Chapitre 6. Les défunts
p. 249‑282
Résumés
Le chapitre 6 concerne les défunts, ceux dont les restes sont conservés (67 cas) comme les trépassés qui ne sont connus que par la littérature archéologique (119 cas) : le nombre de sujets par tombe ; la distribution en fonction de l’âge au décès, qui fait apparaître un fort déficit des jeunes morts ; la répartition par sexe anthropologique, équilibrée quant à elle. Il aborde également les différentes manières de traiter les cadavres, incinération sur place ou sur ustrinum, dépôt primaire non incinéré, dépôt secondaire après décharnement, non incinéré également, et la question des manipulations d’os, ainsi que le problème de l’absence de vestige osseux dans certains monuments semblables aux tombes. Pour chacun de ces traitements, le mode de dépôt des restes humains est étudié : quantification des os incinérés, absence ou présence d’ossuaire, position et orientation des corps non brûlés, aménagement de la région sépulcrale...
Evidence for the dead, presented in Chapter 6, includes those remains still available for study (67 individuals) and those for which only an archaeological description survives (119 individuals). Discussion revolves around the number of bodies per tomb, distribution according to age at death (an unusually low number of early deaths) and anthropological distribution of the sexes (evenly balanced between males and females). The chapter also considers different ways corpses were dealt with, namely burned in situ or on a ustrinum or unburned, either as a primary deposit or as a secondary deposit after excarnation. Such issues as the manipulation of bones and the absence of bone remains in certain monuments resembling tombs are also taken up in this chapter. For each method the way in which the human remains were deposited is examined: quantification of cremated bone, presence or absence of an ossuary, position and orientation of unburned corpses, organisation of the grave area.
Das Kapitel 6 befasst sich mit den Toten; sowohl mit denen, deren Reste konserviert sind (67 der Fälle), wie mit denen, die nur durch das archäologische Begleitmaterial bekannt sind (119 Fälle): Anzahl der Individuen pro Grab, Verteilung nach Sterbealter, das übrigens einen starken Defizit an jungen Toten aufweist, und die gleichmäBige Verteilung nach anthropologischen Geschlechtern. Thema dieses Kapitels sind ebenfalls die verschiedenen Arten, die Leichen zu behandeln: Einäscherung vor Ort oder auf einem ustrinum, uneingeäschertes Primärdepot oder ebenfalls uneingeäschertes Sekundärdepot nach Ablösung des Fleisches. Auch die Frage der Knochenmanipulationen, und das Problem des Fehlens von Knochenresten in manchen Monumenten, die dennoch Gräbern ähneln, werden berücksichtigt. Für jede dieser Behandlungen wird die Art des Depots der menschlichen Reste untersucht: Quantifikation der eingeäscherten Knochen, Fehlen oder Vorhandensein von Ossuarien, Position und Orientierung von unverbrannten Körpern, Ausstattung der Bestattungsregion...
El capítulo sexto esté dedicado a los difuntos, tanto aquéllos cuyos restes óseos se han conservado (67), como los que son conocidos solamente por la bibliográfica arqueológica (119): número de individuos en cada tumba; repartición en cuanto a la edad en el traspaso, que muestra un fuerte déficit de los más jóvenes; repartición según el "sexo antropológico", esta ultima bien equilibrada. Estudia también esta parte los diversos modos de tratar el cadáver, incineración in situ o en una pira, depósito primario no incinerado, depósito secundario después descarnadura, no incinerado también, el problema de manipulaciones de huesos, y la cuestión de la ausencia de restos óseos en ciertas estructuras semejantes a las tumbas. Para cada uno de estos tratamientos, el modo de depósito de los restes esta analizado: cantidad de huesos incinerados, ausencia o presencia de un continente, position y orientación de los cadáveres, disposición de la región sepulcral.
Texte intégral
6.1 La base documentaire
1Nous ne disposons de renseignements concernant les défunts que pour 157 des quelque 240 monuments inventoriés. 13 tertres, presque tous fouillés récemment et complètement, n’ont pas livré d’os humain, une absence dûment constatée par les fouilleurs. Et pour 70 autres sites, toute indication sur le matériel anthropologique fait totalement défaut : presque tous les dolmens et tumulus antérieurs réutilisés, des tumulus presque entièrement détruits dont la fouille n’a pu être que très incomplète, des tumulus seulement repérés, ou explorés anciennement, qui n’ont fait l’objet d’aucune relation et dont l’existence n’est attestée qu’à travers la présence de quelques objets dans une collection.
2Pour les 157 tombeaux restant, les morts sont cependant très inégalement connus. Deux grandes catégories apparaissent.
347 gisements pour lesquels la documentation ostéologique a pu être étudiée. Il s’agit essentiellement de fouilles effectuées depuis les années 1970, mais aussi de celles, plus anciennes, du CRA des Chênes Verts et de certaines de C. Hugues.
Causse de Sauveterre
4Combelongue 1 (site no 7) ;
Le Crès II et IV (sites nos 9 et 10) ;
Les Fonds (site no 11) ;
Roumagnac 1 et 6 (sites nos 12 et 15) ;
Villeplaine 1 et 2 (sites nos 18 et 19) ;
Vayssas 1 (site no 20) ;
Combes de L’Aumède Haute (site no 27) ;
Pomeyrol (site no 71) ;
Le Serre Sec (site no 86) ;
Combe Sévène 1, 2, 3, 4 et 10 (sites nos 111, 112, 113, 114 et 155) ;
tumulus réutilisé de Dignas (site no 121).
Plateau des Bondons
5Cham des Bondons 1 (site no 152) ;
Les Combes I (site no 153).
Causse Méjan
6Moulin à Vent du Pradal (site no 161) ;
Valbelle C3 (site no 163) ;
Dévois de Villeneuve 1 et 2 (sites nos 165 et 166) ;
Plaine de Villeneuve (site no 168) ;
Drigas 2 (site no 177) ;
Nivoliers (site no 181) ;
Champ Rond (site no 184) ;
Serre del Moussu (site no 185) ;
Débès de Caussignac (site no 187) ;
Les Conques 1 (site no 189) ;
Chamblon A2, A4, A6, A7 et A8 (sites nos 192, 194, 195, 196 et 197) ;
abri des Arcs de Saint‑Pierre (site no 205) ;
Jas de Racoules 1 et 3 (sites nos 211 et 213) ;
La Fajole C1 (site no 215).
Can d’Artigues
7Col de La Vache (site no 216).
Causse Noir
8Serre de Cabrié 1, 3 et 5 (sites no 218, 220 et 222) ;
Cros de l’Asé 11 et 13 (sites nos 224 et 225) ;
Rasiguette (site no 237).
9Le matériel ostéologique provenant de ces sites a été examiné par H. Duday (tumulus réutilisé de Dignas), par E. Crubézy (Combe Sévène 1, Les Combes I, Serre de Cabrié 1, 3 et 5), par F. Pons (Roumagnac 6, Les Fonds) à la suite des fouilles, et par nos soins pour tous les autres. Celui de l’abri des Arcs de Saint‑Pierre est « en cours d’étude » (depuis de nombreuses années !), mais les notations de G. Fages autorisent à inclure ce site à ce corpus. Toutes ces données permettent de compléter ou de préciser les remarques des fouilleurs concernant le mode de traitement et de dépôt des corps, d’établir un dénombrement des individus par tombe, de reconnaître leur âge et parfois leur sexe, cela afin de fournir une approche individualisée des pratiques funéraires.
10Pour les 111 autres monuments, les os humains ont disparu depuis la fouille ou ne sont plus accessibles et nous devons nous contenter des indications plus ou moins précises fournies par les archéologues dans la relation écrite qu’ils ont donnée de leurs travaux. Cela concerne pour l’essentiel les fouilles anciennes, toutes celles des docteurs Prunières et Morel, de Lescure, Delisle et Viré, mais aussi une partie de celles de C. Hugues et P.‑M. Blanquet.
Causse de Sauveterre
11Le Viala 1 et 2 (sites nos 4 et 5) ;
dolmen du Viala 10 (site no 6) ;
Le Crès I (site no 8) ;
Les Sarragats (site no 17) ;
Le Freyssinel I (site no 87), II (site no 88), III (site no 72), IV (site no 22), V (site no 23), VI (site no 73), VII (site no 74), VIII (site no 75), IX (site no 76), X (site no 77), XI (site no 78), XII (site no 43), XIII (site no 44), XIV (site no 79), XV (site no 89), XVI (site no 80), XVII (site no 45), XVIII (site no 46), XIX (site no 47), XX (site no 48), XXII (site no 81), XXIII (sites nos 22, 23, 24), XXXI (site no 82), XXXII (site no 83), XXXIII (site no 84), XXXIV (site no 85), XL (site no 90), XLI (site no 91) ;
mas de La Bastide II (site no 26) ;
Grand Lac 20‑1883 (site no 28) ;
L’Aumède Basse (site no 29) ;
La Rouvière 20‑1887 (site no 31) ;
Le Royde 19‑1883 (site no 32) ;
Le Sec 18‑1883 (site no 33) ;
Les Fons I, II et III (sites nos 36, 37 et 38) ;
Chanac‑Laval 21‑1887, 22‑1887 et 23‑1887 (sites nos 39, 40 et 41) ;
Clapas des Pessaments (site no 42) ;
Mazel Bouïssy 12‑1883 (site no 52) ;
Laval 10‑1883 (site no 55) ;
Montredon 9‑1883 (site no 56) ;
Roussac 11‑1883 (site no 61) ;
Bellas 28‑1887 et Bellas sans numéro‑1887 (sites no 63 et 63bis) ;
Devèze d’Inos 26‑1887 et 27‑1887 (sites nos 65 et 66) ;
Devèze du Massegros (site no 67) ;
Mallet 29‑1887 (site no 68) ;
Cham de la Bazalgette 2 et 3 (sites nos 92 et 93) ;
Les Fadarelles 15‑1883 (site no 94) ;
Saint‑Georges 13‑1883 (site no 95) ;
Soulages 24‑1887 (site no 97) ;
Boisset 3‑1887, 4‑1887, 5‑1887, 6‑1887 et 7‑1887 (sites nos 100, 101, 102, 103, et 104) ;
Champerboux 2‑1887 (site no 105) et Champerboux‑Laval 7‑1883 (site no 108) ;
Chaumeils 4‑1883 (site no 109) ;
Clapaslas (ou Satanas) (site no 110) ;
Dinas 8‑1887, 9‑1887, 10‑1887 et 11 ‑1887 (sites nos 116, 117, 118 et 119) ;
Jouanas 17‑1887, 18‑1887 et 19‑1887 (sites n“122, 123 et 124) ;
Bac I, II, III, IV, V, VI, VII, VIII et IX (sites nos 125, 126, 127, 128, 129, 130, 131, 132 et 133) ;
Blachères 2‑1883 (site no 135) ;
Brousses 6‑1883 (site no 136) ;
Les Lacs 12‑1887, 13‑1887, 14‑1887, 15‑1887 et 16‑1887 (sites nos 137, 138, 139, 140 et 141) et Les Lacs III (site no 142) ;
Pessades 3‑1883 (site no 144) ;
Les Vieilles Mortes 5‑1883 (site no 145).
Cham des Blanquets
12Rocherousse (site no 146).
Plateau des Bondons
13Les Bondons I (site no 159) et III (site no 149).
Causse Méjan
14Aven Armand 1 et 2 (sites nos 175 et 176) ;
dolmen du Cerrière (site no 179) ;
Chamblon A3 (site no 193) ;
ciste 4 de Chamblon (site no 198) ;
La Condamine B1 (site no 203) ;
Gargo 1, 2 et 3 (sites n“206, 207 et 208) ;
Jas de Salgas (site no 214).
Causse Noir
15Cabrières (site no 239).
6.2 Le nombre de défunts par tombe
16Les 157 tombes des Grands Causses du Gévaudan pour lesquelles nous disposons d’une étude ostéologique ou, au minimum, de quelques observations consignées par le fouilleur sur le matériel osseux humain, abritaient les restes soit d’un seul défunt, soit de plusieurs sujets, jusqu’à cinq. Il convient toutefois de distinguer celles dont les os ont pu être étudiés des autres.
6.2.1 Matériel ostéologique étudié
17Le matériel ostéologique a pu être examiné pour 47 gisements funéraires. Il correspond en tout à 67 décédés. Nous donnons ci‑dessous la liste de ces sites, établie en fonction du nombre de défunts par tombe et ordonnée par causse (tabl. vii et fig. 240).

TABL. VII – Répartition des tombes en fonction du nombre de défunts déposés dans chacune, par phases chronologiques (en italique : incinération ; en romain : défunt non incinéré).

FIG. 240 – Situation des tombes dont le matériel ostéologique a pu être étudié. Les cercles sont proportionnels au nombre d’individu par sépulture. Les numéros sont ceux des sites.
Un défunt
Causse de Sauveterre
18Le Crès II (site no 9) ;
Les Fonds (site no 11) ;
Roumagnac 1 (site no 12) ;
Villeplaine 1 (site no 18) ;
Combes de L’Aumède Haute (site no 27) ;
Le Serre Sec (site no 86) ;
Combe Sévène 1, 2 et 4 (sites nos 111, 112 et 114) ;
Les Lacs III, sépulture inférieure (site no 142).
Plateau des Bondons
19Les Combes I (site no 153).
Causse Méjan
20Moulin à Vent du Pradal (site no 161) ;
Valbelle C3 (site no 163) ;
Dévois de Villeneuve 1 et 2 (sites nos 165 et 166) ;
Drigas 2 (site no 177) ;
Nivoliers (site no 181) ;
Serre del Moussu (site no 185) ;
Débès de Caussignac (site no 187) ;
Chamblon A2, A4, A6, A7 et A8 (sites nos 192, 194, 195, 196 et 197) ;
abri des Arcs de Saint‑Pierre (site no 205) ;
Jas de Racoules 1 et 2 (sites nos 211 et 213) ;
La Fajole C1 (site no 215).
Can d’Artigues
21Col de La Vache (site no 216).
Causse Noir
22Serre de Cabrié 3 et 5 (sites nos 220 et 222) ;
Cros de l’Asé 11 et 13 (sites nos 224 et 225) ;
Rasiguette (site no 237).
Deux défunts
Causse de Sauveterre
23Combelongue 1 (site no 7) ;
Le Crès IV (site no 10) ;
Roumagnac 6 (site no 15) ;
Pomeyrol (site no 71) ;
Combe Sévène 3 et 10 (sites nos113 et 115) ;
tumulus réutilisé de Dignas (site no 121).
Plateau des Bondons
24Cham des Bondons 1 (site no 152).
Causse Méjan
25Plaine de Villeneuve (site no 168) ;
Les Conques 1 (site no 189) ;
Champ Rond (site no 184).
Trois défunts
Causse de Sauveterre
26Villeplaine 2 (site no 19).
Causse Noir
27Serre de Cabrié 1 (site no 218).
Cinq défunts
Causse de Sauveterre
28Vayssas 1 (site no 20).
29Il convient de remarquer, en préalable, que dans les tombes n’ayant livré que des os incinérés, on n’a pu identifier de doublets permettant d’affirmer la présence de plusieurs individus. Il est en effet plus difficile de déceler des tombes doubles ou multiples lorsque les os incinérés sont, comme dans les sépultures à incinération des Grands Causses, peu nombreux, très fragmentés et dispersés hors de tout contenant. Cela peut expliquer l’absence de repérage des sépultures multiples uniquement à incinération (tabl. vii), ce qui ne correspond pas forcément à la réalité.
30Cette réserve faite, on peut constater que, globalement, les tombes individuelles sont les plus nombreuses : 33 sur 47, soit 70 % et que les tombes multiples ne regroupent chacune qu’un nombre très limité de sujets : plus des trois quarts (11 sur 14 tombes multiples) contiennent les restes de deux individus, deux ont livré les restes de trois sujets et un seul de cinq sujets. Ce dernier nombre est actuellement le maximum attesté dans une même sépulture protohistorique dans cette région. Il concerne le tout début du premier âge du Fer. Au Bronze final, la sépulture est soit individuelle, soit seulement double. Cette situation est analogue à celle remarquée à la même époque dans les Garrigues languedociennes : les tumulus individuels y représentent 85 % du total, et les tumulus multiples, qui comptent au maximum cinq sujets également (et peut‑être huit dans un cas problématique), sont doubles pour les deux tiers d’entre eux (Dedet 1992a : 101‑103).
31La répartition de ces sépultures multiples par causse montre une certaine diversité. En effet, si les monuments renfermant deux sujets et plus sont très rares, ou exceptionnels, sur les causses Méjan (3 sur 20) ou Noir (1 sur 6), voire sur le plateau des Bondons (1 sur 2), ils représentent la moitié des tombes du Sauveterre (9 sur 18) (fig. 240). Et sur ce causse, il ne s’agit pas d’une habitude localisée ni à un groupe de sépultures, ni à un petit pays. On la rencontre en effet aussi bien à son extrémité occidentale dans le Sévéragais (Le Crès IV, Roumagnac 6) ou plus au nord (Combelongue 1), au centre de sa bordure méridionale (Combe Sévène 3 et 10, Dignas), comme sur ses confins sud‑est (Pomeyrol). Il semble bien qu’il s’agisse là d’une originalité du causse de Sauveterre, et peut‑être même de toute la partie nord de la région étudiée, si l’on considère que l’une des deux tombes du plateau des Bondons où l’étude ostéologique a été possible est elle aussi une sépulture multiple. Le même phénomène a été observé dans le petit pays de Malgoirès, en Languedoc oriental, où seulement deux tiers des tumulus sont individuels, contre 87 % dans le reste des Garrigues (Dedet 1992a : 103).
32En revanche, ce rapport entre tombes individuelles et tombes multiples ne semble pas varier de manière significative dans le temps sur les Grands Causses. C’est du moins ce qu’il ressort du tableau vii.
33Au vu du contenu ostéologique de la plupart des monuments ayant livré les restes de plusieurs sujets, on peut cependant se poser la question de l’interprétation de beaucoup de ces dépôts appelés multiples.
34En effet, sur quatorze de ces tombes multiples, trois ont livré du matériel qui ne laisse aucun doute sur le nombre d’individu qu’elles contenaient : Vayssas 1 (site no 20) et Dignas (site no 121) abritaient respectivement cinq et deux cadavres déposés simultanément, bien représentés lors de la fouille par de nombreuses pièces osseuses observées en place ou en connexion ; le tumulus de Roumagnac 6 (site no 15) recouvrait un squelette d’adulte déposé en décubitus dorsal, et contenait en outre, dispersés dans sa masse, 148 g d’os incinérés d’un deuxième adulte.
35En revanche, figurent chaque fois dans les onze autres tumulus les restes, nombreux, d’un individu adulte en dépôt primaire non brûlé, ou exceptionnellement en dépôt secondaire incinéré, accompagnés de très rares petits éléments d’un ou deux autres sujets, petits fragments osseux et/ou dents :
– une ou cinq dents : Plaine de Villeneuve (site no 168), Combe Sévène 10 (site no 115) ;
– deux ou quatre morceaux du squelette post‑céphalique et deux dents : deux des sujets de Villeplaine 2 (site no 19) ;
– un à trois morceaux du squelette post‑céphalique : Combelongue 1 (site no 7), Le Crès IV (site no 10) où les deux fragments sont incinérés alors que l’individu le mieux représenté ne l’est pas, Pomeyrol (site no 71) avec des os de périnatal, Combe Sévène 3 (site no 113), Cham des Bondons 1 (site no 152), Champ Rond (site no 184) où le fragment n’est pas brûlé tandis que le défunt le mieux représenté est incinéré, Les Conques 1 (site no 189) avec des os de périnatal, et Serre de Cabrié 1 (site no 218).
36Dans presque tous les cas, ces pièces surnuméraires n’ont pas été identifiées ou localisées à la fouille, si bien que leur mode de dépôt nous est inconnu. À Pomeyrol, les trois fragments d’os du périnatal ont été découverts dispersés dans la masse du tertre, en dehors de la zone occupée par le squelette de l’adulte. À la Cham des Bondons 1, les deux dents supplémentaires ont été isolées à la fouille, mais il s’agit d’un secteur fortement remanié par les travaux agricoles. D’une manière générale, faute de renseignements sur les conditions de découverte, l’interprétation de la présence de tels restes est fort délicate. Ceux‑ci se trouvaient‑ils déjà là lors du dépôt du défunt « principal » ? Ont‑ils été mis dans le tumulus en même temps que lui ? Ou bien ont‑ils été introduits après ? Une destruction par les agents naturels de la presque totalité des os de ces individus, sauf pour les deux périnataux, paraît étrangement sélective si l’on songe au sujet bien représenté dans le même lieu. Des reprises d’os de la part des survivants n’auraient pas un caractère aussi méthodique, n’« oubliant » qu’aussi peu de restes.
37Deux tumulus du début de premier âge du Fer fouillés récemment dans des régions voisines, où de telles pièces supplémentaires ont pu être observées en place, peuvent nourrir le débat. Dans le tumulus de Peyraube 6 à Lamelouze (Gard), dans les Cévennes micaschisteuses, un morceau de mandibule humaine d’adulte, non brûlée, se trouvait dans un petit coffre enfermant des offrandes, bien séparé des restes d’un adulte incinéré, dispersés au centre du monument (Dedet, Gauthey 1994 : 121‑123). Le tumulus de Pontel à Dions (Gard), dans la Garrigue nîmoise, en milieu calcaire cette fois, abritait les restes d’un adulte en décubitus dorsal, avec, éparpillées vers ses pieds, quatre dents d’un second adulte, et à 50 cm de son thorax, cinq dents d’un grand enfant, tandis que six tessons de vases non tournés et un morceau de plaque de bronze étaient disséminés parmi ses os. Aucune trace de perturbation dans la chape tumulaire ne permet de penser que ces dents ont pu être introduites après la construction du tertre (Dedet et al. 1998 : 123,127). Dans les deux cas, ces dépôts ne constituent pas à proprement parler la sépulture d’individus supplémentaires, mais plutôt un accompagnement du mort incinéré de Peyraube 6 ou du cadavre en décubitus dorsal de Pontel (peut‑être une offrande du genre « relique » provenant d’autres défunts ?). Ce peut être là l’explication qu’il convient de donner à de tels restes d’individus ayant dépassé la petite enfance dans les Grands Causses ? Et dans ce cas, l’expression de « tombes multiples » serait impropre.
6.2.2 Matériel ostéologique non étudié
Un défunt signalé
Causse de Sauveterre
38Le Viala 2 et dolmen du Viala 10 (sites nos 5 et 6) ;
Le Crès I (site no 8) ;
Le Freyssinel IV, V et XXIII (sites nos 22, 23 et 24) ;
mas de La Bastide II (site no 26) ;
Grand Lac 20‑1883 (site no 28) ;
L’Aumède Basse (site no 29) ;
La Rouvière 20‑1887 (site no 31) ;
Le Royde 19‑1883 (site no 32) ;
Le Sec 18‑1883 (site no 33) ;
Les Fons I et II (sites n“36 et 37) ;
Chanac‑Laval 21‑1887 et 23‑1887 (sites nos 39 et 41) ;
Clapas des Pessaments (site no 42) ;
Le Freyssinel XII, dolmen XIII, XVII, XVIII, XIX et XX (sites nos 43 à 48) ;
Laval 10‑1883 (site no 55) ;
Bellas sans numéro‑1887 (site no 63bis) ;
Devèze d’Inos 26‑1887 et 27‑1887 (sites nos 65 et 66) ;
Devèze du Massegros (site no 67) ;
Mallet 29‑1887 (site no 68) ;
Le Freyssinel I, II, III, VI, VII, VIII, IX, XI, XIV, XVI, XXII, XXXI, XXXII, XXXIV, XL et XLI (sites nos 72 à 76, 78 à 83, 85, 87, 88, 90 et 91) ;
Cham de la Bazalgette 2 et 3 (sites nos 92 et 93) ;
Les Fadarelles 15‑1883 (site no 94) ;
Soulages 24‑1887 (site no 97) ;
Boisset 3‑1887, 4‑1887, 5‑1887, 6‑1887 et 7‑1887 (sites nos 100 à 104) ;
Champerboux 2‑1887 (site no 105) ;
Clapaslas (site no 110) ;
Dinas 9‑1887, 10‑1887 et 11‑1887 (sites nos 117 à 119) ;
Jouanas 17‑1887, 18‑1887 et 19‑1887 (sites nos 122 à 124) ;
Bac I, III, IV, V, VI, VII et IX (sites n « 125, 127 à 131 et 133) ;
Blachères 2‑1883 (site no 135) ;
Brousses 6‑1883 (site no 136) ;
Les Lacs 12‑1887, 13‑1887, 14‑1887, 15‑1887, 16‑1887 et III (sites nos 137 à 142) ;
Les Vieilles Mortes 5‑1883 (site no 145).
Cham des Blanquets
39Rocherousse (site no 146).
Plateau des Bondons
40Les Bondons I et III (sites nos 149 et 159).
Causse Méjan
41Aven Armand 1 et 2 (sites nos 175 et 176) ;
dolmen du Cerrière (site no 179) ;
Chamblon A3 (site no 193) ;
ciste 4 de Chamblon (site no 198) ;
La Condamine B1 (site no 203) ;
Gargo 1 et 2 (sites nos 206 et 207) ;
Jas de Salgas (site no 214).
Causse Noir
42Cabrières (site no 239).
Deux défunts signalés
Causse de Sauveterre
43Les Sarragats (site no 17) ;
Les Fons III (site no 38) ;
Le Freyssinel X (site no 77) ;
Le Freyssinel XXXIII (site no 84) ;
Le Freyssinel XV (site no 89) ;
Chaumeils 4‑1883 (site no 109) ;
Bac II (site no 126).
Trois défunts signalés
Causse Méjan
44Gargo 3 (site no 208).
Plusieurs défunts signalés (nombre non précisé)
Causse de Sauveterre
45Chanac‑Laval 22‑1887 (site no 40) ;
Mazel Bouïssy 12‑1883 (site no 52) ;
Montredon 9‑1883 (site no 56) ;
Roussac 11‑1883 (site no 61) ;
Bellas 28‑1887 (site no 63) ;
Saint‑Georges 13‑1883 (site no 95) ;
Champerboux‑Laval 7‑1883 (site no 108) ;
Dinas 8‑1887 (site no 116) ;
Pessades 3‑1883 (site no 144).
46On trouve évidemment dans cette liste proportionnellement moins de tombes à plusieurs individus (15,7 %) que dans les sites dont les os ont été examinés (29,8 %). Plus intéressant en revanche est de constater que le nombre de défunts signalés par les archéologues dans ces tombes multiples n’excède jamais trois, ce qui est tout à fait en accord avec l’enseignement des tombes dont les os ont été étudiés.
6.3 Âge et sexe des défunts
6.3.1 Matériel ostéologique étudié
47Dans les 47 gisements dont la documentation ostéologique est conservée, 67 individus ont été déterminés, qui se répartissent, en fonction de leur âge au décès et de leur sexe, de la manière indiquée ci‑dessous.
Hommes : 10 individus
48– Environ 30 ans : sujet 5 du Vayssas 1 (site no 20), vers 750‑ 700/650 ;
– probablement plus de 30 ans : sujet no 1 de Combelongue 1 (site no 7), Bronze final IIIb ; sujet no 4 du Vayssas 1 (site no 20), vers 750‑700/650 ; sujet no 1 de Combe Sévène 10 (site no 115), 750‑ 500 ; Moulin à Vent du Bradai (site no 161), 750‑500 ; Chamblon A8 (site no 197), 750‑500 ;
– environ 40 ans : Les Lacs III, sépulture inférieure (site no 142), Bronze final IIIb ;
– plus de 40 ans : Serre de Cabrié 5 (site no 222), 750‑500 ;
– vieillard ; Le Crès II (site no 9), transition Bronze final/âge du Fer ;
– âge non précisable : Combe Sévène 1 (site no 111), 650‑600.
Adultes très robustes ou robustes : 14 individus
49– 20‑25 ans : Cros de l’Asé 13 (site no 225), 625‑500 ;
– probablement moins de 30 ans : Combe Sévène 4 (site no 114), 650‑600 ;
– 15‑40 ans : Les Combes I (site no 153), Bronze final IIb ;
– 20‑40 ans : sujet no 1 du Serre de Cabrié 1 (site no 218), 750‑ 600 ;
– probablement plus de 30 ans : Débès de Caussignac (site no 187), Bronze final IIIa ou IIIb ; sujet no 1 de la Cham des Boncons 1 (site no 152), 750‑700/650 ; Col de La Vache (site no 216), 750‑500 ; Rasiguette (site no 237), 750‑500 ; Combes de L’Aumède Haute (site no 27), 625‑500 ; sujet no 1 du Crès IV (site no 10), Bronze final III ou premier âge du Fer ; Dévois de Villeneuve 2 (site no 166), âge du Bronze ou du Fer ? ;
– adulte assez âgé : sujet no 1 des Conques 1 (site no 189), 400‑300 ;
– adulte âgé : Pomeyrol (site no 71), 650‑600 ;
– âge non précisable : Cros de l’Asé 11 (site no 224), 750‑600.
Femmes : 8 ou 9 individus
50– 20‑30 ans : sujet no 2 du Vayssas 1 (site no 20), vers 750‑ 700/650 ;
– vers 25 ans : sujet 1 du tumulus réutilisé de Dignas (site no 121), Bronze final Illb ;
– 25‑30 ans : Serre de Cabrié 3 (site no 220), 750‑600 ;
– moins de 30 ans (sexe féminin probable) : Drigas 2 (site no 177), Bronze final IIIa ;
– probablement plus de 30 ans : Villeplaine 1 (site no 18), transition Bronze final/âge du Fer ; sujet no 1 du Vayssas 1 (site no 20), vers 750‑700/650 ; Chamblon A2 (site no 192), 650‑600 ;
– âge non précisable : sujet no 1 de Roumagnac 6 (site no 15), transition Bronze fînal/âge du Fer ; sujet no 1 de Combe Sévène 3 (site no 113), 750‑500.
Adultes graciles : 4 individus
51– probablement plus de 30 ans : Chamblon A6 (site no 195), 650‑ 600 ; sujet no 1 de Villeplaine 2 (site no 19), Bronze final III ou premier âge du Fer ;
– âge non précisable : sujet no 2 de Combelongue 1 (site no 7), Bronze final IIIb ; sujet no 2 du Champ Rond (site no 184), 550‑450.
Autres adultes : 13 individus
52– probablement plus de 30 ans : Roumagnac 1 (site no 12), 750‑ 600 ; Jas de Racoules 3 (site no 213), 650‑600 ; Le Serre Sec (site no 86), 750‑500 ; sujet no 1 du Champ Rond (site no 184), 550‑ 450 ; Jas de Racoules 1 (site no 211), Bronze final‑âge du Fer ? ;
– âge non précisable : sujet no 2 de Roumagnac 6 (site no 15), transition Bronze final/âge du Fer ; sujet no 2 de la Cham des Boudons 1 (site no 152), 750‑700/650 ; sujets nos 1 et 2 de la Plaine de Villeneuve (sire no 168), 750‑600 ; Chamblon A4 (site no 194), 650‑600 ; Les Fonds (site no 11), 575‑500 ; La Fajole C1 (site no 215), 750‑500 ? ; Nivoliers (site no 181), datation ?
Adultes ou sujets de taille adulte : 6 individus
53– probablement moins de 30 ans : Dévois de Villeneuve 1 (site no 165), 600‑500 ;
– âge non précisable : Chamblon A7 (site no 196), 650‑600 ; Serre del Moussu (site no 185), 550‑450 ; sujet no 2 de Combe Sévène 3 (site no 113), 750‑500 ; Valbelle C3 (site no 163), 750‑500 ; sujet no 2 du Crès IV (site no 10), Bronze final III ou premier âge du Fer ?
Immatures : 11 individus
54– 16‑20 ans, de sexe féminin : Combe Sévène 2 (site no 112), transition Bronze final‑âge du Fer ;
– 15‑18 ans : sujet 2 de Villeplaine 2 (site no 19), Bronze final III ou premier âge du Fer ;
– vers 15 ans, de sexe masculin : sujet no 2 du tumulus réutilisé de Dignas (site no 121), Bronze final IIIb ;
– 10‑12 ans : sujet no 3 de Villeplaine 2 (site no 19), Bronze final III ou premier âge du Fer ;
– 9‑10 ans, de sexe féminin probable : sujet no 3 du Vayssas 1 (site no 20), 750‑700 ;
– 4‑13 ans : sujet no 2 du Serre de Cabrié 1 (site no 218), 750‑600 ;
– 2‑10 ans : sujet no 3 du Serre de Cabrié 1 (site no 218), 750‑600 ;
– 2‑6 ans : abri des Arcs de Saint‑Pierre (site no 205), 525‑400 ;
– 1‑2 ans : sujet no 2 de Combe Sévène 10 (site no 115), 750‑500 ;
– périnatal : sujet no 2 de Pomeyrol (site no 71), 650‑600 ; sujet no 2 des Conques 1 (site no 189), 400‑300.
6.3.2 Matériel ostéologique non étudié
55Les restes osseux humains de nombreuses tombes des Grands Causses fouillées plus ou moins anciennement ont disparu et n’ont pas pu être étudiés. Cependant, dans presque toutes les relations publiées, figurent quelques indications succinctes sur les défunts. Elles permettent de faire la distinction entre deux séries de gisements.
56Les sépultures pour lesquelles la classe d’âge du mort est indiquée ou suggérée :
– soit le fouilleur mentionne dans quelle grande classe d’âge entre le trépassé : adulte, vieillard, enfant, adolescent ; et comme il s’agit presque à chaque fois d’un docteur en médecine (Prunières, Delisle, Morel), on peut retenir l’indication ;
– soit il ne fait que signaler la présence d’un squelette, sans indication concernant l’âge au décès et le mode de dépôt ; par défaut, puisqu’il s’agit encore quelques fois du Dr Prunières et presque toujours du Dr Morel, on peut conclure qu’il s’agit d’un sujet adulte ou de taille adulte.
57Les sépultures pour lesquelles la classe d’âge du mort reste indéterminée. Ce sont les cas où le fouilleur se contente d’indiquer le type de traitement du corps, sans autre précision concernant le défunt : « inhumation(s) », ou « individu(s) inhumé(s) », « incinération(s) » ou « individu(s) incinéré(s) ». Presque tous les tumulus fouillés par le Dr Prunières ne fournissent que ce type d’information.
58D’autre part, J.‑L. Lescure pour Les Sarragats et quelques fois les Dr Prunières et Morel indiquent l’appartenance sexuelle du mort. Mais cette mention doit être prise avec la plus grande réserve car on ignore le plus souvent les critères anthropologiques utilisés pour cette diagnose, et si l’estimation ne repose pas simplement sur le mobilier associé au squelette.
59Quoi qu’il en soit, cette documentation reste difficile à exploiter valablement. On se contentera donc de dresser la liste de ces tombes par sujets adultes ou de taille adulte, immatures ou individus indéterminés.
Adultes ou sujets de taille adulte signalés mais non étudiés
60Le Viala 10 (site no 6), vie‑ive s. av. J.‑C., un individu ;
Les Sarragats (site no 17), 650‑600, deux individus ;
Le Freyssinel IV (site no 22), sépulture supérieure, non datée, un individu ;
Le Freyssinel V (site no 23), 750‑500, un individu ;
Le Freyssinel XXIII (site no 24), Bronze final III ou premier âge du Fer, un individu ;
mas de La Bastide II (site no 26), 750‑500, pour le Dr Morel, un « sujet probablement masculin d’après le volume des condyles fémoraux » ;
L’Aumède Basse (site no 29), 600‑500, un individu ;
La Rouvière 20‑1887 (site no 31), Bronze final ou premier âge du Fer, pour le Dr Prunières un « squelette féminin de grande taille » ;
Les Fons I (site no 36), 650‑550, le Dr Morel parle d’un sujet « adulte (d’après les dents), mesurant approximativement 1,50 à 1,55 m », « féminin » à cause du faible diamètre des bracelets ;
Les Fons II (site no 37), non daté, un individu ;
Les Fons III (site no 38), non daté, sépulture supérieure, un individu ; sépulture inférieure, un individu (sujet no 1) ;
Le Freyssinel XII (site no 43), 750‑650, un individu ;
Le Freyssinel XIII (site no 44), 750‑600, un individu ;
Le Freyssinel XVII (site no 45), 750‑600, un individu ;
Le Freyssinel XVIII (site no 46), 750‑500, un individu ;
Le Freyssinel XX (site no 48), 750‑600, un squelette, « féminin » pour le Dr Morel (à cause de la présence du bracelet ?) ;
Laval 10‑1883 (site no 55), 750‑600, un individu ;
dolmen du Pic de Rausas (site no 58), 750‑500, un individu ;
Le Freyssinel III (site no 72), 750‑600, un individu ;
Le Freyssinel VII (site no 74), Bronze final ou vie s. av. J.‑C., un squelette, « féminin » pour le Dr Morel ;
Le Freyssinel VIII (site no 75), 750‑600, un individu ;
Le Freyssinel X (site no 77), sépulture supérieure, transition Bronze final/premier âge du Fer, deux individus, dont un « adulte jeune » selon le Dr Morel ;
Le Freyssinel XIV (site no 79), 750‑500, un individu ;
Le Freyssinel XVI (site no 80), 650‑500, un individu ;
Le Freyssinel XXII (site no 81), 750‑600, selon le Dr Morel un « sujet féminin jeune n’ayant pas encore ses dents de sagesse » (mais l’indication du sexe est‑elle déduite du port d’un bracelet ?) ;
Le Freyssinel XXXI (site no 82), 750‑600, selon le Dr Morel un « sujet féminin assez jeune, dents pas ou peu usées » (mais l’indication du sexe est‑elle déduite de la présence des bracelets ?) ;
Le Freyssinel XXXIII (site no 84), Bronze final ou premier âge du Fer, selon le Dr Morel, d’après les mensurations des tibias et des fémurs, un individu masculin de 1,75 m ;
Le Freyssinel XXXIV (site no 85), 650‑600, un individu ;
Le Freyssinel I (site no 87), Bronze final II ou IIIa, un individu ;
Le Freyssinel XV (site no 89), 750‑500, sépulture centrale, un individu (sujet no 1) ;
Le Freyssinel XLI (site no 91), 750‑500 ;
Chaumeils 4‑1883 (site no 109), sépulture inférieure, 600‑500, un « vieillard » selon le Dr Prunières ;
Dinas 9‑1887 (site no 117), 750‑500 ;
Bac II (site no 126), sépulture supérieure 2, 750‑600, un individu (sujet no 1), « féminin » selon le Dr Morel ;
Les Lacs III (site no 142), sépulture supérieure, Bronze final IIIa, un individu ;
Les Bondons I (site no 159), 750‑600, un individu ;
Aven Armand 1 (site no 175), 750‑600, un « homme d’un âge avancé » selon Fr. Delisle et A. Viré ;
Aven Armand 2 (site no 176), 750‑600, un sujet robuste, « de sexe masculin » selon Fr. Delisle et A. Viré ;
La Condamine B1 (site no 203), 650‑600, un individu.
Sujets immatures signalés
61Les Fons III (site no 38), non daté, sépulture inférieure, sujet no 2 : « quelques débris du squelette d’un jeune enfant : dents de lait et phalanges » selon le Dr Morel ;
Le Freyssinel XIX (site no 47), 750‑500 : « sujet jeune » selon le Dr Morel ;
Le Freyssinel XXXIII (site no 84), Bronze final ou premier âge du Fer, « enfant » selon le Dr Morel ;
Le Freyssinel XV (site no 89), 750‑500, sujet no 2 : « squelette d’enfant jeune n’ayant pas renouvelé sa première dentition » selon le Dr Morel ;
Chaumeils 4‑1883 (site no 109), 600‑500, sépulture supérieure : « adolescent » selon le Dr Prunières ;
Bac II (site no 126), sépulture supérieure, 750‑600, sujet no 2 : « ossements « très friables » d’un enfant de 7 à 8 ans (la mandibule montre que les prémolaires définitives sont encore dans leurs alvéoles, sous les dents de lait, alors que le remplacement des incisives est effectué) » selon le Dr Morel ;
Le Cerrière (site no 179), Bronze final II, « squelette de jeune enfant dont les mandibules gardaient encore les dents de lait », selon M. Lorblanchet.
Sujets indéterminés signalés
62Le Viala 2 (site no 5) ;
Le Crès I (site no 8) ;
Le Freyssinel IV, VI, IX, XXXII, XL (sites nos 22, 73, 76, 83, 90) ;
mas de La Bastide I (site no 25) ;
Grand Lac 20‑1883 (site no 28) ;
Le Royde 19‑1883 (site no 32) ;
Le Sec 18‑1883 (site no 33) ;
Chanac‑Laval 21‑1887, 22‑1887 et 23‑1887 (sites nos 39, 40 et 41) ;
Clapas des Pessaments (site no 42) ;
Mazel Bouïssy 12‑1883 (site no 52) ;
Montredon 9‑1883 (site no 56) ;
Roussac 11‑1883 (site no 61) ;
Bellas 28‑1887 et sans numéro (sires nos 63 et 64) ;
Devèze d’Inos 26‑1887 et 27‑1887 (sites nos 65 et 66) ;
Devèze du Massegros 25‑1887 (site no 67) ;
Mallet 29‑1887 (site no 68) ;
Cham de la Bazalgette 2 et 3 (sites nos 92 et 93) ;
Les Fadarelles 15‑1883 (site no 94) ;
Saint‑Georges 13‑1883 (site no 95) ;
Soulages 24‑1887 (site no 97) ;
Boisset 3‑1887, 4‑1887, 5‑1887, 6‑1887 et 7‑1887 (sites nos 100, 101, 102, 103 et 104) ;
Champerboux 2‑1887 (site no 105) ;
Champerboux‑Laval 7‑1883 (site no 108) ;
Clapaslas 1‑1883 (site no 110) ;
Dinas 8‑1887 et 11‑1887 (sites nos 116 et 119) ;
Jouanas 17‑1887, 18‑1887 et 19‑1887 (sites no 122, 123 et 124) ;
Bac I, 111, IV, V, VI, VII et IX (sites nos 125, 127, 128, 129, 130, 131 et 133) ;
Blachères 2‑1883 (site no 135) ;
Brousses 6‑1883 (site no 136) ;
Les Lacs 12‑1887, 13‑1887, 14‑1887, 15‑1887 et 16‑1887 (sites nos 137, 138, 139, 140 et 141) ;
Les Vieilles Mortes 5‑1883 (site no 145) ;
Rocherousse 1‑1887 (site no 146) ;
Les Bondons II (site no 160) ;
L’Espital (site no 180) ;
Chamblon A3 (site no 193) ;
Gargo 1, 2 et 3 (sites n“206, 207 et 208) ;
Jas de Salgas (site no 214) ;
Cabrières (site no 239).
6.3.3 Répartition par âge et par sexe
63tabl. viii‑xi
64Que l’on prenne en compte seulement les 67 défunts étudiés ou bien la totalité des 110 sujets (individus étudiés et ceux seulement signalés par les fouilleurs), la répartition des âges au décès est très proche dans les deux cas. Mais si le rapport entre sujets immatures et matures est presque identique, les sujets les plus jeunes sont nettement moins représentés, ce qui résulte sans doute des méthodes de fouilles anciennes. Nous nous limiterons donc ici aux documents examinés, soit les restes de 67 sujets seulement, pour tirer quelques conclusions sur la répartition par âge et par sexe.
65La dispersion chronologique et géographique de cette documentation pose problème pour l’analyse puisque ces défunts s’échelonnent du Bronze final II au ive s. av. J.‑C. et se répartissent dans 47 tombes éparpillées sur les quatre Grands Causses et leur annexe de la Can d’Artigues. Les regroupements topographiques de monuments funéraires sont très peu nombreux et n’affectent qu’un très petit nombre de morts à chaque fois (moins d’un sur dix). La taille de cet échantillon de 67 individus rend peu sûre toute approche autre que globale. Mais en considérant l’ensemble de cette population, cela risque de gommer d’éventuelles différences spatiales ou temporelles. Pour limiter cet inconvénient, on peut essayer de préciser, chaque fois que cela est possible, d’éventuelles particularités chronologiques ou locales. Moyennant ces précautions, quelques constatations ressortent de la composition de cette population et nous verrons plus loin cf. infra chap. 8) quelles conclusions on peut en tirer au niveau social.
66Les plus jeunes morts, ceux de moins de dix ans à leur décès, sont très peu représentés dans ces tombes : deux nouveau‑nés, un tout petit de 1 à 2 ans, et trois petits enfants de 2 à 10 ans, soit respectivement 2,98 %, 1,49 % et 4,47 % du total de la population étudiée, et près de 9 % à peine pour l’ensemble des moins de 10 ans (tabl. viii).

TABL. VIII – Répartition des défunts en fonction de l’âge au décès (en nombre et éventuellement en pourcentage). * Au moins trois individus n’ont pu être placés dans l’une ou l’autre des classes faute de précision sur l’âge au décès.
67La représentation de ces jeunes trépassés ne semble pas marquer de distinction géographique. Ceux‑ci sont en effet attestés sur le Sauveterre et le Méjan, d’où proviennent près des trois quarts de la population qui a pu être étudiée, et leur manque sur les Bondons et le Noir résulte peut‑être simplement de la faiblesse de la documentation (tabl. ix).

TABL. IX – Répartition par causse des défunts dont le matériel ostéologique a été étudié, en fonction du sexe et de l’âge au décès.
68En revanche, une particularité chronologique est discernable. À ce jour, aucun enfant de moins de 10 ans ne figure dans le lot des défunts étudiés au Bronze final II, IIIa, IIIb, et à la transition Bronze final IIIb/premier âge du Fer, phases qui regroupent en tout vingt individus (tabl. x). Tous ceux connus dans cette région sont postérieurs au tout début du premier âge du Fer, sauf au dolmen du Cerrière (site no 179) au Bronze final II, si l’on tient compte de l’indication de M. Lorblanchet de la présence d’un « squelette de jeune enfant dont les mandibules gardaient encore les dents de lait ». Néanmoins, le déficit de ces jeunes morts est plus important avant le viie s., mais cette nuance méritera confirmation par des fouilles nouvelles.

TABL. X – Répartition chronologique des défunts dont le matériel ostéologique a été étudié, en fonction du sexe et de l’âge au décès.
69Les immatures ayant dépassé la petite enfance, grands enfants de 10 à 14 ans et adolescents de 15 à 20 ans, sont également peu nombreux dans cette région : deux grands enfants et trois adolescents, soit respectivement 2,98 % et 4,47 % de la population examinée. Deux particularités chronologique et spatiale ressortent de la répartition de ces défunts. Tout d’abord, on ne les trouve que sur le Sauveterre et dans les périodes antérieures au viie s. av. J.‑C. (5 sur 16 sujets étudiés sur le Sauveterre au Bronze final II, IIIa, IIIb, à la transition Bronze final IIIb/premier âge du Fer et au tout début du premier âge du Fer). Ensuite, ils sont absents du Sauveterre après le viiie s. (où on compte encore seize individus examinés), et dans le reste de la région du Bronze final II au ive s. av. J.‑C., qui a pourtant fourni 54 % de la documentation analysée (tabl. ix, x).
70Chez les immatures les plus âgés, lorsque la diagnose sexuelle est possible, les deux sexes sont attestés : on remarque aussi bien des sujets féminins (Combe Sévène 2 et Vayssas 1) qu’un individu masculin (tumulus réutilisé de Dignas).
71Les adultes constituent l’essentiel du contingent des morts placés dans ces monuments caussenards à toutes les périodes prises en compte (tabl. viii et x), et sur tous les causses (25 défunts sur 32 pour le Sauveterre, 21 sur 23 sur le Méjan, 6 sur 8 sur le Noir, 3 sur 3 sur les Bondons) (tabl. ix). Il en va de même, en guise de sondage, dans les groupements de tombes les plus importants dont la documentation ostéologique a pu être analysée : Sévéragais, rebord du Sauveterre dominant Sainte‑Enimie (Combe Sévène, Les Lacs III, Dignas), Chamblon sur le Méjan et Serre de Cabrié sur le Noir (tabl. xi). Parmi eux, en prenant en compte plusieurs critères, et pas seulement le degré de synostose des sutures crâniennes, figurent autant d’adultes jeunes de moins de 30 ans (quatre individus) que de sujets âgés (cinq cas)1.

TABL. XI – Répartition des défunts dont le matériel ostéologique a été étudié, dans des groupements de tombes ou de petits pays (Sévéragais = Vayssas 1, Villeplaine 1 et 2, Roumagnac 1 et 6, Les Fonds, Combelongue 1 ; Sainte‑Énimie = groupe de Combe Sévène, Les Lacs III et tumulus réutilisé de Dignas).
72Parmi les adultes, les deux sexes sont représentés de manière harmonieuse (dix hommes et neuf femmes au total), équilibre que l’on retrouve dans chacune des phases distinguées, sur chacun des causses, ainsi que dans les petits pays relativement documentés : Sévéragais, rebord du Sauveterre dominant Sainte‑Énimie, Chamblon, Serre de Cabrié (tabl. xi).
6.4 Traitements des cadavres et modes de dépôt
73Plusieurs grands types de traitement des cadavres ont été signalés ou décrits par les fouilleurs, ou suggérés par les restes osseux lorsque ceux‑ci ont pu être examinés.
74La pratique de l’incinération, déduite de la présence d’os fortement brûlés (colorations, craquelures et/ou déformations caractéristiques, variables selon l’intensité ou la durée de l’action du feu), intéresse au moins 42 individus, répartis dans 42 gisements funéraires. Cependant, seuls les restes de 15 de ces sujets ont pu faire l’objet d’un examen. Pour les autres, en général découverts lors de recherches anciennes, les os brûlés sont seulement signalés ou bien « l’incinération » est simplement évoquée dans la relation des fouilles et nous manquons de précisions sur le nombre de défunts concernés et le type d’incinération pratiqué. Mais deux grandes catégories de pratiques incinératoires sont cependant attestées.
75Certaines tombes incluent ou recouvrent le bûcher funéraire. Ce sont les incinérations sur place, ou primaires, avérées dans neuf cas.
76D’autres monuments n’intègrent pas ce bûcher, et on peut en déduire que la crémation a eu lieu ailleurs et que seuls des résidus de cette opération ont été apportés dans la sépulture, os du défunt, parfois accompagnés de charbons de bois interprétés comme des restes de ce foyer. Ces incinérations sur ustrinum, ou secondaires, peuvent être reconnues dans dix‑huit tombes. On y a découvert des os incinérés, quelquefois placés dans un vase ossuaire, mais le plus souvent disséminés. Parfois, ceux‑ci sont accompagnés de quelques autres résidus du bûcher, notamment des charbons de bois, mais les traces de feu sur le sol ou les structures de la tombe font trop souvent défaut (ou ne sont pas signalées) pour pouvoir affirmer que l’incinération a eu heu sur place, d’autant que les quantités d’ossements parvenues jusqu’à nous sont, dans ces cas, très réduites.
77Pour 15 tombes fouillées anciennement, la rareté des données dont nous disposons et le manque de précision des fouilleurs ne permettent pas de savoir si nous avons affaire à une incinération sur place ou sur un ustrinum.
78Le dépôt primaire du corps non incinéré a été décrit, avec plus ou moins de précision dans 28 cas. Et il a été seulement signalé pour 47 autres sujets.
79Le dépôt secondaire, après décharnement, d’os non incinéré n’a pas été décrit, ni seulement évoqué par les archéologues de cette région. Toutefois, dans quelques rares tombes, les os humains sont indiqués dispersés ou éparpillés (dans deux cas seulement), et dans d’autres, le ou l’un des défunts n’est représenté que par une très faible quantité d’éléments, comme une, deux ou trois dents isolées, ou autant de morceaux d’os (huit tombes). On peut alors se demander si l’on n’est pas en présence de cas de tels dépôts secondaires après décharnement, mais bien évidemment, nous n’avons pas les arguments nécessaires à cette démonstration, ni ceux qui pourraient permettre d’éliminer les autres causes ayant pu entraîner la disparition du reste du squelette ou la dispersion des pièces osseuses constatée.
80D’autre part, très souvent, et surtout pour les recherches anciennes, nous ne disposons que de l’indication « sujet inhumé » ; et parfois, les conditions de conservation ont été telles que les os, non brûlés, ne nous sont pas parvenus en totalité. Si donc nous pouvons exclure que le trépassé ait été incinéré, il ne nous est pas possible d’appréhender plus précisément le traitement du corps et son mode de dépôt, et en particulier de trancher entre dépôt primaire et dépôt secondaire. Bien que les fouilles récentes attestent seulement la première catégorie et qu’il paraisse probable que la plupart de ces « inhumés » aient été placés en dépôt primaire, nous préférons parler de sujets « non incinérés à dépôt non précisé » : 59 individus sont dans ce cas.
81Enfin, plusieurs monuments, dont certains fouillés récemment, n’ont livré aucun reste osseux humain et peuvent témoigner de rituels effectués en l’absence du cadavre, ou bien d’autres pratiques concernant celui‑ci.
6.4.1 La répartition des divers types de traitement du corps
6.4.1.1 Répartition d’ensemble
82Pour l’ensemble de la région considérée et des 186 individus, examinés par nos soins ou signalés par les fouilleurs (tabl. xii), les proportions des différents types de traitement sont les suivantes :
– incinération sur place : 9 individus, soit 4,83 % ;
– incinération sur ustrinum : 18 individus, soit 9,67 % ;
– incinération non précisable : 15 individus, soit 8,06 % ;
– dépôt primaire non incinéré : 75 individus, soit 40,32 % ;
– petit lot d’os non brûlés (dépôt secondaire non incinéré ?) : 8 individus, soit 4,30 % ;
– os non brûlés dispersés (dépôt secondaire non incinéré) : 2 individus, soit 1,07 % ;
– dépôt non incinéré non précisable (dépôt primaire ou secondaire ?) : 59 individus, soit 31,72 %.

TABL. XII

TABL. XII – Liste des défunts des Grands Causses en fonction du mode de traitement du corps et par grandes phases chronologiques. En romain : individus dont le matériel ostéologique a été étudié ; en italique : individus signalés par les fouilleurs mais dont le matériel n’a pas pu être examiné ; entre parenthèses : no du sujet dans le cas où le site abrite plusieurs individus.
83Au total, l’incinération n’intéresse qu’un cinquième à un quart des défunts (22,58 %), tandis que les non‑incinérés sont largement majoritaires (77,41 % du total).
84Si l’on considère séparément les 67 sujets dont les restes osseux ont été examinés et les 119 individus que l’on connaît uniquement par la littérature archéologique et dont on n’a pu vérifier les informations, on constate que ces proportions sont tout à fait semblables (tabl. xiii). Sur ce plan du traitement du cadavre, nous pouvons donc faire confiance à nos prédécesseurs et utiliser les chiffres globaux.

TABL. XIII – Répartition des différents modes de traitement du corps, pour les sujets dont les restes osseux ont été étudiés, et ceux seulement signalés dans les publications.
6.4.1.2 Répartition temporelle et spatiale
85Dès le Bronze final II et III figurent les différentes pratiques évoquées pour le traitement du cadavre, incinération sur ustrinum, dépôt primaire et peut‑être dépôt secondaire après décharnement, à l’exception de l’incinération sur place (tabl. xii et xiv).

TABL. XIV – Répartition des différents modes de traitement du corps par grandes phases chronologiques (en romain : individus dont le matériel ostéologique a été étudié ; en italique : individus signalés par les fouilleurs mais dont le matériel n’a pas pu être examiné).
86L’incinération sur ustrinum est bien attestée dès le Bronze final IIb (Les Combes I) et au Bronze final IIIa (Le Freyssinel IV). Elle l’est peut‑être aussi par les restes découverts dans les coffres de L’Espital et de La Téoulière, qui datent du Bronze final II. Le doute subsiste pour le Bronze final IIIb, mais on ne peut exclure que les incinérés de Cabrières ou des Bondons II, voire du dolmen des Combes, relèvent de cette phase.
87Un défunt non incinéré est signalé dès le Bronze final II (Le Cerrière). Le dépôt primaire non brûlé est indiqué par le Dr Morel au Bronze final IIIa dans la sépulture inférieure des Lacs III, et, sans doute, au Freyssinel I au Bronze final II ou IIIa. Il est bien attesté au Bronze final IIIa à Drigas 2, et au Bronze final III b à Combelongue 1 (sujet no 1) et dans le tumulus réutilisé de Dignas. Par ailleurs, un unique morceau d’humérus à Combelongue 1 (sujet no 2) pourrait signer l’existence d’un dépôt secondaire non brûlé dès le Bronze final IIIb, à moins qu’il ne s’agisse d’un autre usage (du genre « dépôt de relique » ?).
88Durant toute la période prise en compte, les pratiques ne faisant pas appel à l’incinération prédominent largement. Cependant, la répartition de 103 défunts dans de grandes classes chronologiques relativement précises permet de remarquer, malgré la très grande faiblesse des effectifs pour plusieurs périodes, certaines fluctuations dans le rapport incinérés/non‑incinérés, qu’il conviendra de valider lors des recherches futures (tabl. xv). Ainsi, l’incinération est relativement bien représentée au Bronze final II et III : environ le quart des défunts est alors incinéré, et peut‑être plus au Bronze final II qu’au Bronze final III. Elle paraît moins fréquente à la transition Bronze final/premier âge du Fer et dans la première moitié du premier âge du Fer. Par la suite, à partir de la seconde moitié du viies., la proportion des incinérés remonte très sensiblement – environ le tiers des défunts, et peut‑être même plus vers la fin du vie s. Par ailleurs, l’incinération sur place n’est pas connue, pour le moment, avant la seconde moitié du vii s. av. J.‑C.

TABL. XV – Comparaison entre défunts incinérés et non incinérés par grandes phases chronologiques.
89Lorsque la documentation est suffisante, on constate que ces différents traitements du corps sont attestés sur chacun des causses, et cela dans des proportions similaires (tabl. xvi). Sur le plan géographique, il n’y a donc pas de préférence pour un mode de traitement du cadavre plutôt que pour un autre.

TABL. XVI – Répartition des différents modes de traitement du corps par causse.
90À l’échelon local, plusieurs de ces pratiques coexistent très souvent au sein d’un même groupe de tombes contemporaines. On en relève plusieurs cas. Ainsi, sur le Sauveterre, dans la région du Freyssinel, au lieu‑dit Las Coronettos, les incinérés des tumulus du Freyssinel XXXII, XXXIII et XXXIV voisinent avec les trépassés non incinérés des tumulus du Freyssinel XVI, XXII et XXXI durant la première moitié du premier âge du Fer (fig. 41). Sur le même causse, dans le groupe de Combe Sévène, les tumulus 3 et 4 sont à incinération, tandis que Combe Sévène 1, 2 et 10, contemporains, abritent des morts non brûlés (fig. 102). Sur le Méjan, la même situation se produit aux environs de Chamblon, où Chamblon A3, A4 et A7, à incinération, sont contemporains de Chamblon A2, A6 et A8, où reposent des défunts non brûlés (fig. 184). À nouveau sur le Sauveterre, à Boisset, le tumulus 6, à incinération, est proche des tumulus 5 et 7 (défunts non incinérés) (fig. 95), et dans le secteur du Bac‑Dignas (fig. 110), les tertres Bac I, III, IV et IX ont livré des os humains incinérés, tandis que Bac II, VI, VII, Dinas 8 et 9 et le tumulus réutilisé de Dignas ont fourni des restes non brûlés ; mais dans ces deux ensembles, les relations chronologiques sont très souvent plus vagues.
91Toujours sur le Sauveterre, mais dans le secteur du Freyssinel, au lieu‑dit Lo Plos, l’incinéré du tumulus du Freyssinel VI se trouve à proximité de morts non brûlés (Le Freyssinel VII, VIII, IX et XIV) (fig. 41) ; mais daté du vie s., il leur succède peut‑être. Car il arrive aussi que l’on perçoive localement un remplacement d’un traitement du corps par un autre. Ainsi sur la bordure sud‑est du Méjan, autour du mont Gargo, Gargo 2 et Jas de Racoules 3, tumulus à incinération datés de la seconde moitié du vie s. av. J.‑C., s’insèrent dans un ensemble plus ancien couvrant toute la première partie du premier âge du Fer (750‑600) où les morts ne sont pas brûlés (Gargo 1 et 3, Jas de Salgas et La Fajole C1) (fig. 200).
92Il arrive également que deux modes de traitement du cadavre soient associés dans un même monument. Le seul cas certain est celui de Roumagnac 6, qui, à la transition Bronze final/premier âge du Fer, abrite un adulte en dépôt primaire non brûlé et les restes d’un second adulte incinéré sur un ustrinum.
93Ailleurs, une telle coexistence reste sujette à caution. Ainsi, au Champ Rond (fin du vie‑début du ve s. av. J.‑C.), un os humain non brûlé figurait parmi les restes d’un sujet incinéré sur place, et à Combe Sévène 3 (premier âge du Fer) un os humain incinéré se trouvait parmi les restes d’un défunt non incinéré (en dépôt primaire ?). L’os non brûlé du Champ Rond révèle‑t‑il la sépulture d’un second mort traité différemment, ou bien un dépôt du genre « relique » accompagnant l’incinéré ? La même question se pose pour l’os brûlé de Combe Sévène 3. Un autre cas de figure problématique est présenté par trois autres tumulus : à Combelongue 1, Cham des Bondons 1 et Les Conques 1, un adulte en dépôt primaire est accompagné d’un très petit lot de dents ou de fragments d’os d’un second individu2. Dans ces tombes, le second défunt est‑il en dépôt primaire après décharnement, ce qui prouverait donc la coexistence de différents traitements du cadavre, ou bien s’agit‑il de dépôts primaires mal conservés, ou encore d’offrandes du genre « reliques » ?
94Enfin, le Dr Prunières a signalé l’existence conjointe « d’incinération » et « d’inhumation » dans quatre tertres, Champerboux‑Laval 7, Dinas 8, Clapaslas et Brousses 6. Mais le manque de précision concernant ces dépôts et leur chronologie ne permet pas de les prendre en compte.
95En définitive, si le phénomène d’association de différents modes de traitement du corps est bien attesté dans la région, il est impossible de le quantifier précisément. Il affecterait un à six des 47 monuments dont nous avons pu étudier le matériel osseux (soit 2,12 à 12,76 %). Et, si les six cas que nous avons examinés entrent tous dans cette rubrique, ce fait concernerait presqu’une tombe multiple sur deux (mais on ne doit pas oublier qu’une telle réunion de restes humains traités de manières différentes contribue grandement à la différenciation et au dénombrement des défunts placés dans un même monument).
6.4.2 L’incinération
6.4.2.1 L’incinération sur place
Les cas attestés
96L’incinération sur place est avérée dans plusieurs gisements fouillés récemment (tabl. xii) : Les Fonds (site no 11), Combe Sévène 4 (site no 114), Dévois de Villeneuve 1 (site no 165), Champ Rond (site no 184) et Serre del Moussu (site no 185). C. Hugues la signale également pour le tumulus des Jas de Racoules 3 (site no 213) qui, selon lui, « recouvre une aire d’incinération de 1,75 m de diamètre » (Hugues, Lorblanchet 1970 : 7) ; mais ce chercheur ne fournit pas d’autre précision. De son côté, sans l’indiquer nommément, le Dr Prunières (1887 : 700) avait manifestement décrit une incinération sur place à Boisset 4 : « Une fois le tumulus déblayé, je trouvai le sol couvert, sur huit à dix mètres carrés, d’une épaisse couche de charbon, avec fragments d’os brûlés. De plus, de nombreux objets métalliques étaient mêlés à ce charbon. C’étaient : 1o des fragments, en quantité incroyable, de cuivre brûlé... ». Enfin, le Dr Morel en désigne deux autres, où le corps n’aurait cependant pas fait l’objet d’une crémation poussée :
– Le Freyssinel V (site no 23) : « À 1 m de profondeur, un squelette orienté nord‑sud a été placé en position demi‑assise, la tête beaucoup plus élevée que les pieds, sur un dallage incliné de pierres plates. La tête est protégée par trois pierres levées. Le corps a été incinéré sur place : les pierres de dallage sont brûlées et les ossements gisent sur une couche de cendres et de charbon tout en conservant leurs connexions anatomiques. Mais la combustion est très incomplète : le crâne est à peine jauni et les petits os sont seuls calcinés » (Morel 1968 : 40‑41) ;
– Le Freyssinel XXXIV (site no 85) : « Au niveau du sol, qui est recouvert de cendres et de bois brûlés, un corps a été incinéré sur place, assez superficiellement, semble‑t‑il, car les ossements ont conservé leurs connexions. Orientation nord‑nord‑ouest/sud‑sud‑est, tête au nord » (Morel 1961 : 108).
97Le même chercheur précise par ailleurs (1961 : 132‑133) que l’incinération sur place n’affecte que deux tertres du Freyssinel.
L’aire de crémation
98D’après les descriptions les plus précises, on se trouve en présence de deux grands types d’aire d’incinération, à la même époque semble‑t‑il : l’une à même la surface du sol, l’autre sur un dallage ou un empierrement de pierres plates.
Aire d’incinération à même la surface du sol
99C’est la modalité la plus répandue. On la trouve dans six monuments, sur le Sauveterre comme sur le Méjan : Combe Sévène 4 (650‑600), Le Freyssinel XXXIV (650‑600), Les Fonds (600‑500), Boisset 4 (750‑500), Champ Rond (550‑450), Serre del Moussu (550‑450).
100Les dimensions et la forme de ces aires sont variables. Aux Fonds, Faire est rectangulaire à angles arrondis, et mesure 1,7 x 1 m ; celles du Champ Rond et du Serre del Moussu, circulaires, ont respectivement 1,85 et 2,2 m de diamètre ; plus grande, celle de Boisset 4 s’étend sur 8 à 10 m2, tandis que celle de Combe Sévène 4 atteint 16 m2 (5,25 x 3 m).
101À Combe Sévène 4, comme au Champ Rond et au Serre del Moussu, la surface du sol est signalée fortement rubéfiée, et les pierres qui s’y trouvent ont été colorées et parfois fragmentées par la chaleur.
102À Boisset 4, l’aire est recouverte « d’une épaisse couche de charbon, avec fragments d’os brûlés ». Aux Fonds, on a également décrit « une couche de charbons de bois mêlés de fragments osseux humains brûlés et de nodules d’argile rubéfiés, épaisse de 5 cm », avec, dans sa partie inférieure, des charbons « nettement plus denses et plus gros, tandis qu’à l’inverse les esquilles osseuses brûlées sont plus rares et plus réduites ». Au Champ Rond et au Serre del Moussu, la surface du sol est jonchée des résidus du bûcher (cendres, charbons de bois, fragments osseux, matériel d’accompagnement), et l’ensemble est recouvert d’un dallage de pierres plus ou moins jointives, noircies par les cendres mais non altérées par le feu.
103À Combe Sévène 4, l’aire d’incinération comporte une fosse centrale, large (2,25 m de diamètre), mais peu profonde (0,3 m). Aux Fonds, cinq trous de poteaux périphériques paraissent correspondre à un dispositif de plate‑forme de 2 x 1 m, sur laquelle le cadavre aurait été brûlé.
104Un tel aménagement est signalé dans deux tumulus, sur le Sauveterre et le Méjan : Dévois de Villeneuve 1 (600‑500), Le Freyssinel V (750‑500).
105Si au Freyssinel V les dimensions ne sont pas données, au Dévois de Villeneuve 1 le diamètre de l’aire est de 1,5 m. Dans les deux cas, les éléments du dallage sont brûlés et recouverts par une couche de cendres et de charbons de bois. Au Dévois de Villeneuve 1, les pierres qui surmontent ce bûcher portent également des traces « d’un feu violent », ce qui fait dire au fouilleur qu elles ont été « jetées pour étouffer le brasier ».
106Par leur forme et leurs dimensions, ces deux sortes d’aire d’incinération repérées sous plusieurs tumulus ou lieux funéraires caussenards rappellent des structures de crémation déjà signalées dans plusieurs nécropoles du Bronze final. Ainsi, le type d’aire à même le sol trouve des comparaisons dans la nécropole des Prés Pendus (Passy‑Véron, Yonne) : tâche de sédiment presque noir, de 2,5 x 0,5 m, contenant des silex éclatés au feu et des charbons (Depierre et al. 2000 : 186). Le second type avec dallage de pierres rappelle pour sa part les deux plates‑formes, l’une rectangulaire (1,7 x 1,4 m), l’autre circulaire (1,6 m de diamètre) de la nécropole du Crot aux Moines (Beaumont, Yonne) (Pellet, Delor 1984 : 16), ainsi que les lits de blocs de grès brûlés (1,27 x 1,16m et 1,1 x 1 m), dont un probablement encadré par quatre trous de poteaux, fouillés dans la nécropole du Moulin à Mailhac (Janin 1996 : 26‑27).
Disposition des restes osseux humains
107Les restes osseux humains des incinérations sur place se présentent de trois manières. Au Serre del Moussu, au Champ Rond, à Combe Sévène 4, et, pour la majeure partie, aux Fonds, les os incinérés ont été retrouvés dispersés parmi les restes du bûcher, et, en l’absence d’information contraire, c’est probablement aussi le cas à Boisset 4 et au Dévois de Villeneuve 1. Aux Fonds, en outre, une partie d’entre eux avait été placée dans un vase ossuaire. Le contenu du fond de ce dernier représente 7,5 % du total des os recueillis sur ce site, mais le récipient n’ayant pas été retrouvé complet, il ne s’agit sans doute là que d’une partie du dépôt. Par ailleurs, selon le Dr Morel, dans les deux tumulus du Freyssinel V et XXXIV, où la crémation a été peu poussée, les os ont conservé leurs connexions anatomiques ; les détails font toutefois complètement défaut.
La quantification des restes osseux
108Les restes osseux ont pu être examinés et pesés pour six incinérations sur place, qui toutes concernent des sujets adultes ou de taille adulte. Aucune de ces sépultures n’a livré de doublet permettant d’affirmer la présence d’un deuxième sujet.
109Si l’on met à part l’ossuaire des Fonds, le poids total d’os par tombe varie de 37 à 764 g, pour une moyenne de 292 g (tabl. xvii). Cela peut sembler faible pour de l’incinération sur place car on estime que le poids d’os brûlés pour une tombe individuelle d’adulte peut atteindre la valeur limite de 1700 g (Gruat et al. 1995 : 29)3. Et ces valeurs sont, pour la plupart, beaucoup plus faibles que les poids des restes de sujets adultes ou de taille adulte contenus dans les ossuaires individuels des nécropoles à incinération du Languedoc et du Toulousain : jusqu’à 880 g à Las Peyros (Couffoulens, Aude) au vie s. av. J.‑C. (Duday 1981 : 69), 917,5 g au Camp d’Alba (Réalville, Tarn‑et‑Garonne) à la fin du Bronze final et au tout début du premier âge du Fer (Janin et al. 1997 : 132), 1 148,2 g au Moulin (Mailhac, Aude) au Bronze final IIIb (Taffanel, Janin 1998 : 321) et 1 765 g au maximum pour la tombe 58 du Peyrou (Agde, Hérault) au viie s. av. J.‑C. (Nickels et al. 1989 : 115)4. En revanche, elles rappellent les poids d’os recueillis pour les trois adultes incinérés sur place dans les Garrigues languedociennes au premier âge du Fer : 355 g à Viols 8 (Viols‑le‑Fort, Hérault), 145 g au Frouzet B1 (Saint‑Martin‑de‑Londres, Hérault) et 27 g au Serre des Galères 2 (Saint‑Géniès‑de‑Malgoirès, Gard) (Dedet 1992a : 67).

TABL. XVII – Poids des os dans les incinérations sur place (indice pondéral crânien : poids relatif des pièces crâniennes, de la mandibule et des dents par rapport au total des os).
110Toutes les régions du squelette sont représentées dans ces sépultures caussenardes, tout comme à Viols 8 et au Frouzet B1 : ce sont donc des corps complets qui ont été brûlés. Dès lors, pour expliquer la faiblesse des ensembles osseux issus de ces incinérations sur place, plusieurs solutions peuvent être envisagées. La première est celle d’un ramassage partiel à la fouille, mais s’agissant de recherches récentes, cette interprétation ne saurait être privilégiée. Il pourrait s’agir aussi d’une extrême fragmentation de ces éléments non protégés par un contenant, entraînant une mauvaise conservation et une disparition d’une partie d’entre eux, hypothèse bien préférable. Mais on ne peut écarter non plus celle d’une reprise d’un certain nombre de pièces osseuses sur le bûcher avant recouvrement par le tumulus pour être placées dans un autre lieu ou dans une autre tombe, comme l’a montré A. Richier pour certaines sépultures primaires à incinération de la nécropole gallo‑romaine de Sainte‑Barbe à Marseille (Richier 1998).
111Le poids relatif du crâne varie de 0,6 à 43,2 % du poids total des os, pour une moyenne de 13,4 %. Selon l’indice de Krogman (1978) le poids du crâne représente environ 20,4 % du poids total du squelette adulte non brûlé. Seuls trois cas sont conformes à ce taux ou s’en rapprochent : deux concernent des lots éparpillés hors de tout contenant, Combe Sévène 4 (16,42 %) et surtout Jas de Racoules 3 (21 %) ; le troisième est l’ossuaire des Fonds (19,44 %), où les os étaient donc protégés.
6.4.2.2 L’incinération secondaire
Les cas d’incinération secondaire attestés
112L’incinération secondaire, effectuée sur ustrinum, est attestée dans dix‑huit monuments, répartis sur les quatre causses, Sauveterre, Bondons, Méjan et Noir, et s’échelonnant du Bronze final II au ive s. av. J.‑C. : L’Espital (site no 180), au Bronze final II ; Les Combes I (site no 153), au Bronze final IIb ; Le Freyssinel IV (site no 22), au Bronze final IIIa ; Cabrières (site no 239), au Bronze final IIIa ou b ; Roumagnac 6 (site no 15), sujet 2, à la transition Bronze final IIIb/premier âge du Fer ; Rasiguette (site no 237), 750‑700/650 ; Chamblon A4 (site no 194), 650‑600 ; Chamblon A7 (site no 196), 650‑600 ; Gargo 2 (site no 202), 650‑600 ; Combe Sévène 3 (site no 113), sujet 2, 750‑500 ; Le Serre Sec (site no 86), 750‑500 ; Bac I (site no 125), 400‑300 ; Le Crès IV (site no 10), Bronze final ou premier âge du Fer ; Le Freyssinel XXXIII (site no 84), sujet 2, Bronze final ou premier âge du Fer ; Bac III (site no 127), non daté ; Bac IV (site no 128), non daté ; Bac IX (site no 133), non daté ; Chamblon A3 (site no 193), non daté.
113Chacune des tombes pour lesquelles les os ont pu être examinés (Les Combes I, Roumagnac 6, Rasiguette, Chamblon A4 et A7, Combe Sévène 3, Le Serre Sec et Le Crès IV), n’a livré semble‑t‑il qu’un seul individu incinéré (absence de doublon), adulte ou de taille adulte dans tous les cas. Ch. Morel signale en outre « un enfant », sans plus de renseignement, dans la sépulture supérieure du Freyssinel XXXIII. Pour les autres, nous n’avons aucune précision.
Mode de dépôt des os dans les tombes à incinération secondaire
114Dans trois cas seulement sur dix‑huit, les os incinérés sont placés à l’intérieur d’un vase ossuaire : Les Combes I, Le Freyssinel IV et Cabrières. Cet usage n’est pas réservé à une région particulière des Causses, puisqu’on le rencontre aussi bien sur les Bondons que sur le Sauveterre ou le Noir. En revanche, il n’apparaît qu’à haute époque, au Bronze final II, IIIa et peut‑être IIIb. Son absence durant tout le premier âge du Fer est un phénomène déjà constaté dans les tumulus du Languedoc oriental (Dedet 1992a : 62‑63).
115Dans toutes les autres tombes, soit quinze sur dix‑huit, les os sont éparpillés hors de tout contenant. À l’exception de deux cas, on ignore généralement la zone de répartition de ceux‑ci.
116Le seul tumulus documenté sur ce point est celui de Roumagnac 6, à la transition Bronze final IIIb/premier âge du Fer, où les os incinérés –plus d’un millier de petits fragments– sont dispersés dans la chape minutaire, avec une densité nettement marquée dans la partie centrale. Le fait qu’ils se situent à différentes hauteurs dans le remplissage de la calotte signale la simultanéité entre le dépôt des restes humains et la construction du monument. Cette disposition, observée jadis par J. Arnal dans les tumulus languedociens du Lebous H4 et H6 (Arnal 1973 : 184 ; Dedet 1992a : 63), a été également bien mise en évidence dans plusieurs fouilles récentes dans le sud de la France : dans plusieurs tumulus du Frau à Cazals (Tarn‑et‑Garonne) au vie s. av. J.‑C. (Pajot 1975 : 150), dans le tumulus Léry à Souillac (Lot) (Girault 1992) et dans le tumulus I des Barracs à Pierrefiche‑d’Olt (Aveyron) au ve s. av. J.‑C. (Gruat et al. 1995 : 28‑29), ainsi que dans le tumulus cévenol de Peyraube 6 à Lamelouze (Gard) au viie s. av. J.‑C. (Dedet, Gauthey 1994 : 119).
117Nous pouvons observer un autre cas de figure dans la fosse du Serre Sec (premier âge du Fer) : les restes osseux incinérés y sont disséminés dans une partie bien localisée de celle‑ci, son quart nord‑est, depuis le fond jusqu’à la moitié de la hauteur du remplissage.
118Par ailleurs, indépendamment de la présence d’un ossuaire, la région sépulcrale peut être délimitée ou non. La première possibilité est toutefois rare : à Chamblon A7 et à L’Espital, les os sont dispersés dans un coffre, et aux Combes I, le vase ossuaire est déposé dans un petit coffre de dalles.
119Enfin, les os peuvent être accompagnés ou non de résidus du bûcher. Dans deux tumulus, Chamblon A4 et A7, ils sont signalés mêlés « à de nombreux fragments de végétaux brûlés » (Chamblon A4) ou « à des fragments de charbons de bois » (Chamblon A7). En l’absence de traces de feu signalées sur le sol ou sur les structures de la sépulture, et étant donné la faible quantité d’os recueillis (respectivement 12 et 47 g), sans doute faut‑il voir dans ces restes des éléments de l’ustrinum prélevés en même temps que les os. Dans ces cas, ce serait une petite part du bûcher qui aurait été déversée dans la tombe. Une telle pratique a été mise en évidence dans le tumulus des Barracs 1 (Pierrefiche‑d’Olt, Aveyron), où les os brûlés sont associés à 308 charbons de bois de petites dimensions, alors que l’absence de toute trace de feu et la dissémination des produits de la crémation dans la masse du tertre montrent que l’incinération a été pratiquée ailleurs (Gruat et al. 1995 : 30). Et elle est aussi en usage à partir du vie s. et au ve s. av. J.‑C. en Languedoc (Grand Bassin II et le Traversant à Mailhac, Saint‑Julien à Pézenas, Las Peyros à Couffoulens, Ensérune, Les Bosquets à Cesseras, Saint‑Brès à Trausse‑Minervois, la Martelle à Siran, Font de la Vie à Saint‑Bauzille‑de‑Montmel ; Dedet 1995c : 160‑161).
120Au Serre Sec, à Roumagnac 6 ainsi qu’au Bac I, III, IV et IX, les os ne sont pas accompagnés de tels vestiges. On peut dès lors conclure que le prélèvement sur le bûcher a été sélectif, ne visant à ramasser que des os. Pour les autres tombes, les informations manquent totalement.
La quantification des restes osseux
121Les os de huit de ces incinérations sur ustrinum ont pu être examinés et pesés. Dans tous les cas, les sujets sont adultes ou de taille adulte, et l’absence de doublet ne permet pas d’affirmer la présence d’un second individu. Le poids total d’os varie de 3 à 563 g, pour une moyenne de 150,44 g (tabl. xviii).

TABL. XVIII – Poids des os dans les incinérations sur ustrinum (indice pondéral crânien : poids relatif des pièces crâniennes, de la mandibule et des dents par rapport au total des os). * Pour ces sites, les poids sont indiqués par les fouilleurs.
122Les deux ensembles quantitativement les plus importants sont ceux de la fosse du Serre Sec (563 g) et du seul ossuaire dont le contenant ait pu être analysé, celui des Combes I (378,54 g), soit des lots bien protégés.
123Pour les six dépôts d’os dispersés connus, le poids total varie de 3 à 148 g, pour une moyenne de 43,66 g. Ces valeurs sont très proches de celles mesurées pour 87 dépôts de même forme des Garrigues languedociennes, avec une moyenne de 50,3 g et des poids compris entre 5 et 470 g (mais ce dernier terme est très éloigné des autres ; si on l’exclut, la fourchette des Garrigues est comprise entre 5 et 225 g ; Dedet 1992 : 64‑67). Cela est également conforme à ce que l’on connaît des tumulus du Frau pour lesquels, sans donner les poids, B. Pajot (1975 : 150) insiste cependant sur le volume des os « extrêmement faible ». Toutefois, il arrive aussi que des tumulus livrent une plus grande quantité de restes dispersés hors de tout contenant, appartenant à un seul sujet adulte : c’est le cas des Barracs 2 avec 872,4 g d’os (Gruat et al. 1995 : 34).
124Bien évidemment, ces quantités d’os dispersés recueillies dans les tumulus des Grands Causses sont en moyenne beaucoup plus faibles que celles que l’on découvre dans les tombes individuelles d’adultes des nécropoles à incinération du Languedoc occidental, où les os sont abrités dans un ossuaire : moyennes de 328,9 g au Moulin de Mailhac au Bronze final IIIb (Taffanel, Janin 1998 : 321), 376,9 g à Las Peyros à Couffoulens au vie s. av. J.‑C. (Duday 1989 : 463), 419,9 g au Camp d’Alba au Bronze final IIIb et au début du premier âge du Fer (Janin et al. 1997 : 132) et 877,2 g au Peyrou à Agde au viie s. av. J.‑C. (Duday 1989 : 462). En revanche les masses d’os placées dans un ossuaire (Les Combes I) ou dans une fosse (Le Serre Sec) sont proches de ces moyennes : 378,54 g pour le premier, au Bronze final IIb, et 563 g pour la seconde au cours du premier âge du Fer.
125C’est aux Combes I et au Serre Sec, où les os ont été le plus protégés, que l’indice pondéral crânien, respectivement 17,96 % et 14,77 %, bien que légèrement sous‑représenté, se rapproche le plus de la valeur théorique de 20,4 % (d’après Krogman 1978). Ailleurs, à Rasiguette comme à Chamblon A4, les indices sont beaucoup plus éloignés de la valeur théorique, d’un côté comme de l’autre, mais il est vrai que les calculs reposent là sur des bases très faibles.
6.4.2.3 Les incinérations non précisables
126Pour quinze tumulus, la plupart fouillés anciennement, le manque de précision dans les relations de fouille ne permet pas de savoir si le monument recouvre l’aire de crémation, ou si celle‑ci a été effectuée en un autre lieu. Nous nous contenterons d’en donner la liste, par causse, accompagnée des renseignements dont nous disposons.
Causse de Sauveterre
127– Le Freyssinel XXXII (site no 83), 750‑600 : contrairement à d’autres tumulus, le Dr Morel ne parle pas ici d’incinération sur place ; toutefois, il signale certains éléments introduisant un doute : « Vers 1 m de profondeur, lit de dalles plates assez épaisses, portant des traces de feu. Ossements humains calcinés, morcelés et très dispersés. Sous les dalles, lit de pierres plus petites avec quelques charbons ». Des « débris métalliques fondus » furent rencontrés « au‑dessous et entre les blocs de pavage » (Morel 1961 : 107).
– Les Lacs 14 (site no 139), 650‑600 : « Les os brûlés et mêlés au charbon sont à 1,35 m de profondeur » (Prunières 1887 : 701).
– Le Freyssinel VI (site no 73), 600‑500 : « Sépulture à incinération avec ossements très calcinés dispersés sur le sol primitif au milieu de cendres et charbons » (Morel 1968 : 45).
– Clapas des Pessaments (site no 42), 600‑500 : « Les fragments osseux étaient dans un vase noir, et ce vase était déposé sur les charbons du foyer, au milieu des débris de très nombreux bracelets fondus, tordus et agglutinés par le feu » (Prunières 1883 : 638).
– Bellas 28 (site no 63), 750‑500 : sujets « incinérés », sans autre précision (Prunières 1887 : 703).
– Champerboux‑Laval 7‑1883 (site no 108), 750‑500 : « Os et bronzes brûlés, mêlés un peu partout [...] aux terres du tertre » (Prunières 1883 : 637).
– Clapaslas (ou Satanas) (site no 110), 750‑500 : à la base du tertre, « os humains réduits en fragments calcinés, mêlés au charbon ; et au milieu de ce foyer, un très beau rasoir... » (Prunières 1883 : 637).
– Champerboux 2‑1887 (sire no 105), Bronze final ou premier âge du Fer : « à 0,75 m de profondeur, couche de charbon épaisse de 3 à 4 cm, avec os brûlés, fragments informes de bronze brûlés » (Prunières 1887 : 699).
– Le Sec 18‑1883 (site no 33), âge du Fer : « Sujets tous brûlés, incinérés. Fragments de très nombreux bracelets et fragments osseux mêlés aux charbons d’un foyer très épais » (Prunières 1883 : 638).
– Devèze du Massegros 25 (site no 67), non daté : « Incinération » sans autre précision (Prunières 1887 : 703).
– Brousses 6 (site no 136), non daté : « Sujet inhumé allongé au milieu d’os incinérés, sur charbon » (Prunières 1883 : 637).
– Chanac‑Laval 23 (site no 41), non daté : « incinération », sans autre précision (Prunières 1887 : 702).
– Dinas 8 (site no 116), non daté : « Le centre est occupé par un foyer avec os incinérés » (Prunières 1887 : 700).
– Boisset 6 (site no 103), non daté : « incinération », sans plus de précision (Prunières 1887 : 700).
Causse Méjan
128– Valbelle C3 (site no 163), 750‑500 : os « incinérés trouvés mêlés à de nombreux fragments de charbon de bois » (CRA Chênes Verts 1959 : 173).
6.4.3 Le dépôt primaire non incinéré
129tabl. xix
6.4.3.1 Les cas de dépôts primaires non incinérés attestés
130Le dépôt primaire a été décrit ou signalé, avec plus ou moins de précision, pour 76 cadavres répartis dans 66 monuments. Le tableau xii en dresse la liste par phases chronologiques. La très grande majorité de ces tombeaux –cinquante et un d’entre eux– n’abritent qu’un seul corps en dépôt primaire. Six au moins en accueillent deux, et un seul monument en contient un plus grand nombre (cinq individus). Dans l’un de ceux où deux sujets sont signalés en dépôt primaire, Les Fons III, les restes d’un troisième trépassé, non brûlé mais de dépôt non spécifié, sont également mentionnés. En outre, huit autres tumulus renfermant un défunt en dépôt primaire non incinéré ont également livré des restes non brûlés d’un ou de deux autres morts pour lesquels on ne peut préciser le type de pratique mise en œuvre, dépôt primaire ou dépôt secondaire de quelques pièces osseuses. C’est le cas pour cinq sites dont nous avons pu étudier le matériel osseux (Combelongue 1, Cham des Bondons 1, Pomeyrol, Les Conques 1, Combe Sévène 10 : os d’un sujet supplémentaire dans chacun), pour le tumulus du Serre de Cabrié 1 (os de deux autres individus), ainsi que pour deux fouilles anciennes, Chaumeils 4‑1883 et Bac II (tabl. xii).
131La simultanéité des dépôts doubles ou multiples de corps entiers est assurée dans deux fouilles récentes : pour la jeune femme et l’adolescent du tumulus réutilisé de Dignas, et pour les deux hommes, les deux femmes et l’enfant du Vayssas 1. Il en va de même pour les deux adultes découverts dans la fouille ancienne des Sarragats, qui a fait l’objet d’une relation précise. Elle est possible également pour les deux adultes de la sépulture supérieure du tumulus réutilisé du Freyssinel X, décrits par le Dr Morel (1968 : 22) « parallèlement l’un à l’autre et en « tête‑bêche ».

TABL. XIX – Les défunts en dépôt primaire non incinéré (en romain : individus dont le matériel ostéologique a été étudié ; en italique : individus signalés par les fouilleurs mais dont le matériel n’a pas pu être examiné ; les numéros entre parenthèses sont ceux des sites).
132En revanche, aux Fons III et aux Lacs III, dans chaque cas, les squelettes des deux adultes sont séparés par « un dallage de pierres plates » (Morel, Peyre 1965 : 10, 14). Ces dépôts ne sont donc pas forcément contemporains. Il en va de même des deux adultes du Freyssinel XV placés en deux lieux différents du tertre.
6.4.3.2 L’aménagement de la région sépulcrale
133Dans les monuments abritant un ou parfois plusieurs individus en dépôt primaire non incinéré, la région sépulcrale se présente sous diverses formes. Elle peut être construite, bordée, ou simplement délimitée, et cela de différentes manières : cette première catégorie compte dix‑neuf monuments regroupant un total de vingt‑cinq défunts. Elle peut aussi ne comporter aucune délimitation : cette seconde formule, plus fréquente, quoique difficile à quantifier du fait de l’imprécision de certaines fouilles, concerne vingt‑neuf monuments décrits sans limite sépulcrale, abritant en tout trente morts. Mais pour dix‑sept autres édifices fouillés anciennement, et peut‑être incomplètement, nous n’avons aucun renseignement sur ce secteur du tombeau : absence réelle de délimitation ou bien manque d’observation ? Il est impossible de faire la part des choses, mais il est probable que la première proposition soit prédominante. Même lorsque la région sépulcrale n’est pas délimitée, il arrive cependant, dans treize cas sur vingt‑neuf, que sa base soit aménagée. Ces différentes occurrences se retrouvent sur tous les causses du Gévaudan et à toutes les périodes prises en compte (tabl. xx et xxi). Par ailleurs, quelle que soit la forme de cette zone sépulcrale, le mode de recouvrement du corps n’est que très rarement évoqué. Enfin, les fouilleurs signalent parfois un dispositif particulier concernant la tête des défunts.

TABL. XX – Répartition des sites par causse en fonction des différents aménagements de la région sépulcrale.

TABL. XXI – La région sépulcrale par phases chronologiques.
Région sépulcrale construite ou délimitée
134La délimitation de la région sépulcrale peut être complète ou partielle, ou bien encore ne consister qu’en un bornage de l’emplacement du corps du défunt (fig. 237).
Délimitation complète
135Elle prend plusieurs formes.
136– La fosse creusée, sans autre aménagement : elle ne concerne pas les tumulus neufs, mais est seulement attestée dans un monument réutilisé, le tumulus de Dignas (site no 121). Sur ce site, où elle renferme deux défunts, elle a été comblée aussitôt après le double dépôt.
– Le caisson à murs de pierre sèche : Vayssas 1 pour cinq défunts et Aven Armand 2 pour un seul cadavre. Dans les deux cas, les restes osseux ont été retrouvés sur le sol naturel. Le comblement du Vayssas 1 comprenait une couche d’origine végétale semble‑t‑il, puis des pierres, mais on ignore si les corps se sont décomposés en espace vide ou colmaté. Le caisson de l’Aven Armand 2 était recouvert de « roches plates » retrouvées effondrées, et devait former à l’origine un espace vide : Fr. Delisle et A. Viré ont constaté un « tassement » au centre du tumulus (1899 : 613).
– Le caisson de quatre dalles de chant : Les Fons III et mas de La Bastide II. Dans le premier, le fond n’est pas aménagé, alors qu’il est constitué dans le second d’un lit de pierres plates. Le mode de comblement et de fermeture n’est pas évoqué et les fouilleurs ne signalent pas la présence d’une dalle fermant la partie supérieure de la structure.
– Loge de dalles de chant entourant le cadavre de manière discontinue : Serre de Cabrié 1 et 3, et col de La Vache. Dans le premier cas, les os gisaient sur le sol naturel, alors que dans les deux autres ils reposaient sur un « dallage ». Dans les deux tumulus du Serre de Cabrié, aucune protection supérieure n’existait, et l’on ignore si le corps s’est décomposé en espace vide ou colmaté. Au col de La Vache C. Hugues (1960 : 71‑72) signale la présence d’un « dallage de lourdes pierres qui avaient écrasé les os », et se demande s’il s’agit d’un couvercle effondré ou d’éléments posés directement sur le cadavre.
– Loge de blocs, entourant le(s) corps de manière discontinue : Combe Sévène 2 et Les Sarragats (deux sujets). Les défunts reposent directement sur le sol naturel et aucune protection supérieure n’est indiquée, de sorte que l’on ignore si les corps se sont décomposés en espace vide ou colmaté.
– Loge réservée dans la masse du tertre : Le Crès II. Le défunt est déposé sur le sol naturel, et aucune protection particulière n’est signalée au‑dessus de lui ; on ne sait donc pas s’il s’est décomposé en espace vide ou colmaté.
– Loge composite comprenant soit un alignement discontinu de dalles de chant d’un côté et un amoncellement de blocs non parementés de l’autre (Villeplaine 1), soit des blocs sur trois côtés et une dalle de chant sur le quatrième (Les Lacs III). À Villeplaine 1, le corps est placé sur le sol naturel, une pierre relevant légèrement la tête, une autre sous le dos ; il est recouvert de terre. Aux Lacs III, le sol naturel sur lequel il est déposé montrait, selon Ch. Morel, les traces d’un feu. Dans ces deux tombeaux, aucune protection supérieure n’est signalée.
Délimitation partielle
137Une demi‑loge de dalles de chant, bordant de façon discontinue le cadavre sur un long et un petit côté, est attestée à Roumagnac 6 et à Combe Sévène 1. Dans ces deux tumulus, le corps repose sur le sol naturel. À Combe Sévène 1, aucune protection supérieure n’a été perçue, et l’on ignore si le corps s’est décomposé en espace vide ou colmaté ; alors qu’à Roumagnac 6, des dalles paraissent avoir été placées en bâtière au‑dessus de lui et la disposition de certains os présente des indices de décomposition en espace vide.
Bornage latéral
138Deux dalles plantées de chant bordent très partiellement le corps soit à hauteur des avant‑bras (Combes de L’Aumède Haute), soit au niveau du bassin (Le Freyssinel XXXIII). Le cadavre repose sur le sol naturel (Combes de L’Aumède Haute) ou sur un « dallage étroit » (Le Freyssinel XXXIII). Dans les deux cas, aucune protection supérieure n’est indiquée, et le mode de décomposition du cadavre est inconnu.
Bornage des extrémités
139Deux dalles plantées de chant bornent l’emplacement du défunt à la tête et aux pieds sans toutefois apparaître à la surface de la chape tumulaire : Le Freyssinel XIX et XX. Dans ces deux tertres, aucun aménagement du sol n’est constaté, à l’exception d’une dalle sur laquelle repose la tête du mort du Freyssinel XX. À Drigas 2, une dalle dont le sommet émerge du tertre est plantée aux pieds, tandis que l’arrière de la tête est appuyé contre une grosse pierre. Ces corps ne sont pas protégés en leur partie supérieure et l’on ignore s’ils se trouvaient à l’origine dans un espace vide ou colmaté.
Région sépulcrale non délimitée
140Dans vingt‑neuf sépulcres, concernant en tout trente morts en dépôt primaire non incinéré, la région sépulcrale ne comprend ni délimitation ni bornage (tabl. xx et xxi) ; treize d’entre eux, répartis dans douze monuments, reposaient toutefois sur un sol aménagé :
– soit sur un « dallage » plus ou moins bien disposé et étendu : Combelongue 1, Le Freyssinel I, III, X (deux individus), XII, XVIII, XXII (dallage de plan « circulaire »), Drigas 2 (dallage recouvert de terre), Dévois de Villeneuve 2, Serre de Cabrié 5 ;
– soit sur une grande dalle unique placée sous le thorax et la tête : Aven Armand 1 ;
– soit sur une couche de pierraille : dolmen du Pic de Rausas.
141À l’exception du Dévois de Villeneuve 2, où des dalles en bâtière sont disposées au‑dessus du corps, aucune protection de la partie supérieure du dépôt n’est signalée, et l’on ignore s’il y a eu décomposition en espace vide ou colmaté.
142Par ailleurs, le Dr Morel, mais il est le seul à le faire, indique des traces de feu à la base de quatre monuments. Ces stigmates peuvent affecter le « dallage » sur lequel a été placé le corps non brûlé (Le Freyssinel I, XII et XXII). Mais aux Bondons I où un tel dallage n’existe pas, le cadavre, qui n’est pas incinéré, est placé sur une couche de « cendres et de bois brûlés ».
143Dans au moins seize autres tumulus, la zone sépulcrale n’est ni délimitée, ni aménagée à sa base : Les Fons I, Combe Sévène 10, Bac VI et VII, sépulture supérieure des Lacs III, Le Freyssinel VIII, XIV, XV, XVI, XXIII, XXXI, XLI, Pomeyrol, Cham des Bondons 1, Moulin à Vent du Pradal et Les Conques 1. Mais cette catégorie est sans doute plus importante, car pour dix‑sept autres tumulus, les renseignements sur ce sujet font complètement défaut (tabl. xx et xxi). Dans l’un de ces derniers, Blachères 2‑1883, le Dr Prunières signale le corps « sous quelques dalles formant voûte ».
Protection de la tête
144Lorsque la zone sépulcrale est construite, délimitée ou bornée, le crâne du mort est le plus souvent situé au pied d’un des éléments servant à cette bordure ; au Serre de Cabrié 1, il se trouve au pied de la proéminence rocheuse fermant la logette B. Cependant, il ne bénéficie qu’exceptionnellement d’une protection supplémentaire. Deux cas seulement sont connus ou du moins signalés. Au Freyssinel XIX, où deux dalles de chant bornent l’emplacement du cadavre à la tête et aux pieds, le Dr Morel note que « derrière la tête, le tumulus a été bâti en forme de « cul de four ». Aux Sarragats, qui abritait deux individus, un dispositif que nous nous représentons fort mal a dû également exister : J.‑L. Lescure a en effet remarqué que « les deux têtes s’emboîtaient dans la double échancrure d’une pierre brute mollement travaillée ».
145Dans les tertres où la zone sépulcrale n’est pas délimitée, il est rare que le crâne bénéficie d’un abri particulier. Le cas le plus élaboré est celui de Chaumeils 4‑1883, au vie s., pour lequel le Dr Prunières note que le « crâne, moins sa mâchoire inférieure, avait été mis à l’abri sous une sorte de dolmen minuscule fait avec des dalles grandes à peine comme des volumes in‑quarto » (Prunières 1883 : 634). Sur deux autres sites, il nous est plus difficile de nous figurer le dispositif mis en œuvre. Aux Lacs 13‑1887, il est indiqué que le crâne est « protégé par une pierre » (Prunières 1887 : 701). Une notation semblable est fournie par le Dr Morel aux Bondons I : la tête est « protégée par une dalle qui s’est effondrée » (Morel 1961 : 125). Dans les deux cas, il semblerait que nous ayons affaire à un recouvrement volontaire de la tête par une pierre ou une dalle, alors que le reste du corps n’a pas été doté d’une protection supérieure particulière.
6.4.3.3 La position du cadavre
146La position du corps n’est décrite avec précision que dans certaines fouilles récentes, qui donnent lieu également à des relevés précis de pièces osseuses in situ. Pour les recherches anciennes, on doit se contenter dans les meilleurs des cas d’une indication générale donnant la posture d’ensemble de la dépouille : « décubitus dorsal », ou « décubitus latéral » avec parfois la précision du côté, ou encore « position accroupie », « assise » ou « semi‑assise » –sans doute des décubitus latéraux plus ou moins fléchis ou repliés– ou enfin squelette « couché », « allongé », ou encore « orienté », selon une direction donnée, sans aucune autre précision. Mais la démonstration de ces dires par le texte, le dessin ou la photographie fait complètement défaut. Ici encore, nous devons distinguer les deux niveaux de connaissance issus de ces deux phases de la recherche.
La position générale du corps
147La position générale de 24 des 75 défunts en dépôt primaire non incinéré, soit presque le tiers, n’est pas connue de manière satisfaisante. Pour les autres, soit 51 individus, deux grandes catégories de posture sont décrites ou signalées (tabl. xxii) :
– le décubitus dorsal : 36 individus, soit 70,58 % ;
– le décubitus latéral : 15 individus, soit 29,41 %5 ; la latéralité, indéterminée pour trois des défunts, paraît cependant plus fréquente à droite (huit cas dont cinq sur des fouilles récentes) qu’à gauche (quatre cas dont deux sur des fouilles récentes).

TABL. XXII – Les différentes positions générales des corps en dépôt primaire non incinéré, par phases chronologiques (en romain : individus dont le matériel ostéologique a été étudié ; en italique : individus signalés par les fouilleurs mais dont le matériel n’a pas pu être examiné).
148Le choix de la posture du cadavre ne semble pas varier selon l’âge au décès. Presque tous les sujets dont nous connaissons celle‑ci sont des adultes. Cependant, quatre défunts immatures présentent des positions reflétant la variabilité de la position du corps. Deux sont en décubitus dorsal : un(e) adolescent(e) et une enfant d’environ 10 ans (respectivement Combe Sévène 2 et Vayssas 1, sujet no 3) ; un est en décubitus latéral gauche (adolescent du tumulus réutilisé de Dignas) ; et un est « allongé » (« jeune » d’âge non précisé du Freyssinel XIX).
149La position générale du corps ne dépend pas non plus du sexe du mort (tabl. xxiii). Pour 18 sujets en décubitus dorsal dont les os ont été examinés figurent sept individus féminins, un très gracile, sept individus masculins et trois robustes ou très robustes. De même, les cinq défunts en décubitus latéral droit dont les os ont été étudiés sont deux femmes, un homme et deux individus robustes, et les deux squelettes en décubitus latéral gauche examinés correspondent à un adolescent masculin et un homme.

TABL. XXIII – Sexe et position générale des corps en dépôt primaire non incinéré dont le matériel ostéologique a été étudié.
150Il ne semble pas non plus, malgré la faiblesse de l’échantillonnage, que la variété dans la disposition de la dépouille soit représentative d’une évolution chronologique (tabl. xxii) ou d’un secteur géographique (tabl. xxiv) : toutes ces positions ont été reconnues sur tous les causses, dans la mesure où la documentation permet cette approche. Et il n’y a pas de spécialisation dans un quelconque champ tumulaire de cette région. Bien mieux, des positions différentes sont attestées dans des sépulcres où plusieurs corps ont été placés simultanément, ou dans un laps de temps court : décubitus dorsal et décubitus latéral dans le tumulus réutilisé de Dignas au Bronze final IIIb, ainsi que dans celui du Vayssas 1 au tout début du premier âge du Fer. Et dans ce dernier cas, le dépôt sur le côté du sujet no 5, à l’extrémité de la rangée des cadavres, peut simplement résulter d’un manque de place.

TABL. XXIV – Répartition par causse des différentes positions générales des défunts en dépôt primaire non incinéré.
Le détail de la position du corps
151Dans de nombreux sites, fouillés récemment ou non, la position de la tête et/ou des membres (à l’exclusion des mains et des pieds dont nous ne savons rien) est précisée. Toutefois, on ignore le plus souvent si le cadavre s’est décomposé en espace vide ou colmaté, et donc si les positions particulières sont voulues par les survivants ou résultent de l’évolution naturelle de la sépulture.
Les corps en décubitus dorsal
152Des détails sur la position de la tête ou des membres ont été signalés pour 21 des 37 corps en décubitus dorsal.
La tête
153Dans sept cas, il est précisé que la tête est inclinée vers la droite ou repose sur le côté droit :
– tumulus réutilisé de Dignas, sujet no 1 (Bronze final IIIb) ;
– Combe Sévène 2 (transition Bronze final IIIb/premier âge du Fer) ;
– Le Freyssinel XXII (750‑600) ;
– Aven Armand 2 (750‑600) ;
– Combe Sévène 10 (750‑500) ;
– Le Freyssinel XXXIII (Bronze final ou premier âge du Fer) ;
– Bac VI (non daté).
154Par ailleurs, à Drigas 2 (Bronze final IIIa), C. Hugues et M. Lorblanchet (1970 : 12) indiquent que le corps est orienté nord‑est/sud‑ouest, et que le crâne est au nord‑est avec face « tournée vers le sud, en direction du mont Aigoual qui se profile à l’horizon » : le massif de l’Aigoual se trouvant au sud et au sud‑est de Drigas, on en conclura que la tête était inclinée vers la gauche. C’est là le seul exemple pour le moment attesté d’une telle position de la tête dans cette région des Grands Causses du Gévaudan.
155Dans le tumulus de Dignas, les deux corps reposent dans une fosse qui paraît avoir été remblayée aussitôt : l’inclinaison de la tête du sujet no 1 vers le cohabitant du lieu n’est sans doute pas fortuite. En revanche, à l’Aven Armand 2 et peut‑être aussi à Combe Sévène 2, il semble que le cadavre se soit décomposé en espace vide ; dans ces deux sépultures, la position du crâne constatée n’a peut‑être pas été voulue par les survivants. Dans les cinq autres tertres, la région sépulcrale n’est pas délimitée et aucun argument ne plaide en faveur d’une décomposition en espace vide ; la posture de la tête a pu être recherchée par les survivants, hypothèse confortée d’ailleurs par la très grande prédominance d’une latéralité. Partout ailleurs, quelle interprétation donner à l’absence d’indication ? Position droite de la tête que l’on juge inutile de signaler, ou bien écrasement et mauvais état de conservation du crâne n’ayant pas permis l’observation ? Il est impossible de se prononcer, mais le second cas a dû se produire bien souvent.
156En définitive, lorsque l’inclinaison de la tête a été recherchée, on a très généralement préféré le côté droit au gauche. Cette pratique n’est en relation ni avec l’âge, ni avec le sexe du défunt, ni avec l’époque, ni avec une particularité locale. Et dans le seul cas où le côté gauche est concerné, le défunt « regarde » un point remarquable du paysage, en l’occurrence le massif de l’Aigoual qui limite l’horizon caussenard vers le sud.
Les membres
157La position générale des membres supérieurs et inférieurs est indiquée pour 17 individus. Il en ressort neuf grandes catégories. L’une d’elle, que l’on pourrait qualifier de nor male, regroupe à elle seule neuf de ces sujets, tandis que les huit autres ne sont attestées que par un seul défunt à chaque fois (fig. 241) :
– décubitus dorsal 1 : membres en rectitude, les supérieurs le long du corps, les inférieurs dans l’axe de celui‑ci (Drigas 2, sujet no 1 du tumulus réutilisé de Dignas, Roumagnac 6, sépulture inférieure des Lacs III, Les Bondons I, Les Fons I, sujet no 1 du Vayssas 1, sujets nos 1 et 2 du Freyssinel X) ;
– décubitus dorsal 2 : membre supérieur droit en rectitude le long du corps, membre supérieur gauche ramené vers le ventre, membres inférieurs en rectitude dans l’axe du corps (Moulin à Vent du Pradal) ;
– décubitus dorsal 3 : membre supérieur droit ramené vers le ventre, membre supérieur gauche en rectitude le long du corps, membre inférieur droit en rectitude dans l’axe du corps (le gauche est inconnu) (Combe Sévène 10) ;
– décubitus dorsal 4 : membre supérieur droit ramené vers le ventre, membre supérieur gauche inconnu, membres inférieurs en rectitude dans l’axe du corps (Vayssas 1, sujet no 4) ;
– décubitus dorsal 5 : membres supérieurs ramenés sur le ventre, membres inférieurs en rectitude, chevilles serrées (Combe Sévène 2) ;
– décubitus dorsal 6 : membres en rectitude, les supérieurs le long du corps, les inférieurs croisés, le droit sur le gauche (Le Freyssinel XXXIII) ;
– décubitus dorsal 7 : membres supérieurs en rectitude le long du corps, membres inférieurs fléchis (Les Fons III) ;
– décubitus dorsal 8 : membres supérieurs et inférieurs en rectitude mais divergents par rapport à l’axe du corps (Le Bac VI) ;
– décubitus dorsal 9 : membre supérieur droit ramené vers le ventre, membre supérieur droit en rectitude le long du corps, membres inférieurs en rectitude, le gauche dans l’axe du corps, le droit légèrement écarté (Villeplaine 1).

FIG. 241 – Les différents types de positions générales des membres signalées pour les défunts non incinérés en décubitus dorsal.
158Au Crès II, seuls les membres supérieurs, allongés le long du corps, sont signalés.
159Aucune corrélation n’apparaît entre le type de position et le sexe du défunt, la phase à laquelle celui‑ci appartient, ou un causse particulier. On trouve ainsi des hommes dans les positions 1, 2, 3 et 4, et des femmes dans les positions 1 (4 cas) et 9. Au Bronze final IIIa (2 cas) et IIIb, la position 1 est attestée ; à la transition Bronze final/premier âge du Fer, les positions 1 (3 cas), 5 et 9 ; vers 750‑700‑650, les positions 1 et 4 ; entre 750‑600, la position 1 ; et entre 750 et 500, les positions 2 et 3. Enfin, la position 1 est connue aussi bien sur le Sauveterre que sur le Méjan ou les Bondons.
Les corps en décubitus latéral
160Les corps en décubitus latéral droit ou gauche se présentent selon trois modalités.
Corps étendu
161Quatre cas ont été recensés (Pomeyrol, Combes de L’Aumède Haute, sujet no 2 du Vayssas 1, sujet no 2 du tumulus réutilisé de Dignas). On remarquera que de nombreuses différences existent dans les positions des membres supérieurs et inférieurs. Les deux membres supérieurs sont repliés vers la poitrine aux Combes de L’Aumède Haute, et seulement à demi repliés au Vayssas 1. Pour le sujet no 2 du tumulus de Dignas, en décubitus latéral gauche, le membre supérieur droit est ramené vers le ventre tandis que l’autre est étendu sous le corps ; à Pomeyrol, où le défunt est couché sur le côté droit, c’est le membre supérieur gauche qui est replié. Les membres inférieurs peuvent être tous deux en extension (Dignas) ou légèrement fléchis (Combes de L’Aumède Haute). Dans deux autres tumulus, Pomeyrol et Vayssas 1, le gauche est en extension et le droit fléchi.
Corps fléchi
162Trois cas (Combe Sévène 1, Aven Armand 1 et sujet no 5 du Vayssas 1) dont deux, pour lesquels nous sommes renseignés, en décubitus latéral gauche : au Vayssas 1, bras et avant‑bras sont étendus le long du corps, le membre inférieur gauche est en extension tandis que le droit est légèrement fléchi ; à Combe Sévène 1, le membre supérieur droit est en extension le long du corps, tandis que le gauche est replié vers la tête, et les membres inférieurs sont tous les deux légèrement fléchis.
Corps recroquevillé
163Le corps est signalé « replié » ou « accroupi » dans cinq monuments (Bac II et VII sur le côté droit, Le Freyssinel XLI sur le côté gauche, Blachères 2 et Clapaslas, côté non précisé).
164La position du crâne n’est qu’exceptionnellement précisée. Sans doute la tête reposait‑elle sur le côté droit lorsque le corps était en décubitus latéral droit, et sur le côté gauche quand celui‑ci gisait en décubitus latéral gauche. Une disposition particulière a peut‑être existé au Freyssinel I où le corps est signalé sur le côté gauche, orienté ouest‑est, tête à l’ouest ; la tête aurait donc dû, normalement, « regarder » vers le nord ; or le Dr Morel indique que celle‑ci est « tournée vers le sud ».
6.4.3.4 L’orientation du cadavre
165L’orientation du cadavre, avec l’indication du côté où gisait la tête, a été relevée pour 63 défunts (tabl. xxv).

TABL. XXV – Orientation du corps des défunts en dépôt primaire non incinéré en fonction du type de décubitus, (t) = tête ; cette indication est placée devant le point cardinal vers où est positionnée la tête (en romain : individus dont le matériel ostéologique a été étudié ; en italique : individus signalés par les fouilleurs mais dont le matériel n’a pas pu être examiné).
166Globalement, pour l’ensemble des cas connus, deux constatations ressortent (tabl. xxvi). On remarque tout d’abord une grande variabilité puisque toutes les orientations sont attestées. Mais celles‑ci ne sont pas représentées selon les mêmes proportions : les défunts ont de préférence la tête à l’est (22,2 %), au nord (19 %) ou au nord‑ouest (15,9 %). Ceux qui sont déposés tête à l’ouest ou au sud sont beaucoup moins nombreux (respectivement 12,6 et 9,5 %). Cependant, pour les fouilles anciennes, la rareté des notations intermédiaires entre les points cardinaux montre le caractère imprécis de ces indications. C’est donc une grande moitié nord de la distribution des orientations, de l’est à l’ouest, qui a la faveur des caussenards, tandis que la moitié sud présente un net déficit (fig. 242A).

TABL. XXVI – Orientation du corps des défunts en dépôt primaire non incinéré en fonction du type de décubitus ; nombre et pourcentage des individus, (t) = tête ; cette indication est placée devant le point cardinal vers où est positionnée la tête.
167Si l’on considère séparément les individus en fonction du décubitus, une distinction paraît s’établir entre ceux qui reposent en position dorsale et ceux qui gisent en position latérale. Dans les cas de décubitus dorsal, ce sont les défunts tête au nord‑ouest qui dominent légèrement, devant ceux qui ont la tête au nord ou à l’est, tandis que le déficit le plus important concerne les corps tête à l’ouest (fig. 242B). À l’inverse, pour les décubitus latéraux droits ou gauches, c’est l’orientation tête à l’ouest qui prédomine, alors que la position tête à l’est est peu représentée (fig. 242C). Le déficit de défunts placés tête au sud est toutefois net dans les deux cas.

FIG. 242 – Distribution des orientations des corps en dépôt primaire non incinéré à partir d’une origine commune, les pieds étant vers le centre et la tête vers la périphérie. La longueur des segments est proportionnelle au nombre d’individus. A ensemble des dépôts primaires non incinérés ; B décubitus dorsaux seuls ; C décubitus latéraux droits et gauches ; D sujets féminins et/ou graciles en décubitus dorsal ou latéral ; E sujets masculins et/ou robustes en décubitus dorsal ou latéral.
168L’orientation du cadavre ne paraît dépendre ni du sexe du trépassé (fig. 242D et E et tabl. xxvii), ni de l’époque (tabl. xxviii), ni du causse (tabl. xxix). D’ailleurs, dans deux cas de sépultures multiples, les corps ont des orientations opposées, « en tête‑bêche » : Le Freyssinel X, à la transition Bronze final/premier âge du Fer, et Vayssas 1 au début du premier âge du Fer. Mais le plus frappant est de constater que la grande majorité des cadavres, environ 90 % d’entre eux, « regardent » vers la trajectoire du soleil. Ce souci d’orienter la face du mort vers cet astre pourrait avoir une raison symbolique, en rapport avec la conception de l’au‑delà. Dans de nombreuses religions, le soleil est en effet reconnu comme un principe de mort et de régénérescence (Eliade 1949 : 115‑136). Et l’orientation du corps à l’intérieur des limites constatées pourrait dépendre de la période de l’année où s’effectue son dépôt, ce qui expliquerait la grande variété remarquée.

TABL. XXVII – Sexe anthropologique et orientation du corps des défunts en dépôt primaire non incinéré, (t) = tête ; cette indication est placée devant le point cardinal vers où est positionnée la tête.

TABL. XXVIII – Orientation du corps des défunts en dépôt primaire non incinéré par grandes phases chronologiques, (t) =tête ; cette indication est placée devant le point cardinal vers où est positionnée la tête.

TABL. XXIX – Orientation du corps des défunts en dépôt primaire non incinéré par causse, (t) = tête ; cette indication est placée devant le point cardinal vers où est positionnée la tête (en romain : individus dont le matériel ostéologique a été étudié ; en italique : individus signalés par les fouilleurs mais dont le matériel n’a pas pu être étudié).
6.4.4 La question du dépôt secondaire non incinéré
169Le dépôt secondaire après décharnement comprend au moins deux phases : une période durant laquelle les parties molles disparaissent, puis le dépôt dans la sépulture définitive d’une part plus ou moins importante des os du squelette du défunt. Le décharnement peut se faire par simple putréfaction dans une sépulture provisoire, sans intervention des survivants, et dans ce cas, il faut en moyenne entre trois et six ans pour atteindre l’état d’os « blancs » (Thomas 1980 : 28). Il peut aussi être obtenu plus rapidement par dépeçage, ou bien par exposition aux animaux carnivores. Son diagnostic repose essentiellement sur le constat d’un désordre dans la disposition des os, mais à condition de pouvoir éliminer l’hypothèse de remaniements postérieurs aux disjonctions articulaires (Duday et al. 1990 : 43).
170En Languedoc oriental, le dépôt secondaire après décharnement a été repéré dès la fin du xixe s. dans des tumulus de la région d’Uzès par le Dr P. Raymond qui le déduit de la faible représentation des éléments osseux. Puis il a été remarquablement observé et décrit dans les années 1974‑ 1976 par Y. Gasco dans des tumulus du Sadoulet à Pompignan (Gard) (Raymond 1900 : 237 ; Gascó 1980c : 51‑ 58 ; et pour l’ensemble de la question dans la région des Garrigues, Dedet 1992a : 71‑92). En revanche, dans la région des Grands Causses du Gévaudan, jusqu’à présent, il n’a pas été mis en évidence. Seul, parmi les chercheurs caussenards, R. Pauc l’évoque à propos du tumulus de l’âge du Bronze réutilisé de Chabusse 1 sur les Bondons (site no 148) (Pauc 1965 : 24) ; mais sa remarque s’applique à un matériel ostéologique non daté et peut‑être remanié car le monument a livré du mobilier d’époques diverses, début de l’âge du Bronze, âge du Fer, époque gallo‑romaine. Pourtant, au vu de certaines observations de fouilleurs ou de la composition de certains lots d’os recueillis dans plusieurs tumulus, la question de l’existence d’une telle pratique dans les Grands Causses durant la Protohistoire mérite d’être posée, même si aucune réponse sûre ne peut être apportée.
171Dans deux tumulus fouillés anciennement, on a constaté un certain éparpillement des os humains. Au Freyssinel IX, le Dr Morel (1936 : 38) a remarqué que le mobilier se trouve « au milieu d’ossements dispersés ». Par ailleurs, dans le caisson du Bac V, le même chercheur a signalé les « ossements en désordre » (Morel 1961 : 120). Dans ce dernier cas, il explique cet état par un bouleversement antérieur à sa fouille. Pour ces deux tombes, on ne peut évidemment conclure à un dépôt secondaire après décharnement car il est impossible de montrer qu’il n’y a pas eu remaniement des restes osseux postérieurement au dépôt, et le matériel n’étant pas conservé, on ne peut pas non plus juger de l’importance quantitative de ces lots et de leur composition, autant d’indice pouvant aider à l’interprétation.
172Parmi les fouilles anciennes, le cas du tumulus II des Fons est également bien particulier. Seul y fut découvert, en son centre, un « maxillaire humain », sans autre pièce osseuse et sans aucun mobilier (Morel, Peyre 1965 : 11). Dépôt secondaire très réduit ? Pratique spéciale touchant au crâne, ou à une partie du crâne de certains défunts ? Ou encore lieu de décharnement d’un corps où cet os aurait été laissé, volontairement ou non ? Non daté, ce dépôt demeure bien problématique, d’autant qu’à seulement quinze mètres de là se trouve un dolmen : y aurait‑il une relation entre les deux monuments ?
173Certains tumulus dont le matériel ostéologique a été examiné se distinguent pourtant nettement des autres par la présence d’individus représentés par de très petits lots d’os (tabl. xii). Les situations sont toutefois différentes et peuvent prêter à interprétations également différentes.
174Écartons d’emblée le tertre de la Cham des Bondons 1 à cause des incertitudes inhérentes à sa conservation. Ce tertre, qui abritait un adulte en dépôt primaire non incinéré, a aussi procuré quelques pièces osseuses d’un second adulte, notamment deux dents et un morceau de diaphyse d’humérus bien distincts du premier. Mais le monument a été partiellement remanié par les travaux agricoles, il n’a pas été fouillé en totalité, et des doutes subsistent dans l’attribution de certaines pièces osseuses à l’un ou l’autre sujet.
175Trois autres tombes posent un problème spécifique, car, avec les restes d’un défunt adulte en dépôt primaire non incinéré, figurent quelques pièces, non brûlées également, d’un très jeune sujet : à Pomeyrol, la moitié proximale d’une ulna droite, un fémur gauche et une diaphyse de tibia droit ou gauche d’un fœtus ou d’un prématuré ; aux Conques 1, la moitié distale du fémur gauche d’un périnatal également ; et à Combe Sévène 10, cinq dents déciduales d’un petit enfant d’1 à 2 ans. Aux Conques 1 et à Combe Sévène 10, la position de ces restes dans la sépulture n’est pas documentée, et il est dès lors difficile de trancher, compte tenu de la fragilité particulière de tels restes osseux, entre dépôt primaire mal conservé, dépôt secondaire, ou élément relique d’un autre mort accompagnant l’adulte. À Pomeyrol, ces vestiges ont été retrouvés dispersés dans la masse du tertre, en dehors de la zone occupée par les restes de l’adulte. Mais cet éparpillement peut être imputable à la circulation de la microfaune entre les éléments pierreux constituant la chape, complètement dépourvue de terre, de ce tumulus, et, d’autre part, on ne peut exclure que d’autres restes de ce très jeune défunt subsistent dans la partie du tertre non fouillée toute proche. Dès lors, il est ici particulièrement difficile de conclure.
176Le tertre du Champ Rond a été dressé sur les restes d’un adulte incinéré sur place. Or il a également livré un morceau, non brûlé, de coxal d’adulte. Ce dernier appartient‑il à l’individu incinéré ou à un autre mort ? D’après la coloration des fragments osseux, l’incinération a été effectuée à une température élevée et de manière homogène pour l’ensemble du squelette, ce qui permet de privilégier la seconde hypothèse. Mais le choix entre diverses autres interprétations ne peut être fait : mauvaise conservation, dépôt secondaire d’un second défunt réduit à un seul morceau d’os, reste d’une sépulture provisoire, lieu de déchaînement ou bien élément relique d’un autre mort accompagnant le sujet no 1 à la manière d’une offrande ?
177Combelongue 1 a livré le squelette d’un homme adulte très robuste (sujet no 1), mais également une diaphyse d’humérus gracile appartenant à un autre adulte (sujet no 2). Que représente cette pièce surnuméraire ? La présence des os du premier individu permet d’écarter l’hypothèse d’une mauvaise conservation du second. Mais les questions qui restent posées sont les mêmes que pour le tumulus précédent.
178À La Fajole C1 (site no 215), l’unique habitant du tertre, un adulte, est seulement marqué par une incisive, deux métacarpiens et un manubrium sternal. La présence de ce dernier, particulièrement fragile, paraît devoir exclure l’hypothèse d’une mauvaise conservation du squelette. Une action de type « pillage », si elle peut expliquer la faiblesse du matériel d’accompagnement, un unique tesson de poterie, ne saurait rendre compte de celle du lot osseux. Restent deux solutions : on se trouve en présence d’une sépulture définitive avec dépôt secondaire après décharnement de quelques os du défunt accompagnés d’un mobilier très réduit ; ou bien il s’agit de la sépulture provisoire, du lieu du décharnement, après reprise de la presque totalité du squelette et du mobilier, où l’on ne trouve plus que des reliquats, laissés volontairement ou non.
179Par ailleurs, deux autres tumulus, Dévois de Villeneuve 2 et Serre de Cabrié 1, ont livré des restes peu nombreux, se rapportant à des adultes dont le traitement a été interprété par les fouilleurs comme « inhumation » ou dépôt primaire non incinéré. Le défunt du Dévois de Villeneuve 2 n’est représenté que par des morceaux de calotte crânienne, treize dents, ou fragments de dents isolées, deux morceaux des os de l’avant‑bras droit, un métacarpien gauche, un morceau de fémur, un de tibia et deux phalanges de pied. Celui du Serre de Cabrié 1 n’est attesté que par quelques morceaux de la calotte crânienne et de la face, une portion de chacun des deux fémurs, un métatarsien et une phalange de pied. Le caractère réduit de ces lots et le désordre dans la répartition des pièces osseuses constaté par les fouilleurs pourrait peut‑être révéler des dépôts secondaires. Toutefois, au Serre de Cabrié 1, les fouilleurs rendent la microfaune responsable de la dispersion de ces éléments.
180Restes de sépulture primaire provisoire où se décompose le cadavre, dont on a récupéré la grande majorité des os, ou bien dépôt secondaire après décharnement, ces deux hypothèses sont impossibles à valider a posteriori. Mais il n’en demeure pas moins que la présence d’os surnuméraire(s) dans certaines tombes atteste bien la réalité de manipulations des restes de certains morts de la part des survivants.
6.5 La reprise de pièces osseuses dans les dépôts primaires non incinérés
181Un cas de reprise d’os a particulièrement bien été observé par G. Fages lors de la fouille du tumulus du Moulin à Vent du Pradal sur le Méjan (site no 161), daté du premier âge du Fer. Il concerne la boîte crânienne et l’atlas d’un adulte en décubitus dorsal. Cette opération a entraîné un important déplacement des clavicules et de l’axis. La clavicule droite a été placée hors du volume du corps, à 20 cm derrière l’emplacement du crâne, tandis que la gauche et l’axis ont été disposés sous le coxal droit. Sous ce dernier os, ont été placés la patella gauche et le naviculaire droit. Cette reprise de la boîte crânienne a dû se produire en fin du processus de décomposition des parties molles, les ligaments maintenant l’atlas au crâne étant les plus longs à disparaître.
182Dans les autres sépultures caussenardes abritant un trépassé en dépôt primaire non incinéré, on ne peut soupçonner pratique du même ordre. L’inventaire des pièces osseuses découvertes, et en particulier les plus résistantes (crâne et os longs des membres), n’accuse aucun déficit qui pourrait permettre d’envisager des prélèvements de ces os. Le cas du Moulin à Vent du Pradal reste à ce jour unique dans la région, mais de telles reprises semblent attestées dans les Garrigues du Languedoc oriental, du moins dans les dépôts secondaires, ou supposés tels, non incinérés. On a en effet constaté que deux séries d’os font souvent défaut, bien que parmi les plus robustes du squelette : la boîte crânienne, alors que des dents supérieures isolées, surtout des uniradiculées qui se détachent le plus facilement du parodonte, sont présentes, et les os longs des bras et avant‑bras (Dedet 1992a : 90). Des exemples de reprise du crâne ont aussi été bien mis en évidence dans des tombes à inhumation en dépôt primaire datant de La Tène I en Champagne, concurremment avec le simple déplacement du crâne dans la tombe ou le rajout d’un autre crâne (Rozoy 1986‑1987, 2 : 55‑63 ; Rozoy 1986 : 257‑259).
183Dans les Grands Causses, une telle action est à mettre en relation avec des dispositifs de protection particulière de la tête du défunt dans certaines tombes, un cas d’incinération sur place (Le Freyssinel V, site no 23), et plusieurs morts non incinérés (Les Sarragats, site no 17 ; Le Freyssinel XIX, site no 47 ; Chaumeils 4‑1883, site no 109). Toutes ces pratiques participent plus généralement d’un souci de privilégier le crâne de certains trépassés. Et cet intérêt plonge ses racines dans le passé régional puisque, au Bronze final II ou IIIa, on découpe des pendeloques dans des parois crâniennes humaines et on les abandonne dans la grotte de Landric (Saint‑Bauzile, Aveyron), sur le rebord du Larzac (Dedet 1992a : 17).
6.6 L’absence de restes osseux humains
184Plusieurs tertres des Grands Causses du Gévaudan n’ont livré, aux dires de leurs fouilleurs, aucun reste osseux humain. Mais cela recouvre en fait des réalités diverses. On trouve dans le lot des sites pour lesquels cette absence n’est pas forcément certaine : tertre très partiellement fouillé du Plo de Saubert (site no 182), fouille ancienne du Freyssinel XXI (site no 49) qui n’a peut‑être pas affecté la totalité du monument, structure des Bondons IV (site no 151), implantée dans un milieu acide ne permettant pas la conservation des os non incinérés, tertre ayant livré un matériel hétéroclite (Les Aires 1 et 2, sites nos 157 et 158) ou non datable (Roumagnac 2, site no 13). Mais sept autres édifices fouillés récemment, en totalité ou presque, posent un réel problème : Roumagnac 4 et 9 sur le Sauveterre, Caousou Viel 1, Les Combes II et III sur le plateau des Bondons, Serre de Cabrié 2 et 4 sur le Noir (respectivement sites nos 14, 16, 150, 154, 155, 219 et 221). Ils présentent l’aspect, les dimensions et la morphologie d’un tumulus funéraire, le plus souvent dépourvu de structures bâties, sauf dans le cas de Roumagnac 4 qui possède un cercle de blocs périphérique. Ils ont livré un mobilier protohistorique, à l’exclusion de tout objet plus récent : des tessons de vases (Roumagnac 4 et 9, Les Combes III, Serre de Cabrié 2 et 4) et/ou des armilles en bronze (Caousou Viel 1, Les Combes III). Tous se rapportent au premier âge du Fer, à l’exception de Roumagnac 4 qui a livré du mobilier des ive‑iiie s. av. J.‑C.). Ils se rencontrent souvent à proximité de tombes protohistoriques avérées (Roumagnac 4 à 50 m de Roumagnac 1, Roumagnac 9 à 120 m de Roumagnac 6, Serre de Cabrié 2 à 50 m du Serre de Cabrié 3, Serre de Cabrié 4 à 250 m de Serre de Cabrié 5, Les Combes II et III à proximité des Combes I). Tous enfin sont installés dans un milieu favorable à la conservation des os, en tout cas semblable à celui de tumulus voisins où des os non brûlés ont été découverts. Or ces tertres n’ont livré aucune trace d’os humain, que leur fouille, menée récemment selon les méthodes actuelles, ait été complète (Roumagnac 4 et 9, Les Combes II et III), ou presque complète (Serre de Cabrié 2 et 4, où seules les bordures n’ont pas été fouillées, et Caousou Viel 1, où des buttes témoins ont été réservées).
185De telles structures, semblables et contemporaines des tumulus environnants mais dépourvues d’os humains, ont également été mises en évidence récemment dans d’autres régions calcaires, sans que, là encore, l’absence d’os paraisse liée à un problème de conservation. C’est le cas par exemple du tumulus X du Blacas (Viala‑du‑Pas‑de‑Jaux, Aveyron), sur le Larzac tout proche (Gruat, Poujol 1997), de la grande majorité des tumulus du Pays Basque de France, où le mobilier est exceptionnel ou indigent, mais l’architecture très développée (Blot 1994 : 142‑143 ; Blot 1995 : 534), ou encore, dans la nécropole de Chavéria (Jura), de plusieurs tumulus, les III, IV, V, VI, IX, X et XI, qui ont pourtant livré un mobilier conséquent (Vuaillat 1977). Dans les Garrigues du Languedoc oriental, si l’on prend en compte les fouilles anciennes, de tels tertres sans os concerneraient environ 13 % du total des quelque trois cents tumulus recensés (Dedet 1992a : 94).
186Preuve supplémentaire de leur appartenance au complexe funéraire, dans les Grands Causses, ces tertres sont en moyenne plus petits que ceux qui ont livré des os humains. Et surtout, ils s’inscrivent à la limite inférieure d’une progression des diamètres moyens qui s’établit en fonction du degré d’encombrement des restes osseux : des plus petits aux plus grands, tertres sans os, tumulus à incinération secondaire, tumulus à incinération primaire, tumulus à dépôt non incinéré, essentiellement primaire (cf. supra § 5.6.1.2). Une gradation analogue a été enregistrée également dans les Garrigues (Dedet 1994 : 33).
187De tels dispositifs témoignent de l’existence d’autres pratiques qui nous échappent totalement. Il pourrait s’agir de monuments commémoratifs, érigés en l’absence, voulue ou non, de la dépouille du mort. Le mobilier qu’ils ont procuré est, en général, plus réduit que celui qui est déposé dans les tumulus. Ce peut être là la marque d’un rituel affaibli, ou du moins différent. Mais on peut aussi envisager que ces tertres correspondent à des structures annexes des tombes, par exemple pour recevoir des offrandes, lors de funérailles ou de commémorations. C’est un aspect de la question funéraire qui a rarement été envisagé dans le sud de la France, mais le complexe du viiie ou du viie s. av. J.‑C. récemment fouillé dans la plaine du Vistre à Vestric (Gard) montre, à côté des sépultures, l’existence de dispositifs parafunéraires, dépôts de vases sur le paléosol, fosse à galets chauffés et enclos fossoyés (Dedet et al. 1997).
Notes de bas de page
1 Si l’on sépare les adultes en fonction du seul critère de la synostose des sutures crâniennes, on obtiendrait 9 adultes présentant des sutures libres (donc probablement jeunes, entre 20 et 30 ans) et 28 dont les sutures sont en cours de synostose (donc probablement âgés de plus de 30 ans). Mais ce seul critère doit être en fait utilisé avec prudence.
2 On ne prendra pas en compte ici le tumulus de Pomeyrol qui a livré un adulte en dépôt primaire et trois os d’un périnatal humain, car la conservation des os des très jeunes morts pose des problèmes spécifiques.
3 À titre de comparaison, le poids moyen d’un squelette d’adulte non brûlé est de 2882 g, selon un examen portant sur 105 squelettes « d’asiatiques » (d’après Lawrence et Latimer dans Krogman 1978), et, selon une information de G. Depierre lors de la table ronde « Les pratiques funéraires à l’âge du Bronze en France » à Sens, en juin 1998, le poids total d’un individu incinéré dans les crématoriums actuels varie entre 1 200 et 1900 g.
4 Pour cette nécropole, H. Duday (1989 : 462) indique un maximum plus important : 2015 g d’os d’adulte incinérés pour la tombe 116, qui n’a pas fourni de doublon. Cependant, lors de l’analyse du matériel, A. Nickels, G. Marchand et M. Schwaller (Nickels et al. 1989 : 377) ont constaté une anomalie dans le mobilier sexuellement discriminant : cette tombe associe en fait objets typiquement « féminins » et « masculins » et pourrait donc avoir accueilli deux sujets. Par ailleurs, la tombe 45 a abrité deux individus dans deux ossuaires : le vase 45B a livré 1 300 g d’os appartenant à un adulte jeune et robuste, et la vase 45E 1 845 g d’un adulte de plus de 30 ans, plus gracile que le précédent. Ce dernier pourrait constituer le maximum au Peyrou, mais on ne peut toutefois écarter l’hypothèse d’un mélange des deux individus pouvant expliquer ce poids élevé.
5 Ces chiffres concernent à la fois les fouilles anciennes et les fouilles récentes. Un calcul séparé pour les données issues des deux séries de travaux donne toutefois des proportions très voisines, preuve que la distinction opérée par les archéologues des générations précédentes entre décubitus dorsal et décubitus latéral peut être considérée comme globalement exacte : d’après les fouilles anciennes, sur 30 individus, 22 sont en décubitus dorsal, soit 73,3 % et 8 décubitus latéral, soit 26,6 % ; d’après les fouilles récentes, sur 21 sujets, on a 14 décubitus dorsaux, soit 66,6 % et 7 décubitus latéraux, soit 33,3 %.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Mottes castrales en Provence
Les origines de la fortification privée au Moyen Âge
Daniel Mouton
2008
Géoarchéologie de sites préhistoriques
Le Gardon (Ain), Montou (Pyrénées-Orientales) et Saint-Alban (Isère)
Dominique Sordoillet
2009
L’enceinte des premier et second âges du Fer de La Fosse Touzé (Courseulles-sur Mer, Calvados)
Entre résidence aristocratique et place de collecte monumentale
Ivan Jahier (dir.)
2011
Lyon, Saint-Georges
Archéologie, environnement et histoire d’un espace fluvial en bord de Saône
Grégoire Ayala (dir.)
2012
Les gisements précolombiens de la Baie Orientale
Campements du Mésoindien et du Néoindien sur l’île de Saint-Martin (Petites Antilles)
Dominique Bonnissent (dir.)
2013
L’Îlot du palais de justice d’Épinal (Vosges)
Formation et développement d’un espace urbain au Moyen Âge et à l’époque moderne
Yves Henigfeld et Philippe Kuchler (dir.)
2014
Bettencourt-Saint-Ouen (Somme)
Cinq occupations paléolithiques au début de la dernière glaciation
Jean-Luc Locht (dir.)
2002
Campements mésolithiques en Bresse jurassienne
Choisey et Ruffey-sur-Seille
Frédéric Séara, Sylvain Rotillon et Christophe Cupillard (dir.)
2002
Productions agricoles, stockage et finage en Montagne Noire médiévale
Le grenier castral de Durfort (Tarn)
Marie-Pierre Ruas
2002