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    Plan détaillé Texte intégral Lucien et le mélange des genres : un hippocentaure actuelTransgénéricités énonciatives, thématiques, stylistiquesEffets de transmédialité et jeux synesthésiquesHistoires Vraies, I, 17-18 : le(s) centaure(s) en batailleHistoires vraies, ΙI, 5-6 : l’île des Bienheureux, une métafiction sensibleÉpilogue : entre immersion et critique, la transmodernité de Lucien Notes de bas de page Auteur

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    Table des matières

    3. La transgénéricité des Histoires vraies

    L’hybridation et la bigarrure comme modes de création, critique et connaissance

    Michel Briand

    p. 71-89

    Texte intégral Lucien et le mélange des genres : un hippocentaure actuelTransgénéricités énonciatives, thématiques, stylistiquesEffets de transmédialité et jeux synesthésiquesHistoires Vraies, I, 17-18 : le(s) centaure(s) en batailleHistoires vraies, ΙI, 5-6 : l’île des Bienheureux, une métafiction sensibleÉpilogue : entre immersion et critique, la transmodernité de Lucien Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    1La réflexion présentée ici est en elle-même un hippocentaure paralucianesque, en deux étapes hétérogènes mais liées ; la première, générale, sur le mélange des genres chez Lucien et les principaux types de transgénéricité à l’œuvre notamment dans les Histoires vraies, en relation avec des effets typiques de transmédialité et de synesthésie ; la seconde appliquée à deux passages dont la nature vivement ecphrastique fait de bons exemples des enjeux esthétiques, culturels, rhétoriques de la mixis : la fin de la bataille cosmique (I, 17-18) et l’arrivée du narrateur et de ses compagnons à l’île des Bienheureux (II, 5-6).

    Lucien et le mélange des genres : un hippocentaure actuel

    2Dans le cadre d’un ouvrage présentant des perspectives très variées et mêlant, en adéquation avec son objet d’étude, tous les genres de la réflexion philologique et littéraire, on peut insister sur la labilité et l’historicité de cette notion de genre, appliquée à l’analyse poétique, rhétorique et discursive, et issue d’abord de la classification naturaliste, puis plus largement sur la grande diversité de ce qu’on peut entendre par genre et classification : on préfèrera ici une catégorisation prototypique des genres littéraires et discursifs, par air de famille, plutôt qu’un système étanche, fondé sur des structures d’oppositions binaires, considérées comme universelles, voire permanentes. On peut à ce propos évoquer la notion hellénistique de polyeideia1 : l’« invention de la littérature » telle qu’elle se développe de la Grèce archaïque et classique au monde gréco-romain, en passant par Alexandrie, s’accompagne souvent de déclarations assurées sur le caractère original et mêlé, notamment transgénérique, des nouvelles formes poétiques et rhétoriques, par rapport aux genres anciens, réputés cloisonnés et strictement liés à un contexte rituel et social précis. Pourtant, par exemple pour la poésie dite « lyrique », c’est la philologie hellénistique qui a créé les sous-genres (épinicie, éloge amoureux, hymne religieux, chant de deuil, de banquet, joute pastorale, etc.), comme des artefacts critiques que la poésie alexandrine, par exemple Théocrite dans ses Idylles, dit mêler2. Un trouble similaire dans les genres littéraires et discursifs peut être décelé dans la distinction, en fait moderne ou au moins postclassique, entre histoire et fiction narrative3 ou encore entre récit et description4.

    3Mais en préambule, en deçà de cette question vive du mélange des genres qui sera abordée plus loin à propos des seules Histoires vraies, on peut être frappé par une certaine double actualité de Lucien de Samosate et de la question du mélange des genres :

    • d’abord une actualité culturelle, sinon politique, celle de la parrhêsia satirique. En février 2015, en ouverture d’un colloque qui se tenait à Poitiers à la faculté de droit et sciences sociales, intitulé, en lien avec de graves événements récents, Le blasphème dans une société démocratique, des collègues de disciplines éloignées des études classiques ont eu l’occasion de découvrir cette figure hybride et bigarrée du Syrien grec et romain, Lucien, en étudiant dans son œuvre les emplois de la blasphêmia, en relation dialectique avec les notions de parrhêsia mais aussi d’euphêmia5. Dans le titre de l’avant-propos rédigé pour les actes de ce colloque, on reconnaîtra dans la formule « Maintenant donc pour des mots vous allez me tuer ? », une citation tirée du texte Les Ressuscités ou le Pêcheur (§ 3), question angoissée du Libre-Parleur (Παρρησιάδης, Celui-qui-parle-avec-franchise), poursuivi par la meute des vrais et faux philosophes que mène Socrate. Associant pensée et discours critique aux enjeux d’une philosophie qui, loin de détester la rhétorique, en fait un outil éthique, cognitif et communicationnel, cette figure active d’un Lucien orateur et sceptique renvoie aussi à la multiculturalité qui le définit, fondée sur une conception hybride et dynamique de l’identité, plurielle pour un même individu, et non pas étanche, fermée sur une seule communauté d’appartenance ; c’est le lieu de se rappeler la justement célèbre expression d’Isocrate : « notre cité (Athènes) a fait employer le nom des Grecs non plus comme celui de la race (γένος) mais comme celui de la culture (διάνοια, pensée, dessein), et on appelle Grecs plutôt les gens qui participent à notre éducation (παίδευσις, instruction) que ceux qui ont la même origine (ϕύσις, naissance, parenté, nature) »6. Ce « mélange de genres » culturels, promu en modèle politique et social vivant, a d’ailleurs à voir avec le développement de la pensée critique, en particulier d’inspiration sceptique, comme l’a montré récemment J.-M. Narbonne7 : les redécouvertes successives de Lucien, par exemple par l’humanisme renaissant ou durant les Lumières préfigurent d’ailleurs, espérons-le, le développement d’une culture critique contemporaine qui sache reconnaître aussi cette référence indissociablement philosophique et rhétorique.

    • ensuite, une seconde actualité qui rassemble les contributeurs à cet ouvrage sur le « mélange des genres », plus paradoxale parce que plus proprement littéraire. Lucien nous parle d’autant mieux que, comme l’a parfaitement montré K. ní Mheallaigh8, il peut être qualifié de postmoderne, plus que simplement postclassique. Le label « transmoderne », en rapport avec les notions de transfiction, de transmédialité et de transgénéricité, sur lesquelles nous reviendrons plus loin, conviendrait peut-être mieux, du fait qu’il court moins le risque de favoriser une vision linéaire de l’histoire littéraire, à laquelle nous préfèrerions une figuration spiralaire9

    • mais cette distinction n’est pas déterminante ici. L’esthétique lucianesque partage en effet avec certains mouvements de notre temps, entre la fin du xxe et le début du xxie siècle, notre quatrième ou cinquième sophistique postmoderne, bien des caractéristiques, comme le montre aussi la comparaison désormais fréquente avec Umberto Eco, auteur à la fois du Nom de la rose et de La Structure absente, introduction à la recherche sémiotique ou autres Lector in Fabula10.

    Transgénéricités énonciatives, thématiques, stylistiques

    4Avant de les prolonger par l’étude de deux passages précis, voici quelques observations générales sur le mélange des genres dans les Histoires vraies de Lucien, conçues comme une œuvre à la fois littéraire et spectaculaire. La première est qu’un récit comme les Histoires vraies est typiquement transgénérique à plusieurs niveaux, complémentaires et en tension, sur le plan littéraire et discursif, mais aussi en ce qui concerne les thèmes traités, les lieux décrits ou les personnages mis en scène et en intrigue. Le premier type de transgénéricité rencontré dans cette œuvre est celle que l’histoire et la théorie littéraires repèrent dans le genre constitutivement polyphonique et dialogique, en termes bakhtiniens, qu’est le roman. Et cela depuis les débuts antiques du genre, où il s’agit plutôt d’une fiction narrative au sens large, incluant ce que les modernes appellent anachroniquement roman, mais auquel on peut adjoindre des voyages paradoxographiques (les Merveilles d’au-delà de Thulé d’Antoine Diogène), des fictions épistolaires (Alciphron par exemple) ou diverses autobiographies ou autofictions (chez Galien aussi, par exemple)11. Cette transgénéricité est encore plus sensible quand l’auteur ou le narrateur en joue explicitement, comme chez Achille Tatius, et encore mieux dans les réalisations du roman les plus postclassiques, réflexives, ironiques, métafictionnelles12. En ce sens les Histoires vraies ont quelque chose du roman métafictionnel postmoderne, du fait notamment de passages déterminants, bien étudiés par exemple dans le commentaire de A. Georgiadou et D. Larmour13 : par exemple la préface (et son fameux paradoxe d’inspiration socratique14 : « je dis la vérité (contrairement à ceux qui se présentent comme historiens) puisque je dis que je mens/ je fais de la fiction » ; les prolaliai qu’on peut associer aux Histoires vraies, Dionysos mais aussi Héraclès, sur les pouvoirs paradoxaux de la parole et du spectacle rhétoriques15 ; le miroir-puits qui permet d’observer du haut de la Lune tout ce qui se passe sur terre, selon, pourrait-on dire, une figuration de la position supérieure occupée par le bon lecteur (I, 26) ; le séjour dans la baleine comme réécriture paradoxale de la caverne platonicienne16 (I, 30-II, 2) ; la rencontre avec Homère dans l’île des Bienheureux (II, 20), et la critique de la philologie d’époque hellénistique et impériale qui s’y exprime ; ou encore l’île des Songes (II, 32-35), alliant allégorie sério-comique des mondes de la veille et du sommeil en miroir et parodie mythologique, le courrier d’Ulysse à Calypso, etc17. Si l’on définit le roman comme étant en soi un « mélange des genres », les Histoires vraies peuvent en être un, mais, surtout, elles relèvent d’un genre de roman métafictionnel (ou post-topique) et réflexif, comme l’indique ce qui vient d’être observé et va l’être plus loin, sur la bigarrure du style, l’entrelacement des intertextualités et des registres, les jeux de méta- et transfiction — comme la métalepse narrative, l’hybridité des lieux, des temporalités et des personnages —, et surtout une pragmatique ambivalente, entre effets de réel (aussi présents dans la littérature fantastique, en fait hyperréaliste18, pour être crédible, que dans une littérature réaliste, s’il en existe), jeux de véridicité paradoxale, engagement auctorial et lectorial, ou encore création carnavalesque, en retour à Bakhtine, par l’inspiration aristophanesque, explicitement cruciale pour Lucien.

    5La transgénéricité à l’œuvre dans les Histoires vraies est donc plus radicale encore que celle d’un roman topique/générique, non pas d’ailleurs qu’un tel idéal-type existe, même le récit de Xénophon d’Éphèse étant plus complexe qu’on ne le dit souvent : on distinguera plutôt deux pôles, dont l’un serait bien représenté par Lucien, entre lesquels peut se déployer tout un spectre. Comme chez Achille Tatius, pour le protagoniste-narrateur Clitophon, les multiples « masques de Lucien », selon l’expression de S. Dubel19, font de ce récit à la première personne ce que V. Colonna20 appelle une « autofiction fantastique », où les phénomènes d’hybridation et de bigarrure témoignent d’encore plus de virtuosité, mettant en jeu à la fois l’identité du narrateur et celle du lecteur, en identification précaire. Comme le souligne notamment T. Whitmarsh, à propos d’Achille Tatius comme de Lucien21, l’une des caractéristiques de ces chefs-d’œuvre de fiction sophistique de l’époque impériale est la tension qui s’y trouve proposée au lecteur, sans résolution possible, entre deux modes de réception contradictoires mais coprésents, et chacun renforcé par cette coprésence, d’une part, une immersion sensationnelle, spectaculaire, volontairement crédule, souvent qualifiée de populaire, d’autre part, une interprétation critique, distante, réflexive, lettrée. Le même processus est mis en jeu dans les Images de Philostrate22. Mais chez Lucien (et, d’une autre manière encore, chez Tatius), d’autres modes d’hybridation décuplent l’intensité de cette tension entre réception immersive et lecture critique, et donc l’efficacité rhétorique du discours. On peut citer ainsi la bigarrure des registres (spoudogeloion, mais aussi satire d’inspiration aristophanesque et énigmaticité symbolique, en demande d’interprétation paraphilosophique) ; la mixis des écritures et styles (entre parodie critique et pastiche équivalant à un éloge, envers de très divers genres, epos odysséen, historia hérodotéenne et thucydidéenne, mythologia, ekphrasis, autres progymnasmata, éloge paradoxal, commentaire scientifique — zoologique, médical, ethnographique —, philologie, philosophie morale…) ; l’hybridité et le mélange des thématiques, des lieux (utopiques et uchroniques), des personnages (des combattants interplanétaires aux Bienheureux ou aux femmes-vignes) ; enfin l’hétérogénéité ou la précarité des intentions d’auteur affichées, des pactes et programmes de lectures proposés et des modalités de réception possibles, sur les plans esthétique, éthique, cognitif23.

    Effets de transmédialité et jeux synesthésiques

    6Au-delà de ces deux approches de la transgénéricité dans les Histoires vraies, en tant que roman (« postmoderne »), puis comme fiction narrative paradoxalement à la fois sophistique et populaire, une troisième approche, complémentaire, permet d’aborder un dernier type de mélange, fondé sur d’autres hybridités et bigarrures, en rapport avec le fait qu’une telle expérience de lecture relève aussi des arts du spectacle — qu’on pense à l’audition du texte lu à haute voix ou mieux à la performance oratoire que pouvait en être l’énonciation théâtralisée, surtout par Lucien lui-même. Il ne s’agit plus seulement de transgénéricité littéraire mais de transmédialité, et on peut renvoyer à ce propos à ce que K. ní Mheallaigh, dit, en des termes un peu différents, des Wunderkammer ou « cabinets de curiosités » à la mode à l’époque de Lucien, ou encore des spectacles d’automates et de marionnettes, et autres théâtres d’ombres et d’illusions24. En ce sens, la tâche des spécialistes de littérature peut être de repérer dans chaque morceau de bravoure lucianesque, comme dans la trame générale, les effets conjugués de kinesthésie, synesthésie, donc d’empathie psychophysique propres à faire des Histoires vraies un exemple de que S.M. Eisenstein appellera « cinématisme », ou d’autres artistes et théoriciens, plus modestement, « précinématisme ». C’est visible25 dans les épopées homériques, mais aussi chez Héliodore ou, d’une autre manière, Longus, chacun créant un style différent d’images et de tableaux en mouvement. On peut renvoyer aussi aux effets kinesthésiques et aux figurations corporelles repérables dans des littératures d’époque variée, de l’Iliade à Proust26, ou encore aux recherches menées sur la synesthésie, en particulier dans l’Antiquité27. Les effets conjugués d’intensité, de variété, de clarté, et d’empathie kinesthésique, tout autant que visuelle et sonore, mais aussi tactile, voire olfactive, jouent un rôle crucial dans l’efficacité illocutoire d’un discours rhétorique (et de son actio) comme d’un spectacle scénique, stimulant à la fois les sensations directes d’un spectateur et la phantasia d’un spectateur-auditeur direct ou encore d’un lecteur devenu spectateur-auditeur par sa lecture28. Il y a là un processus qui pourrait relever d’une catharsis rhétorique, romanesque ou épique, en partie similaire à la catharsis tragique ou comique, et renforcée par les paradoxes de la fiction lucianesque indiqués plus haut, entre immersion et distanciation.

    7En considération de ce triple effet de transgénéricité romanesque, postclassique et transmédiale, associé à ce qui dans le titre de cette étude est désigné comme modes de création, critique et connaissance, il est utile de scruter deux brefs passages des Histoires vraies, en général moins étudiés que d’autres.

    Histoires Vraies, I, 17-18 : le(s) centaure(s) en bataille

    8Comme premier exemple de cet effet singulier, on peut observer le passage I, 17-18, la fin de la bataille cosmique entre les armées du Soleil et de la Lune : on peut le lire, tout comme la préface des Histoires vraies, en relation avec le traité Comment il faut écrire l’histoire et la dialectique métafictionnelle d’un récit qui joue surtout du rapport entre histoire et fiction. Conformément à ce que l’on vient de rappeler, trois types de transgénéricité attirent particulièrement le regard (romanesque, postclassique, transmédiale), en lien avec divers enjeux pragmatiques.

    9Le point majeur de ce passage est la figure du centaure (θέαμα παραδοξότατον). D’une part, cette image résume le processus de création tératologique à la base de la fabrication des entités hybrides qui dominent toute la scène. À la manière de ce qui est souvent le cas chez Aristophane, ce sont les jeux de langage qui créent l’univers fictionnel ; ainsi du procédé de fabrication de noms composés pour désigner un type de soldats hybrides, associant un humain, un animal, une plante, un élément de la nature, etc. Il en va ainsi pour les expressions hippo-gype, ou encore hippo-centaure, et ici néphélo-centaure, une référence encore à l’Ancienne Comédie, et en particulier aux Nuées (dont le sujet principal est d’ailleurs le philosophe-sophiste, personnage également crucial chez Lucien). Sur le plan cognitif, c’est l’un des savoirs principaux transmis par l’ouvrage : tout est fiction et parole, y compris les taxonomies les plus scientifiques a priori, comme chez Aristote, ici parodié ; les discours qui prétendent interpréter le monde réel sont des créations de philosophes, naturalistes et historiens, entre fiction et outils de savoir, ou plus exactement des fictions imparfaites mais nécessaires à l’interprétation du monde, comme un univers possible et donc précaire, souvent troublé et enrichi à la fois par des jeux de métalepse29. Chez Lucien, le savoir, comme la place de l’homme dans le monde, est constitutivement précaire, comme le monde lui-même. D’autre part, cette figure présente l’ensemble des Histoires vraies, de manière métaphorique, comme une armée d’hippocentaures, c’est-à-dire une troupe de monstres, décrite successivement, à chaque étape de la navigation transatlantique, comme un mélange de genres, une mixis : par exemple, l’épisode de la baleine ou les îles des Bienheureux, des Lampes, des Songes, des Femmes-vignes représentent des hippocentaures mais surtout sont en eux-mêmes des hippocentaures génériques, stylistiques, logiques. Le caractère guerrier de la scène inventée ici, et présentée comme décrite, fait aussi de l’œuvre de Lucien une œuvre polémico-comique, surtout contre les historiens, tels Hérodote et Ctésias, qui inventent aussi des hippocentaures (des chimères ethnographiques, zoologiques, etc.), tout en affirmant leur caractère véridique, historique, par autopsie, ou le plus souvent par témoignage. La fiction fantastique et comique de Lucien, fondée sur le spoudogeloion, est un mode de critique efficace à la fois des discours uniquement sérieux et totalisants (ceux de Platon ou du stoïcisme, par exemple, voire de Thucydide) et de ceux qui s’en revêtent (faux philosophes et historiens menteurs).

    10Par ailleurs, l’ekphrasis de bataille fait partie des progymnasmata, comme on peut le voir aussi dans la préface (§ 1), avec le modèle thucydidéen, ici paradoxalement hybridé avec Aristophane30 : le passage est une scène d’histoire théâtralisée et cinématisée, comme un spectacle sério-comique, avec de vifs effets kinétiques, sonores et visuels, une synesthésie évidente, empreinte d’une enargeia plurisensorielle et renforcée par des effets de diction et de rythme sensibles : une véritable chorégraphie oratoire, stimulant la phantasia de l’auditeur-lecteur, et encore mieux du spectateur de la performance sophistique, le public direct de Lucien. À titre d’exemple, on peut observer de plus près les premières phrases du paragraphe I, 17, commençant par une inversion du sujet, véritable effet de zoom, suivi d’une parenthèse suspensive en forme de glose (à propos des ânes-trompettes), puis d’un verbe générique (ἐμάχοντο) introduisant le combat. Cette première étape introduit la description dynamique du front, entre ailes droite et gauche des deux armées, et suivant deux points de vue (Soleil et Lune), deux niveaux (haut et bas) et deux relations à l’espace (centre et périphérie), pour ainsi dire en jeux de panoramiques et travellings. La scène est une sorte de Star Wars épique, historico-fantastique, en plus ambivalent et bien sûr plus oratoire. On peut être également sensible, dans toute la suite du texte, aux effets d’hyperbole, plutôt inspirés de l’Iliade et d’autres évocations similaires, aboutissant paradoxalement à la critique de la mythologie homérique et, encore mieux, à la parodie de l’allégorèse cosmique, par exemple l’interprétation de la mort de Sarpédon par Héraclite du Pont. Nous sommes encore donc continûment à un double niveau, hybride, d’une part métafictionnel et métacritique, rhétorique et philosophique, d’autre part immersif, spectaculaire, directement fictionnel :

    17. Συμμίξαντες δὲ ἐπειδὴ τὰ σημεῖα ἤρθη καὶ ὡγκήσαντο ἑκατέρων οἱ ὄνοι — τούτοις γὰρ ἀντὶ σαλπιστῶν χρῶνται — ἐμάχοντο. Καὶ τὸ μὲν εὐώνυμον τῶν Ἡλιωτῶν αὐτίκα ἔϕυγε οὐδ᾽ εἰς χεῖρας δεξάμενον τοὺς Ἱππογύπους, καὶ ἡμεῖς εἱπόμεθα κτείνοντες· τὸ δεξιὸν δὲ αὐτῶν ἐκράτει τοῦ ἐπὶ τῷ ἡμετέρῳ εὐωνύμου, καὶ ἐπεξῆλθον οἱ Ἀεροκώνωπες διώκοντες ἄχρι πρὸς τοὺς πεζούς. Ἐνταῦθα δὲ κἀκείνων ἐπιβοηθούντων ἔϕυγον ἐγκλίναντες, καὶ μάλιστα ἐπεὶ ᾔσθοντο τοὺς ἐπὶ τῶι εὐωνύμῳ σϕῶν νενικημένους. Τῆς δὲ τροπῆς λαμπρᾶς γεγενημένης πολλοὶ μὲν ζῶντες ἡλίσκοντο, πολλοὶ δὲ καὶ ἀνῃροῦντο, καὶ τὸ αἷμα ἔρρει πολὺ μὲν ἐπὶ τῶν νεϕῶν, ὥστε αὐτὰ βάπτεσθαι καὶ ἐρυθρὰ ϕαίνεσθαι, οἷα παρ᾽ ἡμῖν δυομένου τοῦ ἡλίου ϕαίνεται, πολὺ δὲ καὶ εἰς τὴν γῆν κατέσταζεν, ὥστε με εἰκάζειν μὴ ἄρα τοιούτου τινὸς καὶ πάλαι ἄνω γενομένου Ὅμηρος ὑπέλαβεν αἵματι ὗσαι τὸν Δία ἐπὶ τῷ τοῦ Σαρπηδόνος θανάτῳ. 18. Ἀναστρέψαντες δὲ ἀπὸ τῆς διώξεως δύο τρόπαια ἐστήσαμεν, τὸ μὲν ἐπὶ τῶν ἀραχνίων τῆς πεζομαχίας, τὸ δὲ τῆς ἀερομαχίας ἐπὶ τῶν νεϕῶν. Ἄρτι δὲ τούτων γινομένων ἠγγέλλοντο ὑπὸ τῶν σκοπῶν οἱ Νεϕελοκένταυροι προσελαύνοντες, οὓς ἔδει πρὸ τῆς μάχης ἐλθεῖν τῷ Φαέθοντι. Καὶ δὴ ἐϕαίνοντο προσιόντες, θέαμα παραδοξότατον, ἐξ ἵππων πτερωτῶν καὶ ἀνθρώπων συγκείμενοι· μέγεθος δὲ τῶν μὲν ἀνθρώπων ὅσον τοῦ Ῥοδίων κολοσσοῦ ἐξ ἡμισείας ἐς τὸ ἄνω, τῶν δὲ ἵππων ὅσον νεὼς μεγάλης ϕορτίδος. Τὸ μέντοι πλῆθος αὐτῶν οὐκ ἀνέγραψα, μή τῳ καὶ ἄπιστον δόξῃ — τοσοῦτον ἦν. Ἡγεῖτο δὲ αὐτῶν ὁ ἐκ τοῦ ζωιδιακοῦ τοξότης. Ἐπεὶ δὲ ᾔσθοντο τοὺς ϕίλους νενικημένους, ἐπὶ μὲν τὸν Φαέθοντα ἔπεμπον ἀγγελίαν αὖθις ἐπιέναι, αὐτοὶ δὲ διαταξάμενοι τεταραγμένοις ἐπιπίπτουσι τοῖς Σεληνίταις, ἀτάκτως περὶ τὴν δίωξιν καὶ τὰ λάϕυρα διεσκεδασμένοις· καὶ πάντας μὲν τρέπουσιν, αὐτὸν δὲ τὸν βασιλέα καταδιώκουσι πρὸς τὴν πόλιν καὶ τὰ πλεῖστα τῶν ὀρνέων αὐτοῦ κτείνουσιν· ἀνέσπασαν δὲ καὶ τὰ τρόπαια καὶ κατέδραμον ἅπαν τὸ ὑπὸ τῶν ἀραχνῶν πεδίον ὑϕασμένον, ἐμὲ δὲ καὶ δύο τινὰς τῶν ἑταίρων ἐζώγρησαν. Ἤδη δὲ παρῆν καὶ ὁ Φαέθων καὶ αὖθις ἄλλα τρόπαια ὑπ᾽ ἐκείνων ἵστατο. Ἡμεῖς μὲν οὖν ἀπηγόμεθα ἐς τὸν ἥλιον αὐθημερὸν τὼ χεῖρε ὀπίσω δεθέντες ἀραχνίου ἀποκόμματι.

    17. On en vient aux mains ; les étendards sont déployés, les ânes des deux armées se mettent à braire, car ces peuples se servent d’ânes à la place de trompettes, et la mêlée commence. L’aile gauche des Héliotes prend aussitôt la fuite sans même attendre le choc des Hippogypes, et nous la poursuivons et la taillons en pièces. Mais leur aile droite enfonça notre aile gauche et les Aéroconopes se précipitant à sa poursuite arrivent jusqu’à notre infanterie. Cependant celle-ci venant à la rescousse, ils plient et s’enfuient, surtout quand ils s’aperçoivent que leur aile gauche est vaincue. Comme la déroute se généralisait visiblement, beaucoup se laissèrent prendre vivants, beaucoup aussi furent tués, et le sang coulait à flots sur les nuages, au point qu’ils en étaient baignés et paraissaient rouges, comme ils le paraissent chez nous au coucher du Soleil. Il en dégouttait aussi beaucoup sur la terre et j’imagine que c’est à la suite d’un événement semblable arrivé autrefois dans le ciel qu’Homère a cru que Zeus avait fait tomber une pluie de sang à la mort de Sarpédon. 18. Au retour de la poursuite, nous érigeâmes deux trophées, l’un sur la toile d’araignée en mémoire du combat d’infanterie, l’autre sur les nuages en mémoire du combat aérien. Comme on les achevait, les coureurs annoncèrent l’approche des Néphélocentaures, qui auraient dû joindre Phaéton avant la bataille. C’était un spectacle extraordinairement curieux de voir avancer ces monstres moitié hommes, moitié chevaux, chez qui l’homme est aussi grand que le tronc et la tête du colosse de Rhodes, et le cheval de la dimension d’un gros vaisseau marchand. Quant à leur nombre je n’en dis rien, de peur qu’on ne refuse de me croire, tant il était considérable. Ils étaient commandés par le Sagittaire du Zodiaque. Lorsqu’ils se furent aperçus de la défaite de leurs alliés, ils envoyèrent dire à Phaéton de reprendre l’offensive et, s’étant eux-mêmes rangés en bataille, ils se jetèrent sur les Sélénites qui avaient rompu les rangs pour donner la chasse aux fuyards et s’étaient dispersés pour piller. Ils les mettent tous en fuite, poursuivent le roi jusqu’à la ville et lui tuent la plus grande partie de ses vautours. Ils arrachèrent ensuite les trophées et battirent toute la plaine tissée par les araignées et me firent prisonnier avec deux de mes compagnons. À ce moment Phaéton parut et ses gens élevèrent à leur tour d’autres trophées. Et nous, on nous emmena le jour même chez le Soleil, les mains liées derrière le dos avec un morceau de la toile d’araignée. (Trad. d’É. Chambry révisée par A. Billault et É. Marquis.)

    Histoires vraies, ΙI, 5-6 : l’île des Bienheureux, une métafiction sensible

    11Notre second exemple, II, 5-6, est aussi une ekphrasis, cette fois celle de l’arrivée d’un groupe de navigateurs sur une île inconnue, à lire en relation avec des descriptions dynamiques de jardins et autres loci amoeni merveilleux, typiques de l’Odyssée ou des romans de Longus et d’Achille Tatius. On peut se concentrer ici de nouveau sur les effets de transgénéricité romanesque, postclassique et transmédiale, dans ce qui est précisément une ekphrasis de jardin dramatisée, c’est-à-dire présentée comme un parcours focalisé, en caméra subjective, centrée sur un locuteur collectif « nous », quand en comparaison c’est un « je » explicitement solitaire qui fait voir l’entrée d’Ulysse dans le palais d’Alkinoos.

    12Les spectateurs sont intégrés dans la description, représentés par « Lucien » et ses compagnons, et, par cette focalisation interne, dynamique et intense, une relation empathique se développe en soutien de la phantasia de l’auditeur-lecteur. En mise en abyme, les effets sensoriels de ce qui pour le regard homo-diégétique devient un spectacle, plus qu’une simple étape de navigation, sont d’ailleurs clairement évoqués : à la fin de la description, au début de II, 6, « Tandis que nous étions sous le charme de tant d’objets plaisants, nous abordons » (τούτοις ἅπασι κηλούμενοι κατήχθημεν) ; au cours de la description, en II, 5, notamment par les figures olfactives qui deviennent le comparant des figures visuelles et musicales. Les voyageurs, espérant une rémission de leurs douleurs, sont charmés par le spectacle de l’île des Bienheureux comme par une performance musicale de banquet et donc comme les spectateurs-auditeurs par la performance oratoire de Lucien, et les lecteurs par son discours. Les liens fleuris (« guirlandes de rose ») évoqués à la fin du paragraphe 6 sont d’ailleurs ambivalents, comme la parole sophistique (et donc l’ensemble des Histoires vraies) dont ils peuvent représenter la force illocutoire et le charme (comme dans la prolalia de l’Héraclès). L’île des Bienheureux est une illusion merveilleuse produite par la parole et la fiction efficace (immersive) qu’elle crée. Et ce sont à la fois les lecteurs et les voyageurs qui en restent prisonniers…

    13C’est, au niveau métafictionnel et cognitif, l’une des leçons possibles du passage : à propos du passage précédent, nous avons noté que dans les Histoires vraies, comme en général chez Lucien, tout est fiction ; on peut ajouter, à propos de ce second passage, que cette fiction radicale, totale, est un charme qui enferme et lie — comme la position toujours distante malgré tout du lecteur l’implique ici, mais de manière précaire, changeante, et finalement incertaine. En effet, cette posture critique s’établit encore sur un fond de synesthésie généralisée, qu’on vient de qualifier d’immersive, d’autant plus puissante que c’est l’empathie olfactive et tactile, ou au moins haptique, qui domine II, 5, renforcée par les effets rythmiques et cinématiques d’un long panoramique et travelling avant, et d’une dramatisation vive : successivement, on perçoit les premières odeurs (et souvenirs de parfums fleuris, en même temps que de références culturelles, comme les textes d’Hérodote sur l’Arabie heureuse) ; ensuite viennent la vue des ports et rivières, puis des jardins et chants d’oiseaux et l’air et les brises annonçant la forêt ; puis ce sont des sons lointains (en référence à un symposion idéalisé, qui se révèlera réel, du moins dans la fiction). Enfin, tout du long, on peut noter, comme chez Longus (y compris dans la préface de ses Pastorales) la dialectique mouvante entre art et nature (physis et technê).

    5. Κατὰ δὲ τὴν πρῷραν μία πλατεῖα καὶ ταπεινή, σταδίους ἀπέχουσα οὐκ ἐλάττους πεντακοσίων. Ἤδη δὲ πλησίον ἦμεν, καὶ θαυμαστή τις αὔρα περιέπνευσεν ἡμᾶς, ἡδεῖα καὶ εὐώδης, οἵαν ϕησὶν ὁ συγγραϕεὺς Ἡρόδοτος ἀπόζειν τῆς εὐδαίμονος Ἀραβίας. Οἷον γὰρ ἀπὸ ῥόδων καὶ ναρκίσσων καὶ ὑακίνθων καὶ κρίνων καὶ ἴων, ἔτι δὲ μυρρίνης καὶ δάϕνης καὶ ἀμπελάνθης, τοιοῦτον ἡμῖν τὸ ἡδὺ προσέβαλλεν. Ἡσθέντες δὲ τῇ ὀσμῇ καὶ χρηστὰ ἐκ μακρῶν πόνων ἐλπίσαντες κατ᾿ ὀλίγον ἤδη πλησίον τῆς νήσου ἐγινόμεθα. ῎Ενθα δὴ καὶ καθεωρῶμεν λιμένας τε πολλοὺς περὶ πᾶσαν ἀκλύστους καὶ μεγάλους, ποταμούς τε διαυγεῖς ἐξιέντας ἠρέμα εἰς τὴν θάλατταν, ἔτι δὲ λειμῶνας καὶ ὕλας καὶ ὄρνεα μουσικά, τὰ μὲ ἐπὶ τῶν ἠϊόνων ᾄδοντα, πολλὰ δὲ καὶ ἐπὶ τῶν κλάδων· ἀήρ τε κοῦϕος καὶ εὔπνους περιεκέχυτο τὴν χώραν· καὶ αὖραι δέ τινες ἡδεῖαι πνέουσαι ἠρέμα τὴν ὕλην διεσάλευον, ὥστε καὶ ἀπὸ τῶν κλάδων κινουμένων τερπνὰ καὶ συνεχῆ μέλη ἀπεσυρίζετο, ἐοικότα τοῖς ἐπ᾿ ἐρημίας αὐλήμασι τῶν πλαγίων αὐλῶν. Καὶ μὴν καὶ βοὴ σύμμικτος ἠκούετο ἄθρους, οὐ θορυβώδης, ἀλλ᾿ οἵα γένοιτ᾿ ἂν ἐν συμποσίῳ, τῶν μὲν αὐλούντων, τῶν δὲ ἐπαινούντων, ἐνίων δὲ κρο-τούντων πρὸς αὐλὸν ἢ κιθάραν.

    6. Τούτοις ἅπασι κηλούμενοι κατήχθημεν, ὁρμίσαντες δὲ τὴν ναῦν ἀπεβαίνομεν, τὸν Σκίνθαρον ἐν αὐτῇ καὶ δύο τῶν ἑταίρων ἀπολιπόντες. Προϊόντες δὲ διὰ λειμῶνος εὐανθοῦς ἐντυγχάνομεν τοῖς ϕρουροῖς καὶ περιπόλοις, οἱ δὲ δήσαντες ἡμᾶς ῥοδίνοις στεϕάνοισοὗτος γὰρ μέγιστος παρ᾿ αὐτοῖς δεσμός ἐστινἀνῆγον ὡς τὸν ἄρχοντα, παρ᾿ ὧν δὴ καὶ καθ᾿ ὁδὸν ἠκούσαμεν ὡς ἡ μὲν νῆσος εἴη τῶν Μακάρων προσαγορευομένη, ἄρχοι δὲ ὁ Κρὴς ῾Ραδάμανθυς. Καὶ δὴ ἀναχθέντες ὡς αὐτὸν ἐν τάξει τῶν δικαζομένων ἔστημεν τέταρτοι.

    5. En tête de notre vaisseau, à une distance d’au moins cinq cents stades, une grande île large et basse était en vue. Nous en approchions, lorsqu’une merveilleuse brise nous enveloppa, suave et parfumée, comme celle qui, au dire de l’historien Hérodote, s’exhale de l’Arabie heureuse. Cette odeur délicieuse que nous respirions rappelait celle des roses, des narcisses, des jacinthes, des lis, des violettes et celle du myrte, du laurier et de la fleur de vigne. Tandis que, charmés de ces parfums, nous espérions trouver le bonheur après nos longues misères, nous approchions peu à peu de cette île. Nous voyions sur toute la côte des ports nombreux et tranquilles, de grandes rivières qui charriaient doucement leurs eaux limpides vers la mer ; puis des prairies, des forêts, des oiseaux chanteurs qui gazouillaient les uns sur les rivages, les autres dans les branches. Un air léger, agréable à respirer, enveloppait le pays, et des brises suaves agitaient la forêt de leur souffle paisible, et les rameaux remués murmuraient des chants continus qui charmaient l’oreille comme les sons de la flûte oblique dans un lieu solitaire. On entendait aussi le bruit d’un grand nombre de voix mélangées, mais sans tumulte et pareil à celui d’un festin où les uns jouent de la flûte, où les autres applaudissent et quelques-uns battent la mesure en accompagnant la flûte ou la cithare.

    6. Tandis que nous étions sous le charme de tant d’objets plaisants, nous abordons, jetons l’ancre et débarquons en laissant à bord Skintharos et deux de nos compagnons. Comme nous avancions et traversions une prairie en fleurs, nous tombons sur des sentinelles et des garde-côtes qui nous enchaînent avec des guirlandes de roses, c’est le lien le plus fort que l’on trouve en ce pays, et nous emmènent chez le gouverneur. Chemin faisant, ils nous apprirent que nous étions dans l’île qu’on appelle l’île des Bienheureux, et que le gouverneur était le Crétois Rhadamanthe. Amenés en sa présence, on nous donna le quatrième rang parmi ceux qui passaient en jugement.

    Épilogue : entre immersion et critique, la transmodernité de Lucien

    14Les deux ekphraseis évoquées, l’une d’inspiration iliadique (la bataille cosmique, I, 17-18), l’autre odysséenne (l’arrivée dans l’île merveilleuse, II, 5-6), proposent des mélanges de styles hétérogènes (historique, épique, comique d’une part, historique et romanesque d’autre part, et dans les deux cas susceptibles d’interprétation philosophique). Riches d’effets pré-cinématiques et synesthésiques, ces deux passages, à compléter par tous les autres épisodes marquants des Histoires vraies, entre scènes typiques de combat et d’hospitalité (c’est-à-dire des scènes de rencontres, des plus violentes aux plus policées), sont de bons exemples de ce qu’on pouvait entendre, au début de cette étude, à la fois par l’hybridité généralisée de cette œuvre, son intensité transmédiale et son caractère à la fois fictionnel et métafictionnel. En effet, le mélange des genres littéraires et des pratiques énonciatives se réalise ici à la fois :

    • au niveau des procédures discursives, surtout dans la relation de l’auteur et du narrateur (ici assimilés) avec le spectateur-lecteur : création (textuelle, oratoire, artistique, spectaculaire) et réception (distante/immersive, ludique/sérieuse, philosophique/théâtrale) ;

    • et au niveau des traits caractéristiques du texte, typiquement romanesque, postclassique et transmédial, sur les plans pragmatique, thématique et stylistique.

    15L’efficacité du mélange et de la polyphonie qu’il anime repose aussi sur le fait qu’il agit à la fois de manière linéaire, d’un passage à l’autre, en succession, et en simultanéité, dans un même passage, de manière tabulaire : d’une part, un texte entier, tel l’ensemble des Histoires vraies, enchaîne des composantes génériques qu’on peut dire alors mélangées, mais non confondues, puisque distinctes temporellement dans la composition et dans la réception ; d’autre part, chaque composante générique est elle-même issue d’un mélange, d’une hybridation, par exemple quand la bataille cosmique mêle les influences de Thucydide et d’Aristophane ou que l’arrivée dans l’île des Bienheureux rappelle à la fois l’Odyssée, Hérodote et les introductions aux dialogues socratiques les plus idylliques. Le mélange des genres, dans les Histoires vraies, se réalise au niveau général comme sur le plan microtextuel, et de manière dynamique, car précaire et tendue : la cohésion et la cohérence du texte d’ensemble comme de chacune de ses parties reposent justement sur sa souplesse et sa variété.

    16Cette tension générique caractérise aussi bien la plupart des autres œuvres de notre auteur, qu’elles relèvent en particulier des deux genres hybrides, et souvent associés dans une même pièce, de ce fait doublement hybride, du dialogue comico-philosophique théâtralisé (par exemple Le Banquet ou les Lapithes, Les Sectes à l’encan ou les Dialogues des morts) ou du voyage fantastique en registre sério-comique, donc philosophique (par exemple Le Pêcheur ou les Ressuscités et Icaroménippe ou le Voyage aérien). Mais, dans les Histoires vraies, ils sont déployés, comme scénarisés, sur l’ensemble du texte, et surtout thématisés tout au long, en perspective métafictionnelle, et pas seulement — même si c’est crucial —, dans la préface (I, 1-4) ou encore dans l’absence de fin véritable (II, 47 : « Quant à ce qui nous arriva sur le continent, je le raconterai dans les livres suivants », dans une promesse non tenue que dénonce d’ailleurs le scholiaste). De ce point de vue, cette fiction narrative/descriptive, par certains aspects similaire à une « expérience de pensée » philosophique (et pourtant enjouée), propose au lecteur une véritable série d’épreuves à la fois spectaculaires, imaginaires et cognitives, en même temps qu’elle offre toute la distance critique qui caractérise des temps aussi postclassiques, ironiques et sophistiques, que l’époque de Lucien et la nôtre.

    Notes de bas de page

    1 Voir par exemple Benjamin Acosta-Hughes, Polyeideia : The Iambi of Callimachus and the Archaic Iambic Tradition, Princeton, University of California Press, 2002. Cette notion implique une certaine circularité, les Alexandrins étant les inventeurs de catégories génériques qu’ils revendiquent ensuite de mêler avec art.

    2 Voir Michel Briand, « L’éloge (et le blâme) chez Théocrite : effet – recueil, effet – discours, trans-généricité », dans Présence de Théocrite, éd. par Chr. Kossaifi, R. Poignault, Chr. Cusset, Tours, Caesarodunum-Présence de l’Antiquité, 2017. Sur la transgénéricité, voir par exemple Dominique Moncond’huy et Henri Scepi (dir.), Le genre de travers : littérature et transgénéricité, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2008.

    3 Sur le rapport entre histoire et fiction chez Lucien, voir Michel Briand, « Lucien et Homère dans les Histoires vraies : pratique et théorie de la fiction au temps de la Seconde Sophistique », Lalies 25, 2005, p. 127-149. Voir aussi, pour les enjeux contemporains, Ivan Jablonka, L’histoire est une littérature contemporaine. Manifeste pour les sciences sociales, Paris, Seuil, 2014, et plus largement, dans une perspective croisant théorie littéraire et sciences cognitives, notamment, Françoise Lavocat, Fait et fiction. Pour une frontière, Paris, Seuil, 2016. Voir aussi Robert Porod, « Lucian and the Limits of Fiction in Ancient Historiography », éd. par A. Bartley, A Lucian for our Times, Cambridge, Cambridge University Press, 2009, p. 29-46.

    4 Cf. Michel Briand (dir.), La trame et le tableau. Poétiques et rhétoriques du récit et de la description dans l’Antiquité grecque et latine, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2012.

    5 Cf. Michel Briand, « “Maintenant donc pour des mots vous allez me tuer ?”, Lucien de Samosate. Du blasphème en démocratie, par un détour en Grèce ancienne, à Poitiers », dans Le blasphème dans une société démocratique, dir. par C. Lageot & F. Marchadier, Paris, Dalloz, 2016, p. 11-17. Voir aussi Valérie Visa-Ondarçuhu, « La notion de parrhêsia chez Lucien », Pallas 72, 2006, p. 261-278, et Alberto Camerotto, Gli occhi e la lingua della satira. Studi sull’eroe satirico in Luciano di Samosata, Milano & Udine, Mimesis, 2014, surtout chap. IV Le virtù e la potenza della vista, p. 191-224, V La libertà e il dovere del dire, p. 225- 283, VI Il riso dell’eroe satirico e i suoi effetti, p. 285-324, ainsi que, dans une perspective généalogique, Michel Foucault, Le courage de la vérité. Le gouvernement de soi et des autres II (cours au Collège de France, 1984), Paris, Gallimard-Seuil, 2009, ainsi que Étienne Helmer, Diogène le cynique, Paris, Les Belles Lettres, 2017. Les références bibliographiques sur le mélange des genres chez Lucien seraient trop nombreuses à citer ici, en incluant les enjeux stylistiques, énonciatifs, philosophiques, culturels, de la question : nous nous permettons de renvoyer à des études antérieures où l’on trouvera les références les plus importantes, ainsi que l’étude d’aspects partiels de ce qui est abordé ici de manière synthétique.

    6 Panégyrique 50, trad. G. Mathieu et É. Bremond, Les Belles Lettres (Collection des universités de France).

    7 Jean-Marc Narbonne, Antiquité critique et modernité. Essai sur le rôle de la pensée critique en Occident, Paris, Les Belles Lettres, 2016, en particulier chap. IV « Du scepticisme ancien à la tolérance moderne : l’héritage paradigmatique de Lucien », p. 139-189.

    8 Karen ní Mheallaigh, Reading Fiction with Lucian. Fakes, Freaks and Hyperreality, Cambridge, Cambridge University Press, 2014.

    9 Michel Briand, « L’Homère sophiste de Lucien ou les ambiguïtés d’une mimesis ironique », dans Révolutions homériques, éd. par G. W. Most, L. F. Norman, S. Rabau, Pisa, Edizioni della Normale, 2009, p. 27-46, et, dans le registre particulier des littératures de l’imaginaire, auquel appartiennent les Histoires vraies, Michel Briand, « Transfictions et mythologie chez Francis Berthelot. Autour de La Lune noire d’Orion, Mélusath et Hadès Palace », dans L’Antiquité dans l’imaginaire contemporain. Fantasy, science-fiction, fantastique, dir. par M. Bost-Fievet & S. Provini, Paris, Classiques Garnier, 2014, p. 525-542. Voir aussi, avec une autre définition de la transfiction, liée notamment à la figure de la métalepse, Richard Saint-Gelais, Fictions transfuges. La transfictionnalité et ses enjeux, Paris, Seuil, 2011.

    10 K. ní Mheallaigh, Reading Fiction…, p. 1-38, « Lucian’s Promethean Poetics : Hybridity, Fiction and the Postmodern ». Voir aussi Graham Anderson, « Lucian, a Sophist’s Sophist », Yale Classical Studies 37, 1982, p. 61-92, et id., « The Pepaideumenos in Action : Sophists and their Outlook in the Early Empire », ANRW II.33.1, 1989, p. 79-208.

    11 Sur le roman antique en tant que genre, voir notamment Simon Goldhill, « Genre », dans The Cambridge Companion to the Greek and Roman Novel, éd. par T. Whitmarsh, Cambridge, Cambridge University Press, 2008, p. 185-200.

    12 Cf. Peter von Möllendorff, Auf der Suche nach der verlogenen Wahrheit. Lukians Wahre Geschichten, Tübingen, Gunter Narr, 2000.

    13 Aristoula Georgiadou et David. H.-J. Larmour, Lucian’s Science Fiction Novel True Histories : Interpretation and Commentary, Leiden, Boston & Köln, Brill, 1998. L’intitulé de cette étude, qui fait de Lucien le précurseur d’un genre hypermoderne, peut-être nuancé : cf. Sophie Rabau, « Pourquoi dit-on que Lucien est un auteur de Science-Fiction ? », Cahiers du FoReLL, numéro Lucien (de Samosate) et nous, éd. par A. Eissen et M. Briand, 2013, http://09.edel.univ-poitiers.fr/lescahiersforell/index.php?id=237

    14 Cf. Michel Briand, « La fiction qui pense en riant : avatars et paradoxes du muthos et du pseudos chez Lucien », ibid., 2013, http://09.edel.univ-poitiers.fr/lescahiersforell/index.php?id=243. Sur le rapport entre rire et philosophie, voir Stephen Halliwell, Greek Laughter. A Study of Cultural Psychology from Homer to Early Christianity, Cambridge, Cambridge University Press, 2008, chap. 9, Lucian and the laughter of life and death, p. 429-469, et Geneviève Husson, « Lucien philosophe du rire ou Pour ce que rire est le propre de l’homme », dans Lucien de Samosate, éd. par A. Billault, Lyon, Centres d’études romaines et gallo-romaines, 1994, p. 177-184. Voir aussi Isabelle Gassino, « Par delà toutes les frontières : le pseudos dans les Histoires vraies de Lucien », dans Lucian of Samosata. Greek Writer and Roman Citizen, éd. par F. Mestre et P. Gómez, Barcelona, Publicacions i edicions de la Universitat de Barcelona, 2010, p. 87-98.

    15 Cf. Michel Briand, « Le dialogue entre mythe et fiction : à propos du Dionysos de Lucien », dans Mythe et fiction, éd. par D. Augier et Ch. Delattre, Paris, Presses universitaires de Paris Ouest, 2010, p. 219-237.

    16 Cf. Andrew Laird, « Fiction as a Discourse of Philosophy in Lucian’s Verae Historiae », dans The Ancient Novel and Beyond, éd. par. S. Panayotakis, M. Zimmerman Maaike, W. Keulen, Leiden, Brill, 2003, p. 115-127. Sur la posture générale de Lucien, plus sceptique que cynique, voir Baudoin Descharneux, « Lucien doit-il être rangé dans la boîte des philosophes sceptiques ? », dans Lucian of Samosata. Greek Writer…, p. 63-71.

    17 Sur le parcours à la fois spatial, narratif et ecphrastique que constituent les Histoires vraies, voir Hannah Mossman, « Narrative Island-Hopping : Contextualising Lucian’s Treatment of Space in the Verae Historiae », dans A Lucian for our Times, éd. par A. Bartley, Newcastle upon Tyne, Cambridge Scholars, 2009, p. 47-63.

    18 Cf. K. ní Mheallaig, Reading Fiction…, chap. 6 True Stories : Travels in Hyperreality, p. 206- 260.

    19 Voir Sandrine Dubel, « Dialogue et autoportrait. Les masques de Lucien », dans Lucien de Samosate, éd. par A. Billault, op. cit., p. 19-26.

    20 Voir Vincent Colonna, Autofictions et autres mythomanies littéraires, Auch, Tristram, 2004, ainsi que Suzanne Saïd, « Le je de Lucien », dans L’invention de l’autobiographie : d’Hésiode à Augustin, éd. par M.-F. Baslez, Ph. Hoffmann et L. Pernot, Paris, Éditions Rue d’Ulm, 1993, p. 253-270.

    21 Voir Tim Whitmarsh, Greek Literature and the Roman Empire. The Politics of Imitation, Oxford, Oxford University Press, 2011, en particulier chap. 5 Satirizing Rome : Lucian, p. 247-293.

    22 Voir Michel Briand, « La fiction chez Philostrate, des Images à la Vie d’Apollonios de Tyane, et retour : immersion, expérience, modélisation, intermittences », dans Théories et pratiques de la fiction à l’époque impériale, éd. par Chr. Bréchet, A. Videau et R. Webb, Paris, Picard, 2013, p. 251-267.

    23 Le terme poikilia est couramment rendu par celui de « variété », ou « variation », par le biais du latin, mais l’image est si riche, du concret artisanal à l’abstrait affectif, éthique ou conceptuel, que d’autres expressions modernes, liées à divers champs lexicaux, pourraient figurer le mélange des genres à l’œuvre notamment dans les Histoires vraies : assortiment, bariolage, différence, disparité, diversité, hétérogénéité, marqueterie, mélange, mixture, etc. Lucien joue constamment de ces transferts métaphoriques, de manière réflexive.

    24 K. ní Mheallaigh, Reading Fiction…, chap. 7 Conclusion. Fiction and the Wonder-Culture of the Roman Empire, p. 261-277.

    25 On retrouve ce phénomène dans les plus cinématographiques des romans anciens : cf. Michel Briand, « Tiers pictural et tiers spectaculaire dans les Éthiopiques d’Héliodore : sur un roman ancien, ecphrastique, théâtral, cinématique », dans Autour du Tiers pictural. « Thanks to Liliane Louvel », éd. par M. Briand et A.-C. Guilbard, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2014, p. 25-45.

    26 Cf. Guillemette Bolens, La logique du corps articulaire. Les articulations du corps humain dans la littérature occidentale, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2000, et id., Le style des gestes : corporéité et kinésie dans le récit littéraire, Lausanne, Éditions BHMS, 2008.

    27 Cf. Shane Butler, & Alex C. Purves, Synaesthesia and the Ancient Senses, London – New York, Routledge, 2014, et les travaux du groupe de recherche Synaesthesia (Expérience du divin et polysensorialité dans les mondes anciens. Approche interdisciplinaire et comparée), université de Toulouse. Voir aussi Adeline Grand-Clément, « Poikilia », dans A Companion to Ancient Aesthetics, éd. par Pierre Destrée et Penny Murray, London, Blackwell, 2015, p. 406-421.

    28 Cf. Michel Briand, « Light and Vision in Pindar’s Olympian Odes : Interplays of Imagination and Performance », dans The Look of Lyric : Greek Song and the Visual, Studies in Archaic and Classical Greek Song, Vol. 1, éd. par V. Cazzato et A. Lardinois, Leiden, Brill, 2016, p. 238-254.

    29 Voir Anne Cauquelin, À l’angle des mondes possibles, Paris, Puf, 2010, et dernièrement F. Lavocat, Fait et fiction…, troisième partie D’un monde l’autre, en particulier chap. 1 Mondes actuels et mondes possibles, p. 381-412, et chap. 2, Mondes possibles impossibles, p. 413-441, ainsi que Gérard Genette, Métalepse. De la figure à la fiction, Paris, Seuil, 2004.

    30 Sur le genre de l’ekphrasis, comme exercice rhétorique et composante essentielle des fictions narratives anciennes, les ouvrages de référence sont nombreux, d’Alain Billault, La création romanesque dans la littérature grecque à l’époque impériale, Paris, Puf, 1991, à Ruth Webb, Ekphrasis, Imagination and Persuasion in Ancient Rhetorical Theory and Practice, Farnham, Ashgate, 2009. Le mélange des genres dans les Histoires vraies est un mélange des modes d’énonciation codifiés, entre imitation de modèles classiques et d’exercices normés et innovation, par le pastiche, la parodie, le détournement spectaculaire, la satire : cf. Jacques Bompaire, Lucien écrivain. Imitation et création, Paris, de Boccard, 1958 (réimpr. Turin, 2000). Voir aussi Sandrine Dubel (éd.), Lucien de Samosate. Portrait du sophiste en amateur d’art, Paris, Éditions Rue d’Ulm, 2014, et la postface de J. Pigeaud, « Lucien et l’ekphrasis », p. 177-210, où la notion d’empathie n’est pas employée dans le même sens qu’ici, où l’art oratoire de Lucien est un art du spectacle. Le rapport entre intensité sensorielle (enargeia) et efficacité satirique est important : A. Camerotto, Gli occhi e la lingua…, chap. IV Le virtù e la potenza della vista, p. 191-224. Il s’agit surtout du rapport vif institué entre l’orateur et son public et d’une réception vraiment active de la part du lecteur-spectateur : cf. Anne-Marie Favreau-Linder, « Le sophiste et son public dans les déclamations de Lucien », dans Discorsi alla prova. « Discorsi pronunciati, discorsi ascoltati : contesti di eloquenza tra Grecia, Roma ed Europa », éd. par G. Abbamonte, L. Miletti, L. Spina, Naples, Giannini, 2009, p. 421-448 ; Martin Korenjak, Publikum und Redner. Ihre Interaktionen in der sophistischen Rhetorik der Kaiserzeit, München, Beck, 2000 ; et Thomas Schmitz, Bildung und Macht. Zur sozialen und politischen Funktion der zweiten Sophistik in der griechischen Welt der Kaiserzeit, München, Beck, 1997.

    Auteur

    Michel Briand

    Est professeur de littérature grecque à l’université de Poitiers (EA 3816 FoReLL). Il a récemment dirigé La trame et le tableau. Poétiques et rhétoriques du récit et de la description dans l’Antiquité grecque et latine, Rennes, 2013, et publié une traduction commentée des Olympiques de Pindare (Paris, 2014). Ses travaux sur Lucien ont donné lieu à diverses publications. Parmi les plus récentes, on peut citer les dossiers « Dialogue et théâtralité : interactions, hybridations, réflexivité. De Socrate à Derrida »/ « Lucien (de Samosate) et nous », Cahiers du FoReLL en ligne (09.edel.univ-poitiers.fr/lescahiersforell/index.php?id=71) ; l’avant-propos « “Maintenant donc pour des mots vous allez me tuer ?”, Lucien de Samosate. Du blasphème en démocratie, par un détour en Grèce ancienne », dans Le blasphème dans une société démocratique, dir. par C. Lageot et F. Marchadier, 2016, p. 11-17 ; et, avec A. Eissen et S. Dubel, Rire et dialogue, Rennes, 2017.

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    1 Voir par exemple Benjamin Acosta-Hughes, Polyeideia : The Iambi of Callimachus and the Archaic Iambic Tradition, Princeton, University of California Press, 2002. Cette notion implique une certaine circularité, les Alexandrins étant les inventeurs de catégories génériques qu’ils revendiquent ensuite de mêler avec art.

    2 Voir Michel Briand, « L’éloge (et le blâme) chez Théocrite : effet – recueil, effet – discours, trans-généricité », dans Présence de Théocrite, éd. par Chr. Kossaifi, R. Poignault, Chr. Cusset, Tours, Caesarodunum-Présence de l’Antiquité, 2017. Sur la transgénéricité, voir par exemple Dominique Moncond’huy et Henri Scepi (dir.), Le genre de travers : littérature et transgénéricité, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2008.

    3 Sur le rapport entre histoire et fiction chez Lucien, voir Michel Briand, « Lucien et Homère dans les Histoires vraies : pratique et théorie de la fiction au temps de la Seconde Sophistique », Lalies 25, 2005, p. 127-149. Voir aussi, pour les enjeux contemporains, Ivan Jablonka, L’histoire est une littérature contemporaine. Manifeste pour les sciences sociales, Paris, Seuil, 2014, et plus largement, dans une perspective croisant théorie littéraire et sciences cognitives, notamment, Françoise Lavocat, Fait et fiction. Pour une frontière, Paris, Seuil, 2016. Voir aussi Robert Porod, « Lucian and the Limits of Fiction in Ancient Historiography », éd. par A. Bartley, A Lucian for our Times, Cambridge, Cambridge University Press, 2009, p. 29-46.

    4 Cf. Michel Briand (dir.), La trame et le tableau. Poétiques et rhétoriques du récit et de la description dans l’Antiquité grecque et latine, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2012.

    5 Cf. Michel Briand, « “Maintenant donc pour des mots vous allez me tuer ?”, Lucien de Samosate. Du blasphème en démocratie, par un détour en Grèce ancienne, à Poitiers », dans Le blasphème dans une société démocratique, dir. par C. Lageot & F. Marchadier, Paris, Dalloz, 2016, p. 11-17. Voir aussi Valérie Visa-Ondarçuhu, « La notion de parrhêsia chez Lucien », Pallas 72, 2006, p. 261-278, et Alberto Camerotto, Gli occhi e la lingua della satira. Studi sull’eroe satirico in Luciano di Samosata, Milano & Udine, Mimesis, 2014, surtout chap. IV Le virtù e la potenza della vista, p. 191-224, V La libertà e il dovere del dire, p. 225- 283, VI Il riso dell’eroe satirico e i suoi effetti, p. 285-324, ainsi que, dans une perspective généalogique, Michel Foucault, Le courage de la vérité. Le gouvernement de soi et des autres II (cours au Collège de France, 1984), Paris, Gallimard-Seuil, 2009, ainsi que Étienne Helmer, Diogène le cynique, Paris, Les Belles Lettres, 2017. Les références bibliographiques sur le mélange des genres chez Lucien seraient trop nombreuses à citer ici, en incluant les enjeux stylistiques, énonciatifs, philosophiques, culturels, de la question : nous nous permettons de renvoyer à des études antérieures où l’on trouvera les références les plus importantes, ainsi que l’étude d’aspects partiels de ce qui est abordé ici de manière synthétique.

    6 Panégyrique 50, trad. G. Mathieu et É. Bremond, Les Belles Lettres (Collection des universités de France).

    7 Jean-Marc Narbonne, Antiquité critique et modernité. Essai sur le rôle de la pensée critique en Occident, Paris, Les Belles Lettres, 2016, en particulier chap. IV « Du scepticisme ancien à la tolérance moderne : l’héritage paradigmatique de Lucien », p. 139-189.

    8 Karen ní Mheallaigh, Reading Fiction with Lucian. Fakes, Freaks and Hyperreality, Cambridge, Cambridge University Press, 2014.

    9 Michel Briand, « L’Homère sophiste de Lucien ou les ambiguïtés d’une mimesis ironique », dans Révolutions homériques, éd. par G. W. Most, L. F. Norman, S. Rabau, Pisa, Edizioni della Normale, 2009, p. 27-46, et, dans le registre particulier des littératures de l’imaginaire, auquel appartiennent les Histoires vraies, Michel Briand, « Transfictions et mythologie chez Francis Berthelot. Autour de La Lune noire d’Orion, Mélusath et Hadès Palace », dans L’Antiquité dans l’imaginaire contemporain. Fantasy, science-fiction, fantastique, dir. par M. Bost-Fievet & S. Provini, Paris, Classiques Garnier, 2014, p. 525-542. Voir aussi, avec une autre définition de la transfiction, liée notamment à la figure de la métalepse, Richard Saint-Gelais, Fictions transfuges. La transfictionnalité et ses enjeux, Paris, Seuil, 2011.

    10 K. ní Mheallaigh, Reading Fiction…, p. 1-38, « Lucian’s Promethean Poetics : Hybridity, Fiction and the Postmodern ». Voir aussi Graham Anderson, « Lucian, a Sophist’s Sophist », Yale Classical Studies 37, 1982, p. 61-92, et id., « The Pepaideumenos in Action : Sophists and their Outlook in the Early Empire », ANRW II.33.1, 1989, p. 79-208.

    11 Sur le roman antique en tant que genre, voir notamment Simon Goldhill, « Genre », dans The Cambridge Companion to the Greek and Roman Novel, éd. par T. Whitmarsh, Cambridge, Cambridge University Press, 2008, p. 185-200.

    12 Cf. Peter von Möllendorff, Auf der Suche nach der verlogenen Wahrheit. Lukians Wahre Geschichten, Tübingen, Gunter Narr, 2000.

    13 Aristoula Georgiadou et David. H.-J. Larmour, Lucian’s Science Fiction Novel True Histories : Interpretation and Commentary, Leiden, Boston & Köln, Brill, 1998. L’intitulé de cette étude, qui fait de Lucien le précurseur d’un genre hypermoderne, peut-être nuancé : cf. Sophie Rabau, « Pourquoi dit-on que Lucien est un auteur de Science-Fiction ? », Cahiers du FoReLL, numéro Lucien (de Samosate) et nous, éd. par A. Eissen et M. Briand, 2013, http://09.edel.univ-poitiers.fr/lescahiersforell/index.php?id=237

    14 Cf. Michel Briand, « La fiction qui pense en riant : avatars et paradoxes du muthos et du pseudos chez Lucien », ibid., 2013, http://09.edel.univ-poitiers.fr/lescahiersforell/index.php?id=243. Sur le rapport entre rire et philosophie, voir Stephen Halliwell, Greek Laughter. A Study of Cultural Psychology from Homer to Early Christianity, Cambridge, Cambridge University Press, 2008, chap. 9, Lucian and the laughter of life and death, p. 429-469, et Geneviève Husson, « Lucien philosophe du rire ou Pour ce que rire est le propre de l’homme », dans Lucien de Samosate, éd. par A. Billault, Lyon, Centres d’études romaines et gallo-romaines, 1994, p. 177-184. Voir aussi Isabelle Gassino, « Par delà toutes les frontières : le pseudos dans les Histoires vraies de Lucien », dans Lucian of Samosata. Greek Writer and Roman Citizen, éd. par F. Mestre et P. Gómez, Barcelona, Publicacions i edicions de la Universitat de Barcelona, 2010, p. 87-98.

    15 Cf. Michel Briand, « Le dialogue entre mythe et fiction : à propos du Dionysos de Lucien », dans Mythe et fiction, éd. par D. Augier et Ch. Delattre, Paris, Presses universitaires de Paris Ouest, 2010, p. 219-237.

    16 Cf. Andrew Laird, « Fiction as a Discourse of Philosophy in Lucian’s Verae Historiae », dans The Ancient Novel and Beyond, éd. par. S. Panayotakis, M. Zimmerman Maaike, W. Keulen, Leiden, Brill, 2003, p. 115-127. Sur la posture générale de Lucien, plus sceptique que cynique, voir Baudoin Descharneux, « Lucien doit-il être rangé dans la boîte des philosophes sceptiques ? », dans Lucian of Samosata. Greek Writer…, p. 63-71.

    17 Sur le parcours à la fois spatial, narratif et ecphrastique que constituent les Histoires vraies, voir Hannah Mossman, « Narrative Island-Hopping : Contextualising Lucian’s Treatment of Space in the Verae Historiae », dans A Lucian for our Times, éd. par A. Bartley, Newcastle upon Tyne, Cambridge Scholars, 2009, p. 47-63.

    18 Cf. K. ní Mheallaig, Reading Fiction…, chap. 6 True Stories : Travels in Hyperreality, p. 206- 260.

    19 Voir Sandrine Dubel, « Dialogue et autoportrait. Les masques de Lucien », dans Lucien de Samosate, éd. par A. Billault, op. cit., p. 19-26.

    20 Voir Vincent Colonna, Autofictions et autres mythomanies littéraires, Auch, Tristram, 2004, ainsi que Suzanne Saïd, « Le je de Lucien », dans L’invention de l’autobiographie : d’Hésiode à Augustin, éd. par M.-F. Baslez, Ph. Hoffmann et L. Pernot, Paris, Éditions Rue d’Ulm, 1993, p. 253-270.

    21 Voir Tim Whitmarsh, Greek Literature and the Roman Empire. The Politics of Imitation, Oxford, Oxford University Press, 2011, en particulier chap. 5 Satirizing Rome : Lucian, p. 247-293.

    22 Voir Michel Briand, « La fiction chez Philostrate, des Images à la Vie d’Apollonios de Tyane, et retour : immersion, expérience, modélisation, intermittences », dans Théories et pratiques de la fiction à l’époque impériale, éd. par Chr. Bréchet, A. Videau et R. Webb, Paris, Picard, 2013, p. 251-267.

    23 Le terme poikilia est couramment rendu par celui de « variété », ou « variation », par le biais du latin, mais l’image est si riche, du concret artisanal à l’abstrait affectif, éthique ou conceptuel, que d’autres expressions modernes, liées à divers champs lexicaux, pourraient figurer le mélange des genres à l’œuvre notamment dans les Histoires vraies : assortiment, bariolage, différence, disparité, diversité, hétérogénéité, marqueterie, mélange, mixture, etc. Lucien joue constamment de ces transferts métaphoriques, de manière réflexive.

    24 K. ní Mheallaigh, Reading Fiction…, chap. 7 Conclusion. Fiction and the Wonder-Culture of the Roman Empire, p. 261-277.

    25 On retrouve ce phénomène dans les plus cinématographiques des romans anciens : cf. Michel Briand, « Tiers pictural et tiers spectaculaire dans les Éthiopiques d’Héliodore : sur un roman ancien, ecphrastique, théâtral, cinématique », dans Autour du Tiers pictural. « Thanks to Liliane Louvel », éd. par M. Briand et A.-C. Guilbard, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2014, p. 25-45.

    26 Cf. Guillemette Bolens, La logique du corps articulaire. Les articulations du corps humain dans la littérature occidentale, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2000, et id., Le style des gestes : corporéité et kinésie dans le récit littéraire, Lausanne, Éditions BHMS, 2008.

    27 Cf. Shane Butler, & Alex C. Purves, Synaesthesia and the Ancient Senses, London – New York, Routledge, 2014, et les travaux du groupe de recherche Synaesthesia (Expérience du divin et polysensorialité dans les mondes anciens. Approche interdisciplinaire et comparée), université de Toulouse. Voir aussi Adeline Grand-Clément, « Poikilia », dans A Companion to Ancient Aesthetics, éd. par Pierre Destrée et Penny Murray, London, Blackwell, 2015, p. 406-421.

    28 Cf. Michel Briand, « Light and Vision in Pindar’s Olympian Odes : Interplays of Imagination and Performance », dans The Look of Lyric : Greek Song and the Visual, Studies in Archaic and Classical Greek Song, Vol. 1, éd. par V. Cazzato et A. Lardinois, Leiden, Brill, 2016, p. 238-254.

    29 Voir Anne Cauquelin, À l’angle des mondes possibles, Paris, Puf, 2010, et dernièrement F. Lavocat, Fait et fiction…, troisième partie D’un monde l’autre, en particulier chap. 1 Mondes actuels et mondes possibles, p. 381-412, et chap. 2, Mondes possibles impossibles, p. 413-441, ainsi que Gérard Genette, Métalepse. De la figure à la fiction, Paris, Seuil, 2004.

    30 Sur le genre de l’ekphrasis, comme exercice rhétorique et composante essentielle des fictions narratives anciennes, les ouvrages de référence sont nombreux, d’Alain Billault, La création romanesque dans la littérature grecque à l’époque impériale, Paris, Puf, 1991, à Ruth Webb, Ekphrasis, Imagination and Persuasion in Ancient Rhetorical Theory and Practice, Farnham, Ashgate, 2009. Le mélange des genres dans les Histoires vraies est un mélange des modes d’énonciation codifiés, entre imitation de modèles classiques et d’exercices normés et innovation, par le pastiche, la parodie, le détournement spectaculaire, la satire : cf. Jacques Bompaire, Lucien écrivain. Imitation et création, Paris, de Boccard, 1958 (réimpr. Turin, 2000). Voir aussi Sandrine Dubel (éd.), Lucien de Samosate. Portrait du sophiste en amateur d’art, Paris, Éditions Rue d’Ulm, 2014, et la postface de J. Pigeaud, « Lucien et l’ekphrasis », p. 177-210, où la notion d’empathie n’est pas employée dans le même sens qu’ici, où l’art oratoire de Lucien est un art du spectacle. Le rapport entre intensité sensorielle (enargeia) et efficacité satirique est important : A. Camerotto, Gli occhi e la lingua…, chap. IV Le virtù e la potenza della vista, p. 191-224. Il s’agit surtout du rapport vif institué entre l’orateur et son public et d’une réception vraiment active de la part du lecteur-spectateur : cf. Anne-Marie Favreau-Linder, « Le sophiste et son public dans les déclamations de Lucien », dans Discorsi alla prova. « Discorsi pronunciati, discorsi ascoltati : contesti di eloquenza tra Grecia, Roma ed Europa », éd. par G. Abbamonte, L. Miletti, L. Spina, Naples, Giannini, 2009, p. 421-448 ; Martin Korenjak, Publikum und Redner. Ihre Interaktionen in der sophistischen Rhetorik der Kaiserzeit, München, Beck, 2000 ; et Thomas Schmitz, Bildung und Macht. Zur sozialen und politischen Funktion der zweiten Sophistik in der griechischen Welt der Kaiserzeit, München, Beck, 1997.

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    Ce livre est cité par

    • (2018) Books Received. The Classical Review, 68. DOI: 10.1017/S0009840X18001981

    Ce chapitre est cité par

    • Briand, Michel. (2018) Des mœurs sexuelles des Sélénites (Lucien, Histoires vraies, I, 22) : entre satire queer et constructionnisme incarné, le sexe qui donne à rire et à penser. Archimède. Archéologie et histoire ancienne, 5. DOI: 10.47245/archimede.0005.ds1.09

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    Briand, M. (2017). 3. La transgénéricité des Histoires vraies. In Émeline Marquis & A. Billault (éds.), Mixis (1‑). Demopolis. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.demopolis.2157
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