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4. Sécheresse et canicule : incidence et prise en compte

p. 218-219


Texte intégral

1Les épisodes de sécheresse et de canicule comptent parmi les catastrophes naturelles qui causent le plus de dégâts et qui touchent le plus de personnes au monde. Une augmentation de leur fréquence et de leur intensité dans de nombreuses régions, sous différentes latitudes, semble être une conséquence attendue du réchauffement climatique. De fait, il est crucial de mieux caractériser ces événements, de les comprendre et d’essayer d’en atténuer les conséquences, voire de les anticiper (cf. I.7).

Les épisodes de sécheresse

2L’Organisation météorologique mondiale définit la sécheresse comme une période prolongée de déficit pluviométrique, qui se traduit par des pénuries en eau pour des populations, des écosystèmes ou des secteurs d’activité (agriculture, tourisme, transport, énergie). Néanmoins la grande diversité des secteurs menacés, les variations géographiques et temporelles de la vulnérabilité à la sécheresse, ainsi que de la demande en eau par les sociétés humaines et leurs activités, rendent très difficile l’adoption d’une définition universelle (cf. II.5). Ainsi, la sécheresse météorologique résulte des conditions atmosphériques qui peuvent engendrer une absence ou une réduction prolongée des précipitations. La sécheresse agricole survient lorsque les cultures n’ont pas assez d’eau pour leur développement et engendre une réduction de la production agricole et alimentaire. La sécheresse hydrologique affecte les réserves d’eau en surface, réduisant ainsi les débits des fleuves et le niveau des nappes aquifères, des lacs et réservoirs. Enfin, la sécheresse socio-économique survient lorsque la demande en eau pour un bien économique (eau domestique, fourrage, céréales, poisson, énergie) dépasse l’eau disponible, résultat à la fois des fluctuations du climat mais aussi des usages.

3Les sécheresses sont fréquentes et particulièrement graves dans les pays du Sud, touchés par l’aridité et le processus de désertification, où la population et l’économie dépendent souvent des pluies pour satisfaire les besoins alimentaires. L’Afrique Subsaharienne est très affectée depuis la fin du XXe siècle sous l’effet d’une réduction de près de 30 % des précipitations au Sahel en quarante ans, alors que la population y a doublé (figure 1). Au cours de cette période, se sont multipliés les exemples frappants de cette vulnérabilité, comme les sécheresses des années 1970, qui ont provoqué une famine dramatique, et celles des années 1980, qui ont décimé les troupeaux. Néanmoins, les pays du Nord ne sont pas épargnés par les sécheresses et leurs impacts. Citons l’exemple de l’été 2012 aux États-Unis, où l’absence prolongée de précipitations combinée à des températures exceptionnellement élevées a eu de graves conséquences sur la production agricole, l’élevage et les prix des denrées alimentaires. Un autre exemple est celui des sécheresses exceptionnelles dans le bassin amazonien, en 2005 et 2010, qui ont affecté 2,5 et 3,2 millions de km2 (près de 50 % de la superficie totale du bassin). Les niveaux d’eau des fleuves amazoniens ont alors atteint des minima historiques avec de considérables répercussions socio-économiques.

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Fig. 1 – Sécheresse et vent de sable à Diffa (Niger). © J. Kindra, mars 2012

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Fig. 2 – Observation de la fraction des terres émergées soumises à la sécheresse entre 1950 et 2010. D’après Dai, 2013

Les vagues de chaleur

4Les caractéristiques d’une vague de chaleur (fréquence, intensité et durée) dépendent fortement de la région où elle survient. Cet événement extrême est généralement associé à des températures particulièrement élevées sur un vaste territoire pendant plusieurs jours à plusieurs semaines. Ses conséquences sont souvent dramatiques avec une surmortalité des personnes à risque (personnes âgées, enfants), des conséquences économiques (production et consommation d’énergie, pénibilité du travail) et environnementales (pollution, feux de forêt, bilans de carbone). Les vagues de chaleur arrivent largement en tête des événements météorologiques les plus meurtriers aux États-Unis, loin devant les cyclones, les inondations et les tornades. De grands progrès sur la compréhension de ces phénomènes ont été réalisés après les vagues de chaleurs meurtrières survenues à Chicago (1995) et à Paris (2003). Ces deux événements résultent d’une situation atmosphérique estivale particulière, caractérisée par la persistance de conditions anticycloniques empêchant le passage de dépressions et favorisant la subsidence* et l’advection* d’air chaud. Dans l’hémisphère sud, c’est un retard de la mousson qui a expliqué la canicule sans précédents de janvier 2013 en Australie, avec 48,6° C enregistrés à Birdsville et un record de chaleur absolu mesuré en centre-ville de Sydney (45,8°C), battant l’ancien (45,3°C) qui datait de 1939. Les températures dans le pays ont atteint de tels records qu’une nouvelle couleur a dû être ajoutée sur les cartes météorologiques du Bureau de Météorologie australien.

Sécheresses et canicules dans le futur

5La diversité des définitions des sécheresses et des vagues de chaleur et le besoin de longues séries climatologiques homogènes rendent difficiles une quantification très précise de l’évolution de la fréquence et de l’intensité de ces phénomènes depuis le début du XXe siècle. Néanmoins, les analyses des observations convergent vers une aridification et une augmentation de la fréquence des épisodes de forte chaleur depuis les années 1950 dans de nombreuses régions du globe. De plus, ces observations corroborent les projections des modèles de climat, qui anticipent des sécheresses plus étendues et plus sévères dans les 30 à 90 prochaines années, résultant d’une baisse des précipitations et/ou d’une augmentation de l’évaporation, ainsi que d’une hausse de la fréquence et de l’intensité des vagues de chaleur. À la fin du siècle, d’après les projections des modèles climatiques en Europe, près d’un été sur deux pourrait être aussi chaud, voire plus chaud, que l’été 2003 !

6Des mesures d’adaptation sont cruciales pour réduire notre vulnérabilité à ces événements extrêmes*, afin d’éviter de forts dommages environnementaux, matériels, financiers et surtout sociaux (cf. V.29). Le dramatique été 2003, en France, a conduit à l’élaboration du plan canicule dès 2004, destiné à protéger les personnes à risques et à accroître la surveillance et l’alerte des vagues de chaleur. Toujours en France, depuis 2011, la surveillance des sécheresses a été renforcée notamment par la diffusion sur Internet des données sur les restrictions d’usage de l’eau. La veille climatique de ces événements extrêmes et les systèmes d’alertes précoces existent également partout ailleurs dans le monde. Renforcer et améliorer cette surveillance sont essentiels, car celle-ci contribue à augmenter la résilience* des sociétés face aux bouleversements engendrés par le réchauffement climatique.

Bibliographie

Références bibliographiques

• A. DAI – Increasing Drought under Global Warming in Observations and Models, Nature Clim. Change, 2013.

• C. SCHAR et al. – The Role of Increasing Temperature Variability in European Summer Heatwaves, Nature, 2004.

• G. A. MEEHL et C. TEBALDI – More Intense, More Frequent, and Longer Lasting Heat Waves in the 21st Century, Science, 2004.

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