Impact des politiques économiques sur la désertification : le cas des pays du Maghreb
p. 115-132
Texte intégral
1La désertification progresse dans de vastes zones des pays de la rive sud de la Méditerranée. Elle diminue de façon importante et souvent irréversible la capacité de survie des millions de personnes tirant leur subsistance des ressources naturelles végétales et animales des régions qu’elle affecte. Ce phénomène trouve ses causes, lointaines et plus récentes, dans les modalités du commerce mondial, dans les politiques économiques et sociales menées dans les différents pays le subissant et dans les programmes d’ajustement structurel appliqués de façon brutale et axés trop exclusivement sur le remboursement de la dette extérieure.
La progression de la désertification dans les pays du Maghreb
2La désertification se définit comme « une réduction plus ou moins irréversible du couvert végétal aboutissant à l’extension de paysages désertiques nouveaux, caractérisés par des regs, des hamadas et des ensembles dunaires, à des zones qui n’en présentaient pas les caractères » (Le Houérou, 1968)1. On pourrait préciser que la désertification est aussi le processus de disparition du sol cultivable ou colonisable par les racines des plantes, ce processus aboutissant à une réduction continue (parfois irréversible) de la biodiversité et de la productivité (en quantité et en qualité) des ressources naturelles.
3Au Maghreb, les terres les plus soumises au processus de désertification sont particulièrement celles qui se situent entre les isohyètes 100 et 400 millimètres de précipitations. En dessous de 100 mm, c’est par définition le règne du désert. Au delà de 400 mm, les précipitations sont suffisantes pour qu’existent de façon pérenne, en climat méditerranéen, des cultures en sec et une végétation naturelle relativement abondante. Les terres se trouvant entre les isohyètes 100 et 400 mm supportent principalement les parcours servant à l’élevage extensif des petits ruminants (ovins, caprins). Au Maghreb, ces terres sont généralement qualifiées de « steppiques ».
4En Algérie, l’état écologique de la steppe est, depuis déjà de longues années, extrêmement préoccupant. La désertisation s’étend de façon dramatique : déjà en 1985, un expert estimait que le potentiel de production fourragère de la steppe se serait réduit de 75 % entre 1975 et 1985, les zones dégradées, relativement modestes et localisées dans les années cinquante, s’étant étendues et devenues jointives sur de vastes superficies des zones steppiques (Le Houérou, 1985)2. Sur les 20 millions d’hectares que compterait la steppe algérienne, les documents officiels en recensent 5 millions très fortement dégradés.
5En Tunisie, déjà en 1976, des experts évaluaient les zones « très affectées » par la désertification à 11,7 % de la superficie totale du pays (non compris les surfaces désertiques) et les zones « moyennement affectées » à 39,7 %, ces zones se situant essentiellement dans le centre et le sud du pays, autrement dit dans les régions steppiques (Floret et Pontanier, 1982). Selon les hypothèses, les superficies de parcours auraient diminué de 13 à 27 % entre 1971 et 1992 (Sarniguet et al., 1995). On estime par ailleurs que 8 000 ha de terres, par an et en moyenne, sont définitivement perdus à cause de divers processus de désertification observés dans le sud tunisien3.
6Le Maroc a connu le même cycle de sécheresses que l’Algérie et la Tunisie au cours des trente dernières années. Pour les observateurs avertis, les processus de désertification y sont tout à fait identiques : appauvrissement de la végétation allant s’accentuant des franges pré-désertiques de la steppe vers les franges nord de celle-ci, extension des zones dunaires et des zones de hamadas en formation, amenuisement de la faune sauvage. On estime les parcours faiblement dégradés à seulement 6,5 % de l’ensemble des parcours, ceux moyennement dégradés à 81 % et ceux fortement dégradés à 12,5 % (Le Gall, 1995).
Les causes de la désertification
7Les causes de la désertification sont, cela est connu, climatiques et anthropiques. Les sécheresses récurrentes, et plus ou moins longues, depuis le début des années soixante-dix ont eu un effet important et certain sur la reproduction des plantes pérennes. L’alfa et l’armoise, deux des plantes principales des steppes maghrébines, ont été complètement « brûlées » à certains endroits où les capacités de rétention de l’eau par les sols sont faibles. On n’examinera ci-après que les causes anthropiques, directes et indirectes, de la désertification.
8En dernière analyse, la désertification dans les pays du Maghreb résulte de la trop forte pression humaine, d’une trop forte orientation d’un certain type de capitaux vers l’élevage extensif et des trop faibles et peu efficaces investissements des États dans la lutte contre la désertification, ces causes étant amplifiées, sinon créées, par les effets des rapports de force économiques mondiaux défavorables aux pays du Maghreb.
Une pression humaine forte
9Le processus de désertification a pour composante principale la trop forte pression sur les terres d’une population en croissance rapide et fortement touchée par le chômage et le sous-emploi. En effet, la saturation foncière restreint chaque jour davantage les possibilités de maintien du mode de production extensif qui caractérise les systèmes de production pastoraux et agro-pastoraux.
Forte croissance démographique
10La croissance démographique continue d’être très forte dans les pays du Maghreb, malgré une certaine tendance à la baisse, particulièrement en Tunisie (cf. tableau 1).
11Dans les zones steppiques du Maghreb, que nous avons définies comme étant les plus soumises au processus de désertification, la population s’est accrue de façon considérable en l’espace de quelques dizaines d’années. Ainsi, la population des zones steppiques algériennes a plus que doublé en 20 ans, passant de 1 à 2,5 millions d’habitants entre 1966 et 19874. Sa croissance a été beaucoup plus rapide que celle, déjà considérable, de la population totale (cf. tableau 2)5.
Tableau 2 Taux de croissance annuel moyen de la population résidente en Algérie
Périodes | 1966-1987 | 1966-1977 | 1977-1987 |
Population totale | 3,11 | 3,11 | 3,12 |
Population de la steppe | 4,62 | 5,43 | 3,82 |
Source : Calculés d’après l’ONS. Recensements de la population et de l’habitat.
12Cette croissance de la population de la steppe a caractérisé aussi bien la population agglomérée que la population éparse. Cela signifie que l’exode agricole et rural n’a pas suffi à diminuer la pression humaine sur les terres agricoles et de parcours, pression qui a donc continué à croître. Le même phénomène se constate en Tunisie ainsi que le montre le tableau 3.
Tableau 3 Tunisie : Taux de croissance annuel de la population
Périodes | 1966-1975 | 1975-1984 | 1984-1989 |
Population totale | 2,3 | 2,5 | 2,4 |
Population des zones steppiques et désertiques* | 2,03 | 2,86 | 3,37 |
* Six gouvernorats du Sud de la Tunisie. Source : calculé sur données de l’INS.
Chômage et sous-emploi
13Ce rythme de croissance démographique fait que, chaque, année se déverse sur le marché du travail un nombre de demandeurs d’emploi bien supérieur à celui que peuvent créer les économies. Dès lors, le chômage et le sous-emploi touchent des franges importantes de la population de chaque pays et la pauvreté s’accroît, particulièrement en milieu rural.
14En Algérie, le taux de chômage a toujours été élevé, bien qu’il ait eu tendance à décroître au cours de la période 1966-1987 (cf. tableau 4). Durant les années 1987-1993, il a semblé se stabiliser autour de 22 à 23 % du fait de la faiblesse des investissements6. Depuis 1994, le chômage s’est aggravé, dépassant 28 % en 1996.
tableau 4 Evolution du taux de chômage en Algérie Taux annuels moyens de croissance
1966-1977 | 1977-1987 | 1966-1987 | 1996* | |
Population occupée | 2,8 | 5,9 | 4,3 | |
Population active | 1,6 | 5,8 | 3,6 | |
Population au chômage | – 1,5 | 5,4 | 1,7 | |
Taux de chômage | 32,9 | 23,4 | 22,5 | 28,0 |
Source : calculs faits d’après les données de l’ONS citées par Kouaouci, PNUD, 1990. * Estimation.
15Au Maroc, officiellement, le taux de chômage est passé de 15,8 % en 1990 à 17,3 % en 19917. En Tunisie, après avoir connu une diminution entre 1966 et 1980, le taux de chômage est passé de 13,1 % en 1984 à 16 % en 1991 pour atteindre 15,8 % en 1994 et 15,5 % en 1995 (Banque Centrale de Tunisie, 1995).
16Dans chacun des pays du Maghreb, le taux de croissance de la population occupée à un travail dans les zones soumises à la désertification est en général plus faible que le taux de croissance de la population occupée totale. Ainsi en Tunisie, les taux de chômage dans le Sud-Ouest et le Centre-Ouest, deux des principales régions steppiques, sont respectivement en 1989 de 21,8 % et 16,2 %, le taux pour l’ensemble du pays étant de 15,3 %. Le chômage s’accompagne de la pauvreté. Ainsi, pour ces mêmes régions steppiques, la proportion de la population au seuil, ou en-dessous du seuil de la pauvreté en 1990 est supérieure à celle des autres régions de Tunisie (Banque Mondiale, 1995).
Les causes du chômage et du sous-emploi et leurs effets « dé sertifiants »
17Les causes du chômage, et particulièrement du manque d’emploi non agricole (surtout industriel), sont diverses. On admet que, principalement, la création d’emploi se fait par l’investissement et, en particulier, par l’investissement industriel. Ce dernier induit des emplois au fur et à mesure que la richesse produite augmente (services sociaux, développement des consommations collectives, ...).
18Mais pour investir, il faut des entrepreneurs ayant les connaissances techniques et industrielles nécessaires et il faut que ces entrepreneurs disposent de capitaux (d’origine interne et/ou externe, publics ou privés), de force de travail qualifiée, et de marchés capables d’absorber les productions (marchés internes ou extérieurs). Or les ressources en capital sont rares et d’autant plus rares que le système commercial et financier mondial met en position défavorable les pays du Maghreb, comme tous les pays en voie de développement.
19La force de travail qualifiée nécessaire à une économie moderne, et qui se veut compétitive par rapport au reste du monde, fait parfois défaut malgré les progrès considérables faits par les pays du Maghreb dans ce domaine. Or la formation demande aussi des ressources.
20Population en croissance forte, chômage et sous-emploi importants entraînent une forte pression sur les terres, qu’elles soient de culture ou de parcours. Les populations devant produire leur subsistance coûte que coûte ne trouvent guère d’autres possibilités de le faire que par l’élevage sur parcours et la céréaliculture (les seules choses qu’elles savent « faire » et où l’entrée est encore plus ou moins possible à presque tout un chacun).
21Mais cet élevage s’avère trop important8 pour les ressources fourragères naturelles disponibles. L’évolution du cheptel, pour autant qu’on puisse l’estimer, a été positive pour les trois pays au cours des trente dernières années.
22En Algérie, son taux de croissance moyen annuel a été de 3,3 % entre 1963 et 1989 (cf. tableau 5). Quand on examine par période le taux de croissance du cheptel, il apparaît qu’après avoir été très fort entre 1963 et 1972, ce qui peut être normal du fait de la reconstitution du cheptel après la guerre de libération, il a diminué tout en restant relativement élevé durant la période 1973-82 puis est devenu négatif de 1983 à 1989, du fait de la sécheresse qui a sévi au milieu des années quatre-vingt.
23En Tunisie, on constate aussi une forte croissance du cheptel sur la période 1963-1989, cette croissance se ralentissant en fin de période. Mais le cheptel des zones steppiques (Centre et Sud du pays) continue de connaître une forte croissance (2,1 % entre 1981 et 1990).
24Au Maroc, la croissance du cheptel a été plus faible sur la période 1963-1989, mais elle s’est accélérée au cours des années quatre-vingt, malgré l’hécatombe du début de cette même décennie, due à la sécheresse.
Tableau 5 Taux de croissance annuel moyen du cheptel par période(%)
Périodes | 1963-1989 | 1963-1972 | 1973-1982 | 1983-1989 |
Algérie | 3,3 | 5,7 | 4,1 | – 2,1 |
Maroc | 0,8 | 0,5 | – 1,7 | 2,9 |
Tunisie | 2,3 | 6,3 | – 1,2 | 0,8 |
25Ce cheptel en surnombre détruit le couvert végétal protecteur tout en rendant la surface du sol pulvérulente du fait du piétinement des animaux. Par ailleurs, l’obligation de trouver des unités fourragères de complément pour un cheptel pléthorique, au lieu de provoquer une intensification des cultures fourragères9, a entraîné une course effrénée au défrichage des parcours steppiques. Les labours sur des terres fragiles, sableuses, très exposées à l’érosion éolienne et hydrique ou des terres trop en pente, et un système de culture qui exclut de plus en plus la pratique de la jachère par manque de terres cultivables, transforment en l’espace de deux ou trois dizaines années ce qui était des parcours relativement prospères en champs de cailloux et les anciennes prairies ou maquis de montagne (et de piémonts) en vastes glacis où affleure la roche mère.
26La technique de labour généralement mise en œuvre par les agro-pasteurs et les agriculteurs est une technique particulièrement érosive. Elle consiste à recouvrir les semences jetées sur un sol non préparé par le passage d’une déchaumeuse qui pulvérise l’horizon superficiel sans donc faire revenir à la surface la terre davantage structurée (donc plus susceptible de résister à l’érosion éolienne) de l’horizon plus profond. L’utilisation de cette technique se justifie par son coût moins élevé pour des agriculteurs soumis à des aléas climatiques importants et donc obligés de minimiser leurs coûts du fait de la faible probabilité qu’ils ont d’obtenir une récolte correcte. A supposer qu’on ne puisse pas arrêter les labours sur les sols fragiles – ce qui serait le mieux à faire –, si l’État supportait une partie des risques, ces agriculteurs pourraient adopter d’autres techniques plus respectueuses de l’environnement.
Où peuvent s’utiliser les capitaux privés en steppe ?
27Une autre composante relativement déterminante est la forte propension de certains possesseurs de capitaux à développer l’élevage extensif sur les steppes, cette forte propension résultant de plusieurs facteurs dont le plus important réside dans l’existence simultanée :
de taux élevés de profit dégagés par cette activité du fait de la gratuité des unités fourragères naturelles utilisées par le bétail sur ces zones et de la dé-fiscalisation de fait de cette activité et des revenus qu’elle engendre,
de l’absence ou de la faible connaissance des activités industrielles par ces détenteurs de capitaux,
des faibles opportunités d’investissements rentables dans les secteurs autres qu’agricole et agro-pastoral.
28Les faibles opportunités d’investissement dans les secteurs non agricoles (particulièrement l’industrie) résultent elles-mêmes de plusieurs facteurs : manque de ressources en devises pour importer les équipements, matières premières et demi-produits (c’est sans aucun doute le facteur le plus important)10, manque relatif de main-d’œuvre qualifiée, insuffisance qualitative des systèmes administratif et financier, faiblesse des moyens modernes de communication, ...
Faiblesse et faible efficience des ressources de l’État consacrées au développement des zones steppiques et à la lutte contre la désertification
29La faiblesse des ressources consacrées par les États se voit à la part de ces zones dans les investissements publics. Ainsi, la Tunisie ne consacre que 45,1 % des investissements publics aux zones steppiques, lesquelles regroupent pourtant 48,4 % de la population mais couvrent aussi l’essentiel du territoire. Et encore, ces investissements se concentrent-ils probablement pour une bonne part sur les zones côtières, aux dépens des zones intérieures.
30Malgré les quelques colloques et séminaires qui se sont tenus sur les problèmes de désertification dans les trois pays du Maghreb, aucun d’eux n’a entrepris une politique vigoureuse, cohérente et bien réfléchie, pour combattre le phénomène, faute de moyens. L’indice en est, par exemple, la faiblesse des ressources consacrées explicitement à la lutte contre la désertification et à l’amélioration des parcours steppiques. Cette faiblesse ne peut s’expliquer que par la faiblesse générale des ressources des États. Elle ne peut se prouver par des chiffres du fait du caractère diffus des dépenses ayant un effet sur le phénomène et du fait qu’aucun effort de recherche n’a été fait dans ce domaine.
31Quelques indices peuvent cependant être réunis quant aux tentatives des États dans leur lutte contre la désertification.
32Ayant élaboré, avec le concours de la FAO, un plan de lutte contre la désertification (FAO-MARA, 1986), le Maroc n’a consacré durant le plan 1981-1985 qu’à peine 1 % du budget du ministère de l’Agriculture à l’amélioration des parcours. Par ailleurs, le plan élaboré ne comporte aucun élément chiffré quant à l’effort financier à consentir ni aucun calendrier de réalisation. Enfin, ce plan limite les actions à entreprendre aux seuls aspects agricoles, forestiers et pastoraux, oubliant que le développement des activités non agricoles (particulièrement industrielles et artisanales) est une composante essentielle de la lutte contre la désertification.
33L’Algérie a tenté, quant à elle, une politique relativement ambitieuse de lutte contre la désertification. Sa tentative la plus spectaculaire a été la réalisation du « barrage vert ». Sa deuxième action a été la création du Haut Commissariat au Développement de la Steppe (HCDS). Sa troisième tentative a été l’élaboration et le début de réalisation d’un plan de développement des Hauts Plateaux (dit « option Hauts Plateaux »).
34Le « barrage vert » a consisté, depuis le début des années soixante-dix et en utilisant la force de travail des jeunes appelés du service national, à planter sur une profondeur de 10 à 15 km une bande d’arbres (principalement du pin d’Alep) qui devait joindre les frontières marocaines et tunisiennes en suivant la frange sud des hauts plateaux. Les réalisations du projet « barrage vert » ont coûté beaucoup d’argent (relativement aux ressources budgétaires) et n’ont donné que peu de résultats, principalement du fait que les populations sur les territoires desquels passe le barrage n’ont pas été associées à sa pérennisation (Bédrani, 1992).
35Le Haut Commissariat au Développement de la Steppe est une tentative, originale dans les pays du Maghreb, de confier à un seul organisme la haute main sur le développement d’ensemble (tous secteurs économiques confondus) des régions steppiques dans le but de lutter de façon intégrée contre la désertification. Malheureusement, ayant été mise sous la seule tutelle du ministère de l’Agriculture, cette administration coûteuse ne fait que doubler les administrations régionales agricoles sans apporter un avantage décisif dans la résolution des problèmes des régions concernées.
36Le plan de développement dit « option Hauts Plateaux » voulait créer une ceinture d’industries longeant le nord de l’Atlas Saharien et qui aurait été parallèle aux industries créées sur la côte méditerranéenne. Etabli alors que l’Algérie se trouvait encore dans l’abondance pétrolière, ce plan a été remis en cause par la crise pétrolière de 1986. Pourtant ce plan semblait bien être la seule réelle solution d’avenir pour les zones steppiques.
37La Tunisie aurait aménagé en travaux de conservation des sols environ 1,5 millions d’ha, reboisé 260 000 ha, aménagé 320 000 ha de forêts et 433 000 ha de nappes alfatières. Mais toutes ces réalisations ont été de peu d’effet, ainsi que le souligne le ministère de l’Environnement et de l’Aménagement du Territoire (1993).
38La faible efficience des ressources des États consacrées à la lutte contre la désertification se lit aisément dans les échecs multipliés de la plupart des projets en ce domaine. Elle s’explique par la non-participation des populations à leur conception et à leur réalisation et, corrélativement, par le poids trop important des seuls fonctionnaires dans les prises de décision en ces domaines.
39Ainsi, les politiques de lutte contre la désertification devraient viser :
une diminution de la population tirant sa subsistance de l’exploitation extensive (agricole, agro-pastorale et pastorale) des zones en voie de désertification, ou menacées à plus ou moins long terme par ce phénomène, cette diminution se réalisant par une politique, aussi vigoureuse que possible, d’investissement,
la création d’opportunités d’investissement « non désertifiant » pour les capitaux actuellement utilisés dans l’élevage steppique extensif,
une recherche scientifique et technique trouvant et proposant des techniques agricoles et pastorales à effets désertifiants faibles (ou nuls, si cela est possible) dans les zones menacées, ces techniques devant être peu coûteuses pour la collectivité (en termes de balance devises) et les exploitants (en termes financiers),
une incitation efficace des exploitants et/ou des collectivités locales à utiliser, ou faire utiliser, lesdites techniques.
40Mais par ailleurs, les politiques de lutte contre la désertification se heurtent dans leur réalisation à deux obstacles qui renforcent les causes de la désertification. L’un se trouve dans les mécanismes généraux du commerce mondial et dans l’endettement dont le remboursement justifie les programmes d’ajustement structurel. Il fait l’objet d’autres contributions dans cette étude. Nous n’y reviendrons pas. L’autre obstacle est représenté par l’incohérence, par rapport au problème de la désertification, des politiques économiques et sociales nationales.
Les politiques gouvernementales, source de dégâts écologiques
41Si les rapports de forces mondiaux, que ce soit dans le domaine du commerce ou celui des finances, contribuent à freiner l’accroissement des ressources à la disposition des pays du Maghreb (ou à les diminuer), et donc des ressources que ces pays peuvent affecter à la lutte contre la désertification, il importe de souligner, en outre, que ces pays ont des politiques, en matière de gestion interne, sur un certain nombre de plans, qui ne vont ni dans le sens d’une économie des ressources rares, ni dans le sens de l’utilisation optimale, du point de vue du développement, de ces ressources.
Les politiques de prix et de subvention
42Les pays maghrébins, à des degrés divers, ont réglementé ou subventionné certains prix et, par ce fait, ont causé des dommages à l’environnement en accentuant les phénomènes de désertification. Le schéma ci-dessous (Pearce, 1991) aide à comprendre comment les subventions permettent cela. Il montre le bénéfice net (BNM) retiré de l’activité économique et le coût de cette activité pour l’environnement. Ce dernier (DM) augmente avec l’accroissement de l’activité économique. Le bénéfice net le plus important possible est atteint en A*, point où tout bénéfice supplémentaire dégagé est égal au dommage supplémentaire alors créé, l’objectif étant que la partie hachurée soit la plus grande possible. Mais du fait que les décideurs ne tiennent pas compte des dommages causés à l’environnement, le marché va fixer le niveau de l’activité économique en Afm. « La distance A*-Afm mesure l’échec du fonctionnement du marché » (échec du point de vue de l’environnement) dit Pearce. Les politiques de subvention, en permettant d’augmenter les productions à des niveaux (A+) qui ne sont pas rentables sans subvention, sont encore plus négatives pour l’environnement.
43Source : Pearce (1991).
44En Algérie, les subventions aux machines agricoles, qui ont été relativement fortes de 1973 à 1986, ont permis aux agriculteurs d’accroître leur équipement en tracteurs. Cela a été un facteur décisif d’augmentation des superficies défrichées dans les zones steppiques. La suppression des subventions à la fin des années quatre-vingt a entraîné une diminution de la vente des tracteurs mais cela n’empêche pas les terres déjà défrichées de continuer à être cultivées (donc d’être soumises à la désertification) ni les possesseurs de tracteurs de continuer à défricher là où ils le peuvent.
45La suppression, de façon indistincte, des subventions aux machines pénalise les tentatives de lutte contre la désertification utilisant du matériel pour les aménagements anti-érosifs (construction de digues, réalisation de djessours, aménagement de zones d’épandage de crues, ...). Toujours en Algérie, les subventions données pour les aliments du bétail après la grande sécheresse du début des années soixante-dix – mesure destinée à sauvegarder le cheptel –, et la politique d’importation massive d’orge vendue à bas prix du fait d’une monnaie nationale surévaluée, ont eu un effet pervers certain : elles ont autorisé l’accroissement disproportionné du cheptel dont on a parlé ci-dessus.
46Peut-être dans une moindre proportion, le Maroc et la Tunisie ont eu la même politique de soutien des prix des aliments du bétail pour combattre les effets sur les éleveurs des sécheresses récurrentes et les deux pays ont connu les mêmes effets pervers : le cheptel n’a pas seulement été sauvegardé, il a augmenté, renforçant le déséquilibre entre les ressources fourragères naturelles et le cheptel.
Une fiscalité faible et très inégale, aggravée par la corruption
47Dans les trois pays du Maghreb, les ressources que peut affecter l’État aux dépenses publiques – et donc, parmi ces dépenses, à la lutte contre la désertification – sont relativement faibles par rapport aux ressources qui pourraient être légitimement collectées si ceux qui détiennent le pouvoir d’État en avaient la volonté et le souci.
48Dans un livre bien documenté, Najib Akesbi (1995) traite, entre autres, à propos du Maroc des activités qui échappent à l’impôt soit par une politique délibérée de l’État, soit par incapacité de celui-ci à exploiter tous les gisements fiscaux. Avec sans doute quelques particularités locales, on peut étendre ce qu’analyse Akesbi à propos du Maroc aux deux autres pays voisins.
49Dans un pays où la corruption est généralisée à l’ensemble du corps social, à un point tel qu’elle devient banale11, voire institutionnelle, la fraude, l’évasion fiscales et la contrebande font perdre au Trésor Public des sommes très probablement considérables mais que personne n’a pu chiffrer12. Ces sommes sont en partie détournées par les « prélèvements informels », qu’ils soient ceux d’une « corruption de survie » (Akesbi, 1995, p. 125) pratiquée par de petits fonctionnaires mal payés13 ou ceux, sans doute plus importants, effectués par des fonctionnaires plus puissants.
50Étant donné que la « puissance corruptive » est proportionnelle à la puissance économique et politique, on comprend que « les revenus élevés échappent presque totalement à l’impôt » (Brachet, 1992, p. 86) et que « la fiscalité directe, en 1980, ne pèse pas plus (moins de 20 %) que les impôts indirects » (Brachet, 1992, p. 87). Le résultat en étant que la charge fiscale n’est que d’environ 22 % du revenu national au Maroc, contre 44 % en France et 50 % en Suède (Brachet, 1992, p. 88). Comme le note Corm (1994) à propos des pays arabes, « la nouvelle couche d’entrepreneurs influents du secteur privé pratique une évasion fiscale massive, en dépit de son extrême richesse et de ses capacités financières devenues disproportionnés par rapport aux ressources budgétaires des États et, parfois même, par rapport au produit intérieur brut... ».
51Par ailleurs, la non-imposition d’un secteur informel14 qui a toujours été extrêmement important15 détourne du Trésor des sommes encore plus considérables.
52Enfin, l’État mène explicitement des politiques généreuses vis-à-vis de certains contribuables potentiels ou réels, générosité plutôt malvenue étant donnée la situation généralement peu brillante des finances publiques. Ce sont les politiques envers le secteur agricole et envers les sociétés soumises à l’impôt.
53Les « privilèges du secteur agricole », surtout sur le plan de la fiscalité directe16, mais aussi indirecte, s’ils peuvent se justifier pour les très nombreux agriculteurs vivant en-dessous du seuil de la pauvreté, s’avèrent très dommageables du point de vue des intérêts du Trésor dès lors qu’il s’agit des moyens et gros agriculteurs et éleveurs17.
54En ce qui concerne les sociétés soumises à l’impôt, elles ont non seulement bénéficié d’une baisse des taux mais encore les textes fiscaux leur ouvrent de larges possibilités de fraude et d’évasion du fait de leur imprécision18.
Le poids exagéré de la fonction publique et la faible efficacité des administrations publiques
55Bien des études montrent que, face à une population active en croissance rapide, il est crucial de promouvoir le plus possible les emplois productifs (Tumham, 1993). Or, les pays maghrébins, comme beaucoup de pays en voie de développement, particulièrement les pays africains, ont développé de façon exagérée les emplois dans les administrations et les secteurs para-administratifs aux dépens de la création d’emplois dans les secteurs productifs.
56Les pays maghrébins ont hérités de tous les défauts de l’administration publique française de la première moitié du XXe siècle dans ses aspects courtelinesques. La création d’un poste dans l’administration ne relève dans aucun pays d’une étude sérieuse justifiant sa nécessité. Elle relève essentiellement du rapport de forces existant entre les responsables de la fonction publique et les responsables des différents ministères demandeurs. Si les premiers sont peu motivés (ce qui est généralement le cas) pour une gestion rigoureuse des deniers de l’État, les seconds sont fortement motivés pour augmenter leur prestige et leur clientèle.
57Au Maroc, le nombre de fonctionnaires a été multiplié par 20 entre 1960 et 1988, passant de 31 329 à 624 357 agents (Akesbi, 1995). En Algérie, le nombre de fonctionnaires a été multiplié par plus de 13 entre 1957 et 1989 et par 6,6 entre 1969 et 198919. Dans ce pays, les salaires versés par l’administration représentent, en 1989, 37,5 % de la masse salariale totale du pays.
L’absence d’une politique vigoureuse de régulation des naissances
58Presque tout le monde s’accorde à dire que la dégradation de l’environnement résulte, toutes choses égales par ailleurs, de la pression démographique conjuguée à la recherche de la croissance économique (Pearce, 1991 ; Tabutin et Thilgès, 1992). Pour les pays méditerranéens, Le Houérou (1993) affirme que « l’impact de l’explosion démographique sur les écosystèmes naturels croît..., comme la population, de façon exponentielle » et prévoit une situation catastrophique sur le plan de la désertisation dans les pays de la rive sud de la Méditerranée si la croissance démographique reste ce qu’elle est dans ces pays.
59De ce point de vue, les pays du Maghreb, mise à part la Tunisie de Bourguiba, ne semblent pas avoir de politiques résolues et conséquentes en matière de régulation des naissances. Ainsi qu’il a été vu ci-dessus, les taux de croissance démographique continuent d’être extrêmement élevés y compris en Tunisie. Dans ces conditions, il est difficile de mener des politiques de croissance des niveaux de vie, particulièrement pour les couches défavorisées de la population.
60Outre les contraintes sociologiques20 qui s’opposent à une politique vigoureuse de régulation des naissances (aboutissant à une réduction significative du taux de croissance démographique), il est à noter que celle-ci coûte cher, et d’autant plus cher que les contraintes précédentes sont fortes. L’aide internationale est, ici aussi, indispensable pour suppléer à la faiblesse des ressources des États consacrées à la régulation des naissances et à la planification familiale. Mais assurer un revenu normal au plus grand nombre, c’est-à-dire lutter contre la pauvreté, est encore le meilleur moyen d’agir à long terme sur le niveau de croissance démographique et donc sur les processus de désertification. Et, pour cela, il faut investir davantage tout en gérant bien les investissements.
La corruption et la fuite des capitaux
61La corruption est l’un des principaux fléaux empêchant le développement de beaucoup des pays du Tiers Monde. Elle tend à décourager le travail et l’investissement productifs du fait qu’elle permet à des individus de se procurer des ressources sans travailler et/ou sans investir. Par ailleurs, l’argent de la corruption n’a pas tendance à rester dans le pays mais plutôt à s’en échapper pour se mettre à l’abri des contrôles éventuels. Enfin, la corruption mine la crédibilité internationale des pays. De ce fait, elle les empêche d’obtenir toute l’aide étrangère (que ce soit sous forme de dons ou de prêts) qu’ils pourraient espérer et d’attirer tous les capitaux étrangers qui auraient pu s’investir.
62Outre ses effets sur le niveau des ressources fiscales de l’État et sur celui des revenus dégagés par les entreprises publiques, la corruption diminue les ressources des États par les prélèvements qu’elle occasionne sur ces dernières à l’occasion des marchés publics. Ces prélèvements peuvent être considérables du fait de l’importance du rôle de l’État à la fois sur les plans économiques et sociaux. En effet, les États gèrent généralement une grande partie des richesses annuellement créées dans les pays.
63Brachet (1992) étudie ce problème à propos du Maroc et, ici aussi, à quelques particularités près, on peut étendre l’analyse de cet auteur à l’Algérie et à la Tunisie21.
64Cet auteur démonte les mécanismes de la corruption en indiquant que celle-ci n’a que peu à voir avec la coutume traditionnelle du « bakchich » (celui-ci est payé après la prestation, alors que la somme que paie le corrupteur au corrompu est payée avant) qu’elle a remplacé. Cependant la corruption, qui continue d’être désignée sous le terme de « bakchich », s’appuie, pour une large part, sur les rapports claniques et tribaux qui obligent à la soumission, à l’allégeance, aux notables de différents niveaux.
65Pour l’ensemble du Maghreb, les rapports claniques et tribaux se complètent par les « solidarités » tissées au niveau des régions, le « régionalisme » affaiblissant la constitution de la nation de type moderne nécessaire à l’accumulation du capital.
66On peut souligner que la corruption est d’autant plus répandue que les régimes politiques ne sont pas démocratiques. L’absence d’un multipartisme réel empêche le contrôle des citoyens et autorise toutes les malversations.
67Que représente la corruption comme perte multiforme de ressources pour les collectivités nationales de chaque pays ? Bien sûr, il est impossible de répondre à cette question. Pour l’Algérie, le chiffre de 26 milliards de dollars US, avancé par un ancien premier ministre, ne représenterait que les commissions versées sur les achats à l’étranger durant la période 1967-1987. Or cette somme constitue approximativement la dette algérienne à la fin des années quatre-vingt. Mais les pertes de l’État, ce sont aussi les usines édifiées aux mauvais endroits (parce que tel ministre est de la région), les équipements achetés sans pièces de rechange et sans avoir préparé la main-d’œuvre nécessaire, les infrastructures bâclées réalisées par des entrepreneurs véreux, ...
68En conclusion, les « responsabilités » en matière de désertification sont partagées entre les États concernés et les États dominant l’économie mondiale. Si les premiers doivent mieux se gérer pour utiliser au mieux pour leur développement les ressources rares, les seconds doivent se montrer moins gourmands, ne pas abuser de leur position dominante pour accaparer l’essentiel des richesses produites à travers le monde et, ce faisant, enlever l’opportunité aux pays en développement de promouvoir l’accumulation nécessaire à leur développement et à la lutte contre la désertification.
69Une lutte conséquente contre la désertification ne peut consister seulement en quelques actions techniques éparses de protection et de gestion des parcours, ni même dans un programme de développement seulement agro-pastoral ou sylvo-pastoral. Elle implique le développement intégré de l’ensemble des économies des pays concernés, donc la lutte contre la pauvreté, donc la résorption massive du chômage et du sous-emploi, causes premières des processus de désertification. Les pays à économie forte doivent nécessairement contribuer à la mobilisation des ressources requises par ce type de développement. Le monde ne peut réellement se développer et, surtout, avoir la paix, qu’en étant franchement solidaire. Ce qui n’exclut pas que toutes les nations soient raisonnablement mises devant leurs responsabilités objectives.
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Notes de bas de page
1 Cet auteur nomme ce processus par le terme de « désertisation ».
2 Une étude plus récente (Melzi, 1993) montre que la phytomasse d’un site à alfa est passée de 6 500 à 500 et 1 000 kg de matière sèche à l’hectare respectivement en 1968, 1990 et 1992.
3 Pour d’autres estimations, cf. Tunisie, ministère de l’Environnement et de l’Aménagement du Territoire (1993).
4 Les recensements généraux de la population donnent les chiffres suivants : 1966 : 1 035 596 habitants ; 1977 : 1 756 789 habitants ; 1987 : 2 554 878 habitants.
5 Ces dernières années le taux d’accroissement naturel de la population totale a fortement baissé, passant de 3,1 % en 1985 à 2,5 % en 1990 et 2,17 % en 1994 (Source : ONS. Données statistiques, n° 188, 1993 et L’Algérie en quelques chiffres, n° 26, 1995).
6 Certaines sources l’évaluaient à 19 % alors que d’autres l’estimaient à 24 % (Remouche, 1994). L’Office National des Statistiques (ONS) l’évaluait, sur la base de l’enquête « Main-d’œuvre » 1992, à 23,79 %. Il est fort probable que ce taux soit surévalué du fait de l’emploi informel qui semble être très important. Il faut noter, par ailleurs, que l’Algérie a un faible taux d’activité, dû au faible taux d’activité de la population féminine (4,7 %, soit le taux le plus faible dans les pays arabes). Cependant, il faut remarquer que l’administration et les entreprises publiques continuent de supporter de lourds sureffectifs qui gonflent artificiellement le taux d’emploi.
7 Source : Annuaire statistique du Maroc 1992.
8 L’accroissement du cheptel n’est pas que le résultat du manque d’emploi ; il résulte de ce que les possesseurs de capitaux ne trouvent pas d’autres opportunités d’investir que dans l’élevage ovin, comme on le verra ci-dessous.
9 Soit par l’introduction d’une sole fourragère en remplacement de la jachère, soit par la multiplication des superficies fourragères irriguées.
10 Il ne suffit pas de posséder de la monnaie locale pour pouvoir investir, presque tout investissement demandant des machines et/ou des produits provenant de l’étranger.
11 Akesbi (p. 119-127) parle de prélèvements informels opérés sur les citoyens par le moindre détenteur de la moindre parcelle de puissance publique (« préposé du bureau d’arrondissement, policier, infirmière de la santé publique, agent percepteur, ...). Sur la corruption au Maroc, voir également Brachet, 1992.
12 Au Maroc, la contrebande représenterait 20 % des importations officielles (F. Zaim, entretien, La Vie Economique, hebdomadaire, 26/10/90, cité par Akesbi, 1995, 130). En Algérie, la fraude et l’évasion fiscales feraient perdre à l’État 22 milliards de dinars (Goumiri, 1994) soit 15,3 % des recettes fiscales pour l’année 1994.
13 Au Maroc, rapporte Akesbi (1995, 125), les trois-quarts des fonctionnaires, en 1988, avaient un salaire inférieur de 60 % au revenu du ménage moyen.
14 Au Maghreb, le secteur informel n’est pas seulement « un secteur de survie », ainsi que le qualifie Akesbi, composé de petites gens acculées par le chômage à se trouver des activités pour se procurer un revenu leur assurant le minimum vital. Il est aussi composé d’une multitude d’entrepreneurs (de tailles diverses, certains employant un nombre important de salariés) échappant aux statistiques et au fisc par divers moyens.
15 Au Maroc, La Vie Economique (3/8/90) estime le secteur informel comme représentant entre le tiers et les deux cinquièmes de l’activité économique (cité par Akesbi, 1995, 129). En Algérie, un auteur estimait le revenu parallèle à 116,6 milliards de dinars en 1988, soit 32 % du revenu monétaire national disponible de la même année (Henni, 1991). Un autre auteur cite le résultat d’enquêtes qui dénombreraient plus de 100 000 activités économiques et commerciales non déclarées (Goumiri, 1994).
16 Au Maroc, les revenus agricoles sont exonérés de tout impôt depuis 1984 jusqu’à l’an 2000 (Akesbi, 1995, 345).
17 D’autant plus que ce sont ces éleveurs qui sont en partie responsables de la désertification par l’accroissement de leur bétail sur les zones steppiques. Brachet (1992) note par ailleurs que « les plus grandes fortunes sont celles des grands propriétaires fonciers (à commencer par la famille royale) et ils ne paient pas d’impót ! ». Brachet (p. 87) indique qu’un ministre des Finances reconnaissait lui-même : « Jusqu’à présent, tous les projets de réforme de la fiscalité agricole présentés devant le Parlement ont été soit rejetés, soit vidés de leur substance (...) Peut-être faudrait-il que les gros agriculteurs ne bénéficient pas comme les petits des avantages fiscaux que l’État accorde au secteur agricole. Une certaine équité, une certaine éthique est à mettre en œuvre ». Interview de M.A. Jouahri in Le Matin du Sahara du 23/2/82.
18 Ce qui fait dire à Akesbi (p. 348) : « Aux États Unis, on abaisse les taux d’imposition mais dans le même temps on élargit l’assiette fiscale, notamment par une stricte limitation des charges déductibles et, au-delà, une lutte efficace contre l’évasion et la fraude fiscale ; au Maroc, on abaisse les taux mais de surcroît on maintient et même on amplifie les mécanismes corrosifs de l’assiette fiscale ».
19 En Algérie, l’administration emploie en 1989 1 309 000 personnes soit 29,5 % de la population occupée totale (y compris agriculture) (ONS, Annuaire statistique 1991, p. 53).
20 Le facteur religieux n’est peut-être pas le plus important. Celui de la sécurité matérielle procurée aux parents par une famille nombreuse (en particulier en milieu rural) est sans doute déterminant : le risque de ne pas trouver du travail est réparti sur le nombre de fils !
21 Les sources étant inexistantes sur ce problème en Tunisie, il n’est pas possible de se prononcer pour ce pays. L’histoire, la culture et les structures sociales anciennes étant à peu près les mêmes dans les trois pays du Maghreb, on peut cependant faire l’hypothèse que la Tunisie n’échappe pas complètement au phénomène de la corruption.
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2000