Du signe à la trace : l’information sur mesure
p. 133-150
Note de l’éditeur
Revue Hermès no 531, Traçabilité et réseaux, 2009.
Texte intégral
1L’essor du numérique ne se réduit ni à une nouvelle codification des contenus, ni à l’introduction d’un nouveau canal de circulation. C’est une transformation environnementale, qui affecte les structures et les relations. Une telle mutation ne déstabilise pas seulement des usages et des objets. Elle remet en question les modèles conceptuels qui servent à les formaliser. C’est dire que la pensée du message et du document, qui fonde les sciences de l’information et de la communication, doit évoluer vers une pensée de la traçabilité.
La trace, entre information et communication
2Dans la culture numérique, le signe, le message et le document sont appelés à être subsumés dans la catégorie des traces. Celle-ci ne désigne pas un nouveau type d’objet, mais un mode inédit de présence et d’efficacité, lié aux caractéristiques techniques et sociales des réseaux.
Du télégraphe à l’empreinte
3Les SIC se reconnaissent au moins une convergence : l’étude des messages et de leur traitement au sein de systèmes machiniques ou sociaux. Qu’on les examine sous l’angle technique, sémiotique, pragmatique ou sociologique, les processus d’information et de communication sont toujours pensés comme des opérations portant sur des signaux, des formes ou des contenus. Les sciences du document s’intéressent à leurs supports ou leurs agencements logiques ; l’étude des médias se focalise sur leurs effets de sens et d’organisation. Dans le modèle télégraphique, l’information mesure la probabilité d’apparition et de distorsion des signaux (Shannon et Weawer, 1948). Dans le modèle orchestral, la communication est « multicanal » et les signaux enveloppent les participants (Bateson et al., 1981). Mais, dans aucun des schémas fondateurs de la pensée communicationnelle, il n’est question d’empreintes, de signatures ou de traces. Or, c’est en ces termes que présence et transaction doivent être décrites dans l’environnement numérique. Adressage des pages, identification des ordinateurs (IP), mémorisation des préférences, tatouages des documents, login… avant d’être un arrangement signifiant, l’instruction informatique est un marquage, une « trace, construite ou retrouvée, d’une communication en même temps qu’un élément de systèmes identitaires » (Roger T. Pédauque, 2006, p. 32).
4Le signe, tel que les SIC et la sémiologie le définissent, procède d’un acte d’énonciation doté de sens et (en partie au moins) d’intentionnalité. L’empreinte numérique, elle, est automatiquement produite à l’occasion d’un calcul, d’un codage ou d’une connexion, le plus souvent sans que le sujet en soit conscient. Au lieu d’articuler une face sensible (signifiant) à une représentation psychique (signifié), la trace assigne une signature invisible à un comportement informationnel, qui n’est pas toujours perçu comme tel. Téléphoner, voyager, cliquer sur un lien, commander un produit en ligne… autant d’activités que l’on pratique « en aveugle », sans les éprouver comme traçage. L’équivalence entre communication et conduite, que les chercheurs de Palo Alto avaient établie pour critiquer la linéarité du modèle télégraphique, trouve ainsi un prolongement inattendu. Quand chaque agissement social se traduit en données, il n’est plus besoin de poser le cadre d’une relation interpersonnelle pour établir qu’on ne peut pas communiquer, puisque désormais on ne peut plus ne pas laisser de traces.
5L’étagement des niveaux de communication s’en trouve bouleversé. Dans les échanges étayés par les médias traditionnels, « la sémantique de la relation ou du cadre précède les contenus de nos représentations, et pilote celles-ci » (Bougnoux, 1998, p. 19). En milieu numérique, la trace est en deçà de tout cadrage métacommunicationnel. Nos actes produisent de l’information avant même qu’un message-cadre ne vienne les « intentionnaliser ». C’est tout le paradoxe des réseaux : la fonction phatique des signaux y est souvent plus déterminante que leur teneur sémantique, mais les traces ne sont plus attachées à une énonciation. Du moins, c’est une énonciation incertaine, différée et sans marqueurs corporels. Les données sont des déictiques qui ne signalent plus la continuité d’une présence, mais simplement une identité. Si elles relèvent de la catégorie des indices (Peirce, 1978) par leur pouvoir d’attestation, elles ménagent en même temps l’espacement d’une différance (Derrida, 1967). En termes de distance avec la source, elles sont en deçà de la représentation et au-delà de la manifestation (Bougnoux, 1998). Contextuelles, elles sont pourtant dissociables du hic et nunc de leur production, car ce sont des « unités isolables, agençables et calculables » (Roger T. Pédauque, 2006, p. 186).
6C’est cette déliaison des traces qui permet d’en faire une exploitation administrative ou commerciale. Détachées de la personne qu’elles identifient, elles sont ouvertes à d’infinies « refabrications » en fonction des stratégies et des besoins. « Nous ignorons encore à quelles responsabilités, à quelles incertitudes, nous expose l’usage de ces particules de document, si élémentaires qu’on les croit encore vierges de toute signification. Nul ne peut dire de quel sens, mais chacun sait de quels intérêts ces fragments sont porteurs. L’économie du médium a remplacé l’économie du message2. »
La redocumentarisation des traces
7L’hypothèse d’un comportement zéro est donc moins que jamais envisageable : désormais, non seulement tout communique, mais tout informe. Public, intime et privé se rejoignent dans une même sphère, où la mise en commun relève autant de la collecte et de l’indexation que de l’échange et de la publication. Le Web incite à la spontanéité du mode conversationnel, tout en documentant de façon pérenne chaque source ou « prise de parole ». Cette traçabilité appelle une science du document élargie aux raisons pragmatiques, et une science de la communication tournée vers les processus documentaires. La sémiologie ne saurait en effet décrire cette traçabilité. Examinant le fonctionnement des signes sur le mode du système, elle a dégagé les codes sur lesquels la culture de masse s’est construite. Mais c’est précisément cette massification que la culture numérique met aujourd’hui en question.
8Pour penser cette traçabilité, il faut se placer dans la perspective de ce que Jean-Michel Salaùn appelle la redocumentarisation (Salaùn, 2007 ; Roger T. Pédauque, 2007). Les empreintes que nous laissons sur les réseaux sont au cœur de ce processus qui permet aux récepteurs – destinataires ou non – de réarticuler les contenus selon leur interprétation. Utiles et signifiantes sans être encore des documents, les traces dépendent des opérations d’extraction, d’annotation et de réagencement auxquelles elles sont soumises. Alors que les contenus étaient jusqu’alors assignés à une matérialité qui les validait, les données numériques ne dépendent plus de la stabilité d’un support. La personnalisation des interfaces, la multiplication des liens et la généralisation des formats séparant forme et structure (XML) leur confèrent une plasticité inédite. Elles se prêtent aux recoupages et aux croisements, comme les éléments d’une base de données qui aurait pour contour l’identité. Dans des environnements toujours plus dynamiques, la traçabilité consiste alors en un double mouvement de reconstitution des cycles et de reconstruction des contenus « à la volée ».
9Cette nouvelle disponibilité des traces donne au récepteur une liberté de traitement qu’il n’avait guère avec les médias analogiques. Mais, simultanément, elle expose chacun aux stratégies lourdes de l’attention. La lisibilité nouvellement partagée entre émetteurs et utilisateurs, telle qu’elle a été promue en modèle par les blogs, fait de chacun un auteur potentiel, mais aussi une cible possible. Pendant que les personnes jouent elles mêmes avec leur signature, les puissances économiques et politiques cherchent à cerner leur comportement. Toute la question est de savoir où passe la frontière entre surveillance et redocumentarisation. Autrement dit, comment délimiter les droits d’accès, d’interprétation et de transformation, pour que l’usage des traces soit protégé techniquement et politiquement.
La traçabilité : un carrefour sociotechnique
10Par leur capacité à reconsidérer la place de la technique dans les faits sociaux, les sciences de l’information et de la communication ont un rôle particulier à jouer dans cette négociation entre circulation et protection des données. Là où la pensée classique traite du médium comme d’une réalité seconde, venant après le sens et la conscience, les SIC ont vocation à poser l’extériorité d’une raison produite par les réseaux sociotechniques. Au lieu de voir dans la technologie un épiphénomène, dont il faudrait limiter les effets sur une nature humaine immuable, la pensée communicationnelle nous aide à admettre que dispositifs et dispositions se construisent ensemble. Ainsi, nos empreintes numériques ne sont séparables ni des situations de communication, ni des formes de l’identité dont elles témoignent. Imaginer qu’on pourrait suspendre cette traçabilité (par des règles juridiques) sans affecter du même coup toute la logique des interactions est une illusion.
11L’anthropologie a montré que la tekhnè consiste en une externalisation de nos fonctions3. En s’externalisant, les facultés se modifient : elles acquièrent une dimension formelle et organisationnelle, qui dépasse l’individu et lui survit. Après la force, la perception, le calcul et la mémoire, l’identité pourrait bien être la dernière de nos propriétés ainsi mise au-dehors par nos médias. Avant de signifier ou d’informer, ceux-ci ont pour fonction de ménager des espaces intermédiaires, où le réel peut être négocié, contenu, filtré. Dans ces entre-deux, nous établissons des relations de confiance qui produisent du collectif. La migration des identités sur les réseaux engage donc beaucoup plus que la vie privée. Elle relève du politique, quand bien même elle ne concernerait que des échanges interpersonnels.
12Ce tissage social en amont de tout message demande à être accompagné. « Objets politiques et non sémantiques4 », les traces numériques façonnent l’être ensemble sans être toujours déterminées par des stratégies industrielles ou étatiques. Il importe de dénoncer l’opacité des contrôles et des intérêts derrière l’apparente libre circulation des traces. Mais il faut aussi comprendre comment la traçabilité s’auto(re)produit par les seules propriétés des réseaux. Ce n’est qu’à cette condition qu’on parviendra à alerter l’opinion publique sur ses dangers, sans retomber dans le fantasme du Big Brother. À la fois source et conséquence de la redocumentarisation, les attentes des acteurs sont indissociablement sociales et techniques. Le fait que la traçabilité soit en elle-même invisible rend d’autant plus nécessaire l’explicitation de ces couches logiques liées aux architectures. Les approches sociologiques et politiques des faits de communication ont donc intérêt à se rapprocher du versant ingénierie des sciences de l’information, pour élaborer ensemble une intelligence des outils.
Vers une nouvelle économie de l’empreinte
13Ce qui s’enregistre ne préexiste pas à l’enregistrement. Loin de se limiter à une publicisation du privé, le marquage des données participe d’une restructuration en amont des informations, qui a pour logique la personnalisation.
L’information sur mesure
14Les données personnelles sont le pivot d’une nouvelle économie des savoirs et des interactions, parce que l’information ne se conçoit plus que par rapport à un contexte, un besoin, une relation. Alors que le signe tendait idéalement vers le partage d’un sens par le plus grand nombre (code), la trace vise à calibrer au plus près des renseignements sur mesure (signature). Cette logique de personnalisation trouve ses vecteurs les plus actifs dans les applications du Web 2.0. Podcasting*, blogs, syndication*… il n’y a plus un document maître et des copies, mais une cascade d’états où l’information s’adapte à chaque condition de lecture et d’écriture. Le projet d’un Web sémantique radicalise cette fragmentation des contenus en documents virtuels personnalisables, recalculés dynamiquement à partir d’un moteur et d’un ensemble d’ontologies.
15Là où la culture de masse fabriquait des dénominateurs communs, le numérique tend « naturellement » à personnaliser l’information qu’il dissémine. Par un « déplacement du centre » (Doueihi, 2008, p. 134), il donne à chacun son information, en faisant de la pertinence, reconstruite à chaque session, l’unique boussole. La personnalisation apparaît ainsi comme un moyen de compenser la perte des visions synthétiques et la désorientation par une focalisation sur soi. Cette information sur mesure pourra-t-elle produire « des différences, qui engendrent d’autres différences » (Bateson, 1981), ou s’épuisera-t-elle dans la clôture informationnelle de « nos mondes propres » (Bougnoux, 1998) ? Elle suppose en tout cas un traçage des singularités qui affecte l’identité.
L’identité comme collection de traces
16La personne qui sert de filtre à l’information n’est pas celle de nos CV, de nos appartenances et de nos papiers d’identité (même si, de plus en plus, elle en tient lieu). C’est une entité purement numérique, qui se résume à la collection des traces laissées par nos connexions : requêtes, téléchargements, géolocalisation, achats, mais aussi contenus produits, copiés, repris, etc. Nous n’avons qu’une connaissance approximative de cette identité disséminée dans les réseaux.
17Opérateurs, marchands, moteurs de recherche et services de renseignements en savent plus sur nos comportements numériques que nous-mêmes, car ils ont la capacité de les archiver, de les recouper et de les modéliser. La première protection contre « l’expropriation identitaire » consiste donc à reprendre la main sur la gestion de nos traces – en déposant un nom de domaine, en administrant un site, en agrégeant ses favoris…
18D’une façon générale, face à l’impossibilité de se soustraire aux systèmes de surveillance, c’est la mise en œuvre d’une sousveillance5 où l’acteur enregistre lui même les indices de sa présence, qui peut l’aider à préserver l’intégrité de son identité. Il faut aussi apprendre à jouer de la « polyphonie » du double numérique : « multiple et diversifié, autorisant flexibilité et pseudoanonymat » (Doueihi, 2008, p. 82), celui-ci n’a pas la rigidité d’une étiquette sociale. Il laisse une place à l’ironie, au mensonge, à la fiction.
19Pour autant, l’individu numérique est bel et bien épié avec un degré de pénétration inédit. La sémiotisation des comportements visait à élaguer les particularismes pour dégager des invariants (stéréotypes, codes, mythologies). La traçabilité consiste à l’inverse à pister les singularités pour cibler toujours plus finement l’information. Le token devient la valeur ajoutée sans laquelle le type n’a plus la capacité d’orienter attention et marchandisation. En même temps, la communauté prime sur l’individu dans la mesure où l’identité s’assimile à un processus communicationnel. Chaque acteur n’existe que dans son rapport discriminant aux autres usages, préférences ou opinions. Même la cognition se publicise, puisque nous donnons à observer nos manières de lire, écrire, chercher, trier…
20Reste à savoir jusqu’à quel point une telle identité est calculable. Théoriquement, les faits de communication ont pour particularité de ne pas être programmables, comme le sont les échanges de matière ou d’énergie. Mais, pour les stratèges du traçage, nos empreintes sont censées prédire nos comportements. Heureusement, l’identité procède d’une construction dans le temps : on peut la reconstituer, mais pas entièrement l’anticiper. Quand bien même un moteur de recherche établirait une « base de données de nos intentions » (Battelle, 2005), la part d’imprévisibilité propre à chaque individu ne pourrait lui permettre d’anticiper avec certitude nos actions.
Stock et flux
21Plasticité identitaire et traçabilité se renforcent mutuellement. Plus nous diversifions notre présence numérique, plus nous laissons d’indices, et plus il y a de traces à suivre, plus notre profil se complexifie. Le flux engrange du stock, lequel favorise à son tour une intensification du flux.
L’impensé machinique de la rémanence
22La valorisation des empreintes révèle la double nature de l’information, à la fois instable et pérenne. Pendant longtemps, on a voulu croire que les messages circulaient dans les réseaux sans sillage, et on ne s’est pas privé de dénoncer cette volatilité des contenus. De plus en plus de documents sont de fait des structures dynamiques dont les composantes se renouvellent continuellement. L’organisation des traces en hypertextes accentue la fragilité des échafaudages sémantiques ou logiques – la bifurcation devenant le pivot de toute navigation. La rotation rapide des standards et des formats rend pour finir tout système numérique en lui-même éphémère.
23Mais en même temps, la délocalisation des mémoires entraîne une inflation des couches internes de l’information, donc l’enregistrement d’un nombre toujours plus grand de traces. L’instabilité des dispositifs impose d’identifier l’état du document en même temps que son contenu, démultipliant les informations sur l’information. C’est tout le paradoxe de cette logique : elle indexe la valeur sur l’actualité (une information périmée n’en est plus une), tout en provoquant un développement sans précédent des métadonnées*.
24Du coup, l’archive voit son rôle renforcé. À la fois consignation, publication et normalisation, elle vise aussi à anticiper. Les masses de données doivent être découpées afin d’être traitées par des agents intelligents et des robots. Derrière chaque trace, se jouent des prescriptions d’usage, des modèles à formaliser, des retours d’investissement à planifier. L’élaboration et la possession d’index deviennent l’enjeu même de la compétition entre fournisseurs de services et industriels de la communication. Cet impensé de la rémanence remet profondément en question l’opposition du stock et du flux.
25Dans la société numérique, irréversibilité et turn over vont de pair : notre propre mobilité – cognitive, consommatrice ou sociale – a pour prix le port d’innombrables « bracelets d’informations ».
Recyclage et enchevêtrement
26Le rapprochement entre archive et mobilité témoigne d’un bouleversement général de la causalité : dans l’univers numérique, l’enchevêtrement des hiérarchies devient la règle. L’information, dont nous étions les émetteurs ou les récepteurs, est aujourd’hui ce qui façonne notre identité. Nos relations pragmatiques sont enchâssées dans des protocoles techniques, qui épousent eux-mêmes au plus près nos différences.
27Les métadonnées n’encadrent pas nos messages comme du métalangage. Elles les rendent disponibles pour d’autres situations de communication. Les traces que nous laissons sur les réseaux sont elles-mêmes réinjectées comme des contenus ou des dispositifs d’orientation. C’est notamment ce qui se développe autour du site Flickr, sur lequel les internautes déposent photos et vidéos. Des programmes permettent désormais d’aller automatiquement y puiser des images pour habiller son blog (Ertzscheid, 2008). L’étiquetage des photos effectué par les internautes (auteurs ou non) avec des coordonnées géographiques ou toponymiques permet par ailleurs d’automatiser la réalisation de cartes, que chacun pourra consulter et enrichir. Les empreintes des uns sont ainsi recyclées en traces des autres, sans que cela fonctionne comme emprunt ou citation. Au-delà des plateformes de partage, se multiplient des outils comme Hotmap ou TouchGraphy qui permettent d’observer ce que d’autres ont cherché, visionné ou marqué. Combinés avec les réseaux sociaux, ils font de chaque profil un nœud pour relier entre elles toutes les identités.
28Les données personnelles ne sont donc plus seulement l’envers invisible de notre présence numérique.
29Elles sont devenues l’espace où nous naviguons. Réputation, connaissance, argumentation, confiance… tout se déduit, par percolation, des résonances entre les traces : message is metatag. L’ombre numérique ne peut dans ces conditions que croître d’une façon exponentielle (Williams, 2008), quelles que soient nos vigilances et nos appréhensions. Cela ne doit pas nous dispenser de réfléchir aux moyens de préserver une capacité collective d’oubli.
30Les traces, on l’a vu, sont désormais le bien commun qui dessine les contours de la Cité. Le droit à l’effacement des données ne concerne donc pas que les individus. Il touche à ce qui nous relie, c’est-à- dire à ce qui permet de nous identifier au sein d’un nous. Au nom de la défense de la vie privée, il ne faudrait pas oblitérer cette dimension fondamentalement politique de la traçabilité.
Bibliographie
Des DOI sont automatiquement ajoutés aux références bibliographiques par Bilbo, l’outil d’annotation bibliographique d’OpenEdition. Ces références bibliographiques peuvent être téléchargées dans les formats APA, Chicago et MLA.
Format
- APA
- Chicago
- MLA
Références bibiographiques
Bateson, Gregory et al., La nouvelle communication, Paris, Seuil, 1981.
Battelle, John, The Search : How Google and Its Rivals Rewrote the Rules of Business and Transformed Our Culture, New York, 2005. (Trad. par D. Rueff, La révolution Google, Paris, Eyrolles, 2006.)
10.3917/dec.bougn.2001.01 :Bougnoux, Daniel, Introduction aux sciences de la communication, Paris, La Découverte, 1998.
10.4000/books.editionscnrs.20164 :Chardel, Pierre-Antoine (dir.), Politiques sécuritaires et surveillance numérique, Paris, CNRS Éditions, coll. « Les Essentiels d’Hermès », 2014.
Derrida, Jacques, De la grammatologie, Paris, Minuit, 1967.
Doueihi, Milad, La grande conversion numérique, Paris, Seuil, 2008.
Ertzscheid, Olivier, « Le plug-in de la redocumentarisation », affor dance.info, billet du 21 mars 2008. [En ligne]
Disponible sur : <http://affordance.typepad.com/mon_weblog>.
Pédauque, Roger T., Le document à la lumière du numérique, préface de M. Melot, Caen, C&F Éditions, 2006.
Pédauque, Roger T., La redocumentarisation du monde, Cépaduès Éditions, 2007.
Peirce, Charles Sanders, Écrits sur le signe, rassemblés traduits et commentés par G. Deledalle, Paris, Seuil, coll. « L’ordre philosophique », 1978.
10.4000/edc.428 :Salaùn, Jean-Michel, « La redocumentarisation, un défi pour les sciences de l’information », Études de Communication, no 30, Entre information et communication. Les nouveaux espaces du document, 2007, p. 13-23.
Shannon, Claude et Weaver, Warren, La Théorie mathématique de la communication, 1948 (nlle éd., Paris, Retz-CEPL, 1975).
Williams, Ian, « Digital Universe Continues to Expand », vnunet.com, 13 mars 2008. [En ligne]
Disponible sur : <http://www.v3.co.uk/v3-uk/news/1991552/digital-universe-continues-expand>, consulté le 18 mars 2015.
Notes de bas de page
1 Reprise actualisée de l’article paru p. 23-29.
2 M. Melot, préface à Roger T. Pédauque, Le Document à la lumière du numérique, Caen, C&F Éditions, 2006, p. 14.
3 Voir les travaux d’André Leroi Gourhan et leur interprétation par Bernard Stiegler dans La technique et le temps, Paris, Galilée, 3 volumes, 1994-2001.
4 Melot, op. cit., p. 13.
5 Terme proposé par Steve Mann pour décrire l’enregistrement d’une activité du point de vue de la personne qui la pratique. À ce sujet, voir l’article de Jean-Gabriel Ganascia, « De la surveillance à la sousveillance », in Chardel, 2014 (p. 119-137).
Auteur
Maître de conférences HDR en sciences de l’information et de la communication à l’université Paris Ouest Nanterre La Défense, et directrice adjointe du laboratoire Dicen-IDF, où elle pilote l’axe Traçabilité, mémoires et identités numériques. Responsable scientifique des Ateliers du dépôt légal du Web à l’Ina et d’un webinaire sur les biens communs numériques, elle a récemment coordonné avec L. Barbe et V. Schafer l’ouvrage Wikipedia, objet scientifique non identifié, paru aux Presses universitaires de Paris Ouest dans la collection « Intelligences numériques » qu’elle codirige. Ses activités de recherche sont documentées sur son site : <http://merzeau.net>.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.