Annexe. Fondements théoriques du modèle de gravité
p. 171-222
Texte intégral
1Le modèle de gravité explique les importations (ou exportations) totales d’un pays i en provenance d’un pays j en fonction des PNB, des populations, et de la distance entre les principaux centres économiques.
2 1
3Les variables Yi et Yj désignent les PNB des deux pays partenaires i et j, les variables Li et Lj les populations de i (respectivement de j), Dij est la distance entre i et j, P est une variable muette, δ0 est le coefficient de la constante de régression. IMPij est la variable endogène représentant le volume des importations entre les deux pays. Tous les coefficients sont positifs.
4Dans le modèle d’Heckscher-Ohlin, le volume des échanges est d’autant plus important que les différences de dotations factorielles relatives sont grandes entre les pays partenaires. Celles-ci sont en effet responsables du degré de spécialisation de chaque pays et de l’écart par branche entre la production et l’emploi domestique. Le volume des échanges ne dépend donc pas de la taille du pays : une économie peut avoir des échanges relativement restreints à partir du moment où ses dotations factorielles relatives ne différent pas sensiblement des dotations relatives mondiales. Le modèle de gravité s’appuie sur l’idée qu’au contraire l’ouverture d’une économie est une fonction décroissante de sa taille : plus un pays est petit, plus il est tourné vers les marchés extérieurs.
5 Le plan de cette annexe s’articule de la manière suivante : la première partie tente de reconstituer l’histoire du modèle de gravité depuis les premières intuitions de Linemann jusqu’aux formulations plus tardives et plus formalisées de Krugman. De nombreux articles empiriques, qu’on évoquera rapidement, font intervenir dans les régressions des variables telles que les tailles respectives des économies, les obstacles aux échanges évalués par la distance, les niveaux de développement. La deuxième partie consiste dans la présentation et la clarification des chapitres 7 et 8 de Market Structure and Foreign Trade de Krugman et Helpman (1985) qui proposent une version Chamberlain-Heckscher-Ohlin du commerce et une première version de l’équation de gravité compatible avec la théorie des coûts comparés. L’inconvénient de cette version du modèle de gravité est de dépendre très étroitement de l’hypothèse de rendements d’échelle croissants et de limiter la portée empirique du modèle au commerce intra-branche. Or Hummels et Levinsohn (1993) ont montré que les estimations donnaient de très bons résultats lorsque les échantillons étaient constitués de pays se livrant un commerce intersectoriel. La troisième partie examine de manière critique l’hypothèse des rendements d’échelle croissants et montre que l’équation de gravité est compatible aussi bien avec un cadre de commerce intersectoriel qu’avec un cadre de commerce intra-branche. Elle débouche sur une formalisation plus complète de l’équation de gravité, dont les variables principales sont mises en évidence, en particulier la population et la distance. Enfin la quatrième et dernière partie présente une version de l’équation de gravité désagrégée, proposée par Bergstrand (1989). Cette version a l’inconvénient d’être compliquée analytiquement. Elle a l’avantage de présenter une synthèse de tous les arguments évoqués précédemment : différences de coûts salariaux, différences de dotations factorielles, coûts de transport, rendements d’échelle croissants se conjuguent pour déterminer une équation de demande d’importation qui est l’équation de gravité.
6Dans Market Structure and Foreign Trade, Krugman et Helpman (1985) s’interrogent sur la signification des variables PNB qui dans un modèle classique Heckscher-Ohlin n’ont pas lieu d’être. Ils dérivent une première équation de gravité à partir d’un cadre Chamberlain-Heckscher-Ohlin où sont réconciliées l’approche en termes de coûts comparés et l’hypothèse de rendements croissants. Dans ce modèle où la spécialisation est incomplète2, l’hypothèse de rendements d’échelle croissants est nécessaire si l’on veut comprendre pourquoi les échanges ne dépendent pas seulement des dotations factorielles, mais aussi de la taille des économies. Dans la version du modèle de gravité que les deux auteurs privilégient, les rendements d’échelle croissants sont généralisés et seules les variables PNB interviennent. Plus précisément, la structure du modèle est la suivante :
- les deux technologies de production des biens utilisent des combinaisons de facteurs (travail et capital) plus ou moins intensives en travail (respectivement en capital) ;
- les rendéments d’échelle sont croissants dans les deux secteurs et le goût des consommateurs pour la variété fait que chaque firme produit une variété unique de bien selon une des deux technologies.
7Sous ces hypothèses, le vecteur des importations est égal à la production moins la consommation. Comme les biens sont différenciés, les importations sont simplement égales à la consommation, qui est proportionnelle au revenu car la fonction d’utilité est homothétique. L’équilibre de la balance commerciale permet enfin de trouver la version la plus simple de l’équation de gravité, qui dit que le flux des échanges entre deux pays est proportionnel au produit de leurs PNB respectifs.
8Certains résultats du modèle Heckscher-Ohlin sont conservés :
- les différences de dotations factorielles ne déterminent plus l’intensité des échanges, mais elles sont toujours responsables de la spécialisation de chaque pays ;
- le pays qui a une dotation abondante en capital est un exportateur net du bien dont la technologie est intensive en capital ;
- en revanche, même si les dotations factorielles sont identiques, le commerce est maximal si les tailles des économies sont égales, alors que dans le modèle traditionnel le commerce est nul, car chacun produit ce qu’il consomme. Ce résultat vient de ce chaque pays produit des biens qui sont différenciés, et que l’incitation au commerce est due au goût des consommateurs pour la diversité. Les gains de l’échange sont des gains de consommation.
9Deux critiques peuvent être adressées à cette dérivation du modèle de gravité :
- Il manque les variables de population Li et Lj. Dans la présentation de Krugman et Helpman, l’accent est mis sur la capacité d’une économie à produire des variétés différentes qui sont indifféremment consommées sur le marché domestique et à l’étranger, ce qui implique que le degré d’ouverture ne dépend que des PNB respectifs des deux économies. On ne fait réapparaître la variable « population » qu’en l’interprétant comme une mesure des dotations factorielles et en supposant que, dans au moins un des deux secteurs, les rendements d’échelle sont constants. Le commerce n’est qu’à moitié intra-branche : pour l’autre moitié, il est intersectoriel. Cet aspect du modèle a souvent été laissé dans l’ombre, mais Helpman (1987), dans une étude empirique, introduit le PNB par tête comme mesure des dotations factorielles.
- L’hypothèse des rendements d’échelle croissants n’est nécessaire que si la spécialisation est incomplète, et que l’on raisonne dans la fiction d’une économie -intégrée », où les technologies et rémunérations des facteurs sont identiques3. En fait, l’équation de gravité peut être dérivée d’un modèle plus général.
10C’est ce modèle qui est exposé dans la troisième partie de l’annexe et qui rend possible l’examen de plusieurs configurations de commerce. Il n’y a qu’un seul facteur de production (le travail) et la fonction d’utilité est de type CES.
11On envisagera d’abord le cas où il n’y a pas de bien non échangeable. Soit les rendements sont constants (les biens échangés sont alors différents et les économies sont spécialisées), soit les rendements sont croissants et les biens sont alors qualifiés de différenciés. Dans le premier cas, on montre que l’équation de gravité décrit du commerce intersectoriel, et dans le second, du commerce intra-branche.
12Lorsqu’il y a des biens non échangeables, on introduit la possibilité qu’une augmentation de la taille des économies se traduise par une augmentation moins que proportionnelle des importations, ou que le degré d’ouverture diminue. Deux interprétations sont possibles :
- Lorsque les rendements sont constants, un pays « riche4 » consacre une partie moins importante de son revenu au bien du secteur non échangeable et consomme relativement plus de biens échangeables.
- Lorsque les rendements sont croissants, l’augmentation de la population se traduit par une augmentation du nombre de firmes dans le secteur des biens non échangeables, donc par une diminution du degré d’ouverture.
13Le succès empirique de l’équation de gravité est sans doute dû au fait qu’elle s’applique à un grand nombre de cas théoriques. Cette grande généralité a pourtant été l’objet de critiques : Deardoff (1995) considère que les estimations empiriques ne peuvent pas être considérées comme des tests validant telle hypothèse ou telle théorie spécifique. Hummels et Levinsohn (1993) estiment le modèle théorique de Krugman et Helpman sur un échantillon de pays qui ont un commerce spécialisé, et la qualité des résultats empiriques les amène à conclure que « quelque chose qui est complètement à l’extérieur du modèle standard de commerce intra-branche et qui n’est pas modélisé doit être à l’origine du succès empirique des modèles fondés sur la différenciation des produits ». Si l’équation de gravité ne décrit pas que le commerce intra-sectoriel, et si ce quelque chose d’extérieur peut être parfaitement formalisé, la critique de Hummels et Levinsohn suggère d’être attentif à ce que les échantillons soient suffisamment homogènes pour ne pas compromettre l’interprétation des coefficients.
14Contrairement à l’opinion couramment répandue chez les économistes, même utilisateurs, le modèle de gravité a des fondements théoriques solides. Leamer (1994) cite le paradoxe d’un modèle qui, grâce à l’introduction de la distance, donne empiriquement les meilleurs résultats et continue cependant d’être absent des manuels d’économie, « qui privilégient toujours l’étrange hypothèse que les pays sont à la fois infiniment distants du point de vue des facteurs et infiniment proches du point de vue des échanges » (p. 45).
Section 1 : L’équation de gravité, un modèle éclectique de commerce international
15Les premiers modèles de gravité estimés dans la littérature sont : Beckerman (1956) pour les flux intra-européens, Poyhonen (1963), Tinbergen (1962) et Linnemann (1966). À partir de Aitken (1973), l’approche gravitationnelle est utilisée pour évaluer l’impact sur le commerce de la formation de zones d’échanges privilégiés. Plus récemment, les débats sur le régionalisme sont illustrés par des estimations d’équations de gravité que l’on peut ranger dans deux catégories : (i) celles qui sont estimées à un niveau agrégé : Frankel et Wei (1993), Leamer (1993), Losada (1993), Hamilton et Winters (1992), De Ménil et Maurel (1994) ; (ii) celles qui sont estimées à un niveau désagrégé : Bergstrand (1989), Frankel (1991), Leamer (1993), Schumacher (1996).
16Du point de vue de la filiation théorique, les modèles de gravité se situent à l’opposé des explications traditionnelles fondées sur les différences de dotations factorielles. Les tentatives de validation empirique des trois théorèmes célèbres – Rybczynski, Stolper-Samuelson, et Heckscher-Ohlin – ont dans de nombreux cas échoué – voir Leamer et Levinsohn (1994). Les différences persistantes de rémunérations des facteurs, notamment des salaires, qui démentaient le théorème d’égalisation des rémunérations des facteurs, figuraient parmi les raisons qui ont fait que les économistes ont cherché des explications alternatives. Le fait que le commerce fût intra-branche, au lieu d’être intersectoriel, était une autre raison de douter de la thèse selon laquelle les différences factorielles étaient au cœur des échanges.
17Les modèles de gravité peuvent être caractérisés par : (i) leurs quatre premières variables structurelles, PNB et PNB par tête ; (ii) la distance, qui est la cinquième variable structurelle ; (iii) l’accent mis sur les échanges bilatéraux, et non pas sur les échanges d’un pays avec le reste du monde. Aussi peut-on qualifier d’approche gravitationnelle tous les travaux qui expliquent les échanges par les PNB et PNB par tête : Linder (1961), par exemple, introduit l’idée que les structures de demande dépendent de la richesse et que des pays ayant des niveaux de développement similaires échangent plus car ils produisent des biens qui sont fortement demandés par eux-mêmes et moins demandés par des pays à revenus différents. Grubel et Lloyd (1975) estiment le commerce intra-branche. Loertscher et Wolter (1980) choisissent comme approximation des écarts entre niveaux de développement et des barrières douanières le PNB par tête et la distance. Ces travaux gravitationnels sont intéressants, mais leur inconvénient majeur est qu’ils ne sont pas dérivés de modèles théoriques et ne permettent pas de valider les hypothèses théoriques sous-jacentes.
18Ce défaut d’explication théorique est pallié lorsque Helpman (1987) estime des équations de gravité en s’efforçant de partir d’une théorie articulée du commerce international, celle du chapitre 8 de Helpman et Krugman (1985). Le modèle de commerce estimé est un modèle de compétition monopolistique, et les résultats de l’estimation sur un panel de données OCDE couvrant la période 1956 à 1981 confirment l’hypothèse que le commerce augmente avec la taille des économies5. Harrigan (1992) estime aussi à partir de statistiques d’échanges bilatéraux de l’OCDE un modèle de compétition monopolistique. La conclusion qu’il tire de l’analyse des résidus de la régression est que les pays européens ont un commerce intra-branche beaucoup plus développé que le Japon et les États-Unis. Brainard (1993) utilise une approche similaire pour étudier le comportement des firmes multinationales : si les différences de prix des facteurs sont très élevées, on s’attend à ce qu’elles soient délocalisées ; la possibilité d’exploiter les rendements d’échelle suggère de manière alternative que les firmes s’implantent le plus près possible des consommateurs. Sa conclusion est que les différences de dotations factorielles n’expliquent qu’une faible part des réexportations des firmes, que les variables mesurant la similarité des économies expliquent assez bien les comportements d’échanges, qu’enfin les barrières commerciales et les coûts de transport doivent être pris en considération.
19Linemann (1966) présente de manière synthétique l’ensemble des facteurs qui plaident en faveur du rejet des dotations factorielles. Un facteur décisif dans la détermination des échanges est notamment la taille des économies partenaires considérées. Linemann voit deux raisons possibles à cela :
- En dessous d’un certain niveau de demande, la production de certains biens, du fait de l’existence de rendements d’échelle croissants, n’est pas rentable, et le pays importateur est obligé d’importer les biens qu’il ne produit pas. Cet argument de concurrence imparfaite peut se formaliser avec une hypothèse de rendements d’échelle croissants.
- À des niveaux plus élevés de revenu par tête correspond une demande plus diversifiée, notamment de biens qui sont produits à l’étranger. Ainsi, entre deux pays de même PNB, celui qui a une population moins nombreuse importe davantage car son revenu par tête est supérieur et sa demande plus diversifiée. Cet argument rappelle le modèle de Linder (1961) car il introduit l’idée de l’hétérogénéité des demandes. Mais il n’est pas très convaincant, car, théoriquement, l’effet de diversification induit par l’augmentation du PNB par tête devrait influencer autant la demande de biens domestiques que celle de biens produits à l’étranger6. Par conséquent le degré d’ouverture de l’économie ne devrait pas varier systématiquement dans le sens d’une ouverture croissante de l’économie.
20Le statut de la théorie des avantages comparatifs est discuté d’une manière tout à fait intéressante. Linemann affirme que la production n’est pas adaptée complètement à la demande domestique « [...] because the country has developed comparative advantages in certain fields of production, whereas others countries have relative advantages in others fields, thus creating a division of labour (and international exchange) which leads to a greater volume of production for ail countries taken together » (p. 10). Plus loin, on peut lire que « The foreign trade that remains is due to comparative advantages in production which are not offset by trade obstacles. [...] Many textbooks on international trade pay hardly any attention to the question why the importance of foreign trade differs so much between different countries... » (p. 12). Cette phrase ne manque pas d’étonner le lecteur qui sait que l’importance du commerce extérieur est précisément déterminée dans la théorie des coûts comparatifs par les dotations factorielles : plus celles-ci sont différentes des dotations mondiales, plus les échanges avec l’extérieur sont intenses. Mais Linemann n’envisage pas d’introduire dans l’équation de gravité le travail et le capital, voire les ressources naturelles, car il considère que les rendements d’échelles croissants expliquent mieux les différences entre les pays quant à leur ouverture au marché mondial. Son interprétation des avantages comparatifs est explicitée dans le paragraphe 2.2.5, p. 21 : « Comparative advantages and natural ressources ». Les dotations ne doivent pas être comptées dans l’équation de gravité car ce sont des variables endogènes qui ne sont pas fixées une fois pour toute : elles dépendent de la technologie qui est en perpétuelle mutation ; elles ne sont pas complètement immobiles à l’intérieur des frontières ; il y a des possibilités de substitution entre les facteurs de production. Ainsi, « the most important aspect of trade is stimulus toward création of new productive factors ». « As Kindleberger has formulated it, « trade explains factor endowments rather than factor endowments trade » (p. 22). Pour résumer, si la spécialisation de la production vient des différences de dotations factorielles, les échanges ne sont pas déterminés par ces mêmes dotations factorielles qu’il faudrait endogénéiser, mais par l’importance de rendements d’échelle croissants dans la production.
21Krugman et Helpman (1985) résolvent cette ambiguïté en proposant une formalisation de l’équation de gravité dans laquelle les approches intra-branche et interindustrielle sont réconciliées. Dans un modèle, notamment, à deux secteurs de production où les rendements d’échelle sont croissants, on peut conclure que si les dotations factorielles déterminent la spécialisation d’une économie et le nombre de firmes qui produisent des biens intensifs en capital (respectivement en travail), elles ne déterminent pas l’intensité des échanges qui dépend uniquement de la taille respective des deux économies considérées. Cette formalisation, en évitant de recourir à une approche dynamique où les facteurs de production seraient endogénéisés, rend compte de la manière dont on peut intégrer dans l’équation de gravité la théorie des avantages comparatifs ainsi que de la manière dont on peut rendre compatible cette théorie avec l’hypothèse de rendements d’échelle croissants.
22L’aspect le plus original, et le plus moderne, de l’équation de gravité est sa dimension géographique et la prise en compte explicite des obstacles aux échanges, mesurés à l’aide d’une variable synthétique qui est la distance entre les principaux centres économiques. Le pouvoir explicatif de cette variable est mentionné par Leamer et Levinsohn (1994), Brainard (1993), Hummels et Levinsohn (1993), qui suggèrent de manière explicite que l’absence de la distance dans le modèle de Helpman (1987) est à l’origine de la « faiblesse » de ses résultats empiriques. On notera, à l’instar de Leamer et Levinsohn (1994), que la dimension géographique de l’économie développée par Krugman correspond à une notion de la distance probablement plus complexe que celle qui est contenue dans l’équation de gravité : expliquant des phénomènes d’agglomération, elle est, notamment, non linéaire. En ce qui concerne l’approche gravitationnelle, en revanche, la figure 6.1 p. 1385 dans Leamer et Levinsohn (1994) reflète une linéarité presque parfaite.
23La distance fournit simplement une mesure des coûts de transports pour acheminer une marchandise d’un port (ou d’une gare) à un autre, et intègre des éléments non quantifiables comme « l’horizon économique » ou « les barrières psychologiques aux échanges ». Dans la détermination des échanges bilatéraux, sont également pris en compte les obstacles artificiels, qui sont de nature politique et désignent les tarifs, quotas, contrôle des changes mis en place par les gouvernements. Il est en effet nécessaire de considérer à part les échanges qui de manière systématique sont biaisés et ne peuvent être considérés comme aléatoires : ainsi, dans le sens d’une réduction des échanges par rapport aux échanges potentiels, le commerce entre l’Est et l’Ouest, entre les pays arabes et Israël, ou, dans le sens d’une augmentation des échanges par rapport aux échanges potentiels, le commerce qui s’effectue au sein du Commonwealth, de l’Empire colonial français, de la Communauté européenne (EEC, AELE, LAIA, etc.). Ce deuxième type d’obstacles artificiels est pris en compte par des variables muettes.
Section 2 : Clarification du modèle de Helpman et Krugman (1985)
24L’objectif est ici de présenter la version la plus simple de l’équation de gravité. Elle est engendrée par un modèle (traditionnel) à deux secteurs et dans l’un des deux les rendements d’échelle sont croissants7. Les biens ne sont plus homogènes, et il y a la place pour du commerce intra-branche. La notion d’avantages comparatifs doit être reformulée, mais elle reste pertinente.
Un seul des deux secteurs suit des rendements d’échelle croissants
Les données du modèle
25La production est caractérisée par deux secteurs, agricole et manufacturier. Le secteur agricole produit le bien Y avec des rendements constants :
26On note CY la consommation de bien Y, fabriqué dans tous les pays.
27Le secteur manufacturier produit des biens différenciés i variant de 1 à n, avec des rendements d’échelle croissants. On note Di la consommation de bien i. Les fonctions de coûts li et kj relatives au bien i sont identiques dans tous les pays. Notant αL (αK) le coût fixe, ßL (ßK) le coût variable, et xi la quantité de bien i produite avec une unité de travail li et une unité de capital ki, ces fonctions de coût ont la forme suivante :
28On montre (voir A1 p.204) que :
29Si Lx est la quantité agrégée de travail et Kx la quantité agrégée de capital dans le secteur manufacturier :
30Le programme de maximisation est le suivant :
31Il y a n biens domestiques, n* biens étrangers. Di est la consommation de bien i différencié, CY est la consommation de bien Y.R est le revenu, θ est égal à 1 – 1/σ où σ est l’élasticité de substitution entre deux biens. L’intérêt de cette spécification est d’introduire la possibilité pour les entreprises nationales et étrangères de produire des biens différenciés. Le fait de savoir si elles produisent des biens intensifs en capital ou en travail dépend des dotations initiales, mais le volume des exportations dépend essentiellement du nombre de firmes, puisque chacune produit un bien unique qui est consommé partout.
32La solution de ce programme (3) est :
33Où l’indice “*” se réfère au pays étranger. Tenant compte de l’égalité de la consommation mondiale et de la production mondiale, il vient :
34(4) est équivalente à (7) :
35Le vecteur des exportations nettes s’écrit comme la différence entre la production domestique et la consommation qui, dans un monde à rendements constants, s’écrit en fonction de l’écart entre les dotations domestiques et les dotations mondiales. Dans un monde où les biens sont différenciés, en revanche, les exportations de biens différenciés par l’économie domestique sont simplement égales à s* fois la production domestique, puisque par définition la production du pays étranger et importateur est nulle.
Conditions de plein emploi
36L’équilibre sur le marché des facteurs permet d’exprimer le vecteur (Y, n) en fonction de la matrice des intensités factorielles et des dotations en travail et en capital :
37Des solutions existent, si la condition (8’) est vérifiée :
38Pour que des solutions (n, Y) positives existent, il faut que le rapport soit compris entre et Cette condition exprime le fait que les pays appartiennent au même cône de diversification, et que leurs dotations factorielles ne sont pas trop différentes.
39On supposera que ∆ >0, c’est-à-dire que le bien Y est intensif en travail.
40Cet équilibre sur le marché des facteurs est similaire à l’équilibre de la présentation traditionnelle à deux biens X et Y où les rendements d’échelle dans les deux secteurs sont constants. Le bien X est ici remplacé par nx, où n est le nombre de biens produits dans le secteur manufacturier. x est exogène, et l’augmentation de la production s’effectue à travers l’augmentation du nombre de firmes n. Les rendements d’échelle sont constants au niveau du secteur, et croissants au niveau d’une firme individuelle.
Définition du revenu
41Le profit est nul, et le revenu est égal à la somme des rémunérations des facteurs de production :
42Choix de la représentation graphique.
43Le système (8) sous la condition (8’) permet de représenter l’économie indifféremment dans (X, Y) ou dans (K, L) par simple changement de repère. Notons que Krugman choisit une représentation type boîte d’Edgeworth dans (K, L)8. Par souci de simplicité, l’économie étant représentée par les conditions nous choisissons (X,Y) orthogonal. Dans (X, Y) en effet, l’économie est représentée dans le rectangle OQO*Q’ par un point M appartenant à la droite ∆ d’équation (9) (exprimée dans (X, Y)). Les coordonnées de ce point M représentent par définition la production OMx de bien X et la production OMy de bien Y. On montre (voir Al, p. 204) que les coordonnées du point C sont égales à qui correspondent, d’après (7), aux consommations des biens X et Y.
44Les exportations de l’économie de référence sont égales à la production moins la consommation, et cette différence est égale à la consommation de l’importateur : ps*nx = OMx – OCx . Le pays étranger exporte à la fois du bien manufacturier psn*x et du bien non manufacturier (Y* – sȲ). Mais il est importateur net de biens manufacturés, sinon l’équilibre de la balance commerciale ne serait pas vérifié.
45Les importations en provenance de l’économie domestique sont donc égales à ps*nx. On montre que les lieux décrits par ps*(K,L)X(K,L) = const (où X = nx) ne sont pas des droites (comme dans le modèle traditionnel), mais des hyperboles dans le repère (X, Y). Comme dans le modèle Heckscher-Ohlin simple, l’importance des échanges dépend de l’écart entre les dotations factorielles domestiques et étrangères K/L et K*/L*, mais une autre variable explicative s’est glissée : la taille respective des économies, s et s*. On trace9 les variations de VT, qui désigne le volume du commerce, dans deux directions particulières (droite D et droite d (K/L=constante)), représentées sur la figure ci-dessous :
- A PNB donné (droite ∆), plus les dotations factorielles divergent (ce qui correspond à un déplacement de l’économie de droite à gauche sur la droite ∆), plus le volume du commerce VT est important.
- Pour des rapports de dotations factorielles K/L (et K*/L*) constants, le volume du commerce augmente quand les tailles respectives des économies se rapprochent, ou que l’économie se déplace le long de la droite d.
Les deux secteurs suivent des rendements d’échelle croissants
46Si les deux secteurs sont caractérisés par des rendements d’échelle croissants, les exportations de l’économie domestique sont égales à : s* (pxX + pYY), où pxX + pyY est la quantité de biens différenciés produite, alors que les exportations de l’économie étrangère sont égales à : s (pxX* + pyY*) où pxX* + pyY* est la quantité de produits différenciés produite. Or :
47s* (pxX* + pyY) = s* s (R + R*), où (pxX + pyy) + (pxX* + pyY*) = (R + R*).
48Dans ce cas les échanges ne dépendent plus des dotations factorielles, mais uniquement des PNB respectifs des deux économies.
*
49Dans l’approche Heckscher-Ohlin traditionnelle, l’importance du commerce est expliquée par les dotations factorielles et les tailles des économies n’interviennent pas. La population exerce une influence positive ou négative, suivant que les biens exportés sont intensifs en capital ou en travail et que le pays exportateur a une dotation abondante en travail ou en capital.
50La prise en compte des tailles des économies (PNB respectifs) est justifiée par la présence de rendements d’échelle croissants dans au moins un des deux secteurs de l’économie10. Si les rendements d’échelle sont croissants dans les deux secteurs, le volume du commerce est simplement égal au produit des PNB des deux économies partenaires, ce qui donne l’équation de gravité proposée par Helpman et Krugman (1985) :
51L’équation de gravité s’interprète donc plus aisément dans un contexte de rendements d’échelle croissants et de commerce intra-branche généralisé. Certains résultats du modèle Heckscher-Ohlin sont conservés :
52– Les différences de dotations factorielles ne déterminent plus l’intensité des échanges, mais elles sont toujours responsables de la spécialisation de chaque pays : le pays qui a une dotation abondante en capital sera un exportateur net du bien dont la technologie est intensive en capital. En revanche, même si les dotations factorielles sont identiques (les dotations sont situées sur la droite OO* de la figure p. 184), le commerce est maximal si les tailles des économies sont égales, alors que dans le modèle traditionnel le commerce est nul, car chacun produit ce qu’il consomme. Cela vient de ce que chaque pays produit des biens qui sont différenciés, et que l’incitation au commerce est due au goût des consommateurs pour la diversité. Les gains du commerce sont des gains de consommation.
Section 3 : La synthèse du modèle de gravité et du commerce intersectoriel
53Le modèle que nous venons d’exposer présente un certain nombre d’inconvénients :
541) Il place un accent très fort sur l’hypothèse de rendements d’échelle croissants. Or cette hypothèse n’est pas nécessaire. On peut en effet obtenir la même version de l’équation de gravité (VT = s* (pxX + pyY) = s* s (R + R*)) avec des hypothèses très différentes. Anderson (1979), par exemple, trouve que le volume du commerce dépend du produit des tailles des économies, à partir simplement d’une fonction d’utilité Cobb Douglas. Chaque pays dépense une fraction de son revenu en importations des autres pays partenaires, et l’équilibre des dépenses et de la production assure que les importations s’écrivent de manière symétrique en fonction des revenus respectifs des deux économies. L’avantage de cette dérivation est que le modèle de gravité n’est pas limité à du commerce intra-branche.
55Rien, d’ailleurs, ne prouve empiriquement que cela soit le cas : David Hummels et James Levinsohn (1993) proposent une analyse critique de l’étude de Helpman (1987). Saluant au passage la rigueur du modèle de Helpman et Krugman, ils estiment une équation de commerce intra-branche à partir d’un échantillon de pays appartenant à l’OCDE. Les résultats confirment la théorie. Puis ils réestiment le même modèle à partir d’un échantillon de pays entre lesquels le commerce est de nature intersectorielle. À nouveau, les résultats sont significatifs. « We then test the hypothesis using a different data set and, in the process, suggest that something entirely outside the standard model of intraindustry trade and as yet unspecified may be responsible for the empirical success of models of intraindustry trade based on product différentiation11. »
562) Si on admet que l’un des deux secteurs a des rendements d’échelle constants, le volume du commerce augmente lorsque la taille des économies se rapproche et, à taille fixée, lorsque les dotations factorielles de ces mêmes économies divergent. David Hummels et James Levinsohn (1993) ne retiennent que la première partie de la démonstration, illustrée par le lien entre le développement spectaculaire du commerce entre les économies de l’OCDE au lendemain de la Seconde Guerre mondiale et la convergence de leur niveau de développement. Mais Helpman (1987) montre que l’indice de commerce intra-branche est corrélé à la fois à un indice de dispersion des niveaux de développement économique et aux différences de dotations factorielles. Autrement dit, la croissance du commerce est due aussi bien à des flux d’échanges intersectoriels qu’à des flux d’échanges intra-branche.
57Dans le cadre de l’équation de gravité, les PNB permettraient de mesurer les tailles respectives des économies et les PNB par tête seraient un proxy de leurs dotations factorielles. Si les coefficients des variables PNB sont donc a priori positifs, ceux des variables PNB par tête sont plutôt opposés, contrairement à l’interprétation courante12 qui est donnée dans la littérature.
583) Cette propriété est due au fait que le modèle ne comporte que deux secteurs, complémentaires du point de vue de l’intensité factorielle de leurs technologies respectives, et deux pays. Pour retrouver la possibilité théorique que les signes des coefficients des variables PNB par tête soient identiques, il faut considérer un modèle plus réaliste, qui considère notamment plusieurs biens et plusieurs pays.
59Nous proposons donc un cadre d’analyse caractérisé par plusieurs biens et plusieurs produits, qui permet de retrouver l’équation de gravité à partir de quatre configurations de commerce possibles :
60A) Il n’y a pas de biens non échangeables et la technologie, dans tous les pays, est à rendements d’échelle constants.
61B) Il n’y a pas de biens non échangeables et la technologie est à rendements d’échelle croissants.
62Dans les cas A et B, l’équation de gravité dit que les échanges sont déterminés par le produit des PNB respectifs. Ni la population ni le PNB par tête ne sont représentés.
63C) Il y a des biens non échangeables et les rendements d’échelle sont constants.
64D) Il y a des biens non échangeables et les rendements d’échelle sont croissants.
65Dans les cas C et D, les échanges sont déterminés par les PNB et PNB par tête (ou populations) des deux économies partenaires. Le signe des coefficients des PNB par tête est positif ou, de manière équivalente, le signe des coefficients des populations est négatif.
664) Une autre difficulté est d’introduire les coût de transport qui sont pris en compte par la variable « distance » dans le modèle de gravité. La modélisation des coûts de transport est extrêmement difficile, car on arrive très rapidement à des non-linéarités qui excluent les solutions simples. Bergstrand (1989) propose un modèle qui rend compte de cette dimension géographique des échanges, et qui rompt avec la fiction d’économies « infiniment proches du point de vue des biens et infiniment éloignées du point de vue des facteurs ».
67Partant d’une version désagrégée du modèle de gravité13, il suggère une interprétation des coefficients des variables PIB par tête du pays importateur (PPI) et PIB par tête du pays exportateur (PPE) qui lie le contenu des importations à l’intensité technologique des biens considérés et à leurs caractéristiques de consommation (de luxe ou nécessaire). Toutes les configurations de signes des coefficients des variables PPI et PPE sont alors possibles. Le modèle permet d’expliquer que les estimations du modèle de gravité soient couronnées de succès quel que soit l’échantillon sélectionné ; il est à beaucoup d’égard très proche de la formalisation de Helpman et Krugman, tout en introduisant plusieurs biens ainsi que des coûts de transport ; il restaure en particulier le lien entre les dotations factorielles des pays et le type de biens exportés.
Les biens non échangeables : l’introduction des variables PNB par tête ou population
68Nous proposons dans cette section un modèle à un seul facteur de production (le travail) et à plusieurs pays, qui met en relief la grande polyvalence du modèle de gravité. Cette dernière est à l’origine du succès rencontré par le modèle dans la littérature empirique.
L’utilité
69L’utilité est CES (élasticité de substitution constante) et elle a la forme suivante :
70On suppose que θ < 1, c’est-à-dire que l’utilité marginale est décroissante.
71Il y a I pays, et le pays k (k varie de 1 à I) produit Nk biens échangeables qui sont soit différenciés (lorsque Nk >1 et lorsque la technologie est à rendements d’échelle croissants) soit simplement différents (lorsque Nk =1 et lorsque la technologie est à rendements d’échelle constants). Le pays i produit ni biens non échangeables, avec, selon les cas, ni = 0, ni = 1 ou ni >1.
72Cikj (cij) est la consommation par un agent représentatif du pays i de bien échangeable produit par la firme j dans le pays k (de bien non échangeable produit par la firme j du pays i). Si il y a un secteur de biens non échangeables, ni ≠ 0.
73Cette spécification de l’utilité est centrale. Elle permet de distinguer plusieurs versions (A, B, C, D) de l’équation de gravité : intra ou inter-branche, avec ou sans les variables PNB par tête. Lorsque le commerce est inter-branche, le fait de supposer que les biens sont « différents », c’est-à-dire produits selon des technologies différentes, implique de mettre l’accent sur l’inégalité de la rémunération du facteur travail dans le monde à l’origine d’avantages ricardiens et, si il y a des biens non échangeables, à l’origine de la présence des variables PNB par tête dans l’équation de gravité. Lorsque le commerce est intra-branche, on mettra plutôt l’accent sur le rôle de la taille des marchés en supposant que la rémunération du facteur travail est identique dans le monde. Les quatre versions que nous présentons successivement sont résumées dans le tableau suivant :
Tableau 1 Hypothèses permettant de dériver plusieurs versions du modèle de gravité
A | B | C | D |
commerce intersectoriel (sans la variable population ou PIB par tête) | commerce intra branche (sans la variable population ou PIB par tête) | commerce intersectoriel (avec la variable population ou PIB par tête) | commerce intra-branche (avec la variable population ou PIB par tête) |
ni = 0 | ni =0 | ni = 1 | ni>1 |
Nk =1 | Nk >1 | Nk =1 | Nk >1 |
les rendements sont constants | les rendements sont croissants | les rendements sont constants dans les deux secteurs | les rendements sont croissants dans les deux secteurs |
Les fonctions de coût ont donc les formes suivantes
74Si il n’y a pas de biens non échangeables : ∀i,ni = 0 .
75A : Soit les rendements sont constants : Nk = 1
76L’utilité (10) s’écrit :
77On spécifie l’hypothèse de rendements constants de la manière suivante :
78(11) ∀j,lj = Ajxj, où Aj (coût marginal du travail) est la quantité de travail utilisée dans le pays j pour produire une unité de bien échangeable. On déduit de (11) l’égalité du salaire réel Wj/Pj et de la productivité marginale du travail 1/Aj :
79B : Soit les rendements sont croissants : Nk > 1
80L’utilité (10) s’écrit
81L’hypothèse de rendements d’échelle croissants est spécifiée de la manière suivante : (11’) ∀j,lj = α + ßxj, où α est le coût fixe et ß est le coût marginal. On montre dans A2 (p. 219) que ∀j, Pj = P = θ-1w ß
82Si la technologie est identique quel que soit le pays considéré, on peut calculer simplement le prix que tarifent les entreprises qui font face à des rendements d’échelle croissants, et qui ne dépend pas de j.
83Si il y a des biens non échangeables : ni > 0
84C : Soit les rendements sont constants : ni = 1 et Nk = 1
85L’utilité (10) s’écrit
86(12) ∀j, lEj = AEjxEj et lNEi = aNEixNEi sont les fonctions de coût dans le secteur des biens échangeables et dans le secteur des biens non échangeables. lEj (lNEi) est la quantité de travail utilisée dans le pays j pour produire xEj (xNEi) unités de bien échangeable (non échangeable), et AEj (aNEi) est la quantité de travail nécessaire pour produire une unité xEj (xNEi) de bien échangeable (non échangeable). Chaque pays produit un bien j différent échangeable et un bien non échangeable. On déduit de (12) l’égalité du salaire réel et de la productivité marginale du travail : ∀j,Pj = wjAEj et pi = wiaNEi. L’existence de deux secteurs implique l’égalité du rapport des prix relatifs et du rapport des productivités marginales :
87Dans les cas où les rendements sont constants dans les deux secteurs, on va montrer dans les paragraphes qui suivent que le commerce est intersectoriel (au sens où les biens qui sont échangés correspondent à des technologie différentes) et que si les salaires sont très différents, ce qui dépend des dotations factorielles respectives, le degré d’ouverture est proportionnel au salaire à travers un effet de substitution entre biens échangeables et biens non échangeables.
88D : Soit les rendements sont croissants : ni > 1 et Nk > 1, ᗄk
89L’utilité s’écrit :
90(12’) lEj = αE + ßExEj et lNEI = αNE + ßNExNEi, où αE (αNE) désignent les coûts fixes dans le secteur échangeable (non échangeable) et ßE (ßNE) désignent les coûts marginaux dans le secteur échangeable (non échangeable). On suppose que les technologies sont identiques et cette hypothèse permet de calculer de manière simple le prix que tarifent les entreprises dans les deux secteurs.
91Dans le cas où les rendements sont croissants dans les deux secteurs, on montre que le commerce est intra-branche et que, bien que les salaires soient identiques dans le monde, le degré d’ouverture est inversement proportionnel à la population. L’explication ne réside plus cette fois-ci dans un effet de substitution, mais dans le fait que la technologie des biens non échangeables est caractérisée par des coûts fixes.
Résolution du programme du consommateur
92La maximisation de l’utilité (10) par un consommateur représentatif donne les conditions du premier ordre suivantes :
93(13) 14où λi est le lagrangien associé à la contrainte budgétaire du pays i.
94En faisant la somme sur j de l’équation (13), on déduit la demande agrégée par le pays i de biens produits par le pays k :
95À partir de (14), en écrivant que la somme sur k des demandes par le pays i de biens produits par le pays k est égale à la somme sur 1 des demandes par les pays 1 de biens produits par le pays i, on arrive à l’équilibre de la balance commerciale, soit :
9615 ∀i, en particulier i = k.
97En remplaçant dans l’équation (14) par son expression dérivée de l’équation (15), on obtient la demande d’importation suivante entre i et k :
98ne dépend ni de i ni de k : c’est une constante.
99Si on écrit, en utilisant (14), la contrainte budgétaire, il vient (17) :
100Donc, dans le cas le plus général où il y a des biens non échangeables et des rendements croissants dans la production, la demande d’importation : IMP(i, k) = f (Yi, pi, ni, Yk, pk, nk) dépend des revenus respectifs, du nombre de variétés dans le secteur des biens non échangeables, et du prix du bien non échangeable. Ce que l’on propose dans les sections suivantes est d’étudier les propriétés de la fonctions f, et de retrouver, en utilisant les propriétés des fonctions de coût de telle sorte que :
101des versions « Complètes »15 du modèle de gravité.
Il n’y a pas de biens non échangeables
102ni = 0, ∀i
103En substituant de l’équation (17) dans l’équation (16)16, on trouve :
104Le volume des échanges est d’autant plus important que les tailles des économies sont similaires. Cette conclusion est valable aussi bien dans le cas où les technologies sont différentes pour des biens différents (commerce intersectoriel) que dans le cas où les technologies sont identiques pour des biens différenciés (commerce intra-branche).
105A : les rendements d’échelle sont constants : le commerce est intersectoriel et ne dépend que des PNB respectifs.
106Les conditions de production sont décrites par les équations (11).
107Chaque pays est spécialisé dans la production d’un bien différent et les taux de salaire peuvent être différents :17.
108Le commerce est intersectoriel, et on retrouve le modèle développé par Anderson (1979).
109B : les rendements d’échelle sont croissants : le commerce est intra-branche et ne dépend que des PNB respectifs.
110Alors que dans le cas précédent les biens sont différents, on suppose ici que les biens sont différenciés, c’est-à-dire qu’il y a des rendements croissants dans la production et que chaque firme de chaque pays se spécialise dans la production d’une variété de biens. Les fonctions de coût sont décrites par les équations (11’).
111Si on suppose que les taux de salaire sont identiques : Yi = wiLi = wLi, le montant des importations de i en provenance de k est égal à :
112Le commerce est dans ce cas du commerce intra-branche : plus les économies sont similaires par leur taille, plus elles échangent (cf. Krugman, 1980).
113Tant que ne dépend que du revenu du pays i, on ne peut pas distinguer dans l’équation de gravité la variable PNB de la variable « population », ou de la variable PNB par tête. On remarque qu’alors la demande d’importation est homogène de degré un par rapport aux PNB des deux économies et que l’élasticité des importations par rapport aux PNB est unitaire. Or ces résultats ne sont pas conformes à la description du modèle de gravité selon laquelle les échanges augmentent moins que proportionnellement, car la taille du marché domestique devient suffisante pour absorber la production des firmes nationales. Mais cet argument des rendements d’échelle croissants, on l’a vu, ne suffit pas : si il y a des rendements d’échelle croissants dans la production, une augmentation de la taille de l’économie se traduit par un plus grand volume d’échanges, mais le degré d’ouverture ne varie pas. Les firmes produisent indifféremment pour le marché domestique et pour les marchés d’exportation, et le marché sur lequel elles opèrent est le marché mondial qui est de taille constante ∑Yi .
114Un moyen de formaliser la proposition de Linemann est de distinguer deux secteurs : les biens échangeables et les biens non échangeables, qui ne peuvent être vendus par définition que sur le marché domestique.
115Techniquement » cela revient à dire que dépend non seulement du revenu mais aussi des caractéristiques de ce secteur de biens non échangeables. Plus les ressources en main-d’œuvre allouées à ce secteur sont importantes, moins le pays échange. L’augmentation de la taille du marché domestique se traduit donc par l’accroissement du secteur des biens non échangeables qui par définition n ’exporte pas.
Il y a des biens non échangeables
116C : les rendements d’échelle sont constants : le commerce est intersectoriel et dépend des PNB et des PNB par tête respectifs.
117Etude de la fonction
118D’après les équations (16) et (17), le volume des échangés est égal à :
119où C est la constante de l’équation 16.
120En remplaçant les salaires par le PNB par habitant, on retrouve l’équation de gravité. En effet le prix du bien non échangeable dépend de deux choses : du salaire, et du coût marginal du travail, aNEi. Si les salaires sont indicés par i, c’est-à-dire si il n’y a pas égalisation des rémunérations des facteurs de production dans le monde18, l’équation de gravité comporte, en plus des PNB respectifs des économies, un terme salarial qui peut être approximé par le revenu par tête. (18) se réécrit :
121Si le salaire19 augmente, le dénominateur de l’équation ci-dessus diminue, car le paramètre θ est inférieur à 1. Le volume des importations de i en provenance de j est donc une fonction croissante du PNB par tête20. La demande de biens produits à l’étranger, dont le prix Pi n’a pas varié, augmente. Un pays riche (au sens où le PNB par tête, est élevé) consacre relativement moins de ressources au secteur non échangeable et consomme moins de biens non échangeables car ceux-ci coûtent plus cher.
122Remarque : Si l’on suppose que la technologie du bien non échangeable est la même dans tous les pays, (aNEi = aNE, ∀i), et que les salaires sont aussi identiques : pi = aNEiWi = p, ∀i, à nouveau le dénominateur de l’équation (18) est constant, et le volume du commerce ne dépend à nouveau que des PNB respectifs des économies partenaires.
123D : les rendements d’échelle sont croissants : le commerce est intra-branche et dépend des PNB et des populations respectifs.
124On retrouve ici encore un rôle pour le PNB par tête dans l’équation de gravité, qui dépend de la population, non pas à travers le prix du bien non échangeable, dont on a supposé qu’il était constant puisque les technologies sont identiques dans le monde ainsi que les salaires nominaux, mais à travers ni, qui dépend de la population.
Étude de la fonction ni (Li)
125En faisant l’hypothèse que les technologies sont identiques quel que soit le pays considéré et qu’il y a identité de la rémunération du facteur travail, on montre (voir A3, p. 221) que la quantité de bien non échangeable produite par une firme représentative de ce secteur est égale à :
126et que le prix des biens échangeables (non échangeables) est égal à :
127Les équations (13) et (17) permettent de déduire la consommation de chaque bien :
128Cette équation s’applique aussi à la consommation de bien non échangeable avec cNE et pNE. On montre ainsi (voir A3, p. 221) à partir de l’égalité entre la consommation de biens non échangeables (22) et la production de bien non échangeable (21) que :
129 21.
130et à partir de la condition (24) de plein emploi sur le marché du travail :
131que l’augmentation de la population se traduit par une augmentation du secteur non échangeable :
132 22
133Finalement, en remplaçant ni par n (Li) l’équation de gravité s’écrit :
134Malgré les hypothèses d’égalité des rémunérations et d’identité des technologies, la part des dépenses associées aux différentes catégories de biens (échangeables ou non échangeables) varie à cause du terme ni.
135La prise en compte de la population dans l’équation de gravité traduit donc l’idée que l’existence de rendements d’échelle croissants dans le secteur des biens non échangeables interdit la reproduction de l’économie intégrée23 à travers l’échange. La contrainte d’égalité de la consommation domestique de bien non échangeable et de sa production implique que la production totale de bien non échangeable est inférieure à ce qu’elle serait dans l’économie intégrée (où l’absence de frontières, en donnant aux producteurs l’accès à un marché plus vaste, favoriserait l’exploitation des rendements d’échelle). Du point de vue de l’équation de gravité, une conséquence de cette modélisation des frontières entre les économies (au moyen de l’hypothèse de biens immobiles) fait que le dénominateur de l’équation 26 n’est plus constant car la part des dépenses consacrées aux importations dépend de la taille du marché domestique Li, en particulier de la taille du marché des biens non échangeables n(Li).
136Pour résumer, le volume des importations dans l’équation de gravité ne dépend pas des PNB par tête ou des populations :
- Lorsque en l’absence de biens non échangeables le volume du commerce ne dépend que du produit des PNB respectifs et que la part αikj = αkj24 des dépenses consacrée à chaque catégorie de biens, notamment les biens importés, ne dépend pas de i. Le fait qu’il y ait ou non des rendements d’échelle ne change pas cette conclusion.
- Lorsque en présence de biens non échangeables, et lorsque les rendements sont constants, la rémunération du facteur travail est identique dans le monde.
137En revanche, lorsqu’il y a des biens non échangeables et que soit les rémunérations du travail sont identiques, mais il y a un nombre variable par pays de firmes dans le secteur des biens non échangeables (les rendements sont croissants), soit les rémunérations sont différentes et reflètent des dotations de travail très différentes (les rendements sont alors constants), la localisation des facteurs n’est plus neutre. Dans le cas des rendements d’échelle croissants, la population détermine le nombre de firmes dans le secteur des biens non échangeables en fonction des coûts fixes respectifs de ce secteur par rapport au secteur échangeable. Dans le cas des rendements d’échelle constants, la population (ou dotation en travail) détermine le prix des biens dans le secteur non échangeable à travers le coût salarial, donc détermine la consommation de bien non échangeable.
138Dans le cas où les rendements sont croissants, l’existence de coûts fixes dans la production des biens non échangeables est à l’origine de la relation décroissante entre degré d’ouverture et population. La variation du degré d’ouverture est due aux entrées et sorties de firmes dans le secteur des biens non échangeables25, déterminées par la taille du marché domestique (ces firmes ne vendent pas à l’étranger).
139Dans le cas où les rendements sont constants, le volume du commerce peut être une fonction décroissante de la taille de l’économie. En effet, une dotation abondante en travail suggère un salaire nominal plus faible, et d’après l’étude du cas C une allocation budgétaire plus favorable au secteur des biens non échangeables.
140Ce n’est pas la notion de rendements d’échelle croissants qui permet de formaliser l’idée de Linemann, selon laquelle le degré d’ouverture est inversement corrélé à la taille du marché des biens. S’il n’y avait pas l’hypothèse d’immobilité des biens non échangeables, l’augmentation de la taille de l’économie se traduirait par l’augmentation simultanée de la consommation de biens étrangers et de la consommation de biens domestiques et serait sans effet sur le degré d’ouverture. Ce qui est essentiel dans la dérivation de l’équation de gravité est de supposer l’existence d’un secteur de biens non échangeables.
141Krugman et Helpman (1985, chapitre 10, p. 199) démontrent un résultat analogue pour une économie caractérisée par deux secteurs, un secteur de biens non échangeables dans lequel les rendements sont croissants, deux facteurs de production, et la même rémunération du facteur travail dans tous les pays.
142Dans le cas où les rendements sont croissants dans le secteur des biens non échangeables, les hypothèses d’égalisation des rémunérations des facteurs et de technologie unique pour la fabrication du bien non échangeable ne garantissent plus ce que Helpman et Krugman appellent la reproduction de l’économie intégrée à travers le commerce.
143« The crucial point in this case is that it is no longer possible to reproduce the integrated equilibrium through trade. There may still be factor price equalization, but this does not have the usual interpretation that the location of productive factors does not matter. »
144« Once some increasing returns sectors become nontraded, the analysis breaks down in two ways. First, because relative prices and the diversity of products available are different in each country – both from one another and from those in the integrated world economy – the shares of expenditure falling on industries will not be the same in different countries, even with identical homothetic preferences » (p. 201).
Section 4 : Le modèle de Bergstrand : l’introduction des coûts de transport
145Bergstrand (1989) propose la version la plus complète du modèle de gravité, comportant les variables PNB, PNB par tête, distance, ainsi que des variables monétaires.
146Du côté de la demande, les consommateurs, sous contrainte de revenu, maximisent une fonction d’utilité Cobb-Douglas, CES, Stone-Geary :
147Le bien B est un bien nécessaire, et ne peut pas être consommé en dessous d’un certain niveau est la quantité de bien manufacturé A (agricole B) produit par la firme h du pays n et demandé par le consommateur 1 du pays j. Cette fonction d’utilité permet d’introduire dans l’équation de gravité le PNB par tête du pays importateur, qui est exprimé en termes de consommation minimale du bien Elle engendre une fonction de demande inverse qui implique que l’élasticité revenu de la demande de bien A (B) est supérieure (inférieure) à 1 lorsque le PNB par tête augmente. À la différence des fonctions d’utilité que nous avons considérées jusqu’à présent, cette fonction n’est donc pas neutre sur la détermination des échanges.
148La production est caractérisée par des rendements d’échelle croissants ; chaque firme produit un seul bien différencié et les fonctions de coût sont caractérisées par des coûts fixes et des coûts variables.
149où a = A, B et Lagi (Kagi) sont les quantités nécessaires de travail (de capital) à la firme g de l’industrie a du pays i pour produire une unité de bien Xagi.
150Les coûts de transport sont introduits dans une fonction de répartition de l’offre de bien vers différents marchés :
151Cette fonction de répartition implique que la production de bien a par la firme g du pays i n’est pas égale à la somme des exportations de cette firme vers chaque destination n. Cain est supérieur à 1, et représente la proportion des exportations qui a été « perdue » lors du transport de la firme g du pays i vers le pays n.
152Si ɸa est égal à 1, la minimisation des coûts de transport est triviale : la totalité des exportations de la firme g va vers le pays dont les coûts de transport Cain sont les plus faibles. ɸa>1 en revanche implique que la fonction est concave. L’entreprise maximise son profit en tenant compte de ces coûts de transport. Son offre de bien dépend de l’intensité technologique du bien considéré, de la dotation factorielle du pays, des coûts de transport Cain.
153La résolution du système d’équations implique une équation de gravité qui explique les importations de biens i PXij en fonction des PIB Yi et Yj des deux pays (exportateur et importateur), de leur PNB par habitant Yi/Li et Yj/Lj, de la distance Dij, de « circonstances particulières » Aij qui favorisent ou entravent les échanges entre i et j, et d’un terme complexe Pij qui inclut les taux de change et les prix26 :
154Le PNB par tête du pays exportateur est un proxy pour sa dotation factorielle, qui apparaissait effectivement dans la fonction d’offre. Si le bien exporté est intensif en capital, le coefficient du PNB par tête du pays exportateur est positif ; si au contraire le coefficient du PNB par tête exportateur est négatif, cela veut dire que le bien exporté est intensif en travail.
155Le PNB par tête du pays importateur intervient dans l’équation de gravité, car on a vu, dans la fonction d’utilité, que la consommation de bien B était bornée par un niveau minimal. Les consommations de biens A et B sont donc influencées par le niveau de la richesse, argument qui est de Linder (1961). Lorsque le bien échangé est un bien de luxe, son élasticité de substitution est supérieure à 1, et le coefficient du PNB par tête importateur est positif ; si en revanche le coefficient du PNB par tête est négatif, cela veut dire que le bien importé est un bien nécessaire.
156La distance intervient dans l’équation de gravité : elle est un proxy des coûts de transport Cain.
157L’avantage de la solution est de permettre toutes les configurations possibles des signes des variables explicatives. Bergstrand illustre d’ailleurs le modèle théorique par une estimation de l’équation de gravité sur un échantillon constitué de pays de l’OCDE au premier niveau de désagrégation de la nomenclature SITC (Standard International Trade Classification).
Tableau 2
Signe des coefficients des variables explicative suivantes | PNB par tête importateur : positif, bien de luxe ; négatif bien nécessaire | PNB par tête exportateur : positif, technologie intensive en capital ; négatif, technologie intensive en travail |
SITC0 (produits alimentaires) | + | |
SITC1 (boissons et tabac) | + | – |
SITC2 (matières premières) | – | + |
SITC3 (pétrole et dérivés) | – | |
SITC4 (huiles et graisses) | ||
SITC5 (produits chimiques) | – | + |
SITC6 (biens manufacturés) | + | + |
SITC7 (biens d’équipement et machines) | + | + |
SITC8 (biens manufacturés divers) | + | – |
Source : Bergstrand (1989) ; quatre estimations en 1965, 1966, 1975 et 1976
158Le modèle peut aussi être estimé à un niveau agrégé, à condition de ne pas imposer de « fausses » contraintes sur les coefficients, par exemple en considérant simultanément des exportations de biens de luxe et des exportations de biens nécessaires, ou des exportations de biens dont la technologie est intensive en travail et des exportations de biens dont la technologie est intensive en capital. Les équations de gravité typiquement estimées dans la littérature concernent des flux entre pays industrialisés, c’est-à-dire des échanges de biens dont la production est intensive en capital et qui sont des biens de luxe. Il est par conséquent normal de trouver des coefficients positifs pour les variables PNB par tête. « Thus, typical gravity equation coefficient estimates for these variables in aggregate trade flow regressions suggest that the product exchanged tend to be capital intensive in production and luxuries in consumption ; these are feasible inferences since estimation usually involves trade flows among major industrialized countries. Of course, expected coefficient signs would change as one or more of these assumptions change » (Bergstrand, 1989, p. 146).
159Cette annexe consacrée aux fondements théoriques du modèle de gravité a permis de mettre en évidence les résultats suivants :
1601) L’équation de gravité s’applique aussi bien à du commerce intersectoriel qu’intra-branche. Dans sa version la plus dépouillée, elle dit simplement que les échanges sont déterminés par le produit des PNB respectifs (section 2, p. 179).
1612) Pour introduire les variables PNB par tête ou population, on a proposé un modèle simple de commerce soit intra-branche, soit intersectoriel (section 3, p. 185). Lorsque l’on considère un secteur de biens non échangeables, on montre que les importations dépendent du PNB par tête lorsque les salaires des deux pays partenaires déterminent les parts des revenus consacrées aux biens non échangeables, ou bien qu’elles dépendent des populations respectives lorsque la taille des économies détermine le nombre de firmes dans le secteur des biens non échangeables. Le signe des variables « PNB par tête » est toujours positif, et le signe des variables « population » est toujours négatif, confirmant l’hypothèse de Linemann (1966) selon laquelle le degré d’ouverture d’une économie est corrélée négativement à la variable « population ».
162Ces résultats sont dus essentiellement aux hypothèses que l’on a faites. Du côté de l’offre, il n’y a qu’un seul facteur de production, le travail, et le PNB par tête du pays exportateur n’est donc pas une mesure de ses dotations factorielles. La demande est neutre dans la détermination des échanges, et le PNB par tête du pays importateur n’est donc pas une approximation du niveau de richesse, dans le sens que Linder donnait à cette variable dans la détermination des flux commerciaux. Les variables PNB par tête et « population » jouent un rôle absolument symétrique lorsqu’elles sont introduites à l’aide d’un secteur de biens non échangeables. Ce sont des variables d’offre.
1633) La dernière version du modèle de gravité présentée dans la section 4 (p. 199), celle de Bergstrand (1989), est beaucoup plus complète, puisqu’elle introduit à la fois les quatre variables des modèles précédents, et la variable distance, qui est un proxy des coûts de transport. En faisant jouer un rôle à la demande dans les échanges, et à partir de fonctions d’offre qui impliquent que les exportations d’un pays dépendent de ses dotations factorielles, ce modèle est une extension du modèle de Krugman et Helpman. Dans le modèle de Bergstrand, en effet, comme dans celui de ces deux auteurs, le coefficient de la variable PNB par tête du pays exportateur est une mesure de ses dotations factorielles, alors que le coefficient de la variable PNB par tête du pays importateur dans le modèle de Bergstrand reçoit une interprétation « à la Linder ». Si, dans le modèle de 1986, les coefficients des deux variables sont symétriques et reflètent les différences de dotations factorielles des deux économies, dans le modèle de Bergstrand ces coefficients ne sont plus symétriques et toutes les configurations de signes sont possibles.
164Les modèles de gravité estimés dans cet ouvrage sont agrégés, et correspondent donc au modèle développé dans la section 3, dont l’avantage principal est de mettre en évidence la grande polyvalence du modèle de gravité. Notons que nos estimations sont compatibles également avec le modèle de Bergstrand (1989) présenté dans la section 4, si l’on suppose, à l’instar de cet auteur, que les biens échangés en Europe, dans l’entre-deux-guerres et dans la période contemporaine, sont suffisamment homogènes pour ne pas imposer de fausses contraintes sur les coefficients.
A1 : Représentation géométrique
Section 1 : Démonstration du fait que x s’exprime en fonction des paramètres du modèle
165La production X de bien manufacturier s’effectue à travers l’augmentation du nombre de firmes n, et on montre que x, dans les équations de cette annexe, peut être considéré comme un paramètre : ∀i, xi = x est exogène.
166On rappelle que le programme du consommateur est de la forme suivante :
167Les conditions du premier ordre de ce programme sont les suivantes :
168Comme tous les individus représentatifs de chaque pays sont identiques, on peut écrire la demande de bien manufacturier i de la manière suivante :
169Si on suppose que le nombre de firmes est très grand, la politique tarifaire d’une firme est considérée avoir un impact négligeable sur l’utilité marginale du revenu : on néglige la dépendance de et Μ en pi, i.
170En remplaçant pi par son expression tirée de l’équation (C), le profit s’écrit :
171En écrivant la condition du premier ordre, on montre que le prix qui maximise le profit est égal à :
172La condition de libre entrée, donc de nullité du profit, permet alors d’exprimer x en fonction des paramètres du modèle :
Section 2 : Choix du repère
173Soit l’équation (1) donnant le changement de repère – à la condition (3)– de (L, K) dans (n, Y) :
174ou de façon équivalente de (L, K) dans (X, Y) avec X=nx :
175On a alors également :
176avec la condition :
177Par la suite, on choisit de travailler dans le repère (X, Y), le passage dans le repère (K, L) se faisant par l’équation (1’).
Section 3 : Équations à traiter
178Dans (L, K) :
179(4) wL + rK = PNB est l’équation d’une droite qu’on note (∆)
180(∆) a pour équation dans (X, Y) :
181(4’) PxX + PyY = PNB
182avec :
Section 4 : Mise en place du repère croisé
183On considère (X, Y) et (X*, Y*) avec :
184On peut alors représenter les variations de (X, Y) et/ou (X*, Y*) dans le repère croisé de la figure A-1 :
185On a :
Section 5 : Droite (∆) dans le repère croisé
186Dans (X, Y) (∆) a pour équation : PxX + PyY = PNB
187Dans (X*, Y*) (∆) a pour équation : PxX* + PyY* = PNB*
188avec :
189et : (8)
190la pente de (∆) est donnée par le vecteur
191La pente est donc fixée une fois pour toute mais la position de la droite dans le repère (X, Y) dépend de la valeur du PNB (Figure A-2)
192Alors, par définition du repère, le point M de (∆) a pour coordonnées (X, Y) dans le repère (X, Y) et (X*, Y*) dans le repère (X*, Y*), ce qui se traduit par :
Section 6 : Définition du point C pour (∆) donnée
193Le point C est donné par l’intersection de (∆) et de (D), où (D) est la droite OO*.
194(D) a pour équation dans (X, Y) :
195Le point C a donc pour coordonnées : , en notant
Section 7 : Hyperboles PXS* X =Constante
7.1 Notations et remarques
196Soit à résoudre (10) PXs*X = VT, où VT est une constante positive,
197Notons que :
- Pour un PNB donné, s et par suite s* sont constantes et l’équation (10) est l’équation d’une droite X=Constante dans (X, Y).
- Si on laisse varier PNB, l’équation (10) donne un réseau d’hyperboles.
7.2 Etude du réseau d’hyperboles pour PNB variable
198L’équation (10) a pour équation dans (X, Y) :
199(11) est un réseau d’hyperboles (HVT) dans (X, Y) lorsque VT varie dont les asymptotes sont données par les droites Cette dernière droite est une des droites (∆) que nous notons de vecteur directeur et passant par le point O* (figure A-4), ce dernier ayant pour coordonnées et vérifiant par suite l’équation (8).
7.3 Discussions sur les valeurs de VT
200Valeur maximum de VT
201L’équation (10) impose une condition sur la valeur de VT. En effet, on a :
202Par ailleurs, on ne s’intéresse évidemment qu’aux portions de (HVT) comprises dans la partie du plan , condition qui n’est pas nécessairement remplie lorsque (12) est vérifiée.
203La condition (12) sur VT n’est nécessaire que si l’hyperbole a une partie dans le rectangle OQO*Q’, ce qui revient à dire que l’intersection de l’hyperbole et de la droite d’équation Y=0 n’est pas nulle (c’est-à-dire un ou deux points).
204Cette condition de non-nullité de l’intersection se traduit par une équation du second ordre sur X :
205 soit
206qui a une solution si le discriminant est positif, d’où la condition :
207 d’où la condition VT :
208En conclusion, les conditions (12) et (14’) donnent :
209On retiendra la condition (12) lorsque cette dernière sera la plus restrictive et la condition (14’) dans le cas contraire, de sorte que :
210Si on retient (14’)
211et l’hyperbole a une intersection vide avec le rectangle
212OQO*Q’
213Si on retient (12)
214et l’hyperbole a une intersection non vide avec le rectangle OQO*Q’
215Intersection des (HVT) et de (D)
216Soit CVT l’intersection de (HVT) et de (D). La détermination de CVT est donnée par la résolution de l’équation du second degré en X :
217qui donne :
218(15’) n’a de solutions que si le discriminant est positif, ce qui se traduit par :
219Etude de
220Le cas correspond à l’annulation du discriminant de (15’), de sorte que n’a qu’un point d’intersection avec (D). Ce point a pour coordonnées :
221Ce qui revient à dire que est le milieu du segment OO* (figure A6).
7.4 Conclusions et tracé des (HVT)
222La figure A-7 représente les hyperboles dans (X, Y) pour VT ≤ VTmax, où VTmax est donnée par (12) ou (14’) (voir discussion en 7.3). On se contente de représenter HVT dans le triangle au-dessus de OO*, et on représente en symétrie les hyperboles correspondant au repère (O*, X*, Y*).
7.5 Variation de VT dans le rectangle OQO*Q’
223Variation de VT le long d’une droite Δ
224Soit à résoudre :
225où PNB est donné
226Soit IVT le point d’intersection correspondant. IVT a pour coordonnées :
227Lorsque VT augmente, le point IVT se déplace sur la droite ∆ de droite à gauche (figure A8).
228Direction particulière
229Choisissons la direction particulière de la droite (∆a) de pente et passant par
230La droite (∆a) coupe l’axe X (OQ) en un point, noté E. Le point E a pour coordonnées . Lorsqu’on se déplace sur la droite (∆a), de C à E, la valeur de VT augmente.
Section 8 : Variations relatives de K/L et K*/L*
231Nous voulons décrire ici ce qui se passe lorsque K/L et K*/L* prennent des valeurs très différentes. Pour fixer les idées, nous choisissons d’étudier le cas où K/L devient très grand devant K*/L* ; notons que le cas K*/L*>K/L se déduit de l’étude précédente en ramenant les résultats de (O, X, Y) dans le repère (O*, X*, Y*).
232Nous allons montrer :
233en 8.3) que lorsque K/L augmente, K*/L* diminue, à condition que :
234en 8.4) et 8.5) que dans le rectangle OO*QQ’, cette condition est réalisée, que les droites à K/L constant correspondent à des droites à X/Y constant et que lorsque K/L augmente, X/Y augmente.
235De ces résultats, il suffit alors de déduire que lorsque K/L augmente, VT augmente et d’après 8.3), l’écart entre K/L et K*/L* se creuse.
2368.1. Position de (K, L) dans le repère (X, Y)
237D’après (1’) :
238La droite OK est donnée par
239La droite OL est donnée par
240Les pentes de ces deux droites dans (X, Y), que nous noterons -dK et – dL sont négatives. La position relative des deux droites dans (X, Y) dépend de la valeur relative de dK et dL.
241Posons, pour fixer les idées, l’hypothèse (H) suivante :
242c’est à dire dK > dL. Cette configuration correspond à la figure A-9.
2438.2. Variation relative de K/L et K*/L*
244Posons K/L = A, où A est une constante. On a alors :
245On en déduit :
246On a donc d’où :
2478.3. Position des droites K/L = A dans le repère (X, Y) et limites des valeurs de A dans le rectangle OQO*Q’
248Les droites K/L=A ont pour équations dans (X, Y) :
249Les droites K/L = A sont des droites X/Y = B dans (X, Y). La condition B > 0 impose une condition sur A, en tenant compte de (21) de la forme :
2508.4. Position de la droite dans (X, Y) et variation de A dans (X, Y) et variation de A dans (OQO*Q’)
251La loi de variation (22) donne comme limite de K*/L* décroissant la droite soit Montrons que cette condition est moins restrictive que la condition (23), autrement dit que la droite correspond à une droite de pente négative dans (X, Y).
252Nous montrons pour cela que :
253Si (24) est vérifiée, alors, en utilisant (1’) :
254condition vérifiée d’après l’hypothèse (21).
255En conclusion, dans le rectangle OQO*Q’, les droites à K/L croissant correspondent à des valeurs de K*/L* décroissantes.
2568.5. Conclusion
257On a montré que :
- Dans la zone où X et Y sont positifs, lorsque K/L=A augmente, K*/L* diminue.
- Sur une droite (Δ), l’augmentation de VT est représentée par un déplacement de droite à gauche qui correspond à des valeurs de B croissantes, donc de A croissantes.
258Sur le graphique A-11, A1<A2 et VT1<VT2. De A1 à A2, K/L augmente, VT augmente, et d’après a), K*/L* diminue.
259En conclusion, nous avons montré que l’écart entre K/L et K*/L* se creuse pour des valeurs croissantes de VT.
260Nous avons montré les points suivants :
261dans le repère (X, Y) :
- L’équation PxX + PyY = PNB est l’équation d’un réseau de droites caractérisées par la valeur de PNB.
- L’équation PXs* X =VT est l’équation d’un réseau d’hyperboles caractérisées par la valeur de VT.
- L’écart entre K/L et K*/L* augmente dans (X, Y) lorsque la pente des droites K/L = A augmente.
262Les conclusions des calculs développés sont :
- En se déplaçant de droite à gauche sur une droite ∆, c’est-à-dire pour un PNB donné, la valeur de VT augmente.
- Lorsque l’écart entre K/L et K*/L* augmente, la valeur de VT augmente.
A2 : Extension à une économie ouverte avec un secteur de biens non échangeables du modèle de Krugman (1980)
263Le modèle qui est présenté ici est une extension à une économie ouverte avec un secteur de biens non échangeables du modèle de Krugman (1980), qui concernait une économie fermée sans secteur de biens non échangeables. La seule différence de résolution réside dans l’équation (4), qui exprime l’égalité de la somme des consommations individuelles et de la production d’une firme. Dans le modèle de Krugman, en effet, cette condition était beaucoup plus simple, car la production xi était simplement égale au produit de la population L et de la consommation ci de bien i d’un agent représentatif : xi = Lci. Dans notre modèle, la consommation d’un agent représentatif, en dépit du fait que les salaires sont identiques dans tous les pays, varie d’un pays à l’autre, car il y a un secteur de biens non échangeables, qui fait que la part budgétaire consacrée à chaque bien dépend de la taille de ce secteur (voir démonstration ci-dessous) :
264Un agent représentatif maximise :
265Il y a I pays, et le pays k (k varie de 1 à I) produit Nk biens échangeables. Cikj est la consommation par l’agent représentatif du pays i de bien produit par la firme j dans le pays k. Si il y a un secteur de biens non échangeables, ni ǂ 0. Les lettres majuscules se rapportent au secteur de biens échangeables (P pour prix, X pour production, C pour consommation, N pour nombre de biens produits si les rendements sont croissants), et les lettres minuscules au secteur de biens non changeables (p, x, c, n).
266Sous la contrainte :
267Les conditions du premier ordre s’écrivent donc :
268De ces conditions, et en utilisant la contrainte budgétaire, on trouve facilement que :
269donc la consommation d’un agent ressortissant du pays i dépend de i à travers ni.
270La production de la firme k dans le pays j est égale à la somme des consommations individuelles de bien :
271avec
272Cette relation permet d’écrire les fonctions inverses de demande suivantes :
273Chaque firme k du pays j maximise un profit égal à :
274Si on suppose que chaque firme est suffisamment petite pour que sa politique de tarification n’influence pas l’utilité marginale « agrégée » (on néglige la dépendance de A en Pkj), le prix qui maximise le profit est égal à :
275 27
276Si on écrit la condition de libre entrée sur le marché qui implique la nullité du profit :
277Un raisonnement similaire implique que le prix du bien non échangeable est égal à
278et que la production d’une firme représentative dans le secteur des biens non échangeables est égale à : (8’)
279La condition de plein emploi exprime l’égalité de l’offre et de la demande de travail :
280On montre facilement en utilisant (8) et (8’) que :
A3 : Etude de l’impact d’une augmentation de la population sur les importations de biens échangeables
281Etude de ni (Li)
282avec :
283On pose :
284(1) se réécrit :
285On cherche Li (ni). Utilisant (3), il vient :
286D’où :
287Explicitons N et D en utilisant (4) :
288D’où, après simplification par , il vient :
Notes de bas de page
1 On trouve aussi la version suivante (équivalente) de l’équation de gravité : IMPij = δ0Yiδ1 (Yi/Li)δ2 Yjδ3 (Yj/Lj)δ4Dij-δ5Pijδ6.
2 Chaque pays produit à la fois le bien manufacturé et le bien non manufacturé.
3 Les rémunérations des facteurs sont identiques d’après le théorème d’égalisation des prix des facteurs de production dans le modèle Heckscher-Ohlin. Ce théorème est valable aussi dans le modèle de Helpman et Krugman.
4 Au sens où sa population est moins nombreuse et où le PNB par tête, c’est-à-dire le salaire réel, est plus élevé.
5 Hummels et Levinsohn (1993) critiquent cet article dont les résultats sont compatibles avec d’autres modèles théoriques et ne permettent pas de trancher entre des hypothèses alternatives.
6 L’accroissement des débouchés devrait permettre l’augmentation du nombre de firmes domestiques viables.
7 Cette section est une présentation rigoureuse et explicite des chapitres 7 et 8 de : « Market Structure and Foreign Trade », Helpman Elhanan et Krugman Paul R., MIT Press, 1985.
8 (K, L) est orthogonal et (X, Y) correspond dans (K, L) aux droites OQ et OQ’. Voir Krugman et Helpman (1985), pp. 163 et 164.
9 Le détail de construction des hyperboles est présenté dans A1, section 7, p. 208.
10 Le rôle persistant des dotations factorielles dans l’intensité des échanges suggérerait de prendre en compte aussi bien le capital que le travail.
11 Le même diagnostic est repris par Deardoff (1995) : « Simple gravity equation can be derived from standard trade théories and because gravity équation characterizes many models, its use to test any of them is suspect. »
12 Consistant à dire que, en présence de rendements d’échelle croissants, plus l’économie domestique est grande, plus elle absorbe la production des firmes domestiques, et moins elle est ouverte sur l’étranger. Si on remplace la variable PNB par tête par une variable « population » mesurant la taille de l’économie, cette interprétation se traduit par un signe toujours négatif de la variable « population ».
13 Bien que Bergstrand en propose une version désagrégée, il est possible de retrouver la version agrégée du modèle en sommant les importations des différentes catégories de biens, en veillant toutefois à ne pas imposer de fausses contraintes sur les coefficients structurels.
14 On montre que :
15 Les coûts de transport n’apparaissent pas dans ces versions stylisées du modèle de gravité.,
16 Il suffit pour démontrer ce résultat de remplacer dans l’équation (16) par sa valeur dans l’équation (17) :
On obtient, après simplification par le résultat voulu.
17 Cette équation exprime l’égalité entre la productivité marginale du travail et le salaire réel. A l’équilibre et lorsque les rendements d’échelle sont constants, les profits sont nuls :
18 Les salaires ne sont pas nécessairement identiques puisque les biens, et les technologies qui les produisent, sont différents.
19 C’est-à-dire les PNB par habitant.
20 L’argument est symétrique et vaut aussi pour le pays exportateur.
21 Yi = wLi, car les profits sont nuls et il n’y a qu’un seul facteur de production.
22 Si les coûts fixes αNE sont suffisamment « faibles » (inférieurs à 1 – θ), l’augmentation du nombre de firmes dans le secteur non échangeable est plus que proportionnelle à l’augmentation de la population.
23 La notion d’économie intégrée est centrale dans le livre de Helpman et Krugman : elle est définie par l’allocation des ressources qui résulterait d’un monde où biens et facteurs seraient parfaitement mobiles. La question que les auteurs posent est de savoir si le commerce permet de reproduire cette allocation des ressources lorsque certains biens sont mobiles, d’autres immobiles, alors que les facteurs sont immobiles. En introduisant des biens non échangeables caractérisés par des rendements d’échelle croissants, malgré l’hypothèse d’égalité des rémunérations factorielles, la réponse est que l’économie mondiale ne reproduit plus l’économie intégrée : les consommations varient en fonction du nombre de firmes dans ce secteur non échangeable et la production de biens non échangeables est en générale inférieure à ce qu’elle serait si ces biens étaient consommés partout. En revanche si les rendements sont constants, et que les prix des facteurs sont égalisés, la reproduction de l’économie intégrée redevient possible (ce cas de figure correspond à la remarque de la p. 195).
24 On rappelle que aiki = est défini dans l’équation suivante :
25 Il entre plus de firmes dans ce secteur que dans celui des biens échangeables, car les coûts fixes y sont moins élevés.
26 On suppose que cette variable n’est pas corrélée aux autres variables explicatives, et que son omission n’entraîne pas de biais dans l’estimation des coefficients (voir Huang, 1993).
27 πkj = PkjXkj – w(αE +ßEXkj) = θ۸-1Xθkj – w(αE +βEXkj). Les conditions du premier ordre s’écrivent :
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Régionalisme et désintégration en Europe centrale et orientale
Une approche gravitationnelle
Mathilde Maurel
1998