Avant-propos
p. 13-15
Texte intégral
1Le titre de cet ouvrage – les « petits » maîtres du burlesque – pourra à juste titre choquer le cinéphile : ce qualificatif dévalorisant s’accorde bien mal à des artistes comme Roscoe Arbuckle, Charley Chase, Stan Laurel ou Larry Semon... Mais force est de reconnaître que ces acteurs talentueux, parfois géniaux, n’ont jamais connu auprès du grand public la notoriété des « grands » maîtres que furent Chaplin, Keaton, Lloyd, Langdon ou le tandem Laurel et Hardy. Certains, dont nous sommes, peuvent le regretter. Ces vedettes reconnues, encensées à la fois par la critique et par le public, ont du même coup engendré une littérature pléthorique : études, exégèses, biographies et filmographies abondent à leur sujet. C’est la raison pour laquelle nous avons volontairement éliminé de cet ouvrage les « grands » mentionnés ci-dessus. Tout n’a certes pas été dit sur ces étoiles de première grandeur, mais le cinéphile trouvera facilement dans la littérature d’abondantes informations sur leur filmographie et leur art, ce qui n’est pas le cas de la plupart des comédiens et comédiennes auxquels cet ouvrage souhaite rendre un tardif hommage.
2Nous nous sommes donc intéressé à la redécouverte de ces artistes, plus ou moins oubliés, qui ne sont « petits » que par référence à des acteurs mythifiés. L’objet essentiel de cet ouvrage consiste en effet, à recenser ces comédiens et comédiennes qui connurent aux États-Unis comme dans toute l’Europe une gloire souvent sans lendemain, mais qui participèrent à la grande aventure du cinéma comique américain. Nous avons volontairement négligé les productions européennes pour deux raisons principales. L’Ancien Continent, conscient de la valeur de ce que nous considérons comme les pionniers du burlesque, s’est déjà penché sur la question à maintes reprises, alors que la critique américaine s’est davantage consacrée à l’étude de ses stars. D’autre part, le cinéma comique des États-Unis a connu entre les deux guerres un épanouissement et un succès mondial alors que le cinéma européen, du fait de la Grande Guerre, demeurait plus confidentiel.
3Après une brève analyse des origines et sources du burlesque américain, nous préciserons le rôle et l’apport, souvent négligés, des grands producteurs de comédies. Si le nom de Mack Sennett est connu du grand public, ceux d’Hal Roach, Albert Christie, Henry Lehrman, etc. – tous infatigables découvreurs de nouveaux talents – doivent être remis à l’honneur. Nous préciserons enfin le rôle des réalisateurs, artisans souvent obscurs mais dévoués à la cause du burlesque.
4La première partie de ce livre est consacrée à dix grands comédiens. Pour six d’entre eux (Charley Chase, Stanley Laurel, Lawrence Semon, Monty Banks, Alfred St. John, Roscoe Arbuckle), il s’agit d’auteurs véritables : dans la plupart de leurs films, ils apparaissent en effet comme réalisateurs, scénaristes et acteurs. Par contre, Billy Bevan, Ben Turpin, Snub Pollard et Bobby Vernon ne sont que des « exécutants ». Les deux premiers s’avèrent très représentatifs du génie comique de Mack Sennett : les films de Bevan, avec leurs gags surréalistes et leurs poursuites parfaitement réglées, sont très caractéristiques du dynamisme de Sennett ; d’autre part, Ben Turpin, avec son physique caricatural, excelle dans le cinéma parodique, genre particulièrement développé dans les productions du Canadien. Quant à Snub Pollard, il est bien le digne représentant d’une partie importante de la production d’Hal Roach ; ces courtes (généralement en une bobine) comédies loufoques, à l’esprit purement slapstick, égalent parfois par leur perfection les meilleures réalisations de Sennett. Enfin, Bobby Vernon nous parait être un des acteurs qui a le mieux inspiré un autre grand producteur, Albert Christie, père des fameuses Christie Comedies.
5Pour chacun de ces comédiens, nous avons rassemblé des éléments biographiques et une filmographie très détaillée, accompagnée, lorsque cela a été possible, d’un résumé plus ou moins succinct de chaque film. Rappelons qu’une quantité importante de comédies muettes sont considérées comme définitivement perdues, un des plus malchanceux étant Larry Semon dont les trois-quarts de l’œuvre ont été détruits par la Vitagraph elle-même. Enfin, nous proposons une analyse du comique particulier de chacun de ces créateurs. La deuxième partie est relative à une trentaine de comédiens ou comédiennes qui furent – plus ou moins temporairement – les héros de « séries ». À l’exception de quelques-uns, et non des moindres, comme Charley Bowers ou Clyde Cook, ces acteurs (ou actrices) ne peuvent être considérés comme des auteurs à part entière, mais seulement comme de talentueux artisans, tel Oliver « Babe » Hardy, Lupino Lane ou Hank Mann. Pour chacun, nous donnons, outre quelques indications biographiques, une filmographie aussi complète que possible, mais limitée (réalisateur, nombre de bobines, date de sortie, producteur), et quelques réflexions sur le style de chacun d’eux. Cette deuxième partie se termine par deux chapitres, l’un sur les « Kid Series », si populaires aux États-Unis (la plus célèbre étant « Our Gang », produite par Hal Roach), l’autre sur les nombreux imitateurs de Chaplin à travers le monde (tel Billy West).
6Pour clore cet ouvrage, nous avons ébauché une petit dictionnaire des acteurs du burlesque : une notice plus ou moins détaillée est consacrée à un certain nombre de comédiens et comédiennes moins célèbres. Plusieurs, comme Johnny Hines, Johnny Arthur, Clem Beauchamp ou Dorothy Devore, furent les vedettes de séries éphémères ou dont le succès fut sans lendemain. D’autres ne connurent jamais le privilège d’être les héros d’une comédie : condamnés, malgré leur talent, aux rôles de second plan, ils ont cependant grandement contribué au triomphe des vedettes, tels le coléreux James Finlayson, l’éternel flic bafoué Edgar Kennedy ou l’ignoble vieillard Jack Duffy.
7Nous avons pris en compte toutes les comédies américaines produites durant une période de vingt années : de 1909 à 1929. En effet, les historiens du cinéma (notamment Seymour Stern) considèrent – sans doute assez arbitrairement – que The Curtain Pole (1909), mis en scène par D.W. Griffith et joué par Mack Sennett et Linda Arvidson (Mme Griffith), est le premier film burlesque du cinéma américain. D’autre part, bien que de nombreuses séries aient continué au début des années trente (en particulier chez Hal Roach-MGM, Educational et Columbia), il est évident que l’arrivée du son et de dialogues envahissants a sonné le glas de la comédie burlesque, qui, par essence, reposait sur des gags visuels. Toutefois, il faut compter avec d’incontestables réussites parmi les courts métrages sonores, comme par exemple la courte série des « Taxi Boys » d’Hal Roach (avec un excellent Billy Gilbert qui avait adopté un terrible accent teuton) ou la saga des « Trois Stooges » (pour la Columbia) qui eut ses inconditionnels, comme par exemple Jean Renoir1 !
8Deux indications précèdent les titres de films : la maison de production et la date de sortie aux États-Unis. Cette dernière est souvent difficile à préciser et varie suivant les sources. Nous avons utilisé généralement les dates données par Karel Caslavsky dans son monumental travail sur le burlesque publié dans Griffithiana2. Les titres précédés d’un point d’interrogation sont incertains. Ils sont suivis du nombre de bobines, indiqué entre parenthèses. Dans la première partie, nous donnons, dans la mesure du possible, un résumé du scénario de chaque film, soit d’après une vision de celui-ci, soit d’après des journaux ou documents – français ou étrangers – de l’époque comme Le Courrier cinématographique, Cinémagazine, Motion Picture World, Motography, Photoplay, New-York Dramatic Mirror3, ou modernes tels que les revues Griffithiana, Positif ou le Mack Sennett de D. Turconi. À l’intention des amateurs, nous signalons les films qui, à notre connaissance, ont été diffusés en format réduit (8, super-8 et 9,5) et nous indiquons la firme distributrice qui, le plus souvent – hélas ! –, a aujourd’hui disparu (ces films peuvent cependant être trouvés sur le marché d’occasion). De la même façon, nous précisons si ces films sont disponibles en vidéo. La liste des principales maisons de production de vidéocassettes plus ou moins spécialisées dans le burlesque est donnée en fin de volume (Annexe I).
Notes de bas de page
1 Celia Bertin, Jean Renoir, Paris, Perrin, 1986, p. 426.
2 Karel Caslavsky, « American Comedy Series 1914-1939 », in Griffithiana, n° 51-52, oct. 1994, pp. 8-169.
3 Le plus souvent nous n’avons pas eu accès directement aux revues américaines référées dans cet ouvrage. Les textes cités de ces revues sont généralement traduits à partir d’ouvrages italiens ou américains.
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