1.11. Mangeur et multiculturalité
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Texte intégral
1Le rôle de l’alimentation dans la transmission des valeurs et des normes collectives ainsi que dans le maintien des liens sociaux a été mis en lumière dans de nombreux travaux socio-anthropologiques. L’acte alimentaire est une activité symbolique par laquelle les individus donnent à voir les modalités de leur rapport au monde, aux autres. À travers lui et en interaction, ils construisent une « réalité commune » faite de représentations sociales partagées. Celles-ci sont fondamentales dans les processus qui sous-tendent le sentiment d’appartenance à un groupe social ou une société. Les sociétés multiculturelles ont ceci de particulier que s’y entremêlent plusieurs modèles alimentaires adossés eux même à des systèmes culturels différents. L’intérêt empirique des contextes multiculturels est double. Le premier est de permettre l’étude des modalités de contact de ces modèles, la porosité de leurs frontières, la mise en place d’espaces pratiques et symboliques communs plus ou moins importants et enfin leur dynamique sous l’effet de transformations socioéconomiques. Le second tient au fait que par leurs dimensions à la fois pratiques et symboliques, ils constituent des entrées privilégiées pour étudier le rôle de l’alimentation dans l’expression des identités sociales et culturelles et dans les processus de régulation à l’œuvre dans la cohabitation et le vivre ensemble. En tant que support de représentations symboliques, mais aussi en tant que pratique quotidienne, l’alimentation est au cœur des constructions sociales par lesquelles s’élaborent, au-delà des différences, les représentations sociales communes qui portent le vivre-ensemble. Elle est donc un système de symboles incorporés, quotidiens et festifs, à travers lesquels les sociétés se mettent en scène, expriment les différences qui les constituent en même temps qu’elle est un espace où s’articulent les diversités. À travers certaines préparations culinaires, certaines manières de manger ou de boire communes, les mangeurs actualisent, entretiennent et renouvellent le sentiment d’appartenance aux différents niveaux de la société multiculturelle. À côté de cette valorisation d’un patrimoine partagé, les spécificités culturelles sont exprimées grâce aux plats ou les fêtes emblématiques de tels ou tels groupes culturels. Deux mouvements cohabitent ainsi dans l’alimentation multiculturelle ; l’un affirmant les différences et l’autre désignant un en-commun. De leur combinatoire résultent différentes situations multiculturelles et avec elles, diverses formes de métissages.
Bibliographie
Références bibliographiques
• Etien M.-P., Tibère L., « Alimentation et identité entre deux rives », Hommes et migrations 2013 ; 1303 : 57-64.
• Tibère L., L’alimentation dans le vivre-ensemble multiculturel : l’exemple de La Réunion, l’Harmattan, Paris, 2009.
Auteur
Sociologue de l’alimentation
UMR « Centre d’Étude et de Recherche Travail Organisation Pouvoir »
CNRS - Université Toulouse
Jean-Jaurès
Toulouse
laurencemaryse1968@gmail.com
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