1 En 1983, lorsque l’ex-Haute-Volta devint le Burkina Faso, la Volta Rouge fut rebaptisée Nazinon, la Volta Blanche, Nakambé et la Volta Noire, Mouhoun.
2 Des chiffres relativement anciens (recensement 1985) estimaient à 82 000 le nombre de Kasena vivant au Burkina. Ils représentent actuellement une population de 100 000 personnes environ.
3 En 1985, les départements de Zecco et de Ziou comptaient 23 391 habitants (ibid.).
4 Cet ancien district est aujourd’hui formé par les deux districts administratifs de Chiana-Paga, à l’ouest, et de Navrongo, à l’est. Le Census Report de 1960 dénombrait dans le district KasenaNankana 36 400 Kasena et 55 000 Nankana (soit un ratio de 40 Kasena pour 60 Nankana). On peut estimer qu’il y a, actuellement, un peu plus de 80 000 Kasena qui vivent au nord du Ghana.
5 Rattray qui a mené des enquêtes auprès de cette « branche » des Kasena appelée aussi Awuna indique qu’elle est constituée de deux groupes, respectivement les Fera et les Nagwa (op. cit. : 524).
6 Anciennement appelé « Forêt de Po », il porte aujourd’hui le nom de parc Tambi Kaboré.
7 S’il constitue bien l’un des plus élevés du Burkina (447 mètres d’altitude), l’inselberg du Nahouri reste cependant de dimension modeste puisqu’il ne domine la plaine environnante que de 180 mètres.
8 Ainsi, tel massif de collines est réputé s’aplatir à chaque fois que les villageois, au temps où les conflits intervillageois n’étaient pas rares, y cherchaient refuge à l’approche d’une expédition vindicative menée par un village voisin ; tel autre, tout au contraire, dans la même circonsiance, se faisait impénétrable pour les ennemis.
9 Kukula est connu et fréquenté par des pèlerins venant de tout le Ghana (Awedoba, 1985 : xx). Les habitants de Kaya qui connaissent fort bien ce tàŋwám racontent que, jadis, il se trouvait implanté dans leur propre village. Mais les sollicitations constantes des villageois et l’oubli systématique de leurs dettes sacrificielles ayant fini par lasser la puissance, elle s’en est un jour allée loin à l’ouest, près de Kayoro. Un interdit pèse encore aujourd’hui sur tous les membres de la communauté de Kaya qui n’ont plus le droit de se rendre auprès de ce lieu.
10 Selon l’usage, nous utilisons les guillemets lorsque le terme qu’ils encadrent renvoie à une classification culturelle et non à une classification linguistique.
11 Maurice Delafosse (1912) ; Louis Tauxier (1912) ; H. Baumann, Thurnwald, D. Westerman (1940).
12 Guy Le Moal (1963), repris par Michel Izard (1970) et Anne-Marie Duperray (1984).
13 Il faut lire à ce propos les critiques de Luc de Heusch, ainsi que ses propositions très stimulantes pour une nouvelle conception de l’aire culturelle, dans un article récent où il répond aux contempteurs de l’emploi du concept d’ethnie en anthropologie (Heusch, 1997).
14 Il n’existe pas d’étymologie de ce terme dont l’origine linguistique est incertaine. Ses diverses connotations (« homme de brousse », « fou », « esclave », « non circoncis », etc.), données par les usagers du terme – tous extérieurs aux populations ainsi globalement nommées témoignent plus d’un fantasme de groupe que d’une véritable signification du terme. La dernière « traduction » en date a été proposée par Bonvini qui, après une enquête auprès d’interlocuteurs moose et kasena, pense qu’il s’agit d’un sobriquet moore fabriqué sur les termes de/gúgó/« battue » et de/dúmsi [rúmsi] sg. dúngá/« animaux » et qui signifie « gibier de battue » (1988 : 11).
15 Surnom qu’ils attribuent également aux Djerma (ou Zamberma), cette fraction de Songhay qui, plus que les Moose, ont laissé un souvenir cuisant dans la mémoire des peuples de ces régions par les nombreux raids qu’ils y effectuèrent dans la seconde moitié du XIXe siècle (cf. infra).
16 Les Kasena orientaux font de la région bisa le lieu d’origine de tous les forgerons installés chez eux. Ces derniers, tout en revendiquant d’être aujourd’hui des Kasena, confirment cette origine. À l’appui de leur dire, ils indiquent que l’ethnonyme par lequel ils désignent les Bisa est formé sur le même radical/lu/que les termes qui signifient « forgeron » (luru), « fer » (luu) et « forger » (lugә). Nous n’avons aucun élément qui nous permette de décider si cette origine des forgerons kasena correspond à un fait réel ou s’il ne s’agit que d’un jeu de langage. Les Kasena confèrent par ailleurs une origine mythique au premier des forgerons.
17 La famille linguistique voltaïque comprend de nombreux parlers du Burkina Faso, d’une petite partie au sud-est du Mali et des zones septentrionales de la Côte-d’Ivoire, du Ghana et du Togo. Soit une aire qui s’étend approximativement, d’ouest en est, des rives du Bani (au Mali) à celles du Niger, et du nord au sud, de la zone sahélienne aux marches des forêts tropicales.
18 Outre une mise au point critique et systématique de la composition du groupe voltaïque (1963), cet éminent linguiste a cherché à retracer la parenté génétique des parlers de deux des treize sous-familles que comprend ce groupe, à savoir celle des langues gurunsi (1969) et celle des langues OtiVolta (1975).
19 Au terme de son analyse comparative des langues gurunsi (1969), Manessy conclut à l’existence de trois groupes distincts qu’il appelle simplement A, Β et C dont, dit-il, on peut postuler qu’ils sont issus de l’éclatement d’une « langue gurunsi » unique, ancestrale et hypothétique. Sans entrer dans le détail, il faut retenir que le kasem et le nuna (groupe A) présentent entre eux une parenté plus étroite qu’avec l’isala (groupe C).
20 Rattray inclut dans ce principal groupe de langues « les parlers des Dagomba, Mamprusi, Kusasi, Nabdam, Talensi, Nankanni, Builsa, Dagati, Wala, Lobi ». Hormis ce dernier parler qui est actuellement considéré comme formant à lui seul une sous-famille distincte, les langues de toutes ces populations sont aujourd’hui classées dans le groupe occidental (dit encore mole-dagbane) de la sous-famille Oti-Volta (Manessy, 1975).
21 Dans l’introduction à African Political Systems, publié cinq ans avant le premier tome de la grande monographie de Fortes, on trouve clairement exprimée cette idée : « We may [...] ask to what extend cultural heterogeneity in a society is correlated with an administrative system and central authority. The evidence at our disposal in this book suggest that cultural and economic heterogeneity is associated with a state-like political structure. » Et plus loin : « Marked divergencies in culture and economic pursuits are probably incompatible with a segmentary political system such as that of the Nuer or the Talensi. We have not the data to check this » (Evans-Pritchard et Fortes, 1940 : 9-10). Nul ne conteste qu’en incluant dans le champ de l’anthropologie politique ces sociétés en apparence dépourvues de gouvernement, cette première esquisse d’une typologie proposée par Fortes et Evans-Pritchard fut un moment fécond de la recherche dans ce domaine. Il nous apparaît toutefois aujourd’hui que la corrélation qu’ils tentaient de faire en ce passage de leur article est quelque peu artificielle.
22 Bonvini (1988) isole trois dialectes dans la région du pays kasena située au Burkina : un parler de l’ouest (Koumbili, Guiaro...), un parler « central » (Tiakane, Po, Ponkouyan...) et un parler oriental (Tiébélé, Kaya, etc.). Pour la région située au nord du Ghana, Zwernemann et Callow distinguent un autre dialecte encore, appelé kas ιm méridional (Navrongo, Paga...). À notre connaissance, le parler des deux sous-groupes kasena situés à l’ouest de la Sissili (les Fera et les Nagwa) n’a fait jusqu’ici l’objet d’aucune étude.
23 Cette expression, souvent entendue à l’est et au centre du pays est également utilisée à l’extrême ouest où elle s’est figée dans un ethnonyme « les Awuna » dont Rattray nous dit qu’il n’est qu’un surnom désignant cette « branche des Kasena qui ont l’habitude de précéder toute observation avec les mots “a wun a” » (op. cit. : 525).
24 On retrouvera une même façon de se distinguer des groupes voisins en référence à une parole propre chez les Nankana de la région de Zuarungu qui s’auto-dénomment nyetiga, « je dis » (Keith Hart, 1969 : 20). Rattray indique qu’une étymologie populaire fait dériver la dénomination « sisala » d’une formule n se ha, fréquemment utilisée par eux, et qui signifie « je dis, n’est-ce pas ? » (op. cit. : 465).
25 De fait, la coexistence de maîtres de la terre et de chefs, bien loin d’être un trait proprement « voltaïque », se retrouve dans un très grand nombre de régions d’Afrique noire. Il nous apparaît toutefois que parmi les populations du bassin des trois Volta, cette double institution a pour caractéristique d’être en quelque sorte théâtralisée en une série de rites qui viennent mettre en scène l’opposition et la complémentarité des deux figures du pouvoir (nous pensons ici, notamment, aux très belles descriptions de Fortes de certains festivals talensi où le chef et le maître de la terre rejouent la rencontre mythique entre le premier chef et le premier maître de la terre). Cette forme de théâtralité, qui se retrouve peut-être ailleurs mais dont nous n’avons pas vraiment trouvé trace dans la littérature concernant d’autres aires culturelles africaines, a pour nous valeur de critère pour limiter à l’aire « voltaïque » une entreprise comparative sur cette question.
26 En kasem, ce terme n’a pas le sens littéral de « peau de la terre » qu’il reçoit dans les parlers moréphones voisins (une telle expression se dirait et se dit – en cette langue : t ιga t ᴐnᴐ). Sa structure phonématique quasi identique à celles des termes utilisés par les autres populations comme l’impossibilité de le décomposer en des unités de significations plus simples nous incitent à penser qu’il s’agit d’un terme qui a été emprunté à l’une des langues voisines ; peut-être au nabte, parler des Namnam, ou au buli qui connaît deux réalisations phonétiques distinctes, celle donnée cidessus et une autre, tengwam, relevée par Rattray.
27 La graphie des cinq premiers termes est celle de Rattray. Pour les quatre autres, nous avons suivi celles respectivement proposées par Fortes, Susan Drucker-Brown (1975), Goody et Franz Kroëger (1982).
28 Communication orale (1986).
29 Une légère incertitude subsiste en ce qui concerne les Nuna. Il existe très peu d’écrits sur ce groupe, et ils ne portent pas sur cette question.
30 Concernant les Mwaba-Gurma, on se reportera à l’ouvrage d’Albert de Surgy (1983) et pour les Bassar, à celui de Stéphan Dugast (1992).
31 La forme au pluriel sert à désigner, à l’intérieur d’une grande classe de puissances appelées buli (sing. ο bulo), un sous-ensemble dont Cartry précise qu’il a pour trait distinctif de rassembler des puissances liées au soussol et à la surface de la terre. Dans sa forme singulière (« une seule peau de terre »), l’expression a pour réfèrent l’espace du village (communication orale).
32 L’expression « Kasena-Nankana » est la dénomination inventée par l’administration coloniale britannique pour désigner la population du district de Navrongo. En adoptant cette terminologie, Awedobu entend dire l’originalité culturelle de cette population constituée de deux communautés linguistiques radicalement distinctes mais étroitement alliées. Leurs voisins orientaux, les ɠɔrens i — soit les Nankana de Rattray ou les Frafra de l’administration anglaise ou encore, nous l’avons vu, les Nyetiga selon leur propre terminologie semblent tenir un jugement identique puisqu’ils appellent globalement Yulsi les occupants de l’autre rive de l’Alankwio. Nous émettons cependant de sérieuses réserves quant à faire de ce groupe mixte une ethnie. Tout d’abord parce que, ce faisant, il donne au mot « ethnie » une acception qui n’est pas la sienne (la définition minimale du terme, celle du dictionnaire, veut que l’ethnie soit « un ensemble d’individus que rapprochent un certain nombre de caractères de civilisation, notamment la communauté de langue et de culture » (cf. le Robert, 1979). Ensuite, parce que, à le lire, il apparaît que les Kasena du nord du Ghana ont, selon leur propre dire, conservé des traits qui les distinguent des Nankana.
33 Cette impression, nous l’avons également éprouvée lorsque nous sommes arrivée à Kaya, dans le lignage du chef qui, semblablement aux Nagwa, se réclame d’une origine Peul. Nous aurons l’occasion de montrer que l’origine « étrangère » du chef kasena doit s’interpréter comme un fait de structure. Il serait cependant vain et absurde (l’expérience de Rattray et la nôtre en témoignent d’une certaine façon) de dénier toute réalité historique aux récits retraçant l’origine des différents groupes en présence dans une communauté.
34 À Koumbili réside principalement le clan du chef, dont l’interdit est le crocodile (ɲʊŋʊ). Il existe, à l’est du village, un marigot où vit l’un de ces reptiles auquel sont offerts des sacrifices fréquents. Il fut un temps, disent les villageois, où la population reptilienne était aussi nombreuse que la population humaine de Koumbili et cela en accord avec l’idée qu’à chaque naissance dans le monde humain correspond une naissance dans le monde animal et qu’inversement, tout décès d’un membre du clan est précédé (annoncé) par la mort d’un crocodile, lequel était autrefois inhumé « comme une personne ». Aujourd’hui, Koumbili se meurt et il ne lui reste plus qu’un très vieux crocodile, que nous avons vu, un jour de pêche collective, surgir au milieu des femmes et des enfants qui se tenaient dans l’eau, enfoncés jusqu’à la taille.
35 Cette différence tient peut-être à ce fait, rapporté par Mendosa, qu’il n’existe, en sisala, aucun terme pour désigner ce que nous appelons « clan ». Il fabriquera donc un terme, viara, en précisant qu’il s’agit d’un suffixe qui se rattache au nom de l’objet interdit (ex. nyi’viara, nyi signifiant « crocodile »). Rattray, de son côté, indique que dans toutes ces populations du nord du Ghana, il obtint les noms de clans en réponse à la question : « Quel est ton interdit ? » ou : « Par quoi jurestu ? » (op. cit. : 528). Il est évident que si nous formulions ainsi la question à des Kasena de l’est, nous obtiendrions une réponse, mais cette réponse ne révélerait pas un interdit de clan (tout au plus elle indiquerait l’interdit d’un lignage maximal) et encore moins un nom clanique.
36 Les termes bәsәm et sәnә sont formés sur le même radical verbal sәn (i) qui signifie « louer ».
37 Si la première de ces dénominations trouva chez nos interlocuteurs quelque écho, la seconde intrigua toujours les personnes interrogées.
38 Tant à l’ouest qu’à l’est, les Kasena n’ont pas de tradition se rapportant à un rite d’initiation lié à la circoncision. Cette dernière n’est pratiquée que par les Kasena convertis à l’islam ou, comme ce fut le cas très récemment (cela se produisit lors de notre séjour de 1983), par des jeunes gens dont les pères disaient, en se moquant, « qu’ils voulaient être modernes ». Ces jeunes gens, qui se firent circoncire un jour de marché par un Moose, furent laissés à eux-mêmes et nous les vîmes pendant quelque temps déambuler dans le village, à la manière des jeunes excisées, sous l’œil amusé de leurs aînés.
39 Distinct de ce que les ethnologues appellent le « prix de la fiancée », ce rite met en scène les frères de l’épouse qui, peu de temps après son départ de la maison paternelle, viennent réclamer leur sœur au lignage du mari. En lieu et place de celle-ci, ils « mangeront le kayiiru » sous forme d’une part sacrificielle d’un chien (ou d’une chèvre) et de plusieurs poulets fournis par le lignage du mari. L’un des enjeux de ce rite est la cession, sous couvert d’une femme, d’une parcelle du pouvoir de procréation du lignage donneur au lignage preneur. Tant que ce rite n’est pas effectué, les enfants que pourrait avoir le couple n’ont de statut ni dans le lignage de leur père ni dans celui de leur mère, tout se passant comme si la transmission n’ayant pas été faite, ils restaient le fruit du lignage donneur (leurs maternels leur refusent le statut de « neveu utérin »), tout en ne pouvant être pleinement reconnus comme « enfants » de ce lignage.
40 De ces destins différents, on peut aujourd’hui reconnaître la marque à mille et un usages « modernes » – les ressortissants du Ghana, longtemps plus riches que leurs parents burkinabés, ont eu tôt fait d’adopter les matériaux venus d’ailleurs (tôle ondulée, goudron, ciment, vaisselle chinoise).
41 Ces données sont relativement anciennes (1968 pour le Burkina-Faso, 1985 pour le Ghana), mais elles reflètent une réalité qui est encore largement celle d’aujourd’hui. Si la densité de population à l’est du pays a encore augmenté, l’ouest est toujours aussi faiblement peuplé qu’autrefois.
42 Selon les différentes populations pillées et les diverses graphies adoptées par les observateurs, ils sont également appelés Djermabe, Zarma, Dyerma, Dyabarma, Zabarima, Zambermabe, Jerma, Zabarma, Zamberma.
43 L’histoire de la conquête Zerma dans le nord-ouest du Ghana et le sud du Burkina Faso a été établie dans ses grandes lignes grâce à quelques travaux de qualité tels que ceux de J. E. Holden (1965), M. Echenberg (1971), Anne-Marie Duperray (1984), Jean Rouch (1990), Stanislaw Pilaszewicz (1992). Les sources sur lesquelles s’appuient ces travaux sont les manuscrits haoussa et arabes qui sont conservés dans différentes institutions au Ghana, les traditions orales locales recueillies par les premiers observateurs ou par les auteurs eux-mêmes, et l’excellent ouvrage qu’un africain lettré, Emmanuel Forster Tamakloe, consacra à l’histoire du peuple Dagomba (A Brief History of the Dagomba People, Accra, 1931) dans lequel un chapitre est réservé à l’histoire des Zabarma au Gurunsi.
44 Leur présence à des centaines de kilomètres de leur pays d’origine est liée aux guerres que les Zerma, alliés à leurs voisins venus de Kebbi, Kandi et Dendi, ont menées dans la décennie qui précède contre les Peuls. Dévastée par une longue guerre, la région est exsangue et de nombreux Zerma quittent le pays, les uns pour développer des activités de commerce ou de prosélytisme (ou les deux ensemble), les autres pour suivre une carrière militaire après une guerre finissante dont la victoire ne faisait plus de doute (Rouch, 1990 et Pilaszevicz, 1992).
45 L’assujettissement du royaume dagomba aux Asante remonte, selon Tamakloe, au début du XVIIIe siècle. Appelés par un prétendant évincé du trône, les Asante ont dans un premier temps fait prisonnier le roi de Yendi pour le relâcher ensuite en échange d’un tribut annuel de deux cents captifs. Un bon siècle plus tard, les Dagomba qui semblent avoir négligé leur dette pendant long temps sont durement rappelés à l’ordre par les Asante qui les menacent de détruire le pays s’ils ne payent pas immédiatement un tribut de deux mille esclaves (Rouch, op. cit. : 7).
46 Selon le témoignage de Serki-n Toga, qui rejoignit les Zerma vers 1900, cette campagne conjointe (à laquelle il n’a pas participé) aurait été menée jusqu’à Basisa que Rouch identifie au village de Basiasang (Basiasan) sur la route de Navrongo à Tumu (ibid.). Basiasan, situé à l’ouest de la Sissili, est occupé par les Fra, une fraction des Kasena.
47 D’après Rouch, ils auraient été très tôt animés par l’ambition de se tailler un nouvel empire dans cette vaste région où les hommes vont nus et à pied, armés de leurs seuls arcs, trop préoccupés par leurs querelles intervillageoises pour s’organiser efficacement contre des cavaliers armés de lances et de sabres, et dûment formés à la stratégie militaire. Il en veut pour preuve que leur chef, Alfa Hano, aurait pris soin dès le début des campagnes de prévenir le Moro Naba – chef du royaume moose situé au nord de la Volta Rouge – qui l’autorisa à « chauffer le Gurunsi » (op. cit. : 9).
48 Cet historien polonais a récemment présenté et traduit un manuscrit haoussa de 1914, écrit par Mallam Abu qui dit avoir participé aux exploits de Babatu, l’un des grands chefs Zerma, en pays gourounsi. Le manuscrit, qui faisait partie de la collection F.W.H. Migeod (un fonctionnaire du Colonial Office, linguiste de métier), avait déjà été utilisé par Holden dans son article de 1965, mais n’était guère accessible au commun des chercheurs.
49 Vingt ou trente ans selon les différentes datations de leur arrivée dans la région.
50 Lorsqu’en 1931, le gouvernement colonial anglais chercha à appliquer l’Indirect Rule en créant des districts cohérents du point de vue du pouvoir politique traditionnel, cette fraction de Kasena située à l’est de la rivière refusa la proposition qui leur était faite d’intégrer la même unité administrative que les Kasena de Chiana, Paga et Navrongo et choisit d’être rattachée au district de Tumu, majoritairement peuplé par les Sissala. Par ce choix, ils semblent avoir voulu réactualiser la communauté de destin qui les avait unis aux Sissala pendant plus de trente ans (Awedoba, op. cit. : 10).
51 Victorieux ou défaits, ils se repliaient à chaque saison des pluies vers leurs campements en vue de préparer de nouvelles expéditions. Ces camps bien établis devinrent des lieux importants de trafics et commerce en tout genre. À chaque retour d’expédition, ils y ramènent le butin de leurs rapines et des centaines d’hommes, de femmes et d’enfants ; les uns seront vendus en esclavage contre des armes et des chevaux, les autres envoyés au Songhay pour cultiver les terres. Les paysans des villages d’alentour, s’ils ne participent pas aux raids, cultivent pour entretenir les troupes. Certains plus éloignés, comme le village sissala de Tumu, sont régulièrement soumis à la taxe. Dès le début et durant toute la période de leur occupation, les Zerma s’allient systématiquement aux captives et les enfants nés de ces unions deviendront les chefs et les capitaines des troupes, ceux-là même qui vers 1896-1897 vivront la défaite et la fuite, pris en tenaille entre les forces françaises et anglaises.
52 Anne-Marie Duperray, op. cit. : 89.
53 À Koumbili, cette période est rappelée en exergue du récit retraçant l’attaque en règle du village : « Du temps du chef Ategayeripaga, Koumbili était puissant. Les gens des petits villages environnants sont venus se mettre sous sa protection lorsque les Zermabe attaquaient. Les Zermabe venaient de Kasaana. Ils n’avaient pas de village. Ils venaient voler le bétail et prendre les jeunes gens des petits villages » (Utie, frère du chef Ado, décembre 1981).
54 Les deux premiers villages sont situés en pays nuna, les deux autres sont kasena ; le dernier a aujourd’hui complètement disparu.
55 La version de Binger, sans être totalement fausse, est cependant un peu fantaisiste. Selon Mallam Abu, la chefferie de Koumbili fut dûment attaquée et vaincue et la majorité des hommes tués ou pris en esclavage ; le chef et les quelques survivants ont réussi à se réfugier derrière les remparts de la maison du chef. Il s’ensuivit un siège en règle du village qui prit fin grâce à l’intervention d’un village tiers (Shérigu) qui fit avertir le naba de Ouagadougou par l’intermédiaire de celui de Nobere (chefferie mossi située au nord de la Volta Rouge). Le naba de Ouagadougou envoya un messager à Gandiari lui demandant de laisser Koumbili (Pilaszewicz, op. cit. : XX). La version recueillie à Koumbili efface l’épisode peu glorieux de la défaite pour ne conserver que celui du siège et de la délivrance par « dix guerriers mossi envoyés par le naba du Wogodugu ».