208 Nous suivons ici jusqu’à un certain point les analyses stimulantes de Franck Fischbach dans son livre Sans objet. Capitalisme, subjectivité, aliénation, Paris, Vrin, 2009, section « Fétichisme et réification » : 87-95.
209 Georg Lukács, Histoire et conscience de classe. Essais de dialectique marxiste, traduction Kostas Axelos et Jacqueline Bois, Paris, Minuit, 1960. Franck Fischbach expose et critique cette conception de l’aliénation comme réification (Sans objet, op. cit. : 65-87).
210 Point souligné également par Slavoj Žižek, cité par Franck Fischbach : « être lui-même réduit à la force de travail, à un objet-marchandise échangeable que l’on peut mettre sur le marché » (Sans objet…, op. cit. : 159, note 2).
211 L’échange marchand est en effet classiquement défini comme une « aliénation », comme la cession momentanée ou définitive à autrui d’un bien contre un autre bien ou de l’argent.
212 Sur le vécu de l’horreur affectant le travailleur moderne subjectivement dévalué, voir notre ouvrage Les horreurs du monde, op. cit. : 179-180.
213 Karl Marx Le capital. Livre I, chap. 1, traduction Joseph Roy, Paris, Éditons sociales, 1969, t. I : 88. Exemple cité et commenté par Franck Fischbach, Sans objet…, op. cit. : 90.
214 Franck Fischbach, Sans objet…, op. cit. : 105.
215 Ibid. : 93, nous soulignons.
216 Franck Fischbach, Sans objet…, op. cit. : 16.
217 Ibid. : 109.
218 Karl Marx, Manuscrits économico-philosophiques de 1844, cités par Franck Fischbach, Sans objet…, op. cit. : 153.
219 Voir le livre de Franck Fischbach, La production des hommes. Marx avec Spinoza, Paris, PUF, 2005. Voir également Frédéric Lordon, Capitalisme, désir et servitude. Marx et Spinoza, Paris, la Fabrique, 2010.
220 Franck Fischbach, Sans objet…, op. cit. : 127. L’auteur commente d’ailleurs les textes des Manuscrits en usant volontiers de concepts spinoziens, de même qu’en critiquant les concepts essentialistes et finalistes de Feuerbach de manière spinozienne.
221 Nature devenue « le corps propre non-organique de l’homme » (Marx, cité par Franck Fischbach, ibid. : 145) ; ce qui signifie non pas « mécanique », mais prolongeant son corps organique.
222 Franck Fischbach, Ibid.
223 Ibid.
224 Dans la proximité de Spinoza, pour lequel être libre, c’est agir en étant déterminé par les lois de sa nature, donc par soi ; tandis que la contrainte consiste à dépendre seulement d’un autre dans son action. On sait que Spinoza n’oppose pas la liberté à la nécessité mais la nécessité interne (liberté) à la nécessité externe (contrainte ou, en termes modernes, aliénation).
225 On n’oubliera pas en effet les affinités maintes fois revendiquées par Nietzsche, en particulier dans La généalogie de la morale, entre sa pensée et celle de Spinoza.
226 Franck Fischbach, Sans objet…, op. cit. : 155.
227 Seule une conception dialectique permet la « justification historique » du capitalisme, en tant qu’il a engendré le « machinisme » technologique et industriel qui demeure selon Marx un réel « acquêt » à « dépasser » dans un autre mode de production.
228 Karl Marx, Le capital. Livre I, Conclusion, in Œuvres, t. I, Économie I, op. cit. : 1239-1240.
229 Karl Marx, « Postface à la seconde édition allemande du Capital » [1875], in Œuvres, t. I, Économie I, op. cit. : 558. Marx y approuve l’affirmation selon laquelle la dialectique est à la fois et d’abord « réelle » avant de devenir « idéelle » dans le cerveau humain. Et encore : « Mes rapports avec Hegel sont très simples. Je suis un disciple de Hegel, et le bavardage présomptueux des épigones qui croient avoir enterré ce penseur éminent me paraît franchement ridicule. Toutefois, j’ai pris la liberté d’adopter envers mon maître une attitude critique, de débarrasser sa dialectique de son mysticisme et de lui faire subir ainsi un changement profond. » (Le capital, livre II, première section, chap. ii, in Œuvres, t. II, Économie II, Maximilien Rubel (éd.), Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1968 : 528, note a)
230 Sur les difficultés de cette double présupposition, qui fut aussi celle de Jean-Paul Sartre, nous nous permettons de renvoyer à notre livre Les horreurs du monde, op. cit., chap. vi : 129-130.
231 Voir sur ces acquêts du capitalisme le texte du Capital cité plus haut.
232 Point sur lequel insiste Franck Fischbach dans Sans objet…, op. cit., chap. « Possession versus Expression » : 233-250.
233 Karl Marx, Critique du programme du Parti ouvrier allemand (de Gotha), 1875, in Œuvres, t. I, Économie I, op. cit. : 1420.
234 Ernst Bloch a prolongé et approfondi cette thématique du loisir dans son Principe espérance, 1959 (t. II, Partie IV, Les épures d’un monde meilleur, traduction Françoise Wuilmart, Paris, Gallimard, 1982).
235 Karl Marx, Le capital. Livre III. Tome III, traduction Catherine Cohen-Solal et Gilbert Badia, Paris, Éditions sociales, 1960 : 199.
236 Karl Marx, Économie politique et philosophie (Manuscrits), in Œuvres, t. II, Économie II, op. cit. : 79.
237 Voir Axel Honneth, La lutte pour la reconnaissance, traduction Pierre Rusch, Paris, Cerf, 2000 [1992].
238 Voir Michael Löwy, « Progrès destructif. Marx, Engels et l’écologie », in Jean-Marie Harribey et Michael Löwy (dir.), Capital contre nature, Paris, PUF, 2003 : 11-22. Voir aussi : « Le talon d’Achille du raisonnement de Marx et d’Engels était, dans certains textes “canoniques”, une conception a-critique des forces productives capitalistes – c’est-à-dire de l’appareil technique/productif capitaliste/industriel moderne – comme si elles étaient “neutres” et comme s’il suffisait aux révolutionnaires de les socialiser, de remplacer leur appropriation privée par une appropriation collective, en les faisant tourner au profit des travailleurs et en les développant de façon illimitée. » (Michael Löwy, Écosocialisme : l’alternative radicale à la catastrophe écologique capitaliste, Paris, Mille et une nuits, 2011 : 99-100)
239 Hans Jonas, Le principe responsabilité. Une éthique pour la civilisation technologique, op. cit. : 284.
240 Ibid. : 285.
241 Karl Marx, Critique du programme du Parti ouvrier allemand (Programme de Gotha) [1875], in Œuvres, t. I, Économie I, op. cit. : 1420. En reprenant ce principe utopique saint-simonien, Marx l’intègre à la perspective communiste finale.
242 Voir François Perroux : « Ceux qui participent à la vie sociale n’ont plus aucune raison d’être en conflit les uns avec les autres : l’État devient pour eux inutile. C’est cette dernière part de la représentation qui est vraiment contestable, dès qu’on admet qu’il existe entre les individus des contradictions fondamentales. » (« Préface », in Karl Marx, Œuvres, t. I, Économie I, op. cit. : xvii-xviii)
243 Pierre Naville, Le nouveau Léviathan, t. II, Le salaire socialiste, Paris, Éditions Anthropos, 1970 : 184.
244 Nous avons cherché à articuler ces deux dimensions du désir humain dans notre recherche antérieure, Les horreurs du monde, op. cit., partie II « Esthétiques de l’horreur de crise », chap. iv, section « De Freud à Sartre » : 69-86.
245 Kostas Axelos, Marx penseur de la technique. De l’aliénation de l’homme à la conquête du monde, op. cit. : 276, nous soulignons.
246 Même si Marx, dans cette évaluation morale, ne vise « des personnes qu’autant qu’elles sont la personnification des catégories économiques, les supports d’intérêts et de rapports de classe déterminés » ; impossible donc de « rendre l’individu responsable de rapports dont il reste socialement la créature, quoi qu’il puisse faire pour s’en dégager » (Karl Marx, Le capital, Préface de la première édition, in Œuvres, t. I, Économie I, op. cit. : 550).
247 De même qu’on a pu reprocher à Marx sa théorie du facteur social-économique seul déterminant « en dernière instance », de même a-t-on pu reprocher à Jacques Ellul sa théorie du facteur technique devenu seul déterminant en dernière instance. La causalité unilinéaire est ainsi une reprise du mécanisme naturaliste de Marx par Ellul, même s’il la déplace vers l’autonomie de la technique.
248 Voir Frédéric Vandenberghe, Complexités du posthumanisme. Trois essais dialectiques sur la sociologie de Bruno Latour, traduction Henri Vaugrand, Paris, L’Harmattan, 2006 : 132-133 : « Mais maintenant que la nature humaine elle-même est devenue modifiable […]. Grâce à la révolution des techno-sciences, les humains peuvent maintenant contrôler l’évolution humaine, altérer la composition biologique des humains et de leur progéniture, et créer littéralement de nouvelles espèces qui brouillent les lignes et les temps de l’évolution spontanée. »
249 François Perroux distingue ainsi l’« antagonisme » dont la contradiction est résolue par la suppression d’un des termes (chez Marx le Capital est supprimé par le Travail) moyen non dialectique à terme, et le « conflit » dont la contradiction est résolue par une limitation réciproque sous un troisième au moyen d’une dialectique de dialogue (« Préface », in Karl Marx, Œuvres, t. I, Économie I, op. cit. : xvii-xviii).
250 Voir les analyses de Frederic Jameson dans Le postmodernisme ou la logique culturelle du capitalisme tardif, traduction Florence Nevoltry, Paris, Éditions des Beaux-Arts de Paris, 2007 [1991]. Selon Frederic Jameson le capitalisme a traversé trois phases : capitalisme marchand aux xvie et xviie siècles ; industriel aux xviiie et xixe siècles ; financier mondial, dit « tardif », à la fin du xxe et au début du xxie siècle.
251 Voir Les horreurs du monde, op. cit., partie IV, chap. xiii, section « Le droit, la politique, l’éthique » : 262-280 et section « L’esthétique et l’éthique » : 281-298.