Charles Gide et l’entrepreneur
p. 841-854
Texte intégral
« Il faut reconnaître que l’entrepreneur tel que le représentent les économistes, a une assez fière attitude. »
Ch. Gide, L’Entrepreneur et le Profit, 1923.
1Depuis le début des années 1880 jusqu’à sa mort en 1932, Gide n’a jamais cessé de suivre avec une attention toute particulière les profondes mutations du capitalisme dans les pays développés et les nouvelles institutions économiques qui se mettaient en place.
2Dans le dernier quart du xixe siècle, il constate que – dans l’ensemble de la population française – la proportion des producteurs « autonomes » (paysans propriétaires, artisans, boutiquiers, ...) et des personnes qui sont à leur charge est très élevée ; proportion qu’il évalue entre le tiers et la moitié (Principes, 1884, p. 504, 1901, p. 448). Malgré un tempérament routinier, ces producteurs ont permis à la France de résister aux agitations révolutionnaires et à toutes les crises de son histoire. Il vaut donc la peine de les défendre et plus particulièrement ceux dont l’utilité sociale ne peut pas être contestée (Principes, 1884, p. 504). Les débitants marchands de vin ainsi que tous les intermédiaires (commerçants au détail, boutiquiers, ...) qui ruinent les producteurs en leur achetant trop bon marché et qui grèvent exagérément les prix des denrées au niveau de la consommation peuvent, au contraire, disparaître sans inconvénients (« L’école nouvelle », in Quatre écoles d’économie sociale, 1890, p. 105). Malgré les avantages de la « petite production », Gide est pleinement conscient que la production industrielle à grande échelle présente des avantages considérables sur la production isolée. La grande production permet, en effet, une économie de travail, de capitaux, d’agents naturels et d’emplacement. L’évolution de la production « autonome » vers la grande production s’accomplit donc en vertu d’une certaine rationalité économique (Principes, 1898, p. 548).
3Les grandes entreprises patronales et les sociétés par actions envahissent ainsi peu à peu tous les domaines de l’activité humaine et tendent à devenir le mode le plus courant de la production. Le bon accueil que Gide fait à cette évolution (Principes, 1884, p. 504) ne dure pas. Dès la seconde édition de ses Principes (1889), il s’en inquiète dans la mesure où dans le cadre des nouvelles institutions économiques, le divorce entre le capital et le travail est accentué et l’homme risque de devenir un instrument pour l’homme. Ce qui est en totale contradiction avec le premier précepte de la morale de Kant auquel il se réfère constamment : « se souvenir en toute occasion que nous devons considérer la personne de notre prochain comme une fin et non comme un moyen » (Principes, 1889, pp. 513-514). Gide en vient même à espérer que grâce à des inventions techniques et à de nouveaux produits, la marche « inexorable » vers la grande production puisse être remise en question et que la petite industrie puisse regagner le terrain qu’elle a perdu (Principes, 1891, p. 166).
4L’autre espoir de Gide repose sur le développement de la coopération. Ce n’est qu’à partir de 1885-1886 qu’il prend ses distances avec le darwinisme dont il fait encore l’éloge en 1884 (Principes, 1884, pp.177-178). La lecture de Evolution of Sex (1889), l’ouvrage de Patrick Geddes qui développe l’idée que le véritable ressort de l’évolution n’est pas la lutte pour la vie « mais la coopération pour la vie, non point la guerre, mais l’amour » le renforce dans ses nouvelles convictions (« L’école nouvelle », in Quatre écoles d’économie sociale, 1890, p. 140, note 1). Désormais, il condamne toute organisation de la production basée sur la concurrence et la recherche exclusive et exacerbée du profit (« Concurrence ou coopération », Bulletin du Musée social, mars 1899, pp.1-23) et s’efforce de promouvoir les sociétés coopératives de production dans lesquelles « les travailleurs travailleraient pour leur propre compte et mettraient en œuvre des instruments de production dont ils seraient eux-mêmes propriétaires, ce qui leur permettrait de recueillir l’intégralité de leur travail » (Principes, 1891, p. 515). Malgré tous les efforts des coopératistes français et son engagement personnel les résultats sont des plus modestes. Ainsi dans les années vingt – et en comptant large – les coopératives de production ne réussissent pas à grouper plus de trente mille travailleurs en France, ce qui est « vraiment insignifiant dans l’immense masse des salariés. Et encore, la plupart d’entre elles ne vivent que grâce à l’aide que leur donnent l’État ou les municipalités » (L’École de Nîmes, 1926, p. 107). Les coopératives de production ne sont donc pas suffisamment nombreuses et puissantes pour exercer une quelconque influence sur la condition générale de la classe ouvrière. Avec des résultats aussi décevants beaucoup de membres du mouvement coopératif finissent par perdre leurs illusions premières : « La foi dans l’association de production autonome, comme moyen de transformer le monde a été fort ébranlée en France comme ailleurs » (« Les associations coopératives de production en France », Revue d’économie politique, 1900, n° 1, pp.1-2).
5Autant de changements observés ou espérés de l’organisation économique qui conduisent Gide à s’intéresser à ce personnage clé de l’économie politique française depuis Jean-Baptiste Say : l’entrepreneur. Si la place de ce dernier dans le cadre des sociétés par actions et des coopératives de production vont retenir toute son attention (IIe partie), la compréhension de ses analyses nécessite de s’arrêter dans un premier temps sur sa vision de l’entrepreneur placé à la tête d’une entreprise patronale (Ire partie).
I. L’entrepreneur et l’entreprise patronale
6Avant d’en venir aux fonctions de l’entrepreneur dans le cadre de ce type d’entreprise, il convient de s’arrêter un instant sur la définition qu’en donne Gide.
I.1. La définition de l’entrepreneur
7Dans les premières éditions de ses Principes, Gide ne cesse d’opposer le producteur « autonome » à l’entrepreneur. Le premier est propriétaire d’instruments de production (terre ou capital) qu’il met en œuvre par son seul travail personnel. Quant au second, disposant de terre ou de capitaux en quantité trop considérable pour les faire valoir tout seul, il est obligé de recourir au travail d’autrui (Principes, 1884, p. 501).
8Ainsi, dans le cas où le propriétaire d’une étendue de terre de plus de 4 à 5 hectares doit employer des journaliers pour la faire valoir, il est entrepreneur. De même, le propriétaire d’un capital de 8 à 10 000 francs qui fait appel au travail salarié pour tirer pleinement parti du capital qu’il a placé dans une entreprise industrielle ou commerciale, est à la fois capitaliste et entrepreneur (Principes, 1889, p. 511).
9Il ne faut pas à partir du dernier exemple, en conclure que dans l’esprit de Gide l’entrepreneur est nécessairement un capitaliste. Dès la première édition de ses Principes (1884), il s’inscrit, en effet, dans la tradition française établie au début du xixe siècle par Jean-Baptiste Say. Selon cette tradition, il ne faut pas confondre les fonctions de l’entrepreneur et celles du capitaliste comme l’ont fait les classiques anglais. Gide concède toutefois que la manière de voir de ces derniers peut aisément s’expliquer dans la mesure où, de leur temps, c’était très souvent un capitaliste qui assumait les fonctions d’entrepreneur. Mais cela n’empêche pas que ses fonctions et celles assumées par un capitaliste ne soient parfaitement distinctes en théorie et même souvent séparées dans les faits. L’entrepreneur n’est donc pas obligatoirement un capitaliste.
I.2. Les fonctions essentielles de l’entrepreneur
10À l’époque où la première édition des Principes est publiée, c’est-à-dire au début des années 1880, la France connaît de très graves difficultés économiques et sociales. La fortune de l’entrepreneur apparaît alors comme suspecte et fait l’objet de critiques acerbes. Gide n’en insiste pas moins sur l’importance de son rôle : « Le rôle de l’entrepreneur dans l’organisation économique est hors de pair : il est le capitaine de l’industrie, il en tient entre ses mains toutes les forces et tout l’outillage ; c’est à lui qu’incombe la haute fonction sociale de faire concorder la production avec la consommation, de prévoir les besoins, parfois d’en susciter de nouveaux, de décider de la voie dans laquelle le travail et les capitaux d’un pays doivent s’engager » (Principes, 1884, p. 507).
11La recherche de nouveaux débouchés est, en effet, une des conditions de survie des entreprises modernes. Il se peut que l’entrepreneur s’acquitte mal de ses fonctions mais « ceci ne touche pas à la notion que nous devons nous faire de son rôle » (Principes, 1896, p. 377).
12Dans ses écrits publiés après la Première Guerre mondiale, Gide est encore plus élogieux. N’est-ce pas l’entrepreneur qui est à l’origine de la grande industrie qui s’est développée pendant la première moitié du xixe siècle ? (Cours, 1920, t. II, p. 415). Importance de son rôle sur laquelle les économistes libéraux de la période insistent également beaucoup. Toutefois, Gide ne partage pas certaines idées avancées par ces derniers1 ainsi que par les catholiques sociaux et les disciples de Le Play sur l’étendue et la nature des fonctions de l’entrepreneur.
13Ainsi, Gide est en profond désaccord avec l’idée avancée par Paul Leroy-Beaulieu dans son Essai sur la répartition des richesses et sur la tendance à une moindre grande inégalité des conditions (1881) ; idée selon laquelle la fonction caractéristique de l’entrepreneur est l’invention. Leroy-Beaulieu cite en exemples Bessemer, Nobel et Singer qui ont été de grands entrepreneurs mais aussi de grands inventeurs (nouvelle méthode de production de l’acier, découverte de la dynamite, invention de la machine à coudre). L’argumentation de Paul Leroy-Beaulieu n’a selon Gide qu’un seul objectif : justifier les énormes revenus de ces grands industriels. L’invention n’est-elle pas souvent le fait d’un non-entrepreneur ? L’entrepreneur se limitant « à lui acheter son invention, soit pour l’exploiter lui-même, soit pour monter une société ! On ne saurait donc prétendre que la suppression de l’entrepreneur entraîne forcément celle de l’inventeur » (Principes, 1898, p. 548, note 1). Enfin, Gide s’oppose aux catholiques sociaux et aux Le Playsiens qui considèrent que la fonction de l’entrepreneur ne doit pas être seulement d’ordre économique mais aussi d’ordre social et moral. Dans son esprit, l’entrepreneur doit « s’abstenir de toute intervention dans la vie de l’ouvrier en dehors de l’usine, même pour « lui faire du bien », mais faire tout le possible pour lui procurer dans l’usine les conditions de travail les plus parfaites au point de vue de la sécurité, de l’hygiène et du confort, lesquelles d’ailleurs concourent au maximum de productivité. C’est d’ailleurs l’exemple que donnent déjà quelques grands patrons en Angleterre et aux États-Unis » (Cours, 1920, t. II, p. 417).
I.3. L’entrepreneur : un copartageant qui ne se distingue pas des autres
14Dès 1884, Gide est en désaccord avec le point de vue exprimé par Paul Leroy-Beaulieu dans son Essai d’après lequel l’entrepreneur serait un copartageant tout à fait distinct du capitaliste et des salariés qui viendrait, en quelque sorte, au partage en vertu d’un titre sui generis : « Nous ne pouvons comprendre cette manière de voir. Il n’y a que deux titres dans notre société qui confèrent un droit au partage : ou bien fournir son travail personnel, ou bien fournir un instrument du travail, terre ou capital. L’entrepreneur peut invoquer soit l’un, soit l’autre de ces deux titres, plus fréquemment même tous les deux à la fois, mais il ne saurait en invoquer un troisième, car il n’en existe pas » (Principes, 1884, pp.518-519, note 1).
15Arguments qu’il reprend quarante ans plus tard (« L’entrepreneur et le profit », Collège de France, janvier 1923).
I.4. Le revenu de l’entrepreneur
– du « profit minimum » au « profit pur »
16La détermination de son revenu semble au premier abord très simple puisqu’elle est obtenue en faisant la différence entre la valeur du produit fabriqué par l’entreprise et les frais de production qu’elle doit supporter. Simplicité qui n’est qu’apparente, toute la difficulté consistant, en effet, à savoir ce que l’on doit faire figurer dans les « frais de production » de l’entreprise.
17Dans la première édition de ses Principes, Gide insiste sur le fait que sous un régime de concurrence absolument parfait, il existe un « profit minimum » composé des éléments suivants : 1) une prime d’assurance contre les risques auxquels l’entrepreneur est confronté. Il ne s’agit pas, ici, des risques résultant de la perte possible du capital emprunté – le taux d’intérêt correspondant inclut déjà une prime pour le risque couru – mais des risques qui tiennent directement aux conditions de la production et des ventes de l’entreprise, conditions pouvant conduire à la faillite de l’entreprise2 ; 2) le salaire de « son travail complexe qui comprend à la fois l’initiative, la direction et le contrôle » et qui constitue l’élément essentiel de ce profit minimum ; 3) dans le cas où il s’agit d’un entrepreneur individuel qui fournit tout ou partie des instruments de production, capital, terre ou emplacement, le minimum de profit doit naturellement inclure un troisième élément, l’intérêt ou le loyer, et s’il y a lieu, l’amortissement des capitaux c’est-à-dire les instruments de production (Principes, 1884, pp. 518-519).
18Trois cas peuvent alors se présenter. Le revenu effectif de l’entrepreneur est égal, supérieur ou inférieur à ce « profit minimum ». Le premier cas ne soulève pas de problème particulier. Dans le second, l’excédent par rapport au minimum de profit constitue une véritable rente selon des idées présentées par John Hobson et John Bates Clark dans des articles qui sont publiés en avril 1891 dans le Quarterly Journal of Economics3 et que Gide mentionne dans la quatrième édition de ses Principes (Principes, 1894, p. 518). Dans quelques secteurs d’activité (chemins de fer, tramways, mines, etc.), la troisième éventualité n’est pas impossible dans la mesure où les importants capitaux fixes engagés dans ces secteurs sont très peu mobiles (Principes, 1898, p. 541, note 1).
19Le « profit minimum » fait partie des frais de production. Il faut donc le soustraire de la valeur du produit fabriqué pour obtenir le « surplus » que Gide appelle le « profit pur » de l’entrepreneur ; « profit pur » qui est nul lorsque – pour reprendre la terminologie walrasienne qu’il utilise volontiers – l’entrepreneur évolue dans le cadre d’un régime de parfaite concurrence (Principes, 1898, p. 543, note 1).
20Deux sortes de profit sont finalement distinguées. D’une part, le « profit minimum » appelé encore le « revenu normal » de l’entrepreneur (Principes, 1898, p. 543, note 1). D’autre part, le « profit pur » appelé le « surplus », le « profit-résidu », le « surprofit » ou encore le « vrai profit » expression employée dans l’édition du Cours d’économie politique publiée en 1920 (Cours, 1920, t. 2, p. 422).
– les sources du profit
21Après une série impressionnante de tâtonnements dont on prend conscience en comparant les premières éditions de ses Principes, ce que Gide veut finalement expliquer, ce sont les origines du « profit pur ». Il refuse d’y voir la rémunération spéciale de l’entrepreneur et une récompense pour les risques qu’il assume. Explication qui n’en est pas moins assez largement répandue chez les économistes français du xixe siècle parmi lesquels Jean-Baptiste Say, Jean-Gustave Courcelle-Seneuil et Paul Cauwès qui l’a reprise dans son Cours d’économie politique (Cours, 1912, t. I, p. 110).
22L’explication proposée au tout début des années 1890 par Hobson et Clark d’après laquelle l’excédent du revenu de l’entrepreneur – par rapport au « profit minimum »– serait une véritable rente due à des « causes extérieures et accidentelles », lui semble constituer, au contraire, un vrai progrès analytique (Principes, 1894, p. 518). Ce n’est toutefois qu’en 1898 que les idées de Gide prennent leur forme définitive. De toutes les théories cherchant à expliquer le « profit pur », celle qui admet qu’il a sa source dans une situation de monopole lui semble être la plus pertinente. Adoptée par un grand nombre d’économistes de son époque et non des moindres – Walras, Pareto et Pantaleoni – cette théorie lui semble être la plus conforme aux faits (Principes, 1898, pp.537-538).
23Cette situation de monopole peut être naturelle (avantages de situation, ...), légale (protection douanière, brevets d’invention, secrets industriels, ...) ou résulter de n’importe quelle autre circonstance, car « le monopole n’est pas un fait exceptionnel : il est partout » (ibid, pp.537-538). Ainsi l’épicier qui a son magasin au coin de la rue jouit, du seul fait de sa situation, d’un monopole. Dans un pays pauvre ou neuf, le détenteur d’un capital plus ou moins considérable bénéficie également d’un monopole dans la mesure où dans ces contrées le capital est le plus souvent rare. De même, le fait de porter un nom déjà connu dans l’industrie peut constituer un monopole (Cours, 1920, t. II p. 429). Grâce à toutes ces circonstances « exceptionnellement favorables », l’entrepreneur peut – pendant un temps plus ou moins long – échapper à la concurrence ou en neutraliser les effets.
24Dès lors, on comprend très bien pourquoi certaines qualités et aptitudes particulières ou exceptionnelles de l’entrepreneur – sur lesquelles les économistes libéraux français de la fin du xixe siècle ont beaucoup insisté (P. Leroy-Beaulieu, A. Liesse, E. Villey) – peuvent être sources de grands profits et de grandes fortunes. C’est parce que ces qualités et ces aptitudes constituent des formes de monopoles en faveur de ceux qui en sont dotés (Principes, 1898, p. 538). Gide donne ainsi un soutien inattendu à une explication du profit avancée par des économistes qu’il conteste par ailleurs. Prenant conscience de sa méprise, toute mention relative à l’habileté hors du commun de l’entrepreneur pour expliquer le « profit pur » sera supprimée dans les éditions de ses Principes publiées à partir de 1911. Ce qui n’est pas fait pour nous surprendre dans la mesure où – jusqu’à la Première Guerre mondiale – Gide insiste régulièrement sur le fait que les fonctions économiques remplies par l’entrepreneur n’exigent pas des capacités intellectuelles ni des qualités morales hors de commun que seule une petite élite posséderait (« L’avenir de la coopération », Revue socialiste, 1888, p. 20)4.
– la légitimité du profit
25La première catégorie de profit – le « revenu normal » de l’entrepreneur – lui semble légitime puisqu’elle correspond à la rémunération de fonctions essentielles qu’il assume : « On ne pourrait supprimer le profit sous cette forme qu’autant qu’on aurait démontré que l’entrepreneur n’est qu’un parasite, que sa fonction est surannée et qu’on peut parfaitement s’en passer. Mais tant s’en faut qu’une telle démonstration ait été faite ! » (Cours, 1920, t. 2).
26Quant à la légitimité du « profit pur »– source à ses yeux de toutes les grandes fortunes (« La lutte pour le profit », Collège de France, 1922, p. 9) – son point de vue a sensiblement évolué. En 1898, de toutes ses considérations sur les origines de ce profit, il ressort que ce profit n’est pas nécessairement injuste. Il lui semble, alors, que le « monopole des entrepreneurs se manifeste non par un privilège qui leur permet de vendre au-dessus des prix courants, mais, au contraire par la possession d’un secret ou de quelque avantage de situation qui leur permet de fabriquer au-dessous des frais ordinaires de production, ce qui est très conforme à l’intérêt public » (Principes, 1898, p. 538). En 1911, changement de ton : la légitimité du « profit pur » ne lui semble plus aussi facile à établir (Principes, 1911, p. 612). N’est-il pas prélevé sur le consommateur ?
27La conclusion de Gide est que le « seul revenu normal de l’entrepreneur est celui qu’il touche à titre de travailleur ou de capitaliste, mais que ce qu’il touche sous le nom de profit (« profit pur ») n’est qu’une bonne fortune accidentelle – tout comme la rente ou la majoration résultant d’un monopole – et que par conséquent il pourrait disparaître de même que ceux-ci sans que la production en fût compromise » (Cours, 1920, t. II, p. 431).
– l’évolution du profit
28Selon Paul Leroy-Beaulieu, il faut s’attendre à ce que les taux de profit diminuent. À mesure que l’industrie progresse, les nouveautés deviennent de plus en plus rares et les profits exceptionnels de moins en moins fréquents. En même temps, la diffusion de l’instruction lui semble être suffisante pour augmenter l’offre de personnes capables de diriger des entreprises. Enfin, la baisse des taux de l’intérêt observée pendant le dernier tiers du xixe siècle facilite la concurrence en procurant aux entrepreneurs des crédits à bon marché. Autant de facteurs qui orientent le taux moyen de profit à la baisse (Essai, 1881, P- 307). Gide ne partage pas ce point de vue.
29Les idées sur la dynamique des profits développées par John Bates Clark dans The Distribution of Wealth (1899) selon lesquelles le « profit pur » diminue à mesure que l’on se rapproche de l’« état statique » lui paraissent, au contraire, fort intéressantes. Le jour où cet état est complètement réalisé, le profit pur est entièrement éliminé. Si nous nous trouvons, au contraire, dans le cadre d’une société progressive et dynamique – imaginée et décrite par l’économiste américain dans le même ouvrage – « chaque invention périmée est remplacée par une autre, à chaque monopole détrôné un autre lui succède. Le profit n’est que la vague qui passe, mais sans cesse le flot succède au flot » (Cours, 1920, t. II, p. 430). Autrement dit, le « profit pur » se nourrit de la nouveauté, du mouvement et de l’apparition incessante de nouvelles inventions, sources de nouveaux monopoles.
II. L’entrepreneur, les sociétés par actions et les coopératives de production
II.1. L’entrepreneur et les sociétés par actions
30Gide regrette que les sociétés par actions envahissent peu à peu tout le domaine de la production pour se substituer progressivement aux entreprises patronales (« L’avenir de la coopération », Revue socialiste, 15 juin 1888, pp.8-9). Regrets qu’on peut expliquer de la manière suivante. Les sociétés par actions se trouvent composées de deux groupes de personnes – le premier, celui des actionnaires associés au point de vue de la répartition, mais non au point de vue de la production et le second composé des salariés associés par le fait de la production et du travail en commun, mais non au point de vue de la répartition. Tout cela lui paraît être peu conforme à la loi morale. Il ne se résigne donc pas à voir dans les sociétés par actions la forme définitive et parfaite de l’évolution sociale (Principes, 1891, p. 162). Il n’y voit, au contraire, qu’une forme imparfaite et transitoire qui nous rapproche sans doute de l’association normale mais qui en est encore fort éloignée (« L’avenir de la coopération », Revue socialiste, 15 juin 1888, p. 9). Il est donc loin d’accepter la société future « sous la forme d’immenses sociétés par actions qui s’étendraient à tous les domaines de l’activité humaine » que décrit avec beaucoup de talent Gustave de Molinari dans L’Évolution économique du xixe siècle : théorie du progrès (Principes, 1898, p. 188, note 2). Que devient l’entrepreneur dans le cadre des sociétés par actions ? Peut-on croire avec les « collectivistes » que la réussite et le développement de ces sociétés ne lui doivent rien puisqu’elles semblent parfaitement s’en passer ? (Principes, 1898, p. 548).
– l’entrepreneur mis en question ?
31Le point de vue des « collectivistes » selon lequel dans le cadre des sociétés par actions, l’entrepreneur s’évanouit, a une force incontestable. Dans ces sociétés, il est vrai que les fonctions les plus caractéristiques de l’entrepreneur peuvent être confiées à des directeurs salariés possédant des compétences particulières. Point de vue qui contient cependant une certaine part d’illusion dans la mesure où il n’existe pas de société par actions « qui ne continue d’être dirigée au point de vue financier, sinon au point de vue technique, par quelque gros actionnaire qui est le véritable patron » (Principes, 1898, p. 549). Dans l’édition de 1911 de ses Principes, Gide précise que « les vrais et seuls successeurs du patron ce sont les membres du conseil d’administration, le plus souvent même un seul d’entre-eux, président ou secrétaire qui a étudié et lancé l’entreprise et qui, étant généralement propriétaire d’un grand nombre d’actions, touche une grosse part des bénéfices et apporte toute l’énergie de l’intérêt personnel. Il est donc inexact – tant d’un point de vue économique que juridique – de voir dans les actionnaires de « véritables entrepreneurs ». La plupart d’entre-eux et notamment les plus petits ne sont, en fait, que « de simples prêteurs d’argent qui ne se distinguent des prêteurs ordinaires, dits obligataires qu’en ce qu’ils ont accepté de courir certains risques en échange d’une part dans les profits » (Principes, 1908, p. 580)5. Idée que Gide avait développée dès 1884 (Principes, 1884, p. 518, note 1).
32En même temps, il ne lui paraît pas impossible que certaines sociétés par actions fondées depuis longtemps et marchant en quelque sorte en vertu de la vitesse acquise – comme les compagnies d’assurances, les compagnies de chemins de fer – ne puissent pas finalement se passer complètement de l’entrepreneur et même ne soient pas mûres pour l’exploitation par l’État (Principes, 1898, p. 549, note 1). Gide n’en est pas moins conscient que l’absence d’un patron peut constituer un lourd handicap et entraîner quelques-uns des inconvénients que l’on trouve dans toutes les grandes administrations publiques : absence d’initiative individuelle, irresponsabilité, bureaucratie, gaspillage du travail et du capital dont l’entreprise de Panama nous a donné un « inoubliable exemple » (Principes, 1894, p. 513, note 2). Inconvénients que présenterait, sans doute, le système collectiviste s’il était appliqué.
– l’entrepreneur nécessaire à la création de nouvelles entreprises
33Si les fonctions de l’entrepreneur telles que Gide les a définies dans le cadre d’une entreprise patronale perdent de leur importance et s’effacent une fois que l’entreprise est montée et que l’impulsion initiale est donnée, il n’en demeure pas moins vrai que toute entreprise, y compris une société par actions, n’a pu être lancée que par une personne habile qui en est ainsi le « véritable créateur » (Principes, 1896, p. 376, note 1). Les entreprises récentes qui produisent des automobiles et des avions et dont l’origine et le merveilleux essor sont dus à des « individus riches et courageux » (Cours, 1909, p. 686) illustrent ses propos. Mais le jour où le voyage en avion sera devenu aussi banal que le voyage en train ou en tramways, il n’est pas impossible que ces entreprises puissent être transformées en coopératives ou même en entreprises municipales ou nationales. Ce jour-là, l’entrepreneur cessera d’être indispensable (Cours, 1925, t. II, p. 433).
II.2. L’entrepreneur et les sociétés coopératives de production
34Gide ne perçoit pas le régime du salariat comme un état définitif dans la mesure où l’association coopérative de production lui paraît être – malgré tous les obstacles rencontrés – « l’aboutissement de l’évolution économique » ou encore « la phase supérieure vers laquelle nous pousse l’évolution sociale » (Principes, 1898, p. 187, p. 547).
- l’élimination de l’entrepreneur
35L’association coopérative de production n’est pas simplement destinée à améliorer le sort des salariés en leur permettant de gagner un peu plus en leur distribuant, sous forme de supplément de salaire, le profit que l’entrepreneur a prélevé. Sa finalité première est – en « transformant et même en éliminant graduellement le salariat lui même » et par conséquent le patronat – de créer un « ordre nouveau des choses, c’est-à-dire le capital servant d’instrument au travail, et non plus comme aujourd’hui le travail servant d’instrument au capital » (« Le mouvement coopératif en France dans ces dix dernières années », Revue d’économie politique, n° 1, 1893, p. 17). Élimination du patron qui ne peut pas être désapprouvé dans la mesure où il n’est qu’un intermédiaire (Principes, 1898, pp.547-548).
– la difficulté de remplacer l’entrepreneur
36Alors que Gide semble avoir toujours gardé sa foi intacte dans la coopération, il s’interroge – dès la première édition de ses Principes (1884) – sur les difficultés qui sont à l’origine du faible développement des coopératives de production. Son constat est le suivant. Lorsque les ouvriers s’associent, c’est dans le but précisément de s’affranchir du patron. Ils consentent difficilement, de ce fait, à reconnaître l’autorité d’un chef. Or, il y a deux choses qui ne peuvent pas être supprimées dans les sociétés coopératives de production car c’est de cela que dépend leur réussite : un capital initial et une vraie direction.
37Cette « direction ne peut être le fait d’un groupe d’hommes, surtout si ce groupe est assez nombreux. Elle doit être confiée à un seul. Il faut donc toujours que les ouvriers choisissent un directeur ou un gérant. Ils peuvent certainement trouver dans leurs rangs des gens intelligents et même capables de diriger une entreprise – quoique pourtant les connaissances économiques et les habitudes intellectuelles des classes ouvrières paraissent encore insuffisantes pour aborder la grande production – mais ils ne sont nullement disposés à faire à ce directeur la situation à laquelle il aurait droit au point de vue de l’autorité comme à celui de la rétribution... Aussi longtemps que l’éducation des classes ouvrières ne sera pas faite sur ce point, l’insuccès sera assuré » (Principes, 1884, pp.548-549).
38Si la direction d’une société coopérative de production ne suppose pas des « mérites transcendants », elle n’en nécessite pas moins un long apprentissage. Aussi, afin que la classe ouvrière puisse gérer ses affaires pour son propre compte, doit-elle – dans le cadre de ce type de sociétés – s’exercer au maniement des capitaux, à la pratique commerciale, aux mécanismes des entreprises collectives et aux difficultés qui leur sont propres. C’est la seule façon de faire son éducation économique et morale. Une fois réalisé cet apprentissage, il deviendra possible de trouver en son sein la personne qui en assurera le succès (« L’avenir de la coopération », Revue socialiste, 15 juin 1888, p. 20).
39Pour qu’une société coopérative réussisse, d’autres conditions sont nécessaires. Il faut non seulement que son directeur ou son gérant ait de l’autorité et du dynamisme, il faut également qu’il perçoive une rémunération qui soit en rapport avec l’importance des fonctions qu’il assume. Gide reconnaît donc implicitement que la croyance en la coopération n’est pas un élément suffisant pour maintenir en éveil le directeur d’une société coopérative et pour en assurer le succès.
40Si l’on fait abstraction du manque de capital, c’est faute de pouvoir remplacer le patron que la plupart des coopératives de production échouent (Principes, 1889, pp. 515-516). Aussi, l’affirmation des socialistes selon laquelle l’entrepreneur ne sert à rien et n’est qu’une pure superfétation, est-elle sinon insoutenable tout au moins fort prématurée. « La preuve qu’il n’en est pas ainsi, c’est que toutes les fois qu’on veut essayer de s’en passer, on a toutes les peines du monde à réussir » (Principes, 1896, p. 377). Le moment de la suppression de l’entrepreneur n’est donc pas encore arrivé (ibid., p. 548).
41Dans ses derniers écrits – notamment dans la neuvième édition de son Cours (1926) et dans les conférences qu’il a faites la même année au Collège de France (L’École de Nîmes, 1926, p. 107) – Gide est un peu plus optimiste. La réussite de certaines sociétés coopératives de production rencontre moins de difficultés que par le passé, l’attitude des ouvriers vis-à-vis de leur directeur ayant évolué dans le bon sens : « On voit certaines associations garder leur directeur leur vie durant, les rétribuer très honorablement et même ne témoigner aucun sentiment de jalousie quand ils sont décorés ou ont une auto à leur service » (Cours, 1926, t. I, p. 241).
Conclusion
42En tant que militant de la coopération, Gide minimise volontiers l’entrepreneur en l’assimilant, en certaines occasions, à un simple intermédiaire ou en soulignant le fait que ses fonctions n’exigent pas des qualités spéciales ou exceptionnelles. Il le dénigre également en rappelant que son histoire n’a pas été toujours très belle au point de vue moral. L’École de Nîmes n’a donc pas à faire « de panégyriques en l’honneur des capitaines de l’industrie pas plus que pour les travailleurs manuels. Elle ne veut... se fier à aucune catégorie de producteurs, pas plus patron qu’ouvrier, pour gouverner le monde économique, parce qu’elle sait que les uns comme les autres représentent des intérêts professionnels ou de classes » (L’École de Nîmes, 1926, p. 149).
43En tant qu’économiste, son point de vue est différent. Gide admet que l’entrepreneur assure des fonctions essentielles. La volonté constante qu’il a de se démarquer des économistes libéraux ne l’empêche pas – surtout après la Première Guerre mondiale – de souligner le courage, l’énergie et le dynamisme que doit posséder l’entrepreneur dans l’exercice de ses fonctions. Il incarne l’esprit d’entreprise dans l’automobile et l’aviation. L’entrepreneur est à l’origine du capitalisme moderne qui a permis « un épanouissemenr prodigieux de richesse et de puissance économique ». Habité d’un tempérament créateur, il est l’un des principaux acteurs du progrès économique.
44Dans sa vision de l’entrepreneur, Gide ne cesse donc – jusqu’au début des années vingt – d’être tiraillé entre son engagement dans le mouvement coopératif et les exigences de l’économiste qu’il est, conscient que certaines réalités sont difficilement contournables. Il semble toutefois que dans les toutes dernières années de sa vie, son point de vue de coopératiste et de celui d’économiste se soient sensiblement rapprochés. L’évolution du système industriel dans les pays développés, plus particulièrement aux États-Unis, lui a révélé, en effet, l’importance accrue du manager dans le nouveau capitalisme (Pénin, 1997, pp. 241-242) ; importance qui était en parfaite harmonie avec ses conceptions coopératistes.
Bibliographie
Références bibliographiques
Œuvres de Charles Gide
– Cours d’économie politique, toutes les éditions.
– Principes d’économie politique, toutes les éditions.
– Les Prophéties de Fourier, 1re éd., 1886.
– La Coopération – conférences de propagande, 1929.
– « L’Avenir de la coopération », Revue socialiste, n° 42, 15 juin 1888.
– « De la Coopération et des transformations qu’elle est appelée à réaliser dans l’ordre économique », Revue d’économie politique, 1889, n° 5.
– « L’École nouvelle », in Quatre Écoles d’économie sociale, 1890.
– « L’Idée de solidarité en tant que programme économique », Revue internationale de sociologie, sept-oct. 1893, n° 5.
– « Le Mouvement coopératif en France dans ces dix dernières années », Revue d’économie politique, 1893, n° 1.
– « Les douze vertus de la coopération », Almanach de la coopération française, 1894.
– « Concurrence ou coopération », Bulletin du Musée social, mars 1899.
– « La Solidarité économique », Revue du christianisme social, 1902.
– « La Lutte pour le profit », 1922.
– « L’Entrepreneur et le profit », 1923.
– L’École de Nîmes, 1926.
Autres ouvrages
Cauwès P. (1912), Cours d’économie politique, 4 volumes.
Clark J.B. (1899), The Distribution of Wealth.
Clark J.B. (1891), « The Distribution as Determined by a Law of Rent », The Quarterly Journal of Economics, avril, vol. 5.
Courcelle-Seneuil J.G. (1853), Traité théorique et pratique des opérations de banque.
Geddes P. (1892), L’Évolution des sexes.
Hobson J.A. (1891), « The Law of Three Rents », The Quarterly Journal of Economics, avril, vol. 5.
Leroy-Beaulieu P. (1881), Essai sur la répartition des richesses et sur la tendance à une moindre inégalité des conditions.
Liesse A. (1891), « Entrepreneur », in Nouveau Dictionnaire de l’économie politique publié sous la direction de Léon Say et Joseph Chailley, t. I.
Molinari G. de (1880), L’Évolution économique au xxe siècle : théorie du progrès.
Pénin M. (1991), « Charles Gide (1847-1932), l’hétérodoxie bien tempérée », Y. Breton et M. Lutfalla (éds), L’Économie politique en France au xixe siècle, Paris, Economica, pp. 303-334.
Pénin M. (1997), Charles Gide, 1847-1932, L’esprit critique, Paris.
Porte M. (1901), Entrepreneurs et profits industriels, thèse.
Say J.-B. (1841), Traité d’économie politique.
Villey E. (1905), Principes d’économie politique.
Walker F.A. (1887), « The Source of Business Profits », Quarterly Journal of Economics, april.
Notes de bas de page
1 Pour plus de détail sur l’opposition de Gide aux libéraux français voir Pénin, (1991), pp.303-334.
2 Du fait des difficultés économiques des années 1880-1890, le taux de faillites des entreprises françaises s’est notablement aggravé pendant ces années.
3 Voir Bibliographie.
4 Point de vue qui change notablement après la Première Guerre mondiale. À ses auditeurs du Collège de France, il dit ne plus contester « les qualités rares et à certains égards supérieures qu’il faut pour être entrepreneur » (« La lutte pour le profit », Collège de France, 1923, p. 13).
5 Ce que M. Porte conteste dans une thèse qui a eu beaucoup d’écho (Entrepreneurs et profits industriels, 1901, p. 17).
Auteur
Centre A. et L. WALRAS, Université Lyon II
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