6. Les gaz à effet de serre
p. 55-56
Texte intégral
1On appelle « gaz à effet de serre* » les gaz présents en trace dans l’atmosphère terrestre qui ont la propriété d’absorber une partie des rayonnements infrarouges (i.e. chaleur) émis par la surface de la Terre, les soustrayant ainsi au rayonnement* global repartant dans l’espace ; la différence représentant donc l’effet de serre*.
2Le terme « gaz à effet de serre » fait en général penser spontanément au dioxyde de carbone (CO2), et en particulier à sa composante issue des activités polluantes (anthropiques). Or, peu de gens savent que le premier des gaz à effet de serre est en réalité la vapeur d’eau (H2O). Trois autres gaz sont également responsables de l’effet de serre « naturel » : le méthane, le protoxyde d’azote et l’ozone. S’ils sont tous naturellement présents dans l’air, les activités humaines produisent ces quatre gaz (CO2, CH4, N2O, et O3) de façon accélérée. L’augmentation de leur concentration dans l’atmosphère depuis le début de l’ère industrielle inquiète et demande à être surveillée. Le CO2 est effectivement le premier responsable de cette augmentation. D’autres gaz à effet de serre exclusivement issus des activités industrielles participent aussi à l’effet de serre additionnel. Ce sont les halocarbures lourds et autres gaz artificiels fluorés tels que les CFCs (les chlorofluorocarbones), les HCFCs (les hydrochlorofluorocarbones) et l’hexafluorure de soufre (SF6). Leur contribution est récente et particulièrement efficace.
Les différents gaz à effet de serre
3Le dioxyde de carbone, ou gaz carbonique (CO2) est majoritairement produit au cours de toute combustion des énergies fossiles* (charbon, pétrole, gaz). Les secteurs les plus émetteurs sont l’industrie, la production énergétique et les transports (figure 1). Il est aussi émis par la déforestation et l’agriculture intensive. Sa durée de vie dans l’atmosphère est d’environ 100 ans et sa composante anthropique est responsable d’environ 55 % de l’effet de serre additionnel.
4Le méthane (CH4) est à environ 60 % d’origine anthropique et 40 % d’origine naturelle (terres humides et termites). Il est produit principalement par les processus de décomposition de la matière organique et de fermentation anaérobie (élevage intensif de bovins, rizières, mise en eau de barrages, etc.), par les combustions (feux de forêts, utilisation du bois pour le chauffage et la cuisson) et les exploitations pétrolières et gazières (en raison des fuites). Notons aussi que le CH4 s’oxyde en CO2. Le méthane a une durée de vie (entre l’émission et la destruction chimique par les radicaux OH) de 12 ans et engendre environ 15 % de l’effet de serre anthropique.
5Le protoxyde d’azote ou oxyde nitreux (N2O) est émis naturellement (pour 33 % des sources) par les océans et les sols et produit par les engrais azotés utilisés dans l’agriculture intensive. Sa durée de vie est de l’ordre de 120 ans et il engendre environ 5 % de l’effet de serre anthropique.
6Les halocarbures (dont CFC* et HCFC*), et autres gaz artificiels fluorés (HFC, PFC, SF6) sont ensemble responsables d’environ 12 % de l’effet de serre anthropique. Ils sont utilisés dans les systèmes de climatisation et de réfrigération, dans les bombes aérosols, dans la fabrication de mousses isolantes ou dans les applications électriques. Réglementés par le protocole de Montréal, les CFCs tendent à disparaître naturellement, surtout depuis qu’ils ont été remplacés par les HCFCs dans les installations frigorifiques. Parmi les 3 « familles » de gaz (à effet de serre) artificiels réglementés par le protocole de Kyoto, le SF6 a la particularité d’être l’un de ceux qui a la plus longue durée de vie dans l’atmosphère : 3 200 ans. Malgré des concentrations moyennes très faibles (moins de 0,000 001 % de tous les gaz à effet de serre), les halocarbures ont des durées de vie extrêmement longues leur conférant un potentiel de réchauffement global très élevé.
7L’ozone troposphérique (O3) est le « dernier » gaz à effet de serre présent en partie naturellement dans l’atmosphère. On oublie très souvent de le citer. Contrairement aux autres, O3 a une durée de vie relativement courte, de 1 à 2 mois. D’autre part, il n’est pas émis directement, il est donc difficilement, voire absolument pas, contrôlable. En effet, c’est un composé secondaire dont la concentration dépend des émissions de polluants (NOx, CO par exemple) ou composés naturels (COV* biogéniques, CH4), dépendant à leur tour en partie du climat. Les processus de contrôle de sa distribution et de sa variabilité sont fortement non linéaires (i.e. non proportionnels aux émissions de précurseurs). Les problématiques liées à l’ozone sont en général axées sur le trou de la couche d’ozone (stratosphère) ou la dégradation de la qualité de l’air (en basse troposphère). L’ozone troposphérique engendre environ 10 % de l’effet de serre anthropique. Cependant, ce gaz n’est pas pris en compte dans les accords internationaux (i.e. Protocole de Kyoto), car il ne peut pour l’instant être régi par une métrique simple.
Conclusion
8La durée de vie dans l’atmosphère des gaz à effet de serre varie énormément. Leur contribution relative à l’effet de serre est donc variable. Une façon de mesurer « l’efficacité » de ces gaz est de calculer leur pouvoir de réchauffement global (PRG - figure 2). Ce dernier est défini comme le forçage radiatif* de la molécule cumulé sur 100 ans (normalisation par rapport au CO2). Ainsi, le PRG du SF6 est de 22 800. En d’autres termes, 1 kg de SF6 émis dans l’atmosphère produira le même effet, sur un siècle, que si on avait émis 22 800 kg de CO2. Mesurer et comprendre les distributions de tous les gaz à effet de serre (pas seulement le CO2) doit donc être une de nos préoccupations actuelles et futures.
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Références bibliographiques
10.14375/NP.9782081225091 :• H. LE TREUT et J-M. JANCOVICI - L’effet de serre. Allons-nous changer le climat ?, Flammarion, Champs Sciences, 2009.
• D. HAUGLUSTAINE, J. JOUZEL et H. LE TREUT - Climat : chronique d’un bouleversement annoncé, Le Pommier, 2004.
• Site du GIEC : http://www.ipcc.ch
• Dossier Changement climatique sur le site de Météo France : http://climat.meteofrance.com/chgt_climat2
Auteur
Physico-chimiste de l’atmosphère, Physicienne adjointe au CNAP, Coresponsable du Service d’Observation MOZAIC-IAGOS, Observatoire Midi-Pyrénées, Toulouse.
valerie.thouret@aero.obs-mip.fr
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Sophie A. de Beaune et Henri-Paul Francfort (dir.)
2012