Introduction
p. 11-23
Texte intégral
1La société américaine, comme toute civilisation, a construit sa relation à l’espace et à la nature : elle s’est ainsi dotée d’une conception du cadre de vie, différente de la ville européenne alors qu’elle s’urbanisait et accueillait des flux migratoires. Imprégnée d’« idéal pastoral », elle a institué au xixe siècle l’ordre des banlieues comme un compromis entre la complexité de la ville et la simplicité d’un mode de vie proche de la nature, en valorisant la sphère du privé au détriment de l’espace public. Mais si ce choix a été interprété comme une étape dans l’évolution humaine, cet ouvrage s’interroge sur le sens et la réalité de ce principe d’urbs in rure au travers de l’expérience de Los Angeles qui, mieux que n’importe quelle autre ville américaine, a nié toute idée de centralité et s’est pensée comme une entité homogène (essentiellement White Anglo-Saxon Protestant) et qui aujourd’hui se caractérise par son profil multiethnique. Il remet ainsi en cause l’interprétation du mythe de la ville-jardin comme une étape supérieure de l’évolution humaine pour prôner les valeurs d’une centralité urbaine fondatrice du caractère pluriel de la population et d’un « espace public » symbole d’altérité et facteur d’identité.
Le choix de Los Angeles
2Pour illustrer cette thèse, le choix s’est porté sur Los Angeles (L.A.) considérée comme le modèle le plus épuré de la conception du cadre de vie américain, bien qu’elle ait toujours été qualifiée de phénomène urbain « unique », y compris aux États-Unis. Il est vrai que L.A. se différenciait nettement des métropoles de la côte est, comme New York, Boston, Philadelphie et Chicago pour donner l’impression d’être entièrement façonnée par les techniques des transports et pour n’avoir ainsi jamais fait de distinction au niveau du paysage entre la ville et ses banlieues1.
3Figurant depuis 1980 au deuxième rang national après New York par son poids économique et démographique et célébrée comme la capitale mondiale du cinéma, Los Angeles n’a pourtant pas suscité tout au long de ce xxe siècle des travaux scientifiques équivalants à ceux qui ont été consacrés à d’autres métropoles américaines, telles New York ou Chicago. La ville est de ce fait mal connue, même si elle est régulièrement mise en scène par les médias américains et étrangers qui y dénoncent les tensions et la violence tout en reconnaissant le bouillon de créativité qu’elle représente dans de nombreux domaines. Créée en 1781 en tant que « pueblo » par les Espagnols, intégrée à la fédération américaine en 1850 – après avoir été mexicaine quelques décennies – et promue plus tard métropole de l’ouest américain pour accéder, en cette fin de siècle, au rang de « ville-monde », Los Angeles, une entité WASP devenue multiethnique, se veut un lieu privilégié de l’observation de ce mythe américain de l’urbs in rure.
4Los Angeles se distingue des autres villes américaines, non seulement par sa rapide expansion à partir des années 1880, mais aussi par la spécificité de son processus d’urbanisation qui ne se limite pas à un espace central mais touche simultanément différentes parties de son territoire. L’absence de concentration s’explique aussi par la dispersion spatiale des activités économiques et par leur nature. L.A. participe de cette vision de ville-jardin et, dès 1930, elle fut qualifiée de phénomène urbain unique avec son habitat constitué à 90 % de maisons individuelles.
Los Angeles, référence littéraire et objet de médiatisation
5Jusqu’à la fin des années 1980, Los Angeles avait peu attiré l’attention des chercheurs en dehors des historiens Robert M. Fogelson et Carey McWilliams ou des architectes David Gebhard, Robert Winter et Reyner Banham. Elle était en revanche la ville-référence de la littérature d’avant-garde critique du monde moderne, celle de la génération « Beat » des années 1960 dont un des foyers se trouvait à « Venice West »2 (L.A.), avec Lawrence Lipton et Stuart Z. Perkoff. Au début du siècle, Louis Adamic, Upton Sinclair et Nathanael West avaient été les premiers à mettre en évidence la violence de Los Angeles alors que Thomas Huxley dans les années 1930 et 1940, suivi de Thomas Pynchon dans les années 1960, de Joan Didion et de John Fante, la décennie suivante, avaient plutôt souligné la non-distinction qu’opérait la ville entre le réel et la science-fiction, sans pour autant attribuer sa singularité à la présence du monde du cinéma.
6L.A. est connue pour sa violence. Le département de la police a qualifié de « war zones » certains territoires situés entre l’autoroute San Diego et l’avenue Alameda en raison des activités déployées par les gangs. Mais contrairement aux stéréotypes véhiculés notamment par les médias et le cinéma, elle est loin d’être la ville la plus dangereuse du pays. Avec ses 8 873 crimes contre les personnes et contre les biens pour 100 000 habitants en 1993, elle figure au 34e rang parmi les villes américaines, loin derrière Atlanta (17 354), Miami (18 745), Tampa (15 707) et Bâton Rouge (16 195). Elle possède le plus faible pourcentage de policiers par habitant, 2 pour 1 000 habitants, ou encore 15 pour 2,25 km2 (1 mile carré) alors qu’une ville comme New York en compte 89, six fois plus. Sa structure spatiale non intégrée en raison de la dévalorisation de l’espace public démontre au quotidien les difficultés de la surveillance alors que ses pères fondateurs s’étaient battus pour faire prévaloir le principe d’une faible densité comme garantie de la paix sociale. N’est-ce point d’ailleurs la police que l’on jugea à la suite du verdict de Rodney King et lors du procès d’O. J. Simpson suivi par l’ensemble du peuple américain, entre 1993 et 19953 ?
7Los Angeles est désormais décor théâtral chez Peter Sellars qui, en 1990, n’a pas hésité à la mettre en scène dans la Flûte Enchantée de Mozart et qui, quatre ans plus tard, réinterprète les émeutes du printemps 1992 au travers de la célèbre pièce de Shakespeare, le Marchand de Venise. Cet effet de mode sur la scène lyrique, théâtrale, cinématographique et dans les médias, coïncide avec la publication de récents travaux sur l’expansion d’une industrie de haute technologie dans une agglomération qui figure au septième rang mondial, après Tokyo, New York, Sao Paulo, Mexico, Shanghai, et Bombay, si l’on reprend le classement de la Banque mondiale en 1994. Peut-on alors traduire le choix de Sellars comme le signe de l’appartenance de Los Angeles au palmarès des villes qui, comme Venise, Amsterdam, Londres, Paris, Berlin et New York, ont réussi à symboliser, à une période donnée, la destinée humaine ? L’ouvrage participe de ce présupposé.
8Nombreux sont d’ailleurs ceux qui à la suite du chercheur Joël Kotkin, estiment que cette ville préfigure l’avenir du pays et établissent un parallèle entre New York du début du siècle et Los Angeles en cette fin de siècle. Kotkin écrit dans le Los Angeles Times Magazine du 15 janvier 1989 :
« De la même manière que New York a su façonner le passé européen de l’Amérique, les Angelinos sont capables de donner le la à notre futur dominé par le Pacifique. Par bien des aspects, ce qui arrive à L.A. est déterminant pour la destinée du pays : une ville à la pointe du changement économique et démographique et un modèle pour la société multi-raciale à venir. »
9Aujourd’hui à L.A., on parle 83 langues et la ville est devenue synonyme de « mosaïque » de races, d’ethnies et de cultures alors que tout au long de son histoire américaine et jusque dans les années 1970, elle n’avait cessé de se penser comme une entité WASP (White Anglo-Saxon Protestant). L’élection de Tom Bradley (premier maire noir) en 1973 a marqué la reconnaissance de l’avènement d’une ville pluriethnique et peut être interprétée comme une première rupture dans la tradition locale. Aussi la ville s’interroge-t-elle à présent sur la politique à adopter : faut-il s’appuyer sur le principe de discrimination positive (affirmative action) avancé par le Civil Rights Movement et dont les bénéficiaires ont été essentiellement des membres de la communauté africaine-américaine ou faut-il plutôt promouvoir une politique où les critères de race et d’ethnie seraient absents (color-blind society) afin de permettre à de nouvelles communautés et notamment les immigrés récents de participer à la vie politique et sociale4 ?
Sa suprématie économique
10Les historiens qui ont travaillé sur Los Angeles ont porté peu d’attention à sa croissance économique et ont juste mentionné le tourisme, la découverte du pétrole, l’arrivée du cinéma, puis celle de l’industrie aéronautique, comme facteurs explicatifs de l’avènement de la métropole. Mais de récentes recherches sur l’urbanisation californienne, entre autres celle de Roger Lotchin, ont montré qu’elle résulte de l’alliance nouée entre la recherche et l’industrie, dans le secteur de la défense notamment5. Les promoteurs fonciers de Los Angeles n’ont pas hésité à participer à l’organisation d’expositions présentant la technologie de pointe de l’aérospatiale, par exemple, pour attirer des experts venus de l’ensemble du pays et faire en sorte que la recherche aéronautique s’installe sur le campus de l’université Cal-Tech, (California Institute of Technoloy) à Pasadena. Une fois le pôle de la recherche ancré à Los Angeles, nombreuses furent les entreprises qui se sont créées à proximité.
11Los Angeles comme de nombreuses autres villes de la Sunbelt, a profité du redéploiement des activités militaires en faveur du Sud et de l’Ouest américains autour des années 1940 ainsi que de la révolution technologique dans le domaine de la communication, comme le démontrent les travaux d’Edward Soja et d’autres géographes de UCL.A.6. La Seconde Guerre mondiale a transformé la région en un centre de production où des constructeurs aéronautiques tels Douglas, Lockheed, North American Aviation, Northrop et Hughes Aircraft, ont mobilisé plus de 250 000 personnes. Après la guerre, deux centres de recherche de renommée internationale, la Rand Corporation à Santa Monica et le Jet Propulsion Laboratory (centre de recherches spatiales ayant mis au point toutes les sondes d’exploration du système solaire depuis trente ans) à Pasadena, ont également choisi de s’y établir.
12Mais si le cinéma au début du siècle et le secteur de la défense dans la deuxième moitié ont propulsé Los Angeles au devant de la scène nationale, la vitalité économique actuelle repose tout autant sur le commerce extérieur, la haute technologie, les services professionnels aux entreprises, tout en continuant de s’appuyer sur le tourisme et l’industrie des loisirs. La population active (en dehors de l’agriculture) s’est accrue de 1 468 400 personnes entre 1980 et 1990, alors que la population totale augmentait de 3 millions de personnes. Le comté de Los Angeles a gagné à lui seul 705 500 emplois, suivi du comté d’Orange avec 389 600 emplois. Quant aux comtés de Riverside et de San Bernardino, ils enregistrent un début de croissance économique7.
13Le tableau 1 met en évidence le rôle moteur des services aux entreprises, qui ont atteint le chiffre de 632 200 emplois en 1991. Ce secteur inclut les agences de publicité, d’architecture, d’engineering, de consultants et d’avocats, dont certains ont acquis une réputation internationale. Sur les 200 grandes firmes internationales de design, dix sont localisées à L.A. ; les trois grands de l’industrie automobile américaine qui ont leur siège social depuis toujours à Detroit, ont, en revanche, leur centre de design à Los Angeles, afin d’être proches à la fois des lieux de recherche et des évolutions de la mode. En 1988, 40 cabinets juridiques de New York ont ouvert des succursales à L.A. Le secteur des services aux entreprises est suivi d’un autre plus traditionnel, le tourisme, qui a réussi à créer au cours des dix dernières années 163 000 emplois supplémentaires. En 1990, la ville a accueilli 62 millions de touristes en quête de soleil, de plages et de montagnes, comme il y a un siècle, mais aussi soucieux de visiter les parcs à thème (Disneyland, Universal Studio et bientôt Sonyland), les centres commerciaux et les musées et d’assister à des représentations musicales comme la fête de la musique à Hollywood Bowl et les concerts du Philarmonique de Los Angeles. La multiplicité des spectacles et manifestations de tout genre expliquent, d’après les Angelinos, la décision de deux équipes de football américain, les Rams et les Raiders, de fuir la concurrence et de partir pour Saint Louis (Missouri) et Oakland (Californie).
14Après la fermeture d’usines de voitures par Chrysler Corp. à Commerce en 1970, Ford Motor Corp. à Pico Rivera en 1980 et General Motors à Van Nuys en 1992, L.A. a perdu 440 000 emplois dans le secteur de la défense qui cherche à se convertir avec l’aide de fonds fédéraux, dans le cadre du programme Technology Reinvestment Project (TRP). L’aérospatiale qui a vu ses effectifs diminuer à partir de la seconde moitié de la décennie 1980 ne représente plus que 5,8 % des emplois non-agricoles contre 7,2 % en 1972. Le domaine de la santé connaît une expansion dynamique en raison de la notoriété des centres de recherche de la région ainsi que des revenus dont disposent les gens du troisième âge. La croissance des emplois dans les services financiers (50 000 en l’espace de dix ans) reflète l’ascension de L.A. comme centre financier de la côte ouest. En 1994, Los Angeles est devenu le premier port des États-Unis, dépassant ainsi New York : son trafic portuaire se chiffre à 146 milliards de dollars contre 139 pour son rival atlantique8.
15Les emplois recensés ne représentent pas cependant l’intégralité du marché de la main d’œuvre. Les économistes de la Chambre de commerce ne cessent de souligner leur difficulté croissante à appréhender le fonctionnement économique de la métropole, en raison de la part grandissante de ce qu’il est convenu d’appeler l’économie informelle (underground economy), mal prise en compte par les données officielles. Ce point de vue est partagé par l’historien Mike Davis et le sociologue Alejandro Portes qui analysent la désagrégation du paysage industriel fordiste de L.A. au profit de petites entreprises travaillant dans la sous-traitance, rassemblées sur un même territoire et dont les employeurs et les employés appartiennent au même groupe ethnique9 : « Au sein de la coquille évidée de l’industrie lourde, une nouvelle économie souterraine est en train d’émerger rapidement. » On parle ainsi à Los Angeles d’une économie d’« enclave ethnique » pour signifier l’émergence de cette économie souterraine ethnique (ethnic enclave economy) dans une ville qui, du fait de sa mondialisation enregistre une forte bi-polarisation du marché du travail pour devenir « duale » ou encore « globale »10.
La problématique
16À partir de l’expérience de Los Angeles, cet ouvrage souligne les limites de la conception américaine du cadre de vie idéal fondé sur la valorisation de la sphère du privé (à proximité de la nature) au détriment de l’espace public, et s’articule autour de trois objectifs. Après avoir resitué Los Angeles dans le contexte américain, on cherchera à comprendre comment la ville a réussi à s’imposer une faible densité urbaine, tout en palliant à la dévalorisation de l’espace public comme support de l’animation au sein de la cité. Enfin, on mettra en évidence les signes précurseurs d’une remise en cause de son urbanisme, sur le plan architectural, spatial mais aussi idéologique.
17La première partie place Los Angeles dans une perspective historique et retrace sa rapide ascension en tant que métropole de l’Ouest grâce à la volonté et à l’ingéniosité de ses habitants, en dépit d’un cadre naturel plutôt hostile. La nature de l’immigration (des Américains de la deuxième génération) rend compte de la construction d’une ville de maisons et de jardins. L’agglomération rejette toute notion de centralité pour s’étendre sans aucune limite au seul gré de l’offre de la promotion foncière et immobilière.
18La deuxième partie analyse le projet de fonder la paix sociale sur une faible densité urbaine au travers de débats politiques portant sur la stratégie des déplacements dans l’agglomération. Elle montre comment Los Angeles a réussi à faire face à la dévalorisation de l’espace public, en prônant les bienfaits et les mérites d’une société civile « active ». Mais au fur et à mesure que la population se diversifie pour inclure minorités et immigrés récents et que la participation de ces minorités à la vie politique s’affirme comme nécessaire à leur ascension sociale, Los Angeles redessine les contours de ses circonscriptions électorales et, ce faisant, renforce la ségrégation tout en spatialisant le fait ethnique. D’où le paradoxe de la procédure du redistricting qui bien qu’émanant du mouvement en faveur des droits civiques, n’est pas en mesure de jeter les bases d’une urbanité susceptible de consolider le lien social et de contribuer à sa reproduction.
19La troisième partie rend compte de manière explicite des limites de la conception puritaine du cadre de vie idéal, alors que la ville s’internationalise et devient pluriethnique. Son organisation spatiale est remise en cause par des tentatives de densification et de maîtrise des flux de déplacements sur un réseau autoroutier complètement saturé. Los Angeles en devenant, en cette fin de siècle, la scène de rivalités inter-ethniques alimentées par le phénomène de l’« underclass », pose de manière explicite la question de la centralité urbaine, comme lieu de mémoire reflétant certes des luttes antérieures mais aussi comme symbole d’une identité à construire. Elle rappelle le statut de l’espace public comme lieu de rencontres spontanées (entre individus de classes, d’ethnies et de cultures différentes) et d’apprentissage de l’altérité, deux conditions nécessaires à l’avènement d’une société multiculturelle, jugée relevée d’un niveau de complexité supérieur à la société melting-pot. Aussi, après avoir doté la ville d’un nouveau downtown qui lui donne un profil de ville internationale, le débat actuel sur la mise en œuvre d’un réseau métropolitain de transport aborde la problématique de la centralité comme symbole de l’unité de la métropole et de son corollaire, la valorisation de l’espace public.
20Les tensions que connaît aujourd’hui Los Angeles sont principalement interprétées par Mike Davis et d’autres chercheurs, par la constitution d’un sous-prolétariat pratiquement exclus du débat politique et par des rivalités inter-ethniques dont les émeutes de 1992 seraient la manifestation la plus sensible. Ces hypothèses sont valides et ont été remarquablement argumentées mais cet ouvrage, en soulignant la disjonction entre l’urbs (matérialité du fait urbain) et la civitas (vie socio-politique), démontre que Los Angeles exprime une quête d’urbanité, c’est-à-dire d’une centralité et d’un espace public comme symboles fondateurs de la ville11.
21Une difficulté à laquelle se heurte le chercheur, tout comme l’habitant d’ailleurs, réside dans la délimitation de L.A., comme l’illustre la question-piège « Which Way L.A. ? » (quelle est la direction de L.A. ?) de John Fante dans son roman TheRoad to Los Angeles, ainsi que la réponse leitmotiv de tout résident « I live in the L.A. Area ». L’habitant signale d’abord L.A. puis il précise le territoire auquel il s’identifie en faisant référence à des noms de municipalités, Santa Monica ou Inglewood, à des noms de quartiers de la ville de Los Angeles elle-même, Brentwood ou South Central, ou encore the San Fernando Valley. Dans les territoires récemment urbanisés, situés pour la plupart en dehors du comté de Los Angeles, il mentionne plus facilement le lotissement où il a acheté sa maison pour signifier son appartenance à une communauté de propriétaires fonciers, ce qui implique une certaine homogénéité sociale, raciale et ethnique.
22Los Angeles fait indifféremment référence à la ville qui comprend 3,4 millions d’habitants ou aux deux autres catégories du recensement la Primary Metropolitan Statistical Area (PMSA) et la Consolidated Metropolitan Statistical Area (CMSA). La PMSA inclut les deux métropoles que représentent Los Angeles et Long Beach, soit 82 municipalités couvrant la totalité du comté de Los Angeles et comprenant 8,5 millions d’habitants alors que la CMSA rassemble cinq comtés : Ventura, Los Angeles, Orange, San Bernardino et Riverside, soit 168 municipalités et 14,5 millions d’habitants12.
23En se référant à la métropole de Los Angeles, des géographes de UCL.A., tels Howard Nelson et William Clark, vont jusqu’à inclure les onze comtés qui s’étendent de Santa Barbara à San Diego. Cependant, la majorité des chercheurs comme le géographe Ed Soja, l’historien Mike Davis et le politologue Peter Skerry, se réfèrent à la CMSA tout en la différenciant du concept de Sixty Mile Circle (cercle de 90 km) élaboré par la Security Pacific Bank13. La première se limite essentiellement à la zone urbanisée (10 000 km2) alors que le second comprend, en outre, les territoires agricoles et les espaces naturels, soit une superficie de 88 000 km2. Le Sixty Mile Circle fixe la population de L.A. à 11 millions de personnes, la CMSA à 14,5 millions en 1990.
24Du point de vue du paysage, il est pratiquement impossible de distinguer les trois entités que sont la ville, le comté et la métropole. Tous trois suivent les mêmes principes d’aménagement. Dans les chapitres qui suivent, on traite principalement de la ville de Los Angeles, sans écarter pour autant les données concernant la métropole ou le comté.
Notes de bas de page
1 Encyclopedia of the United States in the Twentieth Century, New York, Charles Scribner’s Sons, 1996, entrée « City and suburb ». Sur la spécificité de L.A., cf. Robert Fishman, Bourgeois Utopias : The Rise and Fall of Suburbs, New York, Basic Books, 987, notamment le chapitre 6 intitulé « Los Angeles : Suburban Metropolis ».
2 La Beat generation a vécu à Venice, un quartier de Los Angeles situé en bordure de l’océan Pacifique. On utilise ici l’expression Venice West à la suite de John Arthur Maynard, Venice West : The Beat Generation in Southern California, Rutgers University Press, 1991, pour bien signifier que l’on parle de la ville du Pacifique.
3 Pour plus de détails sur les rancunes à l’égard de la police lors des révoltes du printemps 1992, cf. C. Ghorra-Gobin, « Los Angeles 1992 : la première émeute multiethnique des États-Unis », Hérodote n° 65-66, juin 1992, pp. 326-337 ; Laureen Lazarovici « Reforming the Cops : Prop. F Wins Big », et Vince Bielski et Laura Proctor « Controlling the Cops », deux articles parus dans l’ouvrage collectif Inside the L.A. Riots : What really happened and why it will happen again, New York, Institute for Alternative Journalism, septembre 1992, ainsi qu’un plus récent ouvrage sous la direction de Mark Baldassare, The Los Angeles Riots : Lessons for the Urban Future, Boulder, Westview Press, 1994.
4 « L.A. Comes of Age », The Atlantic, janvier 1988, p. 39 ainsi que C. Ghorra-Gobin, « South Central = Watts II ? », Hérodote n° 85, 1997, pp. 143-159.
5 Roger W. Lotchin, Fortress California : From Warfare to Welfare, Oxford University Press, 1992, ainsi que Edward W. Soja, The Reassertion of Space in Critical Social Theories, Londres, Verso, 1989, et Ann Markusen, Peter Hall et Amy Glasmeier, High Tech America : The What, How, Where and why of the Sunrise Industries, Boston, Allen and Unwin, 1986.
6 Kenneth T. Jackson « The Shape of Things to Come : Urban Growth in the South and West », in Sunbelt Cities and Recent Urban America, édité par Robert B. Fairbanks et Kathleen Underwood, Arlington, University of Texas, 1990, ainsi qu’un récent ouvrage sous la direction d’Edward W. Soja et Allen J. Scott, The City : Los Angeles and Urban Theory at the End of Twentieth Century, Berkeley, UC Press, 1996.
7 L’évolution rapide du comté d’Orange a été étudiée par le géographe Allen J. Scott dans Technopolis : High-Technology Industry and Regional Development in Southern California, Berkeley, UC Press, 1993.
8 Pour les données concernant les activités portuaires du Worldport de Los Angeles et de Long Beach, cf. The Economist, 18 novembre 1994, « Pacific Shipping », p. 31, ainsi que Manuel Castells s’appuyant sur les travaux d’E. Soja et d’A.J. Scott, The Informational City, Cambridge, Basic Blackwell, 1989, chapitre 4 intitulé « The Rise of the Dual City ».
9 Mike Davis, « The L.A. Inferno », Socialist Review, vol. XXII-1, janvier 1992, p. 63.
10 Le terme de « ville duale » utilisé par Manuel Castells et celui de « ville globale » par Saskia Sassen sont en fait synonymes et signifient bien la présence d’une main d’œuvre peu qualifiée et mal payée où les minorités ethniques et les immigrés sont majoritaires. M. Castells et J. Mollenkopf (éd.), Restructuring New York : The Dual City, New York, Russel Sage et Saskia Sassen, The Global City : New York, London, Tokyo, Princeton University Press, 1991 (traduction française Descartes et Cie, 1996).
11 Cf. C. Ghorra-Gobin (éd.), Qu’est-ce qui institue la ville ? Penser la ville de demain, Paris, L’Harmattan, 1994.
12 Sur ce processus d’extension territoriale des villes, cf. Marcel Roncayolo, La Ville et ses territoires. Paris, Gallimard, « Folio Essais », 1990, ainsi que Villes et Civilisation urbaine xviiie-xxe siècle, avec Thierry Paquot, Paris, Larousse, 1992, collection « Textes Essentiels ».
13 La Security Pacific Bank a été absorbée en 1993 par la puissante banque de San Francisco, The Bank of America.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Les chemins de la décolonisation de l’empire colonial français, 1936-1956
Colloque organisé par l’IHTP les 4 et 5 octobre 1984
Charles-Robert Ageron (dir.)
1986
Premières communautés paysannes en Méditerranée occidentale
Actes du Colloque International du CNRS (Montpellier, 26-29 avril 1983)
Jean Guilaine, Jean Courtin, Jean-Louis Roudil et al. (dir.)
1987
La formation de l’Irak contemporain
Le rôle politique des ulémas chiites à la fin de la domination ottomane et au moment de la création de l’état irakien
Pierre-Jean Luizard
2002
La télévision des Trente Glorieuses
Culture et politique
Évelyne Cohen et Marie-Françoise Lévy (dir.)
2007
L’homme et sa diversité
Perspectives en enjeux de l’anthropologie biologique
Anne-Marie Guihard-Costa, Gilles Boetsch et Alain Froment (dir.)
2007