L’habitat de Torre Sabea (Gallipoli, Puglia) dans le cadre du Néolithique ancien de l’Italie du sud-est
p. 377-385
Résumés
Les auteurs présentent le résultat de deux campagnes de fouilles réalisées à ce jour sur l’habitat néolithique ancien de Torre Sabea à Gallipoli (Pouilles).
Sont successivement décrits : la stratigraphie, l’analyse spatiale de l’aire fouillée et notamment les diverses structures domestiques rencontrées (structures de combustion, trous ronds ou ovalaires, petites fosses régulières, dépression à contour lâche). Les auteurs traitent ensuite de la culturelle matérielle : industrie de silex et d’obsidienne, outillage lourd, abondante céramique à décors d’impressions variées, parures. Un ensemble de recherches tentent de préciser les caractères de l’environnement et les activités de ces premiers agriculteurs : élevage surtout orienté vers les ovicapridés et les bovidés, culture du blé et de l’orge, environnement très découvert. Des datations absolues sont en cours. Des comparaisons sont tentées avec d’autres sites du Néolithique ancien de l’Italie du sud-est.
The authors present the results of two seasona of excavation completed at the Early Neolithic site of Torre Sabea (Gallipoli, Pouilles, Italy) : stratigraphy, spatial analysis of the site, and, notably, the various domestic structures (fire pits, round and ellipsoid pits, etc.). The authors next review the archaeological material : flint and obsidian industries, thelarge stone tools, the abundant pottery with a highly varied impressed ornamentation, and ornaments. Complementary studies examine the natural environment and the subsistence activities of this early farming community : animal herding oriented principally towards sheep, goat and cattle ; cultivation of wheat and barley ; in an environment with a largely open vegetation. Comparisons are drawn with other early Neolithic sites in southeastern Italy.
Texte intégral
1Deux campagnes de fouilles ont eu lieu à ce jour sur le site de Torre Sabea à Gallipoli. Cette recherche s’inscrit dans un programme de travail élaboré entre l’Université de Lecce et l’École Française de Rome. Les travaux sont conduits par l’Institut de Paléontologie Humaine de l’Université de Pise et le Centre d’Anthropologie des Sociétés Rurales (E.H.E.S.S./C.N.R.S., Toulouse). La problématique de cette recherche concerne l’émergence des sociétés paysannes en Italie du Sud-Est. Elle est articulée autour de plusieurs directions :
l’étude d’un site du Néolithique primitif du Golfe de Tarente permettant de mieux définir l’identité des premières civilisations agricoles du Salento (et de les comparer éventuellement avec les cultures contemporaines de l’Adriatique et de l’aire tyrrhénienne) ;
les caractères d’une petite agglomération de plein air (aménagement de l’espace habité, typologie des structures et relations) ;
l’impact de l’homme sur son environnement immédiat à une époque décisive pour l’évolution du milieu, celle où se met en place l’économie de production (élevage, agriculture) et où le paysage subit rapidement des agressions irréversibles.
2Le site de Torre Sabea est un habitat aujourd’hui côtier, situé à 3 km au nord de Gallipoli, au lieu-dit Porticello, à proximité immédiate d’un banc rocheux battu par les flots (Fig. 1). Il est vraisemblable que la mer a endommagé sur sa côte ouest une partie de cet habitat qui, d’autre part, a été en partie détérioré, sur son côté oriental, par une construction romaine d’époque républicaine. La surface fouillée à ce jour totalise une centaine de mètres carrés. Cette superficie sera encore élargie prochainement. Les résultats ici présentés ont donc valeur provisoire.
3On évoquera successivement :
la stratigraphie du gisement
les structures au sein de l’espace domestique
la culture matérielle
le paléoenvironnement
les problèmes chronologiques
le contexte régional : Torre Sabea et le Néolithique ancien de l’Italie du Sud-Est.
La stratigraphie :
4Le remplissage incluant la couche d’occupation néolithique n’est pas puissant. Sous le sable correspondant à la plage actuelle se trouve une terre tassée, brune, sableuse, renfermant les vestiges préhistoriques. Ceux-ci peuvent s’enfoncer localement dans une couche inférieure d’argile rouge reposant elle-même sur le substratum gréso-calcaire parfois découpé en plaques. L’ensemble de la séquence excède rarement 0,50 à 0,60 m. Des structures néolithiques ou plus récentes peuvent affecter la régularité des dépôts. Il est possible de détailler davantage cette sédimentation.
Couche 1 : Puissance variant de 0,02 à 0,20 m. Couche de sable, meuble en surface, tassé ensuite. Dans la partie tassée de la couche figurent des pierres chauffées correspondant à des structures préhistoriques ou historiques démantelées ou conservées. Quelques-uns de ces aménagements de combustion, d’ampleur assez forte (1,45 m de diamètre en J-K/10-11-12 ; 2,50 m X 1,70 m de diamètre en I-J-K/13-14), ne sont pas datés avec précision, faute de données indiscutables (ils contiennent du matériel néolithique mais aussi quelques tessons romains dont il est difficile de certifier la position primaire ou secondaire). Hauteur des trous les plus profonds : 0,60 m.
Couche 2 : Épaisseur variant de 0,10 à 0,35 m. Couche fine argilo-sableuse correspondant à l’occupation du Néolithique ancien. Elle renferme du matériel archéologique, des restes de faune (mieux conservés à la base de la strate qu’au sommet) et aussi des pierres brûlées parfois intégrées à des aménagements. La base de la couche est de teinte plus sombre que la partie supérieure. L’analyse de l’espace montre la présence de plusieurs structures de combustion, d’agencements qui ont pu être des calages, enfin de fosses ou de cuvettes à la signification moins claire. Creusés à partir de la couche d’habitat, ces éléments s’enfoncent fréquemment dans l’argile rouge.
Couche 3 : Puissance allant de 0,20 à 0,40 m, voire au delà. Couche d’argile rouge, encrassée dans sa partie supérieure de passées sableuses ou de vestiges anthropiques ; plus claire et plus plastique à la base où elle est parfois affectée par les pointements du substratum.
5On retrouve semblable ordonnancement du remplissage sur toute l’aire fouillée avec, toutefois, des variantes localisées. Ainsi sur le front ouest l’ensemble des couches va en s’amincissant très nettement en raison du pendage et de la proximité du rivage ; dans le secteur nord-est de la fouille actuelle une bosse de l’argile rouge (C 3) a réduit C 2 à une épaisseur presque nulle.
Les structures au sein de l’espace domestique :
6La plupart des structures néolithiques paraissant liées à la combustion s’ouvrent au niveau de la couche 2, à partir de laquelle elles ont été creusées, et s’enfoncent dans la partie inférieure de la couche et dans l’argile de base. Elles sont concentrées à ce jour dans la partie nord de l’aire fouillée (Fig. 2).
7Ces structures de combustion ont un certain nombre de points communs bien que des détails les différencient quelquefois. Généralement sub-circulaires, leur diamètre moyen oscille entre 0,70 et 1 m mais il en est de plus restreintes. En surface apparaissent de nombreuses pierres mêlées, serrées ; plusieurs, de teinte gris ou rouge, fissurées ou fragmentées en place attestent leur chauffage. La périphérie de la structure est parfois ceinturée de pierres disposées en couronne. Les cuvettes sont généralement peu profondes (de 0,15 à 0,40 m au maximum ; le plus souvent vers 0,20 m). Elles sont remplies de pierres chauffées ; les pierres adhérant à la paroi épousent l’inclinaison de celle-ci et peuvent être posées à plat. Ces vestiges sont éventuellement liés à un remplissage argilo-sableux gris-noir. Sauf dans un cas précis (carré G 14), on n’a jamais recueilli d’authentiques charbons, de tels indices n’ayant pas survécu en milieu sableux humide ; il en va de même des rubéfactions de la paroi, non lisibles dans un tel contexte.
8Parmi les structures « inférieures » creusées dans l’argile rouge il est possible de reconnaître :
des trous ronds ou ovalaires dont les dimensions vont de 0,10 à 0,70 m (profondeur variable). Il est possible mais non certain que quelques-uns aient été des trous de poteaux (notamment l’un, en L8 - M8, qui contenait des pierres très obliques ayant pu faire fonction de calage).
des dépressions assez grandes, à contour irrégulier, emplies de pierres et de déchets divers. Il semble s’agir d’excavations réutilisées en dépotoirs.
des fosses régulières, souvent petites et profondes. Certaines étaient remplies de vestiges (faune, céramique) ou comblées de pierres. On peut émettre l’hypothèse qu’il s’agit de fosses à réserves dont le remplissage ne correspond pas à l’utilisation primaire.
9Toutes ces structures posent le problème de leurs relations spatiales et chronologiques.
La culture matérielle :
A. Outillage de pierre :
10Il comporte une industrie légère de pierre taillée et un matériel lourd destiné essentiellement au broyage.
Industrie de la pierre taillée :
11Elle est tirée essentiellement d’un silex blanc, gris ou bleuté. Une industrie en obsidienne demeure statistiquement très limitée (8 pièces). On a fait appel, occasionnellement, au quartzite et au calcaire. Le débitage en petits éclats est fréquent ; on a aussi tiré du silex des lames et lamelles très régulières, de bonne venue.
Armatures : une trentaine connues à ce jour (Fig. 3, 1 à 9). Les plus fréquentes sont des trapèzes sur lame, à bords concaves, à retouche abrupte, voire verticale. Plusieurs possèdent un piquant trièdre caractéristique.
Pointes : obtenues quelquefois sur des lames ou des lamelles en abattant par retouche abrupte (parfois inverse) un côté distal de la pièce rendue ainsi courbe ; on connaît aussi de petites pointes retouchées genre perçoirs (Fig. 3, 13 à 16).
Couteaux (lames et lamelles) : à côté de quelques lames, souvent cassées, figure essentiellement une industrie de lamelles brutes ou portant des retouches continues ou non, parfois inverses (Fig. 3, 18). Il existe aussi de simples « fils ébréchés ». Une lame cassée, à denticulations régulières, genre scie, pouvait être un élément de faucille.
Lustrés (Fig. 3, 17, 23) : figurent quelquefois sur des lamelles au tranchant brut ou denticulé. Le lustré est souvent très net, brillant. La zone emmanchée est particulièrement visible sur un exemplaire.
Pièces à encoches : assez fréquentes sur lamelles. Une lamelle porte deux encoches face à face étranglant la pièce.
Pièces à dos : présence de quelques lamelles à dos abattu (Fig. 3, 12).
Microburins : cinq connus à ce jour (Fig. 3, 10, 11).
Denticulés : plusieurs.
Troncatures : rares.
12Grattoirs : ils sont en général de petite taille, en bout de lamelle ou sur éclats (présence dans ce cas du grattoir rond typique) (Fig. 3, 19-22).
13Parmi les huit pièces en obsidienne figurent : trois éclats, un fragment de lamelle, un grattoir en bout de lamelle, une lamelle retouchée, deux lamelles à retouche inverse. Ce matériau pose le problème de son origine. L’analyse selon la méthode des traces de fission, appliquée par G. Bigazzi sur un petit éclat, donne comme probable une provenance de l’île de Lipari.
Industrie lourde :
14Plusieurs meules cassées, voire en fragments, ont été retrouvées (l’une, piquetée sur sa face de travail, présente une section piano-convexe). Des galets de calcaire ont pu être des éléments de broyage ou des lissoirs (certains accusent un net poli). On note la présence d’une hématite polie et d’un fragment de hache.
B. La céramique :
15Particulièrement abondante, elle constitue le matériel d’étude le plus varié.
Formes : peu diversifiées.
Bols ou marmites hémisphériques (la forme du pied reste, dans ce cas, peu déterminable).
Pots de fleur ou jarres cylindroïdes à col droit ou légèrement rentrant et à fond plat.
Urnes pansues à col cylindrique étroit, à fond plat ou annulaire.
Coupes (ou vases à fruits) larges, à pied annulaire ou évasé.
16Les récipients, si l’on en juge par l’épaisseur et la courbure des tessons, devaient être fréquemment de gros volume. Les pieds notamment sont bien typés. Ils sont généralement plats avec, parfois, un léger étalement. Il existe plusieurs pieds annulaires (dont la surface est fréquemment décorée).
17Les éléments de préhension sont excessivement rares : aucun téton ou oreille de préhension, seulement quelques anses larges, bien dégagées.
Ornementation :
18Les techniques de la décoration sont axées sur l’impression : appui dans la pâte de coquillages, de doigts, d’ongles, de végétaux, de matrices diverses, etc.. (Fig. 4). La décoration de sillons et de cannelures au poinçon est également fréquente. Plus rare est l’ornementation de fins sillons ou la gravure : ces techniques sont généralement liées à quelques récipients à pâte gris jaune très épurée. Quelques parois, de teinte rouge-bordeaux accusée, ont peut-être été peintes.
19L’ornementation a tendance à couvrir la totalité de la superficie externe du récipient. La disposition en est souvent peu recherchée : impressions au parallélisme ou à l’équidistance très relatifs, motifs se chevauchant, composition désordonnée. Les motifs peuvent être réduits à quelques grandes tendances.
La décoration « cardiale » (et, dans un sens plus large, toute celle obtenue par impression de coquille) est abondante : impressions parallèles verticales ou horizontales, motifs en chevrons verticaux, triangles recoupés par une ligne verticale, dents de loup, motif pivotant « en flamme », etc. La fréquence de cette technique mérite d’être soulignée.
Le décor d’impressions les plus diverses est prédominant. Les motifs sont très variés : ronds, triangulaires, ovalaires, fusiformes, en croissant, en larmes, etc. La disposition comporte des lignes parallèles, des faisceaux, des panneaux et, souvent, des motifs de deux lignes à impressions disposées « en épi ». Le rejet de pâte entraîné par l’impact de l’impression donne souvent aux récipients ainsi décorés un aspect rustique recherché.
Le décor de sillons ou de courts traits incisés est également fréquent : sillons parallèles, zigzags verticaux, quadrillages grossiers, chevrons. Un tesson décoré de traits verticaux comportait peut-être une intention pictographique.
20La céramique épurée, très minoritaire, comporte quelques motifs finement incisés ou gravés plus originaux : motif arbalétiforme (anthropomorphe ?) traité selon la technique « a rocker », un motif ondé, des triangles rayés et une bande quadrillée de style matérien.
C. Les parures :
21Conus et Columbella rustica ont été perforés latéralement, près de l’orifice, pour être suspendus. Quelques dentales. Plus originaux sont une pendeloque en test de pétoncle, un fragment de bracelet en test, une petite perle discoïde, une perle olivaire en coquillage. Une pendeloque massive, en calcite ambrée, brisée à l’attache est un document rare dans un tel contexte.
Le paléoenvironnement :
22L’approche du paléoenvironnement à une époque où l’homme se met à transformer le paysage par le biais de l’élevage et de l’agriculture constitue un axe de recherche privilégié. Il est possible de dresser un bref état des déterminations en cours sans préjuger d’études plus approfondies menées par divers spécialistes.
La faune et l’élevage (J.-D. Vigne) :
23En termes de fréquence des espèces, les ovicaprins dominent, suivis par le bœuf, les suidés et les cervidés. Les ovicaprins domestiques totalisent, à eux seuls, environ 50 % de la faune autant en NR qu’en NMI ; les vestiges qui se prêtent à une détermination se rapportent au mouton. Les bovidés paraissent se rattacher au bœuf domestique, animaux assez gros, mesurant de 1 à 1,30 m au garrot. Le statut des suinés ne peut être correctement évalué. Parmi les espèces sauvages : renard, loutre, chevreuil, cerf, tortue terrestre, poissons.
L’agriculture (P. Marinval) :
24En dehors des documents archéologiques, la présence de l’agriculture est confirmée par l’étude de macrorestes végétaux, malheureusement fort rares. Ont été reconnus : l’amidonnier (Triticum dicoccum, 5 graines à ce jour), l’engrain (Triticum monococcum, 1 grain aux extrémités brisées), l’orge (sans doute Hordeum vulgare, 5 grains, dont les extrémités sont brisées). On a isolé aussi 5 graminées non identifiées pour l’instant1.
Les données de la palynologie (M. Bui Thi Mai) :
25Les résultats obtenus par Mme Bui Thi Mai semblent indiquer que le paysage de l’époque était caractérisé par une pelouse herbacée constituée essentiellement de composées et de graminées ; les cichoriées, très importantes (82,81 %), semblent indiquer qu’une grande partie des espaces libres devait être consacrée aux pâturages. L’absence de pollens de céréales pourrait indiquer une certaine distance de l’habitat par rapport aux aires cultivées. L’action anthropique est nettement démontrée par la fréquence de taxons de plantains, chenopodiacées, urticacées, caryophyllacées, crucifères, graminées et autres composées.
Les charbons, très rares, sont en cours de détermination (J.-L. Vernet).
Malacologie (J. André et J. Granier) :
26Le site a livré divers vestiges de l’espèce Eobania vermiculata. Le polymorphisme de celle-ci est très mal connu. Il faudra l’associer à l’étude de la microfaune malacologique (travaux en cours de J. André). La faune malacologique marine comporte une trentaine d’espèces. Parmi les plus fortes représentations : Glycimeris violascescens (Lam.), Cerastoderma edule glaucum (Brug.), Patella aspera Lam., Monodonta turbinata (Born), Area Noae L., Rudicardium tuberculatum L.), etc.
Les problèmes chronologiques :
27Les problèmes chronologiques sont essentiels. Le site correspond en effet à la plus ancienne phase néolithique d’Italie du Sud. Plusieurs questions se posent à son sujet : quelle est sa position dans le temps dans le cadre du déroulement du Néolithique de l’Italie sud-orientale à poterie imprimée ? Comment se situe-t-il notamment par rapport au Néolithique ancien thessalien ou au Néolithique ancien dalmate ? Est-il très nettement antérieur ou non au Cardial franco-ibérique ? En l’état des connaissances ces questions demeurent en suspens par suite du nombre extrêmement réduit des datations absolues concernant ce premier Néolithique sud-italien. C’est pourquoi un effort particulier est en cours pour mener à bien la datation du site de Torre Sabea. Cette approche prend par ailleurs un caractère expérimental dans la mesure où plusieurs méthodes sont utilisées, voire testées, dans cette recherche : datation par thermoluminescence (D. miallier et J.-P. Daugas), datations C 14 sur charbons (très rares), sur céramique modelée, sur torchis (J. Evin).
Torre Sabea et le Néolithique ancien de l’Italie du Sud-Est :
28Un récent travail sur la néolithisation de l’Italie méridionale (Tiné, 1976) indique que la plupart des sites rapportés dans cette région à cette période sont plus ou moins remaniés. Il s’agit non seulement de dépôts en grotte comme la grotte de Prazziche et la grotte delle Mura — dont les stratigraphies sont discutables, si l’on en croit la récente analyse des matériaux (Coppola, 1981 a) — mais aussi des sites de plein air plus connus tels Coppa Nevigata et le village de Molfetta, site éponyme de ce faciès. Pour ce qui concerne les autres gisements signalés par S. Tiné (Prato Don Michele, Rendina, Grotta del Guardiano, niveau inférieur, Favella), les données publiées à ce jour sont insuffisantes pour essayer de réaliser des comparaisons autres que générales.
29Parmi le matériel peu abondant du niveau inférieur de la Grotta del Guardiano (16 tessons de céramique et 5 outils de silex), on peut seulement remarquer la présence de quelques éléments trapézoïdaux et rhom-boïdaux à piquant trièdre et l’emploi de la technique du microburin (Ceccanti, 1981). Les céramiques de Prato Don Michele (Fusco, 1965) sont plus largement décrites et les décors sont tout à fait semblables à ceux de Torre Sabea ; toutefois l’industrie lithique, peu abondante, incluant même une pièce « campignienne », ne comporte aucun élément comparable au complexe de Torre Sabea. Parmi les sites de plein air, ceux situés sur la côte adriatique au Nord de Brindisi, c’est-à-dire Torre Bianca, Torre Canne (Punzi, 1968, 1969) et Fontanelle (Coppola, 1981 b), ont fourni des séries semblables à celles de Torre Sabea, autant en ce qui concerne les caractères de la céramique que pour ce qui est de l’industrie lithique (trapèzes bien représentés). Malheureusement l’homogénéité de ces ensembles n’est pas évidente. Dans ces trois sites on note la présence d’outils attribuables sûrement au Paléolithique moyen et supérieur. A Torre Canne, il n’est pas exclu qu’une partie du matériel n’appartienne à une phase plus récente du Néolithique : poteries gravées et peintes à bandes rouges, céramiques de la culture de Diana. De ce fait il est délicat de dater les fragments de torchis dans lesquels ont été trouvés des grains à’Hordeum sp. (13), de Triticum dicoccum (4) et de Triticum monococcum (2) (Evett et Renfrew, 1971). Il est intéressant de noter que, parmi les trapèzes de Fontanelle, il en est un en obsidienne et que quelques échantillons d’obsidienne de ce site, proviennent, selon les premières analyses de G. Bigazzi, de Lipari.
Conclusions :
30En conclusion on tirera un bilan des acquis provisoires :
Le site de Torre Sabea permet d’étudier dans une perspective culturelle un bon ensemble homogène se rapportant à la plus ancienne vague ayant assumé en Italie sud-orientale l’émergence de l’économie de production. Le matériel mis au jour, abondant et diversifié, constituera après exploitation un bon catalogue de référence pour cette période.
L’analyse de l’espace est rendue possible par la bonne conservation d’un certain nombre de structures domestiques. Cette direction de recherche, peu développée jusqu’à ce jour en Italie méridionale sur des sites de cette époque, est donc privilégiée.
La restitution du paléoenvironnement dans l’optique de sa rapide modification par suite des premières agressions anthropiques des agriculteurs demeure l’un des axes essentiels de cette recherche. Les premiers résultats montrent dès le début du Néolithique un large impact de la communauté de Torre Sabea sur son milieu.
Les recherches en cours en matière de chronologie absolue seront à même de préciser, outre la chronologie ponctuelle du site, certaines étapes de la transmission de la première économie de production au bassin méditerranéen occidental et d’en cerner les modalités.
Bibliographie
Bibliographie :
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Coppola (D.). 1981 a. Grotta délia Mura, in A.A.V.V. « Il poplamento antico nel Sud-Est barese », Monopoli.
Coppola (D). 1981 b. La distribuzione degli insediamenti e delle grotte nel Brindisino e nel Tarentino : contributo allo studio delle origini e délia diffusione délia civiltà neolitica, Lingua e Storia in Puglia, XI.
Evett (D.), Renfrew (J.). 1971. L’agricoltura neolitica italiana : una nota sui cereali, Rivista di Scienze Preistoriche, XXVI.
Fusco (V.). 1965. Insediamento neolitico nell’isola di San Domino aile Tremiti, Atti X Riun. Scient. Ist. Ital. Preist. Protost.
Punzi (Q). 1968. La stazioni preistoriche costiere del Brindisino, Rivista di Scienze Preistoriche, XXIII.
Punzi (Q.). 1969. L’insediamento neolitico di Torre Canne, Ricerche e Studi, n° 4.
Tiné (S.). 1976. La neolitizzazione dell’Italia peninsulare, in « La néolithisation de l’Europe occidentale », Colloque XXI, IXe Congrès de l’Union Internationale des Sciences Préhistoriques et Protohistoriques, Nice, 1976.
Notes de fin
1 De nouvelles recherches (1983) ont permis de recueillir un grand nombre de graines de céréales carbonisées.
Auteurs
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Les chemins de la décolonisation de l’empire colonial français, 1936-1956
Colloque organisé par l’IHTP les 4 et 5 octobre 1984
Charles-Robert Ageron (dir.)
1986
Premières communautés paysannes en Méditerranée occidentale
Actes du Colloque International du CNRS (Montpellier, 26-29 avril 1983)
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1987
La formation de l’Irak contemporain
Le rôle politique des ulémas chiites à la fin de la domination ottomane et au moment de la création de l’état irakien
Pierre-Jean Luizard
2002
La télévision des Trente Glorieuses
Culture et politique
Évelyne Cohen et Marie-Françoise Lévy (dir.)
2007
L’homme et sa diversité
Perspectives en enjeux de l’anthropologie biologique
Anne-Marie Guihard-Costa, Gilles Boetsch et Alain Froment (dir.)
2007