournage ainsi que les affinités typologiques. Mais on remarque par ailleurs les singularités qui délimitent chaque production. Il semble donc plus prudent de parler de plusieurs ateliers actifs dans le territoire de Tarquinia. Il faut aussi prendre en considération les différentes phases de production puisque ces pâtes concernent des formes produites entre le dernier tiers du IIe et le Ier siècle av. J.-C.
121Il est en revanche possible d’attribuer à un groupe d’ateliers distincts la production à « pâte élastique » des groupes techniques 1 et 3. Bien que leur technique de fabrication diffère dans l’application d’engobes calcaires sur les vases du groupe technique 3, la nature de la matrice argileuse, laisse supposer qu’ils proviennent de la même région. D’après nos observations leur argile nous semble comparable à celle d’un certain nombre de fragments provenant de Cosa, dont un atelier se situerait aux alentours. Si cela est le cas, la datation s’étalerait du début du Ier siècle av. J.-C. à la fin de l’époque augustéenne.
122Le groupe technique 4 n’est représenté que par un seul individu. Malgré sa représentation totalement insignifiante, nous avons choisi de lui créer un groupe car sa technique de fabrication est peu commune à Musarna. Il s’agit d’une importation d’origine indéterminée.
123Dans le prolongement de l’excellente qualité des productions du groupe technique 2 apparaît le groupe technique 7 dont il est difficile de définir la matrice argileuse. Ce n’est d’ailleurs pas fondamental, tant le groupe est homogène et permet de bien regrouper les fragments fabriqués avec cette technique. On peut définir deux aires de production, la première se déduit à partir des affinités techniques et typologiques entre le groupe à pâte « crème » et le groupe technique 2 dont la localisation de la production est indéterminée. En revanche, le groupe de pâte « marron compacte » se rapproche des productions de Cosa.
124Le groupe technique 7 définit une nouvelle phase de production que l’on peut situer entre l’époque augustéenne et l’époque tibérienne.
125Une rupture nette dans les attestations de céramique à paroi fine apparaît avec l’introduction d’argiles très calcaires, comparables à celles utilisées pour les céramiques à vernis noir, les sigillées et les céramiques communes fines. Les vases sont en outre systématiquement couverts d’engobes calcaires peu ou non grésés, ce qui était jusqu’ici un élément relativement marginal. Le répertoire morphologique s’appauvrit considérablement. Une partie de ces productions a bien évidemment disparu avec les niveaux arasés, néanmoins, tous les corpus de la région mettent en lumière cet effondrement typologique et quantitatif. Les fragments que nous avons pu observer sont hétérogènes et rompent avec l’image d’homogénéité jusqu’alors observée. L’essentiel de ces vases à boire ou à verser, calcaires et engobés proviennent d’ateliers plus éloignés. Il est très difficile de les localiser, peut-être se situent-ils aux alentours de Rome, ou plus au nord en Toscane ? Ces productions sont datées de tout le Ier siècle ap. J.-C. mais semblent se concentrer principalement dans la première moitié de ce siècle.
126Le dernier groupe technique, le 6, concerne des vases à boire d’argile calcaire sans revêtement. Ces vases sont peu nombreux et proviennent principalement de la nécropole impériale. Leur pâte, très homogène, est similaire à celle des céramiques communes contemporaines, ce qui laisse supposer de nouvelles productions locales ou régionales pour les vases à boire.
Notes de bas de page
1 Infra, chap. 1, 1. Les caractéristiques techniques.
2 Desbat – Schmitt 2001, p. 39.
3 Pour la description des modes de cuisson établis par M. Picon, Infra, chap. 1, 1. Les caractéristiques techniques.
4 Beige, beige rose, beige orange, beige marron, orange, orange brique, orange rouge, orange marron, orange grisâtre, rouge, rougeâtre marron, marron clair, marron, marron grisâtre, marron noirâtre, grise, blanche et noire.
5 Analyses réalisées par fluorescence X en dispersion de longueur d'onde. Vingt-quatre éléments chimiques sont déterminés, dont dix-sept sont couramment utilisés pour réaliser des classifications de céramiques à partir de leur composition chimique (éléments majeurs et mineurs : MgO, Al2O3, SiO2, K2O, CaO, TiO2, Fe2O3, MnO ; éléments traces : V, Cr, Ni, Zn, Rb, Sr, Zr, Ba, Ce. Voir aussi Desbat – Schmitt 2011, p. 67-69.
6 Inv. 648017.1305
7 Inv. 424014.1906, 635006. 39 et 635006. 44.
8 L’étude ne traite pas la totalité des gobelets fabriqués avec cette pâte qui sont sans aucun doute beaucoup plus nombreux dans les contextes antérieurs non étudiés pour la présente étude.
9 Olcese 2003, p. 78.
10 Pl. LIV.
11 Serra Ridgway 1996, N° T 33-50, p. 48, N° T 90-51 et T 90-52, p. 111, N° T 112-171 et T 112-172, p. 137.
12 The British Museum ; Museum number : 1839,1109.14. b.
13 D’après nos observations faites sur le lot de céramique à paroi fine de Cosa.
14 PL. LIV.
15 Infra, chap. 5, 1. Nature de la matrice argileuse.
16 Duncan 1965.
17 Rebillard 2009.
18 Serra Ridgway 1996, N° T 105-37, N° T 159-12, p. 263.
19 Pohl 1973, N° 31, p. 78.
20 Marabini 1973, N° 181et 187, pl. 17 et 293, pl. 32.
21 Musée archéologique de Bologne, N°27, ROM 1445, Collezione Palagi.
22 Infra, chap. 5, 1.a. Les « pré-paroi fine » : argile calcaire, granulométrie grossière, sans revêtement.
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