1 Le siège s’inscrit dans le cadre du conflit bosniaque. Pour plus de contextualisation, voir Gallagher (2003).
2 Voir Burns (1992) et Wellburn (2002).
3 Le roman de Galloway figure dans la liste de Monroe et al. (2014) de romans traitant de l’humanité en temps de guerre ; Banita (2010) place Galloway dans un ensemble plus large de littérature canadienne sur la Bosnie ; Forrest (2011) signale que le texte de Galloway s’inspire de Smailović mais se sert aussi, de manière très discutable, du roman comme source historique concernant l’Adagio d’Albinoni.
4 Correspondance privée. En 1992, Brabant a interviewé Smailović et enregistré sa performance, dont on peut entendre des extraits dans Lunt (2014).
5 La postface indique : « J’ai été obligé de condenser sur un peu moins d’un mois une durée de trois ans. J’espère toutefois que l’esprit de l’ouvrage est fidèle à la réalité historique » (Galloway 2009 : 295).
6 Flèche est également inspirée par une personne réelle : « Le nom de Flèche vient d’une émission documentaire de Radio Denmark intitulée Sniper. Pour ce programme l’on avait interviewé une femme sniper surnommée Flèche (Strijela), sur laquelle d’ailleurs l’on ne donnait que peu d’informations. J’ai essayé sans succès de la retrouver. […] Quoi qu’il en soit, le personnage de Flèche dans le roman est de mon invention » (Galloway 2009 : 296).
7 Pour préciser le concept de fiction « musicalisée », Wolf écrit que « l’intégration de la musique dans la littérature sous forme de “récit” explicite ou de thématisation n’est pas en soi un mécanisme de musicalisation » (Wolf 1999 : 231-232).
8 Ceci se distingue du « roman-musique » de Smyth (2008), qui a une portée beaucoup plus large.
9 J’ai identifié un certain nombre de romans musico-littéraires. Benson (2006) et Smith (2016) ont analysé An Equal Music (Seth 1999), qui correspond à ma définition. On peut également mentionner Do Not Say We Have Nothing (Thien 2016), Orfeo (Powers 2014), The Noise of Time (Barnes 2017), pour ne citer que quelques exemples.
10 Pour un aperçu plus large, voir Bergh et Sloboda (2010), qui passent en revue les avancées de la recherche sur le rôle de la musique et de l’art dans la transformation des conflits jusqu’en 2010.
11 Je me concentre sur la relation entre le son et les sens. Voir Pinch et Bijsterveld (2011) pour une étude plus approfondie de la sensualité du son.
12 Ce chapitre est traduit par Zachary Weiss, à l’exception des extraits du roman de Steven Galloway, issus de la traduction française du roman, réalisée par André Zavriew et publiée en 2009 aux éditions Lattès.
13 Il est presque impossible de faire abstraction des ressemblances entre les premières lignes de Galloway et celles de Gravity’s Rainbow (Pynchon 2013), publié pour la première fois en 1973, bien que le roman de Pynchon ne soit pas explicitement nommé dans celui de Galloway : « Un cri traverse le ciel. C’est arrivé par le passé, mais rien ne s’y compare aujourd’hui » (p. 3). Le roman de Pynchon évoque le décalage entre la vision et le bruit d’une fusée : « Il ne l’entendra pas arriver. Elle se déplace plus vite que la vitesse du son. Son explosion en est le premier signe. Et puis, si on est toujours là, on en entend le bruit » (Pynchon 2013 : 8).
14 La description par Galloway du violoncelliste guidant l’archet sur la « gorge » du violoncelle est un élément frappant de violence érotique – expression qui ne sera pas reprise à l’égard du violoncelliste ou de la musique ; peut-être que cette première et dernière description violente du violoncelle marque le point où le vacarme se transforme en musique. D’un point de vue pratique, il est difficile de savoir où se situerait la « gorge » d’un violoncelle, mais il est possible que Galloway prolonge la métaphore du « col » du violoncelle pour faire du chevalet, là où l'archet devrait être, sa « gorge ».
15 Frith (1996) souligne que, souvent, on ne fait pas la distinction entre la musique et l’expérience musicale : « nous entendons la musique comme étant authentique (ou plutôt, nous décrivons les expériences musicales que nous apprécions en termes d’authenticité) et cette réaction est ensuite renvoyée, fallacieusement, au processus de création (ou d’écoute) de la musique » (Frith 1996 : 121).
16 Le pouvoir est ici compris comme un potentiel : plus précisément, dans ce contexte, le potentiel de changement positif dans un contexte de conflit. Pour une présentation approfondie des différentes façons de définir, théoriser et conceptualiser le « pouvoir », voir Hearn (2012).
17 Sur l’écoute active et le rôle de l’auditeur, voir Evans (1990) ; DeNora (2000) ; Born (2005).
18 On peut constater la popularité de ce morceau par son inclusion dans de multiples bandes sonores de films, dont Gallipoli (Weir 2001) et Manchester by the Sea (Lonergan 2017).
19 Rappelons qu’il ne faut pas confondre le raisonnement fictionnel de Galloway au sujet de l’interprétation délibérée de l’Adagio d’Albinoni par le violoncelliste avec celui de Smailović, pour qui l’expérience était plus spontanée et émotionnelle : « À un moment donné, je [Smailović] me suis rendu compte que la musique, qui jaillissait de moi comme mes larmes, était l’Adagio d’Albinoni […], la musique la plus triste, la plus triste que je connaisse » (Smailović et Sands 1999).
20 Dans une optique similaire, Petermann (2014) examine comment la légende de la composition des Variations Goldberg de Bach a servi de modèle thématique et structurel dans certains romans.
21 Concernant la critique et la défense de Walzer, voir Orend (2000a, 2000b) ; Parsons (2012) ; Nardin (2013).
22 Voir Nardin (2013) pour une discussion sur l’œuvre de Walzer en tant qu’argument politique plutôt que philosophique.
23 Dans Robertson (2010), le nom de la chorale est remplacé par Most Duša pour préserver sa confidentialité, mais dans Robertson (2016), elle est identifiée comme la chorale Pontanima.
24 Voir DeNora (2000 : 20, 146).
25 La répétition est liée au concept de « civilisation » dans le roman de Galloway, comme l’illustre cette citation. La répétition, comme la performance répétée du violoncelliste, procure de la stabilité, et donc de l’espoir, d’où le constat de Dragan que la civilisation doit être « recréée quotidiennement ». Il illustre le résultat concret de sa nouvelle résolution quelques pages plus tard : « Il passe à côté d’un homme âgé et il sourit. L’homme ne croise pas son regard, garde les yeux fixés au sol. “Bon après-midi”, lui dit Dragan d’une voix sonore. L’homme relève la tête. Il semble surpris. “Bon après-midi”, répète Dragan. Un signe de tête, puis l’homme sourit et lui en souhaite autant » (Galloway 2009 : 287).
26 Voir DeNora (2000 : 65-66).
27 L’argument principal de Frith concerne le moi en devenir : « En résumé, mon raisonnement repose sur deux postulats : premièrement, l’identité est en mouvement, c’est un processus et non un objet ; un devenir, et non un être ; deuxièmement, notre expérience de la musique – de la création et de l’écoute de la musique – se conçoit plus justement comme une expérience de ce soi en devenir » (Frith 1996 : 109).
28 Pour une réflexion sur la capacité empathique potentielle de la musique dans les conflits et une définition pratique de l’empathie dans ce contexte, voir Laurence (2008).
29 Voir également DeNora (2000 : 45-47).
30 Frith peut avancer ceci car « si l’identité musicale est […] toujours fantastique, idéalisant non seulement le soi mais aussi le monde social que l’on habite, elle est, par ailleurs, toujours réelle également, incarnée dans les activités musicales. Autrement dit, faire et écouter de la musique est une affaire de corps » (Frith 1996 : 123).