Chapitre 8. Le néo-paganisme, « foi ethnique », contre-culture ou entrisme politique ?
p. 225-249
Texte intégral
1Le phénomène du néopaganisme n’est souvent mentionné sur la scène publique russe que lors d’affaires à scandales. Ainsi, à l’automne 2001, les services municipaux de Saint-Pétersbourg décident d’ériger une nouvelle église orthodoxe dans le quartier de Frounze et découvrent en cet endroit un temple présent depuis plusieurs années déjà et décoré de figurines en bois représentant des dieux païens. Les adeptes de ce culte protestent vivement contre l’entrée de chrétiens sur un territoire qu’ils considèrent comme leur et exigent des excuses de la part des fonctionnaires qui ont violé les lieux. Ce petit scandale suscite l’intérêt des journalistes et, peu de temps après, les téléspectateurs peuvent suivre la conférence de presse donnée par le prêtre de ladite Communauté des mages, auparavant appelée « Le Pas du loup » [šag volka], Vladimir Goliakov. Celui-ci se présente comme l’héritier d’une tradition païenne nationale vieille de plusieurs millénaires qui compterait parmi ses illustres ancêtres Zarathoustra1. Auparavant, le 21 juin 1995, dans le bâtiment d’une école secondaire, ce même Goliakov avait organisé une prise d’otages de jeunes mormons américains, les accusant de venir propager une foi étrangère au peuple russe2. Le procès ne put se tenir, les services de police ayant refusé de renouveler le visa des citoyens américains agressés, mais Goliakov finit par être condamné, à l’été 2003, à cinq années d’emprisonnement après avoir revendiqué une incursion violente dans le bureau pétersbourgeois de l’organisation de défense des droits de l’homme Memorial3.
2Ces incidents criminels ne sont que rarement mis en relation, par les journalistes, avec les cercles néopaïens, alors qu’il existe des liens étroits entre les mouvances dites védiques et certains cercles de délinquance politique. L’idéologie néopaïenne russe devant beaucoup aux théories aryanistes et au livre de Vles précédemment étudiés par Victor Shnirelman, nous analyserons ici les milieux donnant une interprétation strictement religieuse de l’aryanisme. Ceux-ci sont encore plus radicaux puisqu’ils proposent une lecture littérale du mythe aryen et tentent de « concrétiser » ce que pourrait être une croyance néopaïenne, voire un rituel précis. Néanmoins, les associations néopaïennes ont suivi le même parcours que Pamiat et sont rapidement passées de l’association culturelle ou religieuse à la politisation la plus extrême. Ce radicalisme ne signifie pas que leurs leaders n’exercent aucune influence sur la société contemporaine : comme leurs confrères aryanistes, ils réussissent à infiltrer le domaine intellectuel par leurs discours historiques sur la grandeur russe et à pénétrer le champ politique par le biais des modes ésotériques. L’entrisme du mouvement « Le Prédicateur intérieur de l’URSS » à la Douma en constitue l’un des exemples révélateurs. Le néopaganisme invite alors à s’interroger sur le développement de ces nouvelles « fois ethniques » qui remettent en cause l’universalité des grandes religions et tentent de démontrer le lien intrinsèque entre spiritualité et identité nationale.
La préhistoire soviétique du néo-paganisme Russe et la multiplication contemporaine des associations
3Les premières mouvances néopaïennes organisées apparaissent en Russie dans la dernière décennie soviétique. En 1979, Valeri Emelianov, spécialiste de littérature malgache, publie à Paris et à Damas une série de travaux dans lesquels il cherche à prouver que Jésus tout comme le prince Vladimir, fondateur du premier État kiévien et qui a converti la Russie au christianisme byzantin en 988, étaient des agents d’un complot judéo-maçonnique mondial. Une fois sorti de l’hôpital psychiatrique où il avait été interné après le meurtre de sa femme, il adhère au mouvement Pamiat puis en dirige l’un des courants schismatiques, celui de la revue Rousskaïa pravda, qui semble avoir été liée, de près ou de loin, à l’assassinat aujourd’hui encore inexpliqué du prêtre réformiste Alexandre Men4.
4Dès la deuxième moitié des années 1970 existe à Moscou un « Ordre noir SS » auquel le poète symboliste et spécialiste de l’histoire de l’occultisme Evgueni Golovin semble avoir participé5. Celui-ci enseigne aujourd’hui à l’Université nouvelle, institution qui accueille également deux anciens proches du cercle de Golovin, Alexandre Dougin et, de manière plus irrégulière, Geïdar Djemal. Ces penseurs ne se cantonnent pas à des discours ésotériques ou occultistes, mais tentent, en particulier dans la première moitié des années 1990, de réhabiliter par leur attitude on ne peut plus ambiguë certains traits du national-socialisme. L’expérience allemande de l’entre-deux-guerres se trouve en effet remise à la mode par les mouvances radicales du nationalisme russe. Elle est, par exemple, ouvertement revendiquée par certains journaux comme Nasledie predkov, dont le titre (« L’héritage des ancêtres ») confirme la filiation avec son homonyme nazi, l’Ahnenerbe Stiftung, tandis que Era Rossii exalte régulièrement « le national-socialisme mystique » et ses liens avec tout un ensemble de « cultes anciens de l’esprit humain » qui devraient donner naissance au surhomme païen6. On pourrait également mentionner les partisans déclarés du nazisme historique, comme le journaliste Vladimir Koutcherenko (de son pseudonyme, Maksim Kalachnikov) qui commente avec admiration l’intelligence extraordinaire d’Heinrich Himmler et dit espérer en une acclimatation rapide de l’esprit SS sur le sol russe7.
5Les milieux les plus radicaux découvrent ainsi les références à l’aryosophie germanique et à ses grands noms historiques comme Guido von List (1848-1919) et le célèbre orientaliste Jorg Lanz von Liebenfels (1874-1954). Empreinte du pessimisme culturel de la Vienne fin de siècle, l’aryosophie cherche à conjuguer le pangermanisme avec le renouveau de l’occultisme dû à la mode théosophique et se donne pour but de recréer la religion païenne originale des premiers Germains. L’aryosophie russe ne se limite pas à mieux faire connaître l’expérience occidentale en Russie, mais développe également certaines particularités nationales de mise en valeur de l’héritage slave. Ainsi, dès le début des années 1980, Vladimir Tchivilikhin avait affirmé très clairement dans son roman La Mémoire que « ce sont nous, et non les Allemands, qui devrions être considérés comme les Aryens8 ». Toutefois, l’un des principaux problèmes des partisans de l’aryanité russe reste l’absence de sources directes sur les dieux païens anciens, qui ne sont connus que par les textes chrétiens. En manque d’un équivalent slave des Edda, les néopaïens élaborèrent donc de nombreux faux (les chants de l’oiseau Gamayon, le livre des étoiles de Koliada, le chant de la victoire sur la Khazarie juive de Sviatoslav le Brave, le Rig-Veda de Kiev, etc.), et ce fut le livre de Vles qui s’imposa finalement par sa combinaison équilibrée de récits pseudo-historiques et d’hymnes aux dieux. Mirolioubov fut apparemment le premier à utiliser le terme de « védisme » pour désigner ce néopaganisme russe et l’enrichir de la prestigieuse filiation indienne des Védas.
6Cette mouvance néopaïenne fut très présente dans le mouvement Pamiat des premières années, avant que celui-ci ne soit repris en main par des orthodoxes plus classiques, invitant alors V. Emelianov et V. Averianov (prophète du « karaté astral » assassiné à la fin des années 1980) à quitter l’association9. Durant la perestroïka, à Leningrad, Vladimir Bezverkhi, professeur dans l’un des établissements de la marine de la ville, découvre ledit védisme slave et organise parmi ses élèves une « Union des mages ». Le but politique déclaré de cette association est, selon les termes mêmes de son fondateur, d’assurer la domination des races européennes, l’extermination partielle des Juifs et des métis et « la victoire du fascisme »10. Le KGB, jusque-là plutôt tolérant envers les mouvances nationalistes « classiques », intervient en 1988 et exige de Bezverkhi qu’il cesse ses activités, considérées comme illégales. Il passa toutefois en jugement pour avoir publié en russe une version de Mein Kampf qui avait été spécialement adaptée à la Russie puisque Bezverkhi en avait supprimé les passages négatifs liés aux Slaves. Son introduction affirmait que l’erreur principale de Hitler avait été de ne pas s’être allié aux Russes contre leur ennemi commun, les Juifs. En février 1993, certaines associations tentèrent de faire inculper Bezverkhi pour incitation à la haine interethnique, mais la justice le relâcha, ce qui suscita une explosion de joie dans les milieux néopaïens, qui lui manifestèrent leur soutien en collant des affiches antisémites sur la perspective Nevski11.
7Après la chute de l’Union soviétique, les associations néopaïennes se multiplient rapidement : en 1993, seules deux sont officiellement enregistrées alors qu’elles sont déjà sept en 1995 et dix en 199712. Dans la réalité, celles-ci sont bien plus nombreuses, mais la majorité d’entre elles ne se font pas reconnaître le statut de lieu de culte, mais celui, juridiquement moins contraignant, d’association culturelle. Ainsi, d’après l’almanach moscovite Les Mythes et la magie des Indo-Européens, plusieurs dizaines d’associations étaient présentes lors de la célébration néopaïenne du solstice d’été en 1999. À Moscou même sont enregistrés la communauté de Peroun, l’organisation interrégionale « Voskhod », l’Église de Nav, la communauté védique de Kolomenskoïe, le Centre des arts martiaux et de la culture traditionnelle de la Rous, l’organisation de la Charte panmondiale (cf. infra) et de très nombreux autres clubs néopaïens. La situation est à peu près semblable à Saint-Pétersbourg13 : l’Union des Vénètes de Bezverkhi, la principale association néopaïenne de la ville, s’est scindée en trois groupes (les Vénètes blancs, noirs et dorés) et s’est vu peu à peu concurrencée par de nouveaux regroupements comme la Communauté de la conscience écologique de Krin, la Communauté des mages, le groupe « Religion du peuple russe » dirigé par l’hypnotiseur D. V. Kandyba, ainsi que l’Union spirituelle Thesaurus du médecin S. P. Semionov, qui prétend au rôle de coordinateur des divers mouvements nationalistes de sensibilité néopaïenne.
8Le plus connu d’entre eux reste toutefois le « Mouvement de libération russe » de Dobroslav, dont l’acronyme ROD correspond à celui de l’une des divinités païennes réhabilitées. On mentionnera également l’association « Le Prédicateur intérieur de l’URSS », représentante d’un stalinisme néopaïen dont l’acronyme, en russe, ne signifie pas Union soviétique mais « Rouss conciliaire sociale et juste » [Sobornaâ social’naâ spravedlivaâ Rus’, SSSR] et qui prétend avoir des filiales dans plus de 70 villes du pays14. Il existe en effet des associations védiques dans toutes les principales villes de province ainsi qu’en Ukraine et en Biélorussie. Un rôle particulier semble être dévolu à Riazan, qui compte à elle seule trois journaux néopaïens, accueille des séminaires sur le sujet et est l’un des principaux lieux des fêtes néopaïennes. Omsk occupe elle aussi une place spécifique dans cette géographie du néopaganisme russe et tente de dominer la scène sibérienne sur la question en devenant le lieu de pèlerinage des néopaïens russes ainsi que de ceux des pays Baltes. Les activistes les plus militants participent à des rituels dédiés aux divers dieux de la mythologie slave ancienne (Peroun, Vles, Dajbog, Khors, etc.), tandis que d’autres, comme les Vénètes de Saint-Pétersbourg, affirment que le védisme n’invite à aucun rituel car il n’aurait pas été, à l’origine, une religion mais une sagesse.
La nation comme seul objet de la ferveur religieuse ?
9Avant d’analyser la place du néopaganisme dans le champ politique et social, il semble nécessaire de revenir rapidement sur ses principes idéologiques. Les emprunts théoriques des néopaïens russes se font à des sources très diversifiées : les courants aryosophiques allemands du début de siècle, l’hindouisme et le zoroastrisme, voire pour certains l’enseignement, très à la mode en Russie, de Carlos Castaneda (1931-1998)15. Leur lecture de l’histoire nationale est celle d’une décadence millénaire et d’un âge d’or perdu : depuis sa christianisation au ixe siècle, la Russie vivrait sous le joug du Dieu juif, responsable de tous les malheurs du pays, et Lénine n’aurait fait que poursuivre, un millénaire plus tard, l’œuvre destructrice du prince Vladimir. Pour défendre une telle appréhension de l’histoire, les néopaïens s’appuient sur le livre de Vles et l’affirmation de Mirolioubov selon laquelle il existerait plusieurs niveaux métaphysiques de réalité dans le monde (Prav, Iav, Nav), niveaux permettant de révéler le sens secret des événements aux seuls initiés.
10La croyance en un monde parallèle caché entraîne dans son sillage des propos mystiques et eschatologiques empruntés à la tradition russe du cosmisme. Ainsi, la langue russe est présentée comme la plus ancienne du monde et son bon usage permettrait, selon A. F. Choubin-Abramov, auteur de la Charte panmondiale [Vseâsvetnaâ gramota], « de se mouvoir dans un espace à cinq dimensions […] et de dépasser ainsi l’attraction de la terre16». Cette croyance est présente dans de nombreux cercles néopaïens sans toutefois avoir réussi à faire consensus. Ses partisans croient en un pouvoir magique de la langue russe, qui serait un don des forces extra-terrestres aux premiers Slaves et aurait été la langue mère de l’humanité. La graphie de chaque lettre est dotée d’un sens spécifique qui permettrait d’entrer en contact avec diverses forces de la nature17. Les chrétiens auraient donc consciemment altéré la langue russe, alors que celle-ci est d’origine divine, et transformé la fameuse Charte en un simple alphabet cyrillique.
11Les doctrinaires néopaïens rêvent à la naissance d’un surhomme doté de capacités extra-sensorielles. Dans l’organe de l’Union des Vénètes, Rodnye prostory, l’un d’entre eux se proclame même l’un des dieux de la Raison, effectuant à l’heure actuelle un séjour sur terre18. Si ce type de prétention reste en soi assez rare, l’idée de posséder une nature surhumaine est néanmoins très largement diffusée en tant qu’objectif à atteindre. L’un des livres de l’hypnotiseur Kandyba se termine par exemple sur la proposition d’aider ceux qui le souhaitent à « développer des capacités extraordinaires et à atteindre l’immortalité19 ». Dans le journal Ataka, dont le nom est emprunté à la revue de Goebbels, le publiciste Alekseï Chiropaev, membre du Parti national populaire d’A. Ivanov-Soukharevski, mais également de la très orthodoxe Union de la renaissance chrétienne de V. Ossipov, décrit ce surhomme comme un être quasi divin et omniscient : « Il domine, vêtu de métal et porteur sur ses épaules du feu purificateur. Il est tout, le verdict du monde contemporain et son antithèse vivante. Il a la force de tenir et de maîtriser le levier foudroyant de l’histoire… fils de la lumière, porteur du feu, agresseur sanctifié, découvrant le monde à nouveau… incarnation parfaite de la révolution nationale20… » Sa poésie s’inspire ouvertement du fascisme ésotérique allemand et mentionne la prochaine arrivée d’un Hitler russe21. De nombreux néopaïens semblent en effet convaincus que la tant attendue révolution nationale, qui réhabilitera la foi païenne en tant que nouvelle religion officielle de la Russie, n’arrivera qu’à travers des cataclysmes d’ampleur mondiale.
12La recherche de qualités surhumaines se manifeste le plus souvent par des pratiques énergétiques et l’institutionnalisation d’écoles de médecine et d’arts martiaux. Ceux-ci représentent une sorte de version russe du yoga ou du kung-fu. Ainsi, dans la pratique néopaïenne du yoga russe, la sorcière de nombreux contes traditionnels, Baba-Yaga, est appelée Baba-Yoga, c’est-à-dire porteuse du savoir russe sur le yoga. Les détenteurs de cet art accusent la tradition judéo-chrétienne d’avoir calomnié Baba-Yaga et rabaissé les Aryens païens au rang d’esclaves du démon juif Jéhovah. Si l’exaltation d’un principe religieux proprement russe semble systématiquement liée à des discours antisémites, l’attitude envers le christianisme peut cependant diverger et a constitué l’un des principaux points de discorde au sein de l’Union des Vénètes, conduisant le mouvement à son premier schisme.
13Ainsi, certains néopaïens, inspirés de Fichte et de Chamberlain, affirment que le Christ était un sage aryen ayant amené d’Inde le savoir védique et le principe monothéiste, dont il aurait été dépossédé par les Juifs. Aucun espoir d’alliance avec le christianisme russe n’est alors possible. D’autres sont prêts à reconnaître que le christianisme, bien qu’originellement juif, s’est fondu dans la « vraie foi » russe et a alors donné naissance à l’orthodoxie. Cette vision réconciliatrice permet à certaines mouvances néopaïennes de s’approprier le terme d’orthodoxie ou celui de « vieille foi ». Ainsi, à Omsk, l’église orthodoxe vieux-croyante d’Ingliia tente de conjuguer l’hindouisme et les mythes nordiques venus d’Allemagne22. Son temple, au centre de la ville, a l’architecture d’une église orthodoxe, dispose d’un autel et d’icônes peintes dans le style des tableaux d’Ilia Glazounov, mais les sujets représentent en réalité la lutte des dieux solaires aryens contre les démons des ténèbres. Il a fallu attendre l’intervention de la hiérarchie orthodoxe locale pour que le pouvoir admette que ces « vieux-croyants orthodoxes » n’avaient rien à voir avec l’orthodoxie à proprement parler. En avril 2004, à la suite d’un long procès, la justice d’Omsk a fini par fermer ce temple et trois associations proches de lui pour propagande raciste.
14L’Église orthodoxe a mis du temps à organiser une riposte aux théories néopaïennes. Ces dernières années, le hiéromoine Vitali ainsi que le diacre Andreï Kouraev23, jusque-là spécialisés dans la critique desdits ennemis traditionnels de l’orthodoxie, le protestantisme et le catholicisme, ont réorienté leurs propos en direction du phénomène néopaïen et des courants ésotériques. Néanmoins, les discours restent ambigus puisque les néopaïens sont présentés par certains nationalistes orthodoxes comme potentiellement « leurs » bien qu’actuellement « égarés ». En effet, les néopaïens partagent avec les orthodoxes une appréhension négative des deux confessions occidentales, tout comme du judaïsme. Leurs oppositions sont alors perçues comme strictement internes au monde russe, mais présentant une face unie contre l’ennemi extérieur. De plus, l’orthodoxie compte en son sein plusieurs mouvances intéressées par les idées aryennes et pour lesquelles il est difficile de revendiquer une telle identité sans réhabilitation de la foi pré-chrétienne. Ainsi, comme l’affirme Chiropaev, « le baptême ne nous a pas éloignés de l’aryanité ni ne l’a vidée de son sens, au contraire, il l’a purifiée, éclairée et couronnée24 ». Aujourd’hui toutefois, depuis le procès de Viktor Kortchagin (voir infra), les orthodoxes ont commencé à critiquer plus vivement les néopaïens. En 1995, les appels à la haine interethnique de ce théoricien néopaïen n’étaient condamnés que par l’Union des juifs invalides de guerre. Ceux-ci sont aujourd’hui rejoints par l’Union des citoyens orthodoxes, même s’il semble, au vu des propos tenus, que l’association soit choquée non pas de l’antisémitisme de Kortchagin, mais de ses discours sur la solidarité entre orthodoxie et judaïsme.
15L’élément le plus important de la doctrine néopaïenne reste son aspect culturel et historique. Le millénaire d’existence de l’État russe est analysé comme une décadence, alors que le monde slave était à l’époque pré-chrétienne particulièrement développé et aurait possédé la plus ancienne langue du monde, cadeau des dieux. Bien que le livre de Vles commence son récit en décrivant la présence slave en Asie Mineure, la majorité des néopaïens est convaincue de la localisation nordique du berceau aryen, en Arctique ou en Hyperborée, s’appuyant donc là, sans vouloir le reconnaître, sur les traditions germaniques de l’aryanisme. Incapable de rompre définitivement avec une lecture plus classique de l’histoire nationale, Viktor Kandyba situe à Kiev le centre de ce grand empire russe de l’Antiquité qui aurait dominé tout autant l’Empire romain, la Chine, l’Empire mongol que l’Occident médiéval25. Les Slaves auraient apporté aux Indiens les Védas ainsi que l’art de cultiver la terre, et toutes les grandes figures de la philosophie grecque antique auraient été d’origine slave26.
16Selon Emelianov, dans son célèbre pamphlet Désionisation, la falsification de l’histoire européenne ne daterait pas d’aujourd’hui, mais aurait commencé dès Moïse lorsque, venus des profondeurs du Sinaï, les Juifs auraient occupé une Palestine aryenne proto-slave. Les néopaïens se divisent néanmoins sur leur interprétation des Juifs, bien qu’elle reste systématiquement dépréciative. Bezverkhi et ses partisans sont par exemple convaincus qu’ils ne peuvent être que des « avortons » nés d’un métissage racial conçu par les prêtres égyptiens : ceux-ci auraient marié de force des criminels blancs et des représentants de la race noire, leurs enfants conjuguant ainsi psychologie déviante et déchéance d’une race inférieure. D’autres préfèrent reprendre à leur compte l’idée émise par le Chilien Miguel Serrano, qui affirme que les Juifs sont le golem, des êtres artificiels démoniaques qui se nourrissent de l’énergie humaine, d’où leur tradition de meurtres rituels. Pour tous, la principale accusation portée contre le monde juif serait d’avoir donné naissance au principe démocratique, détruisant alors les conceptions étatiques hiérarchisées des Aryens et leur domination mondiale.
Les réseaux de diffusion du néo-paganisme : sous-culture jeune et manuels scolaires
17La question de l’impact des propos néopaïens sur la société russe est particulièrement complexe et laisse supposer des réseaux de diffusion bien plus importants qu’ils ne le semblent au premier abord. Bien que les organisations védiques ne regroupent, sur le plan quantitatif, que peu de membres, l’idéologie néopaïenne dans son ensemble est devenue un élément important de la culture jeune. Ainsi, par exemple, alors que Saint-Pétersbourg ne compte qu’environ 300 militants néopaïens, le site Internet « Les pages de Vles » a été visité par un million et demi de personnes au cours du premier semestre 199927. Les livres d’auteurs néopaïens sont disponibles dans les plus célèbres librairies des deux capitales, ainsi que sur les stands des églises orthodoxes, dans les librairies universitaires et parmi les usuels des bibliothèques. Certains éditeurs ne remarquent pas nécessairement le contenu politiquement engagé de ces ouvrages apparemment consacrés à des questions historiques ou folkloriques. Ainsi, une très belle collection de livres pour enfants a publié, en 2002, un album consacré aux anciens Aryens28, dont l’un des principaux auteurs est le grand propagandiste du livre de Vles, A. I. Assov, qui cherche ainsi à diffuser ses convictions parmi la jeune génération.
18L’idéologie védique se répand également dans la science historique officielle. L’un des exemples les plus pertinents en est le professeur de Novgorod, Petr Zolin, qui proclame dans ses écrits les fantaisies védiques les plus excentriques accompagnées de propos antisémites radicaux29. Il en va de même pour le responsable de la chaire de journalisme de l’université de Tver, Vladimir Ioudin, qui publie dans le journal très engagé de Viktor Kortchagin, Roussitch, et a soutenu son ami lors de son procès pour antisémitisme et xénophobie. Ce phénomène semble au premier regard être spécifiquement provincial, les « profondeurs » de la campagne russe étant traditionnellement plus sujettes à l’agitation nationaliste que les grandes villes du pays30. Il y a en effet moins d’universitaires ou d’académiciens des deux capitales professant aussi ouvertement les théories néopaïennes. Certains accompagnent cependant la parution des « textes védiques » de recensions très positives. Ainsi, V. V. Kolessov, professeur à l’université de Saint-Pétersbourg, a publié un compte-rendu très favorable du livre de A. A. Koulikov, La Mythologie cosmique des anciens Slaves (Saint-Péterbourg, Leksikon, 2001), fondé sur le livre de Vles ainsi que sur l’hymne de Boian, le célèbre faux de Soulakadzev. Selon Kolessov, le livre de Koulikov « exprime non pas son intuition personnelle mais l’intention conciliaire de son peuple » et, grâce à lui, le lecteur est obligé de reconnaître la nécessité de « sauver nos ancêtres, ne serait-ce que dans notre mémoire », par une réhabilitation de leur religion originelle.
19Si la pensée védique commence seulement à pénétrer le monde scientifique, elle est depuis longtemps bien introduite dans la littérature. Les tirages des œuvres à référents védiques atteignent ainsi des centaines de milliers d’exemplaires. Les auteurs I. D. Petoukhov, I. A. Nikitin. E. I. Gouliakovski, S. T. Alekseev ou A. Bouchin excellent dans la description de la magie slave, seule capable de s’opposer aux intrigues sataniques qui se joueraient actuellement dans les coulisses du monde31. Les motifs védiques sont également visibles au cinéma, par exemple dans le film Vassili Bouslaevitch dédié aux byliny de la région de Novgorod et régulièrement diffusé à la télévision : le héros y récite des textes saints védiques n’ayant rien à voir avec le folklore russe ancien et affirme que les Slaves se refusent à devenir les esclaves du dieu chrétien. Le védisme dispose également de sa peinture et de son peintre officiel, Konstantin Vassiliev, dont le musée coordonne régulièrement diverses activités culturelles néopaïennes. Sur le plan musical, ces motifs se retrouvent dans les groupes de rock proches des mouvances skinhead comme Kalinov Most, Kolovrat, Zolotoe Koltso, TNF, Korrozia Metalla, etc. Certains sont particulièrement radicaux, par exemple Kolovrat, dont le chanteur – qui organise librement ses tournées en Russie – a été arrêté juste après l’un de ses concerts à Prague, en janvier 2004, et s’est vu accusé par la police tchèque de propagande nazie.
20Les néopaïens russes ont des contacts internationaux avec leurs confrères occidentaux tout comme leurs « coreligionnaires » des pays Baltes et particulièrement de Lituanie. Ainsi, en 1998, le leader de l’Union des communautés slaves, A. S. Kazakov, s’est rendu à Vilnius pour le Congrès païen mondial, ce qui lui a valu d’être accusé par des hiérarques orthodoxes de propager une « globalisation païenne ». Comme pour toutes les mouvances ultra-nationalistes, les liens avec l’Occident restent conflictuels. Ainsi, les néopaïens russes considèrent les Allemands comme des Slaves germanisés, tandis que les néopaïens allemands leur renvoient la même critique inversée32. Des oppositions semblables se retrouvent entre néopaïens russes et ukrainiens. La quête frénétique d’identité dans l’espace post-soviétique conduit cependant le néopaganisme à y acquérir des formes imprévisibles et peu courantes pour l’Occident. Les références néopaïennes ont ainsi atteint l’islam turcophone : la mode du « tengrisme33 » se développe activement aussi bien en Asie centrale que parmi les peuples turciques de la Volga et de Crimée, et est présente même chez les Karaïtes, qui pratiquent pourtant traditionnellement un judaïsme non talmudique. Le culte du dieu turcique Tengri y est présenté comme un mode original de « déjudaïsation » permettant de s’affirmer en tant que peuple autochtone de Crimée34. Un même processus semble se dérouler au sein de la communauté juive du Daghestan, qui tente de réhabiliter une forme de zoroastrisme ancien transfiguré pour l’occasion.
21À la différence également de l’Occident, le néopaganisme de l’espace post-soviétique n’est pas un effet de mode limité à une jeunesse marginalisée, mais un phénomène beaucoup plus sérieux touchant les élites urbaines cultivées. Au Kirghizstan, le président Askar Akaev lui-même, démis en mars 2005, a déclaré son intérêt pour le tengrisme, tandis qu’en Ukraine le néopaganisme est devenu partie intégrante du programme du Parti politique agrarien, dirigé par l’écrivain S. Platchind. Celui-ci y professe l’origine ukrainienne des Amazones de l’Antiquité, des Étrusques, des Pélagiens, mais également de Zarathoustra et de Bouddha. Les motifs néopaïens sont ouvertement reconnus au sein du milieu académique, qui organise régulièrement des conférences sur l’antiquité unique de l’espace ukrainien35. L’affirmation selon laquelle les Scythes ne sont que les ancêtres directs des Ukrainiens fait dorénavant partie des manuels scolaires validés par le ministère de l’Éducation nationale36. En Russie, la situation des néopaïens reste plus modeste, même si ceux-ci gagnent du terrain. Ainsi, la sortie du livre La Matriochka aryenne, qui regroupe les textes de nationalistes « krishnaïtes » servant de fondement aux théories dudit Parti de l’unité aryenne, a été publiquement encensée par le professeur G. G. Loukav, l’ataman des Cosaques du Kouban V. I. Kaioud, ainsi que par O. I. Semionov, vice-directeur de l’Institut d’information et de prospective près l’appareil présidentiel biélorusse. L’un des auteurs du livre, V. V. Danilov, dirige actuellement la chaire de « sciences naturelles spirituelles » au Département des problèmes théoriques de l’Académie des sciences de Russie et travaille, entre autres, à diffuser ses préceptes au sein de l’institution scolaire.
La politisation des référents néo-païens et leur entrisme au sein des partis politiques
22Si les théories historiques néopaïennes sont extravagantes et relèvent de la mode, très vivace en Russie aujourd’hui, de l’histoire alternative, cela ne signifie pas qu’elles s’épanouissent entièrement hors du domaine politique. Les néopaïens ont en effet réussi leur stratégie d’entrisme dans les structures des partis nationalistes radicaux, ce qui leur garantit un espace de diffusion complémentaire à celui du champ religieux et culturel. Cette présence leur permet également de dissocier certains arguments de leur arrière-fond strictement religieux, donc de toucher des milieux nationalistes plus traditionnels, soit respectueux de l’orthodoxie, soit assez peu intéressés par les questions religieuses, comme l’Unité nationale russe de Barkachov ou le Parti national-bolchevik de Limonov.
23Certaines mouvances néopaïennes restent toutefois peu politisées. La principale représentante de ce néopaganisme strictement culturel est l’association pétersbourgeoise Thesaurus, dirigée par S. P. Semionov. Dans ses ouvrages, présentés comme une « prédication sur la divinité humaine », celui-ci fait référence au livre de Vles, rappelle la trinité païenne Prav-Iav-Nav, condamne les Juifs et les chrétiens, mais fait également preuve d’une qualité littéraire rare dans le milieu en s’inspirant des traditions du cosmisme russe ainsi que de textes bouddhistes. Les discours tenus par Semionov s’adressent à un public cultivé et l’association recrute tout particulièrement parmi les médecins et les enseignants. Si le mouvement s’adonna pendant quelque temps à des séances de méditation collective, les thèmes des réunions concernent avant tout l’écologie ou la lutte contre la consommation de masse.
24Ce dernier élément est en fait commun à tous les mouvements néopaïens, mais il est tout particulièrement dominant dans Thesaurus. L’association a en effet développé des motifs eschatologiques fondés sur l’idée que le monde va à sa perte en continuant à nier les valeurs religieuses au profit du bien-être matériel. Dans la première moitié des années 1990, alors que Thesaurus était à son apogée, les courants nationalistes russes le considéraient comme une excentricité pour intellectuels libéraux et le condamnaient sévèrement, certains ayant même organisé des agressions contre les membres de l’association. Le « libéralisme » dont fut taxé Thesaurus ne peut être compris que dans le contexte du néopaganisme contemporain, majoritairement radicalisé. Ainsi, les représentants du « Mouvement de libération nationale » de Dobroslav, qui furent pourtant à l’origine de l’association, avaient par exemple pour objectif de « nettoyer » les institutions scolaires de tous les non-Russes. L’originalité du mouvement et son refus de toute politisation n’ont cependant pas résisté aux années et l’activité publique de l’association est aujourd’hui très affaiblie.
25À l’exception notable de Thesaurus, l’entrée dans le champ politique de la majorité des néopaïens a conduit à effacer ces nuances originelles. Le néopaganisme étant foncièrement anti-occidental et antisémite, il trouve sa niche idéologique au sein des petits partis politiques qui, eux aussi, rêvent d’une forme de IIIe Reich russe. La figure de Hitler est d’ailleurs souvent appréciée dans les milieux néopaïens, bien que ceux-ci n’aient pas l’exclusivité de ce culte. Ainsi, Barkachov le partage lui aussi, tout en ayant donné sa préférence religieuse non pas au néopaganisme, mais à une église des catacombes, « l’Église orthodoxe authentique ». Dès 1991, il s’est rapproché du père Konstantin Vassiliev, qui a béni la constitution de la milice du parti. Les détracteurs de Barkachov qui l’ont renversé en 2000 l’accusent toutefois d’être proche du bouddhisme37, une accusation qui, en soi, n’est pas en contradiction avec un mysticisme aryen qui a toujours été tourné vers l’Orient et se présente comme syncrétique. Ainsi, en 1999, Barkachov avait prédit l’apparition prochaine d’une série de planètes prenant la forme d’une svastika qui annoncerait l’ère de la Russie. Au sein de l’Unité nationale, de nombreux autres néopaïens occupent des fonctions importantes. C’est le cas par exemple de Viktor Iakouchev, ancien numéro deux du parti qui, en désaccord avec Barkachov, fonda son propre mouvement, l’Union nationale sociale, le 9 novembre 1990, date anniversaire du putsch de Munich. Ce groupuscule se transforma dès 1994-1995 en une formation mafieuse faisant de la sécurité privée un commerce lucratif et Iakouchev fut condamné pour extorsion de fonds. Un autre responsable de l’une des sections de l’Unité nationale, Igor Semionov, est également un néopaïen connu qui fut jugé pour possession d’armes et dont plusieurs proches ont été accusés de meurtre38.
26Parmi les autres groupes néopaïens influencés par le nazisme se trouve l’Église de Nav, fondée par Ilia Lazarenko en 1996, le 20 avril, jour anniversaire de naissance de Hitler. L’un de ses groupes, « Vervolf », de la région de Moscou, s’est fait remarquer par un documentaire le concernant, diffusé à plusieurs reprises sur les chaînes russes, lors duquel le leader du mouvement, Igor Pirojok, exhibait les oreilles coupées des membres ayant été punis, un fait confirmé par la police. La radicalité de ce groupe était telle qu’il agressa à plusieurs reprises des nationalistes orthodoxes, détruisit le quartier général du front national-patriotique Pamiat et tenta de faire échouer l’une des soirées organisées par les Centuries Noires d’Alexandre Chtilmark39. Même si, en 1994, Pirojok et deux de ses proches furent jugés pour complicité d’homicide, de nouvelles recrues ont aujourd’hui remplacé les pères fondateurs. Ainsi, le groupe Schultz-88, de Saint-Pétersbourg, essaye de transcrire les anciens principes nazis en des termes « classiques » pour la Russie, par exemple dans un livre au titre révélateur, Le Paganisme comme fondement spirituel et moral du national-socialisme russe. Le leader de ce groupuscule, Dmitri Bobrov, tente de reprendre les méthodes nazies de formation paramilitaire de jeunes et les entraîne à mener des actions violentes contre les Juifs ou les Caucasiens. Bobrov fut cependant, lui aussi, arrêté après l’agression d’un Arménien et plusieurs actes qualifiés par euphémisme, lors de son procès, de « hooliganisme »40.
27Hitler n’est pas seul à trôner au sommet du panthéon des divinités du néopaganisme et se voit concurrencé par Staline. L’un des premiers à avoir associé le « petit père des peuples » aux affirmations néopaïennes fut V. Emelianov qui, dès la fin des années 1980, s’était tourné vers le Politburo du Parti dans l’espoir d’y trouver des alliés dans sa lutte contre ledit complot judéo-maçonnique. Après la disparition du régime, ce mouvement en faveur d’un national-communisme païen fut maintenu et trouva même une nouvelle vigueur dans la nostalgie de certains pour le défunt système politique. L’évolution idéologique de l’Union des Vénètes est à cet égard révélatrice : alors que Bezverkhi avait commencé sa carrière en tant que fidèle du fascisme et éditeur de Mein Kampf, ses disciples ont finalement donné leur préférence à Staline en tant que plus grand héros de la cause aryenne. Le mouvement, à ses débuts proche de Barkachov, affirma donc par la suite sa sympathie pour Ziouganov et tenta de donner à la mouvance néopaïenne sa place au sein de la structure communiste. Dès avril 1991, au deuxième congrès du Parti communiste russe qui s’était réuni afin de contrer la politique « décadente » de Mikhaïl Gorbatchev, Nina Taldykina, membre de l’Union des Vénètes, avait déclaré que « le communisme en tant que conception, vision du monde, n’a rien à voir avec le marxisme-léninisme ni l’internationalisme prolétarien [car] Karl Marx a été élevé dans les canons du Talmud et Lénine, fils de gantiers et de bijoutiers, n’avait rien de russe » et affirmé qu’« il était temps de rejeter tous ces vêtements idéologiques non russes41 ».
28Si de tels propos choquaient encore, en 1991, ceux qui se considéraient alors comme des fidèles du marxisme, ce discours a aujourd’hui cessé de déranger la direction communiste, elle aussi partie prenante de la russification – à des degrés toutefois divers – de son ancienne doctrine, et sensible à ces néopaïens se revendiquant sans état d’âme du stalinisme. La mystique aryenne est également présente au sein du Parti national-bolchevik, et plus encore en ses marges radicales, celles des skinheads. La section pétersbourgeoise du parti a par exemple tenté de prendre le contrôle de certains groupes skin, mais fut dépassée en cela par l’Union des Vénètes, qui réussit à s’associer, dès 1994, le groupe d’Artem Talakin, « Solstice ». Celui-ci fut toutefois rapidement emprisonné pour avoir participé, en avril 1995, à un pogrom contre des Azéris le jour anniversaire de la naissance de Hitler. Bien que critiqués par les fractions orthodoxes membres de ces différents partis, les néopaïens réussissent à s’y faire accepter grâce à leur extrémisme politique et à leur antisémitisme virulent. Ainsi, le néopaïen Stanislav Terekhov s’enorgueillit d’avoir dirigé, en 1993, le mouvement pourtant originellement orthodoxe de l’Union des officiers, qui fut l’un des premiers à faire couler le sang durant les affrontements au Soviet suprême.
29Certains adeptes néopaïens participent à des mouvances encore plus radicales et plus politisées, en particulier à Moscou, au sein du Parti russe de Russie. Ainsi, son leader Viktor Kortchagin, en procès depuis l’été 2004 pour appel au racisme et à la xénophobie, affirme que, sur le plan théologique, « le christianisme est la religion de la dépravation spirituelle, une forme de sida spirituel, détruisant l’immunité du peuple face au déferlement des forces étrangères ennemies » et, sur le plan historique, « le cheval de Troie du judaïsme grâce auquel les Juifs ont réussi à occuper la Russie42 ». De telles idées sont partagées par les coprésidents du Parti national de la grande puissance russe, Stanislav Terekhov et Alexandre Sevastianov, ainsi que par l’idéologue principal du journal Nasledie predkov, Vladimir Avdeev. De même, à l’été 2000, lors des journées dédiées à Ivan Koupalo organisées par l’Union des communautés slaves et son leader Dobroslav43, certains des slogans arborés étaient on ne peut plus radicaux : « Mort aux judéo-chrétiens », « Mort aux mères judéo-chrétiennes, mort à leurs enfants44 ! »
30Cette haine du christianisme peut déboucher sur des exactions particulièrement violentes. Ainsi, à l’été 2000, dans la région d’Evenkie, un jeune homme affirmant se nommer Roman Arievitch Krichnin tua et décapita le prêtre orthodoxe qui officiait dans l’église du village45. Les membres de la communauté krishnaïte furent inquiétés, mais il se révéla rapidement que l’héritage de Krishna était également revendiqué par le « Parti du socialisme spirituel védique », aussi appelé « Parti de l’unité aryenne ». Malgré cette référence apparente à Krishna, les soubassements idéologiques de ce mouvement ne sont pas tirés de la tradition hindouiste, mais bel et bien du national-socialisme : conformément au règlement, les membres sont hiérarchisés en plusieurs niveaux : « activiste aryen », « socialiste aryen », et enfin « Aryen véritable »46. Ainsi, ledit Roman Arievitch Krichnin n’a fait qu’appliquer de manière littérale les appels au crime de son parti, même si de tels cas de meurtres idéologiques antichrétiens restent heureusement peu courants.
31Ces dernières années, à côté des groupuscules néonazis et des nostalgiques staliniens, est apparu un troisième mouvement politique inspiré des théories védiques et venu cette fois-ci de l’islam. Ainsi, alors que les skinheads agressent régulièrement des individus originaires du Caucase ou d’Asie centrale, certains théoriciens védiques se tournent avec intérêt vers les discours violemment anti-occidentaux et antisémites des mouvances islamistes et reconnaissent préférer les traditions musulmanes à un christianisme judaïsé. Ce recoupement idéologique se retrouve dans les sympathies exprimées par le groupe, déjà mentionné, du « Prédicateur intérieur de l’URSS », considéré par la hiérarchie ecclésiale comme un traître à la cause orthodoxe. Les textes envoyés par l’association au métropolite de Saint-Pétersbourg Johann étaient en effet émaillés de citations du Coran et d’affirmations concernant la supériorité doctrinale de l’islam sur le christianisme. L’un des textes appelle paradoxalement le peuple russe à se convertir à la sagesse ancienne des Slaves védiques tout en concluant sur un éloge de l’islam47.
32Dans un même temps, de nombreux nouveaux convertis à l’islam, d’origine russe, expriment en retour aux néopaïens leur sympathie. L’un des exemples les plus révélateurs en est la figure d’Ali Polossin, prêtre orthodoxe converti en 1999 à l’islam et devenu depuis l’une des grandes figures du Conseil des muftis de Russie – deuxième association des hiérarques musulmans du pays –, puis directeur du département des relations avec l’État de cette même association. Docteur en philosophie et enseignant les sciences religieuses comparées au collège islamique de Moscou, il a publié sur le site www.islam.ru un travail intitulé La Russie a-t-elle un avenir sans l’islam ? Manifeste pour un unithéisme russe [rossijskoe edinobožie], texte dans lequel il cite à de nombreuses reprises le livre de Vles. Si Mirolioubov affirmait à son époque que le védisme slave constituait une forme de pré-christianisme, Polossin pense au contraire qu’il représente un proto-islam et insiste sur le rôle des préceptes musulmans dans la constitution d’une « foi russe » spécifique qui aurait été de tout temps monothéiste. Il définit le christianisme comme une religion juive implantée de force en Russie par Byzance et comme un paganisme [sic] qui affaiblit l’âme des croyants par sa dualité intérieure et ses complexes masochistes48.
33De tels propos sont devenus populaires au sein des structures de l’islam russe : ainsi, l’Organisation nationale des musulmans russes, constituée à l’été 2004, considère avec respect le livre de Vles et son site « La Russie de la vraie foi » (www.pravoverie.org) propose au lecteur un ensemble d’articles prenant la défense dudit védisme russe et de son monothéisme, considéré comme proche de l’islam sur le plan théologique. L’un des principaux activistes de cette nouvelle association, Artur Iastrebov, fut dans sa jeunesse président du comité central du Mouvement solidariste russe, un groupuscule néonazi déjà partisan des théories védiques. Ces recoupements idéologiques sont également visibles dans le roman Fureur, de l’un des auteurs néopaïens les plus populaires, Iouri Nikitin, qui appelle le président Vladimir Poutine à abandonner la foi orthodoxe pour se convertir à l’islam. Les recoupements idéologiques entre islam prosélyte et extrême droite ne sont donc pas spécifiques aux pays occidentaux, mais connaissent également leur version russe, tous étant solidaires contre leur ennemi commun, la société libérale et le modèle occidental.
34L’une des forces du néopaganisme est d’avoir accaparé une partie du domaine ésotérique : l’attirance pour l’occultisme au sein des milieux dirigeants du pays facilite la rencontre entre cercles de décision et milieux néopaïens. Ainsi, parmi les hommes politiques, nombreux sont ceux qui travaillent en consultant des « mages », ce qu’a reconnu, entre autres, Sergueï Davitaï, un proche conseiller de l’ancien gouverneur de Saint-Pétersbourg, V. Iakovlev. Les cinq grands projets architecturaux et d’aménagement de la ville ont par exemple été pensés de manière à ce qu’ils forment le symbole chinois du jing-jang. Davitaï a même affirmé que « celui qui est contre [ces projets d’urbanisme] est un Juif, c’est-à-dire un Russe infidèle. Les Juifs vivent en Russie aux crochets du peuple russe et le trahissent49 ». Ce n’est pas le seul cas. Alekseï Mitrofanov, député du LDPR, a déclaré publiquement à l’été 1997 qu’il consultait régulièrement un groupe d’astrologues connus qui l’éclairaient, par leurs prémonitions, sur la nature métaphysique secrète des événements politiques50. Il en a conclu que l’extension de l’OTAN à l’est était contraire à l’esprit de Staline exprimé à Potsdam et amènerait donc à divers cataclysmes naturels.
35Le groupe du « Prédicateur intérieur de l’URSS », qui se prétend lui aussi capable de révéler le sens caché des choses, a été créé par des nostalgiques staliniens qui invitent à différencier l’hitlérisme du « siono-nazisme » ou du « fascisme juif ». Les membres de ce groupe se considèrent comme les descendants des premiers prêtres païens et sont convaincus de l’origine divine de la langue russe. Ils réinterprètent fébrilement les poèmes de Pouchkine, présenté comme l’un des héritiers de la sagesse païenne, afin d’en décoder le sens mystique et d’y lire l’annonce des dangers qui menacent la Russie. Ils ont par exemple publié un texte, inspiré du poème Rouslan et Lioudmila, consacré au « développement et [à] l’établissement de l’étaticité russe dans le processus historique mondial » ainsi qu’un texte programmatique, la Conception de la sécurité nationale de la Russie, auquel ils ont donné le surnom, inspiré des œuvres de Pouchkine, d’« eau morte » [mertvaâvoda]. Ce document invite le pays à se fermer à toute influence extérieure, en particulier « judéo-maçonnique », et à se construire sur l’expérience commune du nazisme et du stalinisme. Cet événement pourrait relever de l’anecdote si ce texte n’avait fait grande impression sur l’administration de la région de Saint-Pétersbourg et sur quelques députés, en particulier du PCFR et du LDPR51, mais également sur des centristes.
36Ainsi, dès 1994, Ivan Rybkin, alors porte-parole de la Douma, fait connaître aux dirigeants des fractions et groupes parlementaires la Conception de la sécurité nationale signée « Mikhaïl Ivanov, représentant du collectif d’auteurs de la méthodologie de l’eau morte ». Le 25 juillet 1996, le général K. P. Petrov, à la tête du parti politique « Vers la toute-puissance de Dieu » [K bogoderžaviû], lit le texte de l’« eau morte » aux parlementaires du Conseil de la Fédération. Il semble que le document ait également intéressé l’administration présidentielle et que les membres du « Prédicateur » aient pu rencontrer Tatiana Diatchenko, la fille alors toute-puissante de Boris Eltsine. Ils ont également mené une propagande bien orchestrée lors des élections législatives de 2003. Ainsi, le général Petrov et ses proches ont plusieurs fois pris la parole au nom de leur parti tout juste constitué, le « Parti conceptuel Union ». Celui-ci n’a pu atteindre les 5 % de voix nécessaires pour siéger à la Douma, mais certains de ses membres travaillent au Parlement, par exemple Sergueï Lissovski, expert au Comité parlementaire pour la sécurité. Plusieurs disciples du « Prédicateur » et de son texte de l’« eau morte » ont également contribué à la rédaction du texte Processus globaux : les tendances du développement dans le monde et en Russie jusqu’en 2020, un rapport publié au début de l’année 2004 par l’Institut scientifique de recherche systémique près le Parlement de la Fédération et dont le président n’est autre que Sergueï Chakhraï, ancienne figure de proue du libéralisme des années Eltsine. Lyssovski assure même que Vladimir Poutine, lorsqu’il dirigeait le FSB, aurait pris connaissance du texte de l’« eau morte » et l’aurait jugé positivement52.
37Les disciples du « Prédicateur » n’ont toutefois pas réussi à s’ancrer pleinement dans les milieux politiques moscovites, mais les influencent indirectement par le biais d’Alexandre Dougin : membre de la communauté vieux-croyante de Moscou, celui-ci diffuse des préceptes occultistes proches de ceux des néopaïens lors de ses cours à l’Académie militaire et à travers ses articles publiés dans le journal du ministère de la Défense, Orientiry53. Les néopaïens rêvent en effet d’une domination occulte sur les cercles du pouvoir. Ainsi, le journaliste moscovite Vladimir Koutcherenko (sous son pseudonyme de Maksim Kalachnikov), adepte du culte d’Odin et de Peroun et admirateur d’Alexandre Prokhanov, espère en la constitution d’une « SS russe », un ordre secret transformant la Russie en un nouveau IIIe Reich qui affirmerait sa domination mondiale sur les États-Unis54.
* * *
38Ces attentes messianiques sont encore bien lointaines, mais on ne peut toutefois que remarquer combien le néopaganisme est devenu, en une décennie, une force tangible qui a trouvé sa place dans la réalité culturelle de la Russie contemporaine. Reste alors à s’interroger sur l’arrière-fond soviétique de ces mouvances. En effet, l’enseignement marxiste-léniniste tel qu’il a été pratiqué en Union soviétique a toujours été empreint d’un caractère foncièrement religieux. L’idée que l’histoire répond à des lois profondes qu’il suffit de découvrir afin de comprendre le sens du présent et de prédire en partie l’avenir a-t-elle contribué à la confusion entre science et magie ? De nombreuses personnes ayant été éduquées dans cet esprit se sont-elles trouvées psychologiquement prêtes à accepter des propos à la fois mystiques et pseudo-scientifiques, en particulier au sein des élites intellectuelles et politiques ? Le poids de l’athéisme a probablement, lui aussi, joué un rôle important dans cette recherche d’une spiritualité qui n’exige ni pratique rituelle régulière ni arrière-fond théologique et qui se limite à exalter la nation et la terre mère.
39Néanmoins, ce legs soviétique ne suffit pas à expliquer la diffusion des référents néopaïens parmi une jeunesse qui n’a quasiment pas connu le régime précédent. Ses partisans disent condamner les grandes religions universelles et croire en la nécessité de fois qui soient nationales, inscrites dans le territoire, les traditions et l’histoire d’un peuple. En effet, le néopaganisme frappe par son instrumentalisation extrême du fait religieux, entièrement soumis à un sentiment nationaliste exacerbé. Cette mode peut être alors mise en parallèle avec la réhabilitation des religions dites « ethniques » dans d’autres États post-soviétiques, puisque un néopaganisme slave se retrouve également en Ukraine, existe dans une version balte dans les pays Baltes, en particulier en Lituanie, et que le Kazakhstan et le Kirghizstan en développent leur propre version sous la forme du tengrisme. À travers leur revendication d’une foi ethnique, ces néopaïens signalent leur difficulté à accepter l’occidentalisation des sociétés post-soviétiques suite à l’effondrement d’une Union soviétique qui, bien que dénoncée pour son athéisme militant, n’en incarnait pas moins une forme de nationalisme rétroactivement apprécié.
Notes de bas de page
1 On pourra lire à ce sujet l’interview de Goliakov dans Kriminal'nyj vestnik, n° 37, 1993, p. 6.
2 Stogooff I., Revolûciâ sejčas. Dokumental’nyj roman, Saint-Pétersbourg, Amfora, 2003, p. 206.
3 Vaš tajnyj sovetnik, Saint-Pétersbourg, 28 juin 2004, n° 24 (103), p. 6.
4 Stogooff I., op. cit., p. 190.
5 Čelnokov A., « Melkie besy iz šizoidnogo podpol'â », Lica, Moscou, n° 8, 1997.
6 Volâ Rossii, n° 8, 2002.
7 Kalašnikov M., Bitva za nebesa, Moscou, Krymskij most-9D, 2000, p. 326.
8 Čivilihin V., « Pamât' », Roman-gazeta, n° 17, 1982, p. 11.
9 La tradition du « karaté astral » s’est poursuivie un certain temps et a même donné lieu à la parution, en 1992, à Moscou, d’un petit manuel, Méthodes de défense astrale de l’homme russe, avec comme sous-titre « Nous sommes de la famille de V. Averianov. À la mémoire du maître ». Il semble toutefois que cette branche du néopaganisme se soit aujourd’hui éteinte.
10 Lisočkin I., « Neispovedimy puti vedizma », Leningradskaâ pravda, 22 décembre 1988.
11 Un récit détaillé de ces événements a été publié par V. Dolgov, qui a tenté d’instruire un procès contre Bezverkhi. Dolgov V., « Pošel li process ? », Bar’er, Saint-Pétersbourg, n° 2, 1993, pp. 13-15.
12 Gajdukov A. V., « Političeskie aspekty vozniknoveniâ neoâzyčestva v Rossii », Gercenovskie čteniâ 1997. Aktual’nye problemy social'nyh nauk, Saint-Pétersbourg, Fakul'tet social’nyh nauk RGPU im. A. I. Gercena, 1998 ; du même auteur, « Molodežnaâ subkul’tura slavânskogo neoâzyčestva v Peterburge », in Kostyševa V. (dir.), Molodežnye dviženiâ i subkul'tury Sankt-Peterburga : Sociologiâ i antropologičeskij analiz, Saint-Pétersbourg, Institut sociologii RAN Sankt-Peterburga. Filial. Norma, 1998.
13 Le mouvement néo-païen pétersbourgeois a été étudié plus en détail dans Moroz E. L., « Âzyčniki v Sankt-Peterburge », in Šnirel'man V. A. (dir.), Neoâzyčestvo na prostorah Evrazii, Moscou, Biblejsko-Bogoslovskij institut, 2001, pp. 39-55.
14 Evgen'ev M. « Âzyčeskij stalinizm. Učenie “Vnutrennego Predikatora SSSR” », Bar’er, n° 1 (5), 1999.
15 Gromov I. P., Russkie tol'teki, Moscou, 1999.
16 Potaennoe, n° 1 (12), 2000, p. 1.
17 Voir les théories de S. V. Serebrâkov sur son site Internet http://www.mtu-net.ru/rod/inf/inf_VsesV_Serebr.htm, ainsi que le site de propagande de cette théorie, http://gramota.org.ru.
18 Rodnye prostory, n° 3, 1993, p. 20.
19 Kandyba V., Istoriâ velikogo evrejskogo naroda, Saint-Pétersbourg, Lan', 2002.
20 Ataka, n° 12, s.e., s.d.
21 Consulter son site personnel, http://www.nationalism.org/shiropayev/index.htm.
22 Slavâno-arijskie vedy. Sant'i Vedy Peruna. Saga ob Inglingah, Omsk, Arkor, Izd. drevnerusskoj inglističeskoj cerkvi pravoslavnyh Ingligov, 1999.
23 Ieromonah Vitalij, diakon Kuraev A., Rossiâ i novoe âzyčestvo, Moscou, Svâto-Ioannovskij monastyr'. Pravoslavnoe bratstvo svâtogo apostola Ioanna Bogoslova, 2001.
24 Ataka, n° 12, s.e., s.d.
25 Kandyba V. et Zolin P., Real'naâ istoriâ Rossii : istoki russkoj duhovnosti, Saint-Pétersbourg, 1997. Pour plus de détails sur cet auteur, consulter Šnirel’man V. A., « Neistovyj Kandyba. « Russkij vedizm », ksenofobiâ i antisemitizm », Sociologiâ. Psihologiâ. Kraevedenie. Obrazovanie. Materialšestoj ežegodnoj meždunarodnoj meždisciplinarnoj konferencii po iudaike, č. 4. Moscou, 2000 ; du même auteur, « Perun, Svarog i drugie : russkoe neoâzyčestvo v poiskah sebâ », Neoâzyčestvo na prostorah Evrazii, op. cit., pp. 15-19.
26 Texte publié dans le journal de l’Union des Vénètes, « Pesnâ o pobienii iudejskoj Hazarii Svâtoslavom Horobre », Volhv, n° 1, 1991.
27 Gajdukov A. V., « Molodežnaâ subkul'tura slavânskogo neoâzyčestvo v Peterburge », op. cit.
28 Asov A. I. et Konovalov M. Û., Ot x tysâčešletiâ do našej èry do x veka našej èry. Drevnie arijcy. Slavâne. Rus', Moscou, Veče, 2002.
29 Certains des textes de Zolin ont été écrits avec Kandyba.
30 Uzunova V. G., « Provincial'nye sûžety », Bar’er, n° 8, 2004, 15 p.
31 Une analyse de cette littérature peut être consultée dans Šnirel'man V. A., « Gde ležat istoki “Mirovogo zla” », Diagnoz, n° 4, mai 1999.
32 L’idéologue néopaïen A. Ivanov a tenté de dépasser cette opposition germano-slave dans son article « Snimite s nas kavyčki », Atenej, n° 1, 2000, p. 87. Le journal Atenej se situe, avec le même comité de rédaction, dans la mouvance de l’ancien Nasledie predkov.
33 Mode intellectuelle et religieuse des milieux nationalistes turciques consistant à présenter l’islam comme une foi étrangère à ces populations et à réhabiliter le culte animiste ancien du dieu Tengri en le présentant comme un monothéisme en avance sur son temps qui offrirait une cosmogonie parfaitement adaptée au monde contemporain. (Note de M. L.)
34 Ščegoleva T., « Osnovnye ètnokul'turnye aspekty russkoâzyčnoj karaimskoj publicistiki i sostoânie krymskoj karaimskoj obščiny v konce XX – načale XXI vv. », Tiroš. Trudy po iudaike, vyp. 6, Moscou, 2003, pp. 218-235 ; Moroz E. L., « Ot iudaizma k tengrianstvu. Ešče raz o duhovnyh poiskah sovremennyh krymčakov i krymskih karaimov », Narod knigi v mire knigi, Saint-Pétersbourg, n° 52, 2004, pp. 1-6.
35 Šnirel'man V. A., « Nazad k âzyčestvy ? Triumfal'noe šestvie neoâzyčestvo po prostoram Evrazii », Neoâzyčestvo na prostorah Evrazii, op. cit., pp. 130-143.
36 Ivančenko R., Istoriâ bez mifi. Besidi z istorii ukrainskoi deržavnosti, Kiiv, 1996.
37 Lihačev V., Nacizm v Rossii, Moscou, Panorama, 2002, pp. 53, 57.
38 Ibid., pp. 147, 17-20. Semionov était très proche de Dobroslav et s’est plaint dans une lettre publiée de ne pouvoir se rendre à la fête d’Ivan Koupalo, car « nous nous battons contre les Juifs sans répit ».
39 Lihačev V., Nacizm v Rossii, op. cit., pp. 138-141.
40 Une même conclusion concernant ces publications fut rendue par l’expert N. M. Girenko et fut publiée après son assassinat dans le journal Bar’er, n° 8, 2004, 60 p.
41 Rodnye prostory, n° 3, 1991.
42 Ces déclarations ont été tirées du journal édité par Kortchagin, Roussitch, et citées lors du procès. Un récit détaillé de ces événements a été publié sur le site de l’Union des citoyens orthodoxes dans l’article « Neoâzyčniki i nacional-èkstremisty pytaûtsâ prevratit' sud nad Korčaginymv sud nad Bibliej, Bogom i Cerkov'û », Edinoe otečestvo, 26 juillet 2004.
43 Sur Dobroslav, consulter Verhovskij A. M., Pribylovskij V. V. et Mihajlovskaâ E. V., Nacionalizm i ksenofobiâ v rossijskom obščestve, Moscou, OOO Panorama, 1998, p. 25 et suivantes.
44 Un récit de cette fête est disponible dans les journaux Ogonek de juillet 2000 et Vremečko, n° 6, 2000.
45 Versty, 30 mars 2000, n° 36 (163), p. 2.
46 Les statuts du Parti de l’unité aryenne se trouvent en conclusion du livre qui instaure l’enseignement du « national-krishnaïsme » russe : voir Danilov V. V., Močalova I. V., Tajna arijskoj matreški, Moscou, Volâ Rossii, 1998.
47 Voprosy mitropolitu Sankt-Peterburgskomu i Ladožskomu Ioannu i ierarhii russkoj pravoslavnoj cerkvi, Vnutrennij predikator SSSR, Severo-zapadnoe predstavitel’stvo, 1993.
48 Sur la question des liens étroits entre prosélytisme musulman et néopaganisme russe, consulter Moroz E., « “L’islam habite notre avenir ! ” Le prosélytisme musulman en Russie, conversions, institutionnalisation et stratégies politiques », in Laruelle M. et Peyrouse S. (dir.), Islam et politique en ex-URSS (Russie d’Europe et Asie centrale), Paris, L’Harmattan, 2005, pp. 117-134.
49 Soveršenno sekretno, n° 5, 2000, p. 5.
50 Argumenty i fakty, n° 31, juillet, 1997, p. 2.
51 Il a été imprimé en 1992 sur commande d’un militaire, M. N. Ivanov, conseiller de Jirinovski, « spécialement pour les députés et les propagandistes du LDPR », et il est indiqué comme lieu d’édition « ville de Kitej ».
52 Soldatov A. et Borogan I., « Razliv mertvoj vody », Moskovskie novosti, n° 10, 2004. Une version plus complète est disponible sur le site www.agentura.ru.
53 Sur la carrière de Dougin, on pourra consulter Moroz E. L., « Soblaznâûščie vlast' : Evrazijskij fantom », Bar'er, n° 7, 2002, pp. 21-48.
54 Kalašnikov M., Slomannyj meč imperii, Moscou, Krymskij most-9D, 1998 ; du même auteur, Bitva za nebesa, Moscou, Krymskij most-9D, 2000 ; Kalašnikov M. et Krupnov Û., Gnev orka, Moscou, AST – Astrel'– Tranzitkniga, 2003 ; des mêmes auteurs. Osedlaj molniâ, Moscou, AST – Astrel’– Tranzitkniga, 2003. Sur les idées de Kalachnikov, consulter Moroz E. L., « Podnâvšij svastiku. Imperskij proekt Vladimira Kučrenko », http://xeno.sova-center.ru/29481C8/2948351.
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