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La bande dessinée numérique

p. 149-166

Note de l’éditeur

Inédit


Texte intégral

1La bande dessinée ne se développe plus seulement sur support papier. Son passage dans le monde numérique est une réalité économique, dont l’expansion témoigne de l’intérêt grandissant des lecteurs pour ce nouveau type de BD. Si en 2009 le marché de la bande dessinée s’ouvre au téléphone portable en France1, dès 1986 aux États-Unis, la BD numérique est présente sur Internet. Les premières bandes dessinées numériques sur cédéroms éditées en France ont presque quinze ans : c’est le cas d’Opération Teddy Bear (Lussan, 1996) et de La trilogie Nikopol d’Enki Bilal (1996).

2Depuis la fin des années 1990, la production d’e-manga* et d’e-manhwa s’est industrialisée au Japon et en Corée où la BD en ligne représente près d’un quart du marché global de la bande dessinée. Ses lecteurs ne la lisent pas seulement sur ordinateur, mais principalement sur téléphone mobile et sur console de jeux vidéo. En France, actuellement, les bandes dessinées numériques existent majoritairement sous forme de blogs pour lesquels un festival est organisé chaque année à Paris depuis 2005 : le Festiblog.

Comprendre le passage du papier au numérique

3Pourtant, les enjeux narratifs de ce passage de la BD du papier au numérique ont été peu défrichés. Réinventer la bande dessinée de Scott McCloud (2002) reste ainsi le seul ouvrage théorique entièrement consacré aux spécificités narratives et esthétiques de la BD numérique. Ce sont ces enjeux que nous souhaiterions interroger ici : quelles sont les différences entre le support papier et le support numérique ? Comment ces modifications matérielles agissent-elles sur le système narratif de la bande dessinée ?

4Si cet article se propose d’envisager ce qui différencie profondément le papier du numérique et l’interaction qui en découle avec le système de la bande dessinée, il est essentiel de préciser que ces déploiements narratifs doivent également être remis en perspective au sein du nouvel écosystème éditorial et des nouveaux usages dont ils dépendent.

5L’hypothèse de départ autour de laquelle se structure cette réflexion est que l’utilisation de l’ordinateur modifie profondément la BD, dont le récit, basé sur la juxtaposition spatiale d’images fixes, est intimement lié au support sur lequel il se déploie. Dès lors, comment le support numérique modifie-t-il le fonctionnement de ce système narratif tel qu’il se développe dans l’album ? Quels enjeux font peser les nouvelles technologies sur les structures narratives de la bande dessinée et dans quelle mesure peut-on peut parler d’un renouvellement de son langage ?

6Les rencontres entre récit BD et numérique recouvrent une réalité vaste et hétérogène dont le spectre s’étend des BD papier numérisées jusqu’aux BD multimédias et interactives que l’on peut trouver sur Internet ou sur PlayStation (Bergeron et Côté, 2000). Loin d’épuiser ce riche territoire, cette réflexion espère néanmoins mettre en relief les grands points d’achoppement autour desquels le système narratif de la bande dessinée se transforme, dans son passage du papier au numérique.

Espace de l’écran et impact narratif

7Lire sur un écran n’est pas lire dans un livre. La représentation électronique des textes ouvre des possibilités neuves et immenses, mais elle modifie profondément leur condition (Chartier, 1994 ; Debray, 1991, p. 209-217). En quelques années, « l’objet support d’écran a envahi les espaces les plus inattendus sous les aspects les plus divers : ordinateurs, écran-TV, moniteurs de jeux vidéo, téléphones portables, etc. » (Lellouche, 1997). Or l’écran n’est pas une surface comme les autres : c’est une surface singulière dont l’aspect change continuellement, « une surface animée, abstraite et magique, une surface amnésique qui captive par une luminescence qu’on ne connaissait pas, si différente de celle, archaïque, du luminaire traditionnel diffusant à partir d’un centre. Émettant par plaque, sa lumière électronique renouvelle en outre notre expérience la plus enracinée relative aux surfaces » selon Raphaël Lellouche2 (ibid.). L’écran d’ordinateur fait ainsi entrer la BD dans un nouveau paradigme où les règles du jeu ne sont plus les mêmes.

8Pour comprendre ces dernières, on peut se pencher sur les deux grands types de fonctionnement de l’écran, selon qu’il est utilisé comme une page, ou comme une fenêtre. On parle ainsi de pages-écrans fixes et de pages-écrans déroulantes (Zali, 1999, p. 52). Dans l’utilisation de l’écran comme une page, lorsque les pages-écrans sont de dimensions fixes et qu’elles se remplacent comme c’est le cas dans un PowerPoint par exemple, on peut constater toute une série de modifications dont les principales répercussions sont liées à la nature « amnésique3 » de l’écran.

9L’écran peut en effet être qualifié d’« amnésique » en comparaison avec le support papier dont le contenu est inscrit de manière définitive à la surface. Le papier sert de mémoire, il consigne d’une manière permanente les mots et les dessins qui sont imprimés à l’encre sur sa surface. Sur écran, en revanche, les informations transitent constamment : le message véhiculé n’adhère plus au support. L’écran ne possède donc pas de surface de conservation ni de mémoire. Par conséquent, les pages-écrans se remplacent à l’intérieur de l’écran, elles n’ont plus d’existence tangible comme les pages de l’album que l’on tourne et qui restent présentes à tout instant. Les vignettes et les planches de bande dessinée deviennent alors éphémères, en même temps que les réseaux qui s’établissent entre elles. En ce sens, les bandes dessinées perdent une de leurs qualités spécifiques sur papier, à savoir la capacité à fixer définitivement un moment du récit à un emplacement dans l’album4.

10En revanche, les vignettes et les éléments qui les composent acquièrent une spécificité inédite à la surface de l’écran : la possibilité d’apparaître et de disparaître au détour d’un clic. Autrement dit, les vignettes ne s’articulent plus seulement dans l’espace, mais également dans le temps. La temporalité latente5 de l’écran transforme ainsi le dispositif spatial des vignettes sur papier, en un dispositif mouvant, fluctuant, dont les éléments sont en réserve. Durée et mode d’affichage deviennent de nouveaux attributs narratifs des vignettes, qui se combinent à leurs caractéristiques spatiales premières pour créer un nouveau langage.

11Dans le second type d’utilisation de l’écran, comme une fenêtre où le lecteur fait défiler le contenu verticalement ou horizontalement, l’espace cadré et fini de la page papier n’existe plus6. L’espace de l’écran s’oppose alors profondément à l’espace de l’album, en devenant malléable et infini. Ce bouleversement va alors fortement modifier la manière dont les vignettes s’organisent : elles ne sont plus obligées de s’imbriquer dans le cadre restreint de la page papier comme l’a bien montré Scott McCloud (2002). En s’assouplissant, la mise en page offre désormais de nouvelles constructions narratives possibles, où les vignettes jouent de l’espace extensible qui les sépare comme d’un nouvel élément de son dispositif « spatio-topique7 ». Elles peuvent ainsi s’étaler dans l’espace extensible de l’écran. Ce qui renouvelle par conséquent les moyens de mettre en images le récit.

12Dans ce nouvel espace malléable, la BD ne bénéficie cependant plus des qualités structurantes et rythmiques que lui confère la succession des pages de l’album dont l’espace plié, feuilleté, symétrique et géométrique scande en filigrane les récits. Chaque page agit comme un métronome discret dans la suite des évènements. Or, dans l’espace extensible à volonté de l’écran, il n’existe aucune normalisation du temps, aucune structuration régulière, puissante et sous-jacente à la bande dessinée qui s’y déroule8.

Multimédia et interactivité

13La nature hypermédiatique des environnements numériques apparaît comme le second moteur principal du renouvellement narratif de la BD. De manière plus profonde que l’espace de l’écran, les possibilités multimédias et interactives posent la question d’un changement de nature. Y a-t-il émergence d’un nouveau média, celui de la bande dessinée numérique ?

14Concernant les spécificités multimédias, nous en venons à constater qu’il existe une multitude d’articulations possibles entre les images fixes de BD venues du papier et les effets cinétiques et sonores offerts par le numérique. La BD numérique offre ainsi un paysage particulièrement hétérogène, où l’une des difficultés sera de construire des récits où images, textes, mouvements, sons et gestes créeront une immersion diégétique9 pertinente.

15À l’heure actuelle, peu de bandes dessinées multimédias sont encore développées dans ce sens, mais on peut toutefois pointer la complexité de faire cohabiter mouvements et sons réels, dans un système narratif où images fixes et textes les suggèrent, sans qu’aucune temporalité ne s’écoule réellement. L’introduction de mouvement réel se retrouve par exemple dans L’oreille coupée sur Internet ou dans le cédérom Opération Teddy Bear, où les personnages et les objets s’animent ponctuellement et généralement de manière saccadée. On peut observer que ce type de mouvement a tendance à discréditer le fonctionnement original de la BD tel qu’il est conservé ici, où le temps est représenté de manière spatiale par la succession d’images fixes. En ce sens, le mouvement réel entre en conflit avec la force d’évocation des images de bande dessinée, dont elle rend visible la nature statique.

16Les effets sonores risquent également de revêtir un aspect illustratif ou « gadget » lorsque les dialogues sont dits et écrits dans les bulles. D’autres expérimentations ont toutefois trouvé un équilibre, une piste dans ce nouveau continent à explorer. C’est le cas de Metal Gear Solid10 développé par Hideo Kojima, où le mouvement n’est pas directement présent dans les planches, mais suggéré par une lecture cinématique et automatique des vignettes. Les dialogues conservent une forme écrite, et sont accompagnés de musique et de bruitages réels.

17Dans un univers convergent et plurimédiatique comme celui du numérique, la question des limites de la bande dessinée numérique semble difficile à poser, et peut-être encore précoce. Elle peut néanmoins être envisagée à partir des intentions de l’auteur, qui revendique son œuvre comme appartenant ou non au champ de la BD numérique. Les contours de ce nouveau média apparaissent encore flous, dans l’environnement plus vaste des récits de fictions hypermédiatiques auquel il appartient. En l’état actuel de production des œuvres et des recherches menées, l’intérêt se focalise davantage sur la nouvelle poétique de la bande dessinée multimédia et multisémiotique, où images, textes, effets cinétiques et sonores et gestes s’articulent de manière inédite. Enfin, les possibilités interactives du numérique redessinent les contours de la BD, et plus largement ceux du récit. Le lecteur peut désormais parcourir des œuvres hypertextuelles où le récit devient multilinéaire et jouable.

L’interactivité : nouvelles possibilités

18L’interactivité offre deux grandes possibilités : l’hypertextualité et les déplacements délinéarisés dans le récit ; la jouabilité et l’exploration des planches et des vignettes dans un mode expérientiel. Chacune de ces deux interactivités peut s’articuler de manière périphérique à la structure du récit, ou au cœur de son architecture.

19Dans une interactivité de « surface » ou « exploratoire », le récit n’est pas modifié directement : nous activons des zones interactives nous permettant de progresser dans notre lecture, ou bien des liens hypertextuels nous renvoyant à des informations complémentaires au récit principal. Si la recherche des zones interactives dans la planche s’avère parfois fastidieuse et ne favorise pas notre immersion fictionnelle, l’interactivité exploratoire est susceptible de densifier le récit BD, dès lors que des liens hypertextuels nous permettent d’accéder à des informations enrichissant l’histoire narrée11.

20Dans une interactivité structurelle, la progression hypertextuelle s’effectue à l’intérieur du récit et non plus dans une base de données connexe ; les séquences de jeu peuvent également faire partie du récit. À ce niveau d’articulation, les spécificités de l’interactivité remettent en perspective le fonctionnement même du récit. En effet, les environnements hypertextuels fragmentés, décentrés et multilinéaires s’opposent aux concepts de mise en intrigue12, de tension téléologique et de clôture du récit13. De même, la jouabilité semble également s’opposer à la narrativité14 par sa dimension performative.

21Au terme de nos investigations, nous avons pu constater que les environnements hypermédiatiques transforment la narrativité par leurs spécificités spatiales et d’agencement. Toutefois, la mise en intrigue dont Paul Ricœur (1983) a montré l’importance, reste nécessaire pour maintenir les conditions de notre appropriation du récit dans les univers numériques toujours/déjà déconstruits (voir Bourassa, 2008).

22Deux cas réunissent notamment ces conditions : celui des différentes trajectoires dans un seul récit où la multilinéarité intradiégétique vient enrichir la structure du récit, d’une part ; celui des différentes trajectoires dans une constellation de récits autonomes, où une métaphore spatiale unifierait les différents récits pour assurer la continuité narrative dans un monde graphique homogène, d’autre part. Dans ce dernier cas par exemple, la tradition orale du récit suggère une manière tout à fait pertinente d’envisager ces nouveaux récits hypertextuels intégrant « de manière locale des segments de narration linéaire par l’intermédiaire d’un narrateur verbal, sous forme de micro-récit » (ibid., p. 107). Dans cette perspective, le corpus des Mille et une nuits constitue une configuration réseautique parfaitement adéquate pour les récits hypermédiatiques. Son mode narratif à forme ouverte n’entre en effet pas en conflit avec le mode de la base de données.

23Concernant la jouabilité, il est possible de combiner un mode récit classique avec un mode jeu dans une même œuvre afin de réunir narrativité et jouabilité dans deux espaces métaphoriques distincts, comme le propose Hideo Kojima dans Metal Gear Solid. Certaines vignettes offrent en effet la possibilité au lecteur-joueur de basculer vers un mode jeu, afin de récolter des informations sur l’intrigue. Toutefois, la progression dans le récit ainsi que sa compréhension ne sont jamais contingentées par ce mode jouable.

Tableau récapitulatif

Espace de l’écran

Multimédia

Interactivité

Modifications du récit BD

– Affichage éphémère des vignettes et de leurs éléments.
– Intangibilité des réseaux de sens entre vignettes éloignées.
– Mise en « espace » extensible et malléable des vignettes.

– Renouvellement des rapports textes-images, par les effets cinétiques, sonores et gestuels.
– Nouvelle poétique de la BD numérique.

– Multilinéarité du récit.
– Progression hypertextuelle.
– Jouabilité du récit.
– Dimension expérientielle de la lecture-action.
– Renouvellement de la narrativité.

Conclusion

24Au terme de nos recherches, la BD numérique apparaît comme un nouveau média en émergence dans le vaste champ des fictions hypermédiatiques. Relayé par l’écran, le système spatial de la BD papier devient mobile et temporel, cinétique et sonore à travers les moyens multimédias, et se transforme en espace multilinéaire et jouable au contact de l’interactivité.

25Le support numérique amène donc un usage inédit de la BD qui repositionne la bande dessinée papier sans la remplacer. De nombreuses passerelles connectent aujourd’hui les œuvres numériques et celles sur papier, permettant des allers-retours fructueux entre les deux médias. La BD papier n’en perd pas pour autant son attrait auprès du public.

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Bibliographie

Références bibliographiques

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Bergeron, Jean-François et Côté, André-Philippe, L’oreille coupée, 2000. En ligne sur : http://lisgar.net/zamor/Fran11/oc.html

Bilal, Enki, La trilogie Nikopol. La foire aux immortels. La femme piège. Froid équateur, 3 CD-Rom, Paris, Métal Hurlant productions/Les Humanoïdes Associés, 1996.

Bourassa, Renée, La fiction hypermédiatique : une analyse inter-médiale des relations entre la fiction, la narrativité et les médias numériques, thèse de doctorat en sémiologie, Montréal, Université du Québec à Montréal, juin 2008.

Chartier, Roger, « Du codex à l’écran : les trajectoires de l’écrit », Solaris, no 1, Pour une nouvelle économie du savoir, 1994.

Debray, Régis, Cours de médiologie générale, Paris, Gallimard, 1991.

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Souriau, Étienne et Souriau, Anne (dir.), Vocabulaire d’esthétique, Paris, Presses universitaires de France, 2004.

Zali, Anne (dir.), L’aventure des écritures : la page, Paris, Bibliothèque nationale de France, 1999.

Notes de bas de page

1 Les premières applications françaises pour lire des bandes dessinées sur smartphone sont encore récentes, puisqu’elles ont été lancées par Aquafadas en mai 2009. Avec un focus particulier sur la plateforme Mac, Aquafadas a été créée pour développer et promouvoir des solutions logicielles pour le monde de l’image et de la vidéo.

2 La civilisation de l’écran ne surgit cependant pas du néant. Pour Raphaël Lellouche, « la généralisation de l’écran apparaît comme le lieu de rassemblement de médias initialement séparés. »

3 Pour plus de détails, voir Lellouche, 1997.

4 Pour une utilisation étonnante des pages-écrans fixes, voir McCloud, 2003-2004.

5 L’écran possède une temporalité latente qui fonde sa nature « amnésique » et fluide. En effet, l’affichage écranique joue sur la temporalité propre aux médias audiovisuels, à l’informatique et aux télécommunications. L’écran assigne ainsi une durée aux éléments qui s’affichent à sa surface.

6 Voir McCloud, 2000 et la bande dessinée numérique de demian5, 2001.

7 Le terme « spatio-topie » a été forgé par Thierry Groensteen pour « réunir, tout en les maintenant distincts, le concept d’espace et celui de lieu » (1999, p. 26). Le dispositif spatio-topique se compose de différents espaces qui forment un emboîtement gigogne : la bulle est contenue dans la vignette, la vignette est contenue dans le strip*, le strip est lui-même contenu dans la planche et la planche fait partie de l’espace feuilleté de l’album.

8 Pour plus de détails sur le pli livresque, voir Melot (2006, p. 43-48).

9 Selon Étienne Souriau, « la diégèse est l’univers de l’œuvre, le monde posé par une œuvre d’art qui en représente une partie » (2004, p. 581).

10 Metal Gear Solid est un digital graphic novel* réalisé par Hideo Kojima et édité par Konami en 1998 pour PlayStation.

11 C’est le cas d’Opération Teddy Bear d’Edouard Lussan, dont le fonctionnement interactif a été analysé par Pierre Barboza (2006, p. 99-121).

12 La mise en intrigue est loin de se résumer à une succession d’évènements juxtaposés les uns après les autres. Paul Ricœur a d’ailleurs bien relevé dans quelle mesure celle-ci est supposée opérer un changement qualitatif : « Un récit n’est pas une succession d’événements. Pour ce faire, il faut que cette succession se transforme en histoire ; c’est-à-dire que les évènements qui la composent prennent sens de leur rapport à l’ensemble et plus seulement de leur rapport à l’entourage immédiat. Nous dirions que les relations horizontales de contiguïté doivent être doublées de relations verticales d’intégration. » (Ricœur, 1983, p. 55).

13 La mise en intrigue prend tout son sens du fait de l’existence de la clôture du récit, génératrice d’une tension qui pointe vers la fin du récit, une tension téléologique. C’est le désir de la fin qui agit comme le moteur du récit.

14 « Notion ambiguë, souvent assimilée au récit, la narrativité renvoie à l’acte de raconter. Elle se distingue du récit, constituant la dimension narrative qui le caractérise dans son état le plus abstrait. » (Audet, 2007).

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