Annexe 5. Circulaire du 13 avril 2001 relative à l’accès aux archives publiques en relation avec la guerre d’Algérie.
p. 262-264
Texte intégral
1Paris, le 13 avril 2001
2Le Premier ministre à Madame la ministre de l’Emploi et de la Solidarité, Madame la garde des Sceaux, ministre de la Justice, Monsieur le ministre de l’Intérieur, Monsieur le ministre des Affaires étrangères, Monsieur le ministre de la Défense et Madame la ministre de la Culture et de la Communication.
3Le retour sur les événements liés à la guerre d’Algérie comme les récents débats qui se sont développés à ce sujet montrent l’intérêt qui s’attache à ce que les faits correspondant à cette période reçoivent l’éclairage de la recherche historique. En effet, seule une telle approche, avec les exigences de rigueur et de méthode qui lui sont inhérentes, permettra de donner de ces faits une connaissance claire et impartiale. Un travail historique de qualité ne peut toutefois être mené sans que les chercheurs disposent d’un large accès aux archives publiques relatives à ces événements. C’est pourquoi je souhaite que cet accès soit facilité. L’objet de la présente circulaire est d’indiquer comment un tel objectif peut être atteint, dans le respect de la législation applicable.
41. Les documents produits par les administrations publiques durant la période en cause sont en principe accessibles de plein droit, puisque le délai de trente ans, fixé par l’article 6 de la loi no 79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives, à l’issue duquel les archives publiques peuvent être librement consultées, est aujourd’hui expiré.
Les seules restrictions possibles concernent donc des documents qui, en raison des informations ou des renseignements qu’ils contiennent, relèveraient, pour leur consultation, des délais spéciaux prévus à l’article 7 de la même loi. Il peut s’agir, notamment, de documents contenant des informations mettant en cause la vie privée, ou intéressant la sûreté de l’État ou la Défense nationale, ou encore relatifs aux affaires portées devant les juridictions.
L’article 8 de la loi et les textes réglementaires pris pour son application donnent toutefois la faculté à l’administration compétente d’autoriser la consultation des archives avant l’expiration des délais ainsi fixés.
Ce régime dérogatoire obéit à des procédures distinctes, selon que les archives relèvent de la direction des Archives de France, du ministère de la Culture et de la Communication, ou des deux départements (ministère des Affaires étrangères et ministère de la Défense) qui administrent leurs archives de manière autonome.
Dans le premier cas, régi par le décret no 79-1038 du 3 décembre 1979 relatif à la communicabilité des documents d’archives publiques, l’autorisation est donnée par le ministre chargé de la culture, qui s’assure de l’accord préalable de l’autorité qui a effectué le versement ou qui conserve les archives. Cet accord est donné ou refusé en prenant exclusivement en compte le contenu des fonds qui sont l’objet de la demande. C’est au ministre chargé de la culture qu’il appartient d’apprécier le sérieux de la demande, en s’assurant, le cas échéant, des capacités et de la motivation de la personne dont elle émane.
Dans la seconde hypothèse, les autorisations sont directement accordées, selon le cas, par le ministre des Affaires étrangères (art. 10 du décret no 80-975 du 1er décembre 1980 relatif aux archives du ministère des Affaires étrangères), ou le ministre de la Défense, ou encore par moi-même, lorsqu’il s’agit de documents versés aux archives qu’administre le ministère de la Défense par des services qui me sont rattachés (art. 7 du décret no 79-1035 du 3 décembre 1979 relatif aux archives de la Défense).
52. Je souhaite que ces autorisations soient largement délivrées, à titre individuel, lorsqu’elles sont demandées pour effectuer des travaux de recherche historique, en particulier par des personnes appartenant à la communauté scientifique ou universitaire.
À cet égard, il me paraît souhaitable que vous puissiez faire appel, en tant que de besoin, aux conseils d’une personnalité, spécialement désignée à cet effet et disposant de la hauteur de vue et de l’expérience requises. Dans le respect des procédures précédemment rappelées, cette personnalité pourra, en particulier, faire toutes recommandations sur la façon de régler les questions de principe ou les difficultés soulevées par les demandes dont vous serez saisi. Elle contribuera ainsi à la cohérence du traitement qui sera fait de ces demandes, tant au sein de votre administration que d’un point de vue interministériel, grâce aux relations qu’elle pourra entretenir avec ses homologues des autres départements.
63. Il convient que, dans tous les cas, l’autorisation mentionne expressément, outre l’identité du bénéficiaire, les références des documents qui peuvent être communiqués sur son fondement, ainsi que le lieu où ils peuvent être consultés. Elle devra, en outre, préciser si la reproduction des documents est permise et, dans l’affirmative, selon quelles modalités elle doit être effectuée.
Enfin, vous n’omettrez pas de recueillir l’engagement écrit des bénéficiaires de n’utiliser les informations recueillies que dans le cadre de leurs travaux de recherche, à l’exclusion de tout autre usage, et de préserver l’anonymat des personnes physiques auxquelles elles se rapportent.
74. Je souhaite que les demandes de dérogation soient traitées avec diligence. Il conviendra, en tout état de cause, d’y statuer dans les deux mois, délai à l’issue duquel naîtrait, en l’absence de réponse, une décision implicite de rejet. Je vous rappelle que l’article 5 de la loi du 17 juillet 1978, tel qu’il a été modifié par la loi no 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, ouvre la faculté aux demandeurs qui n’ont pas obtenu satisfaction de saisir la commission d’accès aux documents administratifs.
85. Il convient, enfin, d’accélérer les inventaires des fonds d’archives relatifs à la guerre d’Algérie, et de les tenir à la disposition du public, de manière que chercheurs et historiens soient effectivement à même de présenter des demandes de dérogation à titre individuel. Je vous demande également de veiller à ce que les fonds documentaires qui sont encore détenus par vos services soient rapidement versés aux services d’archives compétents. Les inventaires qui pourront être ainsi constitués permettront, le moment venu, de décider l’octroi de dérogations générales portant sur des fonds bien identifiés.
9Lionel Jospin
10Source : Journal officiel no 98 du 26 avril 2001, p. 6478.
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