Introduction
p. 5-27
Texte intégral
Jean-Marie Delmaire (1943-1997)
in memoriam
1Pour des raisons d’actualité, mais avant tout du fait d’un intérêt historique de plus en plus évident, la corrélation regroupant « La France, l’Europe occidentale et la Palestine » présente nombre d’aspects porteurs pour une étude approfondie. Dans cet ensemble, la périodisation 1799-1948 est logiquement déterminée : c’est d’une part l’incursion de Bonaparte en Orient, et d’autre part la création de l’État d’Israël. Dans ces circonstances, le Centre de recherche français de Jérusalem a jugé intéressant de regrouper un certain nombre d’articles relatifs à la période en question, en optant pour la diversité. Un tel recueil est en effet la possibilité de faire se rencontrer, en un volume, des auteurs de différentes origines, traitant d’une même région en une même époque, mais à partir de points de vue différents. Pour ce faire, nous avons choisi d’aborder dans un premier temps une période en apparence largement balisée, 1799-1917, sujet de nombreuses études auxquelles viennent s’en ajouter régulièrement d’autres, dans les langues les plus diverses1.
2Cet espace de temps, dernier siècle de la domination ottomane sur le Moyen-Orient, est peut-être aussi le plus riche du point de vue historique, en particulier dans le domaine des relations internationales. Après l’entrée en fanfare de Bonaparte en Égypte et sa brève incursion en Terre sainte, la Palestine sort de sa léthargie de province reculée d’un très vaste Empire. Politiquement, administrativement et commercialement, elle n’est en effet alors qu’un point de passage, une région dépendante de provinces bien plus actives ; de plus, elle n’est pas une entité précise du point de vue administratif et ressortit plutôt du domaine des idées2. Dans cette logique, Bonaparte ne juge pas Jérusalem digne d’être visitée, et la Palestine en général semble ne mériter que la représentation figée, même si très belle, qu’en offre l’aquarelliste David Roberts.
3Mais il semble que la Palestine n’attende qu’un signe pour retrouver sa splendeur et son souffle passés. Les événements du tournant du xixe siècle suscitent pour un temps l’intérêt des nations européennes. Celui-ci se confirme lors de l’aventure égyptienne qui parcourt la région jusqu’à l’Anatolie, dans les années 1830. On assiste alors à ce que le géographe historique israélien Yeoshuah Ben Arieh a appelé, dans un ouvrage pionnier, la « redécouverte de la Terre sainte3 ».
4En ce xixe siècle, il ne pouvait s’agir seulement d’un réveil. Au moment où les nations européennes regardent par-delà leurs frontières, dans les prémisses de leurs aventures coloniales respectives ; où elles s’observent mutuellement dans leur course à la domination de vastes sphères d’influence, au risque d’ailleurs de mettre en péril le concert européen de Metternich ; au moment où le progrès technique, des transports notamment, fait du bassin méditerranéen une proche banlieue de l’Europe et s’accompagne d’un fort développement du commerce et d’une envolée culturelle fondée sur la notion alors nouvelle d’orientalisme ; au moment enfin où se développe et se relance une double mission, civilisatrice et religieuse, la Palestine semble focaliser les intérêts de toutes sortes et se donne progressivement une véritable importance géostratégique. Comme l’écrit de manière synthétique l’historien français Henry Laurens : « La Palestine est le lieu où se rencontrent tous ces produits de la modernité et de la quête des origines. » Plus d’une redécouverte donc, en un siècle où l’histoire s’accélère, il s’agit ni plus ni moins, comme il le dit encore, d’une « invention de la Terre sainte4 ».
Les relations Europe occidentale/Palestine dans l’historiographie contemporaine
5On l’a dit, l’historiographie a largement balayé l’histoire des relations entre l’Europe occidentale et la Palestine. Tout en concevant qu’un tel inventaire ne puisse être qu’incomplet, il est intéressant de rappeler les œuvres les plus notables qui ont marqué les vingt-cinq dernières années. En se limitant aux ouvrages parus dans les langues européennes les plus connues (anglais, français, allemand), en en abordant d’autres moins habituelles (italien, espagnol), et en mentionnant celles des populations qui habitent aujourd’hui le territoire spécifique concerné par le présent volume (hébreu et arabe), on peut constater quelques tendances, sélectionnées suivant notre point de vue.
6Lorsque l’on se penche sur l’historiographie disponible en anglais, il est intéressant de remarquer que cette production émane en grande partie d’auteurs israéliens. C’est ainsi que les trois ouvrages les plus importants concernant la Palestine au xixe siècle, des recueils d’articles, sont de la plume d’Israéliens : qu’il s’agisse des responsables de ces publications ou des différents auteurs. Le premier est un recueil désormais classique publié en 19755, dont deux parties concernent les « activités étrangères » et l’« impact de la culture et de la technologie occidentales ». Dans les années 1980 et au début de la décennie suivante, lui succèdent – en le révisant et le complétant – trois volumes plus spécifiques qui permettent de mettre en avant les relations entre l’Europe occidentale et la Palestine6. C’est aussi là que l’on trouve une série de colloques éditée par Moshe Davis et Yeoshuah Ben Arieh, intitulée fort justement « Les yeux tournés vers Sion », dont trois volumes (sur cinq) concernent notre sujet7.
7On peut remarquer également une tendance nouvelle : un intérêt très fort pour la photographie de la Palestine, avec emphase sur l’apport européen à ce domaine8. Tandis que sont désormais disponibles en anglais, publiés par des universitaires israéliens, les documents diplomatiques de quelques consulats européens9.
8Intéressés par l’histoire sociale10, certains auteurs anglophones ont évidemment travaillé sur le sionisme11 ou sur les mouvements religieux, notamment protestants, attirés par la Terre sainte12. Si l’intérêt de ces personnes porte surtout sur la période mandataire, celle où la Grande-Bretagne est « aux affaires » en Palestine, ces auteurs se sont également penchés sur le xixe siècle. C’est une histoire de rivalités13, au cours de laquelle les puissances instrumentalisent notamment l’exploration scientifique, en particulier l’archéologie14. Tandis que le Swedish Christian Studies Centre de Jérusalem met en avant l’« héritage chrétien en Terre sainte », relevant par là la contribution des puissances européennes15.
9En français, les parutions des vingt-cinq dernières années ont permis de combler certaines lacunes. Ce sont d’abord des ouvrages généraux consacrés à l’histoire de la région. Un temps délaissé de l’historiographie française, la Palestine et les contributions européennes à son histoire ont bénéficié d’un apport de connaissances effectué par certains historiens. Outre une brève présentation de Jérusalem16, le lecteur francophone bénéficie à présent d’outils conséquents, en particulier grâce au travail de Henry Laurens17.
10C’est ensuite le domaine des relations entre la France, les Juifs et le sionisme. Longtemps ignorée, ou passant dans l’ombre des relations intenses et difficiles entre la Grande-Bretagne et le mouvement fondé par Herzl, cette relation mérite plus d’attention. Fait ainsi date l’étude de Catherine Nicault sur La France et le sionisme, rencontre qualifiée à juste titre de « manquée18 ». Tandis qu’ont été peu à peu redécouverts et réhabilités les Juifs francophones agissant en Palestine, ignorés, voire méprisés parce que ne favorisant pas l’établissement d’un foyer national juif en Palestine19.
11Pour sa part, l’histoire de la présence religieuse catholique et française, jusqu’en 1914, et au-delà, illustration essentielle de la politique de Paris, reste à écrire. Si l’on peut déjà repérer certains ouvrages, ceux-ci relèvent principalement de la description hagiographique20, et n’ont pas forcément une portée scientifique, ou restent confinés à des cercles très étroits. Certaines études disponibles n’abordent que brièvement la Palestine, à l’instar des rares pages de François Delpech21. Par ailleurs, l’un des points d’orgue de l’historiographie relative à la contribution française à la vie de la Palestine au xixe siècle a été le centenaire d’une institution qui a su s’affirmer, l’École biblique et archéologique française22.
12De prime abord, on peut s’interroger sur l’existence d’une historiographie germanophone relative à la région : l’Allemagne ou l’Autriche n’apparaissent en effet que peu dans les ouvrages généralistes. Or les quelques souvenirs de la présence germanique au Moyen-Orient ne doivent pas faire oublier son dynamisme passé. En premier lieu, l’historiographie allemande apporte sa contribution à la connaissance globale de la Palestine23. Existent aussi quelques monographies d’ordre général concernant les divers intérêts allemands en Syrie et Palestine24. On dispose même d’études concernant l’attitude de certains partis politiques allemands à l’égard du problème, sur une période longue25.
13L’ambiance de la Palestine au xixe siècle apparaît dans la publication de fac-similés de récits de pèlerinages26 ou de voyages27. Tandis que le sionisme, théorisé dans l’espace germanique, apparaît également : c’est par exemple la reproduction de témoignages d’époque28 ou d’études autour de la visite de l’empereur Guillaume II29.
14Outre ces publications, deux points forts marquent l’historiographie allemande des vingt-cinq dernières années.
15C’est d’abord la mise en avant d’un événement qui fait date et ne cesse d’être à la base d’une littérature abondante : le passage en Terre sainte de l’empereur Guillaume II, en 1898. Traité en lui-même, il est aussi significatif pour tous ses à-côtés. Car, à la différence de la France, dépourvue d’un tel symbole, l’Allemagne dispose là d’un événement fondateur : le passage du Kaiser marque une entrée, tardive certes, mais tonitruante de l’Empire dans les affaires palestiniennes. Au cours des dernières années, les publications à ce propos se sont multipliées ; les unes à caractère scientifique30, les autres destinées à un plus large public, profitant de l’abondance iconographique qui a accompagné ce voyage31. Toutes les institutions qui ont été fondées à cette occasion et qui marquent encore le paysage de Jérusalem célèbrent successivement l’anniversaire de leur création : cela permet de retracer l’histoire du missionarisme protestant allemand32 et de se pencher sur les institutions religieuses et scientifiques elles-mêmes, qu’elles soient protestantes33 ou catholiques34.
16Par ailleurs, l’histoire de l’implication allemande en Terre sainte bénéficie également d’un objet d’étude original et spécifique : la colonisation opérée par les Templer, une secte protestante du sud-ouest de l’Allemagne, établie en Palestine à partir de la seconde moitié du xixe siècle. Étudiée en Allemagne35, s’insérant dans le cadre de la « contribution chrétienne à la reconstruction de la Palestine », cette colonisation a fait l’objet d’un intérêt renouvelé de la part d’Alex Carmel, qui a d’ailleurs choisi cette expression de « reconstruction » comme sous-titre du centre de recherche qu’il a mis en place à Haïfa36.
17Enfin, lorsque l’on parle de l’espace germanique, on n’en saurait négliger l’aspect autrichien. Très réduite aujourd’hui, la participation de l’Autriche, dans sa version impériale, à l’« invention de la Terre sainte » a connu son heure de gloire. Certaines publications le rappellent : à travers la réédition de récits, de pèlerinages notamment37, la description des intérêts austro-hongrois en général38 ou l’histoire de la représentation consulaire des Habsbourg en Palestine39 ; tandis que la personnalité de l’orientaliste et espion tchèque, au service de la Double monarchie, Aloïs Musil a suscité des études plus40 ou moins scientifiques41.
18Certains pays considérés a priori comme annexes, sont néanmoins assez actifs au xixe siècle : de manière symbolique, de par leur emprise morale, ou velléitaire, de par l’activisme de leurs dirigeants, c’est le cas de l’Italie et de l’Espagne. La participation de la partie méridionale de l’Europe semble surtout avoir été retenue pour ce qui concerne la période postérieure à notre étude42. Mais la participation italienne est bien réelle dans la période considérée. La bibliographie disponible l’aborde de façon récente pour l’aspect politique. Après l’ouvrage pionnier de Sergio Minerbi43, plusieurs auteurs se sont penchés sur l’action italienne : ont été ainsi abordées l’opinion gouvernementale relative au nationalisme palestinien44, ou, de manière intéressante comme dans le cas allemand, celle des socialistes du pays45 ; l’intérêt a également, et naturellement, porté sur la montée d’une revendication politique en parallèle aux opérations militaires46. Peut-être plus que dans le cas de la France, le regard de l’historiographie italienne passe par le biais de la religion. Il en va de son interaction avec la politique par exemple, avec l’implication du problème religieux dans les relations internationales47. Mais l’intérêt va aussi aux institutions religieuses en propre : c’est ainsi que sont reconstituées les histoires de communautés catholiques d’obédience italienne implantées de longue date en Terre sainte : franciscains48 et carmes49.
19Quant à la participation espagnole, elle est certes moindre mais à mentionner tout de même. C’est ainsi que le ministère des Affaires étrangères de Madrid a publié deux volumes relatifs à la présence espagnole en Terre sainte : l’un portant sur les intérêts espagnols en général50, l’autre sur l’un de ses principaux instruments sur place, encore existant à l’heure actuelle, l’Obra pía51. Mais l’historiographie espagnole ne serait à mentionner qu’en raison d’un ouvrage qui apporte un rare témoignage neutre sur la Première Guerre mondiale à Jérusalem : les carnets du consul d’Espagne de l’époque, le comte de Ballobar, surnommé « consul universel » pour avoir représenté les intérêts d’une grande partie des pays en guerre52.
20En ce qui concerne l’historiographie israélienne parue en hébreu (elle compte aussi, on l’a vu, des publications en anglais, voire en allemand), on est passé, dans les vingt-cinq dernières années, d’une vision « siono-centriste53 », « judéo-centriste » et « palestinocentriste », à la découverte de l’« altérité », au « narrativisme » et à un relativisme très post-moderne. Les auteurs publiant en hébreu sont aussi ceux que l’on retrouve dans l’historiographie israélienne parue en anglais. Cette historiographie porte sur :
- les voyageurs, explorateurs et peintres européens54 ; les colonies allemandes et américaines55 ; les consuls américains56 ; les scientifiques allemands57 ;
- l’immigration et la colonisation juive prises dans un contexte plus large, incluant notamment les mécanismes européens de colonisation (ce que fait la majeure partie des chercheurs) ou l’interprétant dans le cadre du colonialisme (ce que font les nouveaux historiens et les autres post-sionistes), ses influences et accomplissements58.
21Tandis que paraissent, en anglais ou en allemand, de la plume d’auteurs israéliens, des études portant sur des institutions, sionistes59 ou non60, qui permettent de relever l’intervention sur le terrain des puissances européennes.
22En langue arabe, on constate une évolution de l’historiographie61. À l’instar de ce que nous avons remarqué pour la partie israélienne, la littérature parue en arabe est connue (et souvent de ce fait délaissée) comme ne faisant que justifier la revendication nationaliste. C’est ainsi que les titres de certains ouvrages affirment le but de l’auteur62 : la fin de la période ottomane est surtout considérée comme celle au cours de laquelle se forme le caractère national palestinien, à la base même du mouvement actuel. Dans cette tendance, la Palestine est perçue comme une entité bien définie, malgré les imprécisions relevées plus tôt et l’on ignore alors les influences étrangères, lorsqu’on n’en fait pas un repoussoir permettant justement la définition d’une population aux caractéristiques bien précises.
23Dans les dernières années, il est possible de remarquer que l’historiographie en arabe considère de manière plus favorable l’administration ottomane : longtemps elle avait été seulement perçue sous des dehors oppressifs ; elle est désormais vue comme une période de « grandeur », qui, malgré son caractère oppresseur, avait su conserver sa « pureté » à la société palestinienne, avec une coexistence entre les différentes communautés rendue possible par une sage administration63 ; harmonie rompue par l’arrivée des sionistes, perçue comme l’irruption d’un nouvel impérialisme (le sionisme comme instrument de l’impérialisme européen). Cette évolution se traduit aussi par une plus grande collaboration entre historiens palestiniens et turcs, qui retrouvent un Empire ottoman qui n’est plus forcément l’ensemble corrompu qu’on y voyait auparavant64.
24Ces grandes tendances montrent à la fois les points notables, mais aussi les manques de l’historiographie. Il est par exemple possible de souligner que longtemps les éléments principaux constitutifs de la Palestine ont été pris un par un, sans tentative réelle de les mettre en rapport. Quand l’analyse historique n’a pas été tentée, à son corps défendant ou non, d’œuvrer pour justifier les ambitions et prétentions politiques des uns et des autres, s’excluant de fait les unes les autres (comme l’écrit un auteur allemand, « les positions des historiens ne sont pas seulement souvent contraires, elles sont incompatibles65 ») ; une tendance aujourd’hui atténuée mais qui n’a pas complètement disparu. De la même manière, certains éléments pourtant pleinement constitutifs de la Palestine ont été négligés parce que faisant partie d’une Terre sainte passée à la trappe de l’histoire. C’est ainsi que les communautés religieuses chrétiennes, de toutes confessions, ont longtemps été déconsidérées. Avec l’extension à cette région des préoccupations de l’histoire religieuse, ces institutions ont retrouvé leur fonction dans l’histoire de la Palestine. Cette redécouverte illustre l’acceptation progressive d’une mémoire plurielle de la région, mise en valeur par le programme de travail du CRFJ dont il est question, qui permet la collaboration avec nombre d’institutions locales, de Jérusalem comme du reste de la région. Une telle revalorisation fait aussi que ces communautés ne sont plus seulement importantes pour elles-mêmes mais endossent un rôle constructif. C’est ainsi qu’on leur reconnaît des apports (en matière linguistique, archéologique, artistique, scientifique, historique), alors que longtemps elles n’avaient été considérées que comme des instruments impérialistes (pour les Arabes), désireuses d’empêcher la réalisation des visées sionistes (pour les Juifs66).
25Au total, il apparaît que l’historiographie prend progressivement la mesure de toutes les facettes d’une région qui n’en manque pas, dans la mesure des possibilités offertes par les sources disponibles. C’est dans ce sens qu’a été pensé le présent recueil. Le titre choisi, sous son aspect neutre, a le mérite d’insister sur l’interdépendance et l’interaction entre les différents éléments ; de montrer les allers et retours (en évitant une description à sens unique) ; de souligner qu’il s’agit à la fois des intervenants gouvernementaux et des acteurs privés ; de préciser que l’on n’a pas ici une autre histoire générale de la Terre sainte ; d’illustrer au maximum les tendances qui ont marqué le développement de la Palestine à cette époque ; et enfin d’inaugurer une recherche plus approfondie sur la présence française, injustement délaissée, même dans la langue de Molière, par rapport à celle de pays comme l’Allemagne ou la Grande-Bretagne.
26À ce propos, il est nécessaire de rappeler que les présentes études concernent uniquement l’Europe occidentale. Cela ne veut néanmoins pas dire que seule celle-ci a été active. De fait, d’autres intervenants existent : on pense par exemple aux États-Unis (principalement par le biais de leurs missions protestantes, mais quasi inexistants sur le plan politique avant la Première Guerre mondiale) ; à la Grèce (très active sur le plan religieux, moins du point de vue politique) ; à la Russie (très forte en revanche à la fois dans les domaines religieux et politique) ; comme à bien d’autres pays, européens ou non (serait à mentionner ici par exemple la Suède, riche de ses initiatives privées notamment, comme le montre Ruth Kark dans les pages qui suivent). La limitation de l’intérêt à l’Europe occidentale répond à un impératif matériel, mais aussi intellectuel (c’est par exemple l’extrême rareté, d’ailleurs regrettable, d’études disponibles sur l’action de la Russie en Palestine). De plus, cette limitation répond à une logique historique : ces articles ne constituent que la première partie d’une étude consacrée aux présences européennes en Palestine sur la période 1799-1948, et il est utile d’établir des comparaisons. Et par un hasard de l’histoire, la fin de la domination ottomane correspond aussi à l’effacement complet de la présence russe en Terre sainte, consécutive à la Révolution d’Octobre et à l’instauration d’un pouvoir agnostique à Moscou.
« De Bonaparte à Balfour. La France, l’Europe occidentale et la Palestine, 1799-1917 »
27La première partie du présent recueil porte sur « Politiques, stratégies et relations internationales ». L’article de Roger Heacock constitue une approche globale situant la Palestine dans le cadre des relations internationales de cette époque ; au moment où elle passe du stade de région périphérique de l’Empire ottoman à celui d’un enjeu de rivalités croissantes entre puissances. Les contributions suivantes tentent de mettre en avant cette progression.
28On trouve de la sorte le cas de la France, analysé de plusieurs manières. Rina Cohen-Muller présente l’installation consulaire de la puissance protectrice des catholiques en Orient, en insistant sur la continuité de la politique française telle qu’elle apparaît dans l’action des quatre premiers consuls de France à Jérusalem : eux qui appliquent strictement la politique du protectorat catholique français, deviennent les conseillers occultes du gouverneur ottoman et ne sont pas affectés par les bouleversements en métropole. Moussa Abou-Ramadan présente quant à lui la codification du statut des établissements protégés : par l’accord de Mytilène (1901) et le traité de Constantinople (1913), la France montre sa volonté de marquer des points non seulement vis-à-vis de la puissance ottomane, mais aussi, et surtout vis-à-vis de puissances étrangères qui lui disputent de plus en plus sa place (des accords dont la validité est d’ailleurs encore actuelle, mais discutée).
29Exemple trop méconnu de cette rivalité, le cas de l’Allemagne. Or, comme a tenté de le souligner la brève présentation précédente, la montée de la rivalité allemande n’est pas seulement valable du point de vue politico-religieux, sur le modèle de ce que font les autres pays ; elle présente aussi des aspects plus modernes. C’est ainsi qu’il faut percevoir, comme l’indique Shlomo Shpiro, l’action des services de renseignement de ce pays dans la région : là aussi on assiste à une institutionnalisation avec la mise en place précoce d’un réseau d’agents.
30Dans un temps avant tout marqué par la rivalité, il existe néanmoins aussi, dans certains cas très spécifiques, des possibilités d’entente : si les alliances contre l’Égypte dans les années 1830-1840, de la guerre de Crimée ou du temps de l’« intervention humanitaire » au Liban (1860) sont connues, d’autres le sont moins, à l’instar de l’entente militaire franco-britannique de la Première Guerre mondiale. À ce titre, la présentation de Yigal Sheffy apporte un éclairage nouveau sur une collaboration imposée par les nécessités du moment : elle permet la victoire des moyens modernes et s’illustre en particulier dans une expérience novatrice, celle d’une unité aérienne mixte particulièrement efficace dans l’apport d’informations tactiques.
31La deuxième partie du volume porte sur les initiatives économiques et sociales : les interventions étrangères en Palestine ne peuvent en effet être seulement des tentatives d’exploitation, l’illustration de rivalités éminemment destructrices. Elles se traduisent en effet également par des entreprises dont bénéficient non seulement le renom des pays qui les engagent, mais aussi la région elle-même. C’est ainsi que Norbert Schwake évoque le réseau hospitalier qui atteint même, par le biais des rivalités, une dimension disproportionnée par rapport aux besoins réels, ce qui pose malgré tout la question du caractère gratuit et humanitaire de ces établissements. Frédérique Schillo, quant à elle, étudie certains des individus qui représentent les puissances, en particulier les commerçants, ici dans leur composante française : l’étude détaillée d’une population numériquement faible permet de conclure à l’utilité de ces personnes pour les représentants consulaires français. C’est aussi le cas des banquiers, présents en nombre dans un Empire ottoman qui ne subsiste que grâce aux prêts étrangers. Mais cela ne se fait pas toujours de manière paisible, comme l’indique Jacques Thobie : prenant le cas de l’agence du Crédit lyonnais de Jérusalem, il souligne le difficile cumul entre impératifs politiques et nécessités d’une saine gestion. À ce titre, les embarras de l’agence de Jérusalem semblent à l’image de ceux de la France dans la région, de même que ses clients illustrent la diversité et les difficultés des établissements de la Palestine.
32Outre les éléments politiques, économiques et sociaux, les présences européennes en Palestine passent traditionnellement par la religion et les enjeux de culture traditionnelle. À cet égard, la Terre sainte mérite bien son nom, cumulant des Lieux sacrés pour les trois religions monothéistes. De ce point de vue, le long xixe siècle est bien celui d’une certaine invention, dans une corrélation politico-religieuse unique en son genre. Thomas Stransky en retrace les toutes premières années, 1840-1850, véritable éclosion d’initiatives. Claude Langlois affine la perspective en étudiant le cas des communautés françaises d’un point de vue strictement religieux : celles-ci présentent une caractéristique intéressante, avec leur avant-garde féminine très précoce, suivie plus tard par une massification des établissements français. Dans leur installation, les communautés religieuses bénéficient des largesses de certaines personnalités. Dans le cas de la France, Zvi Shilony s’attache à faire ressortir la personnalité du comte Amédée de Piellat : outil et aide de ces communautés, le mécène est le représentant type d’une certaine France, et c’est pour la France, pour le catholicisme, pour la technique et l’art qu’il agit et marque fondamentalement et durablement le paysage de Jérusalem. Dans cet environnement politico-religieux de plus en plus marqué, la France met en place un réseau d’établissements particulièrement dense : elle bénéficie de l’aide de mécènes, elle agit aussi par elle-même en attribuant la garde d’édifices religieux à certaines communautés. La collusion, ou collision, des intérêts politiques et religieux apparaît de manière très claire et vivante dans le cas de l’église croisée d’Abou Gosh, attribuée aux Bénédictins français au tournant du xxe siècle, comme le met en avant Dominique Trimbur : où la religion se met au service de la politique, et la politique sert directement la religion, dans un contexte de rivalité internationale accrue. La France cherche aussi à se mettre en avant à travers la vaste entreprise des pèlerinages : peu connus, comme l’indique Catherine Nicault, ces voyages présentent toutefois de multiples aspects. Il vaut ainsi la peine d’en souligner la codification, qui se rigidifie avec le temps, quand le consul de France à Jérusalem y attache de plus en plus d’importance et qu’ils deviennent un instrument annuel de prépondérance française.
33Cet intérêt politico-religieux pour la Terre sainte n’est bien entendu pas le seul fait de la France. Il est intéressant de ce point de vue d’établir une comparaison avec les agissements d’autres pays. Or deux études présentées dans les pages qui suivent montrent la proximité des pensées et des actions. L’Allemagne catholique, notamment lorsqu’elle sort enfin du Kulturkampf, n’est ainsi pas en reste : elle qui agit d’abord en faveur des intérêts catholiques en général, elle suit assez rapidement, et naturellement, la tendance nationaliste qui marque de plus en plus le renouveau de la présence religieuse en Terre sainte. C’est ce que montre Haïm Goren, conduisant à la consécration que constitue la visite de Guillaume II. Mais le passage de l’empereur est notamment la possibilité de mettre en exergue une autre facette, plus connue, de l’Allemagne : le protestantisme. C’est ce qu’effectue Thorsten Preine. Présente depuis les années 1840 dans le cadre d’une expérience originale, mais assez bancale, d’un évêché anglo-prussien, l’Allemagne protestante acquiert à Jérusalem un terrain disputé entre différentes communautés et y construit une église toute proche du Saint-Sépulcre pour afficher son faste lors de la visite de Guillaume II.
34Le protestantisme représenté en Palestine n’est pas qu’américain, anglais ou allemand, comme le relève Ruth Kark. Celle-ci reprend un exemple passé à la postérité grâce à la romancière Selma Lagerlöf, l’American-Swedish Colony. Déjà séparée de l’Église institutionnalisée, cette assemblée aux aspects communautaristes et millénaristes manifeste des préoccupations qui rejoignent certaines réflexions très actuelles relatives à la fin des temps.
35Comme cela a été signalé, les contributions qui suivent tentent de mettre en avant une mémoire plurielle de la Terre sainte, délaissant en cela des chemins plus battus. Néanmoins, un recueil de textes sur les interventions étrangères dans la Palestine du xixe siècle n’aurait pas été complet sans une mention de l’élément amené à occuper plus tard la première place : le judaïsme. Deux études le replacent dans l’environnement international et en soulignent l’une de ses expressions sur le terrain, la colonisation en Palestine. Yoram Mayorek évoque la figure d’Emile Meyerson, philosophe devenu directeur général de la Jewish Colonisation Association : engagement qui lui permet d’appliquer ses idées « darwinistes » de sélection du matériel humain (thématique reprise plus tard par les sionistes eux-mêmes). Quant à Esther Benbassa, elle se penche sur les réflexions de l’Alliance israélite universelle et retrouve plus directement les rivalités internationales apparues dans leurs expressions chrétiennes. Basée à Constantinople, sa pratique francophile et pédagogique fait s’affronter l’AIU au camp allemand, conjoncturel, des sionistes et du Hilfsverein.
36L’image qui ressort des études mentionnées jusqu’ici ne donne dans l’ensemble qu’une impression plutôt mitigée des interventions étrangères en Terre sainte. Où il ne semble pas possible de se dégager des schémas classiques du concert international du xixe siècle, fait de rivalités et de partage du monde, dénoncés notamment par des auteurs arabes et « post-modernes ». Il n’empêche toutefois, comme le lecteur le déduira lui-même, que ces présences portent en elles des facteurs de progrès : amélioration de l’environnement par l’attribution de concessions économiques à l’une ou l’autre puissance, mise en place d’éléments de modernité longtemps absents de la zone et encore inconnus dans des régions moins prisées. C’est aussi pour cela qu’il est possible de reprendre l’expression de Henry Laurens en rapport avec une intrusion de la culture moderne : on assiste alors à une véritable sortie du Moyen Âge. Dans une large mesure, c’est ainsi qu’il faut aussi interpréter les efforts d’implantation économique de la part des différentes puissances. Mais c’est ce qui transparaît également dans les agissements de certains interlocuteurs a priori plutôt traditionalistes. Derrière leur volonté de reconstituer la réalité de la terre de Jésus, les religieux dont parle Jean-Michel de Tarragon ne figurent-ils pas parmi les introducteurs de sciences nouvelles, en l’occurrence la photographie à vocation archéologique, qui renouvellent en profondeur la perception de la région ? Cette qualité n’est d’ailleurs pas l’apanage des Dominicains de l’École biblique, puisqu’est présentée ici une collection de clichés méconnue, celle de Notre-Dame de France67.
37Pour finir, au rang des éléments de modernité introduits par les intervenants étrangers figure également la presse. C’est elle qui permet de se pencher sur une communauté jusque-là délaissée dans les études, et qui mériterait un regard plus serein : la population arabe. Selon Qustandi Shomali, la presse arabe incarne à la fois l’adoption de techniques nouvelles, mais aussi la confrontation, positive ou négative avec l’Occident, très présente dans cette période. Par là s’effectue une renaissance de la culture locale, avec une montée de la conscience nationale. Des pôles culturels et politiques se dessinent, tardivement, avec prise de conscience progressive de la focalisation internationale sur la Palestine.
38En pleine conscience de ses lacunes, pour la plupart mentionnées dans les pages précédentes, le présent ouvrage à l’ambition de constituer une œuvre ressortissant d’un domaine inédit pour le lectorat français. Il exprime aussi la prétention de vouloir initier, ou participer à une réflexion prenant en compte les apports exogènes au développement d’une région, certes très particulière, comme la Palestine dans ses années de profond bouleversement ; une réflexion acceptant pleinement ces contributions, à savoir dénuée des préjugés pouvant affecter la mise en rapport de mondes différents, voire opposés. Il a aussi pour but de lancer une recherche plus en profondeur sur les divers éléments abordés dans les pages qui suivent et doit trouver un premier complément dans un recueil d’articles à paraître, lui faisant directement suite et portant sur la période du mandat britannique (1917-1948).
Notes de bas de page
1 La période mandataire britannique, 1917-1948, fera l’objet d’un recueil établi sur le même modèle que le présent ouvrage, à paraître également dans la collection « Mélanges » du CRFJ.
2 Le terme « Palestine » est utilisé à l’époque par les Européens comme appellation neutre pour « Terre sainte » (« Palestine » figure en en-tête des documents du consulat de France à Jérusalem, par exemple). Sa connotation politique, comprise dans le discours arabe, ne date que du début du xxe siècle, les Juifs lui préférant l’appellation biblique « Eretz Israël » (« terre d’Israël »).
3 Ben Arieh, Yeoshuah, The Rediscovery of the Holy Land in the Nineteenth Century, Jérusalem-Détroit, 1979.
4 Laurens, Henry, La Question de Palestine, tome premier 1799-1922, L’Invention de la Terre sainte, Paris, 1999, citation p. 699.
5 Ma’oz, Moshe, Studies on Palestine During the Ottoman Period, Jérusalem, 1975.
6 Owens, Roger (ed.), Studies in the Economic and Social History of Palestine in the Nineteenth and Twentieth Century, Carcondale-Edwardsville, 1982 ; Kushner, David (ed.), Palestine in the Late Ottoman Period – Political, Social and Economical Transformation, Jérusalem-Leiden, 1986 ; Gilbar, Gad D. (ed.), Ottoman Palestine 1800-1914 – Studies in Economic and Social History, Leiden, 1990.
7 With Eyes Toward Zion, vol. II : Themes and Sources in the Archives of the United States, Great Britain, Turkey and Israel, New York, 1986 ; vol. III : Western Societies and the Holy Land, New York, 1991 ; mais surtout vol. V : Jerusalem in the Mind of the Western World, 1800-1948, Westport, Ct, 1997.
8 Nir, Yeshayahu, The Bible and the Image : the History of the Photography in the Holy Land, 1839-1899, 1985 ; Perez, Nissan, Focus East : Early Photography in the Near East (1839-1885), New York-Jérusalem, 1988 ; Silver-Brody, Vivienne, Documents of the Dream : Pioneer Jewish Photographs in the Holy Land, 1890-1933, Jérusalem-Philadelphie, 1998.
9 Eliav, Mordechai, Britain and the Holy Land – 1838-1914 – Selected Documents from the British Consulates in Jerusalem, Jérusalem, 1997 ; Kark, Ruth, American Consuls in the Holy Land, 1832-1914, Jérusalem-Détroit, 1994 ; tandis que dès 1975 un volume entier est consacré à la présence allemande en Orient, avec intérêt particulier pour la Palestine : Wallach, Yehuda, Germany and the Middle-East 1835-1939, Tel Aviv, 1975.
10 McCarthy, Justin, The Population of Palestine : Population History and Statistics of the Late Ottoman Period and the Mandate, New York, 1990.
11 Penslar, Derek Yonathan, Zionism and Technocracy, Indianapolis, 1991, mettant en avant les modèles français et allemands.
12 Greenberg, Gershon, The Holy Land in American Religious Thought 1620-1948, Lanham, Md, 1994.
13 Shepherd, Naomi, The Zealous Intruders : the Western Rediscovery of Palestine, Londres, 1987.
14 Silberman, Neil Asher, Digging for God and Country : Exploration, Archeology, and the Secret Struggle for the Holy Land, 1799-1917, New York, 1982.
15 Jusqu’à ce jour sont parus dans ce cadre deux volumes : O’Mahony, Anthony, Gunner, Göran, Hintlian, Kevork (ed.), The Christian Heritage in the Holy Land, Londres, 1995 ; Hummel, Thomas, Hintlian, Kevork, Carmesund, Ulf (ed.), Patterns of the Past, Prospects for the Future, The Christian Heritage in the Holy Land, Londres, 1999.
16 Nicault, Catherine (dir.), Jérusalem 1850-1948, Des Ottomans aux Anglais : entre coexistence spirituelle et déchirure politique, Paris, 1999.
17 On lui doit notamment l’ouvrage déjà cité, auquel viendra s’ajouter un deuxième volume portant sur la période mandataire, livres complémentaires d’un copieux recueil de documents (Le Retour des exilés -La Lutte pour la Palestine de 1869 à 1997, Paris, 1998).
18 Nicault, Catherine, La France et le sionisme, 1897-1948 – Une rencontre manquée ?, Paris, 1992.
19 C’est particulièrement le cas des études réalisées par Elisabeth Antébi, sous une forme romancée – L’Homme du Sérail, Paris, 1996 – ou plus scientifique – Les Missionnaires juifs de la France, 1860-1939, Paris, 1999. Dans le même sens, on consultera avec intérêt une récente publication issue des actes du colloque de Lille de novembre 1997 : Delmaire, Jean-Marie, Delmaire, Danielle & Persyn, Emmanuel (sous la direction de), La Naissance du nationalisme juif, 1880-1904, Lille, 2000.
20 Chalendard, Marie, À Jérusalem – Notre-Dame de France 1882-1870, Aujourd’hui Notre-Dame de Jérusalem – Institut pontifical, Paris, 1984.
21 Sur les Juifs. Études d’histoire contemporaine, Lyon, 1983.
22 École biblique et archéologique française, Un Siècle d’archéologie à l’École biblique de Jérusalem : 1890-1990, Jérusalem-Paris, 1988, et Naissance de la méthode critique – Colloque du centenaire de l’École biblique et archéologique française de Jérusalem, Paris, 1992 ; cf. aussi les détails qui apparaissent au fil de la biographie du fondateur de l’École biblique : Montagnes, Bernard, op, Le père Lagrange 1855-1938 – L’Exégèse catholique dans la crise moderniste, Paris, 1995.
23 C’est ainsi que fait date l’œuvre reconnue d’un auteur dont les livres ont été traduits en anglais, Alexander Schölch : on peut citer à cet égard celui concernant les aspects économiques et sociaux de la Palestine au xixe siècle, devenu à présent un classique : Palästina im Umbruch 1856-1882 : Untersuchung zur wirtschaftlichen und sozio-politischen Entwicklung, Stuttgart, 1986 ; traduction anglaise, Palestine in Transformation 1856-1882 : Studies in Social, Economic and Political Development, Washington, DC, 1993.
24 Sinno, Abdel Raouf, Deutsche Interessen in Syrien und Palästina 1841-1898, Aktivitäten religiöser Institutionen, wirtschaftliche und politische Einflüsse, Berlin, 1982.
25 Scheffler, Thomas, Von der “Orientalischen Frage” zum "Tragischen Dreieck" : die Nahostpolitik der Sozialdemokratischen Partei Deutschlands vom Zerfall des Osmanischen Reichs bis zum deutsch-israelischen Wiedergutmachungsabkommens, Berlin (thèse Freie Universität), 1993.
26 Hilber, Johann, Pilgerreise in das Heilige Land in den Jahren 1851-52, Bruneck, s. d. (1988 ?) ; Gregorovius, Ferdinand, Eine Reise nach Palästina im Jahre 1882, Munich, 1995.
27 Gradenwitz, Peter (Hg.), Das Heilige Land in Augenzeugenberichten : aus Reiseberichten deutscher Pilger, Kaufleute und Abenteurer vom 10. bis zum 19. Jh., Munich, 1984 ; Kaiser, Wolf, Palästina – Erez Israel : deutschsprachige Reisebeschreibungen jüdischer Autoren von der Jahrhundertwende bis zum Zweiten Weltkrieg, Hildesheim-Zürich-New York, 1992 ; en son temps, la RDA s’est aussi intéressée au problème : Polkehn, Klaus, Palästina : Reisen im 18. und 19. Jahrhundert, Berlin, 1986.
28 Bodenheimer, Max I., Meine Palästinafahrt mit Herzl – Der geschichtliche Hintergrund der Reise aus Dokumenten, édité par Henriette Hannah Bodenheimer.
29 Bodenheimer, Max, Die Zionisten und das kaiserliche Deutschland : zur Zeit der Reise Wilhelms II. nach Palästina, Henriette Hannah Bodenheimer, 2e édition, Jérusalem, 1981.
30 Meier, Axel, Die kaiserliche Palästinareise 1898 : Theodor Herzl, Großherzog Friedrich I. von Baden und ein deutsches Protektorat in Palästina, Constance, 1998.
31 Carmel, Alex, Eisler, Ejal Jakob, Der Kaiser reist ins Heilige Land : die Palästinareise Wilhelms II. 1898 ; eine illustrierte Dokumentation, Stuttgart-Berlin-Cologne, 1999.
32 Hanselmann, Siegfried, Deutsche evangelische Palästinamission : Handbuch ihrer Motive, Geschichte u. Ergebnisse, Erlangen, 1971 ; Foerster, Frank, Mission im Heiligen Land : der Jerusalems-Verein zu Berlin 1852-1945, Gütersloh, 1991.
33 Hertzberg, H.W., Friedrich, J., Jerusalem, Geschichte einer Gemeinde, unter Mitarbeit von Rhein, E., Döring, J., Weigelt, J., Malsch, C., Köhler, H., Glatte, H., Wehrmann, J., Kassel, 1965, Jérusalem, 1990 ; Ronecker, Karl-Heinz, Nieper, Jens, Neubert-Preine, Thorsten (Hg.), Dem Erlöser der Welt zur Ehre -Festschrift zum hundertjährigen Jubiläum der Einweihung der evangelischen Erlöserkirche in Jerusalem, Leipzig, 1998 ; Neubert-Preine, Thorsten, 100 Jahre evangelische Erlöserkirche in Jerusalem, Jérusalem, 1998 ; Männchen, Julia, Gustav Dalman als Palästinawissenschaftler in Jerusalem und Greifswald : 1902-1941, Wiesbaden, 1994.
34 Festschrift des theologischen Studienjahres der Dormition Abbey Jerusalem für Abt Dr. Laurentius Klein OSB, St. Ottilien, 1986.
35 Bidermann, Willi, Vom Schwarzwald ins Heilige Land : die Templer im Schwarzwald und ihr Aufbruch nach Palästina, Horb am Neckar, 1990.
36 Et de fait, si ce chercheur est israélien, on est fortement tenté de le ranger dans l’historiographie germanique, tant son œuvre s’y insère parfaitement : Die Siedlungen der württembergischen Templer in Palästina 1868-1918 : ihre lokalpolitische und internationale Probleme, Stuttgart, 1973, 2e édition 1997 ; Carmel, Alex, Christen als Pioniere im Heiligen Land : ein Beitrag zur Geschichte der Pilgermission und des Wiederaufbaus Palästinas im 19. Jh., Bâle, 1981.
37 Strigl, Joseph, Die Pilgerfahrt nach Jerusalem und Palästina 1856, Salzbourg, 1980.
38 Après l’ouvrage pionnier de Breycha-Vauthier, Arthur, Österreich in der Levante, Vienne, 1972, cette présence a fait l’objet d’un colloque organisé en 1995 par l’ambassade d’Autriche à Tel Aviv : Wrba, Marian, (ed.), Austrian Presence in the Holy Land in the 19th and Early 20th Century, Tel Aviv, 1996.
39 Agstner, Rudolf, Österreichs Vertretungsbehörden in Palästina und Israel, Vienne, 1999.
40 Bauer, Karl Johannes, Alois Musil, Vienne, 1989.
41 Feigl, Erich, Musil von Arabien – Vorkämpfer der arabischen Welt, Vienne-Munich, 1985.
42 Il existe ainsi des évocations du détachement italien de Palestine, ayant participé à la campagne menée par Allenby (Buzzetti, Luciano, Il distaccamento italiano di Palestina, 1917-1921, Milan, 1976) ; mais s’imposent surtout les études magistrales de Renzo de Felice ou de Simonetta della Seta sur les tentatives de Mussolini d’interférer dans la politique palestinienne.
43 L’Italie et la Palestine 1914-1920, Paris, 1970.
44 Rostagno, Lucia, Terrasanta o Palestina ? La diplomazia italiana e il Nazionalismo Palestinese (1861-1939), Rome, 1996.
45 Achilli, Michele, I socialisti tra Israele e Palestina : dal 1892 ai nostri giorni, Milan, 1989.
46 Gabellini, Andrea, L’Italia e l’assetto della Palestina, 1916-1924, s. l., 1997.
47 Fabrizio, Daniela, La questione dei luoghi santi e l’assetto della Palestina : 1914-1922, Milan, 2000 ; Pieraccini, Paolo, Gerusalemme, luoghi santi e comunità religiose nella politica internazionale, Bologne, 1996.
48 Picirello, Michele (dir.), La Custodia di Terra Santa e l’Europa -I rapporti politici e l’attività culturale dei Franciscani in Medio Oriente, Rome, 1983.
49 Giordano, Silvano, OCD, Il Carmelo in Terra Santa : dalle origini ai giorni nostri, Gênes, 1994 ; trad. française : Le Carmel en Terre sainte : des origines à nos jours, Paris, 1995. Enfin, c’est aussi dans le domaine italien que l’on peut situer certaines œuvres relatives à l’implication du Vatican dans les affaires palestiniennes. On ne citera ici que l’ouvrage écrit d’abord en hébreu, traduit ensuite en italien et en anglais (mais pas en français) de Sergio Minerbi : Il Vaticano, la Terra Santa e il sionismo, Milan, 1988 (version anglaise : The Vatican and Zionism : Conflict in the Holy Land 1895-1925, New York-Oxford, 1990) ; on notera aussi, en français : Soetens, Claude, Le Congrès eucharistique international de Jérusalem (1893) dans le cadre de la politique orientale du pape Léon XIII, Louvain, 1977.
50 Campo Rey, Conde de, Historia Diplomatica de España en Los Santos Lugares, 1770-1980, Madrid, 1982.
51 García Barriuso, Patrocinio, España en la historia de Tierra Santa : Obra pía española a la sombra de un regio patronato, estudio histórico-jurídico, Madrid, 1992. En cela, une présence aussi réduite se démarque par rapport à l’absence de tels ouvrages de la part, par exemple, du ministère français des Affaires étrangères.
52 Conde de Ballobar, Diario de Jerusalén (1914-1919), Madrid, 1996.
53 Cf. notamment dans l’ouvrage de Friedman, Isaiah, Germany, Turkey and Zionism, 1897-1918, Oxford, 1977 ; Eliav, Mordehai, Sous protection impériale autrichienne : Documents choisis des archives du consulat autrichien de Jérusalem, 1849-1917, Jérusalem, 1985 (en hébreu) ; cf. aussi Pinkus, Benjamin & Bensimon, Doris (eds.), Le Judaïsme français, le sionisme et l’État d’Israël, Jérusalem, 1992 (en hébreu, ici notamment les quatre premiers articles relatifs aux débuts du sionisme en France, avant la Première Guerre mondiale). De nombreux articles en hébreu paraissent dans le périodique Cathedra (avec sommaire et résumés en anglais).
54 C’est par exemple l’œuvre de Yeoshuah Ben-Arieh, dont certains articles sont cités dans la contribution de Zvi Shilony, cf. infra.
55 Cf. Carmel, Alex, idem ; Ben Artzi Yossi, De l’Allemagne à la Terre sainte : les colonies de Templer en Palestine, Jérusalem, 1997 (en hébreu), avec ici comparaison entre les colonies de Templer et les villages traditionnels du Wurtemberg ; Kark, Ruth.
56 Kark.
57 Goren, Haïm, “Allez et voyez le pays" : l’exploration allemande de la Palestine au xixe siècle, Jérusalem, 1999.
58 La plupart des publications sont des articles parus dans des périodiques en hébreu, en particulier dans Ha-Zionut (Le Sionisme) et Iyunim Bitkumat Ysrael (Études sur le sionisme, le Yichouv et l’État d’Israël), ou dans Teoria u-bikoret (Théorie et critique). Cf. aussi Aaronsohn, Ran, « Settlement in Eretz Israel -A Colonialist Enterprise ? “Critical” Scholarship and Historical Geography », in Israel Studies, 1, 2 (automne 1996), pp. 214-229. Pour des ouvrages, cf. du même auteur Le Baron Rothschild et les colonies : les débuts de la colonisation juive en Eretz Israël, Jérusalem, 1990 (traduction anglaise, Rothschild and Early Jewish Colonization in Palestine, New York-Jérusalem, 2000), en particulier l’introduction et les conclusions qui replacent la colonisation juive en Palestine dans le cadre du phénomène global de la colonisation ; Ben Artzi, Yossi, Les Modèles de la colonisation juive en Palestine, 1882-1914, Jérusalem, 1988 (en hébreu, traduction anglaise 1997, en particulier le chapitre II : « Sources d’inspiration ») ; Shiloni, Zvi, Ideology and Settlement, The Jewish National Fund 1897-1914, Jérusalem, 1993 (en hébreu, version anglaise 1998, en particulier le chapitre premier : « Le contexte européen »).
59 Sadmon, Zeev W., Die Gründung des Technions in Haifa im Lichte deutscher Politik 1907-1920, Munich-New Providence-Londres-Paris, 1994.
60 Ichilov, Orit & Mazawi, André E., Between State and Church – Life History of a French-Catholic School in Jaffa, Francfort-Berlin-Berne-New York Paris-Vienne, 1996.
61 Nous tirons les principaux détails relatifs à l’évolution de l’historiographie arabe de l’ouvrage de Reinkowski, Maurus, Filastin, Filistin und Eretz Israel : diespäte osmanische Herrschaft über Palästina in der arabischen, türkischen und israelischen Historiographie, Berlin, 1995 ; nous devons les titres les plus récents à Qustandi Shomali, que nous remercions ici.
62 Tuma, Émile, Le Mouvement national palestinien arabe, Jérusalem, 1995 ; Choufani, Élias, L’Histoire politique de la Palestine, Beyrouth, 1996 ; Ewiess, Abdelfattah, Les Sources de la question de Palestine, 1799-1922, Hébron, 1992 ; Khalidi, Walid, Avant la diaspora, Beyrouth, 1987.
63 Fathi, Ahmed, L’Histoire du Rif palestinien pendant la période ottomane, Ramallah, 1992 ; Bazili, Constantin, La Syrie et la Palestine pendant la période ottomane, Moscou, 1992.
64 Cette tendance est à placer en parallèle à la mise en place de réseaux d’historiens israéliens et palestiniens, travaillant notamment sur la période immédiatement antérieure à 1948 mais aussi sur le xixe siècle (cf. notamment les travaux de l’Institute of Jerusalem Studies, antenne locale de l’Institut d’études palestiniennes, Paris, Washington).
65 Reinkowski, Maurus, Filastin, Filistin und Eretz Israel, op. cit., p. 239.
66 Dans son ouvrage en deux volumes sur Jérusalem (Jerusalem in the 19th Century -The Old City, Jérusalem-New York, 1984, et Jerusalem in the 19th Century -Emergence of the New City, idem, 1986), Yeoshuah Ben Arieh avait esquissé la contribution des bâtiments des communautés religieuses à l’urbanisme de la Ville sainte. Qu’il nous soit aussi permis ici de signaler plusieurs articles de notre plume (DT), traitant de l’apport matériel et intellectuel représenté par ces congrégations, outre celui compris dans le présent volume : « Les Assomptionistes de Jérusalem, les Juifs et le sionisme », Tsafon-Revue d’études juives du Nord, n° 38, hiver 1999-printemps 2000, pp. 71-111 ; « Intrusion of the “Erbfeind” -French Views on Germans in Palestine 1898-1910 », in Hummel, Th., e.a., Patterns of the Past, op. cit., pp. 238-256 ; « Une présence française en Palestine : Notre-Dame de France », Bulletin du Centre de recherche français de Jérusalem, n° 3, automne 1998, pp. 53-75 ; « Le destin des institutions chrétiennes européennes de Jérusalem pendant la Première Guerre mondiale », à paraître in Mélanges de science religieuse, Université catholique de Lille, n° 3, 2000 ; « Sainte-Anne : lieu de mémoire et lieu de vie français à Jérusalem », à paraître in Chrétiens et société – xvie-xxe siècles, Centre André Latreille, Université de Lyon 2, 2000 ; et « L’élévation de l’École pratique d’études bibliques au rang d’École biblique et archéologique française », à paraître in Revue biblique, 2001.
67 Les clichés qui illustrent le présent ouvrage sont extraits de la collection de Notre-Dame de France. (© École Biblique et Archéologique Française de Jérusalem.) Nous remercions ici Jean-Michel de Tarragon de bien avoir voulu nous accorder gracieusement le droit de les reproduire (le cliché illustrant l’article de Dominique Trimbur fait partie de la collection de l’École biblique).
Auteurs
Chercheur associé au Centre de recherche français de Jérusalem. Sa thèse de doctorat est parue en 2000 sous le titre De la Shoah à la réconciliation ? – La question des relations RFA/Israël (1949-1956) (CNRS Éditions, Paris, Collection « Hommes et Sociétés » du Centre de recherche français de Jérusalem). Il travaille actuellement sur les présences européennes, notamment française et allemande, en Palestine aux xixe et xxe siècles. Ses principaux domaines d’intérêt concernent les relations entre politique et religion (avec en préparation un ouvrage sur les réseaux français en Palestine au xixe siècle) et les liens entre politique et culture (en particulier dans la Palestine mandataire, avec intérêt particulier pour les interventions étrangères dans le cadre de l’Université hébraïque).
Enseigne à l’Université hébraïque de Jérusalem, dans le département de géographie. Ses domaines de spécialité sont la géographie historique, les processus de colonisation au xixe siècle (en particulier la colonisation juive en Palestine), la géographie rurale, les communes actuelles en Amérique du Nord. Il a notamment publié Le Baron de Rothschild et les colonies : les débuts de la colonisation juive en Palestine, Jérusalem, 1990 (version anglaise à paraître).
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De Balfour à Ben Gourion
Les puissances européennes et la Palestine, 1917-1948
Ran Aaronsohn et Dominique Trimbur (dir.)
2008
De Bonaparte à Balfour
La France, l’Europe occidentale et la Palestine, 1799-1917
Ran Aaronsohn et Dominique Trimbur (dir.)
2008