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    Plan détaillé Texte intégral La conscience inconsciente : une hypothèse spéculative ? Le point de vue systémique Les résidus d’une philosophie de la conscience et son dépassement Notes de bas de page Auteur

    Vers une philosophie scientifique

    Ce livre est recensé par

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    Table des matières

    11. Freud à l’école de la conscience

    Valérie Aucouturier

    p. 279-302

    Texte intégral La conscience inconsciente : une hypothèse spéculative ? La conscience et ses objets Une conscience inconsciente ? Le point de vue systémique Les pathologies de la conscience La causalité inconsciente Un nouvel inconscient : le point de vue topique et le point de vue systémique Les résidus d’une philosophie de la conscience et son dépassement L’intériorité L’agent et la cause Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    1Franz Brentano (1838-1917) a-t-il eu une influence sur Sigmund Freud (1856-1939) et laquelle ? Après une phase initiale d'omission, voire de déni1, M. Dorer affirme même qu'il est impossible de prouver l'existence d'une telle influence théorique. Un certain nombre d’auteurs ont cherché à répondre à cette question par un travail historique, en épluchant la correspondance du jeune Freud, notamment avec son ami Edward Silberstein, dans laquelle il décrit son enthousiasme pour les cours de Brentano, qu’il a suivis de 1874 à 18762, et où l’on apprend qu’il aurait été invité au moins deux fois chez son professeur pour poursuivre des discussions philosophiques3. On sait, en effet, que ces deux grands penseurs auraient entretenu, au moins un temps, une relation individuelle de maître à élève et que Freud a même été recommandé par son professeur pour la traduction d’une partie de l’œuvre de John Stuart Mill4 et l'on sait également d'après sa correspondance avec Eduard Silverstein que Freud avait même l'intention de faire son doctorat en philosophie sous la direction de Brentano5. D’autres auteurs ont cherché, dans une comparaison entre La psychologie du point de vue empirique6 et la métapsychologie freudienne, à dresser un parallèle entre deux visions du psychisme qui entretiendraient peu ou prou quelque ressemblance7.

    2Notre démarche ici se veut différente. Peu importe que cette influence soit réelle ou fictive, notre objet va être de confronter au plan conceptuel l’élaboration de la métapsychologie freudienne (en particulier de la notion d’inconscient) aux critiques du « philosophe de la conscience » qu’est Brentano. Ces critiques devront nous servir d’outil épistémologique pour aborder l’hypothèse freudienne, pour voir dans quelle mesure il y répond, mais aussi les affinités et les dissonances entre la philosophie brentanienne de la conscience et la métapsychologie freudienne de l’inconscient et des pulsions.

    3À première vue, en effet, tout semble distinguer la philosophie descriptive de la conscience brentanienne de la théorie freudienne de l’inconscient, bien que ces auteurs s’accordent dans leur volonté de produire un savoir proprement psychologique et également dans leur rejet d’une philosophie spéculative au profit d’une approche empirique, dont les hypothèses sont exclusivement fondées sur des données de l’expérience. Comment Freud s’y prend-il pour dépasser le modèle de l’inconscient qui sert de repoussoir à Brentano ? Dans quelle mesure la première métapsychologie reste-t-elle tributaire de certains présupposés d’une philosophie de la conscience ? En quoi parvient-elle à les dépasser ?

    4Cet article aura pour fil conducteur le lien entre l’émergence du nouveau paradigme freudien et l’intérêt de Freud pour ce qu’on pourrait appeler « les pathologies de la conscience », qui l’obligent à dépasser le modèle des philosophies de la conscience.

    La conscience inconsciente : une hypothèse spéculative ?

    La conscience et ses objets

    5La psychologie brentanienne de la conscience est reconnue pour avoir caractérisé les phénomènes psychiques par « l’inexistence intentionnelle d’un objet » (PPE, p. 104), c’est-à-dire par « le rapport à quelque chose à titre d’objet » (p. 110), la présence, dans la conscience, d’un objet sur le mode de l’existence intentionnelle (en tant que Vorstellung, représenté par la conscience). Brentano se démarque ici des philosophies traditionnelles de la conscience qui, depuis René Descartes, affirment que la spécificité du psychique par rapport au physique tient à son caractère non-étendu et en offrent ainsi une « définition négative » (p. 99). Il caractérise les phénomènes psychiques dans leur aspect relationnel, comme le rapport d’un sujet à un objet (interne ou externe). En outre, et c’est ce qui rallie cependant Brentano aux philosophies de la conscience, « les phénomènes psychiques […] sont seuls susceptibles d’être perçus au sens propre du terme » (p. 105), en tant qu’ils sont « objet de perception interne » (p. 110). Et, au « sens propre » de cette Wahrnemung, ils sont les seuls à jouir d’une « évidence immédiate » contrairement aux « phénomènes de la perception dite “extérieure” [qui] ne peuvent aucunement, même par des procédés indirects, être démontrés comme vrais et réels » (p. 104). Ainsi, en plus de l’existence intentionnelle dont ils jouissent, les phénomènes psychiques sont seuls à posséder une « existence effective » (p. 110). Et, tandis que nous les percevons dans leur « unité », séparément les uns des autres, les phénomènes physiques, quant à eux, nous apparaissent toujours comme les parties d’un tout.

    6Néanmoins, Brentano ne va pas, comme son prédécesseur David Hume8, jusqu’à nier l’unité de la conscience. L’analyse doit nous permettre, dans la psychologie empirique, de distinguer les objets de la conscience, objets premiers de la perception externe et objets seconds de la perception interne (de la conscience qui se perçoit elle-même) (PPE, p. 101 sq.), et les modes de la conscience (représentation, jugement, affect), mais ces distinctions analytiques ne font pas pour autant une conscience divisée ; sans qu’elle soit « une réalité parfaitement simple », ses « parties » ne sont que « les éléments divisifs d’une unité réelle » (p. 178). La conscience caractérise donc le psychisme et elle est, comme chez John Locke9, une unité (p. 176) ; elle constitue le terrain d’expérience de la psychologie empirique. À ce titre, nous pouvons qualifier l’approche brentanienne de « philosophie de la conscience », en ce qu’elle définit le psychisme par la qualité « conscience », elle même définie par son intentionnalité (le rapport à des objets de conscience) :

    Aussi bien l’emploierai-je [le terme de conscience] de préférence comme synonyme de phénomène psychique ou d’acte psychique. […] En outre, le terme de conscience, s’appliquant à un objet dont la connaissance est la conscience, paraît tout à fait propre à caractériser les phénomènes psychiques précisément d’après leur différence spécifique, c’est-à-dire la propriété de la présence intentionnelle d’un objet […]. (PPE, p. 114)

    Une conscience inconsciente ?

    7Cependant, cette limitation du domaine de la psychologie à cette catégorie de la conscience soulève certaines questions philosophiques au sein des cercles de psychologues et de philosophes qui entourent Brentano10. En effet, la conscience caractérise avant tout ce qui est actuellement présent à l’esprit du penseur. Quel sort, dès lors, doit-il être fait à tout ce qui n’est pas actuellement présent à la conscience, aux idées qui semblent surgir de nulle part, aux rêves, etc. ? Dans quelle mesure une psychologie de la conscience peut-elle rendre compte de ces phénomènes ? Y a-t-il des processus psychiques qui se produisent en moi sans que j’en aie conscience ? Brentano prend cette question très au sérieux et s’interroge en particulier sur la possibilité d’envisager l’hypothèse d’un inconscient psychique :

    [I] l n’existe pas de phénomène psychique qui ne soit conscience d’un objet, au sens qu’on a indiqué plus haut. Mais la question se pose de savoir s’il existe des phénomènes psychiques qui ne soient pas objets de conscience. Tous les phénomènes psychiques sont conscience ; mais tous les phénomènes psychiques sont-ils conscients ou bien existe-t-il peut-être aussi des actes psychiques inconscients ? (PPE, p. 114, nos italiques)

    8Ainsi formulée, l’hypothèse de l’inconscient est relative à la réflexivité de la conscience : sa capacité à se connaître elle-même comme conscience de quelque chose, à se prendre elle-même pour objet de conscience. Autrement dit, la possibilité de l’inconscient est dans un premier temps envisagée comme la possibilité d’une « conscience [au sens d’un acte psychique] inconsciente » (p. 114), d’une conscience d’objet (premier) dont nous n’aurions pas conscience. Brentano précise alors cette hypothèse d’une « conscience inconsciente » en la comparant à une « vision non vue » : si « nous employons le mot “inconscient” » non pas au « sens actif » de « ce qui n’a pas conscience d’une chose », mais « au sens passif […] d’une chose dont on n’a pas conscience » (p. 115, n. 1). De même que lorsque nous voyons quelque chose, nous ne voyons pas nécessairement que nous le voyons, l’acte de voir lui-même, de même lorsque nous avons conscience de quelque chose, nous n’aurions pas nécessairement conscience de cette conscience.

    9L’hypothèse d’une « conscience inconsciente » ici envisagée n’est pas l’hypothèse d’un acte psychique qui serait à la fois conscient et inconscient, ce qui serait une contradiction dans les termes, comme l’est l’idée d’un rouge qui ne serait pas rouge (p. 115). C’est l’hypothèse d’une conscience dont nous n’aurions pas conscience en tant qu’elle peut elle-même se faire objet de conscience. C’est de l’acte de conscience, en tant qu’objet possible d’une conscience réflexive, dont nous pourrions demeurer inconscient, comme nous voyons parfois sans voir que nous voyons. Dans l’expression « conscience inconsciente », le mot « conscience » porte sur un certain objet (par exemple, de perception) et le mot « inconsciente » porte sur le statut de la conscience elle-même en tant qu’objet de conscience. Une conscience inconsciente serait donc un acte psychique qui ne serait pas lui-même objet de conscience. C’est la possibilité d’une telle conscience inconsciente que Brentano remet en cause.

    10Est au fond en question la possibilité d’une activité psychique inconsciente, c’est-à-dire d’une activité similaire à notre activité psychique consciente (lorsque nous percevons, pensons, connaissons, etc.) qui se produirait en nous sans que nous en ayons la moindre conscience. Brentano exclut de cette hypothèse une simple conception dispositionnelle (latente ou « descriptive » au sens freudien11) de l’inconscient, suivant laquelle tout un ensemble de connaissances et d’expériences acquises ne sont pas constamment présentes à notre conscience ; celle-ci n’est, de toute évidence pour lui, même pas en question. Ne sont pas en question non plus les hypothèses de processus inconscients physiologiques, analogues aux mouvements réflexes, qui ont attiré l’attention des physiologistes et des psychologues du XIXème siècle12. La façon dont Brentano envisage l’hypothèse d’un inconscient psychique sur le seul modèle d’un dédoublement de l’objet de la conscience (qui se prend alors elle-même pour objet ou au contraire qui n’a pas conscience d’avoir conscience) est fondamentale dans l’économie de sa réfutation d’une telle hypothèse. C’est ce que nous allons voir dans un instant.

    11En outre, l’hypothèse à évaluer, d’une « conscience inconsciente », est bien celle d’un inconscient psychique. Car, on le sait, pour Brentano les phénomènes psychiques sont à séparer absolument des phénomènes physiques ; seuls ceux-ci sont l’objet véritable d’une psychologie empirique. Or, si l’hypothèse d’une conscience inconsciente n’est pas contradictoire (comme l’est l’idée d’un rouge qui n’est pas rouge), elle soulève un problème épistémologique ; sa validation ou sa réfutation empiriques semblent, l’une comme l’autre, impossibles :

    Il va de soi et il est indiscutable qu’il ne peut y avoir, dans le domaine de notre expérience, de représentations inconscientes, quand bien même elles existeraient nombreuses en nous ; autrement elles ne seraient pas inconscientes. On ne peut donc, semble-t-il, invoquer en leur faveur le témoignage de l’expérience. Et si l’expérience nous fait défaut, comment pourrons-nous résoudre la question ? (PPE, p. 117, nos italiques)

    12L’inconscient, s’il existe, échappe par définition au champ d’expérience de la psychologie empirique qui vise précisément l’examen des objets intentionnels de la conscience, car l’inconscient tel qu’il a été défini est ce qui précisément n’est pas objet de conscience. Brentano envisage alors, à la manière dont le fera Freud ensuite, la possibilité de « déduire indirectement de faits d’expérience ce que l’expérience ne nous apprend pas directement » (p. 117). Cette déduction peut se faire suivant quatre possibilités : (1) l’hypothèse de la cause manquante (celle que Freud et Breuer proposeront dans les Études sur l’hystérie), (2) l’hypothèse de l’effet manquant, (3) l’idée d’un rapport fonctionnel d’intensité entre les « phénomènes psychiques conscients » et « la conscience qui les accompagne », ou enfin (4) la critique d’une régression à l’infinie des philosophies de la conscience réflexive.

    13Mais Brentano ne les envisage que pour mieux les réfuter ; ou plutôt il pose de cette façon les conditions épistémologiques d’une véritable hypothèse valide de l’inconscient et montre que, jusqu’à présent, il n’a rencontré aucun argument ni aucune observation empirique susceptibles de valider une telle hypothèse (et en particulier aucun permettant de montrer que cette hypothèse serait supérieure à d’autres hypothèses pour rendre compte des mêmes phénomènes). Il se livre ainsi à une véritable analyse d’épistémologie critique de l’hypothèse de l’inconscient. Il n’est pas nécessaire à notre démonstration d’analyser le détail de la réfutation de Brentano. Tâchons donc simplement de la résumer. Pour réfuter chacun de ces arguments, Brentano a recours à divers modes d’argumentation. Les deux premières procédures de validation de l’hypothèse de l’inconscient vont recevoir des objections méthodologiques, les deux dernières des objections (de psychologie) « empirique (s) ».

    14(1) D’abord pour remonter de ce qu’on considère comme un effet à sa cause inconsciente, trois conditions doivent être remplies : (a) « il faut avant tout que le fait [considéré comme effet] soit suffisamment garanti » (p. 118) ; (b) il faut […] qu’il soit prouvé par l’expérience que des phénomènes psychiques conscients ont toujours entraîné des conséquences analogues » (p. 119) ; (c) « une troisième condition […] consisterait enfin à démontrer qu’aucune autre hypothèse que celle-là ne permet de concevoir, sans la plus grande invraisemblance, les phénomènes en question ».

    15D’après la condition (a), il faut exclure des effets considérés des phénomènes douteux tels que les « pressentiments », les « prémonitions », ou encore « les productions géniales ». En effet, rien ne montre que les « plus merveilleuses découvertes » des grand savants (comme Newton) seraient davantage le résultat d’une « pensée inconsciente » que du simple « oubli des étapes conscientes de [la] découverte » (p. 118).

    16La deuxième condition (b), nous oblige à « exposer les lois de ces prétendus phénomènes inconscients et de confirmer, par une explication synthétique, toute une masse de faits et d’expériences qui, sans cela, resteraient inexpliqués, et en les prévoyant à l’avance, une foule d’autres auxquels, sans cela, personne ne s’attendrait » (p. 120). Brentano n’en trouve aucune illustration dans l’hypothèse de l’inconscient de Hartman qu’il considère alors et en laquelle il ne voit qu’un deux ex machina venu combler sans plus de justification les endroits « où l’explication mécanique fait défaut » (p. 121).

    17Pour montrer enfin que la troisième condition (c) n’a pas davantage été remplie par les défenseurs de l’hypothèse d’un inconscient, Brentano passe en revue « les plus éminents d’entre-eux » (p. 122) et montre que partout où ils postulent un inconscient psychique, d’autres explications sont possibles, comme dans l’exemple des « productions géniales », ci-dessus. Il en conclut qu’il est probable « qu’une connaissance plus approfondie des lois psychiques nous permettrait de ramener aux seuls faits conscients, comme à leur cause suffisante, ce qui nous a paru exiger le recours à une activité inconsciente » (p. 128).

    18(2) À défaut de supposer l’existence d’une cause inconsciente, on pourrait déduire d’une cause consciente des effets inconscients. Brentano revisite ici, entre autres, l’hypothèse leibnizienne des petites perceptions13 qui produiraient des « sensations inconscientes » : nous entendons les vagues se briser sur le rivage, mais « quand une seule goute remue, nous croyons que nous n’entendons pas de bruit », pourtant « la sensation du flot bruyant ne peut se composer que des sensations sonores de toutes les gouttes réunies. Nous entendons par conséquent, mais nous entendons sans en avoir conscience » (pp. 128-129).

    19Or, avant de postuler un tel inconscient psychique, nous devons nous assurer que trois conditions sont remplies : (a) « être certain que le phénomène psychique qu’on pouvait prévoir n’est pas apparu à la conscience pour être oublié tout de suite après » ; (b) « qu’il soit prouvé que, dans le cas en question, la cause fut absolument identique à celle des autres cas » et (c) « faire la preuve que les causes, qui ont inhibé ici la conscience concomitante et qui faisaient manifestement défaut dans les autres cas, n’ont pas agi également contre le phénomène psychique dont on prétend déduire l’existence et plus simplement qu’aucun empêchement spécial n’a fait obstacle à ce phénomène » (p. 128). Or, l’exemple donné ne satisfait pas la seconde condition, car il se peut que le son faible n’entraine, contrairement au son fort, aucun « phénomène sonore » et diffère ainsi non seulement par son intensité mais aussi par sa (son absence de) qualité sensible. De même que les variations de l’état qualitatif de l’eau ne peuvent être ramenés à de simples différences (quantitatives) de températures (p. 129). Mais l’argument le plus central employé ici par Brentano est celui de la variation de l’attention : il suffit que nous ne prêtions pas attention à une chose que nous percevons pour qu’elle n’apparaisse pas à notre conscience et il se peut même que cette chose à laquelle nous n’avions pas prêté attention sur le moment, nous reviennent ensuite à l’esprit14. Rien ne permet pourtant de dire que cette chose ne nous est pas apparue pour être oubliée immédiatement. En outre, si l’on considère l’expérience d’Helmholtz, qui remarque « dans les images consécutives, des particularités dont il ne s’était pas rendu compte en voyant l’objet » (p. 130), il n’est pas besoin de supposer que ces particularités non remarquées ont été, dans un premier temps, inconsciemment saisies, car on peut raisonnablement penser que l’image consécutive est un phénomène physique qui résulte de la persistance rétinienne. Par conséquent, la perception de l’image consécutive est une deuxième perception et non une réitération psychique d’une expérience antérieure.

    20(3) On pourrait également envisager un rapport d’intensité entre les phénomènes psychiques conscients et la conscience qui les accompagne, telle que, dans certains cas, cette dernière est nulle tandis que les phénomènes psychiques en question ont lieu. Mais cette hypothèse est réfutée par Brentano en vertu d’un nécessaire rapport de proportionnalité et même d’« égalité parfaite » entre une représentation et la conscience qui l’accompagne (p. 133). Ceci devrait s’éclairer à l’examen de la dernière preuve possible envisagée.

    21(4) Cette dernière preuve, remise en cause par Brentano, emploie l’argument suivant. Si toute représentation consciente (d’un son, par exemple) implique la conscience de cette représentation, alors, pour que la conscience de cette représentation soit consciente, elle implique à son tour une conscience de la conscience de cette représentation, et ainsi de suite à l’infini. Pour ne pas sombrer dans cette régression à l’infini, on pourrait supposer qu’au niveau méta ou subconscient, nous avons affaire à une conscience inconsciente, au sens indiqué plus haut d’un acte psychique non-conscient : « bref, ou bien la série est infinie, ou bien elle se termine par une représentation inconsciente » (p. 134). La réponse de Brentano consiste à affirmer que « l’expérience interne » nous montre qu’il n’y a en réalité qu’un seul acte psychique par lequel « sont représentés », d’une part, « l’objet premier », celui de la représentation et, d’autre part, « l’objet second », cette représentation même15 :

    La représentation [Vorstellung] du son et la représentation de la représentation du son ne forment qu’un seul phénomène psychique, que nous avons, de façon abstraite, décomposé en deux représentations en le considérant dans son rapport à deux objets différents, dont l’un est un phénomène physique et l’autre un phénomène psychique. Dans le même phénomène psychique, où le son est représenté, nous percevons en même temps le phénomène psychique ; et nous le percevons suivant son double caractère, d’une part en tant qu’il a le son comme contenu, et d’autre part en tant qu’il est en même temps présent à lui-même comme son propre contenu. (PPE, p. 139)

    22Si c’est un seul acte psychique qui me met en présence à la fois de la représentation de l’objet et du fait que je me le représente, alors, non seulement il devient inutile de postuler d’autres processus psychologiques (inconscients) sous-jacents, mais, en outre, il n’est pas raisonnable d’envisager la scission de cet acte psychique en deux éléments, l’un conscient, l’autre inconscient. Avoir conscience de quelque chose, c’est aussi avoir conscience que nous en avons conscience ; dans tout autre cas envisagé, aucun acte proprement psychique n’a eu lieu. Ceci semble être une condition de possibilité de la psychologie empirique, qui consiste précisément dans l’examen de ses actes psychiques par la conscience elle-même et qui exige donc une réflexivité constitutive de la conscience ou de l’acte psychique. On comprend ainsi la menace que peut constituer, pour la psychologie brentanienne, l’hypothèse d’un inconscient psychique.

    23En effet, en réfutant l’hypothèse d’un inconscient psychique, Brentano renforce la thèse qui soutient tout l’édifice de sa philosophie de la conscience, à savoir que tout acte psychique se caractérise par son intentionnalité (il est conscience de quelque chose) et que, de ce fait, il doit être conscient. Or l’hypothèse d’un inconscient psychique semble mettre à mal l’idée d’une caractérisation du domaine psychologique par la conscience et l’intentionnalité, et surtout, en retour, elle semble rendre impossible la possibilité d’une psychologie empirique. Car, s’il y a certains contenus psychiques auxquels nous n’avons pas accès, comment pouvons-nous espérer en faire une étude empirique ?

    Le point de vue systémique

    24C’est précisément ce défi que la psychanalyse freudienne tente de relever en affirmant le caractère majoritairement inconscient des phénomènes psychiques, sans leur retirer leur caractère intentionnel, tout en revendiquant la possibilité d’une approche scientifique du psychisme, et même d’une étude du psychisme encore largement tributaire d’une « introspection » de type brentanien. Il s’agit donc d’une recherche qui se fonde sur une observation des contenus de conscience, mais qui cherche en outre à y repérer des expressions de l’inconscient.

    25La plupart des commentateurs s’accordent à dire16 que, si nous ne pouvons pas vraiment trancher la question de savoir quelle influence Brentano a pu avoir sur la théorie psychanalytique, Freud a néanmoins élaboré une théorie du psychisme (et en particulier de l’inconscient) qui tente d’échapper aux apories repérées par Brentano. En effet, malgré les aspects antithétiques, face à une psychologie de la conscience, d’une théorie du psychisme qui n’a cessé, au cours de ses évolutions, d’accorder une place plus grande à sa partie inconsciente, il faut reconnaître une ambition semblable : rendre raison des phénomènes psychiques de manière scientifique, c’est-à-dire en évitant la spéculation philosophique au profit de l’expérience (y compris dans sa dimension la plus subjective et relative à un point de vue). Je reprendrai brièvement ces remarques, mais mon objectif véritable est de mesurer le degré de commensurabilité entre les conceptions de l’inconscient envisagées par Brentano et celles de Freud (car il est bon de rappeler qu’il n’y a pas, chez Freud, une seule théorie de l’inconscient, mais plusieurs). Ceci afin d’évaluer dans quelle mesure le système freudien lui-même demeure, en certains points, tributaire des philosophies de la conscience.

    26Comme nous l’avons déjà suggéré, Freud partage avec Brentano certaines réticences vis-à-vis de la philosophie spéculative. Comme lui, il ne cesse d’appuyer la nécessité de ne soutenir que des hypothèses suggérées par l’expérience et que cette dernière peut vérifier. On peut ainsi comprendre sans doute tout l’intérêt que Freud accordait aux enseignements de Brentano. Mais comment Freud procède-t-il pour échapper à l’antinomie, au moins apparente, d’une conscience inconsciente et qui plus est à l’obstacle épistémologique, semble-t-il insurmontable, qui consiste à démontrer l’existence de ce qui par définition est inaccessible à l’expérience consciente ?

    Les pathologies de la conscience

    27Le fossé théorique qui sépare la psychologie empirique de la psychanalyse tient, pour une grande part, au fait que Brentano se penche sur les phénomènes de conscience « normale » tandis que Freud cherche à rendre compte de phénomènes pathologiques inexpliqués (comme les paralysies sans lésion des grandes hystéries). Ceci est explicitement suggéré par Freud lorsqu’il commente au chapitre VII de la Traumdeutung l’article de 1897 de Theodor Lipps sur le concept d’inconscient en psychologie (IR, pp. 666-667) :

    Le médecin ne peut faire autrement que de repousser avec un haussement d’épaules l’assertion que « la conscience est le caractère indispensable du psychique » et éventuellement, si son respect pour les propos des philosophes est encore assez fort, d’admettre qu’ils ne traitent pas le même objet et qu’ils ne pratiquent pas une même science. Car il suffit d’une seule observation vraiment intelligente de la vie d’âme d’un névrosé, d’une seule analyse de rêve, pour imposer à ce médecin l’inébranlable conviction que les processus de pensée les plus compliqués et les plus corrects, auxquels on ne refusera quand même pas le nom de processus psychiques, peuvent se produire sans exciter la conscience de la personne. Certes, le médecin n’a pas connaissance de ces processus inconscients avant qu’ils n’aient exercés sur la conscience un effet susceptible d’être communiqué ou observé. (…) Le médecin doit se réserver le droit de progresser, en procédant par inférence, de l’effet-conscience jusqu’au processus psychique inconscient (…). (IR, p. 667, les deux premiers italiques sont les nôtres)

    28L’argument central de Freud, qui revient à plusieurs reprises dans ses écrits de métapsychologie, consiste à affirmer que sans l’hypothèse d’un inconscient psychique, on ne peut offrir aucune explication proprement psychologique des états psychiques anormaux. Or, cette impossibilité d’une explication psychologique réduit très considérablement le champ d’investigation du médecin qui s’occupe de ces états et constitue sans doute pour Freud un retour en arrière. Car, dans ce cas, non seulement certains phénomènes (comme le rêve) demeureraient inexpliqués, mais les symptômes névrotiques les plus spectaculaires (comme la conversion somatique de l’hystérie), sans cause organique, ne seraient que « simulation ». Il ne faut en effet pas oublier que les expériences de Jean-Martin Charcot sur les hystériques sont aussi celles qui ont conduit à réviser l’opinion suivant laquelle les hystériques seraient de simples « simulatrices », au profit de l’idée qu’il y aurait dans la conversion hystérique un véritable phénomène (pathologique) à étudier, un nouveau champ d’études pour la médecine.

    29Dans ses écrits de métapsychologie plus tardifs, et en particulier dans le texte de 1915, « L’inconscient », Freud rend compte de manière plus systématique de ses arguments en faveur de l’hypothèse d’un inconscient psychique : « les données de la conscience sont lacunaires » et ne suffisent pas à expliquer certains « actes psychiques » comme « les actes manqués et les rêves chez l’homme sain et tout ce qu’on appelle symptômes psychiques et phénomènes compulsionnels chez le malade »17. Il invoque en outre le principe méthodologique de l’hypothèse la plus simple pour « un gain de sens et de cohérence » et enfin le « succès » de la pratique thérapeutique qui en découle (Ibid., p. 67). À ce titre, il critique même explicitement les philosophies de la conscience : « la conscience ne comporte à chaque moment qu’un contenu minime », le reste demeurant « en état de latence, donc dans un état d’inconscience psychique » (Ibid.). Non que ce point de vue descriptif suffise à étayer l’hypothèse d’un inconscient psychique, il permet à Freud d’affirmer que l’équivalence entre le psychique et le conscient ne va pas de soi. Au contraire, au vu des phénomènes précédemment mentionnés, cette équivalence est soit une « pétition de principe », soit au mieux une « affaire de convention » ; elle est, de ce fait, « irréfutable » (Ibid., p. 68). De plus, elle s’avère « inutilisable », car elle nous force à laisser de côté tout un ensemble de phénomènes psychiques, dont nous ne parvenons pas non plus à rendre compte du point de vue de l’étude des phénomènes physiques. L’absence de considération, par les philosophies de la conscience, de certains faits pathologiques (dont l’hypnose fait partie) ou du caractère psychique de ces faits, conduit donc celles-ci à occulter tout un ensemble de phénomènes qui appartiendraient néanmoins au champ de la psychologie (Ibid., p. 68-69). D’où la nécessité, pour rendre compte de ces phénomènes de réintroduire une forme de déterminisme psychologique.

    La causalité inconsciente

    30Cependant, chez Brentano, la conscience est un mode d’être du psychique ; non pas parce que rien ne lui échappe (ce n’est pas une conscience omnisciente), mais parce que c’est ainsi que le psychisme se présente à nous, se présente à notre expérience. Dès lors, si quelque chose venait déterminer nos contenus de conscience, ce quelque chose serait forcément une cause externe (physiologique, si elle émane de notre constitution ; physique, si elle est la perception d’un objet externe). Le psychique est clos sur lui-même en ce sens qu’il ne peut se saisir pleinement que de l’intérieur, dans l’unité de la diversité de ses modes.

    31Freud réintroduit, au contraire, un certain déterminisme proprement psychique au sein même du psychisme et même plus tard, dans la deuxième topique, au sein même de la conscience18. Dans ses premiers écrits, avant d’offrir une vision proprement topique de l’appareil psychique, il est d’ailleurs d’abord question d’une division de la conscience :

    [C]ette division de la conscience, qui se manifeste si clairement dans les cas classiques de double conscience19, existerait à l’état rudimentaire dans chaque hystérie. La tendance à la dissociation, et par là à l’apparition d’états de conscience anormaux que nous regroupons sous le terme d’« hypnoïdes », serait le phénomène à la base de cette névrose.20

    32Dans sa première théorie des névroses de défense et de l’hystérie de conversion, l’affect lié à une représentation inconciliable (c’est-à-dire traumatique) est détaché de cette représentation (que l’individu ne peut pas supporter et cherche à rejeter hors de sa conscience). Les états hypnoïdes (c’est-à-dire de forme hypnotique, comme le rêve, etc.) sont « coupés du commerce associatif avec le reste du contenu de conscience »21. Autrement dit, ils ne surviennent plus tels quels à la conscience. Ils ont été refoulés. C’est cette transposition (c’est-àdire le déplacement de l’affect de la représentation vers autre chose – un symptôme somatique ou une autre représentation) qui engendre un clivage de la conscience22 : un groupe psychique séparée de la conscience se forme ; on y trouve la représentation inconciliable « refoulée » (c’est-à-dire, dans ces textes antérieurs à la théorie du refoulement, évincée, rejetée de la mémoire, de la « remémoration »). Ainsi, par exemple, dans le « déguisement » du rêve rien n’est arbitraire : la symbolique du rêve est un premier résultat d’une opération de dissimulation du sens réel des pensées de rêve, et le récit de rêve (et ses oublis) est lui-même le résultat d’une seconde censure. Ce sont ces états « hypnoïdes » qui ont d’abord éveillé l’attention de Freud. Conjuguée à un refus de laisser ces phénomènes inexpliqués ou de les considérer comme arbitraires, cette attention a suscité des hypothèses sur leur origine, en particulier dans la biographie du patient, en y cherchant un traumatisme vécu, voire, dans des élaborations théoriques et cliniques plus tardives, seulement fantasmé.

    33Bien sûr, en faisant l’hypothèse que des symptômes, y compris somatiques, pourraient être le résultat d’une cause psychique, Freud a brisé la règle d’or de la psychologie empirique de Brentano ; règle d’or suivant laquelle, on l’a dit, le domaine de la psychologie (coextensif au domaine de la conscience) est clos sur lui-même et n’est donc pas censé interagir en tant que tel avec le domaine physique. L’introduction d’un certain déterminisme, qui sera également critiqué par les existentialistes, menace à première vue l’idée d’une conscience qui pourrait se prendre elle même comme objet de connaissance. Mais on peut se demander ce que ce déterminisme psychophysique, que Freud met en place et qui pose problème dans l’épistémologie freudienne23, a de proprement « psychique » et ce qui le distingue, sans l’en dédouaner complètement, des apories du problème cartésien classique de l’interaction du corps et de l’esprit24.

    34En effet, malgré sa tentative de sortir d’une ontologie dualiste, Freud veut faire droit à la spécificité du psychique. Les interactions entre le psychique et le somatique n’enlèvent rien à la spécificité de chacun des domaines. Tout d’abord, si elle ne résout pas le mystère métaphysique de la transformation de l’énergie psychique en symptôme somatique, l’approche freudienne de la causalité dans la théorie des névroses en fait un phénomène véritablement psychique25 : sans représentation, pas d’affect, et sans rejet de cette représentation hors de la conscience, pas de symptôme. Seul, d’ailleurs, un processus proprement psychique, la catharsis par l’hypnose (qui deviendra la cure par la parole), peut faire disparaître le symptôme. En outre, les lois qui régissent l’interprétation du rêve et des autres symptômes sont, comme l’exigent les critères de Brentano, des lois proprement psychologiques : celles de l’association.

    35En effet, si les associations conscientes ne nous permettent pas d’atteindre le noyau dur du rêve, il existe néanmoins une connexion associative (d’ordre symbolique) entre le récit du rêve et sa signification réelle. Ce sont les lois de l’association qui déterminent les liens entre les contenus manifeste et latent du rêve :

    La seule erreur des auteurs est de tenir la modification du rêve, lors de sa remémoration et de sa mise en mots, pour arbitraire, donc pour impossible à résoudre […]. Ils sous-estiment le déterminisme dans le psychisme. Il n’y a là rien d’arbitraire. […] Je veux, par exemple, que me vienne à l’idée, tout à fait arbitrairement un nombre ; ce n’est pas possible ; le nombre qui me vient à l’idée est, de façon univoque et nécessaire, déterminé par des pensées en moi qui peuvent être éloignées de mon dessein du moment. Tout aussi peu arbitraires sont les modifications que le rêve connaît lors de sa rédaction à l’état de veille. Elles restent en connexion associative avec le contenu dont elles prennent la place et servent à nous montrer la voie menant à ce contenu […]. (IR, p. 567)

    36Voici donc ces effets psychologiques dont la cause nous est inaccessible directement. Suivant le réquisit de Brentano, les lois (de l’association) qui lient ces effets à leurs causes inconscientes sont bien les mêmes que celles qui lient entre elles nos idées conscientes ; simplement, nous n’avons aucun accès direct à ces causes. Mais ce ne sont là que les prémisses de la théorie freudienne du refoulement et de l’inconscient.

    Un nouvel inconscient : le point de vue topique et le point de vue systémique

    37Empruntant à Fechner (Elemente des Psychophysik, II, 1889, p. 520) l’idée que « la scène des rêves est une autre scène que celle de la vie de représentation vigile », Freud ajoute :

    L’idée qui est ainsi mise à notre disposition est celle d’une localité psychique. Nous allons complètement laisser de côté le fait que l’appareil animique dont il s’agit nous est connu aussi comme préparation anatomique et allons éviter soigneusement la tentation de déterminer la localité psychique de quelque façon anatomique que ce soit. Nous restons sur le terrain psychologique et entendons suivre seulement l’invitation à nous représenter l’instrument qui sert aux opérations de l’âme comme, par exemple, un microscope composé de diverses pièces, un appareil photographique, etc. […] Ces comparaisons ne sont là que pour nous soutenir dans une tentative où nous entreprenons de rendre compréhensible la complication du fonctionnement psychique en décomposant ce fonctionnement et en attribuant à telle ou telle partie constituante de l’appareil tel ou tel fonctionnement. (IR, p. 589, nos italiques)

    38Comme Brentano, Freud n’entend pas nier les rapports de la physiologie ou de l’anatomie cérébrale à notre fonctionnement psychologique. Néanmoins il estime nécessaire le recours à un niveau d’explication proprement psychologique, qui met entre parenthèses les considérations d’ordre physiologique. En un sens, il ne peut pas ne pas y avoir de lien entre notre condition d’être vivant et incarné (c’est ce que révèle la théorie de la sexualité infantile qui deviendra la théorie des pulsions) et notre vécu psychologique. Nous sommes mus par toutes sortes de désirs, d’instincts et de besoins qui nous dépassent et que nous (et la société) ne cessons de chercher à maîtriser. Mais ceci ne veut pas dire qu’il faut une physiologie pour comprendre les déterminismes psychiques.

    39Il faut distinguer deux problèmes : celui de l’explication de l’interaction du corps et de l’esprit, que Freud met entre parenthèses, et celui des conséquences psychologiques de notre condition d’être à la fois biologique et de langage. Ce deuxième problème, qui intéresse Freud dans la mesure où il lui permet d’aborder tout un ensemble de phénomènes limites inexpliqués, ne peut être traité d’un point de vue purement physiologique et doit donc faire l’objet d’une théorie de l’esprit. Ainsi, ce qui importe à Freud n’est pas d’être fidèle à une quelconque réalité anatomique, mais de nous fournir une image du « système » psychique qui puisse rendre compte de sa dynamique, au moyen de l’hypothèse, suggérée par l’observation, de causes inconscientes. En un sens, la représentation topique de l’appareil psychique, plusieurs fois révisées au cours des évolutions de la théorie psychanalytique, n’est qu’un accessoire théorique pour mieux nous représenter cette causalité inconsciente :

    « Nous nous représentons donc l’appareil animique comme un instrument composé dont nous appellerons les parties constituantes instances, ou, pour mieux visualiser, systèmes. […] Rigoureusement parlant, nous n’avons pas besoin de faire l’hypothèse d’un ordonnancement effectivement spatial des systèmes psychiques. » (Ibid, p. 590.)

    40Or, c’est bien par cette approche dynamique de l’appareil psychique que Freud se distingue lui-même des philosophies de la conscience, qu’il relèguera dans « L’inconscient » au rang de simple « psychologie descriptive »26 :

    Ce que nous appelons [inconscient] ne coïncide pas avec l’inconscient des philosophes (…). Chez eux il n’est là que pour désigner l’opposé du conscient ; qu’il y ait des processus psychiques inconscients, c’est là la connaissance ardemment contestée et énergiquement défendue. (…). Ce qui est nouveau, ce que nous a enseigné l’analyse des formations psychopathologiques (…), c’est que l’inconscient – donc le psychique – se présente comme fonction de deux systèmes séparés et qu’il se présente déjà ainsi dans la vie d’âme normale. Il y a donc deux sortes d’inconscient (…), l’un, que nous appelons Ics, est de plus incapable de conscience, tandis que l’autre, Pcs, est ainsi nommé par nous parce que ces excitations peuvent parvenir à la conscience (…). Dans notre présentation, quel rôle reste-t-il à la conscience, jadis toute-puissante, recouvrant tout le reste ? Aucun autre que celui d’un organe sensoriel pour la perception de qualités psychiques. (IR, p. 670-671)

    41Si le concept d’inconscient que Brentano soumet a la critique doit avoir une place dans le système freudien, c’est donc peut-être au rôle du préconscient qu’on peut le rattacher, en ce sens, et en ce sens seulement, que le système préconscient rassemble des « cheminements de pensée » (des contenus latents) qui peuvent, ou non, attirer l’attention de la conscience (Ibid., p. 648). Mais, Freud n’accorde pas plus que Brentano, le statut d’inconscient aux contenus préconscients, seulement celui de contenus latents susceptibles de devenir conscients. En revanche, d’un point de vue dynamique ou systémique, où l’inconscient et le préconscient ne jouent pas simplement un rôle descriptif mais un rôle explicatif, l’hypothèse de l’inconscient constitue un véritable défi pour une philosophie de la conscience, comme Freud se plaît à le souligner : elle permet de rendre compte de nombreux phénomènes ignorés par le philosophe de la conscience et elle minimise fortement l’importance des phénomènes de conscience.

    42Le psychisme se présente alors comme une sédimentation des représentations et des affects issus de la rencontre d’un être d’abord corporel, puis social avec son environnement. Le désir inconscient y est l’expression de pulsions primaires (antérieures au refoulement), qui, à défaut de pouvoir se décharger, s’expriment par d’autres voies. Dans l’appareil psychique,

    les processus primaires (…) sont donnés depuis le début, tandis que les processus secondaires ne se forment que peu à peu au cours de la vie, inhibant et recouvrant les processus primaires et n’atteignant peutêtre leur plein domination sur eux qu’au faîte de la vie. Par suite de cette arrivée retardée des processus secondaires, le noyau de notre être consistant en motions de souhait inconscientes reste impossible à appréhender et à inhiber pour le préconscient, dont le rôle se limite une fois pour toutes à assigner aux motions de souhait issues de l’inconscient les voies les plus appropriées. (Ibid., p. 659)

    43Cette notion de « processus primaire », dans la psychanalyse freudienne, introduit une dimension essentiellement passive de la constitution du sujet par ses vécus ou ses expériences (même si l’Erlebnis ne fait pas vraiment partie du vocabulaire freudien). Il y a là quelque chose de radicalement nouveau par rapport aux philosophies de la conscience : l’idée que les expériences qui vont constituer l’histoire d’un individu et déterminer la « structure » de son psychisme lui échappent en tout ou en partie. Contre la pleine lucidité (au moins en droit) du sujet conscient, Freud échange la détermination du sujet par ses pulsions et ses expériences, donc par l’intérieur (par sa nature biologique et humaine) et par l’extérieur (les expériences, la vie sociale). L’incompatibilité d’une telle vision du sujet pour une philosophie de la conscience transparaîtra largement dans les critiques que Jean-Paul Sartre adressera à la psychanalyse27, lui reprochant de réifier de cette façon un sujet dans le sujet et de faire du sujet conscient le simple résultat d’un déterminisme inconscient.

    Les résidus d’une philosophie de la conscience et son dépassement

    L’intériorité

    44Les affinités de l’approche freudienne avec les philosophies de la conscience soumettent celle-ci aux critiques mêmes qui ont pu être faites, dans la philosophie contemporaine, à l’encontre de ces philosophies. Même si ce point dépasse légèrement la portée du présent article, il n’est pas inutile, pour mieux comprendre la nature de ces affinités entre la première métapsychologie freudienne et la psychologie de la conscience brentanienne, d’identifier les endroits où elles tombent sous les mêmes critiques.

    45D’abord, Freud et Brentano semblent succomber à ce que les wittgensteiniens ont pu appeler le mythe de la perception interne ou de l’intériorité28. Ils font, dans un premier mouvement, des contenus mentaux un objet d’observation ou de perception au moyen d’une analogie néo-empiriste entre la perception externe et la perception interne. Ces contenus mentaux sont ainsi réifiés. Ils font ensuite, dans un second mouvement, de la reconnaissance de ces mêmes états mentaux chez autrui le résultat d’une inférence par analogie avec nos propres états mentaux, à partir de ce qu’autrui fait ou dit29.

    46Le reproche classique à l’encontre de ce type d’introspectionnisme intersubjectiviste consiste à montrer qu’il ignore la façon dont l’expérience interne est en réalité constituée du dehors et en particulier dans la relation à autrui, qui devient donc logiquement première et non seconde. Or, le paradoxe freudien veut qu’il ajoute à cette dualité entre l’expérience interne et l’expérience externe un troisième terme : « la psychanalyse n’exige rien, si ce n’est que ce procédé d’inférence soit aussi appliqué à la personne propre (…). [T]ous les actes et toutes les manifestations que je remarque en moi et que je ne sais pas relier au reste de ma vie psychique doivent être jugés comme s’ils appartenaient à une autre personne » (Ibid., p. 71). Les processus conscients et inconscients relèvent ainsi d’un même ordre de description (Ibid., p. 69). Freud confère une « structure intentionnelle » à des processus causaux, les pulsions. Ce que souligne à juste titre Jocelyn Benoist :

    C’est parce qu’elle a cette structure intentionnelle, ou quasi-intentionnelle (apparemment intentionnelle) que la pulsion n’est pas un phénomène purement somatique, mais représente une réelle interface entre le somatique et le psychique, participant de la caractéristique générale des phénomènes psychiques. Mais alors surgissent un certain nombre de difficultés. Parmi les plus notables, la première est de avoir jusqu’à quel point on peut parler d’intentionalité inconsciente et jusqu’à quel point cela a un sens de transposer au niveau inconscient une structure typiquement consciente, au point d’avoir été faite, par une certaine philosophie, caractéristique de la conscience.30

    47En effet, même si le caractère distinctif de la pulsion (par rapport à l’instinct, par exemple) est d’être psychique, on ne peut néanmoins pas l’amputer de sa dimension somatique (Ibid., p. 115). Mais c’est aussi ce caractère « limite » du concept de pulsion31, qui permet d’envisager le dépassement que constitue la métapsychologie freudienne par rapport aux « philosophies de la conscience ».

    L’agent et la cause

    48Le néo-cartésianisme de Freud et de Brentano consiste à supposer un lien inexploré entre le physiologique et le psychique, à laisser de côté le problème de leur interaction sans toutefois s’en extraire. Pire encore, en cherchant à sortir du dualisme par son énergétique des pulsions, Freud ne fait, semble-t-il que reconduire le problème : il offre une théorie causale de la pulsion et des processus psychosomatiques, mais le mécanisme de ces causes demeure inexpliqué.

    49Néanmoins, comme le montre Benoist, c’est l’aspect paradoxal de la notion de pulsion qui fait sa richesse explicative et son originalité théorique. En effet, l’énergétique des pulsions pourrait sembler transgresser la condition épistémologique brentanienne suivant laquelle, en psychologie, seules les causes psychiques nous intéressent. Mais tout l’effort de Freud consiste précisément à essayer de tenir ensemble la dimension incarnée des expériences (et des expériences traumatiques) qui constituent la couche primaire (inconsciente) de notre psychisme et qui ne cessent d’être réactivées au cours de notre vie, avec leur dimension de sens : c’est en tant qu’elles véhiculent un sens (plus ou moins déguisé) que nos pulsions influencent nos actions, nos rêves, nos pensées, etc. En réalité, non seulement en pointant la perméabilité entre le domaine somatique (celui des causes) et le domaine psychique, mais en en faisant un élément central de sa métapsychologie, Freud rend justice à une dimension importante de ce qu’on peut appeler notre psychologie et, en particulier, la « psychologie » de nos actions.

    50En effet, comme l’a montré Elizabeth Anscombe dans L’Intention32, pour rendre compte de l’action volontaire ou intentionnelle, il faut comprendre son lien à l’involontaire et au non-intentionnel. Ou, pour le formuler à la manière de John L. Austin, ce n’est qu’en vertu des ratés de l’action (donc des actions qui n’en sont pas vraiment, comme les lapsus et les actes manqués de Freud) que cela a un sens de souligner le caractère volontaire ou intentionnel d’une action donnée33. Les raisons d’agir servent à rendre compte de ces actions.

    51Freud fait-il un pas de trop en étendant le domaine des raisons d’agir à une intentionalité inconsciente ? Sans doute, si nous considérons qu’il ne fait ainsi qu’appliquer la « grammaire » de nos explications de l’action à une volonté inconsciente qui ne se connait pas elle-même et qui a tous les traits du « fantôme dans la machine » de Gilbert Ryle34. Mais malgré les affinités de la grammaire des raisons inconscientes avec celle des raisons d’agir, la première fonctionne suivant une économie différente, qui rejoint celle de ce qu’Anscombe nomme les « causes mentales » : elle vise à rendre compte, au moyen d’une hypothèse explicative, de ce pour quoi nous sommes en mal de trouver des raisons (conscientes). L’enjeu central, comme le souligne Benoist, n’est peut être pas de savoir si cette hypothèse est la bonne ou si elle peut-être validée empiriquement, mais c’est de mettre au jour notre besoin de rendre raison de ces phénomènes (en en donnant les raisons). Le lieu de rencontre entre les causes et les raisons (que synthétise la notion freudienne de pulsion) témoigne sans doute moins de la rencontre entre deux paradigmes explicatifs (même si c’est ainsi qu’il est parfois présenté par Freud lui-même)35 – le physiologique et le psychologique –, que de celle entre un ensemble de phénomènes ou d’actions limites, qui font, avec le besoin de chercher et de fournir des raisons d’agir, effectivement partie de la caractérisation de notre catégorie de l’agir36.

    52Ainsi, bien qu’il reconduise un certain intentionnalisme du côté d’une sorte d’agent (inconscient) dans l’agent, Freud met aussi le doigt sur une dimension de l’agir reflétée dans le symptôme. L’involontaire apparaît alors comme un aspect de l’agir, en tant qu’il appartient à la même grammaire des raisons et de la justification. Dans les cas limites étudiés par Freud (à ne pas confondre avec les cas clairement nonlimites de l’action intentionnelle ou volontaire), il n’y a pas de rupture entre les explications causales et les explications intentionnelles. Ces cas possèdent le même type d’ambiguïté que l’obéissance aveugle à un ordre37 : tantôt nous le faisons sans y penser, tantôt nous sommes capables de fournir les raisons (par exemple, éviter les ennuis) qui nous y incitent.

    53Mais ce caractère limite entre les causes et les raisons ne fait pas que souligner qu’il faut un corps pour agir et que mon corps conditionne ma capacité d’agir. Dans les cas qui intéressent Freud, je suis agi alors même que j’agis : ces cas ressemblent à des actions mais n’en sont pas tout à fait. Se joue ici un sens de la causalité distinct de celui d’une détermination physiologique (ou neurologique), qui exclue d’ailleurs qu’on puisse l’analyser purement en ces termes, comme y insiste Freud.

    *****

    54Ces considérations offrent un éclairage nouveau sur la façon dont il convient d’envisager les affinités entre la métapsychologie freudienne et la psychologie de la conscience brentanienne. Ce sur quoi nous allons conclure. S’il ne fait désormais aucun doute que l’une et l’autre restent tributaires d’une certaine forme de dualisme, en ce qu’elles ne résolvent, ni ne désamorcent le problème de l’interaction du corps et de l’esprit, l’approche freudienne met en avant une dimension tout à fait occultée par la psychologie empirique brentanienne : il s’agit de l’intrication complexe, au sein même de notre grammaire de l’action et de l’intentionalité, « de l’ordre du sens et de celui des causes ». Car si la psychologie peut sans doute se passer de l’ordre des explications physiologiques (dans la mesure où elle constitue un niveau d’explication propre et distinct de celles-ci), elle ne peut peut-être pas si facilement abandonner une autre notion de cause ; celle qui rend compte à la fois du fait que je fais, dis, etc., mais que ce n’est pas moi (en tant qu’agent responsable) qui fais, dis, etc., c’est-à-dire qui rend compte du domaine de l’involontaire, mais aussi de ce qui me vient à l’esprit, etc. et dont la raison (ou plutôt les raisons) ne parviennent pas toujours à rendre compte. Dans cette découverte, sans doute, la rencontre de Freud avec des pathologies (entre autres de l’agir, comme on en trouve dans les troubles obsessionnels) a joué un rôle important. Freud traite de ces gestes qui ont tout de l’action volontaire mais qui n’en sont pas à proprement parler. Leur ressemblance avec le volontaire est parfois telle qu’on ne peut concevoir qu’il soit illégitime d’en demander les raisons ; c’est le cas du rêve (duquel les humains n’ont de cesse de chercher des explications et des interprétations), des lapsus et de bon nombre des symptômes névrotiques décrits par Freud (que ceux qui en souffrent cherchent d’ailleurs très souvent eux-mêmes à rationaliser).

    Notes de bas de page

    1 Dans ses Historische Grundlagen der Psychoanalyse de 1932 (Leipzig, Meiner, p. 114)

    2 Merlan, Ph. 1949, « Brentano and Freud : a sequel », Journal of the History of Ideas, 10/3, p. 451.

    3 Freud, S. 1989/1990, Lettres de jeunesse, Frankfurt, Fischer, tr. fr. Cornélius Heim, Paris, Gallimard, lettres des 13 et 15 mars 1875.

    4 Merlan, Ph. 1945, « Brentano and Freud », Journal of the History of Ideas, 6/3, pp. 375-377.

    5 Freud, S. 1989, Jugendbriefe and Eduard Silberstein 1871-1881, Frankfurt, Fisher, p. 109

    6 Brentano, F. 2008, Psychologie du point de vue empirique (désormais PPE), trad. M. De Gandillac revue et présentée par J. -F. Courtine, Paris, Vrin.

    7 En particulier Domenjo, B. A. 2000, « Thoughts on the Influence of Brentano and Comte on Freud’s Work », Psychoanalysis and History, 2/1, pp. 110-118 ; Cohen, A. 2000, « The Origins of Freud’s Theory of the Unconscious : A Philosophical Link », Psychoanalytische Perspektiven, 41/42, p p. 109-122 ; Fancher, R. E. 1977, « Brentano’s Psychology from an empirical standpoint and Freud’s early metapsychology », Journal of the history of the behavioral sciences, 13, pp. 207-227 et Gyemant, M. 2014, « Freud et Brentano », dans Terquem, S. (éd.), Dictionnaire Sigmund Freud, Paris, Robert Laffont ; Vetter, H. 1992, « Brentano, Freud und Husserl im Wien der Jahrhundertwende », Mesotes 2, pp. 206-217.

    8 Hume, D. Enquête sur l’entendement humain, trad. A. Leroy et M. Beyssade, I, IV, VI.

    9 Locke, J. 2002, Essai sur l’entendement humain, II, xxvii, trad. J. -M. Vienne, Paris, Vrin.

    10 Brentano mentionne à ce titre Thomas d’Aquin, Beneke, Fechner, Hartman, Helmholtz, Herbart, Kant, Leibniz, Lewes, Maudsley, Ulrici, Wundt, Zöllner.

    11 Voir à ce propos les remarques de M. Gyemant dans « Freud et Brentano », art. cit.

    12 Voir Mill, J. S. 1979, Sir Hamilton’s Doctrine of Unconscious Mental Modifications, Collected Works, IX, Londres, Routledge, ch. XV.

    13 Leibniz, W. G. 1990, Nouveaux essais sur l’entendement humain, trad. J. Brunschvig, Paris, Flammarion, pp. 41-43.

    14 Freud, quant à lui, invoque cette notion d’attention dans son élaboration de la notion de système préconscient : « [L] es pensées de rêve ne sont certainement pas en soi incapables de conscience […]. Le devenir conscient est en corrélation avec l’orientation assignée à une fonction psychique déterminée, l’attention, qui, semble-t-il, n’est dépensée qu’en une quantité déterminée, laquelle a pu être détournée par d’autres buts du cheminement de la pensée en question. […] [N] ous appelons préconscient un tel cheminement de pensée […]. » (2003, L’interprétation des rêves [IR], Œuvres complètes, IV, Paris, PUF, p. 648).

    15 Cet argument est longuement discuté par Susan Krantz dans son article « Brentano on “Unconscious Consciousness” », Philosophy and Phenomenological Research, 50/4, 1990, pp. 745-753.

    16 Voir, par exemple, A. Cohen, R. E. Fancher. M. Gyemant, art. cit.

    17 Freud, S. 1968, « L’inconscient », in Métapsychologie, trad. J. Laplanche et J. B. Pontalis, Paris, Gallimard, p. 66.

    18 Voir Freud, S. 1991, Le moi et le ça, Œuvres complètes, XVI, Paris, PUF, pp. 258-260.

    19 En français dans le texte (NdT).

    20 Freud S. & Breuer, J. 2013, « Communication préliminaire », trad. J. -M. Roux et S. Schick, dans Aucouturier V. et Parot, F. (éds.) Textes clés de psychanalyse, Paris, Vrin.

    21 Freud, S. 1995, « Les névropsychoses de défense », La première théorie des névroses, Paris, PUF, p. 4.

    22 Une « double conscience » : cf. 1956, Etudes sur l’hystérie, Paris, PUF, p. 8.

    23 Voir, par exemple, les critiques de Wittgenstein, de Sartre ou de Politzer.

    24 Voir IR, p. 643 : Le rêve, « voie royale vers l’inconscient » n’est ni « un processus dénué de sens », ni « un processus somatique ».

    25 Qui révélera toute son ampleur dans la deuxième théorie des pulsions de Freud (celle de « Au delà du principe de plaisir » de 1920), comme le montre l’article de Benoist, J. 2006, « Pulsion, cause et raison chez Freud », dans J. -Ch. Goddard (éd.), La pulsion, Paris, Vrin, pp. 113-138.

    26 Freud, S. « L’inconscient », art. cit., p. 77.

    27 Sartre, J. - P. 1943, L’être et le néant, Paris, Gallimard, part. I, ch. II et part. IV, ch. II, 1.

    28 Voir, par exemple, Bouveresse, J. 1976, Le mythe de l’intériorité, Paris, Minuit, ou Descombes, V. 2004, Le complément de sujet, Paris, Gallimard.

    29 Voir, par exemple, S. Freud, « L’inconscient », art. cit., pp. 70-71.

    30 Benoist, J. 2006, op. cit., p. 121.

    31 Voir ibid. Benoist rappelle à juste titre la distinction proposée par Freud entre l’instinct (proprement physiologique) et la pulsion (qui nécessite une représentation), dans les Trois essais sur la théorie sexuelle, Paris, Gallimard, 1987, ch. 1.

    32 Anscombe, E. 2001, L’Intention, trad. M. Maurice et C. Michon, Paris, Gallimard.

    33 Austin, J. L. 1999, « Plaidoyer pour les excuses », trad. L. Aubert et A. -L. Hacker, Écrits philosophiques, Paris, Seuil, pp. 136-170.

    34 Ryle, G. 2005, La notion d’esprit, Paris, Payot.

    35 Et que nous avons peut-être eu tendance à le présenter dans nos précédents articles. Par exemple, V. Aucouturier, V. 2011, « Quelle scientificité pour la psychanalyse ? », Psychiatrie, Sciences humaines, Neurosciences, 9/2, pp. 95-103 ; 2006, « Sartre critique de l’inconscient freudien », ALTER, 14, pp. 103-126 ; 2011, « “An originality that belongs to the soil, not the seed” : Wittgenstein on Freud », dans Ramharter, E. (éd.), Ungesellige Geselligkeiten/Unsocial sociabilities, Berlin, Parerga Verlag, pp. 215-240.

    36 Nous ne discutons pas ici de la question de la valeur thérapeutique de ces explications, qui nous entraînerait sur un tout autre terrain.

    37 Voir l’analyse d’Anscombe dans L’Intention, op. cit., § 15.

    Auteur

    Valérie Aucouturier

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    1 Dans ses Historische Grundlagen der Psychoanalyse de 1932 (Leipzig, Meiner, p. 114)

    2 Merlan, Ph. 1949, « Brentano and Freud : a sequel », Journal of the History of Ideas, 10/3, p. 451.

    3 Freud, S. 1989/1990, Lettres de jeunesse, Frankfurt, Fischer, tr. fr. Cornélius Heim, Paris, Gallimard, lettres des 13 et 15 mars 1875.

    4 Merlan, Ph. 1945, « Brentano and Freud », Journal of the History of Ideas, 6/3, pp. 375-377.

    5 Freud, S. 1989, Jugendbriefe and Eduard Silberstein 1871-1881, Frankfurt, Fisher, p. 109

    6 Brentano, F. 2008, Psychologie du point de vue empirique (désormais PPE), trad. M. De Gandillac revue et présentée par J. -F. Courtine, Paris, Vrin.

    7 En particulier Domenjo, B. A. 2000, « Thoughts on the Influence of Brentano and Comte on Freud’s Work », Psychoanalysis and History, 2/1, pp. 110-118 ; Cohen, A. 2000, « The Origins of Freud’s Theory of the Unconscious : A Philosophical Link », Psychoanalytische Perspektiven, 41/42, p p. 109-122 ; Fancher, R. E. 1977, « Brentano’s Psychology from an empirical standpoint and Freud’s early metapsychology », Journal of the history of the behavioral sciences, 13, pp. 207-227 et Gyemant, M. 2014, « Freud et Brentano », dans Terquem, S. (éd.), Dictionnaire Sigmund Freud, Paris, Robert Laffont ; Vetter, H. 1992, « Brentano, Freud und Husserl im Wien der Jahrhundertwende », Mesotes 2, pp. 206-217.

    8 Hume, D. Enquête sur l’entendement humain, trad. A. Leroy et M. Beyssade, I, IV, VI.

    9 Locke, J. 2002, Essai sur l’entendement humain, II, xxvii, trad. J. -M. Vienne, Paris, Vrin.

    10 Brentano mentionne à ce titre Thomas d’Aquin, Beneke, Fechner, Hartman, Helmholtz, Herbart, Kant, Leibniz, Lewes, Maudsley, Ulrici, Wundt, Zöllner.

    11 Voir à ce propos les remarques de M. Gyemant dans « Freud et Brentano », art. cit.

    12 Voir Mill, J. S. 1979, Sir Hamilton’s Doctrine of Unconscious Mental Modifications, Collected Works, IX, Londres, Routledge, ch. XV.

    13 Leibniz, W. G. 1990, Nouveaux essais sur l’entendement humain, trad. J. Brunschvig, Paris, Flammarion, pp. 41-43.

    14 Freud, quant à lui, invoque cette notion d’attention dans son élaboration de la notion de système préconscient : « [L] es pensées de rêve ne sont certainement pas en soi incapables de conscience […]. Le devenir conscient est en corrélation avec l’orientation assignée à une fonction psychique déterminée, l’attention, qui, semble-t-il, n’est dépensée qu’en une quantité déterminée, laquelle a pu être détournée par d’autres buts du cheminement de la pensée en question. […] [N] ous appelons préconscient un tel cheminement de pensée […]. » (2003, L’interprétation des rêves [IR], Œuvres complètes, IV, Paris, PUF, p. 648).

    15 Cet argument est longuement discuté par Susan Krantz dans son article « Brentano on “Unconscious Consciousness” », Philosophy and Phenomenological Research, 50/4, 1990, pp. 745-753.

    16 Voir, par exemple, A. Cohen, R. E. Fancher. M. Gyemant, art. cit.

    17 Freud, S. 1968, « L’inconscient », in Métapsychologie, trad. J. Laplanche et J. B. Pontalis, Paris, Gallimard, p. 66.

    18 Voir Freud, S. 1991, Le moi et le ça, Œuvres complètes, XVI, Paris, PUF, pp. 258-260.

    19 En français dans le texte (NdT).

    20 Freud S. & Breuer, J. 2013, « Communication préliminaire », trad. J. -M. Roux et S. Schick, dans Aucouturier V. et Parot, F. (éds.) Textes clés de psychanalyse, Paris, Vrin.

    21 Freud, S. 1995, « Les névropsychoses de défense », La première théorie des névroses, Paris, PUF, p. 4.

    22 Une « double conscience » : cf. 1956, Etudes sur l’hystérie, Paris, PUF, p. 8.

    23 Voir, par exemple, les critiques de Wittgenstein, de Sartre ou de Politzer.

    24 Voir IR, p. 643 : Le rêve, « voie royale vers l’inconscient » n’est ni « un processus dénué de sens », ni « un processus somatique ».

    25 Qui révélera toute son ampleur dans la deuxième théorie des pulsions de Freud (celle de « Au delà du principe de plaisir » de 1920), comme le montre l’article de Benoist, J. 2006, « Pulsion, cause et raison chez Freud », dans J. -Ch. Goddard (éd.), La pulsion, Paris, Vrin, pp. 113-138.

    26 Freud, S. « L’inconscient », art. cit., p. 77.

    27 Sartre, J. - P. 1943, L’être et le néant, Paris, Gallimard, part. I, ch. II et part. IV, ch. II, 1.

    28 Voir, par exemple, Bouveresse, J. 1976, Le mythe de l’intériorité, Paris, Minuit, ou Descombes, V. 2004, Le complément de sujet, Paris, Gallimard.

    29 Voir, par exemple, S. Freud, « L’inconscient », art. cit., pp. 70-71.

    30 Benoist, J. 2006, op. cit., p. 121.

    31 Voir ibid. Benoist rappelle à juste titre la distinction proposée par Freud entre l’instinct (proprement physiologique) et la pulsion (qui nécessite une représentation), dans les Trois essais sur la théorie sexuelle, Paris, Gallimard, 1987, ch. 1.

    32 Anscombe, E. 2001, L’Intention, trad. M. Maurice et C. Michon, Paris, Gallimard.

    33 Austin, J. L. 1999, « Plaidoyer pour les excuses », trad. L. Aubert et A. -L. Hacker, Écrits philosophiques, Paris, Seuil, pp. 136-170.

    34 Ryle, G. 2005, La notion d’esprit, Paris, Payot.

    35 Et que nous avons peut-être eu tendance à le présenter dans nos précédents articles. Par exemple, V. Aucouturier, V. 2011, « Quelle scientificité pour la psychanalyse ? », Psychiatrie, Sciences humaines, Neurosciences, 9/2, pp. 95-103 ; 2006, « Sartre critique de l’inconscient freudien », ALTER, 14, pp. 103-126 ; 2011, « “An originality that belongs to the soil, not the seed” : Wittgenstein on Freud », dans Ramharter, E. (éd.), Ungesellige Geselligkeiten/Unsocial sociabilities, Berlin, Parerga Verlag, pp. 215-240.

    36 Nous ne discutons pas ici de la question de la valeur thérapeutique de ces explications, qui nous entraînerait sur un tout autre terrain.

    37 Voir l’analyse d’Anscombe dans L’Intention, op. cit., § 15.

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    Ce livre est cité par

    • Raynaud, Savina. (2016) Studies in the History of the Language Sciences History of Linguistics 2014. DOI: 10.1075/sihols.126.13ray

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    Niveleau, Charles-Édouard, éd. Vers une philosophie scientifique. Paris: Demopolis, 2014. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.demopolis.96.
    Niveleau, Charles-Édouard, éditeur. Vers une philosophie scientifique. Demopolis, 2014, https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.demopolis.96.
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