Avant-propos à la première partie
p. 19
Texte intégral
1La manifestation la plus « phénoménale » des pensées politiques de Strauss et d’Arendt est leur commun diagnostic de crise, leur lecture commune de la situation moderne comme situation de crise. Nous verrons cependant que le lieu apparent de cristallisation de la crise n’est pas le même. Leo Strauss se présente avant tout comme le critique des types modernes de connaissance, c’est-à-dire qu’il analyse les lieux communs de la réflexion moderne comme étant fondamentalement des préjugés modernes, ou encore des modes. En ce sens il adopte une attitude philosophique « classique », celle qui consiste à ne pas accepter comme tel ce qui est donné. Il refuse a priori la modernité comme autorité : la posture du philosophe est une posture critique ; le philosophe est celui qui se place de lui-même en porte-à-faux par rapport à ce qui est communément admis. En mettant à distance les évidences de la modernité, Strauss dévoile leur caractère accidentel.
2Chez Hannah Arendt, la mise en valeur du caractère central et révélateur de l’événement totalitaire s’accompagne du constat d’une crise au sein d’une grande partie des domaines de l’existence humaine (éducation, culture, autorité, liberté, etc.). Son diagnostic va intégrer la crise du jugement à la crise de la réalité elle-même.
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