L’archéologie et les sciences de la cognition
p. 11-31
Texte intégral

Fig. 1 – Les grandes époques de l’humanité.
1Les rapports entre l’archéologie et les sciences de la cognition ne sont pas du domaine de l’évidence, en particulier en France : bien d’autres disciplines, comme la psychologie ou la linguistique, semblent entretenir avec elles des liens plus naturels et donc plus étroits. Les relations avec l’archéologie existent pourtant depuis longtemps et le premier objectif de ce livre sera de les présenter, en retraçant leur évolution sur le dernier demi-siècle. Les acquis des recherches menées à l’intersection seront présentés ensuite : on évoquera successivement l’émergence des capacités cognitives chez l’homme, la reconstruction qui peut être proposée aujourd’hui des activités techniques du passé, la reconstitution des mentalités des populations disparues.
2Nous avons tenu à inclure dans ce panorama la recherche sur les modes de communication, du langage aux langues et aux écritures. Elle n’a pas été traitée jusqu’ici dans la présente collection. Mais surtout il n’était guère concevable de ne pas l’aborder dans un ouvrage consacré à l’archéologie : celle-ci met en effet au jour des documents écrits de toute nature, elle se pose régulièrement la question des langues parlées par les populations dont elle découvre les vestiges, elle s’interroge enfin, dans sa dimension préhistorique, sur l’apparition du langage. L’étude des moyens de communication fait ainsi partie intégrante des contributions que l’archéologie est susceptible d’apporter à l’histoire cognitive de l’espèce humaine.
3Il restera ensuite à aborder, à propos des mentalités, les moyens de reconstituer la perception que les groupes humains ont pu avoir de leur univers naturel et culturel, les moyens donc de retrouver les processus qui ont présidé à leurs choix et à leurs décisions. Les difficultés d’une archéologie de la pensée seront évidemment signalées à ce propos et l’on essaiera enfin d’indiquer quelques perspectives possibles pour des développements futurs.
4Les auteurs ont été sollicités pour leurs compétences et pour la cohérence qu’ils pouvaient assurer à l’ouvrage, mais pas nécessairement pour leur identité de vues : nous avons préféré laisser s’exprimer la diversité des problématiques et des approches. Nous n’avons pas essayé non plus de minimiser les interrogations ou les impasses qui, dans un domaine comme l’archéologie, ne doivent pas être sous-estimées.
De la cognition sans le savoir
5Les recherches sur la pensée humaine, par le biais de l’archéologie, sont bien antérieures au développement des sciences cognitives. Outre quelles sont inhérentes par nature à toute la recherche préhistorique qui, depuis les origines, se préoccupe, même si cela n’est pas toujours apparent, de l’homme par-delà l’outil, il ne faut pas oublier qu’elles ont plus précisément inspiré d’éminents archéologues et conduit depuis longtemps à des résultats tangibles.
6L’étude de l’art et des religions préhistoriques, qui a acquis droit de cité au début du xxe siècle grâce à l’abbé Breuil, n’a guère fait autre chose que chercher à reconstituer des mentalités disparues ; toutes les spéculations auxquelles elle a pu donner lieu jusqu’à aujourd’hui ont poursuivi le même but. L’étude des industries elle-même, par-delà son caractère souvent très technique, est sous-tendue par de constantes considérations sur la pensée, les intentions, les préoccupations qui ont pu guider les tailleurs de pierre paléolithiques. La dimension cognitive, cependant, reste le plus souvent implicite.
7C’est en 1946 que Henri et Henriette Frankfort, introduisant un ensemble de recherches sur l’Égypte, la Mésopotamie et les Hébreux, rappellent que la pensée « ancienne », n’étant pas limitée comme la nôtre par la science, laissait un champ immense à la spéculation et qu’en outre, pour elle, le monde naturel n’était ni séparé ni même distingué de celui des hommes (Frankfort et al., 1946)1. Amplifiant le propos dans la conclusion de l’ouvrage, ils soulignent que la pensée «primitive» ne connaît pas de monde inanimé, mais qu’au contraire, pour elle, le monde naturel est plein de vie et que toute vie a son individualité. Ce que nous appelons la mythologie et considérons comme une forme de la pensée « primitive » est pour celle-ci une vérité, qui rend compte d’une part de la création du monde et des hommes, d’autre part de la cosmologie et des divinités. Pour cette mentalité, la plupart des distinctions fondamentales qui informent la pensée moderne – subjectivité/objectivité, réalité/apparence, mort/vie, symbole/être ou chose, rite/acte – n’ont aucune pertinence. Il s’ensuit que la notion de causalité est dans la pensée « primitive » différente de ce qu’elle est pour nous (tout pouvant être cause de tout) et qu’il en va de même de la notion d’espace et de celle de temps. Il y a là un ensemble d’observations dont la pertinence mérite d’être rappelée.
8En 1956, Gordon Childe affiche son intérêt pour la formation des connaissances et pose que les artefacts sont des expressions concrètes et des incarnations de la pensée, qu’ils représentent des intentions (Childe, 1956). Ce n’est pas une révélation à proprement parler, mais c’est déjà ce à quoi l’on aboutira couramment après 25 ans d’archéologie cognitive.
Sciences de la cognition et archéologie : un historique
9Les sciences de la cognition sont dans leur premier demi-siècle. Ce qu’on a appelé la révolution cognitive et qu’on a pu qualifier de « développement le plus important de ces cinquante dernières années dans les sciences humaines » (Sperber & Droit, 1999) est apparu, pour l’essentiel, après la seconde guerre mondiale et s’est développé surtout à partir de 1975, en particulier aux États-Unis.
10Successivement centrées sur les modèles informatiques et l’intelligence artificielle, puis sur la psychologie et la linguistique, enfin sur les neurosciences, les sciences de la cognition ont paru se stabiliser vers 1978 selon une liste « classique » des disciplines concernées : philosophie, intelligence artificielle, psychologie, linguistique, neurosciences, anthropologie.
11Dès les années 1980, cependant, elles ont débordé sur d’autres sciences concernées de près ou de loin par la connaissance et l’on a vu se constituer, dans un contexte où la pluridisciplinarité était de plus en plus pratiquée, un champ cognitique dans ces sciences mêmes. Il ne s’est pas réellement agi de la naissance de nouvelles disciplines, mais d’une « focalisation de diverses disciplines autour d’une même notion », autour de « l’étude et la modélisation des structures et des processus mentaux » (Sabah, 2000 : 28-29). L’idée commune est de « chercher à élucider les mécanismes de la pensée, de la formation des connaissances dans les organismes vivants, et dans les systèmes artificiels2 ».
12Aujourd’hui, l’élargissement a gagné pratiquement l’ensemble des sciences sociales. L’avantage est qu’il est plus difficile à une théorie ou à une discipline donnée de prétendre pouvoir dévoiler à elle seule tous les aspects de la cognition. L’inconvénient, qui est aussi un défi, est qu’il est devenu plus difficile de construire un objet pour les sciences cognitives.
13Un autre élargissement, en effet, se produit presque simultanément. Au-delà des connaissances au sens strict, on s’intéresse de plus en plus à la pensée en général. Au-delà des structures mentales et des langages symboliques, on s’intéresse aussi aux conditions (et aux mécanismes) de la pensée. Au-delà de la pensée proprement dite, on s’intéresse enfin aux émotions et à la motricité. Un accord se dessine finalement « sur le fait que le cerveau est un organe vivant, que la pensée est tributaire d’un corps et que celui-ci est plongé dans un environnement social » (Dortier, 2001-2002 : 14). Accord sans aucun doute raisonnable, mais d’une banalité peu prometteuse...
14La rencontre avec l’archéologie était à la fois inévitable et improbable. L’archéologie, on le rappelle plus souvent qu’on le pratique, s’occupe de « l’Indien derrière le pot », de l’esprit derrière l’artefact. Mais cette rencontre s’est faite de façon difficile et marginale et elle n’en est encore qu’à ses débuts. Et de toute façon l’archéologie a beaucoup de mal à atteindre les processus mentaux, puisqu’elle ne peut le faire qu’à travers des vestiges matériels.
15L’anthropologie américaine a connu immédiatement, c’est-à-dire dès les années 1970-1975, l’impact des sciences cognitives. En dehors d’américanistes comme Kent Flannery et Joyce Marcus qui se sont référés dès ce moment aux sciences de la cognition, ou encore de Donald Preziosi qui a tenté de retrouver les systèmes de proportions employés par les Minoens dans leur architecture (Preziosi, 1983), c’est surtout Walter Fairservis, spécialiste de l’Inde, qui a le premier formulé une vision de l’histoire humaine inspirée de la psychologie de l’enfant de Jean Piaget (Fairservis, 1975) ; à travers les exemples archéologiques de Terra Amata (Paléolithique inférieur), Dolní Věstonice (Paléolithique supérieur) et Çatal Hüyük (Néolithique ancien), qui venaient alors d’être révélés au monde, il retrace en termes d’étapes cognitives les progrès de l’humanité depuis les origines de la pensée jusqu’au seuil de la civilisation. Cette idée d’une ascension vers la culture symbolique et vers la conscience se plaque de toute évidence sur un évolutionnisme plutôt classique. Quoi qu’il en soit, cette tentative reste isolée et largement méconnue.
16Bien que la fin des modèles ait été, comme dans les autres sciences cognitives, plus d’une fois proclamée, trois approches de l’archéologie cognitive ont été élaborées, qui se sont transformées inévitablement, mais sans nécessité profonde, en autant d’écoles de pensée. L’une, qui a occupé presque seule le devant de la scène sous la bannière de Colin Renfrew, s’est placée dans le sillage de l’archéologie traditionnelle, puis de la New Archaeology rebaptisée « processuelle » pour avoir mis l’accent sur les processus, la démarche ou si l’on veut la méthode, de la discipline ; elle se qualifie elle-même de « positiviste »3. L’autre, développée par Ian Hodder en opposition avec la précédente, peut être qualifiée de relativiste. La troisième, incarnée par Jean-Claude Gardin, se définit elle-même comme logiciste.
L’approche « positiviste » (l’archéologie de la pensée)
17C’est en effet Renfrew qui réussit le premier là où Fairservis avait échoué. Tour à tour porte-drapeau de l’archéologie sociale, puis de l’archéologie « processuelle », il se fait, dès sa nomination à Cambridge (1982), le chantre de l’archéologie cognitive (Renfrew, 1982). Déjà convaincu qu’une archéologie sociale est possible, il se déclare persuadé maintenant qu’une archéologie de la pensée (archaeology of mind) l’est aussi et il suggère d’emblée plusieurs domaines qui lui semblent prometteurs dans cette perspective : la mesure de l’espace (cf. les systèmes de poids et de mesures, en particulier le système de poids de Mohenjo-Daro dans la civilisation de l’Indus) ; l’idéologie religieuse, plus difficile à atteindre (cf. le sanctuaire mycénien de Phylakopi à Mélos) ; la planification volontaire (cf. « l’urbanisme » de Mohenjo-Daro) ; les représentations ; enfin les symboles (cf. les parures personnelles étudiées par Hodder). Il perçoit bien les dangers symétriques qui menacent une telle discipline et qui sont d’un côté le jargon prétentieux, de l’autre l’abus des évidences, le retour aux banalités les mieux établies. Il attire également l’attention sur la nécessité de ne pas seulement traiter les phénomènes culturels comme des touts (« l’invention de l’agriculture ») et de s’intéresser aussi à leur évolution, au détail de leur évolution, au cours des périodes qui suivent leur apparition. Ces deux derniers points, essentiels, resteront pourtant lettre morte par la suite.
18En 1990, Colin Renfrew et Ezra Zubrow organisent à Cambridge un colloque intitulé « L’esprit ancien », qui est publié en 1994 (Renfrew & Zubrow, 1994). Conçu comme une étape fondatrice, il ne cache pas ses ambitions « révolutionnaires ». Se démarquant de l’approche relativiste récemment défendue par Hodder, aussi bien que de l’approche logiciste prônée par Jean-Claude Gardin et Christopher Peebles, il s’inscrit dans la tradition scientifique et la méthodologie empirique ; on recherche les techniques à emprunter aux sciences cognitives, aux mathématiques et à l’informatique pour enrichir la démarche de l’archéologie. Ce courant n’a en commun avec les deux autres que de prendre au sérieux le champ de l’archéologie cognitive, que Lewis Binford avait osé qualifier de « paléopsychologie ». En réalité, la « guerre cognitive » fait rage entre le camp des « relativistes », dirigé par Hodder, et celui des « positivistes », emmenés par Renfrew. Les polémiques enflent et toute une rhétorique manichéenne, qui oppose artificiellement des points de vue en réalité plutôt complémentaires, tient lieu d’argumentation.
19Renfrew définit une seconde fois l’archéologie cognitive comme « l’étude des modes de pensée anciens tels qu’on peut les inférer des vestiges matériels ». L’objectif n’est pas nouveau, mais il est désormais affiché et explicite. C’est en cela que l’archéologie cognitive s’inscrit dans la suite de l’archéologie « processuelle », pour constituer désormais ce qu’il appelle l’archéologie « cognitive-processuelle ». Son but principal est d’étudier la capacité de l’homme à élaborer et à utiliser des symboles, étant entendu que l’ensemble du comportement humain est de nature symbolique (à la différence de celui des animaux, qui n’atteignent pas ce stade). Ces symboles appartiennent à une série de six domaines, dont la liste est alors proposée : conception, planification, mesure, relations sociales, surnaturel, représentations. Zubrow, pour sa part, estime que l’archéologie cognitive n’est qu’un champ plutôt vague, qui étudie les capacités mentales et leurs traductions matérielles, mais il ajoute très prudemment qu’elle inclut aussi l’étude des processus cognitifs qui influencent la pensée des archéologues eux-mêmes (reflexive archaeology, « archéologie réflexive ») : suggestion d’une évidence absolue, mais aussitôt négligée.
20Le bilan, cependant, reste maigre. Quelques travaux préliminaires (Nathan Schlanger, Claudine Karlin et Michèle Julien) apportent un éclairage nouveau sur l’outillage lithique paléolithique, tout en témoignant d’une timide intervention de préhistoriens français dans le domaine ; d’autres (Sander van der Leeuw) commencent à éclairer efficacement la fabrication de la poterie, tandis que la question des écritures fait son apparition. Les croyances fournissent à Chris Scarre l’occasion d’une ferme mise en garde sur ce que l’on peut espérer tirer des pratiques funéraires en l’absence de textes. D’autres contributions, portant sur les symboles et la religion, restent peu convaincantes, entachées qu’elles sont de pétitions de principe ou d’anachronismes.
21Presque en même temps, le Cambridge Archaeological Journal, nouvellement créé, affirme sa vocation d’être la tribune de l’archéologie cognitive. Il publie en effet en 1993 un point de vue collectif intitulé « Qu’est-ce que l’archéologie cognitive ? » (Renfrew et al, 1993) et propose d’emblée une réponse apparemment fort œcuménique : « c’est la partie de l’archéologie qui traite des concepts et des perceptions » – ce second terme, évidemment essentiel, étant promis à un oubli immédiat. Mais il traduit aussitôt par « tout le spectre du comportement humain », tout en ajoutant une référence spéciale aux domaines des religions et des croyances, du symbolisme et de l’iconographie, du devenir et de l’expression de la conscience humaine. Bref, un flou qui paraît constitutif de l’archéologie cognitive elle-même et qui autorise en tout cas bien des différences.
22Renfrew, principal artisan de l’entreprise, réaffirme son programme de 1982, plaide pour une archéologie cognitive et « post-processuelle », qui ne doit se couper ni des acquis du passé ni du reste de la discipline, mais doit se caractériser, comme l’archéologie « processuelle », par la formulation explicite de ses démarches. Parmi les champs possibles d’une telle archéologie, il mentionne, pour la préhistoire ancienne, l’outillage et le langage ; pour les périodes plus récentes, la sédentarisation, les techniques du métal, la religion, la formation des États, l’agriculture ; il insiste sur le domaine des symboles, qui pourrait aussi bien justifier le terme d’archéologie du symbolique (symbolic archaeology) et qui possède depuis 1990 un périmètre déjà tracé. L’archéologie cognitive, on le voit donc, est à géométrie éminemment variable.
23C’est précisément ce que relèvent, dans la même publication, Kent Flannery et Joyce Marcus. Pour eux, l’archéologie cognitive n’a jamais été définie et le terme a servi à désigner n’importe quoi, en particulier des travaux brillants, mais superficiels, ou même des balivernes. Soucieux de lui donner des contours mieux établis, ils en excluent l’archéologie du site et de la subsistance (subsistence-settlement archaeology), dont les tenants, adeptes en général de la New Archaeology, sont de toute façon sceptiques à son égard. Ils la restreignent donc à l’étude de tous les aspects des civilisations du passé qui sont le produit de l’esprit humain, comme la cosmologie, la religion, l’idéologie et l’iconographie. Ils reconnaissent que l’entreprise est difficile dans la mesure où elle s’appuie essentiellement sur des témoins matériels, mais ils l’estiment cependant possible.
24En 1996, un autre colloque, toujours à Cambridge, marque la volonté des organisateurs de relier l’archéologie cognitive à d’autres sciences cognitives comme la psychologie et surtout de lui donner un contenu plus substantiel. L’accent est alors mis sur les moyens de conserver et de transmettre l’information (Renfrew & Scarre, 1998). L’écriture est évidemment le premier de ces moyens, mais on préfère ici s’intéresser aux sociétés sans écriture, où existent pourtant d’autres formes d’archivage symbolique (d’où l’expression déroutante de symbolic storage, qui figure dans le titre des actes). De fait, plusieurs contributions s’intéressent de manière approfondie aux marques et à l’art rupestre paléolithiques, à la religion, aux pratiques funéraires chinoises, aux représentations de l’espace. L’intervention du célèbre psychologue Merlin Donald n’éclaire guère l’évolution humaine, mais l’idée que le matériel peut à son tour influer sur le mental est pour la première fois suggérée par les organisateurs.
25Le colloque de 2003 (« repenser la matérialité ») reprend cette dernière idée et se propose d’explorer les traductions matérielles de la pensée, « l’engagement » de l’esprit dans le monde matériel (DeMarrais, Gosden & Renfrew, 2004). Le nouveau postulat, présenté comme allant de soi, est maintenant que le concept ne préexiste pas à sa matérialisation, comme on avait pu le penser jusque-là, mais que les deux vont de pair et qu’en outre les émotions interviennent aussi dans le processus. Mais les exemples présentés sont de moins en moins nombreux et peu convaincants : l’un porte sur l’architecture néolithique en Anatolie, l’autre sur les mégalithes.
26Faute peut-être de s’être aventuré lui-même dans une recherche cognitive, faute aussi d’avoir incité d’autres à s’y lancer, Renfrew reste finalement bien seul. La répétition, les effets rhétoriques ont pris le dessus et la pensée, potentiellement riche et diverse, s’est notablement appauvrie. L’un de ses épigones, en effet, n’hésite pas à affirmer que, malgré Descartes, les « humains agissent et pensent à travers la culture matérielle » ou encore que « l’archéologie aurait toujours dû être cognitive» (Knappett, 2005 : 170). Ces lapalissades, pour lesquelles Childe avait eu quelques excuses en 1956, ne peuvent que renforcer l’impression, assez largement répandue, que l’archéologie cognitive n’est guère allée au-delà des déclarations ronflantes, des vœux pieux et des théories hasardeuses. La révolution annoncée aurait-elle accouché d’une souris ?
L’approche relativiste
27Très tôt, l’approche « positiviste » a suscité des dissidences et des réactions. Dès les années 1990-1995, leur violence a conduit à parler, on l’a dit plus haut, d’une véritable « guerre cognitive ». L’enjeu est en effet d’y croire ou de ne pas y croire.
28Pour Hodder (in Renfrew et al., 1993), en particulier, le scepticisme est de mise, essentiellement parce que la cognition est toujours sociale, jamais individuelle. L’approche cognitive se justifie bien, certes, puisqu’elle a pour objet d’étudier d’une part les processus apparentés au langage (langues, écritures, symboles), de l’autre les pratiques de tous ordres, enfin la pensée des archéologues eux-mêmes, influencée qu’elle est par les thèmes à la mode (critiques de la démarche supposée scientifique, féminisme, revendications indigénistes...).
29Mais la pensée des archéologues est déterminante dans la présentation du passé et l’on ne peut donc pas, dans ces conditions, espérer atteindre une vision objective de ce passé, mais seulement des visions partielles, variables et subjectives. Comme les archéologues en outre se servent de leur discours pour affirmer leur «pouvoir» sur le passé, le relativisme s’impose. L’archéologie cognitive ne peut donc être ni une science, ni un art (neither science nor art), tout au plus un exercice littéraire.
30Ce courant de pensée ne mérite probablement pas tous les qualificatifs – antiscientifique, « interprétationniste », littéraire... – que Renfrew et ses partisans lui ont hâtivement décernés. Il ne mérite pas forcément non plus les qualificatifs plus flatteurs – postmoderne, humaniste, structuraliste – qu’il s’est attribués sans excès de modestie.
31Il est en effet relativiste, mais il n’est que cela. Se plaçant délibérément, et par définition, en dehors de toute vérification, il n’a pu donner lieu qu’à des applications localisées et intransportables, sur les sites où travaillent ses tenants. C’est ainsi qu’à Çatal Hüyük (Anatolie), où travaille Hodder lui-même, celui-ci a pu présenter, l’une à côté de l’autre, les images possibles du site, différentes selon la personne qui les produit (Hodder, 2000). Le résultat est intéressant et pourrait être stimulant. Mais la juxtaposition pure et simple des points de vue, considérés comme tous également légitimes (ce que nul ne conteste) et également efficaces (ce qui doit être au contraire vigoureusement contesté), ne fait qu’illustrer des phénomènes bien connus et déjà amplement analysés dans d’autres cadres. En l’absence de comparaisons, de hiérarchisations et de perspectives historiographiques, cet exercice de plurivocalité ou d’ethnologie des archéologues reste vain. Ce relativisme absolu s’oppose frontalement au « positivisme » de Renfrew, mais il ne fait que cela : il ne répond à un excès que par l’excès inverse. L’un affirme qu’on peut faire une archéologie de la pensée, l’autre qu’on ne peut rien faire, puisqu’on peut dire tout et son contraire... On tâchera de montrer ci-dessous qu’il existe des façons moins simplistes de construire et d’évaluer des hypothèses.
L’approche logiciste
32La troisième approche, qui tente une « nouvelle synthèse », est inspirée de la sémiotique. Défendue par Jean-Claude Gardin et Christopher Peebles, elle prend la suite des travaux de Mario Borillo (Borillo, 1978) et d’autres, centrés à l’origine sur les applications des mathématiques en archéologie, et emprunte beaucoup aux méthodes logicistes et informatiques.
33Dès 1979, en effet, Gardin avait publié, sous le titre Une archéologie théorique (Gardin, 1979), un ouvrage fondateur sur l’analyse logiciste du discours archéologique. Mais c’est en 1987 qu’il dirige un ouvrage collectif sur les systèmes experts en archéologie (Gardin et al., 1987). S’appuyant sur sa critique antérieure du langage « naturel » et de la logique « naturelle » qui s’incarnent dans le discours archéologique courant, il montre ce qu’un système de reconnaissance logiquement et explicitement construit permet d’obtenir, même si les limites en sont visibles et les incidences sur le savoir présentement limitées. Il réunit ainsi six exemples archéologiques portant sur des problèmes divers et des aires géographiques et historiques différentes. Cette démarche, qui se rattache aux premiers développements de l’intelligence artificielle, paraît alors plus prometteuse que les nombreuses méthodes de traitement informatisé du matériel qui ont fleuri auparavant, mais se sont révélées peu concluantes. Cette étape, en tout cas, ouvre la voie, malgré son caractère encore simplificateur, à toute une série de développements qui vont suivre, en particulier en France, et qui vont porter sur le raisonnement archéologique lui-même.
34En 1992, Cardin et Peebles publient les actes d’un colloque portant sur les représentations en archéologie (Cardin & Peebles, 1992). C’est pour eux l’occasion de mettre en lumière les fondements et les limites de l’interprétation dans cette discipline, mais aussi de proposer à la fois des exemples d’approches symboliques et structurelles, en particulier sur le Néolithique du Proche-Orient, et des exemples d’analyses formelles (architecture, poterie, mesure). Pour Gardin, les premiers sont productifs, mais moins vérifiables, tandis que les derniers sont limités, mais plus sérieux. L’idée récurrente du point de vue cognitif est qu’il faut s’intéresser aussi à nos modes de pensée, pas seulement à ceux des sociétés du passé. C’est là un point de convergence, au moins superficiel, avec Hodder.
35Pour Peebles (in Renfrew et al., 1993), il s’agit de s’intéresser d’une part à ce que les œuvres du passé nous révèlent de leurs auteurs et de leurs capacités cognitives, de l’autre aux connaissances qu’ils ont pu développer pour affronter le monde culturel et le monde naturel.
36En 1991, François Djindjian avait publié, avec une préface de Gardin, un ouvrage général proposant des méthodes pour l’archéologie (Djindjian, 1991). C’était en fait, dans une perspective très classique (de la prospection à... l’étude du climat, etc.), un panorama raisonné et raisonnable des méthodes quantitatives, en particulier statistiques et informatiques, qui peuvent être utiles en archéologie. Le mot cognition n’y figurait pas. Mais l’ouvrage a reflété et amplifié une tendance qui n’a fait depuis lors que s’accentuer : l’utilisation de plus en plus courante de méthodes statistiques et informatiques en archéologie. Une fois dépassées quelques illusions initiales, cette approche s’est en tout cas révélée riche et féconde : elle a rapidement infléchi la pratique archéologique et produit nombre de travaux novateurs. Elle n’a cependant pas modifié en profondeur les modes de raisonnement pratiqués dans la discipline.
L’impact de l’informatique
37Les archéologues ont, dans leur immense majorité, adopté avec enthousiasme les technologies liées à l’informatique. Il serait vain de tenter de dresser ici un panorama des applications qui ont vu le jour ou qui sont à l’étude dans ce domaine, car il serait instantanément dépassé : l’évolution est presque aussi rapide que celle de l’informatique elle-même et les possibilités sont littéralement infinies. Mais les conséquences de cette situation ne se font pas toutes sentir sur le même plan.
38Beaucoup d’applications de l’informatique concernent les techniques d’enregistrement topographique, la cartographie des trouvailles, le traitement du mobilier, l’enregistrement photographique et graphique des objets, le traitement de texte et l’édition des publications. Elles apportent là en premier lieu une facilité et une précision qui ont littéralement changé la vie des archéologues en quelques années.
39Elles ont en même temps rendu possibles des recherches croisées dont on aurait à peine osé rêver il y a quelques dizaines d’années. C’est en particulier le travail pionnier de Jean-Claude Gardin sur les marchands assyriens en Cappadoce, étudiés par Paul Garelli, qui dès 1961 a montré les possibilités qu’offraient les ordinateurs pour croiser un vaste ensemble de données épigraphiques et en tirer des enseignements historiques (Garelli & Gardin, 1961). Elles ont été appliquées, en particulier, par François Djindjian, à l’analyse des habitats et à celle des remontages d’outils préhistoriques (Djindjian, 1997). En protohistoire, elles ont été utilisées dans de nombreux cas, notamment par François Giligny (Giligny, 2005). Elles ont permis enfin d’élaborer des systèmes experts qui facilitent l’identification, le classement et la datation de séries d’objets.
40Ces mêmes applications, de par leurs exigences ou leur seul fonctionnement, ont demandé aux archéologues un effort de rigueur nouveau. Le simple principe du fichier, quels que soient son contenu et sa finalité, oblige en effet à une rigueur logique dont on ne peut plus faire l’économie : l’informatique ne tolère pas l’à-peu-près. Ainsi a vu le jour une série de codes d’analyse et de description consacrés aux outils (Deshayes, 1960), aux décors des vases grecs (Salomé, 1998), aux poteries en général (Gardin, 1976), aux ornements (Gardin, 1978), aux textes orientaux (Salomé et al., 1978), qui ont servi de guides à nombre d’archéologues, avant d’ouvrir la voie à leur propre dépassement. Ainsi sont apparues des publications de fouilles d’un genre nouveau, où un catalogue en ligne du mobilier complète la publication classique tout en ouvrant de nouvelles possibilités de traitement des données (Pinçon, 2009).
41Mais c’est toujours l’homme qui programme la machine et, à cet égard, l’utilisation de méthodes sophistiquées ne garantit pas la pertinence de la démarche. Un certain nombre d’études, en effet, plaquent des méthodes très nouvelles sur un mode de pensée trop peu critique. Or l’objectif de l’archéologie ne peut pas être seulement de traiter des catégories de données bien connues, il doit être aussi d’identifier celles qui posent des problèmes. Et là, il restera toujours deux possibilités : reprendre sans discussion des catégories empruntées à la tradition ou faire porter la recherche sur la définition même des catégories, c’est-à-dire, d’abord, des fonctions elles-mêmes des objets. C’est le point sur lequel de toute évidence achoppent aujourd’hui certaines démarches et sur lequel il sera donc essentiel de faire porter l’effort dans l’avenir.
L’archéologie cognitive aujourd’hui
42Indépendamment des proclamations initiales et des divergences entre écoles, l’archéologie cognitive, vue à travers ses réalisations, se présente aujourd’hui beaucoup plus comme une série de questions disparates qui se posent à la croisée des disciplines que comme une branche particulière de l’archéologie. Elle paraît en fait constituée de deux ensembles à la fois distincts entre eux et largement indépendants des autres sciences.
43Un premier ensemble s’est constitué autour de la préhistoire. On s’est attaché à étudier les habiletés, les apprentissages, les perceptions et, en général, la pensée d’une part des premiers homininés, de l’autre des Néandertaliens et de l’homme moderne. Les outils et les techniques, l’habitat, les sépultures, les réalisations esthétiques ont fourni les données de base. Deux colloques récents témoignent de la vitalité et de la complémentarité de ces orientations. Le premier, tenu en 2001 (Roux & Bril, 2005), traite de la question des compétences nécessaires à la taille de la pierre et fait abondamment appel à la primatologie. Le second, organisé en 2006 (Beaune, Coolidge & Wynn, 2009), aborde plus largement la question de l’émergence des capacités cognitives et envisage une confrontation entre les données de l’archéologie et celles des neurosciences.
44On trouvera un large écho de ces recherches dans la suite de ce livre, où Sophie de Beaune, Valentine Roux, Nicole Pigeot et François Sigaut présentent les travaux faits dans cet esprit et/ou dans ce domaine. En France, la fondation Fyssen, qui s’est donné pour but d’encourager le développement des sciences cognitives, finance régulièrement des recherches en anthropologie4 et en archéologie ; ces dernières, cependant, n’ont parfois qu’un rapport un peu vague avec les sciences en question.
45Un second ensemble s’est constitué autour de l’utilisation des méthodes statistiques, de l’informatique et des technologies de la communication. C’est celui où se situent les travaux, dont on a parlé plus haut, de Gardin et de Djindjian. Ils ont joué un rôle important dans l’évolution des modes de pensée des archéologues, mais nettement moins dans l’étude des processus cognitifs du passé. Cette question si cruciale du rôle de l’archéologue sera abordée plus bas, en fait, à propos des écueils qui guettent sa démarche.
46Mais l’archéologie cognitive ne peut pas se limiter à ces deux champs. Il faut d’abord, nous l’avons dit, lui adjoindre l’étude des modes de communication : c’est ce que tentent de faire, ci-dessous, les chapitres consacrés à l’origine du langage (Bernard Victorri), à celle des langues (René Treuil), à l’indo-européen (Jean-Paul Demoule) et aux écritures (Jean-Jacques Glassner).
47Il faut aussi la réintégrer dans l’histoire et faire en même temps le pari de son élargissement. L’aventure humaine n’est pas faite que d’inventions ou d’innovations explicables par un niveau d’évolution défini du cerveau. Elle s’inscrit dans la géographie, dans l’histoire et dans des sphères culturelles concrètes. L’archéologie cognitive, de par ses origines et son contexte intellectuel, a pu superbement ignorer l’histoire, comme le fait d’ailleurs une grande partie de l’archéologie états-unienne5 et cambridgienne, et l’on est souvent surpris de la désinvolture avec laquelle elle saute à l’universel, sans éprouver le besoin de situer ses affirmations dans un cadre donné. Mais – et l’on épargnera au lecteur la démonstration de cette évidence – le retour à l’histoire s’impose absolument.
48Il s’impose d’autant plus que c’est le seul moyen d’aller plus loin, non seulement en réintroduisant dans le champ le Néolithique et toutes les périodes postérieures, qui jusqu’ici ont surtout brillé par leur absence dans l’archéologie cognitive, mais surtout en allant au-delà des problèmes habituels que sont les genèses, les inventions, les innovations, bref les origines. Ces problèmes d’origine sont en effet souvent insolubles ou mal posés. Il faut aussi décomposer les concepts les plus démesurés et par là vides de sens – l’invention de l’agriculture, la néolithisation... – et s’intéresser aux événements particuliers, divers et multiples, à travers lesquels ils s’inscrivent dans l’histoire réelle : c’est à la fois l’étude des faits par lesquels se matérialisent les tendances, selon la formule de Leroi-Gourhan, c’est celle du détail de l’évolution selon Renfrew, c’est celle des traits culturels selon l’auteur de ces lignes. Il s’agit donc alors d’étudier les démarches que l’esprit met en œuvre dans ces événements. Mais il s’agit aussi, et ce sera nouveau, d’étudier les démarches qui ne relèvent pas de la connaissance objective au sens où nous l’entendons, mais restent subjectives et ethniquement enracinées : on devrait, en d’autres termes, se soucier moins des connaissances que l’homme en général a acquises, par exemple sur la culture des plantes, et plus des approches particulières qu’il a développées en société pour les penser et les maîtriser. Il faudrait donc reprendre l’étude des mentalités en testant les hypothèses de Frankfort. Il faudrait ainsi réintégrer l’ethnobotanique, l’ethnomédecine, l’ethnozoologie et toutes les disciplines comparables dans une archéologie cognitive où elles ont par définition leur place. Or ce sont là des domaines où presque tout reste à faire alors qu’une documentation existe au moins dans une partie des cas.
49Il faut s’intéresser également aux perceptions, aux émotions et aux processus de décision qui leur sont souvent liés. Cela correspond à l’évolution récente des sciences cognitives. Mais c’est surtout une autre voie pour retrouver des cheminements de pensée qui ne sont par définition pas rationnels, mais qui appartiennent tout autant que les autres à la pensée humaine. On n’a pas le droit, en tout cas, de les exclure du champ scientifique de l’archéologie cognitive.
Questions en suspens
50Un tel élargissement pourrait aider à résoudre, entre autres, deux problèmes difficiles, mais importants, que l’archéologie cognitive n’a pas pu réellement éclairer jusqu’ici.
51Le premier est celui de l’organisation de l’esprit. La théorie de la modularité, due au psychologue Jerry Fodor (Fodor, 1983), a été reprise et popularisée très tôt en archéologie par Steven Mithen (Mithen, 1990). Selon Fodor, en plus d’un système central, l’esprit humain serait composé, dans ses systèmes de perception au moins (vision, audition...), de modules relativement indépendants les uns des autres, aptes à remplir des tâches spécifiques ou à gérer des domaines du comportement. Mithen, sans esquisser la moindre justification, en a déduit que l’évolution s’est probablement faite, dans l’espèce humaine, d’une organisation modulaire vers une organisation intégrée. Mais l’évolution récente des connaissances sur le cerveau, qui révèle de plus en plus la plasticité synaptique de cet organe, propose aujourd’hui un modèle plus vraisemblable. L’archéologie cependant n’est pas encore en mesure d’apporter des éléments précis susceptibles d’éclairer cette question (Beaune, infra).
52Le second problème est celui de la préexistence du concept. Après avoir cru, comme beaucoup, que l’idée d’un objet précédait sa réalisation, les archéologues préoccupés par la cognition sont plutôt enclins aujourd’hui à affirmer que les deux vont de pair et que l’idée n’est pas forcément antérieure à l’objet. Quoi qu’on puisse penser de cette formulation, qui ressemble à une synthèse commode, l’archéologie devrait être en mesure – pourvu qu’on ne la fasse pas parler avant d’avoir fait des recherches – d’apporter des éléments de réponse et, qui sait ?, de distinguer des processus différents : ceux où l’idée d’une fonction (un vase à boire...) guide de bout en bout la réalisation de l’objet, ceux plus rares où les aléas de la réalisation suggèrent une modification imprévue, ceux enfin où la fonction prévue (parure, décoration, jeu, rituel...) n’implique pas nécessairement une forme prédéterminée (Beaune, 2008).
Bibliographie
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Notes de bas de page
1 On notera, à la p. 4 de leur livre, ce qui est probablement la première attestation du mot cognition en archéologie. L’ouvrage s’inscrit évidemment dans une longue tradition philosophique et sociologique, qui va au moins de Lewis Morgan à Marcel Mauss : cf., par exemple, Lévy-Bruhl, 1931.
2 Sperber, Libération, 14 octobre 1999 : IX.
3 Ce terme, que nous mettons entre guillemets pour le distinguer de son acception philosophique, désigne simplement ici une archéologie qui croit possible d’étudier des faits de pensée en partant de vestiges matériels.
4 L’anthropologie, étude de l’homme dans ses dimensions biologique et sociale, comprend l’ethnologie, ou anthropologie culturelle, et s’intéresse le plus souvent à des sociétés vivantes ; elle s’inscrit naturellement par principe parmi les objectifs idéaux de l’archéologie, mais celle-ci n’a à sa disposition que des vestiges matériels et, pour les périodes les plus récentes, des textes.
5 Pour les États-Unis, Christopher Peebles, qui déplore aussi ce divorce, l’explique par le sentiment, partagé par nombre d’archéologues, que l’archéologie est une science et donc quelle est incompatible avec une discipline humaniste, narrative et subjective, comme l’histoire (Gardin & Peebles, 1992 : 357-358). Ajoutons que cette vision est favorisée par la nature de beaucoup de vestiges qui s’offrent à l’archéologie de ce pays.
Auteur
René Treuil (archéologie), professeur émérite à l’université de Paris-I – Panthéon-Sorbonne, archéologie et sciences de l’Antiquité, Maison de l’archéologie et de l’ethnologie (Nanterre).
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Informatique et sciences cognitives
Influences ou confluence ?
Catherine Garbay et Daniel Kayser (dir.)
2011