Cartes et annexes
p. 289-299
Texte intégral
Archives de l’OFPRA
1Les archives de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) sont composées de tous les dossiers des demandeurs d’asile depuis 19521, date de la création de l’office2. Elles contiennent également les archives de certains offices de réfugiés de l’entre-deux-guerres (Office central des réfugiés russes, Office central des Arméniens, Office des Géorgiens). L’OFPRA a également hérité des dossiers de l’Organisation internationale des réfugiés (OIR) dans le cas où ces dossiers concernaient des personnes qui par la suite se sont adressées à l’OFPRA pour obtenir le certificat prouvant leur statut de réfugié.
2Les dossiers de réfugiés exploités pour l’étude font partie des archives dites « mortes » (réfugiés décédés, naturalisées, présents en France de façon transitoire). Ces archives sont déposées dans deux centres différents l’entrepôt de Garonor constitué en 1975 et rassemblant environ 50 000 dossiers le centre de Fontenay-sous-Bois dans lequel nous avons pu effectué notre recherche3.
Sélection des dossiers OFPRA
3Le seul principe de classement des dossiers personnels de réfugiés entreposés à Fontenay est l’ordre alphabétique (toutes les nationalités y sont donc confondues). Ces documents sont conservés dans des cartons comprenant en moyenne une trentaine de dossiers. Compte tenu du classement des archives, nous avons décidé de procéder à un sondage aléatoire dans chacune des lettres de l’alphabet (qui comportent en moyenne une « allée » de rayonnage (à gauche et à droite), en soustrayant 10 cartons par lettre dans la première étagère de l’allée. Ce principe de sélection n’a pu être toujours respecté en raison des aléas de classement des cartons, effectué par un archiviste polonais ayant une curieuse conception de l’ordre alphabétique. En effet, le classement a été réalisé autant sur une base alphabétique que phonétique. Un exemple les lettres « CZ » (très courantes dans la première syllabe des noms polonais) correspondent en français au son « TCH », d’où la présence dans l’allée C de tous les dossiers commençant par « tch » ! Les dossiers commençant par « ch » se trouvent en partie dans l’allée C mais également dans l’allée S, car « SZ » correspond au son français « Ch »... Nous avons pris en compte ces cas de figures, en limitant la consultation des cartons dont les premières lettres avaient déjà fait l’objet d’enregistrement de dossiers. D’autre part, il nous est arrivé d’avoir affaire à des séries de cartons qui à l’évidence ne comprenaient aucun dossier de réfugiés russes. Le cas le plus exemplaire à cet égard fut l’espace occupé par les cartons de réfugiés asiatiques « Ngyen ». Dans ces situations, nous n’avons pas respecté le principe défini au départ, et avons pris des cartons au hasard dans les rayonnages proches.
Principe d’exploitation des dossiers
4L’ambition initiale était de constituer un sondage sur environ 10 % des dossiers de réfugiés russes (nous basant sur l’estimation du responsable des archives qui évaluait à 10000 le nombre de dossiers russes archivés à Fontenay). En effectuant un premier essai sur une série de 10 cartons, il s’est trouvé en moyenne de 4 dossiers de réfugiés russes par carton, d’où le principe d’effectuer mon sondage en prenant 10 cartons par lettre alphabétique de façon à obtenir un échantillon d’environ 1 personnes. En réalité, la moyenne du nombre de dossiers de réfugiés russes par carton est de 5 (le nombre varie énormément en fonction des lettres. Certains cartons ne contiennent que des dossiers de Russes ceci est notamment remarquable pour les cartons portant comme indication nominative un nom patronymique comme Alexandrov, Victoroff, Ivanov, etc.). 1476 dossiers de réfugiés russes ont ainsi été enregistrés. Cet enregistrement porte sur les réponses faites au questionnaire contenu dans le dossier (questionnaire de l’OFPRA ou de l’Organisation internationale des réfugiés, OIR). Il est rare que ce questionnaire ne soit pas accompagné d’autres documents (ancienne carte de réfugié Nansen, autobiographie, ancienne trace de traitement administratif par l’Office central des réfugiés russes, correspondances administratives diverses, etc.).
Enregistrement des dossiers
5Respectant la consigne d’anonymat, les informations contenues dans chacun des questionnaires ont été enregistrées selon le principe suivant numéro du carton, emplacement du dossier de réfugié russe dans le carton (1, 2, 3, etc.) et lettre de l’allée.
6L’ensemble des rubriques du questionnaire ont été saisies par codes (numérique et caractère selon les questions). Les questionnaires diffèrent selon les périodes et les organismes de prise en charge. Ainsi les questionnaires de l’OIR (parfois complétés par la présence d’un questionnaire OFPRA) ne fournissent pas la raison du départ, sauf lorsque celle-ci fait l’objet des commentaires de l’enquêteur, ce qui est très fréquent. Les premiers questionnaires OFPRA (distribués jusqu’en 1953) ne sont pas aussi détaillés que ceux qui suivent quant au contexte du départ, au motif de la venue en France, etc. On distingue 4 types de questionnaires le questionnaire OIR qui prévaut évidemment dans le cas des DP (Displaced Persons), des prisonniers de guerre, etc. (4 pages recto verso) le premier questionnaire OFPRA (3 pages recto) distribué en 1952 au moment de la création de l’Office, le second questionnaire OFPRA (le plus couramment rencontré pour les réfugiés Nansen enregistrés dans les années cinquante et soixante et qui présente le plus exhaustivement les itinéraires géographiques et sociaux) le troisième questionnaire OFPRA (4 pages recto verso) distribué dans les années soixante-dix. Il se distingue du précédent par sa présentation, par certaines des questions posées (la rubrique religion contient désormais la mention de « musulman » la contrainte exercée au départ doit faire, entre autres, l’objet d’amples développements, etc.). Le premier questionnaire OFPRA existe en version française, russe et ukrainienne et ces deux dernières sont distribuées tout au long des années cinquante et soixante. Cependant, il n’est pas rare que les seconds questionnaires (version française uniquement) soient remplis en russe.
7Le programme d’enregistrement des questionnaires a été conçu sur la base du second questionnaire OFPRA (le plus courant) contenant les rubriques suivantes :
Nom4
Prénom
Date de la demande
Autre nom ou autre orthographe du nom
Nationalité actuelle
Nationalité d’origine
Nom et prénom du père
Nom et prénom de la mère
Date et lieu de naissance (ville-pays)
Religion RC-prot-isr-grec-ortho, autre confession (rayer les mentions inutiles)
Situation de famille célibataire, marié, séparé, divorcé, veuf (rayer les mentions inutiles)
Nom et prénom du conjoint
Date et lieu de naissance du conjoint
Nationalité d’origine du conjoint
Nationalité actuelle du conjoint
Prénoms des enfants
Date et lieu de naissance des enfants
Adresse actuelle
Lieux de résidence depuis 1939
Date d’arrivée, date de départ (ville, village, province, pays)
Date d’entrée en France avec ou sans autorisation5
Profession ancienne6
Emploi actuel7
Service militaire dans quel pays, dans quelle armée, à quelle époque ?
Éducation : école primaire, lycée, faculté, etc.
Dans quel(s) pays (en indiquant la ville et le camp) avez-vous séjourné avant de venir en France ?
Indiquez la mission de l’IRO (OIR) ou les offices auxquels vous vous êtes adressé
A quelle date, dans quelles conditions et pour quelles raisons avez-vous quitté votre pays ?
Dans quelles conditions êtes-vous venu en France (contrat de travail, clandestinement, passeport, titre de voyage)8 ?
Pourquoi ne vous adressez-vous pas à votre consulat et pour quelles raisons ne voulez-vous pas rentrer dans votre pays ?
Quels sont les documents personnels que vous possédez ?
Signature du réfugié en certifiant exacts les renseignements donnés
Observations de l’OFPRA9
Les archives de l’Office central des réfugiés russes
8Les archives de l’Office Central des Réfugiés russes conservées dans le centre d’archives de l’OFPRA sont composées de tous les dossiers de réfugiés traités depuis 1924 jusqu’à la fin des années quarante (les offices de réfugiés ont été officiellement abolis par circulaire ministérielle au moment de la création de l’OFPRA en 1952. À partir de 1945, les réfugiés soviétiques ont été pris en charge par l’OIR, l’OCRR ne s’occupant que des réfugiés Nansen). Ces archives comportent également plusieurs fichiers de réfugiés russes un premier fichier alphabétique bilingue (fiche recto en russe, verso en français) qui s’arrête en 1941, date à laquelle est créé un nouveau fichier en langue française exclusivement. Ce changement de procédure et l’établissement d’un nouveau fichier correspondent sans aucun doute aux modifications intervenues dans l’administration de l’Office au moment de l’occupation allemande.
9Les dossiers de réfugiés correspondent aux différentes interventions de l’OCRR. Ils sont classés chronologiquement, par année, et non nominativement, de sorte qu’ils ne peuvent constituer par leur volume un indicateur du nombre de réfugiés enregistrés à l’OCRR. Chaque dossier comprend l’original de la pièce délivrée par l’Office et éventuellement la correspondance de sollicitation adressée par l’intéressé. Il indique en bas de page les pièces justificatives ayant permis de délivrer le certificat ou l’attestation demandée. Ce sont les passeports, les laisser passés ou, à défaut, les déclarations du réfugié qui permettent d’identifier les différentes vagues d’immigration des réfugiés.
10Les raisons pour lesquelles les réfugiés sont amenés à s’adresser à l’OCRR sont très diverses. Nous avons effectué un recensement d’après les dossiers consultés qui se présente comme suit :
Traduction certifiée conforme d’une pièce d’identité, d’un document d’État civil, d’un diplôme d’études, d’une recommandation officielle.
Délivrance de certificat de réfugié russe, ayant pour but de prouver la nationalité de l’individu. Ce certificat était nécessaire pour l’établissement d’une carte d’identité d’étranger si l’intéressé ne possédait aucun papier. Il était nécessaire en cas de sortie du territoire, en cas de changement d’État civil (mariage, divorce, déclaration de la naissance d’un enfant).
Déclaration de l’honorabilité de l’intéressé et déclaration certifiée conforme de documents en possession de l’intéressé diplôme, attestation de service militaire, attestation de membre d’une association militaire, caritative ou autre.
Délivrance d’attestations particulières destinées à être produites dans certaines situations et notamment dans le dossier de naturalisation.
Arbitrage de l’Office en cas de contentieux d’un réfugié avec les pouvoirs publics français.
Notes de bas de page
1 Rappelons que tous les réfugiés russes de l’entre-deux-guerres, dits réfugiés Nansen, ont dû se faire enregistrer à l’OFPRA à partir de 1952. La plupart ont effectué cette démarche au milieu des années 1950 (utilisant le deuxième questionnaire OFPRA, voir infra).
2 Sur le contexte de la création de l’OFPRA cf. G. Noiriel, La tyrannie du national. Le droit d’asile en Europe, Paris, Calmann-Levy, 1991 ; Jean Brouste, « Le rôle de l’Office français de Protection des Réfugiés et Apatrides », dans Dominique Turpin (dir.), Immigrés et réfugiés dans les démocraties occidentales – défis et solutions –, Aix-Marseille, 1989. Les réfugiés en France et en Europe, quarante ans d’application de la convention de Genève, 1952-1992 (Actes du colloque 11-13 juin), Paris, OFPRA, 1993.
3 L’existence de ces deux dépôts nous conduisait naturellement à émettre l’hypothèse que le centre de Garonor issu du premier destockage des dossiers « mort » allait contenir les dossiers des plus vieux réfugiés, et qu’il y aurait donc une sur-représentation des Russes par rapport aux autres nationalités. En réalité, le sondage effectué sur 100 dossiers des archives de Garonor montre qu’il n’existe aucune différence significative entre les deux centres du point de vue de la représentativité des dossiers de réfugiés. Le premier tri fut effectué de façon aléatoire, les résultats furent confirmés ensuite par le témoignage d’une ancienne responsable de la section ukrainienne retraitée. Compte tenu de ce constat, seules les archives de l’OFPRA localisées à Fontenay ont fait l’objet d’une exploitation.
4 Ici, comme indiqué supra a été enregistré le numéro de dossier
5 88 % des dossiers concernent des réfugiés issus de la Révolution et de la guerre civile ; 5 % concerne des réfugiés arrivés entre 1900 et 1914, 7 % ont trait aux réfugiés de l’après Seconde Guerre mondiale (la proportion de dissidents des années soixante-dix étant pour des raisons évidentes tout à fait marginale).
6 Les informations sur la profession s’avèrent inexploitables en raison, principalement, de l’ambiguïté des formulations du questionnaire. En effet, par profession ancienne, les réfugiés comprennent diversement la question. Certains considèrent qu’il s’agit du dernier emploi exercé avant l’emploi actuel, d’autres l’interprètent comme étant la dernière fonction ou le dernier statut avant le départ de Russie (étudiant, militaire, avocat), etc.
7 S’agissant de « l’emploi actuel », il faut rappeler que beaucoup de réfugiés sont retraités, de sorte qu’il est fréquent d’obtenir les deux réponses suivantes étudiant – retraité.
8 Plus de 52 % des réfugiés des années 1920 déclarent être venus avec un contrat de travail ou avec un visa collectif.
9 De nombreux questionnaires sont remplis, non par les réfugiés, mais par un employé de l’OFPRA. Dans ces cas, certaines rubriques sont systématiquement laissées vacantes comme celle concernant la religion, la profession ancienne (dans le cas où le réfugié est retraité). De même la question ayant trait aux conditions de départ fait alors l’objet de commentaires très brefs, de même que celle concernant la raison de rester en France. En dépit de leurs carences, ces dossiers restent cohérents et complets du point de vue des itinéraires. Ils ont donc été exploités de la même manière que les dossiers remplis par les réfugiés eux-mêmes.
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