L’aristocratie des affaires en Europe
p. 369-383
Texte intégral
1Le XXe siècle est à maints égards le siècle du grand patronat. Sa prééminence sur les autres groupes dirigeants des sociétés industrielles est devenue indiscutable. Par le niveau de fortune, d’abord et surtout, mais également par l’éducation, le style de vie, les relations sociales. Le rôle croissant joué par les performances économiques – au plan macro-économique comme au niveau des entreprises – pour juger de la « réussite » ou de l’« échec » d’une nation leur confère en outre une responsabilité et un prestige accrus. Les élites patronales occupent donc une place prépondérante parmi les nouvelles aristocraties du XXe siècle qui constituent l’objet de ce volume.
2L’objectif de ce chapitre est triple. En premier lieu, on s’efforcera d’identifier l’aristocratie des affaires dans les trois principales économies européennes du XXe siècle : l’Angleterre, la France et l’Allemagne. On se demandera notamment dans quelle mesure les notions de « dirigeants patronaux » et d’« aristocratie des affaires » sont interchangeables. Le second objectif est de cerner les principales caractéristiques de ce groupe, en particulier le degré d’exclusivité des critères d’appartenance et les relations entretenues avec les autres élites sociales, en premier lieu les anciennes aristocraties. Le troisième objectif, enfin, est de tirer parti de l’analyse comparative. Non seulement pour mieux faire ressortir les spécificités nationales, mais également pour s’interroger sur l’existence possible d’une hiérarchie internationale des aristocraties d’affaires et ses incidences sur l’évolution de la structure des classes supérieures en Angleterre, France et Allemagne au XXe siècle.
GRANDE ENTREPRISE ET ARISTOCRATIE DES AFFAIRES
3La grande entreprise est le point de départ obligé de toute approche de l’aristocratie des affaires au XXe siècle. Seule une grande entreprise confère à son ou ses dirigeants ce mélange de pouvoir économique, de prestige social et d’influence politique qui assure leur position au sommet de la hiérarchie sociale (Cassis 1996). Les seules exceptions, avant 1914, concernent la haute banque, c’est-à-dire les maisons de banque privée les plus prestigieuses de Londres, Paris, Berlin, Hambourg, Francfort ou Cologne, engagées dans les grandes affaires financières internationales. Fortune et prestige social compensent ici une position économique déclinante, encore qu’il ne faille pas sous-estimer leurs liens avec les grandes entreprises, à travers les sièges que détiennent leurs associés aux conseils d’administration des grandes banques, compagnies d’assurances, chemins de fer et autres entreprises coloniales (Cassis 1991). Définir l’aristocratie des affaires exige donc préalablement une définition de la grande entreprise. Sans entrer ici dans des considérations techniques, il importe de distinguer entre grandes entreprises et entreprises moyennes, voire moyennes-grandes. La plupart des auteurs tendent à se baser sur la liste des 200, 100 ou 50 plus grandes entreprises du pays1. La méthode est commode, mais ne garantit guère que ce sont toutes de grandes entreprises. On peut avoir peu de doutes au sujet des 50 plus grandes pour des économies de la taille de l’Angleterre, de la France ou de l’Allemagne, encore que Maurice Lévy-Leboyer ait eu la sagesse de ne prendre en considération que les 40 plus grandes entreprises en 1912 pour son analyse du grand patronat français (Lévy-Leboyer 1979).
4Jusqu’aux années 1960, les sociétés européennes classées du 50e au 100e rang étaient loin d’être toutes de grandes entreprises. La plupart de celles classées entre le 100e et le 200e rang étaient au mieux des entreprises moyennes. Le contraste avec les États-Unis est ici frappant : en 1917, 280 sociétés industrielles américaines avaient un total de bilan égal ou supérieur à 20 millions de dollars2 (100 millions de francs), contre 24 seulement en Allemagne en 19133, le pays européen considéré en général comme le plus proche du modèle américain. L’écart s’était à peine atténué 60 ans plus tard : en 1972, 60 entreprises britanniques, 38 entreprises allemandes et 29 entreprises françaises avaient un chiffre d’affaires égal ou supérieur à 400 millions de dollars, soit le minimum pour être inclus dans la liste des 300 plus grandes entreprises américaines4. On objectera que la taille d’une entreprise est également une donnée relative, qui doit être considérée dans un cadre national : on peut être un « grand patron » français même si l’entreprise que l’on dirige n’est pas de dimensions américaines. C’est vrai. Les 50, 100 ou même 200 plus grandes entreprises d’un pays donné ont avant tout une valeur symbolique, et à ce titre, une élite patronale nationale est bien constituée par les dirigeants de ces entreprises. Il reste que la comparaison internationale permet de rétablir un certain équilibre, de mieux distinguer entre entreprises géantes, grandes entreprises et entreprises moyennes, et par là entre aristocratie des affaires, grand patronat et patronat.
5L’aristocratie des affaires constitue donc un groupe « select », celui des dirigeants d’entreprises véritablement « grandes ». Le choix d’un critère est nécessairement quelque peu arbitraire et doit être adapté aux conditions nationales. Néanmoins, l’aristocratie des affaires ne pesait pas du même poids dans l’économie et la société en Angleterre, en France et en Allemagne, trois pays européens de taille comparable. L’Angleterre, par exemple, a toujours compté un nombre plus élevé de grandes entreprises et de maisons de haute banque que la France et l’Allemagne5. De même, l’aristocratie des affaires française et allemande reste dominée par la banque et l’industrie lourde durant la première partie du siècle, alors qu’elle est très tôt diversifiée et marquée par des clivages internes plus nets en Grande-Bretagne. Les différences se résorbent cependant après 1945 pour disparaître quasi complètement dans le dernier tiers du XXe siècle (Cassis 1997).
HIÉRARCHIE PROFESSIONNELLE ET ARISTOCRATIE DES AFFAIRES
6À partir de quel niveau hiérarchique un dirigeant de grande entreprise appartient-il à l’aristocratie des affaires ? La présidence ? Le conseil d’administration ? La direction générale ? Limiter le groupe aux seuls présidents se justifie pour le dernier tiers du siècle, en raison de l’augmentation considérable du nombre de grandes entreprises et de la tendance toujours plus marquée à identifier l’entreprise à son principal dirigeant. De nombreuses études sociologiques récentes se sont d’ailleurs concentrées sur les « numéros un » (Bourdieu, de Saint Martin 1978 ; Bauer, Bertin-Mourot 1995 ; Stanworth, Giddens 1971). La définition est un peu restrictive pour les périodes précédentes, où les grandes entreprises forment un groupe relativement restreint et où le président n’est souvent qu’un primus inter pares peu engagé dans la direction active des affaires. On peut cependant les considérer comme formant une « élite au sein de l’élite » (Stanworth, Giddens 1971). Ce d’autant plus que l’élargissement à l’ensemble des membres du conseil d’administration, dont une forte proportion appartient encore aux familles fondatrices, pose le problème inverse, celui d’une trop grande dilution de la notion d’aristocratie des affaires.
7Le statut des directeurs salariés pose un problème plus complexe. La plupart des questions relatives à la « révolution managériale » et à la séparation entre propriété et gestion de l’entreprise sont aujourd’hui réglées. Propriétaires et managers appartiennent au même monde patronal, gèrent de la même façon leur entreprise, entretiennent le même type de relations avec leurs employés. La question de leur appartenance à l’aristocratie des affaires n’est pourtant pas du même ordre, à moins de se limiter à une définition professionnelle de cette aristocratie – excellence technique, performances, modèle pour la profession, champion national et autres. Malgré leur importance dans un milieu qui se veut avant tout performant, ces facteurs sont à eux seuls insuffisants. L’aristocratie des affaires se définit en termes de statut à la fois social et professionnel.
8La situation a évolué au cours du siècle, en fonction du degré d’acceptabilité du professionnalisme au sein des classes supérieures. Dans ce domaine, l’Allemagne a précédé la France et plus encore l’Angleterre. Depuis la loi sur les sociétés de 1870 (et sa révision en 1884), les entreprises allemandes sont dirigées par deux conseils : le Vorstand (directoire) et l’Aufsichtsrat (conseil de surveillance). L’objectif de cette direction duale était au départ de séparer dans la loi la gestion quotidienne des affaires de l’élaboration des options stratégiques de l’entreprise. Dans la pratique, le directoire s’est rapidement accaparé les fonctions stratégiques du conseil de surveillance, le contrôle de ce dernier devenant de plus en plus lointain et ne se faisant vraiment sentir qu’en cas de crise. Ce nouveau rapport de forces à la tête de l’entreprise ne doit pas dissimuler une autre transformation, tout aussi importante : celle du statut des dirigeants salariés. Dès la fin du XIXe siècle, les membres du directoire des plus grandes entreprises (dans leur majorité des managers salariés) jouissent du même statut social et professionnel que ceux du conseil de surveillance (pour l’essentiel des membres des familles fondatrices et des notables). Le président du directoire, qui porte en général le titre de Generaldirektor avant 1914, fait incontestablement partie de l’aristocratie des affaires allemande, non seulement par son autorité au sein de l’entreprise (il en est le véritable maître), mais également par son style de vie et ses relations sociales. Les grands dirigeants salariés de l’Allemagne impériale – Emil Rathenau (AEG) dans l’industrie électrique, Emil Kirdorf (G BAG) et Paul Reusch (GHH) dans l’industrie lourde, Albert Ballin (HAPAG) dans les compagnies maritimes, Carl Fürstenberg (Berliner Handelsgesellschaft), Emil Gutmann (Dresdner Bank) ou Max Steinthal (Deutsche Bank) dans la banque – se différencient peu sur ce plan des fondateurs d’entreprises ou héritiers de dynasties d’affaires comme Cari Friedrich von Siemens, August Thyssen, Karl Haniel (GHH) ou Max Warburg.
9La situation est moins claire en France et en Grande-Bretagne. L’accès au conseil d’administration, organe unique de gestion de l’entreprise, reste longtemps réservé aux seuls membres des familles fondatrices et aux notables du monde des affaires ou de la politique. Les managers salariés doivent le plus souvent se contenter du poste de directeur général, sans siège au conseil d’administration, c’est-à-dire, en dernière analyse, une position de subordonné. L’écart entre administrateurs et directeurs est moins prononcé en France qu’en Angleterre. Le niveau d’études plus élevé des dirigeants salariés des grandes entreprises françaises – dans leur majorité des ingénieurs des grandes écoles, en premier lieu Polytechnique – leur confère un plus grand prestige et tend à les rapprocher des administrateurs qui ont quelquefois fréquenté les mêmes institutions scolaires – un rapprochement renforcé par le passage quasi obligé des directeurs par la haute fonction publique. Les administrateurs des sociétés françaises tendent également à déléguer une partie importante de leurs activités aux membres de la direction, affermissant ainsi le pouvoir de ces derniers dans l’entreprise. C’est ainsi que dès avant 1914, des dirigeants salariés se hissent jusqu’au conseil d’administration – où ils portent en général le titre d’administrateurs délégués – voire jusqu’à la présidence de leur société. Tel fut par exemple le cas d’Alexandre Dreux (1853-1939) aux Aciéries de Longwy, de Henry Darcy à Châtillon-Commentry ou de Louis Dorizon à la Société générale.
10En Grande-Bretagne, le fossé séparant les gentlemen des players persiste jusqu’aux années 1960 (Coleman 1973). Les premiers sont issus des milieux de la grande bourgeoisie, ont fait leurs études dans une public school le plus souvent suivie par Oxford ou Cambridge. Ils ont accédé directement à leur poste d’administrateur grâce à leurs réseaux de relations familiales, sociales et professionnelles. Les seconds viennent des milieux de la petite ou de la moyenne bourgeoisie, ont quitté l’école à quinze ou seize ans avant d’être formés sur le tas et de gravir un à un les échelons de la hiérarchie de l’entreprise. Ils accèdent quelquefois au conseil d’administration, mais en fin de carrière, comme remerciement pour services rendus. Les exceptions à la règle sont pourtant nombreuses, surtout dans les compagnies les plus importantes. La personnalité dominante dans le géant de l’industrie textile, J. & P. Coats, est Otto Ernest Philippi (1847-1917), qui entre à 32 ans dans l’entreprise comme directeur commercial avant de devenir administrateur. Les managers salariés recrutés par Courtauld, le géant des textiles artificiels, à la fin des années 1890, Henry Tetley (1851-1921) et Thomas Latham (1855-1931), sont rapidement promus au conseil d’administration et dirigent effectivement l’entreprise jusqu’au lendemain de la Première Guerre mondiale. Entre 1890 et 1918, Edward Holden (1848-1919) fait de la Midland Bank, une petite banque provinciale, la plus grande banque du monde ; il se hisse en même temps d’un poste de sous-directeur à celui de président-directeur général. Ces hommes, tout comme leurs homologues français, doivent être considérés comme des membres à part entière de l’aristocratie des affaires, même si leur origine sociale n’est ni aristocratique ni grande bourgeoise. Ce handicap est compensé au sommet par les avantages sociaux et politiques que leur procure leur énorme pouvoir économique.
11L’homme d’affaires professionnel n’en a pas moins fini par s’imposer. En Allemagne d’abord, puis en France et enfin en Angleterre. Aujourd’hui, dans les trois pays, les véritables décideurs sont des managers salariés qui sont en même temps les dirigeants reconnus de leur entreprise. Le cadre légal est pourtant resté le même. En Allemagne, le Vorstand reste le véritable conseil de direction de l’entreprise, supervisé par l’Aufsichtsrat. En Angleterre, le pouvoir est resté entre les mains du Board of directors, mais celui-ci s’est démocratisé, les hommes d’affaires professionnels y ont progressivement remplacé les hommes d’affaires et les notables. Le processus a été lent. Commencé dès les années 1920 dans les entreprises les plus dynamiques (par exemple ICI qui adopte très tôt une politique de recrutement de jeunes diplômés universitaires à qui sont offertes des possibilités de promotion jusqu’au conseil d’administration), il se généralise à partir des années 1960. Les changements les plus importants se sont produits en France. La loi sur les sociétés de 1940, qui introduit le poste de président-directeur général, opère en quelque sorte une synthèse entre professionnels et notables. Cette professionnalisation de l’aristocratie des affaires pose, pour les trois pays, la question des caractéristiques sociales du groupe et de sa place au sein des anciennes et nouvelles aristocraties.
FORTUNE, NAISSANCE, MÉRITE
12L’aristocratie des affaires est-elle avant tout une aristocratie de la fortune ? Dès la fin du XIXe siècle, les hommes d’affaires sont devenus le groupe socioprofessionnel le plus riche. En Grande-Bretagne, les propriétaires terriens ont conservé ce privilège jusqu’aux années 1870. Selon William Rubinstein, ils représentaient 80 % des millionnaires décédés entre 1858 et 1879, mais 27 % seulement de ceux décédés entre 1900 et 1914 : 72 % des millionnaires viennent désormais du monde des affaires (Rubinstein 1981). La situation n’était pas très différente en Allemagne en 1912 où 25 % des millionnaires étaient des propriétaires terriens et 68 % appartenaient au monde patronal (Augustine 1994). On ne dispose pas de statistiques équivalentes pour la France, mais on peut noter qu’en 1911 à Paris, la fortune moyenne d’un homme d’affaires s’élevait à 1 450 773 francs, celle d’un propriétaire terrien et d’un rentier à 334 650 francs (Daumard 1973). Dans les trois pays, les plus grandes fortunes non terriennes étaient d’un niveau assez proche, autour de 250 millions de francs. C’est notamment le cas du banquier Charles Morrison et du magnat du diamant Julius Wernher en Grande-Bretagne, de Bertha Krupp et de Max von Goldschmidt-Rothschild en Allemagne d’Alphonse et de Gustave de Rothschild en France (Rubinstein 1980).
13En revanche, le nombre de très riches hommes d’affaires, dont la fortune atteignait un demi-million de livres sterling (12,5 millions de francs), était nettement plus élevé en Grande-Bretagne avant 1914 : probalement autour de 500, contre 200 à 250 en Allemagne et en France (Cassis 1997). Combien d’entre eux étaient-ils à la tête d’une grande entreprise et peuvent donc être considérés comme appartenant à l’aristocratie des affaires ? Une minorité seulement, du fait de l’augmentation du nombre de dirigeants salariés et de l’effacement ou du retrait des affaires d’une partie des héritiers des dynasties patronales. D’autres millionnaires étaient engagés dans les affaires sans être à la tête d’une entreprise majeure : c’est notamment le cas du négoce, de la banque et de la finance. Il ne faudrait pourtant pas sous-estimer la fortune des dirigeants effectifs – présidents et administrateurs délégués – des plus grandes sociétés avant 1914 surtout en Grande-Bretagne, où 21 % étaient millionnaires en livres sterling, contre 10 % en Allemagne et 8 % en France (Cassis 1997).
14L’analyse des niveaux de fortune devient plus difficile après la Première Guerre mondiale en raison de l’absence de données fiables. À quelques exceptions près, les dirigeants des plus grandes entreprises ne détiennent plus les plus grosses fortunes du pays, même s’ils restent, de loin, les salariés les mieux rémunérés et que leur niveau de fortune est le plus souvent tout à fait appréciable. Les plus grosses fortunes appartiennent désormais soit à des héritiers retirés des affaires, soit à des hommes d’affaires encore actifs, mais propriétaires d’entreprises moyennes ou moyennes-grandes. Il serait pourtant erroné de considérer ces deux derniers groupes comme formant la nouvelle aristocratie des affaires, même si la vie sociale des multimillionnaires défraye la chronique mondaine. D’autant plus que le nombre de grands patrons millionnaires n’a diminué que de façon progressive. Si l’on tient compte de la part non négligeable de grandes entreprises dirigées par un héritier ou par leur propre fondateur (notamment dans l’industrie automobile), la proportion de millionnaires n’a probablement pas beaucoup diminué de la Belle Époque aux années 1930. Et même au début des années 1990, quatorze des plus grandes entreprises britanniques (dont Cadbury Schweppes, Coats Viyella, GEC, Hanson, Laing, Pilkington, Saatchi & Saatchi, Sainsbury, Swire, Trusthouse Forte, United Biscuits, Whitbread) et douze des plus grandes entreprises françaises (dont Auchan, Casino, Chargeurs, Cora, Dassault, LVMH, Matra, Michelin, Promodes), étaient présidées par des hommes d’affaires disposant d’une fortune d’au moins 500 millions de francs ! (Cassis 1997)6.
15L’aristocratie des affaires se recrute au sein des classes supérieures. La cause est aujourd’hui entendue. Les recherches récentes – les premières datent en fait des années 1950 – menées tant en Europe qu’aux États-Unis ont dissipé les mythes qui ont pu entourer les possibilités d’ascension sociale offertes par la vie des affaires (Kaelble 1980). Tout au long du XXe siècle, plus de 80 % des dirigeants effectifs des plus grandes entreprises britanniques, françaises et allemandes viennent des milieux de la grande ou de la moyenne bourgeoisie. L’ascension de la base au sommet en une génération est un phénomène tout à fait exceptionnel, les fils d’ouvriers et d’employés restant régulièrement en dessous des 10 %. Une exception importante confirme la règle, à moins qu’il ne s’agisse d’un tournant en train de se produire et donc encore difficilement perceptible : l’aristocratie des affaires britannique de la fin des années 1980. Près de 40 % des présidents et directeurs généraux des plus grandes entreprises industrielles en 1989-1990 étaient fils d’ouvriers ou d’employés, un pourcentage étonnamment élevé et sans équivalent dans un autre pays ou à une autre période. Effet de la révolution thatchérienne ? En partie seulement. Car ces hommes dont la moyenne d’âge est proche de 59 ans ont fait leurs études sous les gouvernements travaillistes des années 1945-1951. Quoi qu’il en soit, le phénomène est trop récent pour que l’historien puisse en tirer des conclusions et évaluer jusqu’à quel point il s’agit d’une transformation en profondeur de la société britannique.
16La proportion de fils d’hommes d’affaires reste forte jusqu’aux générations actives au début des années 1970. En 1929, ils forment plus de 70 % des dirigeants des grandes entreprises françaises et allemandes. L’aristocratie des affaires n’est pourtant pas une noblesse héréditaire. Ou pas directement. Car il ne faut pas confondre fils de patron et héritiers : les pères de nombreux dirigeants patronaux sont des hommes d’affaires, mais ils travaillent à leur compte ou sont à la tête d’une entreprise autre que celle où leur fils fera carrière. Certains sont de petits, ou de moyens patrons. Mais la plupart du temps, l’ascension de leur fils à la tête d’une grande entreprise est une marque indiscutable de promotion sociale. Les héritiers restent en tous cas une minorité au sein de l’aristocratie des affaires, comme en témoigne le tableau suivant.
ORIGINE DES DIRIGEANTS DES GRANDES ENTREPRISES

17Le parcours scolaire et universitaire joue donc un rôle non négligeable dans la constitution comme dans la légitimation du groupe. En France, une formation de niveau universitaire est une condition sine qua non d’appartenance à l’aristocratie des affaires. Dès avant 1914, les dirigeants des plus grandes entreprises ont, pour 75 % d’entre eux, fréquenté un établissement d’enseignement supérieur. Les 90 % sont atteints dans les années 1920 et dépassés après la Seconde Guerre mondiale. Le rôle des grandes écoles dans la formation des élites françaises – en premier lieu l’École polytechnique, plus récemment l’École nationale d’administration (ΕΝΑ) – explique en bonne partie ces pourcentages élevés, tout comme le recrutement traditionnel des cadres dirigeants salariés au sein de la haute fonction publique, qui remonte aux origines de la grande entreprise française. Les études universitaires comptent également beaucoup en Allemagne, mais moins qu’en France7. Le phénomène le plus frappant est ici le rôle de l’apprentissage : 31 % des principaux dirigeants d’affaires de la génération d’avant 1914 ont été formés sur le tas. Le pourcentage diminue après la Première Guerre mondiale, mais se maintient au-dessus de 10 % jusqu’aux années 1950. Et si la chose est aujourd’hui devenue exceptionnelle, elle n’a pas, comme en France par exemple, complètement disparu.
18Le pourcentage d’universitaires est en revanche beaucoup plus faible au sein de l’aristocratie des affaires britannique en dépit d’une progression régulière au cours du siècle : à peine plus d’un tiers avant 1914, en-dessous de 50 % des années 1920 aux années 1950. Même dans les dernières décennies un titre universitaire n’est pas devenu, comme en France et en Allemagne, une condition quasi nécessaire – mais certainement pas suffisante – pour accéder aux plus hauts échelons de la hiérarchie des affaires8. En termes de prestige social, d’appartenance aux classes supérieures, le passage par une public school (en premier lieu Eton, mais également Winchester, Harrow, Rugby et quelques autres) a longtemps été plus important que l’université, y compris Oxford et Cambridge. Le passage par une public school majeure peut ainsi servir de détecteur des clivages internes à l’aristocratie des affaires britanniques : le pourcentage d’anciens élèves est ainsi passé de 18 % en 1907 à 37 % en 1929, pour se stabiliser ensuite. Mais en 1907, il est significatif que 72 % d’entre eux étaient des banquiers ou des brasseurs, les deux groupes les plus huppés du monde des affaires anglais.
19Ces différences nationales reflètent avant tout les voies différentes qui, dans chacun des trois pays, conduisent au sommet. Ce chemin passe par des établissements scolaires et universitaires d’élite en France et en Angleterre, pas en Allemagne. Les critères d’appartenance à l’élite sont également différents : en Allemagne, et plus encore en France, l’université (ou la grande école) est de rigueur ; en Angleterre, le collège secondaire privé a longtemps primé. Plus importantes sont les caractéristiques communes aux trois pays.
20C’est d’abord l’importance du prestige et de la tradition dans les filières scolaires d’accès aux élites, qui explique en bonne partie la faible part prise par les écoles de gestion dans la formation des dirigeants patronaux européens. C’est ensuite la formation de type généraliste des dirigeants d’affaires au plus haut niveau, qu’il s’agisse de l’École polytechnique (souvent critiquée pour son enseignement trop théorique), des public schools et de Oxbridge (considérés comme trop tournés vers les humanités), ou des doctorats en droit ou en sciences des grands patrons allemands (même un doctorat en chimie, indispensable pour une fonction dirigeante dans cette branche, a avant tout un rôle de légitimation et de reconnaissance par les pairs).
ARISTOCRATIE DES AFFAIRES ET STRUCTURE DES CLASSES SUPÉRIEURES
21Quelles relations l’aristocratie des affaires entretient-elle avec les anciennes et nouvelles aristocraties ? Avant la Première Guerre mondiale, ce sont ses relations avec la vieille aristocratie terrienne qui déterminent en premier lieu son degré d’intégration au sein des classes supérieures. Et l’intensité de ces relations varie encore considérablement selon les pays et selon les groupes d’hommes d’affaires.
22Dès avant 1914, les élites patronales ont adopté un style de vie aristocratique : habitation dans les beaux quartiers de la capitale (Mayfair et Belgravia à Londres, huitième et seizième arrondissements à Paris, Tiergarten à Berlin) doublée, dans de nombreux cas, par une résidence secondaire à la campagne ; appartenance aux clubs les plus selects, en premier lieu à Londres (Carlton, Brooks, Athenaeum Travellers, etc.), mais également à Paris (Jockey Club, Cercle de la rue Royale, Cercle de l’Union). C’est également la vie sociale : les réceptions mondaines, la « saison » à Londres, les salons parisiens immortalisés par Proust. Il y a enfin, et surtout, les mariages de plus en plus fréquents avec des membres des familles de l’aristocratie ancienne, à travers lesquels se sont instaurées des alliances entre familles et, pour les plus puissantes d’entre elles, un formidable réseau de relations opérant au niveau le plus élevé du pouvoir économique, social et politique.
23En dépit de leur relative homogénéité sur le plan social, les élites patronales allemandes se sont intégrées plus lentement que leurs homologues anglaises et françaises aux élites traditionnelles du pays (Cassis 1996). En Angleterre, cette intégration s’est surtout faite par l’intermédiaire d’une composante du monde des affaires : la haute banque. L’aristocratie de la City et la vieille aristocratie terrienne fusionnent véritablement dans le derniers tiers du XIXe siècle, au moyen notamment d’une succession d’alliances matrimoniales, pour former une élite renouvelée, dont les industriels du nord du pays restent pour l’essentiel exclus (Cassis 1984). En France, l’aristocratie des affaires parisienne fusionne avec la « grande bourgeoisie de robe » pour former une « classe dominante », d’où l’ancienne aristocratie n’est pas absente malgré une position nettement moins forte que celle de son homologue anglaise (Charle 1987). En Allemagne, au contraire, aristocratie des affaires et aristocratie terrienne continuent à former deux groupes distincts, et même s’il s’est instauré un certain partage des pouvoirs, la vieille aristocratie conserve sa prééminence (Kaelble 1996). Comme ailleurs, les styles de vie se sont rapprochés, mais l’atmosphère de Berlin reste beaucoup plus provinciale que celle de Paris et de Londres, et la composante principale du grand patronat, les magnats de la Ruhr, continuent à résider dans leurs fiefs de Cologne, Düsseldorf ou Essen. Mais à part quelques exceptions notables, c’est l’absence quasi totale d’alliances matrimoniales entre les deux groupes (Augustine 1994 ; Henning 1978) qui est particulièrement frappante et qui explique en dernière analyse l’isolement social de l’aristocratie des affaires allemande9.
24La référence à l’aristocratie terrienne perd une bonne partie de sa signification après la Première Guerre mondiale. Non que l’ordre ancien ait complètement disparu, mais la rupture avec le XIXe siècle est claire : le processus de fusion entre les deux groupes se poursuit, mais l’aristocratie terrienne est désormais réduite à jouer les seconds rôles. La position de l’aristocratie des affaires durant l’entre-deux-guerres sera donc principalement déterminée par des facteurs politiques (Cassis 1997).
25Peu de changements fondamentaux se produisent en Grande-Bretagne, dont la structure des classes supérieures est aujourd’hui bien documentée (Stanworth, Giddens 1971 ; Scott 1982 ; Perkin 1989). L’aristocratie des affaires consolide sa position au sommet de la hiérarchie sociale tout en s’ouvrant, à partir des années 1920, aux grands industriels, pour la plupart désormais basés à Londres. La fusion avec l’aristocratie ancienne se poursuit, élargissant l’assise de cette nouvelle classe supérieure anglaise, l’Establishment, dont la cohésion a tant frappé les observateurs étrangers. Le statut de l’aristocratie des affaires anglaise est en outre rehaussé par la position internationale de la Grande-Bretagne – l’une des deux grandes puissances, avec les États-Unis, durant l’entre-deux-guerres – et l’immense prestige dont jouit le pays à la suite de la victoire dans la Seconde Guerre mondiale. Cette dimension internationale lui confère un rang jamais atteint par ses homologues français et allemand.
26En France, l’aristocratie des affaires s’agrandit dans les années 1920, principalement du fait de l’augmentation du nombre de grandes entreprises. Son prestige sort grandi de la Première Guerre mondiale et de la contribution positive de l’industrie à l’effort de guerre (Hardach 1977). Son image est en revanche ternie par la dépression des années 1930 et la responsabilité attribuée au patronat dans le « retard » économique du pays. Un coup sévère lui est porté durant les premiers mois du Front populaire. Les grèves et les occupations d’usines sont une expérience traumatisante et la signature des accords Matignon est perçue dans les rangs patronaux comme une capitulation face aux syndicats (Kolboom 1986). La défaite et l’occupation n’améliorent pas les choses, mais la situation est cette fois différente. L’aristocratie des affaires française appartient certes de plein droit aux classes supérieures, mais ce sont les classes supérieures d’un pays occupé, avec ce que cela implique de dépendance et d’humiliation, même si les patrons s’en sont mieux tirés que la plupart de leurs compatriotes. On n’entrera pas ici dans le débat relatif à l’attitude du patronat français face à l’occupant allemand10. Accusé de collaboration, sa position atteint en tout cas son niveau le plus bas à la Libération (Ehrmann 1959 ; Weber 1986).
27La chute de la dynastie des Hohenzollern et la fondation de la république de Weimar renforcent indiscutablement la position des dirigeants patronaux au sein des classes supérieures allemandes. Leur prestige a beaucoup moins souffert de la défaite que celui de l’armée et de l’aristocratie dont étaient issus la plupart des officiers supérieurs. De plus, la position des Junkers a été affaiblie tant au plan politique – à la suite des changements constitutionnels – qu’au plan économique – du fait du déclin des revenus agricoles. Mais l’aristocratie terrienne est loin d’avoir perdu tous ses privilèges, et de nombreux hommes d’affaires regrettent l’ancien régime qui leur garantissait la paix sociale. La situation des dirigeants patronaux sous le nazisme est plus complexe. Bien que faisant partie des principaux bénéficiaires du régime, ils sont confrontés à une élite politique composée d’hommes issus principalement de la petite bourgeoisie. Ces derniers ne leur sont pas spontanément sympathiques et n’hésitent pas à s’ingérer dans leurs affaires. Sans doute ne faut-il pas surestimer l’importance de ces différences sociales : les intérêts et les styles de vie finissent le plus souvent par converger au sommet. D’autant plus qu’au-delà de la rhétorique, le régime nazi n’est pas fondamentalement anticapitaliste. Mais c’est un régime totalitaire, qui a ses objectifs propres, indépendants de ceux des dirigeants d’affaires, et qui est prêt à recourir à la répression violente en cas d’opposition : la menace des camps de concentration s’applique également à l’aristocratie des affaires (Overy 1984 ; Turner 1985 ; Hayes 1987). Les dirigeants patronaux allemands terminent la guerre dans une position encore plus faible que celle de leurs homologues français. À l’humiliation de la défaite, s’ajoutent les destitutions, les emprisonnements et les procès intentés par les Alliés. Le purgatoire est pourtant de courte durée. Avec le début de la guerre froide, les exigences économiques de la reconstruction et les réseaux de solidarité au sein du monde des affaires allemand, les dirigeants patronaux allemands sont dans l’ensemble peu touchés par la dénazification (Berghahn 1986 ; Joly 1996).
28Quelle que soit leur importance dans le court terme, les bouleversements politiques qui se produisent en France et en Allemagne n’ont été que des reculs temporaires dans la tendance à long terme vers la convergence du statut social de l’aristocratie des affaires des trois principales économies européennes. Depuis les années 1950, elles sont solidement installées au cœur des classes supérieures de leur pays respectif. Et la position des trois pays dans la hiérarchie internationale des puissances s’est beaucoup rapprochée avec la perte du statut de grande puissance de la Grande-Bretagne et la réhabilitation de l’Allemagne sur la scène mondiale. Des caractéristiques nationales n’en persistent pas moins jusqu’à ce jour : la prédominance des financiers de la City en Grande-Bretagne, la position clé des hauts fonctionnaires dans la communauté des affaires française, le provincialisme fédéral des dirigeants des grands groupes allemands. Mais dans les trois pays, comme dans le reste de l’Europe, les dirigeants professionnels salariés des plus grandes entreprises se sont assuré une position dominante. À la fin du XXe siècle, la notion d’aristocratie n’est plus incompatible avec l’activité professionnelle à plein temps, devenue essentielle à l’exercice du pouvoir.
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Notes de bas de page
1 Bourdieu, de Saint-Martin (1978), Bauer, Bertin-Mourot (1995), Mosse (1985), Turner (1985) ; ces deux derniers ouvrages utilisent les listes établies par Kocka et Siegrist (1979) et Siegrist (1980). Voir également Chandler (1990), Kogut (1998) et Wardley (1999).
2 Chiffre obtenu à partir de la liste publiée par Chandler (1977 : 503-512).
3 Chiffre obtenu à partir de la liste publiée par Chandler (1990 : 096-704).
4 Chiffres calculés à partir du magazine Fortune (1973).
5 En 1910, par exemple, on comptait en Angleterre 93 sociétés disposant d’un capital actions égal ou supérieur à.50 millions de francs, contre 4.5 en Allemagne et 22 en France. Ceci sans compter les sociétés en nom collectif, non cotées en Bourse, qui sont alors certainement beaucoup plus nombreuses en GrandeBretagne, en particulier parmi les firmes commerciales et financières de la City.
6 Estimations basées sur les données publiées par le Sunday Times Magazine (14 avril 1991) et Le Nouvel Economiste (14 octobre 1994).
7 Le pourcentage des diplômés de niveau universitaire parmi les dirigeants des plus grandes entreprises passe de.57 % pour la génération active en 1907 à 61 % en 1929, 7.5 % en 1953, 82 % en 1972 et 88 °/o en 1989 (Cassis 1997 : 133).
8 Le pourcentage d’universitaires parmi les dirigeants des plus grandes entreprises britannique était de 59 % pour la génération active en 1972 et 64 % en 1989 (Cassis 1997 : 133).
9 Dans leur grande majorité, les dirigeants patronaux allemands se mariaient dans le monde des affaires.
10 Voir notamment Vinen (1091), Margairaz, Rousso (1992), Burrin (1993), de Rochebrune, Hazera (1995).
Auteur
Université de Genève
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