Le Bâtiment : une histoire d’archaïsmes
p. 25-26
Texte intégral
1Les conditions de travail dans le bâtiment sont souvent difficiles non seulement pour la main-d’œuvre mais aussi, et à la différence d’autres secteurs à haute intensité de travail, pour les techniciens, les travailleurs hautement qualifiés et le personnel d’encadrement. C’est là l’argument principal avancé pour expliquer pourquoi le bâtiment vient au premier rang des filières productives à taux élevé de main-d’œuvre étrangère qui ont fait de la France l’un des principaux pays d’immigration en Europe depuis le xixe siècle1. Cependant, les travaux et enquêtes portant sur les transformations du tissu industriel français au xxe siècle ne nous fournissent qu’une connaissance éparse et morcelée de l’étendue de cette présence. Le but de cette partie est donc, dans un premier temps, de cerner les contours d’un objet peu étudié en tant que tel.
2L’étude des migrants dans le monde du bâtiment et de leur place au sein des entreprises nous conduira ensuite à une analyse de la morphologie productive de cette branche dont la structure industrielle est fortement fragmentée. Il s’agira enfin d’observer comment les étrangers ont en quelque sorte « accaparé » la branche du bâtiment et comment les contemporains ont perçu la diversité et la segmentation de la main-d’œuvre.
3En premier lieu, d’un secteur dont les économistes industriels ne cessent de souligner les traits atypiques, l’analyse s’attachera donc à l’étude de la composition particulière de la main-d’œuvre, marquée par la présence massive de migrations intérieures et internationales. En choisissant une approche résolument axée sur la dimension humaine pour aborder l’étude de ce secteur, je viserai à détailler la percée de la population active étrangère du bâtiment, en m’appuyant sur les statistiques nationales à partir du début du xxe siècle. Quelles sont sa composition et sa distribution sur le territoire national ? La reconstitution à grande échelle de cette masse de main-d’œuvre en croissance et en renouvellement au xxe siècle est le préalable à tout examen ciblé des particularités de la morphologie industrielle et humaine du bâtiment. Ce sont précisément ses spécificités par rapport aux autres secteurs industriels qui sont au cœur de cette enquête.
4Ce faisant, nous ne nous bornerons pas exclusivement à l’étude des salariés. Notre analyse macro-sociale s’intéresse, en deuxième lieu, à la distribution de la population active de la branche selon les statuts professionnels et sociaux qui s’instituent comme critères de répartition de la population active dans les recensements de la population française à partir de 18962. Ce repérage de données reflétant les catégories utilisées par les contemporains pour définir la hiérarchie des fonctions professionnelles se couplera à la prise en compte de l’une des caractéristiques majeures de la structure industrielle du bâtiment : la fragmentation de son appareil productif.
5Enfin, comment se distribue la présence étrangère dans les différents échelons de la branche ? Y a-t-il une spécificité du bâtiment par rapport à l’ensemble de l’industrie manufacturière et des biens d’équipement, où les migrants se trouvent cantonnés dans les segments les moins élevés du travail salarié ? Répondre à ces questions nous amènera à souligner les traits marquants de la structure productive du bâtiment et, par-là même, à revenir sur certaines grandes problématiques de l’économie industrielle française.
6Bien entendu, cette présence ne se matérialise pas seulement par des chiffres. La visibilité des migrants étrangers (et, avant eux, régionaux) a frappé les contemporains et suscité des commentaires, des analyses, des appréciations de nature disparate. Il s’agira ainsi de prêter attention à la façon dont les migrants du bâtiment sont saisis dans les enquêtes qui, depuis un siècle, les décrivent et détaillent les mœurs et les particularités qu’elles leur attribuent.
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