Chapitre VIII. Le nouvel an du radis chez les Néwar du Tibet
p. 315-336
Texte intégral
1Depuis 1988, nous poursuivons avec Kesar Lall Shrestha une recherche sur les relations entre les habitants de la vallée de Katmandou et le Tibet central et le rôle qu’ont joué les marchands néwar dans les échanges entre ces deux régions au XIXe et XXe siècles1.
2Ces relations, qui sont très anciennes, se sont fortement développées à la fin du XVIIIe siècle.
3Au cours de l’enquête menée sur ce thème à Lhasa, des Tibétains interrogés ont évoqué l’importance du rôle économique joué par les Néwar et aussi de leurs fêtes, parlant du la-phug lo-sar, littéralement « le nouvel an du radis », expression qui ne pouvait qu’éveiller notre curiosité.
4Cette fête correspondait, en réalité, dans le calendrier népalais au Dasaῖ, rituel proprement hindouiste célébré au Népal par les castes indonépalaises et par les Néwar de religion hindoue qui symbolise la victoire de la déesse Devī/Durgā sur les forces du mal incarnées par le démon buffle Mahiṣāsura2.
5Il apparaissait à première vue singulier qu’un tel rituel puisse être pratiqué avec faste au Tibet et dans un milieu néwar bouddhiste.
6Nous avons donc essayé de réunir des témoignages venant de différentes sources, tibétaines et néwar, éléments de la tradition orale, histoires de vie, documents publiés, pour décrire les différentes phases de cette fête et les interprétations qu’en ont faites les témoins encore vivants. En effet, cette fête n’est plus célébrée aujourd’hui.
7Kesar Lall Shrestha a recueilli une partie des données présentées ici au cours d’entretiens réalisés en 1990 et 1991 auprès de marchands néwar et de Khacara descendants d’un Néwar et d’une Tibétaine ayant vécu à Lhasa jusqu’à une période récente3.
LE TERME DE MVAḤNI
8Le terme de mvaḥni employé par les Néwar du Tibet (comme par ceux de Katmandou), désigne une succession de rituels qui se déroulent dans la quinzaine claire du mois néwar de kaulā, période qui correspond au Dasaῖ dans le calendrier religieux hindou4.
9Mvaḥni ou mohini dont le sens premier est « enchantement », désigne aussi la suie recueillie au moment du rituel et posée sur le front comme marque de bénédiction. Pour obtenir cette suie, on brûle une mèche trempée dans de l’huile de moutarde, placée dans une petite lampe en terre cuite qui a la forme d’un singe étendu sur le dos : la mèche est recouverte d’une coupelle enduite elle aussi d’huile sur laquelle la suie se dépose (Phot. 1). La lampe est allumée le huitième jour de Mvaḥni. La suie est appliquée sur le front des membres de la famille le neuvième jour, par l’homme le plus âgé de la maisonnée. La lampe est à nouveau allumée le dixième jour, daśamī, et la suie est posée sur le front des parents qui viennent alors rendre visite5.
10Dans nos entretiens, les Néwar de Lhasa faisaient référence au Mvaḥni tel qu’il était pratiqué à Katmandou dans les castes bouddhistes, Tāmrakār, Kānsakār, Tulādhār et Mānandhar. Les membres de ces castes le célèbrent dans une succession de rituels qui comprennent des bains de purification pendant les dix jours que dure le Mvaḥni, une offrande à la divinité Bhindyaḥ (dont nous parlerons plus loin) et la procession du sabre pāyāḥ, le dixième jour. En outre, les Kānsakār d’Asan ṭol organisent une danse rituelle kumho pyākã, « la danse du prince », au cours de laquelle un garçon impubère danse dans l’une des cours du palais royal de Hanuman Dhoka, puis revient à Asan ṭol danse qui a lieu trois jours de suite6.
LA COMMUNAUTÉ NÉWAR DE LHASA
11Avant de décrire le Mvaḥni tel qu’il était pratiqué à Lhasa jusqu’en 1975, il nous paraît nécessaire de présenter brièvement la communauté néwar qui vivait en permanence à Lhasa (voir aussi Waddell 1905, Bell 1924, Bista 1979, Jest 1993), en nous aidant du témoignage de Dan Kaji Kānsakār. Né en 1034 Nepal Sambat (1914 de notre calendrier) à Talabi, Masangalli, Kel ṭol, Katmandou, Dan Kaji est issu d’une famille de la caste des fabriquants de récipients en cuivre et en laiton. Son oncle, connu sous le nom de Lama-Sahu ou Lamaju, partit à Lhasa pour travailler avec un oncle maternel7. Après une longue période d’adaptation, Lamaju fit du commerce à son compte en achetant des étoffes de laine nambu, tissées dans la région de Lhasa8. Lamaju ouvrit un magasin dans l’immeuble du groupe néwar chusinsya pālā dans la vieille ville. Les frères de Lamaju, Hera Kaji (le père de Dan Kaji) et Ratnaman Singh se rendaient à tour de rôle à Lhasa pour surveiller les transactions et convoyer les marchandises.
12Dan Kaji se rendit à Lhasa via Kalimpong en 1937 et y séjourna un an. Il y retourna en 1958, via Gangtok (au Sikkim), chargé des échanges par le groupe kasa pālā (le pālā de la caste des Kānsakār).
13Voici comment Dan Kaji nous a décrit le mode de vie de la communauté néwar à Lhasa :
« En 1937, plus d’un millier de Néwar vivaient à Lhasa. Les Néwar habitaient au centre de la ville dans les mes encadrant le grand temple du Jokhang, site religieux le plus vénéré du Tibet9. Ces mes constituent le Parkhor, itinéraire de circumambulation fréquenté chaque jour par des milliers de pèlerins venus de toutes les régions du Tibet et de Mongolie.
Dès que l’un d’entre nous arrivait à Lhasa, il se présentait à son « patron » et était intégré aussitôt dans un pālā, association regroupant une vingtaine de personnes10. Les aides, appelés bhānjā, avaient un salaire modeste et recevaient en outre un pourcentage du profit, mais ils étaient totalement sous la coupe du marchand qui les exploitait en fournissant tout ce dont le bhānjā avait besoin, lui trouvant une femme tibétaine... avançant de l’argent, qu’il était bien difficile de rembourser, sauf si l’on était parent du marchand.
Les membres d’un pālā étaient originaires d’un même quartier de Katmandou, de Patan ou de Sankhu, ou membres d’une même caste ou lignée. Le pālā était, pour le nouvel arrivant, à la fois une famille et un cadre de vie. Il avait à sa tête un ancien, le thakāli, dont l’autorité était reconnue de tous, parlant bien le tibétain et connaissant la coutume et les règles du protocole et des échanges11. Il était l’intermédiaire obligé entre les membres du pālā et le wakil, représentant du roi du Népal au Tibet12. Le thakāli était en outre responsable des biens du pālā, objets de culte et instruments de musique rituelle ; il donnait aussi sa caution pour les prêts13. Il était assisté par un adjoint nvakū, un trésorier chyanjoye, et un secrétaire thunila.
Les membres du pālā étaient à tour de rôle cuisiniers pour les fêtes rituelles et faisaient les achats pour les repas pris en commun. Chaque pālā possédait une maison, kothā, qui servait de lieu de réunion et dans laquelle se trouvait une pièce consacrée à pālā-aju « grand-père du pālā, » l’ancêtre divinisé, représenté par une statue avec des yeux, mais qui n’avait pas d’autre nom. Une fois Tan, au cours d’une pūjā, on offrait à pālā-aju une tiare en forme de plume, kikinpa14. Le jour de la pleine lune du mois de baiśākh tous les objets appartenant au pālā étaient inventoriés et leur état vérifié.
14Autrefois, d’après la tradition, il y avait 13 pālā à Lhasa15. On les citait dans Tordre suivant :
Chusinsya pālā, dont les membres étaient originaires de Neta-Naradevi à Katmandou,
Ghorasya pālā, ceux d’Asan toi,
Jhwala pālā, d’Asan ṭol et Lagan ṭol,
Tarunsya (tadhumsya) pālā, de Nhayakan ṭol,
Lagan pālā, membres de la caste Sakya de Lagan ṭol,
Bajrasattva pālā, membres de la caste Bajracharya uniquement,
Gandesya pālā, membres de la caste Shrestha uniquement,
Khacara pālā, Khacara uniquement,
Yelaya pālā, membres originaires de Patan uniquement,
Khoaya pālā, membres originaires de Bhaktapur uniquement,
Kun pālā, membres originaires de Neta, Katmandou,
Chyatangya pālā, membres originaires de Sankhu,
Sanshya pālā.
15Le pālā le plus ancien était le Chyatangya pālā et c’est dans son kothā que les anciens se réunissaient pour régler les disputes importantes et prendre les décisions de nature politique. Les Néwar de Sankhu étaient les plus nombreux dans ce pālā. En 1937 il ne restait que sept pālā : Chusinsya pālā, Ghorasya pālā, Jhwala pālā, Tarunsya pālā, Lagan pālā, Kun pālā et Chyatangya pālā.
16Nous vivions entre nous ; les soirées se passaient à évoquer le Népal ; l’un d’entre nous passait la nuit dans l’échoppe pour prévenir tout vol. Il arrivait que des disputes éclatent avec les Tibétains, en particulier avec les pèlerins du Kham16. Le wakil défendait alors nos intérêts auprès des autorités tibétaines.
17Lorsqu’un Néwar mourait à Lhasa, tous les membres de son pālā se réunissaient et portaient le cadavre dans un lieu situé au nord de la ville, près du temple de Pabungka où il était dépecé et abandonné aux oiseaux (il n’était jamais brûlé)17. Le deuil ne durait qu’un jour ; on ne mettait pas de coiffure ce jour-là, mais on gardait nos chaussures à cause du froid. Les rites de purification ghaḥsū étaient accomplis le lendemain des funérailles et non le dixième jour comme c’est la coutume à Katmandou18. Les Néwar résidant à Lhasa étaient très pieux et entretenaient avec les religieux des différents monastères et temples des relations étroites ; comme fidèles, ils faisaient appel à eux pour lire des textes sacrés, faire des rituels de protection pour leur commerce. Ils comptaient parmi les bienfaiteurs les plus généreux des temples et des sanctuaires de Lhasa. Le Mvaḥni donnait cependant l’occasion de se retrouver entre Néwar et de rendre hommage aux divinités propres de notre groupe. »
LE NOUVEL AN DU RADIS
Le Mvaḥni à Lhasa en 1938 (1994 V.S.)
18Dan Kaji décrit ainsi le Mvaḥni auquel il a participé :
« Le Mvaḥni était pour les Néwar de Lhasa, comme d’ailleurs pour ceux des autres centres commerciaux du Tibet où résidaient des Néwar, le moment festif le plus important de l’année, impliquant tous les membres présents et dont le cérémonial était précisé par la coutume.
Huit jours avant le début de la période du Mvaḥni, date fixée par l’astrologue, le gouvernement du Tibet annonçait la date de la fête en demandant aux habitants de la ville de ne pas troubler le déroulement de la procession des bal-po (Néwar) ou de prendre à parti les Néwar ivres qui chercheraient querelle... De son côté le wakil conseillait à ses administrés, quatre jours avant le début de la fête, de se comporter de façon correcte, d’éviter de se battre avec les Tibétains...
Le premier jour de la fête, naḥlā svanegu, les sept pālā constituant la communauté néwar et khacara, avec à leur tête le thakāli, se réunissaient chez le wakil pour organiser les cérémonies19. À tour de rôle, un des sept thakāli était responsable de l’organisation et du bon déroulement des rituels (et de toutes les autres cérémonies de l’année).
Le jour du naḥlā svanegu le thakāli désigné plantait des graines d’orge, naḥlā svaṁ, dans un pot déposé dans le sanctuaire de la déesse Taleju20, situé au premier étage d’un des bâtiments du consulat, lāykū. Le soir venu, les membres du pālā jouaient de la musique rituelle dans le lāykū puis le wakil leur offrait une collation rituelle composée de samay (riz, graines de soja noir, gingembre et morceaux de viande).
Le dixième jour appelé Mvaḥni ou encore pāyāḥ, la procession du sabre clôturait la fête21. Le matin, la garde militaire du wakil allait chercher à leur domicile les thakāli des différents pālā. Ceux-ci étaient habillés à l’ancienne avec une coiffe rouge, une écharpe et une robe tibétaine chuba, retenue par une ceinture22. Tout le monde se rendait au lāykū, suivi par les membres du pālā (Phot. 2).
Le gouvernent du Tibet désignait le porteur du « radis », la-phug, qui devait être sacrifié à Taleju. L’homme était de « basse caste », celle des dépeceurs de cadavres, ro rgyags-pa.
La procession se formait alors, le Tibétain portant le radis, le wakil tenant le sabre pāyāḥ (habituellement conservé dans le sanctuaire de Taleju), précédé d’hommes qui agitaient des queues de yak de couleur blanche et suivi par les sept thakāli puis, par tous les Néwar membres des pālā. Certains d’entre eux jouaient des instruments de musique, cymbales petites et grandes, tambours, suivis par les soldats de la garde (Phot. 3-4).
La procession se dirigeait alors lentement vers le Parkhor, faisant le tour du Jokhang en un peu plus de deux heures, s’arrêtant de temps à autre devant le magasin d’un Néwar. Puis on revenait vers le lāykū (Phot. 5). Devant la porte, le la-phug était posé à terre et le wakil le coupait en deux d’un coup de sabre. À tour de rôle, chaque thakāli coupait le radis.
Le wakil appliquait le mvaḥni sur le front de chaque thakāli et la cérémonie se terminait par un repas. Le wakil donnait alors une noix d’arec, gvay, signal autorisant les jeux de dés pendant quatre jours23. Les thakāli s’en retournaient dans leur pālā emportant le naḥlā-svāṁ qu’ils distribuaient aux membres de leur pālā.
Le radis, la-phug, était un substitut d’une courge bhui-phasi que l’on sacrifiait à Taleju. En effet il n’était pas question de sacrifier un animal, de faire couler du sang en terre tibétaine24.»
19Nous avons établi avec Dan Kaji la chronologie des différents rituels de ce Mvaḥni, présentée ici sous forme de tableau.
« Dans le cadre du Mvaḥni, on rendait un culte à la divinité Bhindyaḥ, particulièrement vénérée par les commerçants néwar. C’est la raison pour laquelle il existait un lien très particulier entre le sanctuaire de Bhindyaḥ à Katmandou et la communauté Néwar de Lhasa et de Kuti au Tibet25.
Tous les douze ans, un officiant du temple de Bhindyaḥ de Katmandou se rendait à Lhasa, c’était le Bhindyaḥ Lhasa yenkigu. Un Jyapu partait pour Lhasa où il était reçu dans un pālā, préalablement tiré au sort. Ce représentant de Bhindyaḥ emportait un plat rituel thāyabhū contenant du sukulā, viande séchée et du samay des fleurs « bénédictions », pour tous ceux qui vénéraient l’officiant ; en échange de dons en argent, l’officiant donnait une fleur et un peu de vermillon. Son séjour n’était pas seulement un honneur, mais sa présence dans le pālā était une bénédiction. On lui donnait aussi une robe tibétaine namulan, une écharpe de soie rouge, des boucles et un anneau en or.
Il séjournait trois mois à Lhasa et les membres du pālā finissaient par se réjouir de son départ tant il devenait exigeant ! ».
TABL. 1. CALENDRIER DE LA FÊTE
Calendrier mois de Kaulā26 | Lieu de cérémonie | Actions |
1er jour naḥlā svanegu | lāykūl temple de Taleju | orge semée, naḥlā svaṁ |
2e jour | ” | musique rituelle par les musiciens du pālā dans le temple de Taleju |
3e jour | ” | ” |
4e jour | ” | ” |
5e jour | ” | ” |
6e jour | ” | ” |
7e jour (phūlpāti) | ” | ” |
8e jour kūchi bhvay27 | dans le pālā chargé de la fête | préparatifs de la fête |
9e jour syāku tyaku28 | dans chaque kothā | offrande à la divinité Bhindyaḥ et repas dans le pālā |
10e jour Mvaḥni ou procession du sabre pāyāḥ | dans chaque kothā Lāykū - parkhor-lāykū cour du lāykū | offrande à pālā aju Procession du la-phug « sacrifice » à Taleju ṭikā donnée par le wakil |
11e jour29 | dans les pālā | début des jeux d’argent |
12e jour | dans les pālā au lāykū | jeux et repas réunion des thakāli et du wakil pour désigner un nouveau pālā Amis tibétains invités pour un repas de fête |
Le Mvaḥni dans la littérature néwar
20Il existe un certain nombre de descriptions du Mvaḥni dans la littérature publiée par des écrivains de langue newari. En voici un exemple, tiré de la nouvelle Minmanah pau « la lettre qui n’a pas brûlé » de l’écrivain Chittadhar Hridaya. C’est sous la forme d’une lettre qu’un marchand néwar décrit la vie à Lhasa et parle du Mvaḥni dans les termes suivants :
« ... (à Lhasa) bien qu’il n’y ait pas de raison de faire pousser des grains d’orge, naḥlā svam, dans chaque maison, comme cela se fait au “Népal”, tous les thakāli des différents pālā doivent se rendre chez le wakil pour planter des grains d’orge et jouer de la musique rituelle, dāphā, à tour de rôle30. J’y allais aussi. Le pālā était en pleine activité. On y confectionnait toutes sortes de friandises. En effet après la fête, les amis Tibétains s’attendaient à recevoir des cadeaux et le pālā responsable de la fête pour l’année devait aussi en donner au wakil... Le jour de kūchi-bhvay, on prépara les repas dans le pālā, car tous les membres se réunissaient dans un même lieu. Le jour de syāku-tyāku, on fit une offrande à Bhindyaḥ dans chaque maison, mais le repas fut pris en commun dans le pālā.
Le sacrifice consistait à couper un radis, remplaçant à Lhasa la courge bhui-phasi que l’on ne pouvait trouver ici. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les Tibétains appellent cette fête bhyabuki labu losa31.
Le jour de cālā, chaque maison faisait une offrande et les membres des pālā se rendaient avec leurs thakāli au lāyku, résidence du wakil. Les thakāli avaient une marque rouge sur le front et portaient des coiffures de couleur rouge. J’y allais aussi. Tout le monde était habillé avec recherche, vêtements avec parements de brocart, chapeaux en fourrure de loup, avec autour du cou des colliers d’or et de turquoise, avec des bagues à tous les doigts. Des hommes âgés avaient même des anneaux à leurs oreilles attachés avec des chaînettes d’or ; nombreux étaient ceux qui portaient des colliers de coraux normalement vendus dans leurs échoppes. Les Tibétains, hommes et femmes, étaient très nombreux à assister à la fête.
Au moment de la procession du pāyāḥ, le porteur du radis, un Tibétain de la caste des dépeceurs de cadavres, sortit du lāyku, portant le radis, suivi des thakāli très bien habillés, des fleurs placées sous leurs calotes. Ils tenaient un sabre khan à la main et d’autres hommes les aidaient car les sabres étaient très lourds. Vint ensuite le wakil à cheval, revêtu de merveilleux habits de brocart, accompagné par un porte-parasol et suivi par les membres des pālā, certains portant des queues de yak blanches. Tous les Néwar étaient très fiers.
Chaque pālā était représenté par son thakāli et les musiciens jouant du tambour nāykhim. Ceux des pālā de Jhawla battaient le tambour dhā ; ils portaient aussi de grands masques sur lesquels étaient inscrits les mots halumanchuli, mais nul n’entra en transe.
Les pétards éclataient de partout. Certaines personnes eurent même leurs vêtements brûlés !
La procession fit le tour du parkhor pour revenir au lāyku. Le hvakeva plaça le radis sur un billot et un gradé de la garde du wakil coupa le radis en deux. Les Tibétains étaient très excités et criaient : Ha-labu ! Ha-Labu !, « le radis ! le radis ! », pendant que les Khacara criaient : phakyu ! phakyu ! « faites place, faites place », repoussant les Tibétains, estimant que c’était leur fête. » (Hridaya 1968, pp. 34-37).
Le Mvaḥni à Lhasa en 1972
21Il est intéressant de comparer les deux récits faits par des membres de la communauté néwar à un témoignage plus « officiel », celui de Dor Bahadur Bista, un Chetri qui a occupé le poste de consul général du Népal au Tibet de 1972 à 1975. Ce Mvaḥni s’est déroulé dans des conditions tout à fait exceptionnelles32.
« En 1972, en pleine révolution culturelle, le Dasaĩ a été célébré de façon très discrète dans l’enceinte du Consulat du Népal. Il n’était pas question de faire une procession autour du parkhor comme c’était la coutume et malgré l’insistance des anciens auprès des autorités de la ville qui interdirent toute manifestation de rue.
Le Consulat était situé au sud du parkhor dans la vieille ville33. Il se composait de deux groupes de bâtiments entourant des cours baithak : autour d’une petite cour, des logements de fonctionnaires et des militaires, autour d’une grande cour, des bureaux, et au centre de la cour, un bâtiment de trois étages avec le logement du consul, des administrateurs et des deux maîtres d’école.
Il y avait environ 350 citoyens du Népal à Lhasa à cette époque (500 en tout au Tibet, à Lhasa, Shigatse, Phari et Kuti).
Rappelons que la création de la fonction de nāyor (nép. nāike) ou représentant du roi de Katmandou date du début de XVIe siècle. C’est le roi de Katmandou Ratna Malla qui a établi des relations avec le Tibet ; c’est lui qui invita aussi les premiers marchands musulmans originaires du Cachemire déjà installés à Lhasa à venir commercer au Népal34.
Dans le Consulat, il y avait un sanctuaire dédié à la déesse Taleju. Cette déesse était représentée par une plaque d’argent portant une empreinte de pieds en relief, sur un socle en forme de pétale de lotus. Des statues de Ganes et de Sarasvatī étaient disposées tout autour ainsi qu’un sabre khadga, utilisé pour le sacrifice du Dasaῖ.
Le rituel du Dasaĩ se déroula donc dans la cour du Consulat. Le 1re jour du Dasaĩ, le jamarā avait été planté par un officiant néwar : j’avais en effet désigné un homme d’origine khacara qui avait été lama dans le monastère de Drepung avant la révolution culturelle. C’est lui qui, le 10e jour, décora le radis dans le sanctuaire de Taleju, dessinant trois yeux représentant une figure démoniaque. Dans la matinée, un groupe de musiciens néwar se réunit à la porte du sanctuaire puis accompagna, Bir Doj Khadka, un Chetri employé du consulat portant le sabre royal, le lama portant le radis, et les membres de la communauté Néwar (Phot. 6-7).
Bhir Doj coupa le radis en deux après avoir invoqué Taleju, puis coupa une moitié du radis en petits morceaux qui furent distribués aux assistants. Cette cérémonie fut suivie par un repas pris en commun et une représentation de danses des enfants de l’école népalaise. »
22Dans le récit de son séjour au Tibet « Report from Lhasa » (1979, pp. 144-145) Dor Bahadur Bista précise ;
« ...un certain nombre d’autres traditions ont été supprimées... [par D.B. Bista] le thakāli, doyen, ne servait plus à rien ; on supprima donc sa fonction après accord de tous les membres et on encouragea les Népalais à s’adresser directement au consulat chaque fois qu’ils avaient un problème à régler plutôt que de passer par le thakāli [...] De même la coutume obligatoire d’accueillir tout nouveau consul à son arrivée et à son départ de Lhasa avec présentation d’une écharpe de cérémonie fut remplacée par une visite amicale. L’obligation de recevoir la ṭikā au Dasaῖ a été abolie. En effet, seule sa Majesté le roi du Népal doit être vénérée et c’est d’elle seule que l’on peut recevoir la ṭikā. Aucun officiel népalais n’est investi pour donner la ṭikā. C’est la raison qui a été mise en avant pour supprimer cette cérémonie. Quelques personnes insistèrent pour que cette pratique continue selon la coutume et de façon officielle. Pour cette raison un lama fut désigné comme prêtre du temple de Taleju et offrit la ṭikā pendant la cérémonie... »
23Dans ce texte, Dor Bahadur Bista insiste sur les changements qu’il a lui-même apporté à la pratique du rituel et au sens donné à la cérémonie. Il a délégué la fonction religieuse des officiels à un lama (ou plutôt ex-lama, car nous sommes dans la période de révolution culturelle). Pour Bista, le seul représentant du pouvoir pourvu de sacralité est le roi. Les officiels et les anciens ont vu leurs fonctions supprimées. Les Néwar de Lhasa n’étaient-ils pas assez hindous aux yeux du consul ?
Le Mvaḥni chez les Néwar du Sud du Tibet
24Le Mvaḥni était aussi célébré dans les communautés néwar des autres centres d’échanges situés dans le sud du Tibet, à Shigatse, Kyirong et Kuti. Tashi Khacara, originaire de Kyirong le décrit ainsi :
« Le Mvaḥni, que nous appelons lo-sar, utilisant l’expression tibétaine qui signifie “nouvel an” (mais qu’il ne faut pas confondre avec le nouvel an néwar qui survient plus tard dans le calendrier), était fêté avec beaucoup de faste. Etant bouddhistes, nous étions considérés par les Tibétains comme des nang-pa « ceux de l’intérieur », c’est-à-dire appartenant au Bouddhisme tibétain. En effet, nous faisions appel aux religieux de l’ordre dge-lugs-pa pour les cérémonies du cycle de vie et les rituels funéraires. Chaque famille possédait une chapelle dans laquelle étaient vénérées Buddha mais aussi la divinité skyes-lha protectrice de la lignée associée à la naissance et bsam-yas rgyal-po, « le roi de bsam-yas », divinité associée à la vie, encore appelée jig-rten lha « divinité des laïcs »35.
Le sanctuaire principal de bsam-yas rgyal-po était situé dans la maison la plus ancienne de la communauté newar, le mūl kothi. Plusieurs fois par an, au moment des fêtes les plus importantes, Dasaῖ, Tihār, Indrajātrā, des offrandes étaient faites à cette divinité.
Le lo-sar était donc fixé par l’astrologue et toute la communauté le suivait pour célébrer les rituels.
Le premier jour du lo-sar, le prêtre gubhāju plantait les grains d’orge dans le mūl kothi. Le neuvième jour avait lieu la vénération de la divinité bsam-yas rgyal-po. Elle était représentée par un masque avec une très grande bouche, le front ceint d’une tiare d’or et d’argent. Le masque était porté de la chapelle jusqu’au bord de la rivière, au lieu-dit chu-lu-og, et placée dans un espace sacré pīṭh. Certains chefs de famille sacrifiaient alors un bélier blanc. Un repas était ensuite pris en commun.
Ce culte à bsam-yas rgyal-po était pratiqué dans presque toutes les maisons de Kyirong, à l’exception de quelques familles très pieuses suivant la règle du Bouddhisme tibétain. Il y avait cependant un interdit de manger de la viande de bœuf, ce qui pouvait offenser la divinité.
Le masque de bsam-yas rgyal-po a été emporté par les Khacara lorsque ces derniers sont venus se réfugier à Katmandou en 1960. Il a été déposé dans le sanctuaire de Bhīmsen, dans un des temples du palais de Hanuman Dhoka.
Tous les ans, le neuvième jour du lo-sar, les Khacara et Néwar de Kyirong se rendent à Hanuman Dhoka pour faire une offrande de fleurs, de vermillon et de pièces d’argent à bsam-yas rgyal-po.
À Kyirong, une association appelée tshog en tibétain, équivalent du pālā de Lhasa, était chargée d’organiser le culte de la divinité : elle avait à sa tête un responsable ditha, assisté d’un thakāli (dingdpon en tibétain). Le dixième jour, daśamī, le représentant du gouvernement du Népal, Gorkha dpon-po « le chef Gorkha », résidant à Kyirong, donnait la ṭikā et recevait en échange des cadeaux, du musc, des pièces d’argent, des étoffes. Le dpon-po offrait ensuite un repas à toute la communauté et donnait l’autorisation de jouer aux cartes (les jeux avec des cauries n’étaient autorisés qu’au moment du Tihar)36.
Les familles pieuses ne sacrifiaient pas d’animaux qui étaient remplacés par des radis que l’on coupait avec un sabre enduit de vermillon... »
LES DIVINITÉS VÉNÉRÉES AU MOMENT DU MVAḤNI
25Cette période festive est dédiée à deux divinités, Taleju et Bhindyaḥ. Taleju était la protectrice du pouvoir royal du temps où les Néwar étaient les maîtres incontestés de la vallée de Katmandou (Toffin 1984, pp. 471-474).
26Bhindyaḥ est plus proche des marchands Néwar ; voici ce qu’en dit Dan Kaji : « Bhindyaḥ (Bhīmsen) est vénéré avec une grande ferveur ; en effet pour nous Néwar, c’est lui qui préside au commerce et aux échanges. Il fait partie des divinités implorées à tout moment, le matin au réveil pour l’associer aux actions de la journée, pour le commerce et ce, aussi bien par les hindouistes que par les bouddhistes. Les bouddhistes ont un dicton : « dans la difficulté implore Bhindyaḥ, il te viendra en aide, si tu es devenu riche va faire des offrandes à Svayambhu ». Une légende connue rapporte que Karuṇāmaya, le « Compatissant », voyant autour de lui les divinités oisives, leur donna à chacune une tâche à accomplir ; mais que faire de Bhindyaḥ, toujours frondeur et contestataire ?
« Que sais-tu faire à part te mettre en colère ?
– Je peux changer un en deux et deux en quatre, répondit Bhindyaḥ,
– Eh bien puisque tu as le don d’accumuler, tu seras le dieu des marchands.
C’est la raison pour laquelle Bhindyaḥ est vénéré par les Néwar. »
27Le Mvaḥni ou la-phug lo-sar était pour les Néwar et les Khacara du Tibet l’occasion d’affirmer chaque année leur différence dans un milieu considéré comme étranger pour ne pas dire hostile. On reconstituait aussi bien que possible les cérémonies qui se déroulaient dans la lointaine « patrie » avec tout le faste, la musique rituelle, les costumes, les richesses ostensiblement mises en valeur. Des réunions des membres des pālā donnaient lieu à des repas et jeux d’argent dont les Néwar étaient grands amateurs.
28L’auteur de Minmanah pau dit bien : « en fait, le Mvaḥni des Néwar de Lhasa est un événement bien plus important et plus joyeux à Lhasa qu’à Katmandou... » On peut penser que l’hommage à Taleju, organisé par le représentant du roi du Népal (mais sans sacrifice sanglant) était l’expression d’allégeance au pouvoir du pays d’origine et à son roi, le cérémonial guerrier ayant été adapté à un contexte religieux bouddhiste non violent. Et Bhindyaḥ, la divinité qui préside au commerce, n’était pas oubliée dans cette circonstance.
LE TEMPS DU DASAĨ CHEZ LES SHERPA, LES TAMANG ET LES GURUNG NON H1NDOUISTES DU NORD DU NÉPAL
29Pour compléter ces observations sur le Dasaῖ dans l’aire de culture et de civilisation tibétaine, nous présentons des observations faites chez les Sherpa, les Tamang et les Gurung.
30Chez les Sherpa, population de langue et de culture tibétaine du nord est du Népal, la période du Dasaῖ – qui leur est connue puisqu’ils vivent au contact des castes indo-népalaises – est considérée comme particulièrement néfaste. Sachant que durant cette fête de nombreux animaux sont sacrifiés et du sang versé pour « nourrir les divinités », les Sherpa pratiquent un jeûne, smyung-gnas, pendant la quinzaine claire du 8e mois lunaire du calendrier tibétain qui correspond au Dasaĩ37. Dans l’esprit du laïc, cette mortification peut contribuer à rétablir le cycle des renaissances pour les animaux sacrifiés par les hindous.
31Cependant, il est intéressant de rappeler un rituel, disparu aujourd’hui, qui se déroulait encore en 1960 dans le village de Kumtö dans le Khumbu. Pour éloigner le mal incarné par une divinité appelée nub-gi rgyalpo, « le roi de l’Ouest », le maître de maison, drong-pa’i apa, un turban de couleur rouge sur la tête, habillé d’un dhoti blanc se rendait dans l’étable og-khang et posait sur trois pierres la ṭikā de vermillon. Il demandait ainsi à ces « divinités des vallées » de les épargner. Ce rituel était accompli le jour de daśamī.
32Chez les Tamang de l’ouest, appelés Nupo-Tamang par les membres de cette ethnie qui résident à l’est de la vallée de Katmandou, on ne célèbre pas le Dasaĩ. Ainsi à Salme, dans la Salankhu Khola, la fête de Durgā est connue, et donne l’occasion de vendre des produits agricoles dans les villages de castes indo-népalaises. Si aucun rituel n’a lieu pendant la période du Dasaῖ, le huitième jour de la quinzaine claire, aṣṭamī, on tue un buffle mâle. Il est acheté en commun, la viande est partagée en autant de parts qu’il y a d’acheteurs et c’est l’occasion, comme le dit le villageois Yorung, « d’un bon repas en famille ».
33On peut cependant penser qu’il y a une relation entre ce repas et le Dasaĩ. En effet, chez les Tamang qui vivent à l’est, dans les districts de Kavre-Palanchok, Dolakha et Sindhupalchok, les responsables de l’administration royale célébraient le Dasaĩ.
34Gokul Sahi (un Thakuri de Timal âgé de 84 ans en 1990) précise :
« Nos anciens disaient qu’autrefois le Dasaĩ était célébré au mois de cait [en avril de notre calendrier]. C’est sans doute le sarkār [gouvernement royal] qui a décidé de modifier la date et de le placer après la récolte d’été [...] Les Tamang ne célébraient pas le Dasaĩ. En revanche, aussi bien du temps du régime foncier kipat38 que du raiti, les responsables de la collecte de l’impôt, les tālukdār, qui étaient des Tamang, étaient obligés d’acheter un buffle. Ce buffle était abattu au matin du 8e jour, après avoir été attaché au poteau sacrificiel maulo, à proximité de la maison du tālukdār. On disait maulo manne « porter respect au poteau sacrificiel » et chaque village était souvent désigné par le nombre de maulo, c’est-à-dire le nombre de tālukdār qui y résidaient39.
La viande était divisée en autant de parts qu’il y avait de maisonnées payant de l’impôt et dépendant d’un même tālukdār [...] La tête de l’animal était ensuite déposée dans la maison du tālukdār. Le jour de dasami à l’heure fixée par l’astrologue, le tālukdār donnait la ṭikā à chaque chef de maisonnée, En retour, il recevait un cadeau, de l’eau de vie, des fruits... puis la tête du buffle était mangée en commun lors d’un repas appelé « repas de la tête » ṭāuko bhoj.
Deux ou trois mois plus tard, les chefs de maisonnées remboursaient leur part du prix d’achat du buffle. Ainsi, les Tamang avaient la possibilité de manger de la viande une fois l’an !
Cette pratique de la ṭikā donnée par le tālukdār, a été abolie en 2021 V.S. (1965). Il y avait 7 tālukdār à Timal Parsel, donc sept maulo.
Le paiement de l’impôt était aussi un hommage à la royauté. Si on ne payait pas pour une raison ou une autre l’impôt, on était chassé du lieu par ordre du roi, ordre exécuté par le dwāre, représentant l’autorité royale. »
35En 1991, à Parsel, quinze maisons tamang se sont entendues pour acheter un buffle d’un coût de 4000 roupies. Il a été abattu au maulo avec un grand khukuri conservé dans la maison de la famille la plus anciennement établie en ce lieu. La viande et la tête ont été partagées en quinze parties égales.
36Pour les Tamang, le Dasaῖ est un moment festif, l’occasion de faire des repas copieux arrosés de bière et d’eau de vie. L’achat du buffle, son choix, puis le dépeçage donnent lieu à de nombreuses discussions et très souvent à des disputes entretenues pendant de long mois. Moment festif aussi pour la jeunesse qui dresse des balançoires rote piṅg (ou attache des cordes à des branches de figuier pipal). Les hommes jouent aux dés ou aux cartes, les paris sont importants et de grosses sommes passent de main en main.
37Chez les Gurung de la région de Lamjung, le Dasaῖ n’est pas pratiqué et, là aussi, seuls les tālukdār étaient tenus de célébrer le rituel et les raiti devaient venir chez eux pour recevoir la ṭikā en signe d’allégeance à la royauté (Gurung 1993).
CONCLUSION
38Dans les descriptions du rituel du Mvaḥni et du Dasaĩ chez les populations bouddhistes ou fortement imprégnées de bouddhisme – Néwar, Sherpa, Tamang, Gurung –, on peut discerner trois comportements spécifiques qui devraient donner lieu à des recherches plus approfondies.
39Chez les Néwar bouddhistes résidant au Tibet, la communauté, avec à sa tête les anciens, rend hommage à la divinité Taleju en un simulacre de sacrifice et en signe d’allégeance au pouvoir royal (ancien et nouveau). Pour des raisons de calendrier, elle rend aussi hommage à Bhindyaḥ, divinité qui préside au commerce et aux échanges.
40Les Sherpa refusent le Dasaĩ et marquent leur « désapprobation » par une attitude de piété et un jeûne – intercession pour tous ceux qui commettent une faute grave en pratiquant des sacrifices sanglants.
41Les Tamang et les Gurung, dans leur majorité (mais jusqu’à quand ?), ignorent le sens du rituel du Dasaĩ mais, suivant la coutume, participent à un repas qui marque une soumission que le pouvoir royal leur a imposé : seuls les responsables administratifs directement liés au pouvoir se plient à cette cérémonie d’allégeance.
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Annexe
PHOT. 1. LAMPE À HUILE UTILISÉE AU MOMENT DU MVAḤNI

La suie se dépose sur une coupelle qui recouvre la lampe, suie utilisée pour faire des marques sur le front. La lampe représente un singe couché sur le dos
PHOT. 2. LHASA, 1955 : MEMBRES DU JWALA PĀLĀ SE PRÉPARANT POUR LA PROCESSION DU PĀYĀḤ

L’un d’entre eux présente le masque de la divinité tutélaire du pālā, Hanuman śrī, dessinée sur un van, les autres portant des sabres et des étendards (photo, collection particulière de Harsha Bir Singh Tuladhar)
PHOT. 3. LHASA 1955

Au cours de la procession du pāyāḥ, les membres du pālā sont accompagnés de deux hommes déguisés en femmes newar « pour bien montrer que ces néwars ont des épouses au Népal » (photo, collection particulière de Harsha Bir Singh Tuladhar)
PHOT. 4. LHASA, MVAḤNI DE 1972. PROCESSION DU SABRE

L’officiant porte le radis qui doit être « sacrifié » il est suivi des musiciens, du porteur de sabre, du prêtre néwar et des membres de la communauté. Noter que la plupart des hommes portent le costume chinois ; quelques musiciens ont le topi traditionnel. (Photo D. Bista)
PHOT. 5. LHASA, 1955 : LES MEMBRES DU JWALA PĀLĀ ENTRENT DANS LA COUR DE LEUR PĀLĀ TENANT LE SABRE ET PORTANT L’EFFIGIE DE LEUR DIVINITÉ TUTÉLAIRE

Le radis, effigie du démon, sera sacrifié sur une} svastika dessinée sur le sol (photo, collection particulière de harsha Bir Singh Tuladhar)
PHOT. 6. LHASA, MVAḤNI 1972

Le radis est le substitut pour l’animal qui doit être sacrifié. (Photo D.B. Bista)
PHOT. 7. LHASA, 1972 : LE REPRÉSENTANT DU CONSUL COUPE EN DEUX LE RADIS

Le temple de Taleju occupe le premier étage du bâtiment au fond de la cour. (Photo D.B. Bista)}
Notes de bas de page
1 En vertu du traité de 1856 entre le Népal et le Tibet, les sujets népalais, Néwar et Musulmans de Katmandou, se rendant au Tibet ou y résidant, jouissent d’un certain nombre de privilèges : par exemple, tenir des commerces à Lhasa (de pierres précieuses, bijoux, étoffes, nourriture...), droits d’extra-territorialité, droit pour le Consul du Népal de rendre justice (Bell 1924, pp. 278-280 texte complet du traité de 1856). En ce qui concerne les échanges avec le Tibet, voir Boulnois (1983, pp. 137-138).
2 mavḥni ou mohini « this long festival is celebrated by both Hindu and Buddhist Newars in essentially the same form... mohini begins on the first day of sukla Kartik and runs until the eleventh day... » Lewis (1984, pp. 380-386).
3 À propos des Khacara, voir Jest (1993).
4 Pour le calendrier des fêtes néwar cf. Lewis (1984, p. 337 sq.), Toffin (1984, p. 501 sq.)
5 Le terme de mohini désigne tout d’abord la marque que l’on place sur le front. Elle est appliquée en prononçant une formule mantra et permet ainsi d’attirer l’amitié des personnes que l’on rencontre. « Avant de commencer la représentation, le maître de danse met un peu de suie noire (néw. mavḥni sihnaḥ) sur le front de tous les membres de la troupe... » Toffin (1984, p. 488).
A Banepa, les Bade Shrestha ne préparent pas le Mohini t mais vont le demander au prêtre du temple de Bhagavatī à Caṇḍesvarī, les 8e et 10e jours du Mavḥni. En outre, les fidèles se rendent au temple tout au long de l’année. Il existe aussi un temple de Bhagavatī à Bhaktapur ; l’officiant met un signe noir, sur le front des fidèles à leur demande.
Définition du terme mavḥni d’après S.M. Joshi, (1987 (2044 B.S.), p. 505 a) : mavḥni : une marque aja sinhaḥ donnée au moment d’une pūjā... enchantement ; mavḥni nakhaḥ : fête du mavḥni ; mavḥni taya : utiliser un mantra pour posséder quelqu’un que l’on aime ou détruire un ennemi.
6 Au cours de cette procession un garçon danse dans la cour de son ṭol, puis dans le palais de Hanuman Dhoka (Lewis 1984, pp. 389-391). À Katmandou, il y a dix processions du sabre pāyāḥ (communication de K.L. Shrestha).
7 Chaque commerçant néwar a un surnom kunã qui peut être le nom de sa maison d’origine, le nom d’un ancêtre ou une particularité de son comportement. Le terme de sāhū (nép.) est souvent employé pour désigner un marchand néwar fortuné.
8 Nambu, (tib. clas. snam-bu) désigne une toile de laine à tissage très serré utilisée pour confectionner des vêtements chauds, un des articles les plus exportés au Népal.
9 Le temple du Jokhang, appelé aussi Tsuglhakhang, dont la construction commença au 7e siècle, est un lieu sacré autour duquel s’est développé la ville de Lhasa. L’ensemble des bâtiments qui entoure le Jokhang est limité par des rues et les Néwar se sont établis au nord et à l’est de l’itinéraire de circumambulation, le Parkhor, voisinant avec des commerçants musulmans. Voir Meyer (1987, pp. 394-407).
10 Pālā : association qui regroupe des Néwar d’une même caste ou d’une même ville. Les membres sont tenus d’organiser les festivités au moment du Mavḥni et de la pleine lune de muṅsir. Ce terme est synonyme de guṭhi, association ayant des fonctions à la fois sociales et religieuses, assurant le culte d’une divinité ; les membres sont de sexe masculin et chaque groupe est doté d’une structure hiérarchique très développée (Toffin 1984, p. 191 sq).
11 thakāli : « ...anciens nommés pour un an, incarnant l’autorité traditionnelle du guṭhi » (Toffin 1984, p. 191).
12 wakil, terme d’origine ourdou, désigne le Consul du Népal à Lhasa. Selon le traité de 1856 signé entre le Népal et le Tibet, le représentant du Népal était obligatoirement un non-Néwar, (Bell 1924).
13 Le groupe de musulmans d’origine indienne (Cachemire) établi à Lhasa depuis le XVIe siècle avait une organisation similaire. La justice était rendue par le chef de la communauté selon la loi coranique.
14 Kikimpā (néw.) / kikampa : diadème, parure de tête d’une divinité (Toffin 1984, p. 389).
15 Cette liste des pālā avait été établie à la lin du XIXe siècle (d’après Kesar Lall Shrestha).
16 Les rapports entre Néwar et Tibétains étaient complexes. Les Néwar disaient qu’ils portaient chance aux Tibétains. Si les Néwar quittaient tous Lhasa, les géants reprendraient possession de la vallée du Kyi-chu où était construite Lhasa. Les conflits étaient d’ailleurs fréquents et Bell fait mention d’un conflit grave qui a eu lieu en 1874 et qui a failli déclancher une guerre entre le Tibet et le Népal (Bell 1924, p. 198).
17 Dans le Tibet central, les cadavres étaient dépecés et donnés aux oiseaux. Les personnes accomplissant le travail de dépeçage constituaient un groupe méprisé, vivant à l’écart, à l’est de la ville de Lhasa.
18 ghaḥsū (néw.), cérémonie de purification du 13e jour marquant la fin de la période d’impureté (Toffin, 1984, p. 148).
19 naḥlā svanegu (néw.), en népali ghatasthāpanā, rituel du semis de grains d’orge.
20 Taleju, divinité tutélaire des anciens rois Néwar (Toffin 1984, pp. 471-474).
21 Le Mavḥni se termine par la procession du sabre pāyāḥ. Dans la vallée de Katmandou, les Néwar font des processions ; l’aîné de chaque lignée doit y participer, tenant un sabre sanctifié ; la procession parcourt un itinéraire précis et se termine devant le dyaḥ chẽ, avec le sacrifice d’une courge bhui-phasi.
22 Les marchands néwar étaient tenus de porter une coiffe de couleur rouge lorsqu’ils se rendaient au Tibet. On dit que les Néwar portant cette coiffe n’entraînaient pas à leur suite les ogresses-géantes lashin. C’est, semble-t-il, une allusion à Sinha Saratha Bahu (Shrestha 1961, pp. 28-30). Les thakāli ces différents pālā portent cette coiffe pour le Mavḥni.
23 gvay (néw.) : noix d’arec Areca catechu. La noix d’arec a une signification toute particulière dans la culture néwar. Elle a une fonction symbolique dans toutes les phases de la cérémonie du mariage. Ainsi, la mariée donne une noix d’arec aux membres de sa famille. C’est aussi une invitation à la cérémonie. Avant le mariage, la famille de la mariée demande un pudu gvay aux membres de la famille de la mariée, les présentant sur un plat, c’est le signe de l’accord formel du mariage. Au moment du départ de la mariée elle donne un gvay aux membres de sa famille, signe qu’elle ne fait plus partie de la maison. Les membres de la famille du marié doivent accepter un gvay de la mariée.
24 la-phug (tib. clas.) radis, substitut d’une courge, appelée en newari bhui-phasi : Benincasa cerifera. Cette plante ne pousse pas au Tibet. C’est le substitut du démon-buffle.
25 Bhindyaḥ (néw.), Bhīmsen, héros du Mahābhārata déifié. Les Néwar lui accordent une grande place dans la vie religieuse, en particulier, les marchands qui le vénèrent pour s’assurer la bonne fortune. Dans chaque famille, la maîtresse de maison fait une offrande quotidienne à Bhindyaḥ devant une image qui le représente. Il est fêté pendant la saison des pluies par les marchands néwar.
À Katmandou, le 9e jour du Mavḥni, on sacrifie un coq dans l’āga de la maison, puis on mange du samay. Après ce pūjā tout travail cesse et c’est le lendemain, 10e jour, que l’on fait le sacrifice d’un canard et que l’on vénère tous les outils avant de s’en servir à nouveau (communication de Ananda Maharjan de Panga).
Le Bhindyaḥ Lhasa yenkigu a eu lieu pour la dernière fois de kārtik 2021 (1964) à jaith 2022 (1965). Voir aussi description du Bhīmsen jatra à Panauti dans Toffin (1984, pp. 524-525).
26 Les fêtes religieuses sont fixées selon le comput lunaire. Le mois lunaire commence le premier jour de la quinzaine claire et se termine le quinzième jour de la quinzaine sombre.
Le nouvel an néwar est le premier jour de la quinzaine claire de kārtik (mois de novembre de notre calendrier). En ce qui concerne l’ère, les Néwar utilisent le nepāl sambat, qui commence en 878 après J.-C.
Outre le Mavḥni, deux autres rituels importants ont lieu à Lhasa : le swañti nakhaḥ et le śrīpāñcamī. Le swañti nakhaḥ (tihār en nepali) commence le 13e jour de la quinzaine sombre de kārtik ; cinq jours sont consacrés à Yama le dieu des morts. Les Tibétains lui donnent le nom de chöme « la fête des lumières ». Le premier jour, kvah pūjā, « pūjā aux corbeaux », les thakāli des sept pālā se rendent au lāykū et jouent aux dés avec le wakil. Ce dernier donne ensuite une noix d’arec à chaque thakali. De retour dans le pala la noix est coupée en morceaux et donnée à chaque membre du pālā ; on joue aux dés pendant cinq jours et les Tibétains participent aux jeux. Jouer et gagner pendant cette période est bon signe pour les gains dans l’année à venir. Le quatrième jour, gagner pendant cette période est bon signe pour les gains dans l’année à venir. Le quatrième jour, 1er jour de la quinzaine claire, marque le début de l’année néwar. Le dernier jour de swañti nakhaḥ, jour de kijā pūjā, la «fête des frères», les thakāli rendent la noix d’arec au wakil et veillent à ce que les jeux s’arrêtent pour de bon, ce qui dans certains cas est très difficile. Cette fête n’a rien à voir avec les croyances bouddhiques ajoute Dan Kaji. Voir aussi Toffin (1984, pp. 538-542).
Śrī pañcamī est la fête de Sarasvatī, considérée par les Néwar de Lhasa comme l’épouse de Manjuśri. Dans la mythologie hindoue, ce jour marque la naissance de Sarasvatī, divinité protectrice des arts (Lewis 1984, pp. 414-415).
Le cinquième jour de la quinzaine claire de magh (Janvier-février), on se rendait au temple de Kamakuśa, situé dans un jardin à l’est de la vieille ville de Lhasa, sur le lieu où d’après la tradition, Manjuśri se serait reposé alors que venant de Chine il se rendait au Népal. On y sacrifiait un chevreau et la journée se terminait par un repas et des jeux de dés. Ce temple en forme de pagode a été réparé en 1974 par le consul D.B. Bista (communication de D.B. Bista). A ces deux fêtes régulières, s’ajoutaient en de rares occasions un samyak offert par un riche marchand de Lhasa. Le samyak est une des grandes fêtes du Bouddhisme néwar et le bienfaiteur peut être l’ensemble de la communauté ou un individu.
27 Kūchi bhvay (néw) : banquet qui réaffirme l’unité de la patrilignée et les prérogatives de son chef (Toffin 1984, p. 534).
28 syāku tyāuo (néw) : jour dédié à Durgā (Toffin 1984, p. 534).
29 Les Néwar de Lhasa s’associent par la pensée à leurs parents et amis qui ce jour-là fêtent l’āsã cālã. «Les Tuladhar d’Asan ont leur fête du Khaḍga jātrā. Des membres de chaque famille de la lignée font une procession autour des temples d’Asan puis reviennent dan sieur cour où ils coupent deux courges peintes de figures de démons. » (lewis 1984, pp. 385-386).
30 Dāphā (néw.); dāphā khalak, groupe de musiciens / associations musicales guṭhi possédant quelques arpents de terre dont les revenus servent à organiser des banquets et réparer les instruments de musique (Toffin 1984, p. 572).
31 Mauvaise transcription des termes bhuiphasi et la-phug lo-sar.
32 Dor Bahadur Bista, ethnologue, a été de 1967 à 1972 secrétaire du Uttar Chetra Bikas Samiti, « Comité pour le développement des régions Nord du Népal », puis Consul Général du Népal au Tibet de 1972 à 1975. Il a fait le récit de son séjour au Tibet dans l’ouvrage intitulé Report from Lhasa.
33 Le Consulat du Népal était situé au sud du Jokhang dans le quartier Kunzangtse (Brauen 1983, plan de Lhasa).
34 D.B. Bista fait ici référence à un.fait cité par D. Wright « At this période the Yavanas (Musulmans) first entered Nepal » (Wright 1877, p. 120).
35 skyes-lha est une divinité associée à un clan ou lignée, identique à une divinité de lieu gzhi bdag. Pour les Néwar de Lhasa, le skyes-lha est rnal-jorma ou lha-mo. Bsam-yas rgyal-po « le roi de bsam-yas » (monastère construit au VIIe siècle) est identifié à Pe-har, une autre divinité protectrice. Ici, il y a assimilation de bsam-yas, rgyal-po à Bhindyaḥ. Ces aspects mériteraient une étude approfondie par des tibétologues (Jest 1993).
36 Le jeu de cauries est strictement réglementé, autorisé seulement lors de certaines fêtes.
37 smyung-gnas (tib.) : période de mortification et de jeûne qui peut durer de deux à six jours, un jour de jeûne étant suivi d’un jour de silence.
38 Kipat (nép.) : statut des terres confiées aux communautés tibéto-birmanes par la couronne. L’allocation des terres et l’exercice de la justice reviennent aux chefs de la communauté.
39 Raiti (nép.) : tenancier direct de l’État, exploitant une terre raikar. Tālukdār (nép.) : représentant le roi, collectant l’impôt sur lequel il prélevait 5 %. Il avait en outre un pouvoir judiciaire et jugeait les délits mineurs (Toffin 1984, p. 354).
Auteurs
Kesar Lall Shrestha poursuit depuis plus de trente ans des recherches sur la tradition orale au Nepal. Membre de la « Nepal Folklore Society », il est l’auteur de plusieurs ouvrages sur les contes et légendes du Népal. Il poursuit actuellement des recherches sur les échanges entre le Népal et le Tibet au XIXe et XXe siècles, les traditions et les modes de vie des commerçants néwar établis au Tibet.
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