Annexe II. Les théories astrologiques : culpabilisation ou fatalisme
p. 293-300
Texte intégral
1Le thème de la tératogénie astrologique mérite quelques précisions. En Occident, l’astrologie antique a été la cible des attaques chrétiennes, pour son prétendu pouvoir de divination et dans le cadre du débat déterminisme et liberté d’action. Jamais cependant, les influences – exogènes mais inanimées – des astres sur le monde sublunaire n’ont été niées et Augustin lui-même écrivait dans un passage par ailleurs hostile à l’égard de l’astrologie :
Il n’est absolument absurde d’admettre que des changements, mais d’ordre physique seulement, soient dus à l’influence des astres : ainsi voyons-nous le soleil, par sa proximité ou son éloignement, provoquer la variété des saisons : la lune, en croissant et en décroissant, fait croître et décroître certaines catégories d’êtres, les oursins par exemple et les huîtres, ainsi que les étonnantes marées de l’Océan1.
Embryologie et tératologie astrale savante
2Au sein de l’univers pensé comme un grand-vivant, les corps célestes sont supposés exercer une action sur tous les aspects du monde sublunaire. Toutes les influences du soleil et de la lune2 sur les plantes, les minéraux, les animaux ou le corps des hommes et des femmes, tous ces effets appartiennent à l’ordre des évidences. Loin de constituer une théorie qui ne serait propre qu’à une secte philosophique, ces croyances sont partagées par l’ensemble de la société. Bien qu’il y ait débat entre savants, le fond du principe demeure le même : les corps célestes influent sur les corps terrestres. La lune détermine les règles féminines et il en est de même pour la formation du fœtus dans le ventre maternel. Mais pour la formation des monstres, la question n’est plus aussi claire et il faut se rappeler que dans la tératologie aristotélicienne ou dans les autres typologies médicales, l’influence des astres n’est pas prise en compte. Les corps célestes pourront toujours être considérés comme une cause première qui agit sur d’autres causes secondaires comme la semence ou la matrice, mais de telles préoccupations sont absentes des traités hippocratiques. On examine l’heure du jour, le mois de l’année ou la saison favorables mais la configuration et les conjonctions des astres ne sont pas considérées comme des facteurs déterminants dans la médecine. Ce sont les astronomes-astrologues de formation et de profession qui vont étudier ces éléments, comme le savant alexandrin Ptolémée au iie siècle ap. J.-C., dans le livre III de son traité d’astrologie connu sous le nom de Tetrabiblos3. Les thèmes classiques de la génération sont successivement étudiés avec le sexe de l’enfant (III, 7), les jumeaux (III, 8) et enfin les monstres (III, 9). Selon sa théorie, il peut naître un monstre, s’il n’existe aucune harmonie entre les astres, notamment entre celui qui domine au moment de la naissance, la lune et les signes zodiacaux. Au regard du reste du Tétrabible, ce passage semble assez surprenant : après une définition matérielle des astres et de leurs influences considérées comme des qualités fondamentales avec le chaud, le froid, le sec ou l’humide, Ptolémée poursuit une analyse en termes de personnification, c’est-à-dire qu’il divinise les constellations et les astres en les intégrant au reste de la religion officielle. Ainsi, s’il y a une configuration à Jupiter ou à Vénus, les produits ressembleront aux animaux qui leur sont consacrés comme le chien, le chat ou le singe. En cas de configuration à Mercure, la ressemblance portera sur des animaux domestiques comestibles comme les volailles, le porc, la chèvre ou le bœuf. Si le zodiaque est un signe humain et qu’il n’y a aucune planète dominante ce sera un « monstre humain ». Dans le cas de configurations malheureuses, Jupiter et Vénus atténuent la laideur et naissent par exemple des hermaphrodites. Vénus joue ici, en tant que déesse, son rôle de garante de la beauté et de la finesse. Quant à Mercure, dieu de la communication pourrait-on dire, il est le seul en tant que planète et divinité à pouvoir provoquer la naissance de sourds-muets. Enfin, si le zodiaque dominant est un animal, et c’est statistiquement le cas deux fois sur trois, il naîtra un monstre animal. La dimension préventive est quasi absente de ces pages et ce constat est encore plus prononcé chez l’astronome M. Manilius d’Antioche, contemporain d’Auguste et fondateur d’une certaine astrologie latine. Selon lui, seules les causes astrologiques permettent d’expliquer les naissances monstrueuses et par la même occasion, il rejette la thèse de l’adultère. Il est intéressant de remarquer que Manilius ne s’attaque pas aux théories médicales mais qu’il se contente de critiquer une croyance moralisante à laquelle nous avons fait allusion. Par contre, contrairement à Ptolémée, il ne conçoit pas l’action d’une semence intermédiaire car selon lui, seule l’action de Fortuna est à prendre en compte. Lorsque l’enfant naît avec une tête d’animal, il faut attribuer cela à Fortune qui est la seule capable de dépasser les lois de la génétique : « Permiscetsaepe ferarum / corpora cum membris humanum non seminis ille / partus erit [...] astra novant formas caelumque interserit ora4. »
3Très certainement, le poids idéologique du principat d’Auguste qui inaugure l’ère impériale n’est pas étranger à cette tendance à l’arbitraire dans une discipline assez appréciée par ailleurs des empereurs Julio-Claudiens5.
4Dans l’Occident médiéval, au xiie siècle, dès sa redécouverte au travers des manuscrits arabes, l’astrologie est classée au sein des arts mécaniques. Au xve siècle, la connaissance de l’astrologie ainsi conçue devient même nécessaire à un bon exercice de la médecine et elle est déjà importante chez un auteur comme Raimond Lulle. Dans le même temps et depuis le xie, est réapparu le thème de la mélothésie zodiacale présente dans l’astrologie antique. Elle consiste en une répartition des signes sur le corps humain. Ces figures prennent de l’ampleur surtout aux xive-xve siècles et ont été largement diffusées au travers de la littérature de colportage. Qu’en est-il alors des pouvoirs tératogènes des astres ? Albert le Grand (1200-1280) énonce le cas en demeurant néanmoins sceptique6. Il en est de même d’Ambroise Paré qui a pu lire dans les Problèmes d’Aristote et aultres filozophes7, compilation de diverses opinions classées par thèmes, une anecdote concernant justement Albert le Grand. Le médecin français ajoute cependant : « Je doute fort si le jugement du seigneur Albert estoit bon8. » Cependant, contrairement à Paré qui reste sceptique, les commentateurs de Ptolémée ont le plus souvent accrédité la thèse de l’influence astrale dans la formation des monstres9. Elle est restée malgré tout une cause possible mais peu développée dans les ouvrages tératologiques du xvie siècle. Pierre Boaistuau, antérieur à Paré, ne doute pas mais il faut reconnaître qu’il s’y attarde bien peu puisqu’il lui consacre seulement trois lignes10. En fait, en dehors des ouvrages spécialisés, la théorie est peu développée par les généralistes. En revanche, les théories astrologiques de cette tradition savante tiennent une grande place dans le Grand Albert et il n’est pas le seul ouvrage à les véhiculer au sein de la littérature de colportage. Dans les différentes éditions, l’on retrouve d’ailleurs à chaque fois une gravure suffisamment explicite. L’on y voit un astrologue – Albert le Grand lui même ? – montrer le ciel étoilé à un couple modeste dont les enfants souffrent de maux divers comme la gibbosité, la claudication ou les pieds bots et les pieds retournés.
5Fidèle à une théorie soutenue dans de nombreux livres savants qui ont traité la question, le Grand Albert relie chaque mois de la gestation à l’influence d’une planète. Cette influence est censée s’accomplir tant sur le corps que sur l’esprit de l’enfant. En voici une présentation sous forme de tableau qui nous semble préférable à un laborieux résumé11.
Mois | Planète | Actions physiques | Qualités morales |
1er | Saturne | conception du fœtus (dessèche) | discernement, raison |
2e | Jupiter | ébauche des futurs membres (chaleur) | générosité, passions nobles |
3e | Mars | distinction des membres, tête (chaleur) | colère, haine |
4e | Soleil | différentes formes, apparition du cœur | science, mémoire et joie |
5e | Venus | peaufine les membres, oreilles, nez, os, sexe, doigts des pieds et des mains | mouvements voluptueux |
6e | Mercure | organes de la voix, yeux, cheveux, ongle | attrait du plaisir |
7e | Lune | peaufine l’ensemble par l’humidité | fortifie les autres vertus |
8e | Saturne | refroidit et sèche (d’où la forte mortalité des fœtus de huit mois) | |
9e | Jupiter | chaleur humide bienfaitrice |
6Planète et gestation
7Ce schéma vaut pour toute gestation. Cependant, chaque naissance a lieu à une période où domine une planète. Ainsi, les corps et les âmes seront ainsi tributaires de cette influence.
8Si l’astre est Saturne, le corps sera obscur, les cheveux noirs, l’être un gros barbu et pourvu d’un petit estomac. Son esprit sera méchant, perfide, coléreux, mélancolique et il aura tendance à être mal habillé.
9Si c’est Jupiter qui domine, l’enfant – puis l’adulte – aura beau visage clair et rond, les dents de devant écartées, la peau blanche un peu rouge par endroit et de longs cheveux. Le caractère sera bon, modeste, pourvu du sens de l’honneur, vertueux, et du goût pour les beaux habits.
10Si c’est Mars, l’individu aura la peau rougeâtre, de petits yeux, des cheveux courts, un corps grossier et courbé, le tout couronné par un esprit inconstant, trompeur, traître.
11Si cet astre est le soleil, le corps sera clair, beau, les yeux grands, et les cheveux longs.
12L’esprit sera celui d’un hypocrite chez qui tout n’est qu’apparence ou un savant, porté sur la science.
13Si c’est Vénus, le corps est beau, les yeux élevés et la grandeur moyenne. L’âme est franche et plaisante, elle est portée sur la danse et les beaux habits.
14Mercure produit des êtres bien faits et de taille moyenne. L’esprit est sage, subtil, philosophe et fidèle ; l’homme est peu riche mais de bon conseil.
15Enfin, si c’est la lune, le corps est agréable et assez petit, et les yeux sont inégaux. L’esprit est celui d’un errant, d’un volage propre à rien.
16À ces combinaisons, il faut encore ajouter l’influence d’autres facteurs comme le jour de la lune où a lieu la naissance, le jour de la semaine ou de la nuit et enfin l’heure12. En fait, les jours de la lune ne sont pas présentés comme propices à l’influence du corps céleste mais sont simplement favorables ou néfastes – sans aucune autre explication – tant en ce qui concerne l’aspect du corps et de l’esprit que le destin de l’enfant.
17La présence de Saturne en tant que planète dans les débuts de la vie n’est pas originale car on le retrouve, comme divinité, actif en cette tâche dans l’ancienne religion romaine. D’autres références à des dieux antiques sont également présentes : Vénus contribue au façonnage du sexe de l’enfant et donne un caractère voluptueux porté vers les choses de l’amour et de la séduction. Des remarques semblables pourront être faites à l’égard de Mars dont la fonction guerrière du dieu antique se retrouve dans les caractères attribués à la planète. En fait, tout ceci n’a rien de surprenant dans le contexte de la culture chrétienne, puisque dès les origines, l’une des principales critiques chrétiennes à l’égard des païens était d’avoir transformé des corps célestes en divinités pourvues de caractère humain. L’influence naturelle de ces astres n’en fut pas niée pour autant. Alors que Ptolémée, malgré une certaine matérialisation, continuait de les considérer comme des divinités et des êtres – l’exemple des monstres est convaincant –, l’astrologie chrétienne a par force fini de les naturaliser, c’est-à-dire d’en extirper toute personnalisation. Ainsi, les arguments ne s’expriment qu’en termes de qualités physiques comme le chaud, le froid, le sec et humide. Sur ce point du moins, on peut établir que la critique chrétienne a poursuivi l’œuvre entamée par les « rationalistes » antiques, comme Aristote, Cicéron ou Plutarque qui s’attaquèrent aux prétendues influences de la lune. Dans les deux cas, les intérêts étaient communs. Quant à son épistémologie, l’astrologie du Grand Albert présente un nombre tel de paramètres qu’un déterminisme rigoureux devient difficile. Jours du mois lunaire, de la semaine et heures se conjuguent de manière à ce que plusieurs astres interviennent et que les portraits types se mélangent. Ainsi, toute distorsion à la règle pourra s’en trouver justifier. Dans le cas du Grand Albert et de toute l’astrologie en terre chrétienne, cette absence de rigueur est non seulement assumée mais elle est approuvée et sur cette question, le Grand Albert prend l’initiative de devancer d’éventuelles attaques théologiques. « On pourrait conclure de mes paroles qui s’ensuivrait que rien n’arriverait dans le monde que par nécessité et absolument et [...] que je voudrais dans ce livre obscurcir et détruire la foi catholique13. Ainsi, il se garde bien de fournir une configuration astrale particulière susceptible de provoquer des naissances monstrueuses. Peut-être parce qu’elle relevait des astres trop souvent sollicités pour le déchiffrage du destin, la tératologie astrologique ne put en aucun moment se targuer d’un déterminisme théorique qui par ailleurs, ne fut jamais contesté – bien au contraire –, pour la médecine ou pour bien d’autres sciences.
L’influence des astres dans la culture folklorique
18La croyance en l’influence des astres sur le monde est répandue dans la culture folklorique et la météorologie y tient une place importante14. Cependant, l’influence des corps célestes semble se limiter à celle de la lune et sur ce sujet, les folkloristes ont recueilli des témoignages nombreux dont voici quelques exemples15. Dans les Vosges et en Gironde, l’enfant conçu en lune croissante sera un garçon. Au contraire, si la conception a lieu durant la lune décroissante, ce sera une fille. En Anjou, il en est de même pour les bêtes mais c’est le contraire dans le Puy-de-Dôme où les mâles sont conçus en vieille lune. Dans la région de Liège, la configuration est identique mais c’est le moment de l’accouchement qui importe et non celui de la conception. Dans les Vosges, un enfant conçu pendant la lune rousse sera vigoureux, forts mais jaloux, sournois, traître et vindicatif. Il existe un écho de cette croyance datant du xve siècle selon laquelle les enfants petits sont engendrés en l’absence de lune16.
19Quant aux accouchements, ils sont plus pénibles pendant le quartier descendant (Basse-Bretagne), croyance à mettre en relation avec la théorie classique présente chez Hippocrate et bien d’autres, qui considère les grossesses et les accouchements d’enfants femelles plus éprouvants. Si dans le Béarn, l’enfant né en lune croissante est robuste, en Bretagne on pense au contraire que les boiteux, bigles, bossus et borgne, c’est-à-dire ceux atteints du B, naissent pendant le croissant. On peut également prédire le destin du nouveau-né. En Basse-Bretagne, si l’enfant naît la nuit par le clair d’une lune cernée de nuages, comme étranglée, il périra pendu. Si la lune est en croissant comme suspendue au ciel, il en sera de même. Si l’astre est submergé de nuage, il périra noyé. On le voit, l’influence est pensée aussi comme un message écrit sur le mode analogique.
20Par ailleurs, selon la période de l’année de la naissance, le caractère ou la valeur de l’être changent, et même sur les animaux domestiques. Pour les chats, par exemple, le mois de mars est propice (Anjou) ainsi que le mois d’avril : ils seront bons chasseurs. Au contraire, ceux de mai et d’août seront nuls (Lorient)17. Dans les Deux-Sèvres, c’est le moi de mai qui est le meilleur. Par contre, il ne faut pas mener la vache au taureau les trois premiers jours de mai, les trois du milieu et les trois derniers car les veaux seraient torts et bossus.
21L’influence de la lune sur le physique de l’enfant est particulièrement représentée en Bretagne. La jeune fille qui sort uriner dans la nuit doit éviter de se tourner vers la lune, surtout si celle-ci est « cornue », en croissant, car la personne risque d’être loaret, « lunée », c’est-à-dire fécondée par la lune. Elle doit prendre garde à n’avoir aucun contact avec les rayons de l’astre. Les enfants qui naîtraient seraient loarer, « lunatiques ». Dans ces derniers exemples, l’influence est plus pensée sur le mode matériel qu’analogique. Dans la région de Morlaix (Finistère Nord), la jeune fille doit éviter de sortir découverte pour des raisons semblables car son enfant risquerait d’être monstrueux18. D’ailleurs, si la femme est déjà enceinte, il lui est strictement interdit de sortir la nuit : « si tu vas dehors, la lune se vengera »19. Un enfant né loariet n’est pas forcément lunatique, il peut être disgracié physiquement ou moralement. Selon Paul Sébillot, ces croyances se limiteraient à la Bretagne où la lune y est perçue comme un astre irritable et vengeur. Au cap Sizun, même les hommes ne doivent pas aller uriner dehors car si la lune les voit, elle fera des grimaces et les enfants risqueraient de naître idiots20. Par ces derniers exemples, nous nous rapprochons de la théorie de l’imagination et de l’impression émotive qui fit interdire aux femmes enceintes le cirque, le carnaval et ses masques grotesques et tous les spectacles en général21. Quant aux théories, tout est dit et son contraire mais l’essentiel demeure : la lune exerce une influence déterminante.
Astrologie savante et astrologie folklorique
22Il est clair que les croyances collectées par les folkloristes aux xixe- xxe siècles diffèrent des théories astrologiques savantes véhiculées par le Grand Albert. À l’exception de la liste des jours lunaires fastes et néfastes22 dont le principe est fréquent, il est central dans un poème d’Hésiode, Les Jours, l’astrologie de la littérature de colportage ne puise pas dans la culture folklorique et celle-ci n’a, semble-t-il, que très peu pénétré celle-là. Voici comment le Dr Westphalen, après avoir donné différentes causes tératogènes recueillies dans sa région de Metz, achève la notice « monstre » de son dictionnaire (1934) : « Enfin, les guérisseurs mettent en cause une influence astrologique néfaste entrée en action au moment de la conception23.
23Le médecin folkloriste limite ici la thèse astrologique au domaine très particulier des guérisseurs. La théorie de l’influence des astres et des constellations sur le corps du fœtus relève, semble-t-il, d’une tradition exclusivement livresque. Les sorciers pour qui le livre24 était important, étaient plus susceptibles d’accréditer l’interprétation astrologique, d’autant qu’a contrario, elle ne fut retenue que très rarement par le reste de la population. Dans le milieu « populaire », elle appartenait à une marge culturelle que l’on pourrait dire « savante » par sa dimension élitiste et « latérale » par sa répartition culturelle.
Un fatalisme excessif ?
24Il est légitime de se demander pourquoi cette théorie d’origine savante qu’est l’astrologie n’a pas réellement pénétré le corpus populaire des explications tératologiques. Il est possible qu’elle ait constitué une explication trop déterministe et théorique, avec une dimension explicative construite exclusivement a posteriori. En définitive, c’est toute la dimension préventive qui fait défaut puisque réussir un enfant est le fruit d’une stratégie complexe dont l’enjeu est le contournement des nombreux dangers et obstacles contrariant le bon déroulement du processus biologique. En quelque sorte, la maxime serait « mieux vaut prévenir qu’expliquer ». C’est bien autour de ces enjeux divergents que sont distinguées d’un côté, les analyses philosophiques et de l’autre, les analyses médicales : pour ces dernières et notamment en « gynécologie », la notion préventive est fondamentale. De plus, la méfiance théologique officielle à l’égard du déterminisme ne pouvait que mal s’accommoder avec cette forme de fatalisme : ce dernier pouvait en outre, rendre caduque la culpabilisation à l’égard de certaines pratiques sexuelles éventuellement tératogènes.
Notes de bas de page
1 Augustin, Cité de Dieu, V, 6. Tгad. G. Gombès : « Cum igiturnon usque-quaque absurde dici posset ad solas corporum differentias adflatus quosdam ualere sidereos, sicut in solaribus accessibus et decessibus uidemus etiam ipsius anni tempora uariari et lunaribus incrementis atque detrimentis augeri et minui quaedam genera rerum, sicut echinos et conchas et mirabiles aestus oceani ».
2 Claire Préaux, La lune dans la pensée grecque, Bruxelles, Académie royale de Belgique, 1973. Concernant l’influence sur la physiologie féminine voir le panorama des sources anciennes dans Danielle Gourévitch, « La lune et les règles des femmes », in Les Astres. Les correspondances entre le ciel, la terre et l’homme. Les « survivances » de l’astrologie antique, actes du colloque de Montpellier, 1996, p. 85-96. Un certain nombre de communications porte sur les époques postérieures. Sur quelques questions en milieu savant voir C.S.F. Burnett « The planets and the developpement of the embryo », in G.-R. Dunstan (edited by), The Human Embryo. Aristotle and the Arabic and European Traditions, University of Exeter Press, 1990, p. 95-112.
3 Éd. et trad. angl. Robins, Loeb CL. Trad. fra. Nicolas Bourdin de Villeneuve, rééd. Paris, Belles Lettres, 1993.
4 Astronomica, IV, 101-105 Classical Loeb Library. Plutarque (La Fortune des Romaines), parle des différents aspects de cette divinité Fortuna.
5 Suétone, Auguste, 94 ; Tibère, 69 ; Néron, 36 ; Tacite, Annales, VI, 22 et 46 (Tibère) ; Horace, Odes, I, 11, 2 ; Satires, I, 6, 113.
6 Des animaux (De animalibus), XVIII, 1, 6 (47), t. II, p. 1214-1215 Stadler, 1920
7 Ainsi que chez Boaistuau, Histoires prodigieuses, c. 5, p. 25, Slatkine-Fleuron.
8 Des monstres et prodiges, c. XIX, de l’édition critique de Jean Céard, p. 68.
9 Junctinus, Cardan (Les Cent génitures), Rodolphe Camerarius (Centuries des nocivités) ou Garcée (Jugement).
10 Histoires prodigieuses, c. 5, p. 69.
11 [A] : Les secrets admirables du Grand Albert, éd. du xixe siècle collationnée sur l’édition latine de 1651 (il y manque le Secret des femmes), éd. fac simile, Nîmes, Lacour, 1994/ [B] : Les admirables secrets d’Albert de Grand contenant plusieurs traittez sur la conception des femmes..., Cologne, 1703, éd. fac simile, Paris, La diffusion scientifique/ [C] : Le Grand Albert, éd. de Bernard Husson, Paris, Belfond, 1970.
12 [A], p. 30-34 (heures) et p. 36-41 (jours de la lune) : au 8e jour l’enfant aura mauvaise figure, au 12e il est boiteux, au 23e il est laid et mal fait. Il y a en tout, huit mauvais jours sur trente et un, soit un bon quart. D’autres sont positifs (l’enfant est parfait au 14e jour, au 17e il naît coiffé), d’autres enfin sont neutres.
13 [B], p. 40 ; [C], p. 78.
14 Par exemple Jean-Philippe Chassany, Dictionnaire de météorologie populaire, Maisonneuvre et Larose, 1970.
15 Paul Sébillot, Le folklore français, t. I, p. 41-44 ; t. III, p. 78-83.
16 Évangile des quenouilles, V, 19 (G).
17 Évangile des quenouilles, III, 33.
18 RTP, XV (1900), p. 471.
19 RTP, XV, p. 597.
20 RTP, XVII, p. 586. L’explication des grimaces pourraient bien être une rationalisation – une explication a posteriori – d’un vieux conseil, à propos du soleil, présent dans l’Évangile des Quenouilles, III, 1 et 21 (les risques sont un orgelet ou la gravelle : en VI, 2, 51 il est juste recommander de ne pas regarder le soleil de face car il peut se fâcher). Pour la lune, l’interdit est exprimé chez Hésiode (Travaux et Jours, v. 727-730) et expliqué par le fait que la nuit est le domaine des « Bienheureux », c’est-à-dire les dieux et les morts. Pour le soleil, la précaution est également attestée parmi les interdits pythagoriques (frag. École pythagoricienne C, 6 Diels-Kranz = Jamblique, Protreptique, 21).
21 Par exemple Claude Seignolle, Folklore de la Provence, Maisonneuve et Larose, 1980, p. 25 : les spectacles aussi divers que la Pastorale, Caramantran, théâtre amateur, Guignol ainsi que le cinématographe et les fêtes foraines.
22 Présente seulement dans le [A].
23 Raphaël de Westphallen, « Monstre », Petit dictionnaire des traditions messines, Metz, Sainte-Barbe, 1934, col. 499-500.
24 Par exemple pour le Languedoc : Jean-Pierre Pinies, « Le livre de magie : l’écrit dans la tradition sorcellaire », in ouv. coll., Un demi-siècle d’ethnologie occitane. Autour de la revue Folklore, Carcassonne, GARAE, 1982, p. 57-76.
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