Soigner par les lettres : la bibliothérapie des Anciens
To Heal through Letters: the Bibliotherapy of the Ancients
p. 7-20
Résumés
Ce chapitre d’introduction présente les enjeux du dossier thématique. À la différence de la bibliothérapie moderne qui soigne plutôt des troubles psychiques, les Anciens ont utilisé une forme de bibliothérapie pour soigner les maladies du corps. Ils ont considéré les pratiques lettrées comme des pratiques de santé, parce qu’ils avaient des conceptions différentes des nôtres, tant dans le domaine médical que dans leurs usages du livre. Lire et écrire ont indéniablement pour eux une action physiologique sur le corps et cet effet est utilisé à des fins thérapeutiques. Des types de textes ou d’exercices littéraires sont choisis en fonction des pathologies à guérir. Le dossier thématique montre enfin comment le prestige social, la pratique littéraire ou épistolaire et le souci pour la santé s’articulent dans l’imaginaire de l’élite politique du monde gréco-romain et forment les traits sociaux distinctifs de cette aristocratie lettrée et cultivée.
The introductory chapter presents the issues of the thematic dossier. Contrary to modern bibliotherapy, which heals mostly mental diseases, the Ancients used therapeutic reading and writing to heal bodily disorders. They considered literary practices as health practices, for their conception of both the medical domain as well as the uses of books differed from our own. Reading and writing had undoubtedly for them a physiological action on the body and this effect was used for therapeutic purposes. Certain types of texts or literary exercises were chosen for specific diseases to be cured. Lastly, the thematic dossier shows the interconnection among social prestige, literacy or epistolography, and health care for the Greco-Roman political elite, as distinctive social marks of a literate and refined aristocracy.
Entrées d’index
Mots-clés : bibliothérapie, physiologie de la lecture, écriture thérapeutique, lecture curative, élite gréco-romaine
Keywords : bibliotherapy, reading physiology, therapeutic writing, curative reading, Greco-Roman elite
Texte intégral
La physiologie de la lecture est encore à étudier. Il y a là un sujet qui ne doit pas être confondu avec la bibliographie, et qui s’apparente aux phénomènes organiques de la nature.
Ossip Mandelstam, Physiologie de la lecture
(tr. André du Bouchet, 1989, p. 13).
1Nous héritons d’une conception de la littérature qui a rompu tout lien avec le corps. Depuis plus de deux siècles, les textes dits littéraires sont produits et reçus comme des objets autonomes, solitaires et silencieux. Leur oralité n’est que seconde. Lire et écrire sont pour nous des expériences individuelles où le corps s’immobilise et s’efface. Depuis le Romantisme s’est même imposée une figure de l’homme de lettres dont la santé est minée par l’écriture et la lecture. La littérature, oubli du corps, en serait presque devenue une maladie.
2Pourtant dans l’Antiquité, lecture et écriture étaient considérées comme des remèdes pour soigner le corps ou des exercices pour préserver la santé. Asclépios, le dieu de la médecine, prescrivait aux fidèles qui venaient implorer la guérison dans son sanctuaire de composer des discours ou de la poésie, en leur envoyant des songes. Le médecin Galien de Pergame (129-ca 216), qui fut un des fidèles du dieu, considérait lui aussi que l’écriture littéraire et la performance rhétorique étaient curatives dans le cadre du culte d’Asclépios à Pergame. D’autres médecins de l’époque impériale, comme Celse, Soranos ou Antylle délivraient dans leurs ordonnances de la lecture à voix haute (clara lectio) contre les digestions trop lentes, les maux d’estomac ou les quintes de toux. Et des savants comme Pline le Jeune ou Plutarque s’exerçaient quotidiennement à une forme de déclamation oratoire dénommée ἀναφώνησις ou vociferatio afin de rester en bonne santé.
3Cette perspective ancienne a de quoi déconcerter. Elle peut sembler primitive, naïve et dépassée dans notre monde où la littérature est généralement dévalorisée et où les progrès technologiques et scientifiques ont déporté la médecine bien loin des sciences humaines. Penser la littérature comme une médecine pour le corps relèverait à première vue de la plaisanterie. Une telle proposition heurte le bon sens et soulève l’incompréhension générale. Il est certes bien connu que la lecture et l’écriture peuvent constituer une thérapie pour l’âme, mais comment concevoir qu’elle puisse agir comme un remède sur le corps ?
4Diodore de Sicile1 rapporte que le pharaon Ramsès II avait fait graver sur le linteau de sa bibliothèque sacrée une inscription qu’il traduit en grec par ψυχῆς ἰατρεῖον. Dès le xiiie siècle avant notre ère, les bibliothèques sont définies comme des hôpitaux pour l’âme et les livres comme des médicaments. L’inscription de la bibliothèque du pharaon traduite par Diodore se trouve aujourd’hui à l’entrée de la Bibliothèque du monastère de Saint-Jean-le-Théologien à Patmos ou encore au seuil du bâtiment de la Carolina Rediviva de la Bibliothèque universitaire d’Uppsala en Suède. La devise de l’American Philological Association fait écho à l’inscription du pharaon : ψυχῆς ἰατρὸς τὰ γράμματα (« les lettres sont un médecin de l’âme »). Que la littérature offre toutes les ressources d’une pharmacie pour l’âme, depuis les fortifiants et les vitamines jusqu’aux antidépresseurs, voilà qui ne choquera pas un lecteur averti2.
5Dans le monde anglo-saxon s’est développée une pratique scientifique issue de la psychologie que l’on appelle « bibliothérapie ». L’invention de cette discipline peut être attribuée à une femme noire américaine : Sadie Peterson Delaney3 (1889-1958) a mené les premières expériences cliniques de bibliothérapie moderne dans un hôpital de Tuskegee en Alabama. Nommée bibliothécaire en chef de cet hôpital pour les vétérans de guerre en 1924, Sadie P. Delaney a, grâce à des lectures choisies, tenté de soulager les traumatismes psychologiques des soldats américains, rescapés de la Première Guerre mondiale. En plus de prescriptions de lectures adaptées à chacun, elle a créé un groupe de parole mensuel autour du livre, une « heure du conte » pour les aliénés et fait de la bibliothèque de l’hôpital un lieu de vie et de soin. Depuis les années 1930 aux États-Unis, la bibliothèque est devenue une institution dans les hôpitaux psychiatriques et gériatriques notamment. Le bibliothécaire hospitalier est un bibliothérapeute qui a une fonction similaire au pharmacien par rapport au médecin. Le rôle thérapeutique de l’acte de lire est ainsi reconnu.
6La bibliothérapie embrasse aujourd’hui un large champ et gagne du terrain. En France, on voit fleurir partout sur les étals des librairies des livres de psychologie destinés au grand public pour le développement personnel ou le bien-être, ce qu’on appelle en anglais des self-help-books. D’autres formules proposent aussi des choix de textes poétiques ou fictionnels, dont le contenu est en rapport avec les problèmes du lecteur. Ces livres qui répondent le plus souvent davantage à une stratégie commerciale qu’à un véritable souci thérapeutique se présentent comme de beaux objets aux couvertures attirantes qui renferment des anthologies associant un problème (acouphènes, angoisse existentielle, calvitie, chagrin d’amour, colère, ménopause, tristesse, etc.) ou une préoccupation contemporaine (prendre le temps, trouver l’amour, avoir confiance en soi) avec un texte plus ou moins littéraire4. De tels livres se réclament de la bibliothérapie, mais il ne s’agit souvent que de titres aguicheurs.
7En revanche, aux États-Unis, au Canada, en Angleterre ou en Suède, la discipline de la bibliothérapie semble bien institutionnalisée pour soigner les maladies mentales, les addictions, les malades en phase terminale ou les traumatismes de l’enfance liés à des divorces ou des abus. Le principe est de conseiller un ouvrage en rapport avec la souffrance du patient qui l’aidera à traverser, voire à vaincre, sa maladie. Le bibliothérapeute doit lui-même avoir lu les livres qu’il conseille, mais il dispose aussi de fiches dressées par ses collègues indiquant dans quel cas un titre peut être conseillé5.
8En France, une telle pratique n’est pas reconnue par l’institution médicale. On admet certes pleinement la vertu thérapeutique de l’écriture sans prétention littéraire. Cette écriture dite ordinaire est préconisée comme thérapie mentale ou comme adjuvant aux traitements médicamenteux lors de maladies graves comme un cancer ou lors d’opérations comme les greffes d’organe. La bibliothérapie a été introduite en France en 1994 par le rabbin et philosophe Marc-Alain Ouaknin6. En 2013, le médecin Pierre-André Bonnet7 a publié une étude qui milite pour l’introduction de la bibliothérapie dans la pratique des généralistes. En 2015, avec Les livres prennent soin de nous, Régine Detambel défend la vision plus créative et plus littéraire d’une bibliothérapie à la française8. Le thème est à la mode et on s’explique mal que la pratique médicale française soit restée en retrait par rapport au monde anglo-saxon, où ce champ de recherche explose9.
9La bibliothérapie dont il est question dans ce dossier de Mètis diffère pourtant de la bibliothérapie contemporaine. Il ne s’agit pas de l’origine antique de cette pratique actuelle, mais d’une pratique étrangère à notre expérience d’aujourd’hui. Les Anciens considéraient que la lecture et l’écriture avaient une action non seulement sur l’âme, mais aussi sur le corps. Or aucun médecin ne prescrit plus au xxie siècle d’écrire des vers ou de réciter de la poésie épique pour guérir un mal physique. Ils n’inscrivent plus non plus dans leurs prescriptions des exercices de lecture pour des problèmes digestifs ou contre la toux. Comment les Anciens ont-ils pu considérer les pratiques lettrées comme des pratiques de santé ? Que suggère cet écart sur les discours médicaux des Anciens et sur leur représentation du corps ? Que nous disent ces textes sur les pratiques littéraires des sociétés antiques ? Et en quoi cette altérité des Anciens peut-elle nourrir les pratiques et les représentations contemporaines ?
10Pour expliquer l’exotisme des Anciens, on doit faire appel à l’anthropologie et procéder à trois brèves mises au point. Dans l’Antiquité, la lecture était d’abord une pratique orale et collective : on lisait pour un public et rarement pour soi. La lecture ancienne était un processus complexe suivant lequel le lecteur devait d’abord mentalement identifier les mots dans un texte en scriptio continua, puis les verbaliser et les rendre sonores devant un public d’amis, une foule de spectateurs ou une assemblée. L’écriture avait elle-même une dimension orale et collaborative, notamment parce que certains auteurs dictaient leurs œuvres à des sténographes ou qu’ils avaient recours à la recitatio, durant laquelle ils testaient une première version de leur texte qu’ils faisaient lire à haute voix devant un auditoire d’amis, afin de le corriger en fonction de leurs réactions. Le monde antique, sans microphone, était un monde où celui qui devait prendre la parole en public (homme politique, orateur, acteur, héraut, professeur, etc.) possédait une voix exercée, capable de retentir en plein air et de couvrir le brouhaha des foules. La lecture, la déclamation et même l’écriture étaient dans l’Antiquité des activités engageant le corps et sollicitant une intense dépense physique. C’est une première explication pour combler le fossé de ce grand partage.
11Une autre concerne la physiologie du corps et son rapport avec l’âme. La dichotomie âme/corps telle que nous la concevons aujourd’hui relève d’une construction historique et nos projections actuelles ne recoupent pas celles des Anciens. Pour eux, l’âme et le corps sont bien des entités distinctes, mais les schèmes explicatifs qui les mettent en rapport sont plus poreux que les nôtres. Dans les représentations anciennes, le corps et l’âme sont constitués d’un même mélange d’humeurs qui affecte l’un autant que l’autre : les mélancoliques souffrent d’un excès de bile noire et les flegmatiques d’un excès de phlegme, etc. L’âme est subtilement matérielle, composée de cette mixtion d’humeurs et de pneuma qui véhicule informations et sensations, tandis que le corps, via ses nerfs, ses veines et ses artères, est traversé par les mêmes substances liquides et gazeuses, dont le mélange forme le « tempérament ». Les passions de l’âme s’expliquent par des processus physiologiques : la colère n’est autre qu’un bouillonnement du sang dans le cœur, tandis que la peur et la pitié génèrent un refroidissement corporel. La dichotomie âme/corps est une construction culturelle et les Anciens vivaient sous un régime assez différent du nôtre.
12Enfin pour comprendre ces interférences entre les pratiques littéraires et la médecine, il faut rappeler que la séparation entre sciences humaines et sciences dures ou entre les lettres et les sciences est une donnée assez récente dans l’économie de la connaissance. Jusqu’au xviiie siècle, le système éducatif avait une visée encyclopédique et les savants, depuis Eudoxe de Cnide (ive siècle avant notre ère) et Ératosthène (iiie siècle avant notre ère) jusqu’à Descartes ou Pascal, étaient par essence polymathes. La paideia antique fournissait aux hommes éduqués un socle de connaissance embrassant toutes les branches du savoir. La médecine faisait partie de ce bagage culturel commun aux personnes éduquées, les pepaideumenoi10. Pas de culture scientifique sans culture littéraire et inversement. Pas d’entraînement de l’âme sans entraînement du corps et inversement. Pas de santé sans littérature et pas de littérature sans qu’il soit question de corps, de santé ou de maladie.
13Nos catégories binaires (oral/écrit ; corps/âme ; lettres/sciences) ne rendent donc pas compte de la complexité à laquelle nous confronte la pensée des Anciens. Si les théories humorales et médicales antiques sont largement dépassées, les textes Anciens et médiévaux préservent des expériences lettrées qui présupposent une approche holistique – une « estroite cousture de l’esprit et du corps » comme le disait Montaigne – une action physiologique de la lecture et de l’écriture sur le corps, tout comme des vertus curatives de ces pratiques lettrées.
14Comme dans la bibliothérapie moderne, le contenu et la forme littéraire du texte ont une part importante dans le processus thérapeutique. À l’époque impériale, le médecin pneumatique Antylle préconise, pour soigner les pathologies de la voix, un exercice de déclamation dénommé « anaphonèse » qui doit en priorité s’effectuer en récitant par cœur des vers épiques11. Patient résidant dans le sanctuaire d’Asclépios à Pergame, Aristide12 reçoit du dieu le conseil de composer des poèmes lyriques et de se faire le chorège d’un chœur de jeunes garçons. Ces chants choraux procurent au malade un mieux-être et soignent son asthme, tout comme son ulcère à l’estomac. Sur ordonnance divine, Aristide est encore sommé de composer des discours à la manière de Socrate, de Démosthène et de Thucydide.
15La thérapie littéraire concerne une élite alphabétisée, instruite et lettrée dont font partie les femmes. Le médecin Soranos d’Éphèse recommande à ses patientes, pour des troubles alimentaires liés à la grossesse, de faire des exercices vocaux et de lire tout haut avec expressivité (I, 15, 49). À une patiente atteinte de gonorrhée (III, 46, 4-5) – une émission involontaire de semence féminine sans désir sexuel –, le médecin prescrit un type de lecture bien précis : il interdit les récits érotiques et recommande des lectures austères et tristes, afin de ne pas exciter la patiente. Théodore Priscien, un médecin africain de la fin de l’Antiquité (ive-ve siècle) indique au contraire dans son arsenal thérapeutique contre l’impuissance masculine « d’user sans retenue des lectures qui élèvent à la jouissance de l’âme, comme le sont celles de Philippe d’Amphipolis, d’Hérodien ou de Jamblique le Syrien et toutes ces autres qui racontent des histoires d’amour voluptueuses » (Euporiston II, 11, 34). Les Anciens avaient expérimenté les pouvoirs physiologiques des lectures érotiques sur le corps et les médecins en régulaient l’usage pour soigner les pathologies sexuelles de leurs patients.
16Cette tradition de la lecture curative s’est poursuivie bien au-delà de l’Antiquité. Arnaud de Villeneuve, un médecin et théologien catalan qui enseigna à l’Université de Montpellier durant la seconde moitié du xiiie siècle, recommande lui aussi certaines lectures dans le Régime de santé qu’il dédie au roi d’Aragon. Ces lectures, effectuées après le repas, sont destinées au coucher et à l’endormissement13. L’écoute se fait assis pour reposer le corps autant que l’esprit et les récits ne doivent être « ni amers, ni subtils, mais paisibles et faciles à comprendre, comme sont les histoires des rois et des saints ou encore des mélodies accompagnées de musique14 ». Les médecins de l’Antiquité et du Moyen Âge ont ainsi reconnu l’action de la forme et du contenu des textes littéraires sur le corps et la santé de leur patient. Les médecins anciens ont utilisé les effets physiologiques de la lecture ou de la déclamation pour réguler des fonctions corporelles vitales comme le sommeil, la sexualité, l’alimentation ou la respiration. Ces pratiques médicales ont perduré dans le monde islamique chez Avicenne ou Averroès15 et elles ont connu un regain de curiosité à la Renaissance avec notamment le De arte gymnastica de Girolamo Mercuriale16 ou encore chez Rabelais17.
17Autour de l’an 2000, le sujet a suscité des études pionnières de la part d’antiquisants historiens de la médecine comme Armelle Debru18 et Heinrich von Staden19, mais aussi d’Emmanuelle Valette-Cagnac20 qui a renouvelé, à travers son approche anthropologique, notre idée de la lecture à Rome. En 2002, E. Valette-Cagnac dans « Corps de lecteurs » montrait que la lecture était pour les Anciens un acte physiologique ; elle évoquait cette « lecture-médication » du monde gréco-romain. La même année, H. von Staden, dans « La lecture comme thérapie dans la médecine gréco-romaine » exhumait une foule de textes médicaux conseillant des lectures curatives aux malades. Le petit dossier qui suit tente d’approfondir l’enquête sur cette bibliothérapie des Anciens qui soignaient leur corps par les lettres. Elle rassemble des contributions qui ont été présentées à Reims le 16 mai 2014 lors d’une journée d’étude organisée à la Bibliothèque Carnegie. Lors de cette journée, Heinrich von Staden nous avait fait l’honneur et l’amitié de venir pour présenter une communication intitulée « Galien sur ses lecteurs », mais elle n’a pas pu figurer dans cette publication. Les cinq contributions qui suivent abordent la question en croisant les approches (philologique, anthropologique, historique) et les différentes sources (archéologiques, papyrologiques, épigraphiques et littéraires).
18Emmanuelle Valette-Cagnac interroge avec minutie les liens entre santé (valetudo) et épistolarité en se plongeant dans l’imposante correspondance de Cicéron (106-43 avant notre ère). Elle montre d’abord que les vœux de santé en tête ou en fin de lettre (vale !) ne sont pas seulement des formules stéréotypées dépourvues de sens. Elles sont en réalité très variées en fonction des contextes et de la nature des liens qui unissent les correspondants. Ces formules montrent que la santé est aussi la condition de l’activité épistolaire, de sa régularité et de sa réciprocité. Mais les préoccupations de santé se retrouvent aussi et surtout dans le corps de la lettre. Ces « bulletins de santé » à l’intérieur des lettres participent à la construction de la persona sociale, voire politique, de Cicéron. Quand il parle de sa propre santé ou qu’il délivre des conseils médicaux21 à Atticus ou Tiron, Cicéron entre en connivence avec ses destinataires, mais il exprime aussi la relation hiérarchique du patronus envers ses amici dans le cadre de l’amicitia romaine. Les lettres, comme le discours sur la santé qui est parsemé de termes grecs, exhibent la culture que partagent les correspondants. L’écriture épistolaire est enfin, autant pour celui qui l’écrit que pour celui qui la lit, un acte thérapeutique.
19Les trois articles suivants portent chacun sur un auteur grec de l’époque impériale : Aelius Théon, Aelius Aristide et Antylle. Pierre Chiron déploie sa grande érudition sur le sophiste alexandrin Aelius Théon pour interroger la place du corps dans les Progymnasmata, un recueil d’exercices préparatoires pour former les jeunes gens à la rhétorique. Au cours d’une mise au point sur la formation qu’offre le rhéteur, P. Chiron souligne que le travail sur le rythme de la phrase influe autant sur le corps que sur les caractères moraux et les passions de l’âme. Il rappelle aussi à quel point l’exercice oratoire engage le corps. Par sa gestuelle, il constitue un « exercice d’incarnation ». Il écrit ainsi : « En somme, non seulement le corps et l’ascèse sportive servent de références constantes à la description de la formation rhétorique, mais le corps est aussi l’origine et le réceptacle des représentations échangées par le langage humain ». Il examine ensuite ce qui est dit du corps dans les sujets présentés aux étudiants (la sexualité, la mort, le suicide) pour constater la grande liberté de parole, voire la cruauté, qui caractérisent les Progymnasmata. La formation rhétorique des jeunes aristocrates est décrite avec les termes mêmes de l’entraînement sportif, elle est calquée sur ce paradigme physique : le corps et l’âme, formant un tout, s’épanouissent de conserve dans l’entraînement et l’effort.
20On présente souvent Aelius Aristide, le célèbre sophiste du iie siècle, comme un personnage fantasque et hypochondriaque dont on comprend mal les Discours sacrés ou la relation qu’il entretient avec son dieu Asclépios. Aristide raconte en effet comment après plusieurs séances d’incubation dans le sanctuaire, il a reçu en songe des conseils pour soigner sa maladie. Il a, par exemple, dû déclamer un discours alors qu’il pouvait à peine respirer ou composer des chants lyriques choraux. Georgia Petridou jette un jour nouveau sur les textes de ce personnage mystérieux et lève le mépris que lui vouent volontiers les lecteurs contemporains. En convoquant des témoignages épigraphiques, papyrologiques et archéologiques, elle montre notamment que le cas d’Aelius Aristide n’était pas si isolé qu’on veut bien le dire. Elle s’attache à différentes formes de remèdes littéraires qui sont envoyés par le dieu : les « remèdes rhétoriques », les « prescriptions poétiques », les « médicaments musicaux » et les « cautions épistolaires ». À travers ces exemples, on perçoit mieux comment la vertu curative des belles-lettres était l’un des ressorts des thérapies miraculeuses d’Asclépios.
21Dans « Déclamer pour soigner son corps : l’anaphonèse chez Antylle et Oribase », je me suis attaché à trois chapitres des Collections médicales d’Oribase, le médecin personnel de Julien l’Apostat. Attribués à Antylle, ces chapitres décrivent les modalités et les vertus médicinales d’un exercice vocal dénommé anaphonèse : ce type de déclamation est une pratique de santé pour les gens bien portants, mais il soigne aussi, entre autres, les pathologies de la voix, du souffle et de la digestion. Cet article est l’occasion d’une mise au point sur Antylle, un médecin pneumatique méconnu, et sur un problème d’attribution posé par l’un de ses trois chapitres. Il se propose surtout de restituer les modalités de cet exercice oublié : quand, comment et à partir de quel texte cet exercice était-il pratiqué ? En annexe, j’ai donné une nouvelle édition critique et une nouvelle traduction française des chapitres d’Oribase.
22Il est étonnant que contrairement aux médecins méthodiques, pneumatiques ou même à Asclépios, Galien n’intègre pas les remèdes littéraires dans ses prescriptions médicales, comme l’a signalé avec perspicacité Heinrich von Staden lors de la journée d’étude de Reims. Galien reconnaît certes l’action thérapeutique de la composition littéraire dans le cadre du culte guérisseur d’Asclépios22 ou la valeur thérapeutique ou préventive de l’anaphonèse, mais il ne compte pas les lectures à voix haute, la déclamation rhétorique, ni les exercices de composition littéraire dans son arsenal thérapeutique, contrairement à des médecins comme Celse, Soranos ou plus tard Caelius Aurélien. Il évoque même parfois les effets nocifs de l’anaphonèse et critique son utilisation par les médecins méthodiques. La contribution de Heinrich von Staden n’est pas présente dans le dossier, mais son argument percutant mérite d’être ici mentionné.
23Le dossier s’achève sur un article de Virginie Leroux qui mène une réflexion sur les pouvoirs de la parole et de la lecture sur le sommeil. Elle aborde ainsi plusieurs techniques d’endormissement utilisées par les Anciens depuis les incantations magiques et les berceuses jusqu’aux lectures destinées à favoriser le sommeil. Elle discute ensuite de la double rédaction d’un problème aristotélicien (Problêmata XVIII, 1 et XVIII, 7) dont la question initiale est formulée ainsi : « Pourquoi, s’ils se mettent à lire, les uns tombent-ils de sommeil même contre leur volonté, alors que d’autres, qui voudraient dormir, en sont empêchés lorsqu’ils prennent un livre ? ». L’étude de V. Leroux fait résonner les textes antiques gréco-romains avec leur interprétation à l’époque humaniste, englobant ainsi dans une même tradition culturelle, l’Antiquité, le Moyen Âge et le premier âge moderne.
24Au-delà d’une expérience multiséculaire qui entérine les effets physiologiques de la lecture sur le corps pour les appliquer à la médecine, ce qui se dessine nettement de la réunion de ces études est l’image d’une élite dirigeante dotée d’une grande culture littéraire, soucieuse de son corps et férue de médecine. Les pepaideumenoi sont philiatroi. D’un autre côté, certains médecins ne sont pas uniquement spécialistes de leur art, car ils ont reçu une formation de haut vol. Celse écrit ainsi : « aucun homme illustre n’a exercé la médecine avant que la discipline des lettres (disciplina litterarum) n’ait commencé à être cultivée avec assez de zèle »23. Dans l’histoire de la médecine selon Celse, l’art médical procède de la littérature. La médecine fait partie des belles-lettres et elle a été créée par les gens de lettres24. Pour Celse, on doit être lettré, avant d’être médecin. Plus tard, Galien exhorte les jeunes gens à ne pas entreprendre des études de médecine avant d’avoir reçu une solide formation logique et philosophique.
25La médecine par les lettres apparaît chez cette élite romaine – depuis la fin de la République – comme un marqueur de classe tout comme un facteur de cohésion sociale. Les réseaux, les communautés ou cercles d’amis se soudent autour de préoccupations médicales et de discussions sur les souffrances du corps. La correspondance de Cicéron avec Atticus et Tiron est une façon de tisser des liens sociaux qui s’inscrivent dans le dispositif hiérarchique de l’amicitia romaine. Les récits de maladies ou « bulletins de santé », qui occupent la correspondance de Cicéron ou celle de l’orateur Fronton (iie siècle), instaurent une intimité, une familiarité entre les épistoliers. De même, les compagnons d’Aelius Aristide dans le sanctuaire de Pergame échangent sur leurs maladies, leurs traitements et leurs guérisons. Cette connaissance intime de l’intérieur de leur corps contribue à créer un effet de groupe qui conforte une appartenance à la classe spécifique des therapeutai du dieu25. Ces privilégiés se distinguent des pèlerins ordinaires, parce qu’ils ont leur propre entrée dans le sanctuaire et leur propre chambre d’incubation, mais aussi par leur façon quotidienne d’offrir des sacrifices au dieu. Dans ces deux cas, la maladie joue en quelque sorte le rôle de ciment social. Alors que la maladie est plutôt pour nous une expérience individuelle, elle était dans l’Antiquité un événement social et collectif26.
26Il en va de même pour le livre. L’écriture d’un texte, son processus de création, puis de diffusion ainsi que sa réception étaient des actes collectifs et collaboratifs. Dans le monde gréco-romain, les livres sont des cadeaux qu’un auteur adresse à l’un de ses amis en tant que beneficium méritant en retour une gratia. Les sodalités et les cercles d’amis se forment autour des livres dans un système de don et de contre-don et ce sont les amici de l’auteur qui contribuent à la diffusion de ses livres. On peut encore songer aux Deipnosophistes d’Athénée de Naucratis (iie-iiie siècle), qui met en scène le cercle de Larensius, un riche Romain de rang équestre, bibliophile, qui fut le protecteur d’un cercle de lettrés – dont le juriste Ulpien de Tyr et le médecin Galien – et le généreux patron de somptueux banquets, lors desquels il mettait à leur disposition son importante bibliothèque27. Les activités littéraires d’écriture et de lecture sont, là encore, un signe de distinction, tout comme des liens qui unissent les communautés.
27Chez Plutarque et chez l’Antylle d’Oribase, on retrouve une même idée, plutôt surprenante : le corps du lettré adepte de l’anaphonèse est en meilleure santé que celui des athlètes qui s’entraînent au gymnase. Les exercices de déclamation poétique ou rhétorique sont plus salutaires que les exercices gymniques, parce qu’en touchant simultanément le corps et l’âme, ils font, dit Plutarque, « naître dans les parties les plus vitales, dans les parties essentielles, une vigueur intime, une énergie réelle28 ». Chez l’Antylle d’Oribase, le corps lettré devient, grâce à l’anaphanèse, plus détendu, plus aéré et plus subtil que celui des athlètes qui est pesant, lourd et compact. Le corps lettré, nourri et pétri de textes, façonné par les exercices de déclamation, les lectures et les discours publics représente un idéal de santé chez cette élite de l’époque impériale.
28Le dossier qui suit plaide sans doute en faveur d’une « médecine de velours29 » ou pour le retour des humanités médicales. Il s’inscrit aussi dans le sillage des livres de William Marx30 qui cherchent à retrouver des potentialités perdues du littéraire. Il vise enfin à étoffer l’historiographie de la bibliothérapie ou du moins à proposer quelques pistes de réflexion aux bibliothérapeutes contemporains.
Bibliographie
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von Staden 2002 : Heinrich von Staden, « La lecture comme thérapie dans la médecine gréco-romaine », CRAI 2002, p. 803-822.
Valette-Cagnac 1997 : Emmanuelle Valette-Cagnac, La Lecture à Rome, Paris.
Valette-Cagnac 2002 : Emmanuelle Valette-Cagnac, « Corps de lecteurs », in Ph. Moreau (éd.), Corps romains, Grenoble, p. 289-312.
Notes de bas de page
1 Diodore de Sicile, Bibliothèque historique I, 49.
2 Sur les usages thérapeutiques du littéraire, voir le n° 13 (2008) de la revue en ligne Études Épistémè et l’avant-propos d’Ariane Bayle, https://episteme.revues.org/888 (15 mai 2017).
3 Voir Gubert 1993.
4 Voir Berthoud, Elderkin 2013 ou Chaumette 2016.
5 À titre d’exemples, on peut citer Pardeck 1998 ou Aubry 2011.
6 Ouaknin 1994.
7 Bonnet 2013.
8 Detambel 2015. Dans cette veine plus littéraire, voir Cahen, Lefèvre 1989 et Silvera 2007.
9 Pour prendre un exemple qui a fait ricochet dans la presse grand public tout récemment, on peut citer l’étude de scientifiques américains de l’Université de Yale établissant que les gens qui lisent des livres vivent plus longtemps ; voir Bavishi, Slade, Levy 2016.
10 Voir par exemple, Aristote, Politique III, 1282a.
11 Voir mon article « Déclamer pour soigner son corps : l’anaphonèse chez Antylle et Oribase » dans la suite du dossier.
12 Voir l’article de Georgia Petridou, « Poésie pour l’esprit, rhétorique pour le corps : remèdes littéraires et cautions épistolaires dans les Hieroi logoi d’Aelius Aristide » dans la suite du dossier.
13 Voir infra l’article de Virginie Leroux, « Les effets soporifiques de la parole et de la lecture ».
14 Arnaldi de Villanova opera medica Omnia X, 1. Regimen sanitatis ad regem Aragonum, Capitulum quantum. De dormicione et corporis tranquillitate, L. Garcia-Ballester, M. R. McVaugh (ed.), Barcelona, 1996, p. 434 ; cité par V. Leroux, n. 56.
15 Avicenne, Canon 1, 3, 2, 2 et Averroès, Colliget 6, 2.
16 Girolamo Mercuriale, De l’art de la gymnastique 3, 7 et 6, 5-6 (éd. et tr. C. Pennuto, V. Nutton, Firenze, 2008, p. 362-371 et p. 633-649 ; voir aussi Agasse 2008, notamment p. 163-164.
17 Rabelais, Gargantua, chapitre 21.
18 Debru 1996, p. 248-253.
19 von Staden 2002.
20 Voir Valette-Cagnac 1997 et 2002. Dans l’article de 2002, elle écrit : « la lecture à voix haute ne produit pas un effet de surface, mais modèle le corps en profondeur et agit jusqu’à l’âme. Cette action directe de la lecture sur le corps et l’âme du locuteur est possible grâce à l’ambiguïté du terme pneuma signifiant à la fois “souffle”, “principe vital” et “espri”, “âme” » (p. 295).
21 Sur les conseils de santé dans les lettres, voir aussi l’étude de Georgia Petridou dans ce dossier.
22 Galien, De sanitate tuenda I, 8 (Kühn VI, 41-42) : « Le dieu de notre patrie, Asclépios, a prescrit la rédaction de nombreuses odes et la composition de nombreux mimes comiques ou de chants méliques à ceux qui, parce qu’ils avaient des mouvements passionnels trop forts, avaient un tempérament du corps plus chaud que la normale. À d’autres, nombreux aussi, il a prescrit de pratiquer la chasse, l’équitation ou la lutte armée ».
23 Celse, Sur la médecine, prol. 5-6.
24 Dans le prologue du Sur la médecine, Celse va même jusqu’à avancer l’idée que la médecine a été inventée par des intellectuels pour pallier le manque d’exercice lié à leur travail sédentaire sur les livres ; voir Celse, Sur la médecine, prol. 6-7.
25 Voir le texte de Georgia Petridou dans ce volume, mais aussi Petridou (2016).
26 Sur la maladie comme évènement social, voir Mattern 2008, p. 69-92 et la contribution d’Emmanuelle Valette-Cagnac dans ce dossier.
27 Sur les Deipnosophistes d’Athénée, voir Jacob 2013.
28 Plutarque, Préceptes de santé 16, 130a-b.
29 Les expressions « medecins de veloux » ou « medecins veloutez » sont utilisées par le médecin du xvie siècle Sébastien Colin pour critiquer les médecins qui utilisent la danse, les jeux et les textes littéraires pour faire passer leur médecine. Il écrit : « comment pourra il trouver les scopes et indications de guérir par les fables, dances, jeux et gambades ? » ; voir Sébastien Colin, Déclaration des abus et tromperies que font les apothicaires…, Tours, 1553 [réimp. Genève, 1971], p. 26-27.
30 Voir Marx 2009 et Marx 2012, notamment p. 87-122.
Auteur
Université de Reims, IUF
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