Introduction de la partie 10
Art et culture
p. 334-335
Texte intégral
1Approcher par la recherche l’art et la culture, c’est à la fois s’intéresser à des supports matériels et aux systèmes de signification complexes et distinctifs qui les accompagnent et qui caractérisent un courant culturel ou une société. À partir des humanités nées à la Renaissance, le xixe siècle a constitué les savoirs systématiques et les méthodes permettant de faire de ces questions des sciences.
2Philosophie comme sciences du patrimoine et de la culture produisent aujourd’hui des questionnements et des méthodologies aussi exigeantes qu’inventives. Leurs approches sont extrêmement variées. Ainsi, l’art et la culture sont l’objet d’analyses s’attachant à les comprendre comme des dispositifs technologiques et comme des représentations du monde. Avec les humanités numériques, l’art et la culture, devenus des données parmi d’autres, peuvent également faire l’objet d’analyses quantifiées ou de représentations numériques.
3Si certaines approches sont spécialisées, les créations artistiques et culturelles peuvent être aussi analysées du dehors, comme des faits culturels, par la sociologie, l’histoire, l’anthropologie ou les sciences cognitives : la culture s’analyse dans ses logiques internes, mais aussi dans la mesure où elle nous informe sur le fonctionnement des sociétés ou de l’esprit humain. En retour, le travail fait par les humanités sur le passé ou le présent d’une culture se nourrit de compétences en communication et en réflexion critique qui participent de la vie démocratique. Discipline des disciplines, la philosophie, qui constitue un champ académique visant à réfléchir sur des questions générales, de l’éthique à la métaphysique, et à observer les autres savoirs, est elle-même l’objet d’une constante réflexion historique et philologique.
4Les réflexions sur la culture rencontrent toujours la question du commun : la culture est à la fois ce qui différencie et ce qui rassemble, ce qui révèle des histoires et des géographies particulières, ouvre à un travail de comparaison et de contextualisation, mais qui se connecte à l’universel en rencontrant des questions générales partagées par (au moins) l’espèce humaine. C’est le cas lorsque l’on essaye de comprendre les premières productions graphiques de la préhistoire, comme le montre ce texte de Carole Fritz. Le patrimoine, l’ensemble des biens matériels et immatériels qui sont considérés comme ayant une valeur culturelle, historique, artistique ou scientifique pour une société, n’est reconnu comme commun qu’à travers des constructions juridiques complexes et différenciées, suggère de son côté Marie Cornu. L’exemple donné du projet de protection des églises creusées dans la roche de Lalibela en Éthiopie est particulièrement éclairant (Marie Bridonneau et Marie-Laure Derat), tout comme les questionnements auxquels se heurtent désormais les musées, dont la mission est de représenter la diversité culturelle, suggère Cyril Isnart. La question d’une histoire mondiale des littératures se pose avec force depuis au moins les années 1990 (Jean-Marc Moura). Si la danse et la musique sont peut-être des arts communs à toute l’humanité, s’appuyant sur des processus mentaux physiologiques et intersubjectifs partagés (Julien Laroche et Asaf Bachrach), elles appellent elles aussi l’approche diversifiée proposée par l’ethnomusicologie (Denis Laborde). Quant à la dimension sonore du monde, elle trouve depuis quelques années sa juste place dans les sciences humaines et sociales (Marie-Madeleine Mervant-Roux). La fiction, capacité cognitive universelle, est elle aussi la mise en rapport de l’individualité avec les interdépendances, avance Jean-Marie Schaeffer. Les rapports interculturels, les études aréales, nous confrontent aux dangers d’un arraisonnement du monde qui le rapporterait à un commun uniquement occidental en négligeant sa complexité et les phénomènes d’occupation culturelle (Cécile Vidal). Les sociétés humaines se sont entremêlées et profondément imbriquées (Michael Lucken). Les cultures résistent à tout arraisonnement simpliste, à toute volonté de traduction et de translation transparente, comme si une dimension commune des productions de l’esprit était de faire résonner la variété des formes de vie et de société.
5Parler de commun plutôt que d’universel est déjà un geste de modestie, qui nous engage à saisir des valeurs et des sensibilités incarnées et non abstraites. Pour chaque discipline des sciences humaines et sociales dont les textes que l’on lira ici ne représentent que quelques exemples, penser le commun peut désormais se faire à partir de méthodes et de disciplines nouvelles, en interrogeant par exemple à nouveau frais la notion de culture avec les sciences de la nature, mais cela demande une infinie délicatesse, mélange de rigueur épistémologique et de modestie scientifique.
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