Chapitre 3. Le traitement des données
p. 85-105
Texte intégral
3.1. Le développement
1Le développement est une amplification du phénomène amorcé par la lumière. Il consiste à transformer l’image latente en une image visible, par réduction des grains de bromure d’argent en argent métallique.
3.1.1. Mécanisme du développement
2Cette réaction prend naissance autour de chaque germe de l’image latente et se propage à l’intérieur du cristal. Le développateur (réducteur) fournit les électrons à l’ion Ag+ suivant le schéma :

3L’image développée est discontinue. Elle est formée de petits grains noirs, dispersés, ou au contraire concentrés, selon que l’éclairement a été faible ou intense.
3.1.2. Propriétés des révélateurs
4Les constituants des principaux révélateurs, destinés aussi bien aux films qu’aux papiers, se limitent à un développateur, un accélérateur, un conservateur, un retardateur anti-voile et un solvant, l’eau.
3.1.2.1. Les développateurs
5Les agents développateurs sont pour la plupart des dérivés benzéniques, dont les plus fréquemment employés sont l’hydroquinone et le métol, ce dernier plus connu sous le nom de Génol ou d’Elon, mais aussi le phénidon, le paraminophénol et la pyrocatéchine.
6L’hydroquinone, C6H4(OH)2, employé seul, engendre un révélateur dur à action lente car peu énergétique, plus particulièrement adapté aux reproductions de documents au trait, c’est-à-dire sans demi-teinte.
7Le métol, C6H3OHNHCH3, est un agent réducteur doux et très énergétique, mais il s’oxyde très rapidement car il présente un potentiel de réduction élevé. Sa toxicité, reconnue depuis longtemps, semble le fait d’impuretés, notamment la p-phénylène-diamine. Le phénidon, beaucoup plus stable et moins toxique tend à se substituer actuellement à ce dernier. L’association de l’hydroquinone et du génol ou du phénidon a favorisé l’élaboration d’une gamme très étendue de révélateurs aux propriétés répondant à la majorité des besoins.
3.1.2.2. Les substances annexes
8Employés seuls, ces agents s’oxydent plus ou moins rapidement ; l’addition d’un conservateur, le bisulfite de sodium essentiellement, Na2SO3, favorise un ralentissement notable de ce mécanisme d’altération.
9Les accélérateurs de développement sont des alcalis, borax, tétraborate de sodium ou de potassium et soude caustique, substances classées ici selon leur pH croissant. Leur rôle est double, fournir l’énergie au révélateur, qui augmente avec le degré de basicité, et neutraliser l’acide bromhydrique qui se forme lors de la transformation des sels d’argent en argent métallique (solution tampon).
10Le retardateur anti-voile le plus répandu est le bromure de potassium, KBr, dissous à raison de 0,2 g à 2 g/l. La faible quantité de produit est justifiée par le fait qu’au cours du développement, le révélateur s’enrichit en bromure provenant de la réduction des sels d’argent. Actuellement des anti-voiles organiques, tels que le benzotriazol ou le nitrate de P-nitrobenziminazol, sont susceptibles de remplacer le bromure de potassium, surtout pour le développement des émulsions de haute sensibilité.
11Certains adjuvants participent à la constitution d’un révélateur, mais cet apport n’est pas impératif. Parmi ceux-ci on cite, entre autres, les agents mouillants. Ils améliorent l’uniformité du traitement et préviennent la formation de bulles d’air à la surface de l’émulsion. La nécessité d’obtenir un grain plus fin implique la présence dans le bain de développement d’hyposulfite de sodium ou de sulfocyanure de potassium, substances favorisant un pouvoir solvant élevé. Enfin, l’addition, éventuellement, d’héxamétaphosphate de sodium est justifiée afin d’éviter la formation d’un voile carbonaté sur la gélatine, mais ce composant ne se rencontre que rarement.
12L’eau intervient non seulement comme solvant, mais favorise aussi la pénétration du révélateur dans la gélatine, par gonflement. L’eau courante n’est pas chimiquement pure. Elle contient du carbonate ou du sulfite de calcium, à l’origine de formations de boues ou de dépôts sur l’émulsion une fois séchée. En outre, les multiples opérations de traitement pour l’amélioration de la qualité des eaux du réseau de distribution entraînent une oxygénation intense de celles-ci, provoquant une oxydation prématurée du révélateur. Enfin, les impuretés occasionnelles, telles que l’hydrogène sulfuré, la rouille des canalisations et l’eau de javel, sont autant d’éléments pouvant altérer l’image argentique finale. Il est quelquefois indispensable, notamment pour les documents susceptibles d’être archivés ou numérisés, de diluer les composants du révélateur dans une eau bouillie qui a pour effet d’expulser les gaz dissous et de provoquer la précipitation du calcaire. Ces conditions peuvent être remplies par désionisation du liquide et filtrage des corps en suspension, qu’ils soient d’origine organique ou minérale.
3.1.2.3. Les formules
13Les formules pour révélateurs film, fournis par les fabricants, sont nombreuses, mais la plus commune reste le D 76 de Kodak. Ce produit autorise une exploitation remarquable de la sensibilité du film et génère un grain fin, avec un effet compensateur sensible. De plus, l’apport d’une solution d’appoint, le D 76R, permet sa régénération, assurant des résultats constants et limitant ainsi les frais de fonctionnement.
14Formule de type D 76 :
Hydroquinone | 5 g |
Métol | 2g |
Sulfite de sodium anhydre | 100 g |
Borax | 20 g |
Eau | Q.S. 1 000 ml |
15Solution d’entretien D 76R :
Hydroquinone | 7,5 g |
Métol | 3g |
Sulfite de sodium anhydre | 100 g |
Borax | 20 g |
Eau | Q.S. 1 000 ml |
16L’absence de bromure dans la solution mère provoque rapidement une forte variation du potentiel de développement au cours des traitements successifs, ce qui a entraîné la création de formules dérivées, D 76b, D 76c, D 76d. On retrouve chez d’autres fabricants des révélateurs équivalents comme l’ID 11 d’Ilford, par exemple.
17Ce type de développateur convient parfaitement pour l’enregistrement de sujets dont l’écart des luminances extrêmes, c’est-à-dire le contraste, est moyen. Certains vestiges pariétaux, cependant, fortement altérés, partiellement occultés par un voile de calcite ou d’une teinte sensiblement équivalente à celle du support lithique, présentent des écarts de brillance très faibles, impliquant l’emploi d’un développateur générant un gamma plus élevé, afin d’augmenter, dans une large mesure, l’écart des densités du document final. Il faut donc rechercher des révélateurs haut contraste, tels que l’ID 19 d’Ilford ou le D 11 de Kodak.
18Formule de type D 11 :
Hydroquinone | 9g |
Génol | 1g |
Sulfite de soude | 75 g |
Carbonate de soude monohydraté | 30 g |
Bromure de potassium | 5 g |
Eau | Q.S. 1 000 ml |
3.1.3. Fixage de l’image argentique
19Le traitement du phototype se poursuit avec l’intervention du deuxième bain, acide celui-ci, ou bain d’arrêt. Son rôle est de neutraliser l’action du révélateur, dans des délais plus brefs que ne le ferait le fixateur. C’est le plus souvent une solution d’acide acétique à 3%, limitant le pH à 4 environ.
20Les halogénures d’argent résiduels, c’est-à-dire non insolés, sont éliminés au cours de la phase de fixage. Ces sels sont solubles dans l’eau en présence d’hyposulfite de sodium (NaS2O3), agent stabilisateur universellement reconnu. Empiriquement, cette étape est achevée lorsque le temps de fixage est double par rapport à celui mis par le film à devenir transparent, correspondant à la destruction de la couche anti-halo. Les sels rendus solubles s’éliminent aisément au cours du lavage, opération qui achève la phase de traitement chimique du document.
3.1.4. Les conditions de développement
21Au cours de la phase de développement proprement dit, les produits usés doivent être éliminés consécutivement à leur formation afin de favoriser une action homogène du révélateur. Le mode d’agitation mécanique ou par jets gazeux intermittents participe de manière importante à l’optimisation des résultats. Celui-ci doit définir une circulation très irrégulière des produits pour éviter la formation d’ondes stationnaires. On se doit d’observer une séquence identique pour chaque traitement.
22La température du révélateur est fixée avec une précision au 1/10. L’écart ne doit pas excéder 2° C pour les bains suivants de la chaîne de traitement, sous peine de provoquer une réticulation du film, ou gaufrage superficiel de la couche gélatinée, phénomène issu d’une différence de vitesse de dilatation de ce matériau par rapport à celle du support.
23Une température élevée de traitement engendre des conséquences identiques, sur lesquelles viennent se greffer plusieurs autres risques tels qu’une altération rapide du révélateur et une augmentation notable de la densité du voile. Une augmentation de la température suppose une accélération de l’activité chimique et donc des temps de développement trop courts pour assurer une uniformité suffisante des résultats. Pour pallier ces inconvénients, notamment dans les pays chauds, on procède à un durcissement de la gélatine en incluant au développateur, D 76 ou D 11, du sulfate de sodium anhydre à raison de 50 g/l, 100 g/l ou 150 g/l respectivement pour une température n’excédant pas 26° C, 32° C ou 36° C. Malgré l’élévation de température, la durée de développement, pour un gamma équivalent, est sensiblement la même qu’à 20° C. Les bains consécutifs sont également tannants ; l’agent durcissant est l’alun ordinaire ou l’alun de chrome. Dans une certaine mesure, ces traitements préviennent aussi les détériorations, les rayures en particulier, quelquefois générées lors de fréquentes manipulations par des opérateurs indélicats.
3.2. Notions de sensitométrie des émulsions noir et blanc
24Après développement, l’image formée est constituée d’une myriade de grains argentiques, dont la répartition est fonction de la quantité de lumière reçue. Ces concentrations différentielles génèrent l’illusion de demi-teintes s’échelonnant de la transparence maximale au noir le plus profond. Les plages très denses traduisent une luminance élevée du sujet et inversement.
3.2.1. Densité optique
25La densité optique d’un support ainsi traité peut être mesurée. Elle est fonction du rapport du flux lumineux incident Øi sur le flux transmis Øt :

26Ce noircissement est proportionnel, entre autres, à la quantité de lumière ayant frappé l’émulsion photographique et au temps de développement dans un révélateur donné.
3.2.2. La courbe de noircissement
27Les opérations sensitométriques consistent à mesurer les variations d’absorption du phototype testé et à les représenter sous forme de courbes de profil sygmoïdal :

28E étant la lumination, c’est-à-dire le produit de la quantité de lumière reçue par la couche photosensible ou l’éclairement I, par le temps d’exposition t :

29On l’appelle traditionnellement relation de noircissement. Elle rapporte toutes les informations nécessaires à la connaissance du produit, du moins en ce qui concerne le rendu des valeurs : densité, seuil, voile, contraste. On cherche à la réduire à quelques paramètres plus faciles à manipuler.
30En portant en ordonnée la densité D des tests, et en abscisse le logarithme de la lumination, on obtient la courbe de noircissement, appelée aussi courbe caractéristique, soit à éclairement constant et temps variable, soit à temps constant et éclairement variable (fig. 84).

● Fig. 84 – Courbe théorique de noircissement d’une émulsion noir et blanc.
3.2.2.1. La gamme de gris
31Le choix d’un sujet comportant toutes les valeurs de gris, depuis la transparence maximale jusqu’au noir profond, a amené à la fabrication d’une gamme de gris étalon. Elle se présente comme une bande pelliculaire transparente, comportant 21 plages, dont les densités optiques croissant régulièrement s’échelonnent entre 0,15 et 3, avec une progression régulière de 0,15 (gamme Kodak no 3). Cette échelle est mise en contact avec l’émulsion à tester, puis le tout est exposé sous un éclairage uniforme. On règle le temps de pose de manière à obtenir une densité optique juste différenciable du voile de fond, derrière la plage la plus dense de la gamme étalon. Un laps de temps minimal de deux heures doit être observé entre l’insolation et le traitement afin de laisser s’effectuer la régression immédiate de l’image latente. Après développement du film test, les variations des densités sont lues à l’aide d’un densitomètre optique ou à effet photoélectrique.
3.2.2.2. Représentation graphique
32On porte en abscisse les densités mesurées sur l’échelle de référence que l’on convertit en lux, et en ordonnée celles lues à partir de l’émulsion testée. La courbe caractéristique ainsi construite se divise en cinq zones :
le voile de base ou densité minimale (AO-A) ; c’est la densité résultant du développement d’un film vierge, c’est-à-dire non exposé ; il dépend plus particulièrement du temps de révélation et de la température du bain ;
le pied ou le seuil (A-B) ; c’est la région des sous-expositions et la partie de la courbe traduisant les ombres et les détails dans les ombres ;
la partie rectiligne (B-C) ; la densité augmente régulièrement et proportionnellement à la quantité de lumière reçue (Log de It) ; c’est la zone d’exposition correcte ; elle nous renseigne sur les principales caractéristiques du film, notamment sur le contraste, le gamma de développement, la latitude d’exposition ou la sensibilité exacte du film ;
l’épaule (C-D) ; c’est la région des surexpositions ; la pente diminue rapidement jusqu’à devenir nulle ; on obtient alors le noir maximum ;
au-delà, la densité décroît de manière continue ; ce phénomène prend le nom de solarisation ou d’effet Herschel.
33Cette courbe constitue en quelque sorte la fiche signalétique pour un couple révélateur-émulsion donné. A partir de celle-ci on est en mesure de calculer le gamma ou facteur de contraste. Il est représenté par la pente de la partie rectiligne de la courbe ou plus exactement par l’angle formé par cette ligne et son prolongement avec l’axe des abscisses :


34Une reproduction photographique est correcte lorsque le produit du gamma du négatif original par celui de la copie sur support papier est égal à l’unité.
3.2.3. Pratique de la sensitométrie
35Dans les conditions normales de prise de vues et pour des sujets présentant un écart de luminance moyen, les négatifs sont développés à un gamma inférieur à l’unité (de 0,6 à 0,8), afin d’enregistrer toute l’étendue des luminosités. La compensation s’effectue lors du traitement du positif, film ou papier, toujours développé à un gamma supérieur à l’unité. Toutefois, certaines peintures peu différenciables du support lithique nécessitent une accentuation des valeurs chromatiques extrêmes afin d’améliorer leur lecture. Dans cette éventualité, le produit des gammas peut être très nettement supérieur à un et peut, dans certaines circonstances, excéder six, voire dix, pour les motifs très altérés ou diffus.
36Cette valeur est influencée par la qualité de la lumière utilisée pour la prise de vues, le type de révélateur, sa température, la durée du développement et le mode d’agitation du film.
37Les radiations de hautes fréquences, en effet, n’agissent que superficiellement, car elles sont très fortement absorbées. Inversement, les radiations de longueurs d’onde plus grandes produisent une image d’autant plus en profondeur que la bande spectrale prise en compte est décalée vers les infrarouges. Cet effet est renforcé par la présence de colorants sensibilisateurs dont la finalité est d’accentuer la sensibilisation des halogénures d’argent inactifs normalement à un tel rayonnement. Le mode de formation des images des émulsions non chromatisées, orthochromatiques, panchromatiques ou infrarouges diffère quelque peu suivant leur type. Le contraste de la région chromatique est, dans la majorité des cas, plus élevé que celui de la région naturelle. Les tests des émulsions prendront donc en compte la qualité de la lumière ou des filtres positionnés entre la source et le sujet.

3.2.3.1. Mode opératoire
38L’évolution du contraste du phototype est influencée par les caractéristiques du développateur et les facteurs extrinsèques qui s’y rattachent : température et agitation, qu’il est indispensable de fixer afin que seul le temps soit pris en compte.
39En pratique, on stabilise la température à 20° C, avec une précision de l’ordre du dixième de degré, puis on procède à une agitation mécanique ou manuelle afin d’activer la circulation du bain. Au cours de la phase initiale d’immersion des cadres ou des spires de développement, ceux-ci doivent être vigoureusement frappés sur le fond de la cuve, pour éliminer les bulles d’air.
40En fin de traitement, on procède à la lecture des échantillons. Les résultats obtenus sont ensuite transcrits, générant un faisceau de courbes dont chaque élément correspond à un temps de développement donné permettant d’établir la valeur du gamma correspondant (fig. 85).

● Fig. 85 – Faisceau de courbes caractéristiques et traduction de l’évolution du gamma en fonction du temps de développement pour un révélateur et une émulsion noir et blanc donnés.
41Un deuxième graphe met en relation le gamma obtenu en fonction du temps de développement. Par ailleurs, il est important d’estimer l’évolution du « bruit de fond », ou voile, dont les caractéristiques définies sont traitées de manière identique. A partir de ces données il est donc possible de déterminer le temps de développement optimal susceptible de traduire un gamma fixé intentionnellement et répondant aux problèmes posés, qu’ils soient relatifs au contrôle des surfaces sensibles, ou à la restitution correcte de l’image enregistrée.
42Cependant il ne faut pas passer sous silence les perturbations apportées par l’instrumentation utilisée in situ ou en laboratoire, lors de la reproduction fidèle de documents. Les caractéristiques, propres à chaque instrument de relevé et relatives en particulier à la diffusion provenant des réflexions sur les dioptres de l’objectif, sur la monture, le diaphragme, l’obturateur, les parois internes de la chambre photographique ou de l’agrandisseur, et la surface sensible elle-même, entraînent une distorsion dans le rendu des faibles éclairements. Depuis quelques années pourtant, on tend à réduire ce signal parasite par un traitement multicouches des surfaces optiques impliquées, améliorant leur transmittance qui est passée de 66 % à 90 %. Mais ce traitement n’apporte qu’une correction partielle de ce phénomène.
3.2.3.2. Contrôle des produits photosensibles
43Les films noir et blanc développés quotidiennement ne permettent pas de juger de manière suffisante de la qualité et de l’uniformité du traitement. L’objectivité de l’analyse visuelle peut être mise en défaut par des conditions de prises de vues difficilement comparables, avec des sujets très différents d’un site à l’autre, ou d’une paroi à l’autre. Les facteurs influant ont trait aussi bien à l’albédo du support ou de la texture de la roche encaissante, qu’à la nature des pigments d’origine anthropique et à la présence ou non d’un film d’eau à l’interface roche-air. Les variations de brillance traduites par un négatif sont dans la plupart des cas difficilement interprétables. Seule l’analyse sensitométrique permet de détecter une évolution des caractéristiques d’un film ou d’un développateur et de donner les réponses relatives aux corrections à apporter.
44Le développement de bandes de contrôle préexposées (control-strips) permet de définir de façon très précise la qualité effective du processus suivi. Cependant nous préférons confectionner nous-même ces bandes test, car le choix de l’illuminant nous est laissé. Cette démarche autorise aussi l’intégration de paramètres supplémentaires tels que ceux apportés par les filtres. Le matériel d’exposition des sensitogrammes peut dans ces conditions être semblable à celui utilisé pour la prise de vues. Les résultats seront constants, même dans l’éventualité d’une évolution des caractéristiques de la source de lumière et des filtres employés.
45En pratique, et pour garantir une plus grande régularité, l’achat de films se fait par lots importants. Seul un élément de chaque approvisionnement, référencé sous le même numéro d’émulsion que les autres, est testé. L’essai portant sur l’unité prélevée est fractionné sous forme de cinq échantillons que l’on développe avec des temps différents, après exposition sous la gamme étalon. Ils permettent, consécutivement à la lecture au densitomètre, de retrouver la sensibilité effective du film, de connaître le degré d’énergie du révélateur et le taux de régénération qu’il faut lui apporter, de définir l’état du fixateur et la qualité du lavage. En outre, chaque nouveau couple développateur-film est soumis au même traitement, afin de déterminer le temps de développement optimal dicté par le sujet photographié et les conditions d’éclairement sous lesquelles il a été enregistré. Parallèlement, un contrôle chimique des bains, essentiellement le relevé de chaque pH, assure une parfaite régularité de traitement.
46Nous n’hésitons pas à éliminer tout bain défectueux ou susceptible d’avoir été pollué accidentellement, car de cette opération dépend la qualité finale du document et la valorisation d’un travail de relevé souvent réalisé dans des conditions inconfortables (euphémisme).
3.3. Optimisation du contraste
47Le relevé photographique exhaustif d’une image anthropique pariétale suppose un enregistrement optimal de ses données chromatiques. Sans faire appel dans un premier temps à des moyens élaborés tels que le traitement numérique à partir de microdensitomètres ou de caméras linéaires ou matricielles, nous pouvons par la voie chimique affiner notablement les résultats recueillis in situ. Ce n’est que dans des cas limites, ou pour mettre en évidence des phénomènes pariétaux fortement altérés, que les méthodes traditionnelles ne permettent pas d’isoler, que l’on pratique le traitement automatique des images.
3.3.1. Les phototypes monochromes
48Le document original noir et blanc doit présenter une gamme de gris étendue de manière à ce que les valeurs du sujet, des plus claires aux plus denses, soient traduites dans leur intégralité. L’accentuation du contraste n’intervient qu’au moment des opérations de contretypage seulement et non lors du développement du document initial, du moins, lorsque l’on veut favoriser une partie essentiellement de l’information contenue.
3.3.1.1. Principe
49L’augmentation du contraste se résume à accroître l’écart des densités d’une fraction ou de la totalité de la gamme de gris matérialisant le cliché. Sur l’ensemble de l’image, cette valeur n’excède pas 1,5 en règle générale ; mais elle est beaucoup plus réduite lorsque l’on ne considère qu’une partie du document, un tracé anthropique altéré ou un support lithique trop absorbant, abaissant par là même l’indice de lisibilité de la représentation pariétale. Dans cette éventualité, cet écart peut chuter à 0,3 et moins.
50Au cours du tirage des épreuves, une première approche vers l’amélioration de la lecture des motifs enregistrés est rendue possible par l’emploi de papiers durs. Cependant, les très faibles intervalles de densités pris en compte peuvent être en revanche notablement accentués par contretypage du document original sur films à haut contraste destinés traditionnellement aux arts graphiques. Au cours de cette opération les données initiales sont susceptibles d’être multipliées par un facteur 10.
51Le principe de ce procédé peut être résumé ainsi : d’une part, plus le temps de développement de l’émulsion est important et plus petit sera l’intervalle de densité susceptible d’être pris en compte, d’autre part, plus le temps d’exposition est long et plus cet intervalle concernera des densités élevées (fig. 86).

● Fig. 86 – Simulation de l’augmentation du contraste sur film lith.
52Les émulsions appropriées sont disponibles chez la plupart des fabricants et dans un large éventail prenant en. compte aussi bien le degré de contraste que la rapidité ou la chromaticité. On peut citer en outre : Kodalith et Gevalith, pour l’obtention de contrastes très élevés, et Kodelio, émulsion demi-teinte, pour une application plus courante, apportant une réponse satisfaisante à la majorité de nos problèmes. L’échelle de contrastes accessible avec ce produit est très étendue et fonction du développateur utilisé. Cependant, ces films n’étant pas autoréversibles, un contretypage intermédiaire s’avère indispensable. Au cours de cette première phase de la reproduction, réalisée en principe sur une émulsion demi-teinte de type Kodelio, une amélioration notable du contraste peut déjà être apportée. La seconde étape, autorisant le rétablissement du caractère négatif du document initial, s’effectue sur le même type de film ou sur une émulsion lith pour l’obtention de contrastes extrêmes.
53En pratique, nous pourrions opérer de manière empirique, mais les conditions matérielles le permettant, nous préférons étalonner au préalable les films et déterminer ainsi les caractéristiques du couple film-révélateur de manière à obtenir des résultats répétitifs et réduire par là même les délais d’exécution. Au cours des différentes étapes de contretypage une gamme de gris étalon exposée simultanément permet de suivre plus rigoureusement l’évolution de l’image ainsi traitée.
54Cependant, il n’est quelquefois pas opportun d’accéder à des contrastes extrêmes. Dans cette éventualité il est préférable d’utiliser des films noir et blanc inversibles, tels que le Direct Duplicating 4 168 de Kodak par exemple, film orthochromatique initialement limité au contretypage de négatifs ou de positifs demi-teinte et favorisant plutôt l’aspect relatif à la fidélité de la copie par rapport à l’original que l’accentuation importante du contraste. L’intérêt de cette émulsion réside dans le fait qu’elle est auto-positive (fig. 87). Une seule phase dans le procédé de contretypage est de ce fait nécessaire.

● Fig. 87 – Optimisation du contraste sur film autopositif.
3.3.1.2. Application
55Nous proposons en application la représentation d’une main négative appartenant à l’iconographie de la grotte de Gargas, dans les Hautes-Pyrénées. Ce motif peint est exécuté par projection d’un pigment rouge sur la paroi, la main servant de pochoir.
56Des conditions normales de prise de vues et de traitement caractérisent l’élément de comparaison (fig. 88). Le second phototype regroupe en revanche plusieurs éléments améliorant la lisibilité du document (fig. 89). Le sujet fut enregistré sur une émulsion panchromatique. Un filtre Wratten no 12, placé devant l’objectif, accentua la réflexion de la roche encaissante de teinte jaune. Il favorisa, en outre, l’absorption de toutes les radiations bleues issues du flash et auxquelles les émulsions sont toujours très sensibles, quelle que soit leur catégorie. Le cliché, développé dans des conditions normales, à un gamma de 0,85 pour conserver une image plus conforme, fut ensuite contretypé afin d’isoler du support lithique le signal anthropique.

● Fig. 88 – Main négative tracée en rouge, grotte de Gargas, Aventignan. Lumière naturelle.

● Fig. 89 – Le même motif après traitement physico-chimique limité à un accroissement du contraste.
3.3.2. Les phototypes couleur
57Les émulsions inversibles couleur sont, par vocation et après développement, des documents achevés pouvant être observés par transparence. Celles-ci accusent un maximum de densité de l’ordre de 3, pratiquement le double de celui des phototypes négatifs traditionnels. Certaines représentations pariétales révèlent un écart de densité beaucoup plus faible qu’il est alors possible d’augmenter dans des proportions non négligeables afin d’en améliorer la lecture.
58Deux méthodes peuvent intervenir consécutivement à la prise de vues.
59La première consiste à recopier le document original inversible sur un film de classe identique puis de le développer sur une chaîne de traitement pour film négatif couleur. Mais rares sont les laboratoires qui se prêtent à de telles expériences », les produits exsudés par le film ainsi développé pouvant, semble-t-il, polluer les bains successifs et influer sur la qualité des traitements ultérieurs. Néanmoins, il existe des kits de traitement, C 41 ou équivalents, à usage limité à quelques unités, réduisant de ce fait le coût d’exploitation. Il est à remarquer que cette méthode a pour effet d’augmenter dans de fortes proportions la sensibilité du film, au détriment de sa latitude d’exposition.
60La seconde éventualité réside dans le contretypage du document original sur un film inversible couleur pour prise de vues. Le contraste résultant augmente dans des proportions notables, valeur qu’il est possible d’accroître encore par des copies successives : on obtient ainsi un résultat sans demi-teintes intermédiaires. Notons cependant une dépréciation sensible de la résolution, caractéristique en relation avec le nombre de passages effectués ; mais cet artifice dispense cependant d’une mise en service d’une chaîne de traitement spécifique.
61Il existe toutefois des films couleur à haut contraste, utilisables directement à la prise de vues et dont l’approvisionnement n’offre aucune difficulté ; il s’agit du film inversible Ektachrome Photomicrographie, en conditionnement 35 mm, et du film négatif Vericolor II, pour tous formats, émulsions conçues et commercialisées par la société Kodak. Ces produits, comme tous ceux cités dans cet ouvrage, subissent des améliorations constantes, impliquant une réactualisation permanente. Leurs caractéristiques et leur appellation sont susceptibles d’évoluer et ne sont donc mentionnées qu’à titre indicatif.
3.4. Les équidensités
3.4.1. Généralités
62La technique des équidensités consiste à isoler sur l’échelle continue des gris un ou plusieurs intervalles plus ou moins étroits de densité auxquels on attribue une valeur pouvant être traduite par un tramé ou une couleur le différenciant fortement de son environnement immédiat. Cette méthode permet de sélectionner les densités représentatives du sujet et d’atténuer, voire d’éliminer, toutes les autres informations. La transformation d’une image demi-teinte en un document possédant des aplats tramés ou colorés améliore dans une très large mesure la lecture de certains phototypes et favorise ainsi leur interprétation.
3.4.2. Les différents procédés
63Deux méthodes très différentes, de par leur structure, sont susceptibles de fournir des résultats sensiblement équivalents. La première fait appel à une émulsion spéciale, l’Agfacontour, la seconde découle de recherches co-dirigées par la société Kodak et l’Institut de géographie nationale et relatives à l’amélioration de la lecture des prises de vues aériennes. Celle-ci nécessite l’emploi de films arts graphiques de type Gévalith d’Agfa ou Kodalith de Kodak, émulsions dont la principale caractéristique est, comme nous l’avons évoqué au chapitre précédent, de traduire des documents demi-teinte en documents au trait c’est-à-dire sans valeurs de gris intermédiaires.
64En raison de la plus grande facilité d’approvisionnement et du temps de conservation plus important des produits, nous avons opté pour le second procédé, pourtant plus long à mettre en œuvre.
3.4.3. Mode opératoire
65En règle générale, le document original est un négatif ou une diapositive noir et blanc. Cependant on peut aussi opérer à partir d’une image couleur. Dans cette éventualité, le contretype doit nécessairement appartenir à la classe des films panchromatiques. Consécutivement, on procède à des copies successives de ce document initial sur un film à contraste extrême, avec des temps d’exposition différents pour chaque élément traité, mais régulièrement échelonnés. L’écart de densité considéré est subordonné à l’incrémentation donnée au facteur temps. Le tirage d’un document en demi-teinte sur une émulsion lith fournit une image au sein de laquelle toutes les parties claires de l’original, au-dessus d’une certaine densité D, sont traduites par une zone très opaque, et les parties les plus denses par des plages totalement transparentes. On obtient un masque de premier ordre. La limite entre deux zones correspond à la ligne d’équidensité de l’original. En faisant varier le temps d’exposition pour chaque masque, on peut déplacer cette ligne d’équidensité à volonté.
66Soit T le temps d’insolation nécessaire à l’obtention du premier masque, la durée d’exposition proposée pour les contretypes suivants peut être de 2T, 4T, 8T. Une période plus courte a pour effet, au terme du processus, un écart de densité plus étroit et inversement.
67On obtient ainsi un premier jeu de masque : M1, M2, M3 ... (fig. 90).

● Fig. 90 – Gamme de gris et contretypes, M1, M2, M3, réalisés sur film lith avec des temps d’exposition croissants.
68La deuxième phase de l’opération se limite à recopier la série M sur une émulsion lith. Les résultats acquis s’expriment sous la forme d’un second jeu, constitué de contre-masques : C1, C2, C3 (fig. 91).

● Fig. 91 – Contre-masques, C1, C2, C3, des phototypes M1, M2, M3.
69Au cours de l’étape ultime (fig. 92), on superpose avec une très grande précision un des éléments de la première série avec un contremasque, ces deux unités n’appartenant pas au même couple. Pour un repérage fiable, la précaution initiale consiste à pratiquer sur un des bords de chaque plan-film une double perforation avant exposition. Deux ergots d’écartement et de diamètre équivalents assurent par la suite un maintien parfait et sans distorsion de chaque masque ou contremasque insolé. Les plages transparentes résultant de ce montage sont enregistrées soit sur une émulsion noir et blanc, à travers une trame spécifique à chaque gris sélectionné, soit sur un film négatif ou inversible couleur avec des filtrages différentiels. On peut traduire les équidensités obtenues isolément ou sur un même plan-film.

● Fig. 92 – Principe du mode d’obtention des équidensités.
3.4.4. Application
70L’exemple venant à l’appui de nos propos a pour thème un équidé peint (fig. 93), appartenant au bestiaire paléolithique de la salle des Taureaux de Lascaux. L’élaboration de cette figure par l’homme préhistorique nécessita la convergence de plusieurs techniques de dessin. Notre but fut donc d’essayer d’isoler les zones de même densité du motif pariétal pour retrouver les phases successives d’exécution de cette œuvre. Le document original dont est issue cette équidensité est un cliché inversible couleur que l’on a par la suite contretypé sur un film Separatone.

● Fig. 93 - Equidé de la salle des Taureaux, grotte de Lascaux, figure enregistrée avec un éclairage frontal.
71Il est essentiel de mentionner qu’au moment de la prise de vues, l’éclairage fut rigoureusement uniforme sur toute l’étendue de la surface enregistrée, sous peine de faire apparaître, après traitement, les zones sous ou surexposées, traduites dans des densités équivalentes à celles du sujet que l’on désire analyser, ou bien de prendre en compte les ombres projetées.
72Pour une meilleure lecture du document initial ainsi traité, nous l’avons fractionné en autant d’épreuves que nous avions de masques, chaque information essentielle étant traduite par un tramé spécifique, la synthèse apparaissant sous la forme d’un document polychromé.
73Les tracés empâtés par la diffusion des pigments et les superpositions successives d’aplats s’avèrent bien individualisés après cette suite d’interventions. Ce procédé fait ressortir en outre, et de manière très nette, la configuration du naseau, de la lèvre inférieure, de la ganache, de l’oreille et de l’œil en partie cerné par son arcade orbitaire (fig. 94). Ce document reproduit les traits les plus denses de cette représentation, s’identifiant en fait et avec une forte probabilité aux tracés exécutés au crayon, de manganèse certainement. Le document suivant (fig. 95) détermine les limites du dessin de l’encolure résultant d’une projection du pigment sur la paroi. On remarque aussi le tracé subhorizontal et bien individualisé de la ligne dorsale de l’équidé. Enfin, la dernière épreuve met en valeur, d’une part, l’aplat évoquant le flanc droit du cheval et, d’autre part, la diffusion du pigment à la surface de la roche encaissante (fig. 96).

● Fig. 94 – Equidensité prenant en compte les plages les plus denses de l’œuvre, traitement favorisant la lecture des délinéaments tracés au crayon d’oxyde.

● Fig. 95 – Equidensité délimitant les plages obtenues par une application des pigments par un premier soufflage. Est mise en évidence aussi l’amorce de la ligne dorsale de l’équidé.

● Fig. 96 – Mise en valeur des plages teintées par un second soufflage de pigments moins denses car bruns.
74Ce traitement chimique de l’image, qui a l’intérêt de souligner l’impact initial de l’outil préhistorique sur la paroi et du choix de celui-ci, favorise en outre l’énoncé d’hypothèses sur une chronologie raisonnée de l’élaboration de l’œuvre (fig. 97).

● Fig. 97 – Synthèse colorée des trois équidensités.
3.5. Le traitement numérique des images
75Les possibilités offertes par l’analyse assistée par ordinateur sont très étendues et peuvent s’appliquer aussi bien aux clichés noir et blanc que couleur. Elles ont trait à l’amélioration de la lecture des phototypes par lissage, variation du contraste ou correction des distorsions photométriques. Les images peuvent être interprétées en fausses couleurs et en isophotes ou traduites soit partiellement sous la forme de courbes individualisées mettant en relation la densité lue et les données topographiques du cliché, à savoir un axe déterminé au préalable, soit dans leur intégralité en projection cavalière. Il est en outre possible de procéder à une analyse multispectrale par filtrage différentiel.
3.5.1. Principe du traitement automatique
76Les variations d’absorption de la lumière, engendrées par le sujet analysé, sont traduites sur le document argentique par des plages d’opacités plus ou moins importantes. A une forte réflexion du sujet correspond sur le négatif une densité élevée et inversement.
77Le principe d’analyse repose sur le découpage de l’image primitivement continue en autant d’aires, ou pixels (picture element), qu’il sera nécessaire pour obtenir une résolution convenable, souvent 256 x 256. Chaque unité est caractérisée par la valeur moyenne de la densité (z) consécutive à l’absorption et par sa position dans un repère orthonormé, le cliché en l’occurrence, définie par ses coordonnées cartésiennes (x-y).
78La mise en œuvre d’une analyse automatique se scinde en deux étapes, l’une est relative à la lecture du document photographique, l’autre au traitement de l’information proprement dit. Selon l’importance et les capacités d’analyse du matériel susceptible de réaliser ces opérations, le lecteur est soit une caméra à tube cathodique, à barrette ou matricielle, soit un microphotomètre. Ce dernier instrument (fig. 98), actuellement le plus performant, nous a permis de procéder aux premières analyses d’images issues de l’iconographie pariétale préhistorique.

● Fig. 98 – Schéma d’un microphotomètre.
79La première phase de la numérisation, ou digitalisation, nécessite donc l’emploi d’un microphotomètre asservi par ordinateur. Le lecteur est un double système optique, le microscope d’éclairement, formant l’image d’une fente sur l’émulsion photographique et le microscope de projection, placé en opposition et projetant cette image, dont la luminance est modulée par l’émulsion, vers le tube photomultiplicateur. L’émulsion est fixée entre deux plaques de verre montées sur un chariot animé d’un mouvement rectiligne uniforme (x). L’ensemble du bloc optique se déplace perpendiculairement à l’axe précédent (y). La lecture s’effectue donc point par point et ligne par ligne. Le faisceau de lumière résultant, analysé par le tube photomultiplicateur, fournit un signal analogique d’amplitude proportionnelle à l’absorption. La position de chaque point sur l’aire analysée et la valeur du flux lumineux ayant traversé le phototype sont ensuite numérisées et consécutivement transmises à l’ordinateur. Cette seconde phase correspond à l’extraction de l’information.
3.5.2. Limites du procédé
80L’application de cette méthode d’analyse des représentations pariétales peintes a pour but essentiel la séparation de tons, transformation autorisant la ségrégation des pigments rapportés et des matériaux en place.
81La résolution de l’échelle de gris, en 32, 64, 128 ou 256 niveaux, est subordonnée aux conditions de prises de vues. L’éclairage de la plage considérée doit, en effet, être rigoureusement uniforme. Seul un flash annulaire autorise une répartition optimale de la lumière et procure une image plate » totalement dépourvue d’ombres portées.
82Cependant, trois facteurs restent à contrôler, le vignettage des objectifs utilisés pour la prise de vues, la décroissance de l’éclairage du flash, du centre de l’objet vers sa périphérie, et le relief de la paroi, support de l’information anthropique.
83Les deux premiers peuvent être quantifiés d’une manière précise en une seule opération. On procède en laboratoire à la photographie d’un écran uni, de couleur blanche de préférence. La distance séparant le plan sujet et l’appareil doit être sensiblement identique à celle mesurée lors de l’enregistrement in situ du sujet original. L’éclairage annulaire est conservé. Les données issues de la lecture initiale de ce phototype et traduisant les altérations photométriques seront par la suite prises en compte lors du traitement du document principal. Afin d’intégrer les distorsions imputables au développement et en particulier de définir un gamma identique, les deux clichés devront figurer, dans les limites de la séquence des opérations, sur une même pellicule pour être traités simultanément.
84Seule l’amplitude du relief limitera donc la précision de la lecture. En considérant l’éclairage comme ponctuel, nous savons que l’éclairement de la paroi est fonction à la fois de l’intensité lumineuse de la source et de la distance qui la sépare de l’objet :

85Dans l’éventualité d’un support lithique plan et compte tenu des réserves précédemment formulées, l’éclairement est considéré comme uniforme après correction. Il y a variation de cet éclairement lorsque le sujet s’écarte géométriquement du plan entraînant de ce fait un accroissement ou à l’inverse une diminution de la distance lampe-sujet pour chaque point considéré. Du rapport entre l’amplitude maximale du relief (x) et la distance de prise de vues ou recul (d), dépendra la résolution de l’échelle des densités (∆D). Elle est définie par la relation :


86Pour une gamme de gris s’échelonnant de 0 à 3 (fig. 99) :

● Fig. 99 – Diagramme précisant le nombre de niveaux de gris considérés en fonction de l’amplitude du relief (x) et du recul (d) de la source de lumière et de l’appareil de prise de vues par rapport à la paroi.
3.5.3. Lecture analogique linéaire
87On réalise à l’aide d’un microdensitomètre une mesure continue des variations d’absorption d’un cliché, suivant un axe prédéterminé. Une courbe traduit simultanément ces écarts de densités enregistrées.
88L’exemple est tiré de l’enregistrement photographique de l’arrière main du « Cheval renversé », un des motifs les plus représentatifs de la grotte de Lascaux (fig. 100).

● Fig. 100 – Croupe du « cheval renversé », diverticule Axial, grotte de Lascaux. Le trait rectiligne (A-B) barrant l’image à mi-hauteur matérialise la trajectoire du lecteur densitométrique.
89La lecture des variations densitométriques du cliché suivant un axe recoupant les deux postérieurs à hauteur des jambes est reproduite sous l’aspect d’une courbe mettant en relation la position du point sur la ligne et sa densité caractérisant les variations de l’albédo du sujet (fig. 101). La réponse très brutale marquant la transition entre le support et le tracé extérieur des pattes s’oppose à celle plus modulée du tracé intérieur.

● Fig. 101 – Lecture densitométrique transversale, suivant l’axe A-B, des membres postérieurs du « cheval renversé », On observe une dissemblance des parois de chaque puits marquant les variations densitométriques des deux pattes arrière. Cette analyse argumente en faveur de l’utilisation d’un pochoir mobile pour marquer une limite plus nette du tracé extérieur de chaque jambe.
90Cette dissymétrie s’explique par l’emploi d’un pochoir apposé sur la paroi et placé en limite de la face externe et potentielle du contour lors de l’exécution de cette figure. A. Leroi-Gourhan avait pressenti l’utilisation par les artistes paléolithiques de pochoirs mobiles dans l’élaboration de certains motifs pariétaux, cette lecture démontre la véracité de ses propos.
3.5.4. Analyse intégrale de l’image
91L’exemple a pour support la représentation d’une main négative tracée avec un pigment de couleur rouge, certainement un oxyde de fer. Ce motif est tiré de l’iconographie de la grotte de Gargas dans les Hautes-Pyrénées. La finalité du traitement résidait dans l’élimination des signaux parasites, de manière à isoler du contexte lithique naturel le signal anthropique.
92L’analyse de cet enregistrement photographique réalisé sur support inversible couleur fut effectuée au Centre de dépouillement et synthèse des images à Orsay, en collaboration avec A. Marion. Le traitement automatique de l’intégralité de l’image offrait une résolution limitée à 256 x 256 pixels, pour 64 niveaux de gris (fig. 102).

● Fig. 102 – Main négative de la grotte de Gargas, après lissage de l’image.
93A partir de ce document on réalisa un lissage, pour améliorer l’image par diminution du bruit de fond, avant de procéder à une ségrégation chromatique par filtrage différentiel. Les caractéristiques des filtres utilisés, respectivement R, V et B, s’apparentaient à ceux désignés par les nos 92, 93, 94 de Wratten. L’extraction de la teinte rouge matérialisant le témoignage paléolithique fut rendue possible en appliquant aux données obtenues l’algorithme :

94B, V, R représentant les densités optiques de chaque pixel lues sous les filtres correspondants.
95Les contours des plages colorées furent ainsi isolés et l’œuvre pariétale traduite dans son intégralité (fig. 103).

● Fig. 103 – Dissociation de l’image anthropique de son support naturel par traitement d’un document poly-chrome.
96Dans une seconde phase, on tenta, en appliquant l’algorithme inverse, de retrouver l’image monochromatique de la paroi, telle que les artistes du Paléolithique l’ont considérée avant d’apposer leur main sur la roche encaissante (fig. 104). Cette démarche permet de retrouver l’aspect initial du support lithique.

● Fig. 104 – En appliquant l’algorithme inverse, seule la roche encaissante est prise en considération.
97Le fait de provoquer l’abstraction du témoin préhistorique autorise une appréhension optimisée du site et facilite par là même la recherche des caractères particuliers de la roche, reliefs, fissures, concrétionnements, qui sont autant de facteurs susceptibles d’influencer l’homme paléolithique dans son choix sur l’implantation du motif à peindre.
3.6. Conservation et archivage des documents
3.6.1. Conservation des phototypes
98L’exploitation d’une collection de documents photographiques suppose des mesures rigoureuses quant à leur archivage et à leur conservation.
99Cette dernière s’amorce au cours des opérations de développement des émulsions noir et blanc. La phase relative au fixage en effet se scinde en deux étapes afin d’éliminer les halogénures d’argent résiduels. Cette méthode est préférable à un fixage prolongé dans un seul bain lors d’une conservation des phototypes à long terme.
100L’eau de lavage doit être maintenue à une température constante de 20° C pour un pH de 8. La gélatine a la propriété de retenir l’hyposulfite par absorption ; ce phénomène est d’autant plus important que l’acidité du bain de lavage est élevée. Pour s’assurer de l’efficacité de cette opération, un contrôle de la présence ou non d’hyposulfite est indispensable. A l’eau d’égouttage du phototype sont additionnés quelques millimètres cubes de réactif à base de permanganate de potassium :
permanganate de potassium | 1g |
carbonate de sodium | 10 g |
eau | Q.S. 1 000 ml |
101La coloration rose, due à la présence de permanganate, doit persister. Si la solution devient verdâtre, elle dénonce la présence d’hyposulfite.
102Après le bain mouillant, on procède au séchage des films ou des plaques, sous atmosphère filtrée et à température ambiante. Les émulsions conditionnées en bandes telles que les formats 35 mm ou 120 ont tendance à s’incurver sous l’effet d’une température trop élevée, ce qui provoque la formation de franges d’interférence ou anneaux de Newton, phénomène mis en évidence au cours de la projection. Cependant, on peut y remédier en maintenant les phototypes secs sur une surface froide, de marbre ou métallique, dès leur sortie de l’armoire de séchage. Il est possible aussi de les insérer entre deux feuilles de papier chimiquement neutre sous une légère pression, à l’intérieur d’un livre par exemple, et de les maintenir ainsi quelques jours dans cette position pour obtenir une planéité parfaite.
103Les conditions de conservation sont aussi subordonnées au mode de rangement. Chaque cliché est isolé puis placé dans une pochette de papier chimiquement inerte, elle-même rangée à l’abri de la lumière dans un meuble métallique recouvert d’une peinture cuite au four. L’emploi d’un mobilier en bois n’est pas recommandé à cause de la présence quelquefois de peinture, de vernis ou de colles à l’origine d’émanations gazeuses qui ne sont pas d’une totale innocuité pour les documents.
104Les dommages les plus préjudiciables sont provoqués par les agents climatiques. L’humidité ne joue, à cet égard, qu’un rôle secondaire ; elle ne peut qu’accélérer les transformations engendrées par la chaleur. La gélatine est un milieu particulièrement favorable à une prolifération bactérienne ou algale, que ses propriétés hygroscopiques ne font qu’accentuer. Le développement des micro-organismes peut être enrayé en immergeant au préalable l’émulsion dans une solution bactéricide, puis en maintenant l’enceinte de conservation à une température n’excédant pas 15° C, pour une hygrométrie maximale de 50 %, les variations de ces paramètres ne devant pas excéder 5 %.
105L’atmosphère sera régulièrement renouvelée et dépoussiérée, les vapeurs de solvants tels que le benzène, l’alcool, le tétrachlorure de carbone et autres détachants volatils, éliminées. De même les émanations nocives engendrées par l’acide chlorhydrique, acétique, ou l’ammoniaque seront à contrôler et la source à isoler.
106Les altéragènes relatifs aux émulsions couleur sont identiques. La nature des colorants formés par développement chromogène les rend encore plus sensibles aux agents extérieurs. Les conditions de conservation devront donc être respectées de manière beaucoup plus stricte. Elles subissent des variations densitométriques notables, induites par des agents thermohygrométriques, et en particulier le colorant cyan qui se dégrade plus rapidement que les deux autres, magenta et jaune, et ce, quelle que soit l’origine du film. Les émulsions polychromes les plus résistantes aux variations thermo-hygrométriques sont le Cibachrome (support papier uniquement) puis le Kodachrome. La conservation à basse température est certes souhaitable, mais son maintien n’est pas sans quelques difficultés et le passage à -10° C sans inconvénients : coût excessif en énergie, impossibilité de visionner les films sans les ramener extrêmement lentement à une température ambiante afin d’éviter tout choc thermique.
107Si les documents originaux noir et blanc ne sont soumis à la lumière que pour des opérations de tirage, il en est tout autrement des documents inversibles polychromes qui sont quelquefois exposés très longtemps aux lampes halogènes des projecteurs. Dans cette éventualité, il est fortement conseillé de procéder à leur duplication afin de maintenir les originaux à l’abri de toute contrainte, qu’elle soit chimique, climatique ou mécanique. Cette dernière peut se traduire par des empreintes digitales, des griffures du support ou de la gélatine voire même des enlèvements. Cette inopportunité peut intervenir au cours du transport ou de manipulations intempestives telles que le renversement d’un panier de diapositives par exemple.
3.6.2. Archivage
108La recherche d’un document implique la nécessité de recourir à une numérotation que nous avons voulue simple et dont l’incrémentation se réfère à l’ordre d’entrée des phototypes.

109Seule une rubrique d’affectation est quelquefois liée à cette identification, mais elle ne possède aucune valeur chronologique :

110Accompagnant le tirage 7,3 x 10 cm du phototype considéré, nous avons établi parallèlement une fiche au format A5 (fig. 105), définissant chaque document et sur laquelle sont portées non seulement les caractéristiques intrinsèques du cliché, format, nature, mais aussi les conditions de prise de vues, la focale de l’objectif utilisé, la distance par rapport au sujet, la longueur de la base dans l’éventualité d’un stéréogramme, la nature de la lumière et du filtrage, ainsi que les modalités du traitement, le type de révélateur et le gamma. Viennent ensuite compléter ce descriptif les indications relatives à l’auteur du cliché et à sa date de réalisation. Les phototypes conservés n’étant pas de qualité équivalente, une case est consacrée à cet effet. Le degré d’élaboration s’échelonne de 0 à 5. L’origine de l’altération de l’image engendrant sa dépréciation est précisée à la rubrique : observations.

● Fig. 105 – Fiche analytique des phototypes originaux.
111L’identification du sujet se fonde sur sa description très succincte, rappelant le thème abordé, la facture du motif et sa teinte, dans l’éventualité bien sûr d’un décor peint. Chaque motif pariétal possède une cote à quatre codes, dans les limites de l’avancement de l’inventaire général du décor paléolithique entrepris sur le territoire national :

112Le site d’élaboration de l’œuvre est mentionné, ainsi que la commune et le département.
113Chaque entrée de document est consignée sur un catalogue chronologique reprenant les données précédemment évoquées sous forme d’un tableau classique, à deux entrées et sur quinze colonnes.
3.6.3. Informatisation des données
114Après avoir défini la cote de chaque phototype et celle des thèmes pariétaux, puis élaboré une fiche descriptive et ouvert un catalogue chronologique ou d’entrée, la masse importante d’informations, alliée à la nécessité d’une mise à jour périodique et à celle d’une sélection sur profil, impliqua une gestion informatisée de la photothèque. Cependant, toutes les données précédemment citées ne sont pas enregistrées sur support magnétique, car elles n’offrent aucun intérêt dans la recherche des clichés.
115Le système documentaire utilisé est un progiciel multifichier relationnel autorisant une recherche multicritère. Sont consignées essentiellement les données relatives au domaine souterrain et issues aussi bien des enregistrements photographiques, topographiques et géographiques, que des références administratives et bibliographiques. Ces différentes disciplines sont regroupées au sein de quatre fichiers (fig. 106), la liaison entre eux étant réalisée par l’intermédiaire de la cote du site concerné, complétée éventuellement par l’identification numérique de l’œuvre.

● Fig. 106 – Modèle organisationnel des données photographiques, topographiques, bibliographiques et thématiques.
116La recherche du document photographique peut être soumise jusqu’à concurrence de onze descripteurs, associant les caractéristiques du phototype, format, type de film, cadrage et qualité du cliché, à celles du motif pariétal, thème, facture et teinte, et des données topographiques, nom du site, secteur d’élaboration du motif et orientation de la paroi ; la cote de la représentation pouvant aussi intervenir.
3.7. La restitution graphique
117Les moyens optiques et physico-chimiques mis en œuvre pour répondre aux impératifs de l’analyse des documents photographiques reflètent la volonté d’introduire en laboratoire l’image paléolithique et son support, afin d’en extraire successivement les données morphologiques et chromatiques.
3.7.1. Objet de la restitution graphique
118Il est manifeste qu’à certains stades du traitement du phototype, qu’il soit manuel ou automatique, le relevé peut être considéré comme achevé. Mais certaines figures nécessitent une reprise graphique, telles que les gravures, les représentations sculptées ou les tracés digités.
119Outre l’intérêt cartographique du relevé, aspect déjà évoqué, la restitution graphique poursuit un double but. D’une part, elle permet de mieux appréhender le sujet ; au cours de cette étape, en effet, chaque détail, même le plus ténu, est observé puis consigné. D’autre part, elle rend plus explicite le tracé paléolithique qui, dans de nombreuses circonstances est très discret ou passablement altéré. Cette opération implique un matériel susceptible de permettre une lecture précise des informations recueillies in situ afin de traduire clairement l’image enregistrée.
120Nous avons fait nôtre la méthode de reproduction des images mise en pratique, entre autres, dans les ateliers de publicité ou les bureaux d’étude d’architectes. Elle repose sur le principe du retour inverse de la lumière. A cet effet, le document transparent initial, ou plus judicieusement sa copie, est introduit dans une lanterne autorisant la projection de l’image soit sur un écran plat soit sur un dépoli.
121Les conditions plus strictes que nous nous sommes imposées conduisirent à améliorer ce procédé en modifiant quelque peu le principe de base et en sélectionnant un matériel plus performant. Nous avons pensé qu’il était plus aisé de suivre les contours du tracé paléolithique et celui des formations naturelles lorsque ceux-ci sont observés par transmission plutôt que par réflexion. Dans le second cas, la main et le crayon de l’opérateur masquent le sujet et son dessin, surtout au centre de l’image.
3.7.2. Qualité du support
122Les qualités du support devant recevoir manuellement les informations essentielles répondent aux problèmes posés par le principe même du procédé, à savoir un excellent pouvoir de transmission de l’image et une stabilité dimensionnelle élevée. De surcroît, il est important que ces caractéristiques soient en accord avec les impératifs conservatoires, c’est-à-dire une insensibilité aux variations hygrométriques et thermiques et une adhérence satisfaisante des encres.
123Les films utilisés dans la reproduction d’œuvres pariétales sont tous d’origine organique et donc susceptibles d’oxydation, altéragène provoquant une dégradation des propriétés physiques et en particulier celle du comportement mécanique. L’oxydation est consécutive à une élévation de température ou à une exposition trop prolongée à un rayonnement très énergétique tel que les radiations ultraviolettes, en relation avec une présence d’air ou d’oxygène. Ce phénomène implique une dépréciation des propriétés mécaniques de ces matériaux entraînant une résistance plus faible à la rupture ou au déchirement.
124Nous avons volontairement écarté les supports à base de papier comme les calques ordinaires qui deviennent rapidement très cassants avec le temps, au profit des films en matériaux de synthèse. Les acétates de cellulose, cellophane, kodatrace, rhodoïd, sont encore relativement instables. Les produits vinyliques, tels que l’astralon ou le vinylite, et les polystyrènes, comme le rhodolène, sont toutefois plus fiables. Mais les supports les moins sujets aux variations climatiques ou aux effets du temps sont encore les polyesters tels que le cronar, le mylar ou l’estar. Notons enfin qu’en plus des qualités déjà citées, ils rendent possible la rectification des erreurs par grattage.
125Les conditions de conservation optimales et à long terme de ces documents s’apparentent à celles des films noir et blanc, c’est-à-dire une obscurité totale, une température de 13 °C et une hygrométrie limitée à 50 %. Les variations de ces paramètres ne doivent pas excéder 5 %. On peut améliorer leurs conditions de conservation en les conservant en suspension ou à plat, plutôt que pliés.
3.7.3. Principe du mode de restitution
126Dans la pratique, le film polyester est amené au contact d’une glace sans tain servant de support. Le projecteur placé à l’arrière de ce plan vertical est muni d’un objectif orthoscopique à diaphragme autorisant la modulation de l’intensité lumineuse. Le document à analyser est monté entre deux lames de verre garantissant une parfaite planéité.
127Le plan image et le plan objet doivent être rigoureusement parallèles. A cet effet, on projette un réticule sur un miroir disposé contre le plan modèle. Celui-ci renvoit l’image sur un écran annulaire blanc, placé contre la partie frontale de l’objectif. Le parallélisme des plans est rigoureusement respecté lorsque l’image projetée du réticule se superpose à celle du motif correspondant tracé sur la cible (fig. 107).

● Fig. 107 – Méthode d’alignement des axes optiques.
128A ce stade de notre démarche intervient la notion d’échelle de la reproduction graphique. Les conditions d’accès aux parois et donc aux sujets, les impératifs conservatoires et le procédé d’enregistrement, induit par notre volonté d’apparenter les proportions du relevé à celles observées par l’œil et donc de conserver une perspective conique frontale, sont autant d’éléments qui amenèrent à définir l’échelle à partir des données propres au système d’enregistrement et de restitution et non par rapport aux cotes prises directement sur le motif original. Le grandissement intégrant les deux phases du relevé, prise de vues et restitution, est lié, d’une part, aux distances focales, f et F, des objectifs utilisés et, d’autre part, à l’intervalle qui sépare chaque appareil, d’enregistrement d, et de projection D, de leurs plans tableaux respectifs, objet et analyse.
129Le rapport de reproduction final E est défini par la relation :

F : distance focale de l’objectif de projection
f : distance focale de l’objectif de prise de vues
D : distance de projection.
d : distance de prise de vues
130Au cours de la prise de vues, le choix de l’angle de champ est dicté à la fois par les proportions du sujet, par l’amplitude de son relief et par la configuration de son site d’implantation. En revanche, la restitution implique des contraintes moindres, car les documents en présence sont plans, tandis que l’écart compris entre le phototype projeté et le plan de reproduction peut varier dans une large mesure et avec une très grande précision. Nous sommes donc conduits à définir cette distance fixée en fonction du rapport :

131Une mauvaise appréciation du relief peut dans certains cas trahir les résultats. Pour pallier cette éventualité, la représentation spatiale du sujet a été envisagée. Chaque relevé photographique soumis à une restitution graphique est accompagné d’un stéréogramme. L’observation des deux épreuves conjuguées, au format 18 x 24 cm, et situées dans un même plan, fait appel à un stéréoscope à miroirs. La possibilité d’y faire référence à chaque instant permet de rectifier la plupart du temps les erreurs d’interprétation.
132Le positionnement par ce procédé de tous les éléments pariétaux enregistrés n’est qu’une première étape dans la restitution graphique. Aussi élaboré qu’il soit, celui-ci ne peut prétendre à l’exhaustivité et ne peut donc produire un relevé achevé du moins dans la très grande majorité des cas traités. Seules de multiples confrontations avec l’original apportent les ultimes informations nécessaires à une reproduction du sujet tendant vers la perfection, sans pour autant accéder au relevé définitif, bien évidemment ; mais était-il essentiel de le préciser ?
133Le fait que la quantité d’informations retenues au cours de l’opération initiale de copie graphique soit toujours nettement plus élevée que celle apportée ultérieurement par les corrections et les additions réalisées sur le site, nous a incité à concevoir ce premier document comme l’élément fondamental vers lequel convergent les remarques secondaires. Cette méthode a pour effet d’éliminer les transferts successifs des dessins maintes fois retouchés, générateurs bien souvent d’erreurs d’interprétation ou de lissage des tracés. Seules les copies de ce document ainsi traité sont introduites sous terre pour satisfaire aux exigences du contrôle.
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Campements mésolithiques en Bresse jurassienne
Choisey et Ruffey-sur-Seille
Frédéric Séara, Sylvain Rotillon et Christophe Cupillard (dir.)
2002
Productions agricoles, stockage et finage en Montagne Noire médiévale
Le grenier castral de Durfort (Tarn)
Marie-Pierre Ruas
2002