Les ultimes combats (1871-1880)
p. 325-350
Texte intégral
1Au lendemain de la Commune, le paysage politique est complexe et la destinée de Carnot aussi incertaine que le futur gouvernement. Mais l’écrasement de révolution parisienne a un effet inattendu : il montre la capacité d’une République modérée à préserver, fut-ce aux prix du sang, l’ordre. La fracture durable qu’il provoque entre les ouvriers parisiens et les modérés rassure ceux qui sont effrayés par les « classes dangereuses », et la République provisoire pourrait séduire les campagnes et les bourgeois. Tout n’est peut-être pas perdu pour les démocrates modérés et les idéaux de Carnot.
2De plus, à la différence de 1848 ou 1851, la province ne semble plus disposée à suivre les monarchistes ou quelque aventurier à poigne car le spectre rouge ne menace plus. La peur sociale reste circonscrite aux villes et ils sont nombreux à penser qu’un régime stable et conservateur, même républicain, pourrait convenir. En attendant, l’heure de l’insubmersible Thiers, partisan d’une République très conservatrice a sonné.
L’heure de la respectabilité
3Après l’épisode du siège de Paris et de la Commune, le député de Seine-et-Oise déménage une nouvelle fois et s’installe 89 rue Mac-Mahon. Mais il passe de plus en plus de temps à Presles où il prend des responsabilités en tant qu’élu local. Il ne renie cependant pas ses engagements nationaux et reste un exemple de républicanisme modéré militant. « Vous allez bientôt reprendre les travaux législatifs. Votre retour à Paris consolidera la République, qui triomphera de ses ennemis, malgré leur incessante hostilité1 » lui écrit son compère Garnier-Pagès à la veille de la rentrée parlementaire de 1872.
4De son côté, Thiers, âgé de 73 ans, tient enfin les rênes d’un pouvoir qu’il contrôle d’autant mieux que ses adversaires lui laissent le champ libre. Les socialistes sont défaits depuis la Commune et les républicains partisans de la guerre comme Gambetta ont perdu les élections de février. Ils sont deux fois moins nombreux que les 400 députés monarchistes. Quant à Carnot, il soutient du bout des lèvres son ancien collègue de sociétés car il dirige une République, même provisoire, et a maintenu l’ordre. Thiers, qui entend apparaître comme l’homme de la paix devient, par la loi Rivet du 31 août 1871, « président de la République ». Mais le régime reste fragile, d’autant qu’il ne s’appuie encore sur aucune constitution. Les monarchistes et les bonapartistes, qui pensent qu’il va peu durer, se préparent au retour du roi, à l’unique condition que ses partisans s’accordent.
5En attendant, la division entre les orléanistes plus progressistes et les légitimistes plus rétrogrades2 permet à l’habile Thiers de consolider petit à petit une République conservatrice éloignée des idéaux de Carnot, mais une République quand même. Surtout, face au danger de restauration monarchique, les républicains les plus ardents comme Gambetta suivent finalement la voie tracée par Carnot : la modération et le compromis pour stabiliser le régime avant de le faire évoluer. Le Président provisoire accepte avec d’autant plus d’empressement ce soutien inattendu que les élections de juillet sont un triomphe pour les républicains qui obtiennent 100 sièges contre 12 aux monarchistes. Ils apparaissent comme la seule force d’avenir capable de stabiliser le régime. Pour le consolider, Thiers veut aussi faire libérer plus vite le pays d’une occupation qui le ruine. Carnot, que la guerre a transformé en ardent patriote, soutient cette stratégie avec une arrière-pensée : une fois la République conservatrice stabilisée, il sera toujours temps de l’améliorer.
6Surtout, ce légaliste averti par l’histoire récente n’entend pas braquer les Français contre le pouvoir par excès de radicalité. L’expérience de la Commune devient pour lui un contre-exemple absolu. Lors du rétablissement de la colonne Vendôme en 1873, il la fustige encore : « La destruction d’un monument national [fut] un crime aux yeux de la loi et de la morale3 ! » pour mieux vanter la modération et le compromis. Cette position gagne même du terrain chez ses amis pour qui la révolution parisienne a fait plus de mal que de bien : « Voilà l’effet de l’exagération, du radicalisme : il repousse, il n’attire pas. Toute politique sèche, brutale, cassante est funeste à notre cause4. » Carnot pèse donc de tout son poids pour mobiliser les Français et hâter le départ des Allemands, encouragé par Jules Simon : « J’approuve sans réserve vos efforts pour faire libérer le territoire […] et je regrette qu’aucun acte public ne témoigne de vos louables efforts5. »
7Mais libérer le territoire coûte cher : cinq milliards de francs or à verser au nouvel Empire allemand. Carnot songe évidemment à l’impôt sur le revenu, « égalitaire et républicain » dit-il, ce que le libéral Thiers rejette. Le chef de l’État préfère l’emprunt, en lance deux, dont le second de 3,5 milliards est couvert treize fois. Devant ce succès, la France est évacuée par anticipation dès septembre 1871, sauf les « provinces perdues » d’Alsace-Moselle. Carnot n’a cessé de soutenir les partisans de la paix en souscrivant aux deux emprunts et en défendant l’action présidentielle pour libérer le pays. Ses amis comme Garnier-Pagès le félicitent même de ses discours « pleins de talent, de patriotisme et de courage6 ».
8Au début de 1872, si la République semble avoir gagné un répit grâce à Thiers, l’opposition relève la tête. Les monarchistes et les bonapartistes ne peuvent admettre que Président déclare : « La République existe, elle est le gouvernement légal du pays, vouloir autre chose serait une nouvelle révolution et la pire de toutes7. » En outre, chaque élection partielle qui porte une nouvelle vague républicaine à l’Assemblée, pousse les opposants monarchistes à s’unir aux bonapartistes et aux ultramontains pour faire pression sur le pouvoir. Ils poussent tant le régime vers la réaction que Thiers finit par être renversé le 23 mai 1873. Dès le lendemain, l’Assemblée lui trouve un successeur en la personne de Mac-Mahon. De son côté, Carnot n’oublie pas ce que la République, même conservatrice, doit à Thiers. Il écrit à Jules Simon :
« Pendant les derniers jours de notre session législative, j’ai entendu plusieurs de nos collègues exprimer le regret que nous n’ayons pas donné à M. Thiers un témoignage de reconnaissance pour les efforts patriotiques qui ont abouti à la libération du territoire. […] Faisons frapper une médaille en l’honneur de ce grand acte national, et que le premier exemplaire soit attribué à M. Thiers. Rien là qui sente la flatterie personnelle, c’est un hommage cent fois mérité. Toutes les gauches s’y rallieront8. »
9C’est l’heure de la revanche des monarchistes contre un régime à présent dirigée par le général Mac-Mahon. Ce duc de Magenta, héros de la guerre de Crimée, des campagnes d’Italie et des guerres coloniales algériennes, conservateur voire réactionnaire, monarchiste, catholique intransigeant et « fusilleur de la Commune » (André Gillois) exècre la République qu’il dirige. Sous l’égide du duc de Broglie, contre lequel Carnot a voté le 24 mai, le programme de « l’Ordre moral » doit préparer le retour de la Monarchie et renouer l’alliance du trône et de l’autel. La chasse aux républicains est rouverte et Carnot croit revivre les premières années du Second Empire. Les libertés et les journaux sont suspendus, les enterrements civils sont surveillés, de nombreux fonctionnaires, dont des instituteurs, sont révoqués et les maires nommés par le pouvoir9 retirent les bustes de Marianne des hôtels de ville. Pendant un court laps de temps, Hippolyte n’a même plus de mandat avant d’être réélu en Seine-et-Oise dans le cadre d’un vaste succès républicain en octobre et novembre 1873.
10C’est donc de Presles et de la rue Mac-Mahon qu’il assiste à cette tentative de restauration qui l’effraie autant qu’elle le galvanise. Il continue à recevoir des opposants et retrouve l’atmosphère des débuts du Second Empire pour aider les instituteurs. Il défend les enseignants révoqués comme celui de Saclas en écrivant au ministère de l’Intérieur. Il dénonce sa « disgrâce […] en tant que victime d’une vilaine intrigue » qui pousse le ministère à l’envoyer « dans une petite école sans moyen10 ». Comme au temps de la République d’après Juin, il reçoit des pétitions d’enseignants protestant contre la loi qui rend la nomination des instituteurs aux conseils municipaux. Si elles proviennent surtout de la région (Corbeil, Limours, Marmer, Pontoise, Gonesse), elles arrivent aussi d’Astafort ou de Lille. Les enseignants ont bien compris ce qui se joue. « Ce projet détruirait infailliblement l’enseignement public », disent ceux de Pontoise, car « l’instituteur doit être un homme public et non un homme communal11 » confirment ceux de Corbeil. D’autres instituteurs ou enseignants du Secondaire lui envoient des projets sur l’école, comme ceux de Chavenceaux ou d’Étampes.
11Sa posture de vieux sage, puisqu’il fête ses 71 ans en mars 1872, en fait un notable républicain régulièrement consulté dans son département. Les habitants des alentours de Presles le sollicitent sur chaque sujet local. Le Comité de Milly le presse d’être candidat aux élections cantonales : « Avec votre candidature, vous assureriez une grande victoire démocratique pour notre canton. C’est en déposant dans l’urne des noms estimés, dont la signification démocratique ne puisse être douteuse que nous parviendrons à faire triompher notre cause12. » Il est invité partout, à des comices agricoles, à un banquet en l’honneur de Hoche ou à un bal pour l’école et les pauvres à Saint-Germain-en-Laye en 1873. On le convie à des remises de prix (La Ferté-Alais, Milly, Corbeil, Étampes), y compris dans les écoles religieuses comme celle de Mantes-la-Jolie le 13 août 1873. Sa renommée reste intacte : en avril 1874, le Cercle républicain de Toulouse veut en faire un membre honoraire au nom « du puissant concours qui s’attache à l’autorité de votre nom13 ». Carnot demande quelques renseignements avant d’accepter, tout en reprenant contact avec les francs-maçons14. On lui demande même d’arbitrer le conflit entre les écoles privées et publiques15 de Milly-la-Forêt en décembre 1875.
12C’est toujours l’éducation qui le préoccupe. Il reste en contact épistolaire avec Madame Pape-Carpantier qui lui demande conseils et recommandations après sa destitution qui l’a obligée à s’exiler en Belgique. Il publie dans le bulletin de l’Association pour la diffusion et la réforme de l’enseignement en France de 1873 un projet « d’institution secondaire pour jeunes filles ». Il intervient dans des projets pédagogiques novateurs comme l’École manufacturière de Sainte-Geneviève-des-bois fondée au lendemain de la guerre. Cette « œuvre philanthropique et morale16 » sollicite son parrainage et lui envoie son programme. Il est fondé sur l’éducation morale, certes religieuse, mais aussi sur un enseignement primaire éclectique. L’accent y est mis sur les exercices gymniques de préparation militaire pour préparer à la Revanche. S’y s’ajoutent l’apprentissage professionnel et l’enseignement de l’allemand pour les enfants de 10 à 14 ans. Carnot s’enthousiasme et soutient financièrement ce projet qui entend « former une nouvelle génération après ces terribles épreuves qui comprendra ses droits et ses devoirs patriotiques17 ».
13L’ancien ministre renoue aussi avec des sociétés militant pour l’école comme la Société d’instruction républicaine de Jules Barni18 dont il est adhérent depuis sa création en 1870, et qui bénéficie d’un fort crédit. La société est divisée en comités autonomes qui recrutent des « missionnaires laïques ». Elle entend fonder des bibliothèques et organise des conférences « pour faire connaître les avantages du gouvernement républicain […] et éclairer les citoyens sur leurs droits et devoirs ». Elle diffuse surtout des brochures « d’instruction républicaine », pour la modique somme de 15 et 5 centimes. Carnot écrit dans plusieurs de ses revues et elle regroupe une grande partie des républicains partisans d’une instruction populaire et civique. On y trouve les jeunes Spuller, compagnon de Gambetta et victime du « procès des Treize », Clamageran ou Poupin19 aux côtés des « vieilles barbes » comme Carnot, Garnier-Pagès ou Schœlcher. En 1874, alors que les bonapartistes redressent la tête20, Carnot publie dans la collection « Instruction républicaine » un opuscule sur Lazare Hoche et, surtout, un autre intitulé : Ce que serait un nouvel Empire. Le texte place en exergue l’acte de déchéance de la dynastie impériale voté par l’Assemblée en 1851, et trace un parallèle entre les dictatures des deux Bonaparte, toujours au détriment de « Napoléon le petit ».
« Les deux Empires qui ont dominé la France sont une forme particulière de césarisme […] Le neveu qui a cent fois dépassé son oncle en extravagances ; les désastres qu’il a attiré sur notre pays sont bien plus terribles. […] La première partie du régime fut une orgie de dictature, la seconde un relâchement […], signe de l’épuisement après une longue lutte contre l’esprit de vérité et de liberté. […] Tout atteste que les bonapartistes préparent un nouveau coup d’État pour restaurer la dictature. […] L’Empire devra flatter les passions populaires, hâter l’heure d’une revanche sanglante. Il ne peut pas, comme la République […], attendre cette revanche […] d’une forte éducation militaire, d’un progrès de la raison publique. […] S’il revenait, il serait pire que par le passé, nouvelles aventures, nouvelles catastrophes21. »
14Pour Carnot, puisque seule l’éducation empêchera ces dérives, il est urgent d’agir en faveur de la lecture. Il devient président honoraire de la Société libre de la bibliothèque de la Ferté-Alais et, prêchant par l’exemple, invite des parlementaires à visiter la bibliothèque de cette petite bourgade de 900 habitants. Il s’inspire des modèles alsaciens, prussiens et suisses où « les bibliothèques abondent, soutenues par des sociétés privées ». Car, si la « lecture est l’outil nécessaire de la première instruction, elle est aussi un levier de l’éducation populaire, elle donne un pouvoir pareil à celui qu’on attribue aux magiciens. […] C’est par la lecture que nous allumerons le flambeau de notre intelligence22 ». Carnot participe ensuite à l’ouverture d’autres établissements de la région comme à de Rambouillet en février 1875 et répond à l’invitation de la Société de la bibliothèque populaire de Saint-Germain-en-Laye. Il en profite pour préciser le rôle de quelques matières scolaires qui lui tiennent à cœur :
« Le dessin qui accoutume l’œil à la cause juste […], l’écriture conservatrice des sentiments […], le chant langage de l’âme […], l’apprentissage scientifique […] qui accompagne le perfectionnement de l’ouvrier […] qui s’élève ainsi en dignité morale […]. L’histoire, livre d’éducation par excellence, tableau des efforts […] et des souffrances de l’homme dans sa morale ascendante sur la barbarie. […] L’histoire apprend à aimer le juste et le vrai, à éviter le mal. […] Étudions l’histoire, surtout notre histoire nationale : en voyant la France si ardente à propager les idéaux de Liberté, nous en apprécions sa part de travail dans l’œuvre générale de civilisation23. »
15Ces projets conviennent parfaitement au ministre de l’Instruction publique Jules Simon24 qui tente alors, malgré tout, d’impulser une politique scolaire équilibrée et démocratique. Ainsi, si le ministre sanctionne les instituteurs libres de Lyon au nom de l’enseignement public, il rétablit le catéchisme dans les écoles de Paris. Il avait même déposé à l’Assemblée le 15 décembre 1871 un projet de loi, soutenu par une pétition de La Ligue de l’enseignement, préconisant l’obligation et la gratuité qui recueillit plus d’un million de signatures. Mais, comme nous l’avons dit, la démission de Thiers, victime d’une assemblée réactionnaire et légitimiste, remet en cause ces propositions. Le ministre Jules Simon tente alors de résister quelque temps.
Ordre moral, mémoire et incertitudes
16Mac-Mahon se place dans la perspective d’une restauration monarchique : « Avec l’aide de Dieu, le dévouement de notre armée, qui sera toujours l’esclave de la loi, avec l’appui de tous les honnêtes gens, nous continuerons l’œuvre de la libération de notre territoire et le rétablissement de l’ordre moral de notre pays. Nous maintiendrons la paix intérieure et les principes sur lesquels repose notre société25. » Le gouvernement conduit donc une politique conservatrice, antirépublicaine et cléricale qui entend lutter contre « le spectre rouge » pour canaliser le suffrage universel sans le remettre en cause. Il envisage de le rendre indirect pour les élections législatives et présidentielles et de créer un Sénat conservateur. Le pouvoir épure l’administration, destitue une vingtaine de préfets républicains, renvoie les maires républicains et nomme leurs successeurs. Et il renoue avec l’Église, dans un climat d’expiation, de missions, de pèlerinages et de culte marial. Enfin, la presse républicaine est attaquée au nom de textes remontant à l’état de siège, un collaborateur de Gambetta est même condamné à mort par contumace, et la commémoration du 14 Juillet est interdite.
17Jamais le retour de la monarchie n’a semblé aussi proche et les anciens privilèges sont remis à l’honneur. Une loi de juillet 1873 rétablit ainsi la Légion d’honneur supprimée par le gouvernement de Défense nationale. Le sang de Carnot ne fait qu’un tour : « D’une manière générale, je n’aime pas ces distinctions qui établissent des stratifications entre les citoyens. Si on les considère comme des moyens d’exciter l’émulation, il y a du pour et du contre. […] Il ne faudrait la donner que pour des actes ou une vie exceptionnelle26. »
18Symboliquement, le gouvernement veut rendre les enterrements civils à l’Eglise, de crainte qu’ils ne dégénèrent en manifestations républicaines comme pour Victor Noir. Il interdit donc « les inhumations faites sans la participation d’un culte reconnu par la loi » après sept heures du matin. Carnot vote aussitôt contre cette atteinte à la laïcité et explique habilement qu’il aurait voté le texte s’il avait condamné le maire de Lyon qui empêchait les enterrements civils au mépris de la loi. Le service militaire voté fin 1872 ne le satisfait pas non plus. Carnot l’a certes soutenu, mais le trouve injuste. Il plaide toujours pour un service obligatoire, personnel et sans aucune exception car « c’est dans les exercices militaires que se forgera notre patriotisme ». Il refuse donc le tirage au sort et les exemptions prévues par la nouvelle loi, notamment celle des enseignants : « L’instruction militaire est obligatoire, nul ne doit s’en dispenser pour le jour du péril national. Les instituteurs laïques et congréganistes ayant pour mission de préparer la première éducation militaire des enfants, le devoir d’instruire au service militaire est pour eux plus important que tous les autres27. » Il annonce la position des républicains radicaux qui veulent généraliser le service militaire à tous, religieux compris.
19Dans ce climat réactionnaire, l’ancien ministre a peu de prise sur la politique scolaire qui se met en place sous l’inspiration de Mgr Dupanloup. Depuis l’automne 1872, le plan Simon est balayé. Les libéraux, alliés aux catholiques, votent même la liberté de l’enseignement supérieur réclamée depuis le début du siècle par l’Église. Les jurys universitaires doivent s’ouvrir à des enseignants des universités privées. Et l’attaque cléricale et monarchiste ne se limite pas au Supérieur : la majorité caresse l’espoir de se réapproprier totalement l’enseignement primaire. Elle envisage ainsi d’élargir le système de gratuité par un système de « bons d’école » remis aux parents et valables aussi bien dans les écoles libres que dans les écoles privées, projet trop contraire à la laïcité et finalement annulé. L’un des porteurs du texte est Jean Ernoul qui rédige également un projet de loi sur l’Instruction primaire présenté à l’Assemblée le 3 juillet 1872.
20Il s’inspire des conclusions d’une « Commission chargé d’examiner le projet de loi sur l’Instruction primaire de Simon » où siège Carnot aux côtés de Mgr Dupanloup et d’autres cléricaux. Ce texte signe l’arrêt de mort de la loi Simon : sur les quinze membres de la Commission, treize se prononcent contre son projet, Carnot seul hésite et « fait le choix plus approché du projet de loi du ministre Simon ». Rejetant toute idée de gratuité totale, le texte a de quoi révolter l’ancien ministre de 1848 : « Oui, l’enseignement doit être gratuit, mais relativement gratuit », car « la gratuité complète est loin d’avoir produit les effets merveilleux que lui attribue la théorie […] et le niveau s’abaisse souvent par l’introduction du principe de gratuité absolue ». Il repousse aussi l’obligation, « incompatible chez nous avec la liberté de conscience sincèrement et honnêtement pratiquée », au nom du refus de l’intervention de « la police d’État dans les rapports du père et de l’enfant […] dans les familles ». Il réintroduit même « l’instruction religieuse et morale » dans les programmes, car « l’éducation ne se conçoit pas sans la religion et la morale28 ». Atterré, Carnot collecte les protestations de toutes les sociétés pour l’instruction de France. Puis Ernoul rejette une proposition de Charton qui désirait créer des « conférences publiques d’instituteurs » inspirées de celles de 1848, au motif qu’elles ne relèvent pas de la loi.
21Face à une telle agression, Carnot soutient Simon et tente de freiner cette cléricalisation de l’école. Il écrit en mai 1874 au ministre de l’Intérieur Fortou, éphémère ministre de l’Instruction sous Thiers29, pour qu’il lève l’interdiction de l’Union libre et démocratique de Seine-et-Oise, sans grand succès.
22La situation se complique pour l’ancien ministre de 1848 qui se replie, contraint et forcé, sur ses activités privées et sur l’entretien de sa magnifique roseraie. Il se pique d’horticulture, adhère à la Société d’horticulture de l’arrondissement d’Étampes en 1875 et écrit quelques traités sur le sujet. Il se fait surtout mémorialiste de la guerre contre les Prussiens :
« Ce sont les hommes qui en 1870 ont courageusement soutenu le premier choc des Prussiens marchant sur Paris. La plupart ont payé de leur vie cette résistance patriotique dans les cantons d’Étampes et de Milly. Qu’ils partagent notre récompense avec les personnages célèbres [les héros de l’histoire] évoqués tout à l’heure. Un bon citoyen vaut un grand homme. […] Le département de Seine-et-Oise a eu le triste privilège de servir de quartier général aux Prussiens ; il a supporté le luxe d’occupations étrangères et nulle part peut-être elle n’a laissé des impressions plus détestables30. »
23Cela lui vaut d’être invité à de nombreuses commémorations du souvenir de ce conflit qui a tant marqué la région et la nation. Dans un pays en pleine fièvre nationaliste, un véritable culte aux morts de la guerre de 1870 et à la Revanche se met en place. Les premiers monuments sont ainsi sortis de terre moins d’un an après les combats31 ! Et, depuis la loi 1873 relative à la construction et à l’aménagement des sépultures32 qui codifie et finance ces pratiques, les constructions s’accélèrent et deviennent des cérémonies patriotiques mobilisatrices. Les monuments commémoratifs fleurissent autour des champs de bataille pour honorer les régiments et les « morts pour la France ». Les municipalités, poussées par des Comités locaux (ou du souvenir) de la guerre (ou des combats) de 1870, ancêtres locaux du Souvenir français33, sont souvent à l’origine des souscriptions destinées à financer ces édifices et à organiser des fêtes d’inaugurations exemplaires.
24L’un de ces premiers monuments est celui de Dannemois, petite commune à une dizaine de kilomètres à l’est de Presles où eurent lieu de violents combats34 le 18 septembre 1870. Le Comité d’inauguration du monument (la mairie, l’Église, les écoles, le sous-préfet, les Anciens Combattants), choisit un ouvrage assez simple, orné de quatre médaillons dédié aux « francs-tireurs morts pour la patrie », et décide d’inviter ce Carnot, fils de « l’Organisateur de la victoire » qui parle si bien de l’héroïsme des soldats.
25En ce 15 septembre 1872, l’affluence est remarquable (2 000 personnes) et la cérémonie est une sorte de résumé de toutes les fêtes républicaines à venir35. Rien ne manque, ni le cortège officiel, ni les sociétés musicales et orphéoniques de Milly, ni les élèves des écoles et les membres de la Société patriotique qui font des exercices gymniques, ni les Anciens combattants, dont un de Reichshoffen, décoré de la Légion d’honneur. La place est pavoisée et les enfants que Carnot qualifie de « pupilles de la République » chantent Clairons et tambours avant les discours d’un ancien franc-tireur, du sous-préfet et du maire, tous interrompus par les cris de « vive la République » et « vivent les francs-tireurs ».
26Puis Carnot prend la parole pour vanter l’héroïsme des soldats, évoquer l’avenir qui passe par la Revanche que l’école doit populariser :
« Honte aux ennemis barbares dont la colère retombait sur les populations inoffensives […] et vive la guerre des partisans […], ces vaillants citoyens qui ont couru volontairement, irrégulièrement à la frontière menacée […]. Honorons ceux de nos frères [...] qui ont quitté leurs foyers pour prendre les armes. […] Que des monuments comme celui-ci leur soient élevés ! Gardons-nous de décourager ceux qui voudraient les imiter […] Il faut que chaque Français devienne au besoin un défenseur de la patrie, comme le seront bientôt ces jeunes pupilles de la République36. »
27La fanfare clôt la journée par le fameux Alsace-Lorraine et Claire Carnot improvise une quête au bénéfice des victimes et orphelins de guerre, avant une ultime Marseillaise reprise en cœur par l’assistance. À partir de cet instant, Carnot est systématiquement invité aux inaugurations de monuments de 1870 de la région. Étampes l’invite le 24 janvier 1874 pour en inaugurer un dédié aux 49 soldats « morts pour la France » dont il avait été l’un des premiers donateurs qui offrit 100 francs. On le retrouve à Étrechy, à Rambouillet, à Chevannes, à Pontoise, à Sainte-Geneviève. Il assiste à une messe en « l’honneur de la garde nationale et des soldats morts pour la France » à Rueil-Buzenval le 19 janvier 1872. Les discours s’enchaînent, comme les invitations qui rassemblent les républicains à Montlhéry à la fête des pompiers de 1875 ou aux comices agricoles d’Étampes et Mesnil en 1874. C’est la même chose au « bal au profit des pauvres et des enfants » de Saint-Germain-en-Laye en 1873, à celui pour les indigents de Versailles en 1875, au concours musical de Dourdan de 1877 où à la « Fête des instituteurs de l’arrondissement » de Rambouillet en 1875.
28Pendant ce temps, à l’échelon national, la brutalité et la morgue de l’Ordre moral lassent l’opinion qui se tourne vers les républicains. De plus, la division de la majorité, toujours écartelée entre légitimistes et orléanistes perdure, permettant aux républicains de gagner les élections partielles de 1873 grâce à une efficace campagne de banquets de Gambetta37, qualifié de « commis voyageur de la République ».
29Le pouvoir conservateur tente alors de ménager l’avenir et Mac-Mahon fait voter en novembre 1873 la « loi de septennalité » destinée à pérenniser le régime en attendant une hypothétique Restauration. Elle explique que « le pouvoir exécutif est confié pour sept ans au maréchal Mac-Mahon. […] Ce pouvoir continuera à être exercé avec le titre de Président de la République et dans les conditions actuelles jusqu’aux modifications qui pourraient y être apportées ». Carnot vote évidemment contre le texte. Mais, pendant ce temps, la solution monarchique semble chaque jour s’éloigner, car les légitimistes s’entêtent au point de rendre la « fusion » avec les orléanistes de plus en plus improbable.
30Inquiets de la remontée des bonapartistes, les orléanistes se rapprochent alors des républicains de Gambetta. De leur côté, les républicains sont bien décidés à suivre les positions de Carnot : la modération et la réforme plutôt que le raidissement idéologique ou l’intransigeance. Sous l’impulsion de Gambetta, qui rend ainsi involontairement hommage à adversaire malheureux, ils rejettent à présent la dissolution qu’ils exigeaient auparavant, pour lui préférer l’alliance avec les libéraux de centre droit et sauver la République, fût-elle provisoire.
31Grâce à cette alliance (« la conjonction des centres »), les lois constitutionnelles sont votées le 30 janvier 1875 et l’amendement Wallon reconnaît implicitement la République38 sans que sa victoire ne soit encore sûre. Et, même si les lois constitutionnelles sont assez conservatrices, les républicains les considèrent comme une étape nécessaire vers une démocratie républicaine. Carnot vote donc l’ensemble de ces textes sans toutefois s’investir autant qu’à l’habitude dans les débats politiques.
32Le nouveau système, qui donne beaucoup de pouvoirs au Président, ne le satisfait guère. Élu au suffrage indirect pour sept ans, il a la totalité du pouvoir exécutif, l’initiative des lois et peut dissoudre la Chambre. Face à lui, l’Assemblée élue pour quatre ans au suffrage universel, voit ses pouvoirs limités par un Sénat conservateur39. Manifestement les monarchistes espèrent encore voir les institutions d’une « République conservatrice » mener à quelque monarchie.
33Mais, dans les profondeurs du pays, la situation évolue rapidement grâce à la tactique de Gambetta, président de l’Union républicaine. Pour rassurer les électeurs, il choisit d’abord de rénover le corpus républicain en ôtant tout ce qui peut effrayer, depuis la Terreur jusqu’au socialisme en passant par l’impôt sur le revenu. La future République sera réconciliatrice, fondée sur les classes moyennes, notamment paysannes, filles de 1789 et de la promotion sociale. Gambetta accepte même l’idée d’un Sénat qu’il surnomme « le grand conseil des communes françaises » pour enraciner le régime dans les campagnes. Dans le même temps, pour mobiliser les électeurs et les « classes nouvelles », il désigne de nouveaux ennemis. Ce sont les « blancs » qui veulent rétablir la monarchie féodale, et l’Église leur alliée qui accapare les consciences et les privilèges. Et quand il déclare que « c’est aux paysans qu’il faut s’adresser sans relâche. C’est eux qu’il faut relever et instruire40 », on croirait entendre le ministre de l’Instruction en 1848. De son côté, Carnot voit avec ironie Gambetta affublé du sobriquet « d’opportuniste » par les mêmes radicaux qui le raillaient à l’époque pour sa modération.
34Ainsi idéologiquement recentrés et politiquement unis, les républicains gagnent chaque élection législative jusqu’à celles de février-mars 1876. Grâce à leur tactique et à une presse dynamique comme la République française41, ils n’effraient plus. Une partie des libéraux et des conservateurs bascule alors dans leur camp. En 1876, les républicains obtiennent plus de 55 % des suffrages et 360 sièges contre 160 à leurs adversaires. Comme Carnot l’avait toujours prédit, c’est bien l’ensemble du peuple qui confirme dans les urnes la République. Une large partie de la paysannerie vote à présent pour Marianne, tandis qu’à leur habitude, les villes restent fidèles à la République. Face à ce désaveu, Mac-Mahon va donc être contraint de composer avec les républicains, nous le verrons.
35Mais rien n’est encore acquis, c’est toujours lui, monarchiste conservateur, farouche opposant à la République, qui en est le Président. Et il a beaucoup de pouvoirs, contrôle l’administration, nomme le gouvernement et a surtout la mainmise sur un Sénat dont le rôle devient central dans la lutte entre les progressistes républicains et les conservateurs monarchistes.
Le sénateur et la difficile victoire de Marianne
36Tout va se jouer au niveau national, sous les yeux d’un Carnot qui, malgré une lassitude bien compréhensible, semble ne penser qu’à l’intérêt collectif. À la veille de l’élection par l’Assemblée Nationale des 75 sénateurs à vie42, un avocat républicain d’Étampes l’interroge sur son avenir. Il répond en se posant néanmoins comme une sorte d’homme providentiel ou de recours moral :
« Si je ne consultais que mes dispositions personnelles, je dirais adieu à la vie politique où j’ai pris longtemps ma part de travail. […] J’ai commencé ma carrière politique en retirant ma première candidature devant celle d’un vétéran, Monsieur Isambert. Je n’hésiterai pas davantage à la terminer en m’effaçant devant un plus jeune […]. Cependant, si la République juge ma candidature utile, je me mettrai à sa disposition, car l’objectif est de former dans la nouvelle Chambre une majorité bien décidée à soutenir la constitution républicaine, toute considération personnelle doit s’effacer devant celle-là43. »
37Le parti républicain qui entend promouvoir sa nouvelle génération à l’Assemblée nationale, le désigne à la candidature pour le Sénat où sa personnalité d’homme modéré, partisan des compromis peut rassurer à la veille d’élections cruciales pour les républicains. Son image peut permettre de limiter les dégâts dans un Sénat que l’on pressent conservateur grâce au suffrage indirect. Pendant trois semaines, du 9 novembre au 21 décembre 1875, les tractations se multiplient donc.
38Or, en dépit de la coloration encore conservatrice de la Chambre, le choix se porte majoritairement sur des républicains modérés car tous les groupes parlementaires veulent ménager l’avenir. En outre, les légitimistes et les bonapartistes campent sur leurs positions et s’entendent même avec les républicains pour avoir quelques élus. Les légitimistes parviennent ainsi à obtenir une dizaine de sièges, bien loin des 58 sénateurs républicains, dont Carnot, qui forment une sorte de « légion républicaine » (Seignobos) inespérée. Le Sénat ne deviendra donc jamais la forteresse conservatrice qu’il devait être et, deux ans plus tard, n’appuiera pas Mac-Mahon lors du conflit avec la Chambre. Si les autres membres du Sénat, élus au suffrage indirect en janvier suivant sont souvent conservateurs, leur majorité reste ténue. L’avenir est d’autant plus incertain pour les monarchistes que les républicains gagnent largement, nous l’avons dit, les élections de février-mars 1876.
39Le sage et rassurant Carnot est donc nommé le 15 décembre 1875 sénateur inamovible au sixième tour de scrutin. Si sa propension aux compromis et son modérantisme expliquent son élection, sa foi républicaine séduit aussi des électeurs soucieux de ménager l’avenir qui pourrait être républicain. Ses compagnons de 1848 sont donc les premiers à le féliciter comme Garnier-Pagès qui lui écrit : « C’est un grand bonheur pour moi que le succès de votre élection au Sénat44. » Aucun ne manque ni Charton, ni Henri Martin, ni Jules Simon ou Schœlcher qui considèrent cette nomination comme légitime pour un homme qui n’a jamais varié ni hésité à s’engager au péril de sa carrière. La fierté de Carnot de servir une dernière fois la République se double de la satisfaction de voir ses anciens compagnons comme Charton, Corbon, Simon, Schœlcher, Crémieux, Wallon ou Littré le rejoindre à la Chambre Haute qui devient un repère de vieilles barbes de 1848.
40Carnot déménage une dernière fois pour s’installer au 122 rue de la Boétie et, bien qu’assez fatigué, reprend ses activités provinciales pour « propager les idées républicaines dans l’arrondissement d’Étampes et le canton de Milly45 ». L’Association philotechnique lui écrit à l’été 1876 pour lui faire part de sa nomination à sa tête pour deux ans et « à l’unanimité, pour votre dévouement à l’instruction publique et en particulier à la cause de l’instruction populaire46 ». Touché, il accepte le poste en laissant entendre que ses 75 printemps réduisent sérieusement ses capacités d’action.
41Il suit toujours les réunions de la Société pour l’Instruction élémentaire dont il est membre et où ses amis comme Jules Favre lui assurent une certaine audience. Il intervient parfois dans le journal de l’association le Bulletin ou journal d’éducation populaire pour ce qui touche aux bibliothèques populaires.
« Il faut faire une bibliothèque qui est ouverte aux instituteurs, institutrices et élèves des cours normaux […] pour distribuer des livres aux écoles […] et constituer des conférences où sont discutées les questions relatives à l’instruction primaire. […] Il faut provoquer tôt le goût de la lecture chez les enfants […], car l’enseignement de la lecture n’est qu’un bienfait illusoire et stérile s’il n’y a pas dans chaque école une petite bibliothèque où les enfants puissent prendre l’habitude de la lecture47. »
42En ce début de mandat, il croit plus que jamais, comme l’écrit son ami Émile Deschanel dans la Revue d’éducation populaire en 1875, « [qu’] il faut à la France un enseignement laïque désintéressé, libéral […] et affranchi du joug de ceux qui ont rédigé, qui l’acceptent, qui répandent ou qui même seulement tolèrent le Syllabus48 ».
43Pendant ce temps, la crise politique se noue, car le Président Mac-Mahon semble désorienté après les élections de 1876. Il répugne à appeler à la présidence du Conseil Gambetta, grand vainqueur des législatives, tergiverse et choisit un chef de gouvernement « centriste », Dufaure, un ancien de la Monarchie de Juillet, pour gagner du temps. Cette tactique semble d’abord fonctionner car les républicains, cherchant à séduire des classes populaires et paysannes, modèrent leurs critiques. Le ministère tient donc dix mois, avant que le Président n’appelle, le 13 décembre 1876, un vieil ami de Carnot, Jules Simon, ce qui ne ravit guère Gambetta49.
44Le nouveau président du Conseil qui entend mener une politique d’équilibre entre cléricaux et radicaux, confirme au ministère de l’Instruction le modéré Waddington, l’un des fondateurs de l’École des Hautes Études sous le ministère Duruy. Ce ministre œuvre aussi dans le sens de Simon et de Carnot et dépose le 23 mars 1876 à la Chambre des députés un projet modifiant la loi sur l’enseignement supérieur et rendant à l’État la collation exclusive des grades. Il prononce le 3 juin un grand discours pour exposer devant la Commission du budget l’ensemble de réformes qu’il entend mener. Il compte rendre l’instruction primaire obligatoire et gratuite, voire laïque (projet de loi des 28-29 janvier 1877) en multipliant le nombre des écoles (circulaire du 15 juin 187650). Il compte aussi relever le niveau de l’instruction secondaire, élargir le recrutement du Supérieur et améliorer la situation des enseignants avec un salaire minimum de 1000 francs pour les hommes et 700 pour les femmes. Malgré l’opposition du parti catholique, il parvient à faire adopter son projet de loi sur la collation des grades par la Chambre des députés, avant qu’il ne soit rejeté par le Sénat le 21 juillet 1876, à une courte majorité, alors que Carnot l’avait voté. Le nouveau sénateur est comme galvanisé par les projets de Waddington. Il participe donc à une « Commission spéciale sur l’instruction primaire » pour le compte de la Société pour l’Instruction élémentaire avec, entre autres, Jules Barni et surtout son fils cadet Adolphe, alors professeur à l’École des Mines. Il en résulte un projet de loi présenté à la Chambre le 23 mars 1877 qui préfigure les textes éducatifs de Ferry et synthétise la pensée de Carnot. C’est lui qui est cité en introduction :
« Nous pouvons dire comme notre vénéré collègue Carnot : “l’esprit de la société n’a pas varié. Elle est toujours opposée hautement, franchement, depuis 1830 aux envahissements de l’éducation congréganiste, soutient avec force que l’éducation laïque donne à l’État de meilleurs citoyens, à la famille des chefs plus éclairés” […]. L’instruction publique est obligatoire pour les deux sexes […] dans les écoles primaires publiques, l’enseignement est gratuit et laïque et l’enseignement religieux n’est point donné dans les écoles publiques et relève exclusivement des familles. […] Tout département est tenu d’avoir deux écoles normales primaires, une de garçons, une de fille51. »
45Le projet cherche à améliorer les salles d’asile, les salaires et retraites des instituteurs, le Brevet de capacité, les bibliothèques, des programmes sans religion mais avec de la gymnastique et de l’éducation civique. Novateur, il est l’objet d’un consensus : les sénateurs de la vieille génération de 1848, tous amis de Carnot comme Charton, Corbon, Favre, Simon ou Schœlcher sont enthousiastes. Mais les jeunes députés républicains ne sont pas en reste. Clémenceau, Ferry, Gambetta, Sée ou Sadi Carnot, alors âgé de 40 ans et député de Côte-d’Or, approuvent eux aussi le projet de la Société pour l’Instruction.
46L’heure est d’autant plus à l’offensive que la majorité républicaine reste soudée en dépit des inimitiés entre Simon et Gambetta. Les cléricaux et les ultramontains se déchaînent alors, pétitionnent contre le projet de loi de mars, multiplient les mandements d’évêques en faveur du pouvoir du Pape, manifestent tant et plus qu’ils redonnent espoir aux légitimistes à la grande colère des républicains52. Le très pondéré Jules Simon dénonce ces attaques cléricales et demande leur répression, ce dont Mac-Mahon profite pour le destituer le 16 mai. La crise est ouverte et trois semaines plus tard, quand le Président dissout la Chambre le 25 juin 1877 avec l’accord des sénateurs, républicains exceptés.
47L’épreuve de force est donc engagée et la parole rendue au peuple. Comme un quart de siècle plus tôt, le pays est traversé de rumeurs de coup d’État, cette fois-ci monarchiste, et le pouvoir utilise toutes les vieilles ficelles pour gagner le scrutin décisif. Il révoque 77 préfets, renforce sa propagande, distribue gratuitement ses brochures, ferme les cabarets, renvoie 3 000 maires jugés trop républicains, ferme les loges maçonniques et les sociétés républicaines comme au temps de la candidature officielle.
48Mais le résultat est l’inverse de ce qu’il escomptait. Ces excès soudent les républicains dans une vaste coalition, allant du centre droit de Thiers à l’extrême gauche de Clémenceau, appelée Comité de vigilance. Ils sont menés de main de maître par Gambetta et son Comité central composé de sénateurs républicains, parmi lesquels Carnot fait figure de caution. L’ancien vainqueur de Belleville envoie ses élus faire campagne dans tout le pays et dramatise les nouvelles élections. Pour lui, elles opposent les républicains, gage de stabilité et de démocratie, à « des nobles qui ne veulent pas s’accommoder de la démocratie et [à] une congrégation qui veut asservir la France53 ». Les républicains se présentent comme les héritiers de 1789 et 1830, ce qui ravit Carnot bien que la référence à 1848 n’apparaisse guère. Gambetta demande donc à Mac-Mahon, en août 1877, de « se soumettre ou se démettre », ce que ce dernier refuse en déclarant : « Je ne saurai […] abandonner le poste où la constitution m’a placé. Je resterai pour défendre, avec l’appui du Sénat, les intérêts des conservateurs54. »
49Le 14 octobre 1877, avec participation de 81 %, qui prouve la politisation des masses et le poids des arguments de Gambetta, les républicains conservent une large majorité et obtiennent trois fois plus de sièges55 que les monarchistes et les bonapartistes. Le Président ne peut dissoudre une nouvelle fois et comprend que la bataille est perdue56.
50Le régime présidentiel devient parlementaire et la légitimité de la Chambre des députés l’emporte sur celle du Président. Maîtres de la Chambre, majoritaires dans le nouveau gouvernement de centre gauche Dufaure pour lequel a voté Carnot, soutenus par une nouvelle administration préfectorale57, les républicains se lancent à l’assaut des derniers centres de pouvoirs qui leur résistent. Aux élections municipales de janvier 1878, ils conquièrent les deux tiers des communes grâce aux « couches nouvelles » séduites par les perspectives et la modération républicaines. Un an plus tard, cette victoire leur permet de gagner le Sénat lors de son renouvellement triennal, en obtenant 60 sièges sur 80. Le 30 janvier 1879, prétextant la solidarité militaire avec des généraux monarchistes que les républicains veulent limoger, Mac-Mahon démissionne. Le jour même, Jules Grévy qui incarne aussi 1848, est facilement élu président de la République et s’engage à renoncer au droit de dissolution. Neuf ans après sa proclamation, la République est enfin aux mains des républicains amis de Carnot.
51Quatre jours plus tard, le Président appelle Waddington à former un gouvernement et le régime multiplie les gestes symboliques. Les Assemblées quittent définitivement Versailles et reviennent à Paris, le ministre de la guerre rend sa qualité de « chant national »58 à la Marseillaise en février 1879. Enfin le 6 juillet 1880, la République adopte le 14 juillet comme fête nationale pour renouer avec 1789 et commémorer les droits de l’homme, la laïcité, le mérite et l’éducation populaire. Le 13 juillet 1880, l’amnistie des communards doit « fermer le livre de ces dix années ; [mettre] la pierre tumulaire de l’oubli sur les crimes et sur les vestiges de la Commune, et [dire] à tous, à ceux-ci dont on déplore l’absence, et à ceux-là dont on regrette quelquefois les contradictions et les désaccords, qu’il n’y a qu’une France et qu’une République59 ».
52Le lendemain, à la nouvelle fête nationale à laquelle Carnot est invité, après une revue et un défilé militaire, Grévy remet ses drapeaux à chaque colonel de l’armée. Il scelle ainsi l’union entre l’armée, la patrie et la République, sanctifiée par une école dont les élèves et les enseignants défilent aussi. Tous les symboles et toutes les valeurs défendus par l’ancien ministre de 1848 se trouvent réunis et le pays entre dans une ère nouvelle, sous le signe de l’éducation pour tous.
Notes de bas de page
1 Lettre de Garnier-Pagès à Carnot, 25 novembre 1871, AN 108 AP 2.
2 L’épisode est connu : le comte de Chambord, légitimiste traditionnel refuse de « faire un pas vers la France du siècle » et d’adopter, par exemple, les trois couleurs. Le comte de Paris, orléaniste finit par se lasser.
3 La colonne fut détruite en mai 1871, car elle était, selon la Commune, « un monument de barbarie, un symbole de force brute et de fausse gloire, […] un attentat perpétuel […] à l’un des trois grands principes de la République française, la Fraternité ». Hippolyte Carnot, AFP/HC/VI/carton A, d1 et carton B, d6.
4 Lettre d’Agricol Perdiguier à Carnot, 13 octobre 1874, AFP, idem.
5 Lettre de Jules Simon à Hippolyte Carnot, 1er août 1873, AFP/HC/VI/carton A, d1.
6 Garnier-Pagès, lettre à Carnot, 25 novembre 1871, AN 108 AP 2.
7 Discours de Thiers à l’ouverture de l’Assemblée le 13 novembre 1872.
8 Hippolyte Carnot, lettre à Jules Simon citée dans Jules Simon, Notice historique, op. cit., p. 37.
9 Hippolyte Carnot vote avec 318 autres contre le rétablissement de la nomination des maires, adjoints et policiers locaux par l’État le 24 janvier 1874. La loi est adoptée par 359 voix.
10 Lettre d’Hippolyte Carnot, avril 1872, AFP/HC/VI/carton A, d2.
11 Pour les instituteurs de Pontoise, 10 août 1871, de Corbeil 25 août 1871, AFP/HC/VI/carton C, d5.
12 Lettre du Comité républicain cantonal de Milly à Carnot, 27 juillet 1871, AFP/HC/VI, idem.
13 Comité du cercle républicain à Carnot, 12 avril 1873, AFP/HC/VI, ibidem.
14 Carnot se présente à l’élection du Grand maître du Grand Orient de France en juin 1870. On lui préfère Babaud-Laribière, ancien commissaire de la République des Charentes et préfet des Charentes en 1870.
15 L’école congréganiste du village reçoit des subventions publiques, ce qui pousse le nouvel instituteur public à boycotter le maire qui laisse faire. L’enseignant demande la réunion des deux écoles privées et publiques et se désole du peu d’intérêt des « délégués à l’Instruction » pour la petite enfance, l’asile communal et le Primaire. On comprend qu’Hippolyte se soit intéressé à l’affaire (AFP/HC/VI/carton A, d1-d2).
16 Lettre de la directrice à Carnot, mars 1872, AFP/HC/VI/carton A, d1.
17 Lettre de Louette à Carnot, 1er mars 1872, AFP/HC/VI/carton A, d1-2.
18 Elle est fondée par Barni, né en 1818, franc-maçon et libre-penseur, ami de Simon, partisan du suffrage universel, qui avait lui aussi refusé le serment en 1851 quand il était professeur à Rouen. Il fut exclu de l’enseignement par Bonaparte, puis, après sa chute, devint Inspecteur de l’Instruction publique et député de la Somme en 1872. Il est aussi auteur d’un Manuel Républicain en 1870 à la demande de Gambetta sur le modèle de celui de Renouvier. Voir « Jules Barni (1818-1878) ou l’entreprise démopédique d’un philosophe républicain, moraliste et libre penseur », par Mirelle Gueissaz, Les bonnes mœurs, Paris, PUF, 1994, p. 131-165.
19 Eugène Spuller est né en 1835, accompagna Gambetta lors de sa fuite en ballon et devint député de la Seine en 1876. Jean-Jules Clamageran est né 1827 et sera ministre des finances en 1885. Victor Poupin est né en 1838, futur député du Jura et co-fondateur de l’Union démocratique anticléricale avec Hugo et Blanc.
20 Depuis 1873 se développe un mouvement en faveur du retour de la dynastie impériale aux affaires, sous l’impulsion de notables et préfets bonapartistes, et grâce à une campagne de presse efficace (Le Gaulois, L’ordre) qui demande un plébiscite sur la question, au nom de la souveraineté nationale. Aux élections partielles de 1874-1875, sur 12 sièges les républicains en obtiennent 7 et les bonapartistes 5.
21 Hippolyte Carnot Ce que serait un nouvel Empire, Instruction républicaine, Paris, 1874, p. 6-7-10-11.
22 Hippolyte Carnot, note dans date, 1872, AFP/HC/VI/carton B, d6.
23 Hippolyte Carnot, notes sur l’instruction populaire, 1872, AFP/HC/VI/carton B, d6.
24 Jules Simon sera ministre de l’Instruction du 5 septembre 1870 au 17 mai 1873.
25 Mac-Mahon, discours, le 28 avril 1873 repris dans sa lettre du 25 mai annonçant son programme.
26 Hippolyte Carnot, notes sur la légion d’honneur, 1873, AFP/HC/VI/carton A, d2.
27 Hippolyte Carnot, note sur le service militaire à propos de la loi de 1872, AFP/HC/VI/carton Ad1-2.
28 Rapport Ernoul, dans Octave Gréard, La législation de l’instruction primaire en France de 1789 à nos jours, Tome IV, p. 383-392. Paris, Imprimerie de l’Université, 1899.
29 Oscar Bardi de Fourtou fut ministre de l’instruction pendant six mois sous la présidence Thiers, puis ministre de l’intérieur sous l’Ordre moral. Il y fut nommé le 23 mai 1874 pour deux mois seulement. Farouchement antirépublicain, il se battra en duel avec Gambetta en novembre 1878.
30 Hippolyte Carnot, note sur la guerre à Presles, 1875, AFP/HC/VI/carton C, d5 et carton A, d1. Note du discours de Dannemois, 1872, AFP/HC/VI/carton C, d5.
31 Ainsi, par exemple, le monument de Bazincourt, près de Gisors est-il inauguré le 26 juin 1871, soit quatre mois à peine après la signature de la paix. Voir Jean-Pierre Chaline, « Témoins d’une guerre oubliée. Les monuments commémoratifs de 1870-1871 en Haute-Normandie », dans Etudes Normandes, no 1-2009, p. 5-16.
32 La loi du 4 avril 1873 explique que l’État prend à sa charge la construction des nécropoles nationales destinées à rassembler les ossements des soldats français et allemands tombés sur le champ de bataille et ensevelis ensemble par l’armée victorieuse.
33 Le Souvenir Français est créé en 1887 par Xavier Niessen, un professeur alsacien, d’abord pour entretenir les tombes des soldats français, puis pour commémorer et préparer la Revanche.
34 Le 18 septembre 1870, un bataillon de francs-tireurs de Paris accroche par surprise à Dannemois un détachement avancé de la IVe division de cavalerie prussienne fort de 3 000 hommes et douze canons, tuant le prince de Horn et une centaine de Ulhans. Les occupants prussiens font subir aux habitants de dures représailles, pillant les villages alentour et incendiant 15 maisons de Dannemois.
35 Voir Rémi Dalisson, Histoire des fêtes nationales, op. cit., chapitre IV, « Le 14 juillet et ses petites soeurs (1870-1940) », p. 229-318.
36 Le monument de Dannemois, Paris, Millière, 1872, p. 6-8, AFP/HC/VI/IMP.
37 À la Ferté-sous-Jouarre en 1872, Gambetta présente son programme électoral et patriotique. À Auxerre en 1874 il prononce son discours sur les « couches nouvelles qui forment la démocratie ».
38 L’amendement est adopté par 353 voix contre 352. La République y est indirectement reconnue avec la phrase suivante : « Le président de la République est élu à la majorité des suffrages de la Chambre des députés et du Sénat ». Le texte crée en outre un Sénat, en partie élu à vie, qui doit contrebalancer la Chambre élue au suffrage universel direct. Il doit « faire échec [.. ] à l’omnipotence du nombre et à l’action démocratique des villes » selon de Broglie. Il a aussi de considérables pouvoirs.
39 Sur le sujet, voir Jean-Marie Mayeur, La vie politique sous la Troisième république, op. cit., chapitre second.
40 Discours de Léon Gambetta à Bordeaux, 26 juin 1871.
41 Créée dès novembre 1871, par Gambetta et Spuller, elle tire à 15 000 exemplaires par jour. Le journal est complété en 1876 une feuille populaire à un sou (5 centimes), la Petite République française.
42 Le nouveau Sénat dispose de pouvoirs identiques à ceux de la Chambre des députés. Il compte 300 membres, 222 élus par un collège restreint (les députés, les conseillers généraux et les délégués des conseils municipaux) pour neuf ans et renouvelés par tiers tous les trois ans, et 75 sénateurs inamovibles désignés par la Chambre des députés et par le Sénat.
43 Hippolyte Carnot, 2 décembre 1875, lettre à un avocat d’Étampes, AFP/HC/VI/carton A, d2.
44 Lettre de Garnier-Pagès à Carnot, 16 décembre 1875, AFP/HC/VI/carton A, d1.
45 Hippolyte Carnot, note de 1877, AFP/HC/VI/carton A, d1.
46 Lettre d’Hébert, de l’Association philotechnique à Carnot, 16 juillet 1876, AFP/HC/VI/carton A, d1-2.
47 Bulletins de la société pour l’instruction élémentaire, 1872, 1873, 1875, AFP/HC/VI/PR.
48 Député de la seine en 1876, futur collègue de Carnot comme sénateur à vie (1881), il fut arrêté et exilé sous le Second Empire jusqu’en 1859 et rencontra Hippolyte à Bruxelles. AFP/HC/VI/carton A, d1-2.
49 Rappelons que c’est Jules Simon qui, en janvier 1871, avait enlevé à Gambetta ses pleins pouvoirs pendant qu’il était replié à Bordeaux. Gambetta trouvait Simon beaucoup trop modéré et enclin aux compromis.
50 Il veut en construire 8 000. Son projet de 1877 explique que « toute commune a la faculté d’établir la gratuité absolue », et « l’obligation, corollaire de la gratuité ». Un an avant, il demandait « des établissements assez nombreux […] et que l’école se trouve à proximité des enfants ». Dans Octave Gréard, La législation de l’instruction primaire, op. cit., p. 660 et 607.
51 Projet Carnot de 1877 dans Octave Gréard, La législation de l’instruction primaire, op. cit., p. 683-702.
52 C’est à cette occasion, le 4 mai que Gambetta prononce sa phrase : « je ne fais que traduire ce traduire les sentiments intimes du peuple français en disant du cléricalisme ce qu’en disait un jour mon ami Pyat : le cléricalisme ? voilà l’ennemi ».
53 Léon Gambetta cité dans Jean-Marie Mayeur, Les débuts de la IIIe République, op. cit., p. 43.
54 Proclamation de Mac-Mahon, 19 septembre 1877.
55 Les républicains obtiennent 54 % des suffrages exprimés (soit 600 000 voix de plus que leurs adversaires, ce qui est peu), mais grâce a scrutin majoritaire, 302 sièges contre 104 aux monarchistes et 104 aux bonapartistes.
56 Après cette crise, le droit de dissolution présidentiel tombe en désuétude jusqu’à la Seconde Guerre mondiale.
57 Cinq jours après son arrivée en 1876, le ministre de l’Intérieur remplace ou déplace 82 préfets monarchistes.
58 Le ministre invoque le décret du 26 messidor an III qui faisait de la Marseillaise l’hymne national et n’avait jamais été abrogé. Voir Michel Vovelle, « La Marseillaise » dans Pierre Nora (dir.), Les lieux de mémoire, t. I « la République », Paris, Gallimard, 1984, p. 85-135.
59 Léon Gambetta, discours du 20 juin 1880, http://www.assembleenationale.fr/histoire/Gambetta1880.asp, consulté le 31 mai 2010.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
The Asian side of the world
Editorials on Asia and the Pacific 2002-2011
Jean-François Sabouret (dir.)
2012
L'Asie-Monde - II
Chroniques sur l'Asie et le Pacifique 2011-2013
Jean-François Sabouret (dir.)
2015
The Asian side of the world - II
Chronicles of Asia and the Pacific 2011-2013
Jean-François Sabouret (dir.)
2015
Le Président de la Ve République et les libertés
Xavier Bioy, Alain Laquièze, Thierry Rambaud et al. (dir.)
2017
De la volatilité comme paradigme
La politique étrangère des États-Unis vis-à-vis de l'Inde et du Pakistan dans les années 1970
Thomas Cavanna
2017
L'impossible Présidence impériale
Le contrôle législatif aux États-Unis
François Vergniolle de Chantal
2016
Sous les images, la politique…
Presse, cinéma, télévision, nouveaux médias (xxe-xxie siècle)
Isabelle Veyrat-Masson, Sébastien Denis et Claire Secail (dir.)
2014
Pratiquer les frontières
Jeunes migrants et descendants de migrants dans l’espace franco-maghrébin
Françoise Lorcerie (dir.)
2010