Chapitre IV. Postes fortifiés et garnisons urbaines
Éléments pour une géographie militaire de la conquête
p. 279-361
Texte intégral
1Les cartes présentant les différentes étapes de la progression romaine dans la péninsule Ibérique incluent habituellement une série de points correspondant à ce qu’il est convenu d’appeler les sites stratégiques de la conquête. Cet ensemble est hétérogène : il rassemble à la fois des lieux où une présence militaire est explicitement mentionnée par les sources, mais aussi d’autres où elle est restituée à partir des données éparses de la documentation, tant archéologique que textuelle.
2Tous présentent cependant un dénominateur commun : ils forment autant de points d’ancrage supposés de l’armée romaine, à un moment ou à un autre de la conquête. Néanmoins, la prudence semble devoir s’imposer à l’heure d’exploiter les données ainsi recueillies pour élaborer une typologie des modes d’occupation et de contrôle des territoires par les armées romaines au cours de notre période. On ne peut, en particulier, faire l’économie d’une réflexion préalable sur les critères qui soutiennent l’attribution d’un site à l’activité de l’exercitus républicain. Ainsi, parmi eux, la notion même de réseau, induite par la simple mise en relation de tous ces points sur une carte, mérite une attention plus approfondie. Elle oriente en effet la conception que l’on se fait du rôle des garnisons romaines dans la construction progressive des espaces provinciaux.
I. — LES LIMITES DES TENTATIVES DE RESTITUTION
3Les limites du critère toponymique. — Valeur stratégique et fonction militaire.
4Selon toute vraisemblance, Rome n’a pu éviter le recours à l’installation de postes et de garnisons tout au long de sa progression dans la Péninsule. Les récits de la conquête se montrent toutefois extrêmement avares de précisions sur le sujet. Leurs mentions explicites, même incomplètes et parfois ambiguës, suffisent néanmoins à convaincre de la banalité de cette pratique dans l’Hispania républicaine1. Pour cette raison, d’autres sources ont été mises à contribution afin de compléter la liste de ces postes par leurs traces indirectes puis de proposer un schéma d’explication géographique et stratégique fondé sur un corpus plus vaste. Plusieurs éléments sont généralement retenus pour assimiler les sites ainsi repérés comme étant des établissements militaires républicains. La toponymie représente le critère principal, dans la mesure où les sources utilisées se contentent en général de citer des noms dont il faut interpréter l’origine et la transmission. Des considérations géographiques ou historiques fournissent ensuite la confirmation supposée. Il convient toutefois de se garder d’oublier le caractère hypothétique de la plupart de ces restitutions. En effet, bien souvent, l’explication militaire ne s’impose pas comme une évidence.
LES LIMITES DU CRITÈRE TOPONYMIQUE
5Les énumérations de toponymes, fournies pour des périodes plus tardives par Mela, Pline, Ptolémée ou les Itinéraires, ont été les éléments les plus mis à contribution pour retrouver les survivances possibles d’un ancien réseau de postes militaires républicains2.
6Cette méthode a conduit à identifier une série de sites, distribués selon des lignes stratégiques susceptibles d’avoir structuré la pénétration romaine à l’époque de la conquête. Ces propositions, telles qu’elles figurent chez R. C. Knapp avant d’être régulièrement reprises depuis, se répartissent en trois groupes (carte 4)3 :
- La vallée du Guadalquivir et le sud-est : Castellum Ebora4, Castra Gemina5, Decuma6, Calpurniana7, Castra Vinaria8, Cilniana9, Mariana10, Castra Postumiana11.
- La région entre Tage et Anas : Vicus Caecilius12 ; Castra Caecilia13 ; Caeciliana14, Castra Seruilia15 ; Castra Liciniana16 ; Castellum Ciseli17, Aritium Praetorium18 ; Caepiona19 ; Praesidium20.
- Le quart sud-ouest ou nord-ouest (Castellum Berense21 et Castellum Meidunium22) et la vallée de l’Èbre (Atiliana23 ; Castra Aelia24).
7Au total, cet inventaire, qui comprend plus d’une vingtaine de noms, est relativement abondant par rapport aux garnisons attestées de façon assurée par les sources. Cependant, en dépit de la large diffusion de ces restitutions dans la bibliographie relative à la conquête, beaucoup d’incertitudes subsistent. En effet, contrairement à ce que l’on a coutume d’admettre, les éléments permettant d’étayer l’origine militaire de ces établissements se révèlent extrêmement ténus.
8Decuma trouve ainsi sa place dans cette liste en raison d’un passage de Tite-Live mentionnant pour l’année 205 une legio tertia decima dans la vallée du Guadalquivir25. Ce rapprochement soulève toutefois deux objections majeures. D’une part, la lecture Decuma résulte du choix discutable d’une leçon donnée par les premiers éditeurs de Pline mais apparemment inexistante dans les manuscrits26. D’autre part, même en acceptant cette tradition incorrecte, l’interprétation hasardeuse de ce toponyme reste sujette à caution27. La mise en relation d’un site avec l’armée ne saurait s’imposer sur un fondement aussi mince. La prudence est d’autant plus nécessaire dans ce cas que le doute existe même lorsqu’un toponyme présente pourtant, à l’évidence, une terminologie a priori militaire, comme Praetorium ou Praesidium. Certes, on ne peut, dans ce cas précis, écarter d’emblée un lien avec des postes fortifiés de la conquête, mais il faut souligner que le vocabulaire employé n’a rien de spécifiquement républicain : on sait ainsi que, sous l’Empire, ces deux termes désignaient certains relais routiers destinés à accueillir un fonctionnaire en mission ou bien à héberger les voyageurs de marque autorisés à utiliser le cursus publicus28. Il n’est guère étonnant par conséquent de le voir apparaître dans des itinéraires datant, au plus tôt, de la fin du IIIe siècle de notre ère29. D’une manière générale cependant, l’attention s’est focalisée sur un indice jugé plus probant : la majorité des attributions proposées s’appuie ainsi sur la possibilité de mettre un nom de lieu en relation avec des castra de la période républicaine. Deux cas de figure se présentent : ou bien le terme castra est restitué, ou bien il est explicitement attesté. Nous allons voir que le second n’offre pas plus de fiabilité que le premier.
9Le suffixe d’un toponyme en -ana, si on le lit comme un neutre pluriel, témoignerait, selon R. C. Knapp, d’une ancienne fondation sous forme d’établissement militaire : il en retient ainsi cinq (Atiliana, Caeciliana, Caepiona, Calpurniana, Cilniana) dont les noms auraient été à l’origine précédés du terme castra30. En lui-même, l’argument grammatical n’a rien de définitif : il pourrait aussi bien s’agir d’un nom féminin singulier, servant à désigner un établissement civil, comme une uilla31. Mais, selon R. C. Knapp, il acquiert de la force dans la mesure où ces toponymes peuvent être, en outre, mis en relation avec un nom propre correspondant à celui d’un magistrat romain attesté pour une période de la conquête pendant laquelle la région de localisation présumée du site se trouvait concernée par des opérations militaires32. Séduisant à première vue, ce raisonnement se heurte toutefois à de sérieuses objections. Il implique d’attribuer une fondation à un individu précis sur un critère unique, dont la fragilité, rendue d’emblée évidente par les lacunes des Fastes provinciaux, n’est guère prise en compte : ainsi, non seulement l’absence d’Atilii dans le gouvernement de la province de Citérieure n’apparaît-elle pas contradictoire avec l’établissement d’Atiliana dans la région de Logroño, mais elle pousse au contraire à imaginer des suppositions sans grand fondement33. Lorsque plusieurs magistrats du même nom sont connus, la tentation d’un choix arbitraire n’est pas non plus évitée : c’est le cas par exemple de Caeciliana, dont la création est tour à tour mise en relation avec un membre différent de la gens34. Quand aucun fondateur n’est identifiable, l’initiative d’un praefectus ou d’un legatus est alors invoquée35. La démarche trouve ainsi sa limite en elle-même : en effet, si l’absence d’un nom adéquat de magistrat supérieur suffit pour attribuer l’origine de l’établissement à un subordonné, comment prouver alors, dans le cas contraire, que la désignation du lieu est forcément à mettre au crédit du gouverneur lui-même ? D’une manière plus générale, la circularité de l’argumentation est patente : les nomina d’origine sont recherchés dans le contexte républicain, pour la seule raison qu’il paraît impossible que des postes militaires aient pu être édifiés dans les zones concernées en dehors de cette période36. Partant de ce principe, l’association avec un général de la conquête sert ensuite, précisément, à valider l’hypothèse de cette fonction militaire. Ainsi, c’est la localisation de Cilniana, par l’Itinéraire d’Antonin, sur la route littorale entre Malaca et Gades qui constitue le seul élément permettant à R. C. Knapp de rattacher ce site aux campagnes de Scipion37. De même, la mention par Ptolémée de Caepiona entre Lacobriga et Mirobriga est le seul élément qui légitime son rapprochement avec les activités de Servilius Caepio en 140-139 en Ultérieure38. On le voit, les bases solides manquent pour accepter la restitution de ces toponymes comme ceux d’anciens castra39. Il est plus raisonnable de penser que ces mansiones des Itinéraires devaient leur nom à celui de propriétaires terriens dont le fundus jouxtait le trajet des voies romaines, selon une habitude fréquemment constatée dans le monde romain : cette probabilité a été suggérée de manière très convaincante pour les sites d’Hispanie méridionale dont font précisément partie Calpurniana et Cilniana40.
10Il faut donc à notre avis rejeter la restitution du nom de ces cinq stations routières, telle qu’elle est proposée par R. C. Knapp. En revanche, on peut admettre que, lorsqu’elle existe, la mention explicite du terme castra suffit en principe à prouver le caractère militaire originel d’une agglomération. Sept toponymes seulement appartiennent à cette catégorie : Castra Gemina, Castra Vinaria, Castra Caecilia, Castra Seruilia, Castra Liciniana, Castra Aelia et Castra Postumiana. Encore faut il que ce type de dénomination soit avéré de manière sûre dans les sources. Remarquons ainsi que, contrairement à ce que prétend R. C. Knapp, le nom Castra Liciniana n’est aucunement livré par nos sources, puisque l’Itinéraire d’Antonin donne seulement Leuciana et Ptolémée Λιϰινίανα : l’ajout de castra est une extrapolation d’A. Schulten que l’historien nord-américain suit ici sans discussion41. Par conséquent, nous nous trouvons ici dans le même cas de figure que celui critiqué précédemment. En outre, le lien de cet établissement avec les campagnes d’un membre de la gens Licinia est pour le moins fragile42. De même, il n’est pas impossible que le nom Castra Aelia, mentionné par un fragment de Tite-Live relatif à la guerre sertorienne, s’explique par une erreur de copiste, et soit ainsi sans relation avec les Aelii, par ailleurs mal attestés en Citérieure43. Restent donc les cinq autres toponymes qui, de manière intéressante, proviennent tous de la description plinienne, hormis Castra Postumiana, le seul du reste à ne pas concerner une agglomération. Mais le naturaliste ne fournit guère de précisions exploitables quant à leurs origines. Seuls Castra Caecilia et Castra Seruilia peuvent être peut-être identifiés, puisque Pline affirme que ces agglomérations étaient contributa de la colonie de Norba Caesarina44. La localisation de cette dernière ne va pas elle-même sans difficulté, mais est généralement située à l’emplacement de l’actuelle Cáceres, en Estrémadure, sur la foi d’une inscription trouvée surplace en 1794, dans une maison de la Puerta de Mérida45. Pour cette raison, il a paru évident de placer Castra Caecilia à Cáceres el Viejo, au nord-est de Cáceres, sur la route de Torrejón del Rubio : la faible distance (2,5 km) entre les deux sites est compatible avec les données de l’Itinéraire d’Antonin qui évoquent, à quarante-six milles au nord d’Emerita, des Castris Caeciliis, dont la position par rapport à l’actuelle Mérida correspond donc précisément aux alentours de Cáceres46. Cette hypothèse est d’autant plus facilement admise qu’une vaste enceinte rectangulaire, repérée à cet endroit, est interprétée comme le vestige d’un grand camp romain depuis la prospection réalisée par A. Schulten au début du siècle (voir infra, p. 000)47. Sans insister pour le moment sur le détail des multiples obscurités et lacunes de ce dossier archéologique, on peut déjà souligner l’incertitude globale quant à une localisation de Castra Caecilia à cet endroit précis48. La plupart des travaux récents ont en effet souligné à ce sujet la circularité du raisonnement du savant allemand dont le travail sur le terrain était entièrement soumis à l’illustration de ses schémas d’interprétation49. En l’absence d’arguments définitifs, certains préfèrent d’ailleurs associer Cáceres el Viejo à Castra Seruilia, ou même à Castra Liciniana, dans la mesure où une chronologie plus ample que celle proposée par A. Schulten est désormais admise pour le site et sa relation avec Metellus Pius remise en cause50. Mais ces attributions alternatives paraissent en fin de compte tout aussi insatisfaisantes.
11La conviction que la Castra Caecilia mentionnée par Pline devait être à l’origine un établissement militaire (plus ou moins éphémère) du Ier siècle avant J. -C. tient essentiellement à son appartenance supposée, en raison de son nom, à une ligne de défense établie par Metellus Pius à cette époque, comprenant Caeciliana, Vicus Caecilius et Metellinum51. C’est pourquoi il a été jugé possible — voire nécessaire — de l’identifier à Cáceres el Viejo, dont la fonction militaire est couramment admise52. Mais encore faudrait-il pouvoir établir sans ambiguïté la réalité de ces fondations parallèles : on a vu précédemment que l’argument toponymique était bien fragile dans le cas de Caeciliana ; il l’est encore davantage dans celui de Vicus Caecilius, jamais attesté sous cette forme dans les sources. En effet, l’Itinéraire d’Antonin donne seulement Caelionicco, et l’anonyme de Ravenne Coloricum53. La restitution en Vicus Caecilius est largement due à A. Schulten54. Mais elle n’a aucun fondement solide55. Plus généralement, la réalité d’un limes métellien, étendu en direction du Nord et de l’Ouest depuis Metellinum, doit donc être rejetée56. Par conséquent, il est abusif de prétendre que le nom Castra Caecilia correspond sans aucun doute à un poste militaire d’époque sertorienne, uniquement parce que des établissements similaires seraient attestés dans la région. L’objection peut être étendue à Castra Seruilia dont le lien avec Servilius Caepio n’est rien d’autre qu’une pure conjecture57. Tout ce qu’il est possible d’affirmer, c’est qu’à un moment antérieur au milieu du Ier siècle après J. -C., deux petites agglomérations rurales ont fait l’objet d’une procédure de contributio58. Cela implique leur préexistence, et l’on peut admettre que leur nom fait référence à un établissement militaire. La signification de cette référence nous échappe cependant. Renvoie-t-elle à une origine militaire de ces bourgs ou bien seulement à la proximité d’un camp dont le souvenir s’est conservé ? Quoi qu’il en soit, dans un cas comme dans l’autre, nous ne sommes en mesure d’en déterminer ni la date de fondation, ni une attribution précise à un moment particulier de la présence romaine dans la Péninsule. En ce qui concerne Castra Gemina et Castra Vinaria, sur lesquels nous ne disposons d’aucune information, leur identification comme leur datation ne saurait non plus découler d’évidence et il faut se résoudre à avouer notre ignorance, faute de documentation59. Dans l’état actuel du dossier, rien ne permet de les associer à des camps militaires républicains.
12En fin de compte, il apparaît que le terme castra ne doit pas être restitué arbitrairement à des toponymes. Pour localiser éventuellement des camps, il ne peut fonctionner comme un critère décisif que lorsqu’il est explicitement mentionné par les sources. Or ce cas de figure, on l’a vu, se rencontre très rarement. En outre, le terme castra n’est accolé à un nom de lieu évoquant le nomen d’un gouverneur républicain que deux fois dans le cas d’agglomérations d’époque impériale (Caecilia et Seruilia). Ceci est très insuffisant, même si l’on admet qu’il s’est bien agi à un moment donné d’établissements militaires romains, pour autoriser une généralisation sous forme de système et en tirer des conclusions fermes. Par ailleurs, seuls les Castra Postumiana nous sont mentionnés par une source contemporaine de la conquête60. Mais rien ne permet de vérifier que la petite colline désignée ainsi en 45 lors du siège d’Ategua tenait bien son nom d’un camp établi sur place en 180-179 par le gouverneur d’Ultérieure L. Postumius Albinus, comme on l’affirme unanimement depuis A. Schulten61. Sans écarter cette possibilité, on ne saurait la considérer comme avérée.
13En dehors des castra, si faiblement attestés, le reste du vocabulaire ordinairement associé à un ouvrage militaire romain n’est pas dépourvu d’ambiguïtés. C’est le cas des castella. On sait en effet que le castellum pouvait être une petite fortification militaire dotée d’une fonction tactique ou stratégique62. Mais c’est également le nom donné aux petits bourgs, et plus particulièrement à ceux qui sont fortifiés63. Ainsi, le récit de Tite-Live met plusieurs fois ce terme en relation avec le milieu indigène64. Il est donc permis de douter que les quatre castella intégrés par R. C. Knapp à sa liste aient forcément été des postes militaires romains65. Leur forme toponymique semble en outre correspondre davantage à des noms de peuples ou de localités (Castellum Ciseli, Castellum Berense, Castellum Ebora, Castellum Meidunium), dont la localisation précise est souvent délicate. A. García y Bellido a mis ainsi en relation Castellum Berense et Castellum Meidunium avec la Meidobriga ou Merobriga de Pline, qu’il situe sur les rives du Miño, dans le quart nord-ouest de la Péninsule66. Tout en revendiquant sur ce point l’autorité de son prédécesseur espagnol, R. C. Knapp déplace pourtant ces établissements chez les Conii, entre Tage et Guadiana, sans doute par confusion avec la Mirobriga attestée au Cerro Cabezo dans la province de Badajoz67. Quelle que soit la solution retenue, elle concerne cependant des régions où les castella désignaient encore couramment sous l’Empire des agglomérations rurales secondaires68. Le Nord-Ouest se caractérise ainsi par sa culture des castros, à laquelle sont rattachées les quelques mentions de castella dans l’épigraphie69. Moins bien attesté encore en Lusitanie, où l’on ne relève que trois occurrences dans les inscriptions, dont une seule incontestable, le castellum n’en formait pas moins un élément à part entière de l’organisation traditionnelle des territoires, même si l’évolution de celle-ci, sous l’effet de la diffusion du modèle romain, avait pu progressivement contribuer à minorer l’importance de ce type d’agglomération70.
14L’ensemble des remarques précédentes montre que, en ce qui concerne les attributions de toponymes à des établissements militaires romains, les cas acceptables sont non seulement en nombre très réduit (Castra Caecilia, Castra Seruilia, Castra Postumiana), mais également que leur identification ne saurait être démontrée avec suffisamment de certitude. En ce sens, on peut conclure que l’existence de témoignages relatifs à des réseaux de postes fortifiés remontant à l’époque républicaine résulte, avant tout, d’une invention de l’historiographie moderne reposant sur des fondements très fragiles. Il ne s’agit pas, bien sûr, de nier totalement l’existence de tels postes au moment de la conquête, mais il faut reconnaître que nous n’en avons aucune trace indiscutable. Cela s’explique en partie, selon nous, par la difficulté à définir la valeur militaire d’un site et par conséquent à établir des typologies fiables. Le poids de cette réserve méthodologique justifie que l’on insiste brièvement sur quelques-uns des aspects les plus importants qui lui sont liés.
VALEUR STRATÉGIQUE ET FONCTION MILITAIRE
15En l’absence d’informations suffisantes permettant d’identifier et de dater la plupart des toponymes attribués dans l’historiographie aux différentes étapes de la conquête, un argument intervient généralement pour valider les hypothèses émises. Il s’agit de la valeur stratégique reconnue au site, en raison par exemple de sa situation de carrefour, au débouché d’une vallée, ou de sa position de surveillance sur un site escarpé le long d’un axe important de communication. La qualité de la localisation d’un établissement, du point de vue défensif notamment, tend ainsi à constituer un indice jugé particulièrement probant de sa fonction militaire initiale. Ce faisant, il semble que les tentatives effectuées pour cartographier les points d’appuis de la conquête de la Péninsule abusent de l’emploi du terme « stratégique », aboutissant ainsi à une forme de déterminisme géographique en matière militaire. Faute de données précises, c’est en effet la distribution spatiale des toponymes qui, sur cette base, oriente la plupart des conclusions.
16La fragilité de la démarche apparaît évidente, car ce facteur topographique correspond seulement, en réalité, au plus petit dénominateur commun entre les établissements humains. Toute communauté, romaine ou ibérique, avait en effet par définition le souci de s’implanter sur un site favorable lui permettant de maîtriser efficacement son territoire afin d’assurer la défense ou la mise en valeur de celui-ci.
17Ainsi, si l’on accepte d’identifier Castellum Ebora à l’actuelle Sanlúcar de Barrameda, ce que l’épigraphie, jointe aux dires de Pline l’Ancien et de Pomponius Mela pourrait accréditer, il est possible que cet établissement ait contrôlé effectivement un passage au niveau de l’embouchure du Guadalquivir71. Pourtant, cela ne suffit pas pour conclure qu’il s’agissait, à l’origine, d’un poste militaire mis en place par Rome. L’agglomération préromaine, à laquelle nous avons vu que renvoyait très certainement le terme castellum, éprouvait tout autant le besoin d’assurer ce contrôle pour sa propre survie ou celle de l’organisation politique dont elle contribuait peut-être à structurer le territoire. Le fonctionnement de ce système au profit des conquérants entraîna sans doute un certain nombre de réaménagements en fonction des besoins nouveaux issus de la conquête ou des redécoupages politiques et territoriaux imposés par les nouveaux maîtres72. Mais, et nous reviendrons sur ce point, il est probable que les tâches de contrôle des territoires continuèrent à relever de l’initiative des cités indigènes sans recours à des garnisons romaines73. Le risque existe donc, en associant trop étroitement situation stratégique et présence militaire romaine, de surestimer les formes prises par cette dernière74.
18Ainsi, les lignes défensives tracées par R. C. Knapp le long de la vallée du Guadalquivir ou sur un axe entre Tage et Guadiana ressortent-elles de ce que l’on pourrait appeler « l’illusion stratégique » qui consiste à surévaluer ce critère dans l’interprétation des sites que l’on propose de rapporter aux armées de la conquête. En effet, c’est le rapprochement de Castellum Ebora, Castra Gemina et Calpurniana avec les villes de Gades, Italica, Ilipa et Iliturgi qui fonde la conviction que les premières formaient autant de postes militaires destinés à sécuriser les voies d’accès vers l’Ultérieure75. Encore faudrait-il être en mesure d’établir le rôle stratégique des secondes. Nous verrons ultérieurement que la présence de garnisons permanentes n’y est pas si évidente que l’auteur le prétend76. En ce qui concerne Italica, l’installation par Scipion, sur la rive gauche du Guadalquivir, en 206, de soldats blessés lors de la bataille d’Ilipa répondait sans doute à un souci de protéger les acquis de la récente victoire sur Carthage dans une région où l’influence punique demeurait une menace alors même que la seconde guerre punique n’était pas encore terminée77. Mais par la suite, sa fonction dans un éventuel dispositif défensif n’est pas claire. En dépit des silences de la documentation, on admet généralement que l’établissement a constitué un précieux verrou face aux raids lusitaniens qui débutent dans les premières décennies du IIe siècle78. Cependant, la poursuite de ces incursions jusque dans la première moitié du Ier siècle, comme la nécessité pour les préteurs d’Ultérieure de pénétrer en Béturie puis en Lusitanie, suggèrent que l’efficacité dissuasive de la fondation était demeurée en réalité limitée. Il faut tenir compte en effet de la tendance des sources d’époque antonine à valoriser excessivement l’importance du rôle joué à l’époque de la conquête par la patrie de deux empereurs79. De même, Metellinum a sans doute pu fournir dans la première moitié du Ier siècle une tête de pont dans un zone rendue instable par la guerre sertorienne80. Cependant, malgré les affirmations de R. C. Knapp, l’articulation de Metellinum avec Castra Caecilia, Castra Seruilia, Castra Liciniana et Castellum Ciseli, ne peut être démontrée, comme on l’a vu précédemment81.
19En dehors de l’appartenance de ces sites à une même aire géographique, il est en effet impossible de prouver que ces établissements militaires supposés fonctionnaient ensemble. Or, il s’agit d’une condition indispensable pour accepter l’hypothèse de telles lignes de défense, même si l’on admet que leur composition a varié au cours du temps. Le problème est que les données chronologiques font ordinairement défaut. Généralement, c’est la localisation présumée de la plupart des toponymes retenus qui sert en fait à fonder leur rattachement à une phase connue de la conquête : en l’absence de tout autre élément, on date ainsi Cilniana de la seconde guerre punique simplement parce que l’Itinéraire d’Antonin la situe dans la vallée du Guadalquivir82. Toutefois, si l’on renonce à identifier a priori cet établissement à un poste militaire, n’importe quelle datation peut dès lors être préférée à celle-ci avec autant de vraisemblance. Il nous paraît très significatif que les études qui n’ont pas pour objectif de mettre en évidence l’aspect militaire de la présence romaine n’accordent pas d’attention particulière à la vocation stratégique de ces mêmes lieux : par exemple, un spécialiste des voies romaines ne s’étonne pas, à bon droit, de ce que les toponymes fournis par les Itinéraires se répartissent le long des principaux axes de communication. La nature même de sa source l’implique. Cette particularité ne l’incite donc pas à succomber au « tout stratégique ». Ainsi, contrairement à Caepiona, Liciniana ou Caeciliana, la mansio Semproniana, sur le tronçon catalan de la uia Augusta, n’a jamais donné lieu, à notre connaissance, à un rapprochement avec un gouverneur de Citérieure portant ce nom, malgré les mandats attestés de Sempronius Tuditanus en 197 ou de Sempronius Gracchus en 18083. De même, Praetorium, à proximité, n’est jamais cité en tant qu’ancienne garnison républicaine à l’inverse de son homonyme de l’embouchure du Tage84. Cette disparité traduit nettement la profonde ambivalence du critère stratégique dont l’évidence est finalement moins nette qu’on ne le suppose souvent et qui sert surtout à pallier la pénurie de données suffisamment sûres quant à l’organisation militaire de la conquête85. La présence d’une garnison romaine à un moment donné ne peut se déduire avec certitude de la localisation, présumée stratégique, d’une agglomération mentionnée ultérieurement par nos sources. L’armée romaine n’avait évidemment pas le monopole de cette préoccupation. Aussi la confusion entre fonctions civile et militaire d’un établissement, loin de se trouver dissipée sur ce plan, ne peut pas être résolue sur ce critère. À plus forte raison, cette difficulté contribue à expliquer certains des obstacles rencontrés dans l’interprétation des vestiges archéologiques régulièrement considérés comme des fortifications témoignant de l’activité des armées de conquête.
II. — LES DONNÉES DE L’ARCHÉOLOGIE : PROBLÈMES DE MÉTHODE
20L’héritage d’Adolf Schulten. — L’application d’une grille de lecture systématique.
21En dépit des trésors d’ingéniosité déployés par les historiens, les restitutions proposées à partir de sources écrites se révèlent insatisfaisantes parce qu’aucun des éléments retenus pour les élaborer ne parvient à établir avec certitude la datation et la nature des établissements dont la toponymie conserve pour nous la trace fugitive. De ce point de vue, dans la mesure où la péninsule Ibérique est traditionnellement présentée comme la partie du monde romain où la castramétation d’époque républicaine est la plus riche (carte 5), nous serions en droit d’espérer davantage de l’archéologie. À première vue en effet, le matériel retrouvé tout comme la morphologie des structures dégagées sont susceptibles de fournir davantage d’informations. En réalité, il n’en est rien. L’archéologie militaire péninsulaire, à la suite des remarquables travaux pionniers d’A. Schulten au début du XXe siècle, demeure très dépendante d’un schéma interprétatif qui partage d’ailleurs plus d’un trait commun avec celui analysé précédemment. Il convient par conséquent de se montrer circonspect dans l’utilisation d’un dossier archéologique où la dimension militaire est également constamment surévaluée.
L’HÉRITAGE D’ADOLF SCHULTEN
22La double limite, de nature chronologique et fonctionnelle, que nous avons soulignée précédemment à propos de l’analyse toponymique, trouve un écho significatif dans celles propre à la méthode suivie par A. Schulten dans son identification de la plupart des camps légionnaires de la Péninsule. Or il se trouve que les propositions de celui-ci forment, aujourd’hui encore, le point de départ incontournable de toute approche du sujet86. Les opinions émises par l’érudit allemand en la matière ont longtemps fait autorité87. Elles commencent cependant, depuis quelques années, à faire l’objet d’une nécessaire remise en question méthodologique. On a ainsi mis l’accent sur la tendance d’A. Schulten à vouloir systématiquement faire correspondre les données du terrain au détail des récits des opérations militaires rapportés par les sources littéraires88. Deux révisions récentes des structures fouillées par lui autour de Numance se sont particulièrement attachées à mettre en évidence cet artifice qui explique non seulement l’illégitimité de la plupart des datations admises, mais également l’interprétation abusive de la fonction des sites concernés89. Si les vestiges trouvés à Numance, Renieblas et Cáceres el Viejo présentent bien des caractéristiques permettant d’y reconnaître, selon toute vraisemblance, des structures liées à une activité militaire romaine d’époque républicaine, il n’en va pas de même des nombreuses enceintes régulièrement attribuées à des camps légionnaires depuis les suggestions d’A. Schulten : Almazán (Soria), Almenara (Valencia), Alpanseque (Soria), Aguilar de Anguita (Guadalajara) et la Cava de Viriato (Viseu). Tous ces sites posent en effet de multiples problèmes sur lesquels il convient de s’attarder.
23Le recours exclusif aux arguments topographiques ou aux données littéraires, même cumulés, ne saurait suffire à identifier un site mal connu par ailleurs à des castra républicains. C’est pourtant ce qui fonde l’extrême majorité des identifications proposées. De cette façon, la découverte, au sommet d’un tertre peu élevé, d’une enceinte trapézoïdale d’une superficie évaluée à 9,5 hectares, à neuf kilomètres au nord de Sagonte, à Almenara, dans la province de Valence, a été rapprochée d’un passage de Polybe pour y localiser le camp de Publius et Gnaeus Scipion, établi à l’occasion de leur avancée au-delà de l’Èbre à l’été 217 (fig. 1)90. Mais cette hypothèse ne repose sur aucun fondement scientifique. D’ailleurs, dès 1929, le site avait été clairement daté de l’époque médiévale91. Des fouilles entreprises dans les années 1980 ont définitivement confirmé cette interprétation (fig. 2, p. 300)92. Malgré cela, les travaux relatifs à la période antique, encore très dépendants de l’opinion d’A. Schulten, commencent à peine à tenir compte des résultats de ces fouilles déjà anciennes93. Une remise en question aussi spectaculaire ne peut dès lors qu’inviter à la prudence à propos de dossiers similaires : c’est le cas notamment du périmètre fortifié de 4,7 hectares repéré dès le début du siècle entre Barahona et Alpanseque, dans la province de Soria (fig. 3, p. 302). Jamais fouillé, il fut arbitrairement interprété comme un camp militaire catonien uniquement en raison de la proximité de Segontia, dont Tite-Live nous dit qu’elle fut assiégée par le consul de 19594. Invisibles aujourd’hui, les vestiges ne permettent plus, en l’absence d’excavations, de vérifier le plan polygonal publié par A. Schulten95. Le site n’a produit aucun matériel susceptible d’en préciser la nature, si bien qu’il faut se résoudre à utiliser les conclusions du rapport avec circonspection96. Enfin, l’attribution à l’armée romaine des fortifications trouvées au lieu-dit « Cava de Viriato » près de Viseu, au Portugal, entre Coimbra et Porto, a conservé jusqu’à récemment un certain crédit (fig. 4, p. 303). Le site97 n’a pourtant livré qu’un denier de Q. Voconius Vitulus daté de 41-40 avant J. -C. et un fragment de tuile, tous deux insuffisants pour parvenir à une interprétation solide98. Le réexamen le plus récent du dossier, sans reprise de fouilles cependant, conclut d’ailleurs à une fortification d’époque moderne datable du début du XVIIe siècle99.
24Sans aller jusqu’au cas extrême d’Almenara, il est certain que, lorsqu’il a eu lieu, le travail de terrain, repris sur certains sites, a contribué à nuancer la doxa schulténienne. C’est le cas pour Aguilar de Anguita, dans la province de Guadalajara (fig. 6). Située sur le tertre de « La Cerca » à vingt kilomètres à l’est de Sigüenza, emplacement présumé de Segontia, cette enceinte d’un peu plus de douze hectares avait par conséquent été mise en parallèle avec celle d’Alpanseque et considérée également par A. Schulten comme un camp romain daté de la campagne de Caton100. Le savant allemand présentait le recours aux sources littéraires comme imposé par la méthode anarchique de fouille du marquis de Cerralbo, le découvreur du site, qui, en dégageant entièrement la muraille, avait rendu inexploitable celle-ci d’un point de vue stratigraphique. Ce faisant, il reconnaissait la difficulté à proposer une véritable datation du site101. Le réexamen de l’ensemble à la fin des années 1970, sans fouilles toutefois, a montré que les caractéristiques décrites par le savant allemand n’apparaissent pas non plus de manière claire : ni le cardo ni le decumanus supposés n’étaient alors visibles, pas plus que les quatre portes citées par lui, dont trois seulement étaient alors vaguement reconnaissables102. En revanche, la technique de construction et la présence possible d’un poignard à antennes datable des VIIe -Ve siècles parmi les trouvailles de 1911-1915 ont conduit à supposer une occupation romaine d’une agglomération celtibère103. Bien que l’idée d’un camp militaire ne soit donc pas totalement écartée, la médiocrité du dossier a amené ensuite la plupart des commentateurs à renoncer à toute datation précise104. Certains n’écartent plus la possibilité d’y voir un oppidum indigène105. L’identification récente d’une partie du matériel déposé par le marquis de Cerralbo au Museo Arqueológico Nacional (Madrid) et demeuré jusqu’à présent ignoré, paraît du reste devoir orienter l’étude en ce sens, puisqu’y dominent objets domestiques et céramique celtibère tardive ainsi que des éléments métalliques (mors, talons de lance) vraisemblablement indigènes106. La présence de fragments de céramique campanienne A et B, datables donc entre les IIe et Ier siècles, n’a rien de contradictoire avec la possibilité d’une occupation non romaine107. La question est compliquée par la possible réutilisation du site jusqu’au Bas-Empire, comme le suggère la datation de la nécropole voisine108. Surtout, ce matériel, vaguement attribué à « La Cerca » sur la foi d’un étiquetage parfois ambigu, est dépourvu de tout contexte stratigraphique109. Il nous semble donc important de souligner avant tout que, en dépit de la réapparition de certaines pièces depuis l’étude d’A. Schulten, rien dans les structures ou le matériel retrouvé ne permet de soutenir sérieusement son hypothèse d’aestiua romains plutôt que celle d’un oppidum celtibère.
25Ces quelques exemples montrent donc que l’obscurité du dossier archéologique tient à la convergence de plusieurs facteurs. À la tendance du précurseur allemand à identifier des vestiges à des établissements militaires romains sur des critères essentiellement philologiques, topographiques et logiques, s’est ajoutée depuis l’impuissance à vérifier archéologiquement ces hypothèses, en raison du mauvais état de conservation des sites ou bien de l’absence totale de toute campagne de fouilles ; par conséquent, le poids de l’autorité schulténienne sur la tradition historiographique conduit les chercheurs à admettre par défaut ses interprétations de fond, et à se contenter de discuter âprement les datations initialement proposées110. De ce point de vue, le cas d’Almazán est exemplaire (fig. 7). À mi-chemin entre Medinaceli (Ocilis ?) et Numance, le site est attribué aux campagnes de Fulvius Nobilior en 153, puisque celui-ci, opérant contre l’oppidum arévaque, disposait selon Appien d’une base à Ocilis111. Aujourd’hui entièrement détruits par l’utilisation du lieu comme carrière de pierre industrielle à partir de la fin des années 1960, les restes de l’enceinte ont fait l’objet d’un réexamen, en 1968, à l’occasion des profondes tranchées ouvertes par les engins mécaniques112.
26Ces tranchées semblent toutefois avoir considérablement endommagé la muraille, si bien qu’il est difficile de parvenir à quelque conclusion que ce soit concernant les techniques de construction employées113. Les sondages effectués n’ont ainsi pu que confirmer la dégradation constante du site, déjà déplorée en 1927 par A. Schulten par rapport à son état de 1911, date de la première visite du savant allemand114. En un point seulement, situé au nord-est de la porte du grand côté nord-ouest, les fouilleurs ont cru pouvoir reconnaître le profil de la muraille : de part et d’autre d’une zone de 2,5 à 3 mètres de large constituée de matériel fin, ils ont localisé des pierres de plus grande taille qui les ont poussés à suggérer prudemment la possibilité d’un mur à double parement, sans que la face externe apparaisse toutefois clairement115. De manière intéressante, ces précautions disparaissent des travaux ultérieurs116. Elles sont pourtant fondamentales pour souligner les multiples problèmes d’interprétation posés par des structures dont le plan lui-même est incertain117. Le plan initial, dressé par le général A. Lammerer en 1913 à partir de relevés topographiques, reposait sur un premier croquis effectué l’année précédente sans la moindre fouille. Certaines de ses caractéristiques essentielles n’étaient plus visibles en 1968, notamment la plus grande partie du petit côté nord-est ainsi que l’angle ouest118. Mais la forme générale rectangulaire de l’ensemble demeure admise sur la foi d’une photographie aérienne de 1957, attestant l’existence perpendiculaire des deux côtés nord-ouest et sud-ouest. Cependant, cette image montre en outre deux lignes droites coupant en son milieu la superficie supposée, depuis le côté nord-ouest jusqu’à l’angle présumé au sud-est, sans qu’aucune explication ait pu en être donnée119. En l’état, la preuve formelle d’un quadrilatère fait donc défaut, et, de ce point de vue, la restitution d’A. Schulten demeure toujours l’argument essentiel120. Enfin, aucun élément n’est venu appuyer une datation assurée de la seconde moitié du IIe siècle121. En l’absence de stratigraphie, le peu de céramique romaine retrouvé n’est guère utilisable122. En outre, les huit fragments de céramique campanienne B appartiennent sans doute à un même objet, ce qui réduit encore la proportion de matériel romain par rapport au matériel indigène, plus abondant, retrouvé en superficie123. Cette pauvreté en trouvailles pourrait être tout à fait compatible avec l’occupation temporaire généralement supposée, mais elle n’en complique pas moins l’analyse, à l’heure d’étayer solidement l’hypothèse d’un camp républicain. Une fois de plus, celle-ci repose davantage sur le lien éventuel du site avec les opérations militaires attestées dans la région à la fin du IIe siècle par les sources littéraires. L’argument le plus fort en faveur de la nature militaire d’Almazán reste selon nous la présence de structures en avant des portes, interprétées depuis A. Schulten comme des titula124, et reportées sur le plan actuellement disponible, bien que, en 1968, G. Gamer et T. Ortego n’en aient pas retrouvé trace sur le terrain125. Toute vérification étant impossible, la prudence s’impose donc. En dépit de toutes ces incertitudes, la bibliographie persiste pourtant à se référer à Almazán comme à un camp romain de la conquête, comme si le fait était suffisamment prouvé126.
L’APPLICATION D’UNE GRILLE DE LECTURE SYSTÉMATIQUE
27Nombreux sont ainsi les sites qui sont régulièrement associés à des postes militaires romains, permanents ou temporaires, sur des fondements insuffisants ou trop fragiles. Bien souvent, une simple prospection fournit les seuls éléments disponibles : c’est ainsi le cas de Navalcaballo dans la province de Soria127 ou d’El Pedrosillo en Estrémadure128. Parfois même, une photographie aérienne suffit : c’est le cas pour Ronda la Vieja129 et Ategua130 en Andalousie ou encore pour Zalbeta (Aranguren) en Navarre131. Notamment lorsqu’elle est jugée remarquable ou inhabituelle, la présence de matériel italique sert parfois d’argument unique, comme dans le cas d’Ormiñén - La Nava en Navarre132 ou de Los Planos de Mara en Aragon133. La datation de ces sites est ensuite déduite principalement de leur localisation géographique, exactement comme dans le cas des toponymes mentionnés par les Itinéraires. Plusieurs camps présumés ont été également repérés de la même manière dans le Portugal actuel134. Là encore, les arguments avancés en faveur de telles interprétations (essentiellement l’existence de structures de type défensif) sont la plupart du temps très insuffisants135. Ils reposent en général davantage sur la volonté de trouver à toute force, dans le paysage portugais, des traces des campagnes de Brutus en 138 ou de César en 61, attestées par les textes136.
28Cette préoccupation a poussé ainsi récemment certains chercheurs à proposer une nouvelle interprétation en ce sens de la fortification d’Alto do Castelo, près d’Alpiarça, à une centaine de kilomètres au nord-est de Lisbonne, sur la rive gauche du Tage (fig. 8, p. 314)137. Tout indique pourtant qu’il s’agit d’un oppidum indigène en voie de romanisation au Ier siècle138. Les arguments avancés pour soutenir l’idée que l’enceinte pourrait en fait être celle d’un camp romain sont fort ténus (la situation sur une terrasse fluviale, les caractères de l’agger, la présence probable de deux fossés, la forme polygonale de l’enceinte) et surtout peu décisifs139. En réalité, l’hypothèse trouve son origine ailleurs, dans un débat né autour d’un autre emplacement supposé de camp, un peu plus au nord, à Chões de Alpompé, daté entre le milieu du IIe et le milieu du Ier siècle (fig. 9, p. 315)140. Ce site est généralement considéré comme le camp établi par Brutus, au cours de sa campagne contre les Lusitaniens, près de la ville de Moron, laquelle est alors localisée par les historiens portugais à Alto do Castelo141. Mais la configuration de l’enceinte, extrêmement irrégulière, évoque davantage un site de hauteur préromain142. Le matériel retrouvé est également majoritairement préromain et couvre une ample période entre le VIIe et la fin du Ier siècle avant J. -C., voire jusqu’au IIe siècle apr. J. -C.143. L’idée consiste donc à inverser les propositions : plaçant Moron à Chões de Alpompé, il a paru séduisant d’essayer de faire d’Alto de Castelo le camp en question144. Toutefois, le passage de Strabon ne spécifie l’établissement d’aucun camp autour de la base de Moron145. La recherche de sa trace laissée sur le terrain ne semble ainsi pas entièrement justifiée146.
29Ces discussions contradictoires ont l’intérêt de montrer qu’entre la découverte supposée d’un établissement militaire romain et la reconnaissance possible d’un oppidum indigène, la frontière est paradoxalement assez mince et que l’interprétation dépend pour une grande part de la subjectivité des analyses. La présence de matériel romain conduit trop souvent à assimiler de façon systématique un site fortifié à des castra ou à un praesidium. C’est le cas des bâtiments trouvés à Lomba do Canho, près d’Arganil, dans la région de Viseu, au Portugal (fig. 10), où la coexistence de monnaies et de céramiques indigènes avec des monnaies, des armes et de la céramique romaines a incité l’inventeur à suggérer qu’une occupation militaire romaine avait succédé à une phase proprement indigène147. Une reprise de fouille dans les années 1980 ayant permis de conclure à une phase unique d’occupation, celle-ci est attribuée désormais uniquement à un poste militaire romain148. L’étude des trouvailles céramiques et numismatiques a conduit à en fixer provisoirement la chronologie dans le second ou le troisième quart du Ier siècle, peut-être en 61, à l’occasion de la campagne de César149. L’abondance d’armes, représentées par cent quarante pointes de baliste et de très nombreuses balles de fronde, constitue l’argument essentiel pour mettre le site en relation avec l’armée romaine150. Par ailleurs, il s’agit d’un petit établissement, les structures fouillées occupant une superficie de 250 sur 75 mètres, soit près de 2 ha, même s’il est probable que l’ensemble devait être à l’origine plus grand. L’enceinte, localisée dans la partie sud, n’a pas été fouillée151.
30La construction en dur et la présence d’un bâtiment rectangulaire doté d’une annexe circulaire comprenant des restes de chauffage par hypocauste, sans doute liés à une cuisine ou à des thermes (secteur Q)152, témoignent du caractère permanent de l’installation, confirmé également par le dégagement, dans un autre bâtiment, d’un petit atrium à portique, au sud d’un ensemble de plusieurs pièces d’habitation (secteur P)153. Cette dimension résidentielle (très nette dans le secteur B154), associée à des traces d’activité de manufacture (métallurgie du fer et du bronze, meules), invite à s’interroger sur la nature exacte du site155. L’accumulation d’armes n’est pas un élément déterminant156. On peut comparer par exemple ce phénomène à celui de La Caridad (Teruel), daté à peu près de la même période et dont l’occupation indigène et civile ne fait aucun doute, en dépit de la trouvaille d’une catapulte, de plusieurs pila et de balles de frondes dans un contexte urbain très romanisé157. Par conséquent, en dépit de la présence des armes, il apparaît nécessaire de rechercher des alternatives à la solution militaire dans le cas de Lomba do Canho, avant de conclure à des castra de la conquête158. Les responsables du chantier eux-mêmes reconnaissent d’ailleurs l’artifice de leur désignation du site, plus proche à leurs yeux d’un castellum que d’un véritable camp romain159.
31Un élément de réponse sur la définition de l’établissement de Lomba do Canho est peut-être fourni par la réévaluation récente d’un ensemble de constructions localisées dans le sud du Portugal, en Algarve et dans l’Alentejo. La plus connue est le Castelo da Lousa, situé à six kilomètres au sud-ouest de Mourão, et interprété dès les premières fouilles, au début des années 1960, comme un fortin militaire romain, en raison de son plan quadrangulaire et de la solidité de ses murs, qui atteignent deux mètres d’épaisseur (fig. 11, p. 320)160. Pour cette raison, en fonction des variations de chronologie admises, plusieurs explications en ont été données : protection d’Évora161 ; sécurisation de l’accès à Emerita162 ; simple poste de guet163. Son type et sa fonction ont été rapprochés d’autres sites de la région, comme le Castelo do Manuel Galo164. Toutefois, les véritables fouilles se sont limitées à ces deux sites165. Malgré cette réserve, une vingtaine de sites présentant des caractéristiques similaires ont été repérés, alimentant un débat autour de l’existence d’un réseau de forteresses romaines au sud du Tage, dans la région entre Castro Verde, Mértola et Alcoutim166. Les faiblesses d’une telle hypothèse ont été démontrées, nous semble-t-il, de façon définitive : outre que l’emplacement de ces sites n’a aucune valeur stratégique en règle générale, puisque ceux-ci se trouvent à l’écart des voies de communication, l’analyse du matériel retrouvé suggère une datation tardive, entre César et Auguste, c’est-à-dire à un moment où la région est vraisemblablement pacifiée167. Leur fonction militaire doit par conséquent être remise en question168. Par comparaison avec ce qu’on connaît en Orient, J. Wahl a proposé de les interpréter comme des fermes fortifiées, à la manière grecque, peut-être dans le cadre d’un programme officiel de colonisation de vétérans, ce que pourrait confirmer la grande homogénéité morphologique de tous ces édifices, dont le style hellénistique est étranger à la tradition indigène169.
FIG. 11. — Castelo da Lousa (Mourão) [d’après A. GONÇALVES et P. C. CARVALHO, « Intervención arqueológica en el Castelo da Lousa (1997-2002) », p. 67, fig. 1]
32À la suite de cette révision, M. Maia a rejeté son interprétation initiale, tout en soulignant à son tour les obstacles à une fonction exclusivement agricole : la pauvreté des sols de la région ne permet qu’une agriculture de subsistance et celle-ci ne saurait justifier une architecture défensive aussi imposante, dont la chronologie doit être en outre, selon lui, encore abaissée170. Préférant une datation augustéenne, il conclut à de petites exploitations minières concédées à des emeriti171. En dernier lieu, P. Moret a radicalisé encore la critique : il remarque que, tout en écartant à juste titre la dimension militaire de ces établissements, aussi bien l’hypothèse des fermes fortifiées que celle des petites exploitations minières continuent à conserver au fond la connotation défensive des édifices172. Or, leur aspect peut s’expliquer à ses yeux de bien d’autres manières, en particulier par des nécessités de stockage ainsi que de solidité des soutènements173. Le modèle, selon lui italique, des plans des bâtiments comme des techniques de construction, le conduit ainsi à mettre ces édifices en relation avec une immigration italienne privée, motivée par l’attrait des ressources minières des contreforts septentrionaux de la Serra do Caldeirão174. Plus qu’à de véritables exploitations minières, dont le matériel retrouvé n’offre pas assez de preuves, il pense à de petites exploitations agricoles destinées à ravitailler les villages miniers175. Par comparaison, on peut alors remarquer que Lomba do Canho offre plus de points communs avec ces sites qu’avec le praesidium romain qu’on persiste pourtant à y voir : une datation tardive176, un plan intégrant une tradition italique (atrium, portique, thermes), la proximité de gisements miniers177. Pour l’époque de la conquête, rien ne permet donc, selon nous, d’envisager sans discussion l’appartenance de ces structures à un système de surveillance et de contrôle militaire des territoires178.
33Ces quelques exemples suffisent à montrer la similitude des critères qui, depuis A. Schulten, continuent à fonder l’attribution d’un site à l’armée romaine de conquête :
- la possibilité de mettre son emplacement en relation avec des événements connus par les sources littéraires ;
- une situation jugée stratégique (sur une légère hauteur, à proximité d’une voie de communication) ;
- une morphologie de type castral (plan de l’enceinte, tours, portes) ;
- du matériel contenant des armes ou de la céramique d’origine italienne179.
34Se trouve ainsi définie une grille de lecture mécaniquement appliquée aux découvertes, en dépit des incertitudes pourtant systématiquement relevées parles fouilleurs eux-mêmes. Sur cette base, l’aspect apparemment défensif d’un site suffit souvent à accréditer, sans autre preuve, l’hypothèse de praesidia romains. Un bon exemple en est fourni par les « fortins » d’Estrémadure, dont le catalogue d’une trentaine de sites est particulièrement représentatif de cette démarche180. En particulier, la mise en relation, depuis quelques années, des turres de La Serena, dans la province de Badajoz, avec le besoin éprouvé par Metellus de contrôler, entre 78 et 76, les ressources minières de la région pendant la guerre sertorienne, repose sur des fondements très discutables181. On peut en dire autant des vestiges régulièrement attribués à l’armée romaine républicaine dans les publications archéologiques182. À titre d’exemples, on peut citer les difficultés soulevées par l’interprétation en ce sens de nombreuses structures de type défensif, en relief ou bien en creux, réparties dans l’ensemble de la Péninsule et dans les îles :
- en Catalogne : Tentellatge183, Peralada184 ou Olèrdola185 ;
- dans la moyenne vallée de l’Èbre : Las Canteras186 ;
- dans les îles Baléares : Ses Salines (Majorque)187 ;
- en Navarre : Los Cascajos188 ;
- en Andalousie : Cerro del Trigo189 ;
- dans le sud-est : Cerro de Las Fuentes de Archivel (province de Murcie)190 et La Vila Joiosa (province d’Alicante)191 ;
- dans le sud du Portugal : Pedrão, près de l’embouchure du Sado192.
35Ce qui précède montre bien, à nos yeux, le risque encouru sur le plan méthodologique à étayer une réflexion sur l’organisation d’un réseau de camps et de garnisons à partir d’une documentation, provenant de sources littéraires (comme les Itinéraires, les ouvrages géographiques ou chorographiques) ou archéologiques, qu’il est souvent plus prudent, voire indispensable dans certains cas, de mettre en relation avec une occupation civile autochtone, romanisée ou non. Cette difficulté à repérer sur le terrain les traces d’un dispositif stratégique d’époque républicaine peut évidemment tenir en partie à la disparition ou à l’altération inévitables de tels vestiges au fil du temps ainsi qu’aux limites matérielles des fouilles entreprises, encore trop peu nombreuses actuellement. Mais cet argument n’est pas suffisant pour se contenter d’admettre sur cette base, presque par défaut193, l’existence de maillages, éphémères ou durables, de postes militaires durant la conquête. Au contraire, il nous semble que la pauvreté du dossier en la matière doit nous inviter plutôt à réfléchir à la pertinence d’une idée souvent en filigrane des études sur l’Hispania républicaine et selon laquelle le rôle de l’armée romaine lui imposait d’implanter durablement des praesidia à des fins de contrôle territorial. Pour approfondir cette question, il nous semble important de revenir maintenant aux garnisons explicitement attestées par les sources, car ce sont elles qui servent de référence à l’ensemble des restitutions dont nous venons de discuter la vraisemblance. Il s’agit de vérifier si ces mentions peuvent être ou non effectivement interprétées en fonction d’une logique privilégiant systématiquement la longue ou la moyenne durée.
III. — LES GARNISONS URBAINES ET LA QUESTION D’UN RÉSEAU DE CONTRÔLE TERRITORIAL
36Tarragone et Emporion : du prototype au modèle.
37— Les moyens militaires d’une politique de contrôle.
38Parmi les établissements militaires liés aux campagnes narrées par les textes, les garnisons (praesidia) jouissent, chez les historiens modernes, d’une réputation de longévité supérieure à celle des camps de marche (castra aestiua) dont on s’accorde à reconnaître la dimension éphémère. Certes, ces garnisons apparaissent peu dans les récits relatifs à la conquête : nous en connaissons moins d’une vingtaine, réparties sur deux siècles194. Mais cette objection e silentio est sans portée : il n’y a aucune raison de croire qu’il ne s’agissait pas d’une pratique beaucoup plus fréquente. D’autre part, lorsqu’ils sont mentionnés, les praesidia concernent toujours des agglomérations, d’importance variable. Pour ces deux raisons, on estime ordinairement que la progression romaine a régulièrement donné lieu à l’installation de troupes dans des villes dont le conquérant jugeait la maîtrise indispensable au maintien de son hégémonie. S’est ainsi élaboré dans l’historiographie un modèle de contrôle territorial dans lequel le rôle clé de ces garnisons urbaines est implicitement admis. Nous voudrions montrer que ce postulat résulte en fait d’une généralisation excessive, construite à partir d’exemples canoniques qui sont en réalité moins bien démontrés qu’on a tendance à le supposer. Par conséquent, il convient, selon nous, de s’interroger plus avant sur la dimension proprement militaire des méthodes de contrôle des territoires péninsulaires par Rome.
TARRAGONE ET EMPORION : DU PROTOTYPE AU MODÈLE
39La question nous semble devoir être discutée à partir des deux cas emblématiques que représentent, dans l’historiographie moderne, les villes de Tarragone et d’Emporion, toutes deux situées sur le littoral nord-oriental et toutes deux associées par les auteurs anciens aux débuts de la présence romaine dans la Péninsule. Le choix d’analyser plus précisément ces deux exemples s’explique par le fait que, selon une idée répandue, les Romains y auraient placé leurs premières garnisons stables et qu’on leur reconnaît, pour cette raison, une valeur de modèle qu’il serait possible ensuite d’étendre à l’étude d’autres points névralgiques de la conquête. Ces deux sites, en effet, ont la particularité d’être les mieux documentés dont nous disposions, à la fois sur le plan littéraire et archéologique. D’après l’opinion courante, les données textuelles et matérielles convergeraient pour démontrer le rôle de praesidia permanents que ces villes auraient joué durant la première partie de la conquête. Cette interprétation mérite toutefois, selon nous, d’être remise en question.
40L’installation de praesidia à Tarragone dès 218 est explicitement mentionnée dans nos sources195. Elle offre en outre un parallèle avec celle attestée à Carthagène en 209, après la prise de la ville196. Ceci alimente généralement la conviction que Rome entendait contrôler et sécuriser par ce moyen des centres aussi essentiels pour sa présence en Hispania. Doit-on pour autant conclure au caractère durable de ces garnisons ? Rien ne le prouve. Certes, on sait qu’en 206 Carthagène conservait une garnison, puisque celle-ci permit de faire échec à une tentative de débarquement de Magon, désireux de rééditer à son profit l’exploit de Scipion197. Toutefois, intervenu avant le départ définitif de ce dernier pour Rome, cet incident ne préjuge pas du maintien ultérieur du praesidium, en particulier après 202, lorsque la menace d’un retour punique en Péninsule se fut estompée, suite à la victoire de Zama et à la capitulation de Carthage198. De fait, les allusions à de telles garnisons disparaissent de la documentation pour le reste de la période, malgré la mention de quartiers d’hiver (hiberna) dont nous verrons infra qu’ils n’impliquaient pas automatiquement le cantonnement dans une ville199.
41L’apport de l’archéologie peut-il suppléer en ce domaine le silence des sources littéraires ? On le croit parfois en ce qui concerne Tarragone, dans la mesure où la ville actuelle conserve une muraille cyclopéenne, datée de la fin du IIIe ou du début du IIe siècle, dont la construction a généralement été associée à la présence d’une garnison romaine sur place. Toutefois, le rapport ainsi établi entre muraille et praesidium soulève selon nous certaines difficultés. C’est depuis le milieu du XXe siècle que cet appareil monumental a été mis en relation avec la fortification du site par les Romains à partir de la seconde guerre punique200. Son étude, reprise dans les années soixante-dix par T. Hauschild, a conduit à proposer d’identifier deux phases bien distinctes de construction (fig. 12, p. 330)201.
42D’après cet auteur, la base mégalithique appartient à une première enceinte, pourvue de tours, dont la Tour de l’Archevêque, la Tour du Cabiscol et la Tour de Minerve constituent les trois vestiges actuels. Dans un deuxième temps, selon cette théorie, cette muraille aurait été réaménagée, comme le suggère l’existence d’un parement à bossage plus petit et plus régulier, venant prendre appui sur le grand appareil précédent. À cette occasion, le rempart aurait donc connu un double agrandissement, en hauteur et en largeur, s’accompagnant de la disparition des tours (fig. 13, p. 331).
43Cette seconde phase correspondrait ainsi à une monumentalisation accrue :
44désormais l’enceinte mesurerait six mètres de large au lieu de quatre et demi, et douze mètres de haut au lieu de six. On explique ce renforcement par une extension du périmètre du rempart, destinée à réunir à l’intérieur d’une même enceinte les deux noyaux jusque-là juxtaposés : d’une part, dans la partie basse, la ville indigène originelle, qu’il faut peut-être identifier à la Cissis/Kesse de Polybe et de Tite-Live qui possédait peut-être sa propre muraille, et d’autre part, le praesidium ou le castrum romain, installé dans la partie haute (fig. 14, p. 332)202.
45Ces phases successives sont attribuées toutes les deux à une époque antérieure au Ier siècle, même si leur chronologie demeure discutée dans son détail. T. Hauschild met la première enceinte en relation avec la seconde guerre punique et pense que la deuxième lui succéda très tôt, dès les premières décennies du IIe siècle, peut-être au moment de la campagne de Caton203. Depuis, sur la foi d’une nouvelle fouille, la construction de la seconde phase a été rabaissée au troisième quart du IIe siècle, entre 150 et 125204. Dans un cas comme dans l’autre, on considère néanmoins que la partie haute de la ville abritait une garnison permanente et servait de base aux légions de Citérieure, le développement urbain proprement dit concernant seulement la partie basse que l’intégration à l’intérieur d’une même enceinte engagea ensuite dans un processus de transformation accéléré205. En dépit de certaines variations de détail, ce schéma d’une construction en deux temps a été largement suivi206. Dans cette perspective, l’évolution de la muraille est censée refléter celle du type de garnison installé dans la ville entre la fin du IIIe et le milieu du IIe siècle : la faible hauteur de la première enceinte ainsi que la présence des tours sont interprétées comme l’indice d’une garnison importante à l’origine, conçue pour repousser une attaque et soutenir un siège207 ; en revanche, le renforcement du rempart au cours de la seconde phase correspondrait à la réduction de la garnison, dans la mesure où le siège de la ville était moins redouté, ce que traduirait l’absence de tours dans le nouveau tronçon208. Aussi la spectaculaire extension du périmètre s’expliquerait-elle alors surtout par l’utilisation de la ville comme base arrière et centre d’hivernage, à un moment où les effectifs envoyés en Péninsule connaissaient un accroissement important209.
46Cette interprétation courante présente toutefois un certain nombre d’obscurités. Pourquoi prétexter d’une garnison importante dès 218, pour expliquer la morphologie de la muraille, alors que Tite-Live précise bien au contraire que, cette année-là, Gn. Scipion n’avait laissé à Tarragone qu’un praesidium modicum210 ? D’autre part, l’idée que les tours ont été construites dans la crainte d’avoir à soutenir un siège repose uniquement sur la conviction que la première phase de la muraille remonte à la seconde guerre punique, car, d’un point de vue architectural, elles ne peuvent correspondre à des plateformes d’artillerie, comme le prétendent les auteurs211 : outre que l’organisation interne des tours est insuffisamment connue, le très grand espacement entre elles affaiblit l’hypothèse d’une fonction de protection efficace de la courtine212. Par conséquent, il est difficile d’accepter l’hypothèse que la transformation de l’enceinte vers 130 a entraîné la disparition des tours : en effet, celles-ci ne sauraient être systématiquement associées à un contexte d’insécurité, puisqu’elles caractérisent également la phase du rempart que les fouilleurs ont proposé de dater du Haut-Empire213. Enfin, rien n’autorise à penser que les troupes de Citérieure étaient régulièrement cantonnées à l’intérieur des murs, dans la partie haute de la ville, si bien qu’il est peu probable que l’extension de l’enceinte ait répondu à l’accroissement de ce type de besoins après le milieu du IIe siècle214. Finalement, il faut admettre que l’hypothèse du praesidium de Tarragone et de son évolution a surtout pour avantage de justifier commodément la théorie d’une construction du rempart en deux phases bien distinctes, expliquées par les variations des besoins militaires. Or, d’un point de vue archéologique, cette théorie n’est pas aussi évidente que sa diffusion majoritaire dans la bibliographie pourrait le laisser penser215.
47En effet, l’identification de la muraille en tant que construction entièrement romaine a reposé sur une analyse de l’intérieur du mur au début des années 1930 : alors qu’on attribuait traditionnellement le socle mégalithique à une phase préromaine, J. Serra Vilaró a montré qu’il était constitué d’un double parement de gros appareil et que son remplissage était identique à celui du mur à bossage qui le surmonte, au moins jusqu’à une certaine hauteur (fig. 15, p. 336)216.
48Cette caractéristique interne suggère une phase unique217. En revanche, l’hypothèse de T. Hauschild, quant à elle, s’appuie essentiellement sur l’irrégularité des faces externes du mur, la partie mégalithique étant par endroits plus ou moins élevée, tandis que la partie supérieure présente, selon cet auteur, un état de conservation très inégal, tout en étant plus ou moins régulière dans sa structure218.
49Il estime ainsi que les différences de ce type entre le rempart oriental et la paroi de la Tour de Minerve prouvent l’antériorité de celle-ci : il croit notamment qu’elle est plus ancienne dans la mesure où son socle est plus haut, comme dans le cas des deux autres tours et des portions de muraille qui les relient219. Le caractère non décisif de cet argument avait pourtant été souligné par anticipation par J. Serra220. Ces critères externes se heurtent en outre à la difficulté de toujours bien faire la part des choses entre remaniements antiques, modernes et contemporains qui ont forcément altéré l’aspect du rempart221. De ce point de vue, la Tour de Minerve, qui constitue le pivot de l’argumentation en faveur de la double phase, est particulièrement problématique. On a récemment attiré l’attention sur sa possible démolition puis reconstruction au XVIe siècle, soulevant par là-même la question du réemploi de ses structures, et notamment du relief de Minerve222. Celui-ci fournit en effet à T. Hauschild son principal élément pour supposer l’antériorité de la tour, car il rappelle que l’image de la déesse, qu’il estime être à son emplacement originel, se trouvait jusqu’en 1932occulté par le mur oriental de la seconde phase (fig. 16, p. 338)223. Cet argument perd de sa force si l’on admet que l’emplacement actuel de ce relief est très vraisemblablement le résultat de manipulations modernes. Un élément nous paraît aller dans le sens des doutes exprimés par J. Sánchez Real : T. Hauschild insiste en effet sur la « significación especial » de cette décoration, dans la mesure où les deux autres tours en sont dépourvues. La présence d’un relief sur ce type d’architecture est en outre rarement attestée ailleurs dans le monde romain. Par conséquent, il estime que la façade orientale de la Tour de Minerve était la principale, ce qui lui semble prouver son hypothèse selon laquelle cet édifice était bien une tour d’angle lors de la première phase. Mais dans ce cas, comment comprendre qu’un décor aussi rare et lourd de sens se soit trouvé — très peu de temps après, si l’on suit la chronologie proposée par l’auteur — recouvert sans le moindre égard par le rempart de la seconde phase ? On le voit, la question est particulièrement complexe. Les sondages effectués au Bastion de Santa Bárbara qui ont fourni, selon T. Hauschild, la confirmation de sa théorie, n’offrent pourtant pas de solution satisfaisante. Ils introduisent au contraire une confusion nouvelle dans l’analyse du remplissage224. Toutefois, si la configuration des structures repérées à ce niveau devait bien attester d’éventuels réaménagements de la muraille dans le sens d’un renforcement de sa hauteur et de sa largeur, ce constat ne préjugerait pas pour autant de la succession chronologique de deux remparts de morphologie différente. L’érection d’une enceinte aussi imposante exigeait, par définition, une période longue : le rempart pouvait donc connaître des inflexions, de tracé comme de conception, au cours de sa réalisation225. Le problème se ramène par conséquent à la possibilité de fixer un terminus post quem au début du projet.
50Le matériel trouvé dans la muraille a été daté entre la fin du IIIe et le troisième quart du IIe siècle226. Comme seuls les fragments les plus récents doivent servir à étayer une datation, n’est-il pas possible d’envisager plutôt, dès la première étape du projet, une construction entre 150 et 125 ? En effet, contrairement à l’idée généralement admise, la mention d’un praesidium en 218 n’impliquait pas forcément la mise en place d’une architecture défensive aussi importante227. Rappelons que le récit de Tite-Live associe l’installation de cette garnison, dont on a déjà souligné la modestie, non pas avec la prise de Cissis, pourtant signalée au paragraphe précédent (XXI, 60, 7), mais comme la conséquence d’un raid d’Hasdrubal : celui-ci, ayant en effet surpris à proximité de Tarragone (procul Tarracone) les soldats de marine (classicos milites) et les matelots (socios nauales), négligemment dispersés dans la campagne après la victoire, avait réussi à en massacrer un grand nombre (cum magna caede)228. Un tel échec, subi immédiatement après la première victoire en bataille rangée contre les forces carthaginoises, était de nature à en ruiner le profit en fragilisant le réseau d’alliances que le général romain avait fraîchement établi le long du littoral entre Emporion et l’Èbre229. L’empressement de Scipion à réagir souligne l’importance de l’enjeu230. Mais surtout, avant son retour vers Emporion, le général romain prit ouvertement deux mesures : d’une part, la punition de certains des responsables du revers et, d’autre part, la mise en place de la garnison231. La mise en parallèle de ces deux mesures dans le récit montre que l’installation du praesidium n’était pas seulement destinée à renforcer stratégiquement le contrôle romain dans la zone la plus exposée à la menace punique, en raison de la proximité de l’Èbre qui, à ce moment, formait encore la limite nord de ce que Tite-Live appelle la Hannonis prouincia232. Alors que les sanctions prises à l’encontre des praefecti jouaient un rôle d’avertissement à destination des troupes romaines, la garnison de Tarragone constituait donc aussi, et peut-être même avant tout, un geste à l’intention des alliés indigènes, rappelant de cette façon que Rome tiendrait les engagements qui fondaient l’entrée de ceux-ci dans sa fides. Le récit se poursuit d’ailleurs en rapportant que, sitôt Scipion reparti, Hasdrubal chercha de nouveau à dévaster agros fidelium Romanis sociorum233.
51Le praesidium laissé alors à Tarragone était donc le produit des circonstances et du calcul politique, et il n’avait sans doute aucune dimension permanente. Rien ne permet d’assurer que le site a continué sans interruption à abriter par la suite d’importants contingents romains à l’intérieur d’une forteresse. Au contraire, il est frappant qu’en 195, Caton ait choisi pour débarquer ses troupes le port d’Emporion et non celui de Tarragone, pourtant déjà utilisé depuis 217 à cette fin234. Si son port avait été sécurisé dès cette époque par une fortification située sur la colline, comme on le pense en général, il est curieux que le consul ait jugé bon de s’en remettre plutôt à la fidélité des Grecs d’Emporion, soulignée à cette occasion par Tite-Live, alors qu’il disposait d’une base romaine puissante plus au sud235. C’est donc que celle-ci n’existait pas à l’époque sous la forme qu’on imagine ordinairement. Par conséquent, il nous semble clair que c’est bien la théorie d’une double phase de construction de la muraille qui a rendu nécessaire de dater la première phase des premiers temps de la seconde guerre punique, alors que le contenu des sources littéraires ne suggère rien de tel236. La définition de la ville par Pline comme colonia Tarracon Scipionum opus sicut Carthago Poenorum237 ne contredit pas ce constat, car l’expression ne doit peut être pas être prise dans son sens littéral. Pline fait référence au statut colonial de Tarragone, or on sait que la ville n’a pas obtenu de statut privilégié avant une époque très avancée, sans doute le milieu du Ier siècle238. Il ne peut donc vouloir dire que les Scipions ont créé la colonie de Tarragone. Peut-être faut-il seulement comprendre que les Scipions, tout comme les Barcides pour Carthagène, sont ceux dont les choix politiques ont déterminé le développement ultérieur de la ville239. En effet, dans les deux cas, l’importance historique de la ville résulte d’abord d’une tradition de gouvernement. Ainsi, dès 210, P. Scipion avait inauguré la convocation des représentants des différents peuples du Nord-Est à Tarragone240, imité en cela par Caton en 195241. Cette fonction symbolique accordée à la ville ne dépendait pas de la présence d’une forte garnison, puisqu’aucun de ces deux généraux n’avait particulièrement choisi d’y débarquer ses troupes. Il n’y a donc pas lieu de penser que, par la suite, l’association de Tarragone à l’activité du gouverneur de Citérieure ait modifié cet état de fait, d’autant plus que, passé le premier quart du IIe siècle, le littoral oriental n’est plus directement concerné par les guerres de conquête242. Le passage de relais entre Fulvius Flaccus et Sempronius Gracchus en 180 montre que les opérations administratives liées à l’incorporation des supplementa et au licenciement des ueteres milites pouvaient nécessiter le rapatriement des légions vers la capitale, mais le texte ne permet pas de déduire que les troupes étaient alors cantonnées dans la partie haute de la ville243. Au contraire, la procédure suivie par Gracchus ne semble pas être habituelle, puisqu’elle n’a pas été anticipée par son prédécesseur : si telle avait été la routine, on ne comprend pas pourquoi le nouveau gouverneur prit soin, non seulement de faire savoir à Flaccus qu’il devait conduire son armée à Tarragone, mais aussi de lui en expliquer la raison244. Cette anomalie s’explique aisément si l’on se souvient du litige survenu cette année-là à propos du renouvellement de l’armée de Citérieure : il s’agissait donc pour les deux généraux de contrôler soigneusement l’application du décret sénatorial qui avait cherché à satisfaire les revendications contradictoires de chacun245. Vraisemblablement, Gracchus réclamait la présence exceptionnelle de toute l’armée afin d’éviter, dans ce contexte de tension politique, toute fraude de la part de Flaccus. En temps ordinaire, il est probable que revenaient uniquement à Tarragone, afin de s’embarquer à destination de l’Italie, les soldats à qui le gouverneur sortant avait accordé leur congé. En revanche, des troupes en grand nombre devaient rarement séjourner sur place : même en 180, il est bien précisé que sitôt la répartition effectuée, Gracchus emmena ses troupes en Celtibérie246. Dans l’intervalle, on peut imaginer que l’ensemble de l’armée avait pu établir un ou plusieurs camps temporaires à proximité de la ville.
52Le rôle de capitale provinciale ne suffit donc pas à étayer de manière sûre, à Tarragone, le principe d’un double établissement où un praesidium romain aurait longtemps coexisté aux côtés de l’oppidum indigène. En revanche, ce rôle explique selon nous le besoin ressenti par l’agglomération de se doter progressivement d’une parure monumentale digne de la cité romaine qu’elle était devenue, non par le statut, mais par la fonction247. Résidence du gouverneur, centre administratif, point de transit des légions, Tarragone a connu en effet un développement économique important et constitué, pour cette raison, un foyer attractif pour une émigration romano-italique248. Aussi la construction d’un rempart imposant vers le milieu du IIe siècle, ou un peu après, pourrait-elle précisément correspondre à ce processus de transformation urbaine dont les modalités demeurent toutefois très mal connues pour l’époque préaugustéenne249. Si cette hypothèse était vérifiée, l’érection de l’enceinte actuellement visible serait donc entièrement à mettre en relation avec un projet urbain et non avec une nécessité strictement militaire, ce qui expliquerait pourquoi elle s’est produite dans le contexte de paix et de prospérité de la seconde moitié du IIe siècle250. Peu claire dans les textes, l’existence d’un praesidium stable s’avère une explication d’autant moins satisfaisante que nous avons vu précédemment les difficultés pour identifier de façon incontestable une « première phase » de la muraille, en réalité trop mal attestée. Ces incertitudes devraient nous inciter à renoncer à rattacher artificiellement cette supposée « première phase » à la seconde guerre punique ou aux premières décennies du IIe siècle, sous prétexte d’un praesidium qui n’a sans doute jamais existé sous cette forme : dans l’état actuel du dossier, rien n’interdit en effet de préférer supposer une phase unique de contruction de la muraille, débutée vers 150. Celle-ci a pu être menée progressivement, dans le contexte pacifié de cette période, sans urgence et en fonction des moyens disponibles, donnant ainsi naturellement lieu à une réalisation dont les différences de conception ne doivent pas surprendre251. Dans la partie haute de la ville, l’absence de structures internes antérieures à la seconde moitié du IIe siècle (et même antérieures au Principat) n’est pas une preuve de l’utilisation exclusive de cette zone à des fins de cantonnement de troupes pendant une longue période : outre le fait que les fouilles y ont été peu nombreuses, il faut tenir compte du développement monumental postérieur de la ville à cet endroit (en particulier la création des trois plateformes artificielles superposées de l’époque flavienne) qui a entraîné une altération profonde non seulement des éventuelles structures originelles, mais encore du terrain lui-même252.
53L’hypothèse d’un praesidium stable à Tarragone nous semble donc sans véritable fondement dans la documentation existante. L’intérêt qu’elle continue malgré cela à susciter dans l’historiographie s’explique surtout par un a priori, selon lequel il existait nécessairement un modèle d’occupation du territoire fondé sur l’installation d’un établissement militaire romain permanent à proximité d’un noyau urbain indigène préexistant, choisi en fonction de critères stratégiques et logistiques. Ainsi, ce n’est pas un hasard si l’interprétation traditionnelle des structures tarragonaises trouve une grande partie de sa légitimité apparente dans un rapprochement, toujours effectué, avec l’exemple du site d’Emporion /Ampurias. On croit en effet généralement que ce dernier offre une confirmation du schéma associant un praesidium à un centre urbain. Fondée au tournant des VIIe et VIe siècles, cette colonie phocéenne est devenue, comme son nom l’indique, un port (emporion) de première importance aux deux siècles suivants253. D’abord installée sur une île (Palaiapolis), elle a été rapidement déplacée sur le rivage (Neapolis)254. Vraisemblablement alliée aux Romains dès avant la seconde guerre punique, elle joua un rôle décisif à l’arrivée de ceux-ci en 218 et demeura un élément essentiel du dispositif de conquête tout au long du IIe siècle255. Vers 100 au plus tôt, une cité, dont le nom nous est inconnu, se développa sur la hauteur surplombant la Neapolis à l’ouest et se dota d’une muraille et d’édifices publics importants au cours du siècle suivant, témoignant de la prospérité de la ville nouvelle256. Or, on pense généralement que celle-ci fut précédée d’un camp permanent installé initialement sur la hauteur du Turó d’Empúries et dont la ville du Ier siècle constitua en quelque sorte le prolongement (fig. 17)257.
54C’est la découverte, à l’angle nord-ouest du forum augustéen, de deux tronçons perpendiculaires de murs en appareil mégalithique entourant un ensemble de citernes qui a fondé cette hypothèse d’un praesidium initial, datable du premier quart du IIe siècle et resté en fonction jusqu’à la fondation de la ville (fig. 18, p. 346)258. Les parallèles revendiqués avec Tarragone sont donc nombreux259 : choix d’un site surplombant la ville préexistante ; absence d’occupation préromaine ; transformation de ce premier établissement en ville, puis en colonie260. Plus tardive que celle de Tarragone, cette garnison emporitaine traduirait alors la volonté de Rome de renforcer son contrôle du littoral nord-oriental après la révolte de 197261.
55Il faut souligner cependant l’extrême fragilité des éléments permettant de prouver l’appartenance effective des structures mises au jour à un édifice militaire romain. Les restes conservés sont très fragmentaires : le mur d’orientation nord-sud, en gros appareil irrégulier, n’a pu être suivi que sur vingt-huit mètres, tandis que celui orienté est-ouest court sur une cinquantaine de mètres262. Ces mesures ont servi à suggérer un plan rectangulaire. Mais la trace d’un autre mur, également orienté nord-sud, pourrait remettre en question cette première restitution263. La datation repose sur le matériel céramique trouvé dans les contructions incluses dans le périmètre supposé de l’édifice : quatre citernes oblongues sous un quadrillage de petits murs. Cependant, on a remarqué à juste titre que, si la terre qui remplissait les citernes a livré quelques fragments de céramique campanienne A, susceptibles d’offrir une datation entre 175 et 150 (en raison de l’absence de Campanienne B), elle contenait surtout un grand nombre de fragments de céramique indigène264. Ce constat incite à la prudence à l’heure d’attribuer avec certitude la construction des citernes et des murs à un praesidium romain265. De fait, les données archéologiques ne permettent pas de rejeter l’éventualité d’une occupation préromaine du site, autre que résiduelle. Un certain nombre de silos, caractéristiques de l’urbanisme ibère, entourent ainsi la fortification romaine présumée266. D’autre part, la nécropole voisine de Les Corts n’est plus aujourd’hui considérée comme grecque ou italo-indigène, mais bien comme pleinement ibère267. Enfin, la description de la ville donnée par Tite-Live à l’occasion de l’arrivée de Caton en 195 met clairement en évidence l’existence à cette époque d’un oppidum Hispanorum, vraisemblablement situé dans la partie septentrionale du Turó d’Empúries, immédiatement au nord de l’édifice268. Le choix de l’emplacement de la future ville avait donc pu tout aussi bien résulter de cette première occupation.
56Bien entendu, ces réserves n’empêchent pas que le praesidium ait pu être installé sur la partie méridionale de la colline encore inoccupée, afin de garantir l’obéissance future de l’agglomération indikète, puisque celle-ci semble avoir sérieusement menacé la Neapolis grecque avant l’arrivée de Caton269. Mais, en dehors de la présence des structures dégagées sous le forum augustéen, le seul élément allégué en ce sens réside dans la mention problématique selon laquelle le consul avait installé à trois milles d’Emporion, c’est-à-dire à un peu plus de quatre kilomètres, un camp d’hiver (castra hiberna) où il laissa un praesidium modicum270. La localisation de ce camp a fait couler beaucoup d’encre271 : elle a été alternativement recherchée à l’emplacement même de la ville du Ier siècle272, à l’ouest de celle-ci vers l’intérieur des terres273, ou au contraire le long du rivage274. Ces différentes propositions ne sont cependant pas exclusives les unes des autres, car le récit de Tite-Live montre que l’armée de Caton n’était pas demeurée cantonnée à la même place entre le moment de son débarquement et la bataille d’Emporion275. À son arrivée, le consul resta très peu de temps à Emporion même (paucos ibi moratus dies Cato), emmenant immédiatement ses troupes ravager le territoire ennemi (profectus ab Emporiis agros hostium urit uastatque)276. Les castra Catonis, où M. Helvius rejoignit Caton après avoir vaincu en chemin vingt mille Celtibères277, correspondaient sans doute un camp temporaire établi au cours de cette opération. Peut-être ne se situait-il pas très loin de la ville grecque, mais nous croyons cependant qu’il faut le distinguer de celui où le consul reçut ensuite la délégation ilergète, car Tite-Live écrit : in Hispaniam interim consul haud procul Emporiis castra habebat278. En effet, l’indication de temps (interim) établit un parallèle avec le récit du périple d’Helvius vers Rome après son départ du camp de Caton, décrit par Tite-Live au paragraphe précédent. Il faut comprendre la précision suivante comme la mention d’un retour de Caton vers le littoral et traduire ainsi : « pendant ce temps, en Hispanie, le consul avait établi son camp non loin d’Emporion ». De façon similaire, Tite-Live présente l’établissement du camp d’hiver à trois milles de la ville grecque comme un nouveau mouvement, consécutif au stratagème employé pour tromper les ambassadeurs ilergètes :
Le consul, après avoir suffisamment donné le change, fit débarquer ses soldats. Comme la saison d’entrer en campagne approchait déjà, il établit un camp d’hiver à trois milles d’Emporion (trad. M. Nisard modifiée)279.
57Selon nous, rien ne permet donc de cumuler ces trois indications pour essayer de situer plus précisément un camp unique280. Elles se réfèrent plutôt à trois camps différents. Dès lors, il devient inutile de chercher à corriger l’indication de distance (trois mille pas) donnée par Tite-Live dans le dernier cas, afin de la rendre compatible avec le voisinage immédiat de la Neapolis281. Les castra hiberna devaient donc se trouver non pas sur le Turó d’Empúries, mais plus à l’ouest vers l’intérieur des terres282. Le déroulement du récit suggère du reste que les habitants de l’oppidum Hispanorum d’Emporion, incapables de résister à une armée romaine de cette taille, avaient abandonné leur ville dès le début des opérations pour gagner l’arrière-pays, où se trouvait l’armée rebelle283. Par conséquent, la présence d’une garnison romaine près du littoral ne s’imposait pas284. En outre, le praesidium laissé par Caton à la garde du camp ne peut de toute façon pas être interprété comme un établissement permanent : le contexte montre bien que le terme renvoie ici à une précaution élémentaire prise par les généraux en campagne, selon une pratique attestée par ailleurs285. En outre, il est bien précisé qu’une fois la victoire remportée, Caton leva son camp (confestim inde castra mouit) pour marcher directement vers Tarragone286. Aucun élément ne vient donc explicitement étayer l’idée que ce départ ait pu s’accompagner de la fondation d’un quelconque praesidium stable à côté de la ville indigène287. Cette dernière hypothèse tient par conséquent exclusivement à la volonté de ramener à des faits connus par les textes l’explication des structures retrouvées sous le forum. Toutefois il semble clair que, dans l’état actuel de la documentation, le doute doit être maintenu quant à leur interprétation définitive.
58L’ensemble des remarques qui viennent d’être effectuées, aussi bien à propos de Tarragone que d’Emporion, démontre que font défaut les éléments susceptibles de prouver solidement qu’un castrum ou un praesidium romain stable fut établi à proximité immédiate de ces agglomérations à des fins de contrôle, avant de fusionner avec elles pour donner ensuite naissance à des villes romaines288. Cette conclusion nous paraît importante, car elle oblige à envisager d’une façon moins systématique le rapport entre ville et garnison pendant la conquête, et à considérer ainsi avec plus de prudence les origines castrales souvent attribuées par défaut aux fondations urbaines romaines dans la péninsule Ibérique. Derrière cette question, ce sont bien entendu les aspects militaires des pratiques de contrôle des territoires par Rome qui doivent être réévalués.
LES MOYENS MILITAIRES D’UNE POLITIQUE DE CONTRÔLE
59Dans l’historiographie, les exemples de Tarragone et d’Emporion sont régulièrement invoqués comme des précédents pour justifier l’association d’autres agglomérations hispaniques (et en particulier les fondations nouvelles) à l’établissement de postes militaires romains stables, au fur et à mesure de la progression des armées. En somme, on considère, sur cette base, que les besoins stratégiques des armées de conquête ont déterminé en profondeur la carte de l’urbanisation de la Péninsule. Les limites d’une telle vision du développement urbain ont été rappelées à juste titre par P. Le Roux289. Il semble que la fragilité des dossiers relatifs à Tarragone et Emporion, que nous croyons avoir établie dans les pages qui précèdent, ne peut que renforcer cette critique de méthode et pousser à rechercher des modèles alternatifs, dans lesquels le quadrillage de l’espace péninsulaire par des praesidia permanents ne constituerait plus une clé d’explication toute faite.
60Il est frappant de constater en effet qu’une origine militaire, ou tout au moins une phase initiale de coexistence entre praesidium et oppidum, est commodément prêtée à de nombreux sites, sur la foi d’indices pourtant très ténus290. À Italica, on a ainsi cru pouvoir mettre en relation une section de fossé fouillée sur le site d’El Olivar, à l’ouest de Santiponce, avec un établissement militaire primitif auquel auraient alors peut-être appartenu les restes du capitolium retrouvé sur le Cerro de los Palacios291. S. Keay a souligné récemment, de façon convaincante, la fragilité de cette interprétation qui repose sur des vestiges extrêmement fragmentaires292. Selon la restitution traditionnelle, le site de Corduba aurait également abrité une base militaire avant la fondation de la ville romaine dont elle aurait favorisé naturellement l’emplacement dans la seconde moitié du IIe siècle293. Pour A. Ibáñez, cette base correspondrait même à un camp établi par L. Marcius en 206, mais une telle hypothèse ne repose sur aucun fondement294, en dehors de la conviction préétablie selon laquelle les principales villes romaines d’Hispania procédaient habituellement de la fusion d’un camp militaire originel et d’une ville indigène295. En réalité, la fondation de Marcellus à Corduba fut bien celle d’un établissement civil, sans lien avec un quelconque praesidium préexistant296. Rien n’assure même que la ville abrita une garnison après sa fondation297. Quant à Metellinum, régulièrement citée comme une position militaire déterminante tenue à l’origine par une garnison avant de se transformer en agglomération puis en colonie, il est frappant de constater qu’aucune source n’y fait la moindre allusion. Les circonstances de sa possible fondation par Caecilius Metellus Pius recouvrent en effet une lacune importante de la documentation, muette sur cette partie de la guerre sertorienne298. D’un point de vue archéologique, les niveaux d’occupation républicains demeurent complètement inconnus, comme l’illustre l’absence totale de céramique campanienne B299. On ne saurait par conséquent considérer Metellinum comme un exemple bien établi d’établissement militaire de l’époque de la conquête. Le dossier, aussi bien littéraire qu’archéologique, concernant les éventuelles fondations pompéiennes (Pompaelo300 et peut-être Gerunda301) est tout aussi problématique. D’une manière générale, même en l’absence de toute trace (notamment archéologique), on en vient désormais à supposer une origine castrale par simple vraisemblance : citons par exemple les propositions récentes concernant Palma, Pollentia et Sanisera dans les Baléares302, La Cabañeta303 et Augustobriga304 dans la vallée de l’Èbre, ou encore Lucentum, dans la province d’Alicante305.
61Autant dire que les praesidia urbains, pas plus que les autres formes de garnisons étudiées précédemment, ne sont, dans leur version permanente, une réalité bien attestée de l’Hispania républicaine. Faut-il s’en étonner ? Le développement d’un véritable réseau d’établissements militaires soulève en effet de multiples difficultés. Même en admettant que les opérations de la seconde guerre punique aient conduit à l’installation de quelques praesidia stables, il est peu probable que Rome ait eu les moyens humains de multiplier ensuite de telles garnisons sans affaiblir dangereusement ses disponibilités en effectifs et donc sa capacité à mener la guerre au cours des décennies suivantes306. Les réticences de Caton en 195 à diviser excessivement son armée alors qu’il disposait de deux légions, soit le double de l’effectif ordinairement affecté à la Citérieure, suffisent pour en douter307. De même, le rassemblement périodique des troupes au début de chaque saison de campagne, bien attesté par les sources, renvoie à la dispersion éphémère propre aux quartiers d’hiver et non à la nécessité d’alimenter un improbable réseau de garnisons dont le général aurait été obligé de tirer ses troupes en cas de besoin308. Inversement, certaines dispositions prises par les généraux impliquent qu’ils ne disposaient pas de postes fixes, même à des endroits jugés stratégiques. En 208, aucune garnison romaine n’avait été prévue pour s’opposer à un éventuel passage d’Hasdrubal vers l’Italie, pourtant annoncé depuis 216 : ce n’est qu’après la bataille de Baecula que Scipion se décida à envoyer des troupes dans le piémont pyrénéen309. Deux siècles plus tard, la situation n’a guère changé : en 49, les praesidia placés par Afranius et Petreius dans les cols des Pyrénées ont sans doute fait partie des préparatifs en vue de l’arrivée de Fabius310. En Ultérieure, Varron n’entreprit de sécuriser certaines agglomérations qu’une fois la victoire de César connue et en prévision de sa venue prochaine. Selon le Bellum Ciuile, il envoya une garnison à Gades, pour veiller sur le trésor de guerre qu’il y avait fait transporter, et aussi dans les villes qu’il soupçonnait d’incliner en faveur de son adversaire311. La suite du récit laisse supposer que ces villes, à la loyauté incertaine, comptaient parmi elles Carmona et Cordoue312. Cela signifie qu’elles n’abritaient donc pas auparavant de garnisons, en dépit de leur importance, et qu’en règle ordinaire les cités jugées fidèles échappaient à de telles mesures. En effet, si les principales villes des provinces avaient normalement comporté des contingents dans leurs murs, on ne comprendrait pas le besoin ressenti par l’auteur du Bellum Hispaniense d’expliquer la présence d’une garnison à Cordoue en 45 sous les ordres de Sextus Pompée313. D’une manière générale, les diverses mentions de garnisons urbaines ne peuvent être confirmées en dehors du contexte précis de la campagne au cours de laquelle elles apparaissent dans la documentation314.
62Au-delà de ces objections, il faut enfin souligner que la notion même de réseau, liée à celle d’un modèle appliqué et développé par Rome au cours de la conquête, suppose l’existence d’une politique cohérente d’occupation des espaces dans laquelle l’installation de garnisons militaires aurait tenu une place prépondérante. Or les traces d’une telle politique n’apparaissent pas clairement315. À ce titre, il est peu probable, contrairement à ce qu’affirme R. C. Knapp, que la question de l’installation d’une garnison dans une agglomération constitua une exigence presque toujours incluse dans les traités qui réglaient le sort d’un vaincu316. Le texte de Tite-Live qui soutient un tel point de vue est celui où, à l’occasion de la défaite ilergète de 206, l’historien padouan rappelle que les Romains avaient pour usage de ne pas considérer une capitulation comme officielle tant que l’adversaire n’avait pas livré toutes ses possessions, donné des otages, rendu ses armes et reçu garnison dans ses villes317. Mais nous pensons qu’il s’agit là d’une définition de la deditio dont on sait qu’il faut distinguer la portée symbolique et juridique de sa traduction concrète, comme le montre la modestie des dispositions attestées par la Tabula Alcantarensis datée de 104318. La deditio exprimait, on l’a vu, la reconnaissance de la toute-puissance du vainqueur, mais ne préjugeait pas du contenu réel du traitement réservé par Rome au vaincu. Ainsi, la remarque de Tite-Live précède immédiatement, dans le récit, l’éloge de la générosité de Scipion vis-à-vis des chefs Mandonius et Indibilis auxquels il n’imposa en fin de compte qu’un simple dédommagement financier. Les rares exemples de deditio connus par les textes, dans le cadre d’une reddition, vont dans le même sens. À Cauca en 151, c’est seulement dans un second temps, une fois les garanties nécessaires à la conclusion du traité données, que Lucullus demanda à faire entrer une garnison dans la ville319. Cette requête apparaît ainsi comme une exigence supplémentaire et non comme partie intégrante des dispositions du traité. De même, en ce qui concerne Gades en 206, on admet généralement que Lucius Marcius y avait installé une garnison, mais que cette initiative était distincte des conditions prévues par la reddition volontaire de la ville320. L’installation probable de la garnison tenait avant tout au souci d’assurer le contrôle de l’ultime base carthaginoise d’importance à un moment où tout retour punique dans la Péninsule n’était pas encore écarté. On ne peut exclure par conséquent que le praesidium de 206 ait été retiré de la ville après la victoire de Zama et la capitulation définitive de Carthage321. Comme dans le cas de Cauca où il s’agissait de faciliter le massacre prémédité de la population, l’installation d’un praesidium à Gades répondait donc à des besoins circonstanciels et non à une mesure systématique322. L’absence de toute référence à la question des garnisons dans les traités gracchiens confirme l’idée qu’une prestation de ce type n’avait rien d’automatique323. En revanche, elle faisait partie des services qu’une cité alliée — ce qu’étaient devenues Cauca et Gades en vertu de leur deditio — ne pouvait refuser à l’autorité romaine si celle-ci en manifestait la volonté.
63La deditio permettait donc effectivement à Rome de placer des garnisons chez les peuples vaincus, mais il semble que celle-ci s’en abstenait la plupart du temps. Si un dispositif militaire de contrôle, fondé sur des praesidia, avait été la règle, ni les Ilergètes en 206/205, ni les Bergistans en 195 n’auraient eu les mêmes facilités pour se révolter plusieurs fois successivement324. En 152 encore, le retrait d’Atilius hors de Lusitanie provoqua le soulèvement immédiat des peuples qu’il venait pourtant de vaincre325. Ces épisodes suggèrent donc l’absence d’un véritable réseau de postes défensifs. D’ailleurs, le récit entier de la guerre civile en 45 montre que le but principal des garnisons ne pouvait être de sécuriser l’ensemble d’un territoire en le verrouillant. Ainsi, les fortes garnisons pompéiennes défendant les principales villes d’Ultérieure n’empêchèrent nullement César de circuler librement dans la province, assiégeant ces agglomérations les unes après les autres. Le contrôle des provinces ibériques passait donc par d’autres voies326. Un fameux passage d’Appien relatif à l’Italie nous en donne très certainement une clé, en rappelant que l’originalité du système romain reposait notamment sur le développement d’une politique d’urbanisation, sous forme de déductions coloniaires, ex nouo ou non327. L’exportation des méthodes de contrôle élaborées lors de la conquête de l’Italie et adaptées aux conditions rencontrées outre-mer est attestée en Hispania par la fondation précoce de nouveaux noyaux urbains sur le modèle romain et par la réorganisation de centres préexistants à l’intérieur des régions où s’affirmait l’influence de Rome, qu’il s’agisse de la vallée de l’Èbre (Gracchurris, Pompaelo), de la côte levantine (Valentia) ou de l’Andalousie actuelle (Carteia, Iliturgi, Corduba)328. Bien que la population de ces villes pût intégrer parfois des soldats romano-italiques, il ne s’agissait nullement de fondations militaires proprement dites, dans un but stratégique329. En stabilisant des populations et en favorisant la promotion de centres destinés à recomposer durablement la hiérarchisation des espaces, ces interventions contribuaient à restructurer certains des territoires conquis selon les besoins des conquérants330. Parallèlement à ces initiatives directes des pouvoirs romains, restées sans doute minoritaires, il faut tenir compte également du relais assuré par les peuples et les cités alliés, fondamental dès les débuts de la présence romaine331. Constituant une alternative efficace à la multiplication dangereuse des garnisons romaines, le contrôle quotidien exercé, sous le regard du magistrat chargé des provinces, par les communautés indigènes sur leurs territoires s’inscrivait ainsi dans la marge d’autonomie que Rome leur laissait en contrepartie de leur soumission.
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64En dépit des lacunes évidentes de notre documentation, on ne peut guère douter du fait que les garnisons établies par les armées romaines dans la péninsule Ibérique furent très nombreuses au cours de la conquête. En revanche, il est peu probable que les villes et les territoires d’Hispanie aient, sur ce plan, éprouvé une occupation autre que temporaire. Aucun élément ne vient en effet appuyer l’idée que Rome organisa la mise en place, même en des points jugés stratégiques, de garnisons permanentes destinées à maintenir l’ordre dans les provinces et à assurer, sur le long terme, sa maîtrise des Hispaniae332. La restitution d’un réseau cohérent de praesidia, qui forme la condition nécessaire pour conclure au développement de méthodes de contrôle territorial fondées sur la création de postes militaires permanents ou semi-permanents, se heurte à des obstacles méthodologiques majeurs : outre les incertitudes nombreuses d’identification et d’interprétation des établissements supposés, ni leur simultanéité, ni leur planification dans le cadre d’une politique systématique ne peuvent être prouvées. Sur le plan archéologique, les traces matérielles du passage ou du stationnement des armées de conquête ont été considérablement surévaluées, et l’abondance des mentions de camps républicains dans la bibliographie masque mal la fragilité des conclusions, très souvent tirées arbitrairement de données insuffisantes et de conceptions préétablies. Le rôle joué par les armées romaines dans le contrôle des territoires conquis n’apparaît donc pas clairement. Face à ce dossier décevant, il convient de se demander si certaines particularités de la présence prolongée des légions sur le sol ibérique, comme l’obligation de loger les troupes pendant l’hiver dans des cantonnements adaptés (castra hiberna), n’auraient pas toutefois conduit Rome à développer des solutions qui conférèrent à ces contingents une importance spécifique dans ce domaine.
Notes de bas de page
1 La liste en est donnée infra, p. 327, n. 194.
2 Après les FHA d’A. Schulten, l’étude pionnière en la matière est celle d’A. García y Bellido, « Del carácter militar activo de las colonias romanas de la Lusitania y regiones inmediatas », pp. 299-304 ; la méthode, ainsi qu’une partie des conclusions, ont été reprises par R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, pp. 21-28. Ce dernier assure ainsi (p. 21, n. 17) que le caractère tardif de ces sources, en particulier des Itinéraires, qu’il date sommairement du IIe siècle de notre ère, n’interdit pas une telle approche. On peut toutefois faire remarquer que la datation de ces documents est à rabaisser considérablement : l’Itinéraire d’Antonin est désormais considéré comme une compilation de la fin du IIIe siècle, voire du milieu du IVe ; de même, l’Anonyme de Ravenne est une compilation de l’extrême fin du VIIe ou du début du VIIIe siècle, abrégeant vraisemblablement des sources du Ve siècle. Sur ces documents essentiels, voir l’édition de J. M. Roldán Hervás, Itineraria hispana, ainsi que la précieuse mise au point donnée par P. Sillières, Les voies de communication de l’Hispanie méridionale, pp. 20-40. Voir également la rapide synthèse de R. Chevallier, Les voies romaines, pp. 53-60. Seuls Mela, Pline et Ptolémée livrent donc une information de la fin du Ier siècle après J. -C., pour les deux premiers, et de la première moitié du IIe siècle après J. -C., pour le second.
3 Pour chaque toponyme, sont rappelées en note les principales sources, ainsi que les références bibliographiques où l’on trouve les hypothèses plus précises de localisation, si elles existent, mais sur lesquelles on ne reviendra pas ici en détail afin de ne pas alourdir le propos.
4 CIL, II, 504 ; Pomponius Mela, III, 4. A. García y Bellido, « Del carácter militar activo de las colonias romanas de la Lusitania y regiones inmediatas », p. 301. Mais It., 418, 1 et Rav. 306, 15, donnent Ebora, tout comme Pline, NH, III, 10.
5 Pline, NH, III, 12 ; R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 25 ; A. Tovar, Baetica, p. 130.
6 Pline, NH, III, 10 ; R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 27.
7 It., 402, 7 ; Ptolémée, II, 4, 9 ; J. M. Roldán Hervás, Itineraria hispana, p. 227 ; A. Tovar, Baetica, p. 105.
8 Pline, NH, III, 10 ; A. García y Bellido, « Del carácter militar activo de las colonias romanas de la Lusitania y regiones inmediatas », p. 302 ; A. Tovar, Baetica, pp. 131-132.
9 It., 406, 1 ; J. M. Roldán Hervás, Itineraria hispana, p. 231 ; A. Tovar, Baetica, pp. 74-75.
10 It., 445, 3 ; Vicarell., 1, 18 (CIL, XI, 3281) ; 2, 18 (CIL, XI, 3282) ; 3, 18 (CIL, XI, 3283) ; 4, 20 (CIL, XI, 3284) ; Rav., 313, 18, donne Marimana. J. M. Roldán Hervás, Itineraria hispana, p. 248 ; A. Tovar, Tarraconensis, p. 171.
11 Bell. Hisp., VIII, 6 ; A. Schulten, FHA, V, p. 130 ; R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 26 ; A. Tovar, Baetica, p. 100.
12 It., 434, 1 ; A. Schulten, FHA, IV, pp. 173-174 ; R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 28 ; J. M. Roldán Hervás, Iterab Emerita Asturicam, pp. 89-90.
13 Pline, NH, IV, 117 ; Ptolémée, II, 5, 8 : Καιϰιλία ; mais It., 433, 4, donne Castris Caecilis et Rav., 319, 14, seulement Castris ; leur identité est toutefois admise, à la suite de la proposition d’A. Schulten, par J. M. Roldán Hervás, Itineraria hispana, p. 229 ; Id., Iter ab Emerita Asturicam, pp. 80-83 ; A. Tovar, Lusitanien, p. 237.
14 It., 417, 2 ; Rav., 306, 17 (Celiana) ; J. M. Roldán Hervás, Itineraria hispana, p. 225 ; J. de Alarcão, Portugal romano, pp. 40 et 70 ; A. Tovar, Lusitanien, p. 216.
15 Pline, NH, IV, 117 ; A. Schulten, FHA, IV, p. 123 ; A. Tovar, Lusitanien, p. 238.
16 Ptolémée, II, 5, 8 : Λιϰινίανα ; It., 438, 5, qui donne seulement Leuciana, en est considéré comme l’équivalent par A. Schulten, FHA, IV, p. 153 et R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 26. Mais J. M. Roldán Hervás, Itineraria hispana, p. 246, n’en dit rien. En revanche, A. Tovar, Lusitanien, pp. 233-234, fait de Leuciana et Liciniana deux sites différents.
17 CIL, II, 5320 ; A. García y Bellido, « Del carácter militar activo de las colonias romanas de la Lusitania y regiones inmediatas », p. 301.
18 CIL, II, 172 (Aritiense oppidum uetus. Aritienses) ; A. García y Bellido, « Del carácter militar activo de las colonias romanas de la Lusitania y regiones inmediatas », p. 301, considère que la mention uetus suggère que le toponyme similaire fourni par les sources tardives ferait peut-être référence à une agglomération différente, mais voisine (novus ?) : Ptolémée, II, 5, 6 (Ἀϱίτιον) ; It., 418, 8 (Aritio Praetorio) ; Rav. 316, 7 (Aretio Praetorion) ; il est suivi par R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, pp. 21-22 ; mais J. M. Roldán Hervás, Itineraria hispana, p. 216, ne fait pas la différence. Quant à A. Tovar, Lusitanien, p. 268, il distingue Aritium et Aritium praetorium.
19 Ptolémée, II, 5, 6 ; R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 23 ; A. Tovar, Lusitanien, p. 216.
20 It., 431, 10 (Praesidio) ; J. M. Roldán Hervás, Itineraria hispana, p. 260 ; A. Tovar, Baetica, p. 170.
21 CIL, II, 5353 ; l’identification de ces lieux est incertaine : rattachant ce toponyme au sud-ouest, R. C. Knapp prétend se fonder sur l’interprétation d’A. García y Bellido, « Del carácter militar activo de las colonias romanas de la Lusitania y regiones inmediatas », p. 301. Or celui-ci revendique au contraire une localisation de ces postes dans le quart nord-ouest de la Péninsule.
22 CIL, II 2520 ; A. García y Bellido, « Del carácter militar activo de las colonias romanas de la Lusitania y regiones inmediatas », p. 301. Même remarque que pour la note précédente.
23 It., 450, 3 ; J. M. Roldán Hervás, Itineraria hispana, p. 219 ; A. Tovar, Tarraconensis, p. 379.
24 Tite-Live, frgt. XCI, 3.
25 Tite-Live, XXIX, 2, 9. R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 27, n. 41 : « A legio decima could have had a camp here and left its name for the site ». À sa suite, Decum (a) figure régulièrement, dans la bibliographie, sur les cartes indiquant les lieux stratégiques de la conquête. Voir J. M. Blázquez Martínez et Á. Montenegro Duque, Historia de España, t. II (1), p. 70, fig. 45 ; J. M. Blázquez Martínez, Á. Montenegro Duque et J. M. Solana Sáinz, Historia de España, t. III, p. 73 ; W. Trillmich et alii, Denkmäler der Römerzeit, p. 3, fig. 1.
26 L’édition Teubner de C. Mayhoff, publiée en 1906, donne en effet Detumo, avec ses variantes (detuma, detummo), tout en mentionnant la variante decumo/ decuma comme une lectio vulgata des premiers éditeurs (I. B. Palmarii editio Veneta, 1499) qui avait été, initialement, celle reprise dans la première édition Teubner de L. Ian en 1854 ; pour cette raison, Decuma est la seule forme donnée par les éditions de M. E. Littré en 1883 et de H. Rackham, dans la collection Loeb, en 1938 ; en revanche, elle ne figure même plus dans l’apparat critique de H. Zehnacker dans son édition CUF de 1998.
27 Ainsi, R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 27, n. 41, n’écarte pas lui-même une hypothèse bien éloignée d’un contexte militaire : celle d’un centre collecteur de la dîme (decuma). Cette alternative ne paraît guère plus convaincante. Elle suffit cependant à montrer la fragilité du raisonnement.
28 Sur cette fonction du praesidium, sur les uiae militares notamment, voir P. Sillières, Les voies de communication de l’Hispanie méridionale p. 786, qui renvoie en outre à H. -G. Pflaum, Essai sur le cursus publicus sous le Haut-Empire romain, pp. 34-36. L’auteur fait de ce type d’établissement l’équivalent officiel des grandes tabernae qui jalonnaient ordinairement les routes ; sur le lien des praetoria avec les fonctionnaires impériaux sur la via Augusta, voir M. Chalon, « Le caractère public de la via Domitia », pp. 20-21.
29 De fait, ni Praetorium, ni Praesidium ne sont attestés par l’épigraphie. Dans le cas d’Aritium Praetorium par exemple, l’inscription mentionnant peut-être Aritium ne donne pas le second terme. Voir supra, p. 282, n. 18.
30 R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 22, n. 20, déclare sur ce point se rallier à l’opinion exprimée par A. Schulten, FHA, IV, p. 175 : « Schulten is surely correct in seeing that names like Caeciliana apply to military camps ». Ce type de dénomination existe en effet dans la documentation en relation avec un contexte militaire : Castra Postumiana (Bell. Hisp., VIII, 6), Castra Corneliana (César, BC, II, 24). Suite à ces travaux, on admet généralement que ces toponymes renvoient à un site militaire primitif ; en dernier lieu, accord, par exemple, de G. Bandelli, « La colonizzazione romana della Penisola Iberica », pp. 110.
31 Le fait a été souligné par Á. Montenegro Duque, « Toponimia latina de España », p. 523. L’objection est prise en compte par R. C. Knapp qui la considère toutefois comme moins probable dans les cinq cas dont il est question.
32 R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 22, n. 20 : « Where a post name fits well with the stage of Roman control at the time of the namesake governor, there is a reason to suppose that the governor orlegate gave his name to the site. » Il est suivi par J. J. Sayas Abengochea, « Estacionamiento de tropas en Lusitania y el campamento de Cáceres », pp. 236 et 237, n. 9, et par M. A. Marín Díaz, Emigración, colonización y municipalización en la Hispania republicana, pp. 87-88. À la liste proposée par R. C. Knapp, on pourrait en outre rajouter Manliana (Ptolémée, II, 5, 7), près de Caparra, que A. Schulten, « Ein römisches Lager aus dem sertorianischen Krieges », col. 79, met, dans le même esprit, en relation avec le Manlius qui gouverna l’Ultérieure en 182. Voir A. Tovar, Lusitanien, p. 241.
33 R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 22, suppose commodément que le M. Atilius Serranus attesté à la tête de l’Ultérieure en 152 a pu faire campagne très au Nord. Mais rien dans Appien, Ib., 58, seul à mentionner le personnage, ne permet de fonder une telle hypothèse. Quant à l’alternative, proposée également par le même auteur, selon laquelle C. Atilius Serranus, préteur en 109, aurait pu servir en Citérieure dans la mesure où aucune province ne lui est connue par ailleurs, elle est entièrement gratuite et procède avant tout du souci de fournir un contexte chronologique plus cohérent avec une pénétration très avancée à l’intérieur des terres. L’impasse de ces déductions est du reste reconnue par l’auteur lui-même, puisqu’il prend soin de conclure ainsi : « The name may otherwise derive from a legatus or a praefectus ». Autant dire, au fond, qu’on n’en sait rien…
34 Localisé par l’Itinéraire d’Antonin sur la route Salacia-Olisipo, ce site est traditionnellement rapporté à Q. Caecilius Metellus Pius depuis A. Schulten, Sertorio, p. 96, puisque ce personnage est le seul membre connu de la gens Caecilia à avoir gouverné la province d’Ultérieure. Il est suivi par F. García Morá, Un episodio de la Hispania republicana, p. 96. Toutefois, sans écarter cette hypothèse, R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 23, estimant que « an earlier date would be preferable », profite de la mention répétée de Caecilii en Citérieure, pour donner sa préférence à Q. Caecilius Macedonicus, gouverneur de cette province en 142, tout en suggérant deux alternatives « less likely » : C. Caecilius Metellus Caprarius, ayant servi sous les ordres de Scipion en 134-133 (Cicéron, De Orat., II, 267) ou Metellus Nepos en 101, dont la présence n’est pourtant pas attestée en Péninsule. Son but consiste donc à replacer à toute force au IIe siècle une fondation dont la datation ordinaire n’est pas, du reste, prouvée avec certitude.
35 Aucun Cilnius n’ayant, à notre connaissance, détenu de charge officielle sous la République, R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 24, hasarde : « Perhaps a Cilnius served under Scipio in Iberia and was in charge of establishing this post. »
36 Ibid., p. 21, n. 17, justifie ainsi son interprétation des données pourtant tardives des Itinéraires : « This should not hinder linking the camps to the initial period of the conquest, as there would be scant reason to establish new castra orpraesidia after the pacification was completed. There would especially have been no reason to station new posts in Baetica, where most of the castra appear. »
37 Ibid., p. 24 : « Cilniana perhaps dates from the late third or second century B. C. »
38 Ibid., p. 23 : « It is tempting to think that this post represents agarrison in the neighbourhood of the town settled by Servilius Caepio (Ulterior140-139) with veterans from the Viriathic war […]. Such a post would have been a wise safeguard against a resurgence of Lusitanian raiding. » Même principe en ce qui concerne Calpurniana, dont la proximité de Cordoue alimente le lien avec C. Calpurnius Piso, gouverneur d’Ultérieure en 186-185. On peut remarquer cependant que si le Καλπουϱνίανα de Ptolémée trouve un écho dans le Calpurniana de l’Itinéraire d’Antonin, il n’en va pas de même de Caepiona, seulement déduit du ϰαιπ'ιαν donné par le géographe grec. J. de Alarcão, Roman Portugal, pp. 4 et 8, admet cependant que Caepiana a bien été un camp de Servilius Caepio. Dernièrement, une hypothèse alternative a été présentée par A. Guerra, « Caepiana », pp. 217-235 : tout en pointant les difficultés de méthode d’une identification fondée essentiellement sur la toponymie, ce travail admet l’identification de Caepiana avec le site de Chibanes (Palmela). Comme la phase IIB de celui-ci est datable archéologiquement de la fin du IIe siècle, cela paraît aux yeux de l’auteur un élément plus probant pour fonder plutôt un lien avec le gouverneur de l’Ultérieure en 109, Q. Servilius Caepio, fils du précédent. La démonstration implique toutefois d’admettre que le faciès archéologique du site atteste nécessairement une présence militaire, ce qui n’est pas du tout certain (voir infra, pp. 322-323, sur ce type de critères).
39 En ce qui concerne Atiliana, voir ainsi les critiques justifiées exposées par F. Pina Polo et J. Á. Pérez Casas, « El oppidum Castra Aelia y las campañas de Sertorius », pp. 256-257, qui rejoignent les remarques qui viennent d’être formulées. Ces auteurs doutent également, à juste titre, que Caeciliana, Caepiona, Calpurniana aient une origine militaire. À leurs yeux, seule Castra Aelia peut être considérée, dans la région, comme une agglomération fondée à partir d’un camp républicain.
40 P. Sillières, Les voies de communication de l’Hispanie méridionale, p. 802, a montré que ces deux toponymes, auxquels il rajoute Mariana, s’expliquent probablement ainsi, puisque les stations routières portaient en général le même nom que le domaine sur lequel elles étaient installées : de fait, la prospection atteste la présence de grandes villae à proximité du lieu probable de ces mansiones. En outre, l’épigraphie fait état d’une très grande diffusion du gentilice Calpurnius en Bétique (ibid., p. 322, n. 394). Il est suivi par C. González Román, « La no ciudad en la Bética », pp. 195-196. La même révision a eu lieu pour Atiliana, dans la haute vallée de l’Èbre : A. Tovar, Tarraconensis, p. 379, estime qu’il pourrait s’agir d’un fundus.
41 Cette tradition abusive a été relevée à juste titre par L. A. García Moreno (dir.), Hispani Tumultuantes, p. 92.
42 L’assimilation hâtive du site à des castra a conduit A. Schulten, FHA, IV, p. 153, à attribuer sa fondation à P. Licinius Crassus lors de son proconsulat d’Ultérieure en 98-93 ; de la même manière que pour Caeciliana, R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 26, préfère pour sa part une datation plus haute et propose C. Licinius Nerva en 166 (Tite-Live, XLV, 16, 3) ou L. Licinius Lucullus en 151-150. Il privilégie la seconde solution, bien que L. Licinius ait été gouverneur de Citérieure, dans la mesure où il a mené conjointement campagne en Ultérieure avec Galba en 150 (Appien, Ib., 59).
43 A. Schulten, Sertorio, p. 106, situe la ville à la confluence du Jalón et de l’Èbre et estime qu’elle s’y était développée à partir d’un camp militaire dont la date de fondation n’est pas possible toutefois à déterminer. Il est suivi par R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, pp. 24-25, qui s’avance cependant à rapporter ce camp aux campagnes de Fulvius Flaccus ou de Sempronius Gracchus en 180-179. Plus récemment, certains travaux ont proposé des identifications plus précises : F. Pina Polo et J. Á. Pérez Casas, « El oppidum Castra Aelia y las campañas de Sertorius », pp. 247-249, pensent qu’il s’agit à l’origine d’un camp stable construit dans la décennie 170 pour contrôler la Celtibérie et qui pourrait tenir son nom de Q. Aelius Patus, dont ces auteurs proposent de faire le gouverneur d’Hispania Citerior en 170. En outre, contrairement à l’hypothèse de Schulten, ils estiment qu’il faut localiser la ville au nord de l’Èbre et suggèrent de la situer sur le site d’El Castellar-Valdeviñas (Torres de Bellerén, Saragosse), où ont été découverts en prospection de nombreux fragments de céramique (locale et campanienne) et des structures en dur. Cette identification a été depuis contestée au profit du site de La Cabañeta (El Burgo de Ebro, Saragosse), où les fouilleurs voient dans le plan rectangulaire du site la trace du camp primitif : A. Ferreruela Gonzalvo et J. Mínguez Morales, « “La Cabañeta” », p. 212 ; Id., « Secundum oppidum quod castraAelia vocatur », pp. 671-682. Dans le débat, il faut cependant tenir peut-être davantage compte des arguments de F. García Morá, « Castra Aelia », pp. 281-288, qui a montré que, chez Tite-Live, le nom de l’oppidum provenait sans doute d’une corruption de la tradition manuscrite et qu’il serait donc inutile de rechercher à tout prix une fondation militaire pour l’agglomération. Il est suivi par M. Beltrán Lloris, « Roma. República », p. 13, plus hésitant en revanche dans la deuxième partie de cette chronique : Id., « Roma. República », II, pp. 429-430. En revanche, F. Burillo Mozota, Los Celtíberos, pp. 173 et 208, inclut le site dans sa liste de camps romains stables.
44 Pline, NH, IV, 117 : coloniae […] Norbensis Caesarina cognomine : contributa sunt in eam Castra Seruilia, Castra Caecilia.
45 CIL II, 693 : COL. NORB. CAESARIN. Ce document est considéré comme une preuve suffisante parJ. M. Roldán Hervás, Iterab Emerita Asturicam, p. 82, qui reprend parailleurs l’argumentation de C. Callejo Serrano, El origeny el nombre de Cáceres, pp. 47-50. Mais la variété des propositions concernant l’emplacement exact de la colonie est rappelée par J. J. Sayas Abengochea, « El caso de Norba Caesarinaysu contributa, Castra Serviliay Castra Caecilia », p. 65. La critique la plus audacieuse de l’hypothèse en faveur de Cáceres a été formulée par G. Arias, « En torno a Norba Caesarina », pp. 211-221, reprenant un article paru en 1965. Indépendamment de cette polémique, la date de la fondation de la colonie, quant à elle, peut-être rapportée à C. Norbanus Flaccus, unique gouverneur des deux provinces entre 36 et 34. VoirH. Galsterer, Untersuchungen zum römischen Städtewesen, pp. 23-24 ; P. Le Roux, L’armée romaine et l’organisation des provinces ibériques, p. 51. Il est toutefois possible, comme l’a suggéré A. García y Bellido, « Dictamen sobre la fecha fundacional de la Colonia Norbensis Caesarina, actual Cáceres », p. 286, que Norbanus ait mené à bien un projet de César, ce qui expliquerait le cognomen Caesarina.
46 J. M. Roldán Hervás, Iter ab Emerita Asturicam, p. 81. Sur la contributio, voir U. Laffi, Adtributio e contributio, notamment p. 133, sur le cas de Norba ; J. M. Abascal et U. Espinosa, La ciudad hispano-romana, pp. 204-205.
47 A. Schulten, « Ein römisches Lager aus dem sertorianischen Krieges », col. 75-106 ; A. Schulten et R. Paulsen, « Castra Caecilia » (1928), col. 1-30 ; Id., « Castra Caecilia » (1930), col. 37-88 ; Id., « Castra Caecilia » (1932), col. 334-388. Un bref résumé des résultats a été publié en espagnol dans A. Schulten, « El campamento del cónsul Metelo en Cáceres », pp. 14-15. Le site était connu avant l’intervention d’A. Schulten : E. Hübner, « Cáceres en tiempos de los romanos », p. 152 ; J. Rodríguez Molina, « Historia descriptiva de la villa de Cáceres », pp. 565-571 ; F. Fita, « El castro romano de Cáceres », p. 469. Ce sont toutefois les publications du professeur d’Erlangen qui ont définitivement contribué à associer Cáceres el Viejo à Castra Caecilia.
48 La nature et la chronologie du site de Cáceres el Viejo sont discutés plus précisément infra, pp. 393-401.
49 G. Arias, « Cáceres el Viejo guarda aún su secreto », p. 233, a ainsi fait remarquer qu’A. Schulten « habla de castra Caecilia, en el título de sus trabajos, como si la correspondencia de la etiqueta con el lugar fuera un hecho evidente que no necesitara demostración » ; même ceux qui admettent le lien du site avec les guerres sertoriennes reconnaissent l’artifice de la méthode : J. M. Roldán Hervás, Iterab Emerita Asturicam, p. 81 ; G. Ulbert, Cáceres el Viejo, pp. 6-7 ; J. J. Sayas Abengochea, « Estacionamiento de tropas en Lusitania y el campamento de Cáceres », p. 238 ; Id., « El caso de Norba Caesarina y su contributa, Castra Servilia y Castra Caecilia », pp. 63-64.
50 Castra Seruilia : C. Callejo Serrano, El origen y el nombre de Cáceres, pp. 66-68 ; Castra Liciniana : M. Beltrán Lloris, « Problemas de la arqueología cacereña », p. 298.
51 Ce réseau a été mis en évidence parA. Schulten, Sertorio, pp. 91-95, avant d’être repris, unanimement et sans discussion, par la suite : J. M. Roldán Hervás, Iter ab Emerita Asturicam, pp. 171-172 ; M. Beltrán Lloris, « Problemas de la arqueología cacereña », p. 296 ; R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 32 ; J. L. Sánchez Abal, « Sertorio, Metello y Castra Caecilia », pp. 21-29 ; J. J. Sayas Abengochea, « Estacionamiento de tropas en Lusitaniayel campamento de Cáceres », p. 242 ; S. L. Dyson, The Creation of the Roman Frontier, p. 231 ; G. Ulbert, Cáceres el Viejo, pp. 197-200 ; J. M. Blázquez Martínez et R. Corzo Sánchez, « Luftbilderrömischer Lageraus republikanischer Zeit in Spanien », pp. 687-688 ; J. de Alarcão, Roman Portugal, p. 10 ; P. O. Spann, Quintus Sertorius and the Legacy of Sulla, pp. 67-68 ; S. J. Keay, Roman Spain, p. 43 ; F. García Morá, Un episodio de la Hispania republicana, pp. 93-96 ; A. Morillo Cerdán, « Campamentos romanos en España a través de los textos clásicos », pp. 389-390 ; L. Pérez Vilatela, Lusitania, pp. 178-179. Voir aussi les remarques de L. Berrocal-Rangel, « Poblamiento y defensa en el territorio céltico durante la época republicana », pp. 203-207, qui admet l’hypothèse d’une « línea fortificada de frontera » dans la région.
52 De façon significative, G. Ulbert, Cáceres el Viejo, p. 200, tout en rejetant avec force l’idée schulténienne d’une fondation du site par Metellus, éprouve le besoin de suggérer que ce fut toutefois sa réutilisation par celui-ci dans le cadre de sa ligne de défense qui lui a donné son nom.
53 Pour l’Itinéraire d’Antonin, l’édition de O. Cuntz donne la lecture Caelionicco et les variantes caecilionicco, cecilioni, caelionico ; pour l’anonyme de Ravenne, l’édition de J. Schnetz donne seulement Coloricum.
54 A. Schulten, Sertorio, p. 92, n. 338 : « Caecilio vico es reconstrucción segura de cae(ci)lio nicco. »
55 Voir sur ce point les réserves justifiées de P. A. Brunt, Italian Manpower, p. 216 ; de même, J. M. Roldán Hervás, Itineraria hispana, p. 83, juge que Caecilius uicus est une « interpretación moderna sin apoyo en los manuscritos ». Ce faisant, il revient sur l’opinion exprimée antérieurement par lui dans Id., Iterab Emerita Asturicam, p. 90, où il suivait l’opinion d’A. Schulten.
56 La mise en relation de Caeciliana, Castra Caecilia et Vicus Caecilius avec la stratégie développée par Metellus en 79 résulte de l’hypothèse que le général romain avait cherché à contenir son adversaire à l’intérieur de la Lusitanie au moyen de lignes de défense destinées à le prendre en tenaille, dans l’attente de l’arrivée du gouverneur de Citérieure, Domitius Calvinus, dont le renfort aurait alors permis à Metellus de frapper un coup décisif. L’audace de Sertorius, envoyant Hirtuleius intercepter l’armée de Domitius, aurait ruiné ce plan et obligé Metellus à se replier sur l’Ultérieure, abandonnant ses positions, détruites ensuite par l’ennemi. Formulée initialement par A. Schulten, Sertorio, pp. 87-88, cette interprétation a été ensuite reprise et développée : J. L. Sánchez Abal, « Sertorio, Metelloy Castra Caecilia », pp. 21-29 ; J. Esteban Ortega et J. L. Sánchez Abal, « Sertorio y Metello en la Lusitania », pp. 749-755 ; F. García Morá, Un episodio de la Hispania republicana, pp. 95-106 ; Id., « Sertorio frente a Metelo », pp. 390-398 (ces pages n’ajoutent rien cependant à l’ouvrage précédent). Cette restitution, appuyée sur une documentation très faible, a été toutefois contestée à juste titre par P. O. Spann, Quintus Sertorius and the Legacy of Sulla, p. 65 : « It is better simply to confess our ignorance regarding the purpose of the initial maneuvers of the campaign of 79 ». Il ajoute très justement en note 52 que « Modern scholars are, in general, too ready to assume pincer operations, forgetting orignoring the difficulties involved. » Il est plus vraisemblable de penser que Metellus s’est efforcé de ravager les territoires alliés à Sertorius afin de pousser son adversaire à accepter la bataille ou du moins afin de provoquer la défection de ses partisans. C’est du reste ce que suggère Salluste, Hist., I, 112M. Cependant, comme P. O. Spann suit les hypothèses toponymiques traditionnelles, il continue à admettre (pp. 67-68) que ces opérations ont pu entraîner l’établissement des postes mentionnés par A. Schulten.
57 La prudence commence à être rappelée dans certains travaux récents, comme par exemple R. López Melero, « Viriatus Hispaniae Romulus », p. 261, n. 25 : « es igualmente una hipótesis su atribución a Servilio Cepión y, consecuentemente, la fecha de su fundación », même si cet auteur reconnaît la cohérence de cette attribution avec le contexte de la progression romaine dans la région.
58 J. J. Sayas Abengochea, « El caso de Norba Caesarina y su contributa, Castra Servilia y Castra Caecilia », pp. 72-75, a proposé de la dater de la fondation même de la colonie de Norba.
59 R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 27, explique que le nom Castra Vinaria « may derive from the cultivation of the vine in the area of the camp ». Mais il n’avance aucune preuve, étant incapable de localiser précisément le site (« this castra was somewhere in the midlands between the Baetis river and the Mediterranean sea ») et de le dater (« no certain date for the foundation of Castra Vinaria is possible »). Il rattache le camp à la guerre contre Viriathe, pour la simple raison que l’Ultérieure n’a pas connu par la suite de troubles importants. L’argument est spécieux et fait bon marché des guerres civiles du Ier siècle où la province a été particulièrement impliquée. Les mêmes approximations entourent son analyse de Castra Gemina (p. 25). Comme l’auteur admet qu’un bourg s’est développé sur le site au Ier siècle, il en déduit que le camp d’origine est forcément bien antérieur et propose pour cette raison de le dater du IIe siècle. Les raids lusitaniens de 194 (Tite-Live, XXXV, 1, 5) lui servent alors à étayer cette hypothèse. Aucune de ces suppositions ne résiste à l’examen, comme le montre l’interprétation différente qu’il donne de Castra Vinaria, pourtant dotée de caractéristiques pouvant fonderun raisonnement similaire.
60 Bell. Hisp., VIII, 6 : ab suis castris circitermilia passuum IV grumus est excellens natura, qui apellatur Castra Postumiana (« à environ quatre mille pas de son camp se dressait un tertre assez élevé, appelé Castra Postumiana », trad. N. Diouron, CUF).
61 A. Schulten, FHA, V, p. 130.
62 Dans le premier cas : Végèce, III, 8 ; 4, 10 ; César, BG, VII, 69 ; César, BC, III, 43 ; Bell. Hisp., XX, 1 et XXIV, 2 ; dans le second : Végèce, III, 8. Voir également l’article « Castellum », dans Ch. Daremberg et E. Saglio (éd.), Dictionnaire des antiquités grecques et romaines, t. I, p. 936 ; A. Jiménez de Furundarena, « Castellum en la Hispania romana », pp. 129-150.
63 Isidore, Etymol., XV, 2, 11. Sur le castellum comme élément du réseau urbain ibère, voir P. Moret, Les fortifications ibériques, pp. 152-153, et C. González Román, « La no ciudad en la Bética », pp. 193-194.
64 Tite-Live, XXXIV, 16, 9 ; XL, 33, 8 ; XL, 47, 2.
65 Voir ainsi le scepticisme exprimé à juste titre par N. Mackie dans son compte rendu de R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 187 : « This lead him to count as military posts four castella which are probably merely native settlements. »
66 Pline, NH, IV, 116. A. García y Bellido, « Del carácter militar activo de las colonias romanas de la Lusitania y regiones inmediatas », p. 301.
67 R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 24, fait pourtant seulement référence en note 28 et 30 à l’opinion d’A. García y Bellido et à Merobriga. M. A. Marín Díaz, Emigración, colonización y municipalización en la Hispania republicana, p. 87, n. 271, tout en déclarant citer R. C. Knapp, ne relève pas la contradiction et situe le Castellum Berense « en el Noroeste peninsular ».
68 A. Tranoy, La Galice romaine, p. 374, attribue ainsi Castellum Berense et Castellum Meidunium à la région nord-ouest et les considère sans hésitation comme des bourgs indigènes.
69 Ibid., pp. 75-91 (sur les castros), p. 204 (sur le castellum) et p. 204, n. 104 (sur le lien entre ces deux catégories).
70 P. Le Roux, « Vicus et castellum en Lusitanie sous l’Empire », pp. 151-160. L’auteur (p. 154) se montre également très prudent sur la lecture Castellum Ciseli pour CIL, II, 5320 (ex <c>as(tello) Ciseli), soulignant que la disparition de l’inscription ne permet plus de vérification. Pour cette raison, outre la question même de l’interprétation du terme castellum, il semble par conséquent difficile de continuer à faire figurer le toponyme, comme s’il était bien attesté, dans une liste d’éventuels postes militaires romains.
71 A. Tovar, Baetica, p. 52.
72 Sur cette appropriation par Rome des territoires péninsulaires où les exigences militaires jouaient évidemment un rôle de premier plan, voir les remarques de P. Le Roux, Romains d’Espagne, notamment p. 22.
73 Voir infra, pp. 360-361.
74 Voir également à ce sujet les critiques formulées par P. Le Roux, L’armée romaine et l’organisation des provinces ibériques, p. 52, à propos du schéma interprétatif proposé par A. García y Bellido, « Del carácter militar activo de las colonias romanas de la Lusitania y regiones inmediatas », pp. 299-304, pour la colonisation césaro-augustéenne.
75 R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 29.
76 Voir infra, pp. 351-354.
77 L’unique mention de cette fondation nous vient de Appien, Ib., 38 ; sur son rôle militaire initial, voir : R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 27 ; J. S. Richardson, Hispaniae, p. 61 ; A. Caballos Rufino, Itálica y los italicenses, pp. 23-24 ; P. Le Roux, « Armées et promotion urbaine en Hispanie sous l’Empire », p. 202.
78 A. Caballos Rufino, Itálica y los italicenses, p. 36.
79 Ce point a été bien montré par S. J. Keay, « Early Roman Italica and the Romanization of Western Baetica », pp. 28-32. L’auteur insiste en particulier sur le fait que l’archéologie montre qu’Italica était restée une agglomération mineure à l’époque républicaine.
80 S. Haba Quirós, Medellín romano, p. 407.
81 R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 32.
82 Sur ce problème méthodologique, voir supra, p. 285.
83 Vicarell., 1, ligne 13. Ainsi, J. M. Roldán Hervás, Iterab Emerita Asturicam, p. 267, considère sans hésitation ce toponyme comme une référence au praedium d’un Sempronius.
84 It., 398, 3.
85 Le problème méthodologique qu’implique le recours à une explication de type stratégique est, d’une manière générale, insuffisamment discuté dans l’historiographie relative à la conquête : sur ce point, voir F. Cadiou, « Les armées romaines dans la vallée du Duero. Géographie et stratégie à l’époque de la conquête », pp. 45-58.
86 Voir la mise au point de M. Luik, « Die römischen Militäranlagen der iberischen Halbinsel », pp. 213-275 (et plus particulièrement pp. 215-246 pour l’époque républicaine), qui ajoute peu cependant au catalogue antérieur de Á. Morillo Cerdán, « Fortificaciones campamentales de época romana en España », pp. 135-190 (et pp. 146-159 pour l’époque républicaine). Celui-ci a depuis été actualisé à deux reprises : Id., « Los establecimientos militares temporales », pp. 41-80 ; Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, pp. 211-289.
87 Son interprétation du dossier archéologique constitue ainsi la base des listes de camps dressées par A. García y Bellido, « El ejército romano en Hispania », pp. 59-101 (et notamment pp. 64-70 pour la période républicaine) et J. M. Blázquez Martínez et R. Corzo Sánchez, « Luftbilder römischer Lager aus republikanischer Zeit in Spanien », pp. 681-688. Dernièrement, ses conclusions ont encore été reprises de manière curieusement acritique par J. M. Blázquez Martínez, « Campamentos romanos en la Meseta hispana en época romano republicana », pp. 65-118.
88 Souligné vigoureusement par G. Ulbert, Cáceres el Viejo, p. 7, à l’occasion de son réexamen du site extréménien, ce reproche a été très justement formulé par Á. Morillo Cerdán, « Campamentos romanos en España a través de los textos clásicos », p. 381 : « Se han identificado como campamentos romanos recintos que tenían poco que ver arqueológicamente, pero que se ajustaban bien al marco geográfico de sucesos históricos conocidos. » Depuis, la démarche d’A. Schulten a été qualifiée de « philologische Archäologie » par M. Blech, « Schulten und Numantia », pp. 38-47 (p. 45 pour l’expression citée), qui analyse en détail le processus intellectuel aboutissant à déformer l’interprétation des sources archéologiques et appelle par conséquent à une révision de son travail. En dernier lieu, voir la brève présentation critique de la méthode suivie par l’archéologue allemand dans M. Luik, Die Funde aus den römischen Lagern um Numantia, pp. 3-9.
89 J. Pamment Salvatore, Roman Republican Castrametation, particulièrement p. 21-28 ; M. J. Dobson, The Roman Camps at Numantia, particulièrement pp. 33-34. L’importance accordée par ces auteurs à la discussion minutieuse des présupposés d’A. Schulten tient en grande partie au fait que leurs travaux respectifs ne résultent pas d’une reprise de fouille sur place mais seulement d’un examen des publications de l’époque. J. Pamment Salvatore déclare toutefois (p. 3, n. 7) avoir effectué de nouvelles mesures sur les sites, contrairement à M. Dobson, dont l’analyse est présentée par l’auteur lui-même (p. 25, n. 6) comme une critique interne du raisonnement d’A. Schulten. Dernièrement, M. Luik, Die Funde aus den römischen Lagern um Numantia, centré pour sa part sur l’analyse du matériel provenant des fouilles et déposé au musée de Mayence, insiste régulièrement (notamment p. 9) sur l’absence de fiabilité des publications d’A. Schulten.
90 Polybe, III, 97, 6, rapporte en effet que les Scipions avaient établi un camp à une quarantaine de stades de la ville. Voir A. Schulten, « Forschungen in Spanien 1927 », p. 233 ; suivi par A. García y Bellido, « El ejército romano en Hispania », p. 64, selon lequel il s’agit donc d’un des camps les plus anciens du monde romain.
91 N. P. Gómez Serrano, « Secció d’Antropologia i Prehistòria. Resum dels seus treballs », pp. 200-201.
92 F. Arasa i Gil, « El Punt del Cid d’Almenara », pp. 219-242 ; A. Bazzana, Maisons d’al-Andalus, t. I, p. 350 et t. II, pl. CLXXX ; dernièrement, F. Arasa i Gil, « El conjunto monumental de Almenara », pp. 117-118, donne ainsi une datation entre le VIIe et le IXe s. pour le site.
93 L’idée qu’Almenara est bien un camp romain a bien été mise en doute dans plusieurs travaux récents, mais sans référence aux analyses des médiévistes : Á. Morillo Cerdán, « Fortificaciones campamentales de época romana en España », p. 148 ; J. Pamment Salvatore, Roman Republican Castrametation, p. 21 ; M. J. Dobson, The Roman Camps at Numantia, p. 26 ; M. Luik, « Die römischen Militäranlagen der iberischen Halbinsel », p. 218 (qui cite en n. 19 l’article de F. Arasa sans toutefois tenir compte de ses conclusions). L’intégration de l’apport des travaux de F. Arasa et d’A. Bazzana ne débute vraiment qu’avec le plus récent d’entre eux : Á. Morillo Cerdán, « Los establecimientos militares temporales », p. 67. Par conséquent, ce n’est que depuis 2006 qui le site d’Almenara ne figure plus dans la liste des sites militaires républicains mise à jour dans Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, pp. 211-289.
94 Tite-Live, XXXIV, 19, 10.
95 A. Schulten, « Forschungen in Spanien 1927 », pp. 198-199, qui l’interprète comme des aestiva ; Id., Numantia IV, pp. 196-199 ; il est suivi par A. García y Bellido, « El ejército romano en Hispania », p. 70, qui en fait un camp d’auxiliaires, mais considère en revanche son attribution à Caton avec prudence.
96 Á. Morillo Cerdán, « Fortificaciones campamentales de época romana en España », p. 158 et M. Luik, « Die römischen Militäranlagen der iberischen Halbinsel », p. 222, préfèrent adopter, à juste titre, une attitude prudente. De même, Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, p. 216.
97 Le site, malgré sa dénomination commune de « Cava de Viriato », est considéré comme un camp romain depuis la fin du XIXe siècle : voir notamment J. L. Vasconcellos, « A Cava de Viriato », pp. 11-16. A. Schulten, « Forschungen in Spanien (1928-1933) », pp. 534-538, n’a fait que s’insérerdans cette tradition et s’est contenté, sans fouilles, de le dater des campagnes de Decimus Brutus en 138, sur la foi de Strabon, III, 3, 1. Sans accepter cette datation, on a néanmoins généralement admis depuis qu’il s’agissait d’un camp romain : A. García y Bellido, « El ejército romano en Hispania », pp. 69-70 ; J. de Alarcão, Roman Portugal, pp. 2 et 11, où l’auteur suggère même qu’il a pu abriter les légions de Petreius avant 49 puis celles de Cassius en 48. Mais il reconnaît toutefois la faiblesse des preuves.
98 A. García y Bellido, « El ejército romano en Hispania », p. 70, reconnaît ainsi que les quelques sondages effectués n’ont permis d’apporter aucune preuve qu’il s’agissait bien d’un camp romain. Pour lui, c’est donc uniquement la régularité de sa forme qui permet d’en soutenir l’hypothèse.
99 M. J. Dobson, « A Re-Dating of the Conjectured Roman Camp at the Cava de Viriato », pp. 226-235. Comme dans le cas des hypothèses précédentes, l’auteur s’appuie sur la morphologie de l’enceinte et le contexte de la guerre d’Indépendance entre 1580 et 1666 pour proposer cette nouvelle datation (le choix de la première moitié du XVIIe siècle tient à une comparaison avec ce que l’on connaît du programme de fortification du roi Jean IV). La méthode ne diffère donc guère de celle d’A. Schulten et les conclusions obtenues ne sont pas plus définitives. Rappelons ainsi que, sur des bases similaires (absence de matériel romain, mention récurrente de Viseu dans les chroniques musulmanes relatives à Almenzor) une origine califale a également été attribuée à ce site avec beaucoup de vraisemblance : V. G. Mantas, « As fundações coloniais no território português nos finais da república e inícios do império », p. 473, n. 34 ; Id., « Indícios de um Camp Romano na Cava de Viriato ? », pp. 40-42. Dans cette dernière publication, l’auteur affirme toutefois qu’un réexamen des photos aériennes de 1956 lui aurait permis de repérer la trace d’un camp romain, plus réduit et en forme de carte à jouer, sous les structures médiévales (fig. 5, p. 303). En l’absence de toute intervention de terrain, il se risque à suggérer une datation de la fin du Ier siècle. En l’état, cette nouvelle hypothèse est à considérer avec beaucoup de prudence.
100 A. Schulten, Numantia IV, pp. 191-195 ; A. García y Bellido, « El ejército romano en Hispania », p. 70. La découverte initiale fut le fait de E. de Aguilera y Gamboa, marquis de Cerralbo, qui a mentionné « La Cerca » comme « campamento romano » et « campamento iberorromano ». Sa méthode de fouille a été sévèrement critiquée par A. Schulten lui-même.
101 Du reste, la campagne de Caton représentait seulement l’hypothèse privilégiée par A. Schulten : il n’écartait pas lui-même d’autres solutions.
102 J. Sánchez-Lafuente, « Aportaciones al estudio del campamento romano de “La Cerca” », p. 77.
103 Ibid., p. 82 : « … nos encontramos ante un campamento romano asentado sobre un hábitat más antiguo, un poblado celtibérico ».
104 Á. Morillo Cerdán, « Fortificaciones campamentales de época romana en España », pp. 149-150 ; J. Pamment Salvatore, Roman Republican Castrametation, p. 21 ; M. Luik, « Die römischen Militäranlagen der iberischen Halbinsel », p. 218. Dernièrement, J. Sánchez-Lafuente a finalement proposé de dater le site des guerres celtibères, en raison de sa proximité (8 km) avec l’oppidum de Luzaga, où des fouilles récentes permettent de localiserune importante ville celtibère de cette époque (la Luzia d’Appien ?) : Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, p. 213.
105 M. L. Cerdeño, R. García et J. Arenas, « El poblamiento celtibérico en la región del Alto Jalón y Alto Tajo », pp. 161-162, qui ne se prononcent pas toutefois ; M. Luik, « Die römischen Militäranlagen der iberischen Halbinsel », p. 218.
106 Le catalogue en est donné par M. Barril et V. Salve, « Reexcavando Aguilar de Anguita », pp. 61-63. Dans sa dernière mise au point surce site, Á. Morillo Cerdán, « Los establecimientos militares temporales », p. 47, continue donc à tort de déplorer l’entière disparition du matériel exhumé par le marquis de Cerralbo.
107 De ce point de vue, le commentaire qui suit le catalogue de M. Barril et V. Salve, « Reexcavando Aguilar de Anguita », pp. 78-79, n’est pas entièrement satisfaisant. Les auteurs arguent de cette datation tardive pour revenir à l’idée d’un camp romain progressivement converti en agglomération civile et estiment ainsi réfuter l’hypothèse de l’« asentamiento celtibérico », prêtée, à tort on l’a vu, à J. Sánchez-Lafuente.
108 Ibid., p. 79.
109 Ibid., p. 62, observent ainsi que l’inventaire AA/2609-2634 mélange une étiquette « Campamento Iberorromano » et une autre « Objetos de Aguilary otras localidades ». Les auteurs croient pouvoir faire le tri, mettant de côté ce qu’elles pensent être les objets des autres sites : « porello decidimos que los demás podían ser del campamento y de Aguilar ». C’est précisément dans cet ensemble que figurent l’assiette de Campanienne B et les deux fragments de Campanienne A avec estampille.
110 M. J. Dobson, The Roman Camps at Numantia, p. 26 et p. 31, n. 1, estime toutefois qu’Aguilar de Anguita, Almenara, Alpanseque, Alpiarça, Tentellatge et Viseu sont des « pre-roman native castros, ratherthan […] Roman camp ». Mais il ne propose aucune argumentation à ce sujet.
111 Appien, Ib., 47. A. Schulten, « Ausgrabungen in Numantia », p. 97 ; Id., « Forschungen in Spanien 1927 », p. 198 ; Id., Numantia IV, pp. 187-190 (p. 189 pour la datation).
112 G. Gamer et T. Ortego, « Nuevas observaciones sobre el campamento romano de Almazán », pp. 67-79 (la version allemande, dans Madrider Mitteilungen, 10, 1969, p. 172-184, possède l’avantage de publier un plan plus lisible, p. 178) ; T. Ortego, « El ambiente arqueológico en torno al campamento romano de Almazán », pp. 668-676.
113 G. Gamer et T. Ortego, « Nuevas observaciones sobre el campamento romano de Almazán », pp. 70-71 : « al deshacer el terraplén actual, se habían destruído también todos los restos de la muralla del campamento. […] La limpieza del plano adyacente de la superficie actual del terraplén no aportó solución alguna acerca del sistema empleado en la construcción de la muralla. »
114 A. Schulten, Numantia IV, p. 190.
115 G. Gamer et T. Ortego, « Nuevas observaciones sobre el campamento romano de Almazán », p. 71 : « Parece tratarse de los restos de un muro de dos paramentos con relleno en medio. En el perfil no aparecen, sin embargo, las piedras allí donde estuvo la cara externa. » ; T. Ortego, « El ambiente arqueológico en torno al campamento romano de Almazán », p. 671, se montre encore plus clair : « La acción de las excavadores afectó a los pobres restos de los muros de circunvalación, reducidos en los sectores visibles a una recta alineación de terreno alomado producido por los residuos de la muralla, de la que no queda el menor indicio de paramentos. »
116 Á. Morillo Cerdán, « Fortificaciones campamentales de época romana en España », p. 155 : « Las excavaciones han revelado una muralla de dos paramentos exteriores rellena con guijarros bastantes grandes » ; idem en Id., « Los establecimientos militares temporales », p. 49.
117 Quand bien même il serait possible d’affirmer sans erreur qu’il s’agit bien d’une muraille à double parement, la diffusion de cette technique en péninsule Ibérique rendrait l’argument insuffisant pour orienter, en l’absence d’autres indices, l’identification vers un établissement romain : sur ce point, voir P. Moret, Les fortifications ibériques, p. 80.
118 G. Gamer et T. Ortego, « Nuevas observaciones sobre el campamento romano de Almazán », pp. 72-73.
119 Ibid., p. 72. Ils expliquent leur incapacité à en trouver trace sur place du fait des nombreuses altérations du terrain entre 1957 et 1968.
120 T. Ortego, « El ambiente arqueológico en torno al campamento romano de Almazán », p. 672, parle d’ailleurs de la « la hipotética línea del cierre del campamento ». Voir également les réserves de S. von Schnurbein, à propos de l’aspect orthonormé proposé sur le plan, dans le chapitre « Camps et castella » qu’il a rédigé dans M. Reddé et S. von Schnurbein (éd.), Alésia, p. 510, n. 20.
121 Sur ce plan, le point de vue de Á. Morillo Cerdán, « Los establecimientos militares temporales », p. 50, nous paraît trop optimiste.
122 G. Gamer et T. Ortego, « Nuevas observaciones sobre el campamento romano de Almazán », pp. 75-78. Les auteurs ne se montrent guère précis dans leur analyse du matériel : ils se contentent de relever le fait que huit fragments de céramique campanienne B ont été trouvés en relation avec la muraille (« entre el escombro de la muralla ») ainsi qu’un fragment d’amphore Dressel 1A en superficie. Tout en reconnaissant que ces pièces « carecen de valorpara su datación » et qu’elles ont pu « llegar a la muralla cuando ésta estaba ya en ruinas », ils admettent l’hypothèse d’une datation de la seconde moitié du IIe siècle. Pour cela, ils allèguent le parallèle avec les camps de Numance (murs à double parement, titula, forme rectangulaire). Ils se fondent donc ici sur des critères dont leur description précédente contribuait pourtant à montrer la fragilité.
123 Ibid., p. 73, signale aussi en superficie « apenas indicios de sigillata sudgálica » ; M. Luik, « Die römischen Militäranlagen deriberischen Halbinsel », p. 232, a la prudence de rejeter toute tentative de datation.
124 Contrairement à l’usage couramment en vigueur dans la bibliographie, le neutre (titulum) doit être préféré pour désigner ces obstacles sous forme de fossés creusés en avant des portes. Voir M. Reddé, « Titulum et clavicula », p. 349, n. 3.
125 Faute de confirmation par les fouilles au sol, on ne peut totalement écarter une interprétation abusive des traces repérées : à titre de comparaison, on peut mentionner les nombreuses clauiculae reportées sur les plans des camps d’Alésia effectués sous le Second-Empire et qui, comme le rappelle M. Reddé, « avaient été (rajoutées) “de confiance”, parce que tout érudit connaissait alors le texte du Ps. -Hygin ». Voir M. Reddé, « Titulum et clavicula », p. 352, repris dans M. Reddé et S. von Schnurbein (éd.), Alésia, p. 536. Or, comme il a été souligné précédemment, A. Schulten était précisément l’un de ces érudits persuadés de retrouver immanquablement sur le terrain les données bien connues par les textes. Toutefois, cette réserve nécessaire n’est pas décisive dans le cas d’Almazán, étant donné l’état du site en 1968. En effet, d’après G. Gamer et T. Ortego, « Nuevas observaciones sobre el campamento romano de Almazán », p. 72, les titula de Schulten seraient effectivement visibles sur la photographie aérienne de 1957.
126 Ainsi, J. M. Blázquez Martínez et R. Corzo Sánchez, « Luftbilder römischer Lager aus republikanischer Zeit in Spanien », pp. 681-682, Á. Morillo Cerdán, « Fortificaciones campamentales de época romana en España », pp. 154-155, et Id., « Campamentos romanos en España a través de los textos clásicos », p. 387, le tiennent pour authentique et se contentent de proposer d’attribuer le site à Marcellus en 152 plutôt qu’à Nobilior en 154/153 ; c’est également le seul des camps secondaires de la liste d’A. Schulten qui est retenu par J. Pamment Salvatore, Roman Republican Castrametation, p. 28. Il ne tranche cependant pas quant à sa datation, qu’il place entre la seconde moitié du IIe siècle et les premières décennies du Ier siècle. Enfin, voir Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, pp. 214-215, où N. Sabugo et D. Rodríguez Pérez signalent en outre qu’une intervention archéologique a été récemment effectuée pour corroborer l’état actuel de conservation des vestiges.
127 B. Taracena, « Sistema de construcción de los campos atrincherados romanos, según el de Navalcaballo », pp. 1-5 ; Id., Carta arqueológica de España. Soria, pp. 120-121. Il s’agit d’un talus en terre surmontant deux sillons parallèles, interprétés comme les restes de l’agger et du fossé d’aestiva de forme rectangulaire. La présence de quelques fragments de sigillée en superficie l’amenait à le dater de la période impériale. Cet argument a été jugé à juste titre insuffisant par A. García y Bellido, « El ejército romano en Hispania », pp. 70-71. La difficulté d’expliquer la présence d’un camp de ce type dans la région pour cette époque incite celui-ci à préférer, sans autre preuve, une datation d’époque sertorienne. Á. Morillo Cerdán, « Fortificaciones campamentales de época romana en España », p. 159, a exprimé avec raison ses doutes quant à la nature réelle du site. Voir aussi Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, pp. 247-249 : « the attribution of this settlement to a Roman military camp can’t be reliably assured ».
128 J. -G. Gorges et F. G. Rodríguez Martín, « Un probable complejo militar romano de época republicana en la Beturia túrdula », pp. 665-669 ; Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, pp. 263-268. Situé à 7 km au nord-est de Llerena (Badajoz), le site comprend selon ses inventeurs deux enceintes trapézoïdales de taille inégale couvrant une superficie d’environ 14 ha, complétées par un système défensif (castella, titula, constructions annexes) réparti sur près de 350 ha. L’ensemble leur paraît correspondre à un camp opérationnel de campagne établi en territoire hostile (d’où son système sophistiqué de défense), en vue d’une opération contre un oppidum voisin (Las Mesillas ?) au cours des guerres lusitaniennes. Cette datation et cette interprétation reposent uniquement sur la situation géographique du site (sur les contreforts de la Sierra Morena), et sur une comparaison — discutable — avec Renieblas et Aguilar de Anguita. En l’absence de tout matériel de surface et en l’attente des sondages annoncés, il est permis de se montrer extrêmement sceptique quant aux premières conclusions proposées par les auteurs au sujet de ce site atypique dont, par ailleurs, le caractère antique n’est pour l’instant pas assuré.
129 Ronda la Vieja n’est mentionné que par A. García y Bellido, « El ejército romano en Hispania », p. 71 : il s’agit d’un vaste tracé rectangulaire, visible sur photographie aérienne. Il n’a fait l’objet d’aucune reconnaissance sur le terrain. Tout en suggérant qu’il pourrait s’agir d’un camp de la guerre civile de 45, l’auteur reconnaît qu’il n’en existe aucune preuve.
130 J. M. Blázquez Martínez et R. Corzo Sánchez, « Luftbilder römischer Lager aus republikanischer Zeit in Spanien », pp. 689-691.
131 J. Armendáriz Martija, « Propuesta de identificación del campamento de invierno de Pompeyo en territorio vascón », pp. 41-63. Le site correspond au tracé d’une possible enceinte de plan irrégulier localisée par photographie aérienne sur la hauteur de Alto de Santa Cruz, dans la commune d’Aranguren (Navarre), à 9 km de Pampelune. Tout en reconnaissant le manque de données actuellement disponibles, en l’absence de toute intervention archéologique, l’auteur se risque à formuler l’hypothèse qu’il s’agit d’un camp (ou d’un fortin) romain, en raison d’éléments topographiques qu’il n’hésite pas à mettre en relation avec une castramétation de type romain (fossé, agger et uallum). La démonstration ne convainc guère, pas plus que la proposition de rapporter au site les deux balles de fronde au nom de Sertorius trouvées par un prospecteur clandestin au milieu des années quatre-vingt et publiées en 1990 par F. Beltrán. Voir également la mise au point du même auteur dans Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, pp. 287-289. En l’état actuel des choses, il paraît donc préférable de suivre Á. Morillo Cerdán, « Los establecimientos militares temporales », p. 66, qui classe le site dans sa liste de camps « de identificación problemática ».
132 M. Medrano Marqués et M. A. Díaz Sanz, « El patrimonio arqueológico de Fitero », pp. 397-398. L’hypothèse d’un camp républicain se fonde sur la présence, dans une zone de 2.775 sur 750 mètres, de monnaies républicaines (aussi bien des as romains que des émissions d’Hispanie méridionale) et de quatre balles de fondes inscrites au nom de Sertorius. Ajoutons un objet de bronze portant une inscription en latin archaïque, ainsi qu’une phalère de bronze représentant une tête masculine casquée, tous deux signalés pp. 403-404. Il s’agit de trouvailles très intéressantes, et pour certaines inhabituelles, mais qu’il est sans doute prématuré de mettre directement en relation avec l’installation d’un camp romain d’époque sertorienne, alors qu’aucune structure n’a été jusqu’à présent repérée. Il est vrai que les auteurs privilégient la thèse d’un campement éphémère, en raison de l’absence de céramique. Voir aussi M. Medrano Marqués, « El campamento de Quintus Sertorius en el valle del río Alhama », pp. 15-32.
133 Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, pp. 268-272 (avec la bibliographie antérieure). Le site a été repéré en 1999 par F. Burillo sur un plateau à 4 km au sud-est du Poyo de Mara, que l’on identifie généralement, avec de bons arguments, à l’acropole de la ville celtibère de Segeda, attaquée par les Romains en 154-153. La rumeur de la découverte de monnaies romaines par des clandestins, fréquente à cet endroit, a conduit à y réaliser une prospection systématique qui a mis en évidence une distribution significative de céramique (essentiellement d’époque républicaine, mais pas seulement) sur une surface d’environ 10 ha. Dans ce contexte, c’est la présence de fragments d’amphores gréco-italiques tardives (similaires à ceux retrouvés à Segeda I et Renieblas III) qui fonde l’hypothèse d’un camp romain de campagne, étant donné par ailleurs l’absence totale de structures, vérifiée depuis par une fouille effectuée en 2005. La proximité avec Segeda I fonde quant à elle l’attribution de ce camp présumé au consul de l’année 154, Q. Fulvius Nobilior. Sans être fantaisiste, une telle hypothèse (tout comme celle évoquée en note précédente) invite néanmoins à s’interroger sur la possibilité de dégager des critères indubitables pour caractériser l’occupation militaire d’un site, surtout lorsque celle-ci est censée n’avoir été que passagère.
134 En particulier : Cerdal, près de Valença do Minho, ainsi que Gonçalo et Ferreiroz do Dão, entre Duero et Tage (F. R. Cortez, As escavações arqueológico do « Castellum » da Fonte do Milho, pp. 60-61) ; Valado de S. Quitéria (A. Girão, « Um novo campo fortificado romano », pp. 101-104) ; Antanhol, près de Coimbra (J. M. Bairrão Oleiro [éd.], Subsídios para o estudo do acampamento romano de Antanhol) ; Campo Romão (A. Vasco Rodrigues, « Torre de “Centum-Cellas”. Prétorio de um Acampamento Romano ? », p. 325). Dernièrement, C. Fabião, « The Roman Army in Portugal », p. 124, signale qu’une prospection aurait localisé un possible camp romain près de Baião, mais sans donner plus de précisions.
135 Voir à ce sujet les remarques prudentes de C. Fabião, « The Roman Army in Portugal », notamment pp. 109-115.
136 On peut prendre à ce sujet l’exemple de Scallabis ou de Fonto do Milho. J. de Alarcão, Roman Portugal, p. 11, estime que la colonie de Scallabis Praesidium Iulium (Santarém) a été fondée par César après 61 et précédée, comme le suggère son nom, par une garnison. Esquissant un parallèle avec le camp supposé établi auparavant par Brutus à proximité de Moron, il n’hésite pas à conclure de ces supputations : « The two camps prove the strategic importance of this area » ; dans la première version de l’ouvrage (Id., Portugal romano, pp. 47-48), l’auteur se montre cependant prudent pour dater (mais non interpréter) les camps présumés du Portugal ; voir aussi Id., Roman Portugal, p. 65 ; à Santarém, la découverte de bâtiments datés du milieu du Ier siècle ainsi que du matériel de la même époque (amphores, céramique à parois fines, armes) sont mis en relation avec ce praesidium supposé : C. Fabião, « Arqueología militar romana da Lusitania », p. 60 ; Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, p. 279 ; en ce qui concerne Fonto do Milho, le site est attribué aux guerres cantabres, ce que réfute A. Tranoy, La Galice romaine, p. 238, qui s’oppose à toute interprétation militaire du site. Même scepticisme chez C. Fabião, « The Roman Army in Portugal », p. 113.
137 Ph. Kalb et M. Höck, « Alto do Castelo, Alpiarça - ein römisches Lager in Portugal ? », pp. 696-699. Les faiblesses de cette interprétation ont été soulignées par C. Fabião, « Arqueología militar romana da Lusitania », p. 59. Le même auteur s’est montré toutefois moins catégorique depuis : Id., « The Roman Army in Portugal », pp. 111-112 (« still open to discussion ») ; Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, pp. 217-218.
138 G. Marques, Arqueologia de Alpiarça ; G. Marques et M. de Andrade, « Aspectos da protohistória do território português », pp. 125-148.
139 Ph. Kalb et M. Höck, « Alto do Castelo, Alpiarça - ein römisches Lager in Portugal ? », p. 699, font d’ailleurs part de leurs doutes, dans la mesure où la présence d’une occupation préromaine sur le site est bien attestée et que ses caractéristiques morphologiques correspondent à celles d’oppida de La Tène tardive. En outre, ils reconnaissent eux-mêmes n’être pas familiers des problèmes de castramétation romaine : « wir uns mit der Deutung als römisches Lager auf ein Gebiet vorwagen, in dem wirnicht zu Hause sind, und wo wirmöglicherweise Grundsätzliches nicht beachtet haben ».
140 G. Zbyszwski et alii, « Acerca do campo fortificado de Chões de Alpompé », pp. 49-57 ; J. Ruivo, « Moedas do acampamento romano-republicano dos Chões de Alpompé », p. 101 ; C. Fabião, « Arqueología militarromana da Lusitania », pp. 58-59 ; Id., « The Roman Army in Portugal », p. 111.
141 Strabon, III, 3, 1. Sur l’interprétation courante du site : J. de Alarcão, Portugal romano, pp. 35-36 et 76. Dernièrement, C. Fabião, « The Roman Army in Portugal », p. 112, a tenté de concilier les deux hypothèses, en proposant que Alto do Castelo soit « related to some previous campaign », mais sans présenter d’arguments véritablement probants à l’appui d’une telle idée.
142 Pour cette raison, A. Girão et J. M. Bairrão Oleiro, « Geografia e campos fortificados romanos », pp. 77-80, ont proposé de placer Moron à Chões de Alpompé.
143 A. M. D. Diogo, « Ânforas pré-romanas dos Chões de Alpompé », pp. 215-227 ; A. M. D. Diogo et L. Trinade, « Materiais provenientes dos Chões de Alpompé », pp. 269-270. Les auteurs prennent soin de préciser que ce matériel provient non pas de fouilles, mais de prospections : cependant il livre déjà l’un des plus grands ensembles d’amphores préromaines et romaines tardo-républicaines du Portugal, qui atteste « importantes relações comerciais com o Mediterrâneo desde o seculo VII a.C. até segunda metade do século I a.C. ». Par conséquent, ils suggèrent qu’il pourrait bien s’agir de Moron décrite par Strabon comme une importante cité indigène.
144 Ph. Kalb et M. Höck, « Alto do Castelo, Alpiarça - ein römisches Lager in Portugal ? », p. 699. Voir aussi, Id., « O Alto do Castelo, Alpiarça (distrito de Santarém) », pp. 239-245.
145 Le fait a été bien montré par Ph. Kalb et M. Höck eux-mêmes dans « Morón. Historisch und archäologisch », pp. 92-102, où ils suggéraient alors une localisation de Moron à la place de l’actuelle Santarém.
146 Ph. Kalb et M. Höck, « Alto do Castelo, Alpiarça - ein römisches Lager in Portugal ? », p. 699, objectent non sans raison : « Das muß zwarnicht heißen, daß es in der Gegend kein Lager gegeben hat, nur kann man sich für ein solches nicht auf die antike Quelle berufen. » Cette remarque de bon sens ne saurait cependant tenir lieu de preuve.
147 J. de Castro Nunez, « Fibulas de tipo Nauheim no Castro da Lomba do Canho, em Arganil », pp. 5-23 (notamment p. 21). Sur la même base, ce type de raisonnement est désormais appliqué à des sites du sud du Portugal, comme Serro Furado (Baleizão), sans datation précise, ou Cabeça de Vaiamonte (Monforte), pour lequel on suppose une phase d’occupation militaire au début du Ier siècle, contemporaine de celle de Cáceres el Viejo : C. Fabião, « The Roman Army in Portugal », pp. 121-122.
148 C. Fabião et A. Guerra, « Escavações no acampamento romano da Lomba do Canho », p. 307 ; J. de Castro Nunez, C. Fabião et A. Guerra, O acampamento militar romano da Lomba do Canho ; Id., « O acampamento militar romano da Lomba do Canho », pp. 403-424 ; C. Fabião, « Arqueología militar romana da Lusitania », pp. 61-63 ; Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, pp. 245-246.
149 A. M. de Faria, Espólio monetário do acampamento romano de Arganil ; Id., « As moedas do acampamento romano da Lomba do Canho », pp. 37-42 ; C. Fabião et A. Guerra, « Consideraçôes preliminares sobre a cerâmica comum do acampamento militar romano da Lomba do Canho », p. 287 ; C. Fabião, Sobre as ânforas do acampamento romano da Lomba do Canho. Cette datation est celle qui est admise par Á. Morillo Cerdán, « Los establecimientos militares temporales », p. 60.
150 A. Guerra, « Acerca dos projécteis para funda da Lomba do Canho », pp. 161-177. Il est suivi par M. Luik, « Die römischen Militäranlagen der iberischen Halbinsel », p. 240. F. García Morá, Un episodio de la Hispania republicana, p. 102, n. 35, admet également sur cette base qu’il s’agit d’un castellum romain et remonte sa datation aux guerres sertoriennes pour y voir une preuve archéologique de la dispersion des troupes de Metellus en 79, face à la guérilla menée par Sertorius.
151 J. de Castro Nunez, C. Fabião et A. Guerra, O acampamento militar romano da Lomba do Canho, p. 14.
152 Cette pièce circulaire a été d’abord interprétée comme le podium depuis lequel le commandant du camp s’adressait à ses soldats. L’hypothèse finalement retenue est celle d’une cuisine ou d’un bain : C. Fabião et A. Guerra, « Escavações no acampamento romano da Lomba do Canho », p. 310 ; J. de Castro Nunez, C. Fabião et A. Guerra, « O acampamento militar romano da Lomba do Canho », p. 407.
153 Cette construction avait été initialement considérée comme le praetorium du camp : C. Fabião, Sobre as ânforas do acampamento romano da Lomba do Canho, p. 34 ; J. de Castro Nunez, C. Fabião et A. Guerra, « O acampamento militar romano da Lomba do Canho », p. 406.
154 C. Fabião et A. Guerra, « Escavações no acampamento romano da Lomba do Canho », pp. 310-311.
155 En 1989, son interprétation comme sa datation étaient du reste soigneusement présentées comme provisoires par C. Fabião, Sobre as ânforas do acampamento romano da Lomba do Canho, p. 37. Malgré cela, l’auteur n’hésitait pas à appeler « casernas » cette zone résidentielle ; la même année, la synthèse de J. de Castro Nunez, C. Fabião et A. Guerra, « O acampamento militar romano da Lomba do Canho », p. 407, concluait de manière moins nuancée : « Aestação arqueológica da Lomba do Canho constitui, sem dúvida, um lugar de establecimento militar romano. » Même certitude désormais chez C. Fabião, « Arqueología militarromana da Lusitania », p. 62. Dernièrement, Id., « The Roman Army in Portugal », p. 118, considère même le site comme la preuve d’une stratégie nouvelle en matière d’établissements militaires au cours du Ier siècle : « new permanent ones related to the control need of important resources areas orcommunication/circulation lines ».
156 J. de Castro Nunez, C. Fabião et A. Guerra, O acampamento militar romano da Lomba do Canho, p. 27, reconnaissent la difficulté à l’expliquer.
157 J. D. Vicente et alii, « La catapulta tardo-republicana y otro equipamiento militar de “La Caridad” », p. 196, écartent ainsi, en l’état actuel de la documentation, l’hypothèse que « el núcleo de La Caridad sería un campamento “permanente” del ejército romano ».
158 J. de Alarcão, Roman Portugal, p. 64, a ainsi proposé d’y voir une ferme fortifiée d’époque tardo-républicaine.
159 C. Fabião et A. Guerra, « Escavações no acampamento romano da Lomba do Canho », pp. 313-314 ; C. Fabião, Sobre as ânforas do acampamento romano da Lomba do Canho, pp. 39-40 ; J. de Castro Nunez, C. Fabião et A. Guerra, « O acampamento militar romano da Lomba do Canho », p. 408. Ils admettent utiliser le terme « acampamento » par commodité, comme un terme générique. Ce faisant, dès leurs titres, ces publications présentent donc une certaine ambiguïté.
160 J. Bação Leal et A. Do Paço, « Castelo da Lousa, Mourão (Portugal). Una fortificación romana de la margen izquierda del Guadiana », pp. 167-183 ; Id., « Castello di Lousa. Fortino romano sulla Guadiana a Mourão (Portugal) », pp. 17-24 ; Id., « Castelo da Lousa (Mourão). Campanhas de escavações de 1965, 1966 et 1967 », pp. 1-5 ; A. Do Paço et alii, « Castelo da Lousa, Mourão (Portugal) », pp. 195-203.
161 J. Bação Leal et A. Do Paço, « Castelo da Lousa, Mourão (Portugal). Una fortificación romana de la margen izquierda del Guadiana », p. 182.
162 J. de Alarcão, Portugal romano, pp. 50-51.
163 R. C. Knapp, « The Signifiance of Castelo da Lousa », pp. 159-163. Il y voit l’illustration du modèle développé par lui précédemment à partir des Itinéraires (voir supra, pp. 284-286).
164 M. Maia, « Primera campanha de escavações realizada no Cerro do Castelo do Manuel Galo », pp. 139-156 ; Id., « Fortaleza romana do Monte Manuel Galo », pp. 325-332.
165 Celles du Castelo da Lousa ont d’ailleurs repris depuis 1997, à l’occasion de la construction du barrage d’Alqueva qui a entraîné depuis l’immersion du site sous les eaux du lac de retenue. Les résultats de ces campagnes de sauvetage commencent à peine à être publiés : A. Gonçalves et P. C. Carvalho, « Intervenção Arqueológica no Castelo da Lousa (1997-2002) », pp. 181-188, et Id., « Intervención arqueológica en el Castelo da Lousa (1997-2002) », pp. 65-76. D’importantes structures (d’habitat ?), datables de la même période, ont été mises au jour au pied de l’édifice, sur les terrasses nord, nord-occidentale et nord-orientale, ainsi qu’une petite nécropole. Bien que les auteurs ne se prononcent pas sur la fonction du site, ces découvertes pourraient selon nous écarter définitivement l’hypothèse d’un simple fortin romain, même si le matériel retrouvé, relativement abondant, ne permet pas d’exclure une phase d’occupation militaire : fibules tardo-républicaines et augustéennes, monnaies romaines (du premier quart du Ier siècle à l’époque augustéenne), objets métalliques (fragments de simpulum et d’écumoir ; spatule ; un ciseau à bois ; deux pointes de pila ; quatre glandes). Quoi qu’il en soit, les nombreux fragments de céramique locale (majoritaire) et importée (130 fragments de campanienne B et C ; 200 fragments de terra sigillata archaïque et précoce), les fragments d’amphores (surtout Dr. 1 et Halt. 70), ainsi que la marque d’un potier arétin des deux dernières décennies du Ier siècle av. J.-C. (L. TETI/SAMIA) confirment l’hypothèse d’une datation basse. Une monographie reprenant l’ensemble des données est annoncée.
166 M. Maia, « Fortalezas romanas do sul de Portugal », pp. 279-285 ; l’hypothèse d’un réseau défensif a été largement suivie : J. de Alarcão, Portugal romano, p. 40 ; T. Júdice Gamito, « O castro de Segóvia (Elvas, Portugal), ponto fulcral na primeira fase das Guerras de Sertório », p. 152, n. 12 ; F. García Morá, Un episodio de la Hispania republicana, pp. 105-107, estime pour sa part que ce réseau reflète l’effort fourni par Metellus à partir de 78 pour fortifier tous les accès à l’Ultérieure, en commençant par la rive du Guadiana ; dernièrement, voir R. Mataloto, « Fortins Romanos do Alto Alentejo », notamment p. 48, qui y reconnaît le développement dans la région d’une « nova estratégia de ocupação » de la part de Rome, dans les décennies postérieures à la guerre sertorienne.
167 J. Wahl, « Castelo da Lousa », pp. 149-176.
168 Ibid., p. 151 : « fragt man sich, warum die militärische Funktion des Castelo da Lousa und dereng verwandten “fortalezas” niemals in Frage gestellet worden ist ». Contra C. Fabião, « Arqueología militar romana da Lusitania », pp. 67-68 ; Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, pp. 228-229.
169 J. Wahl, « Castelo da Lousa », pp. 164 et 172. Il est suivi par J. de Alarcão, Roman Portugal, pp. 63-64, qui abandonne ainsi sa position précédente. En revanche, C. Fabião, « The Roman Army in Portugal », pp. 114-115, tout en prenant acte du fait que « the major trends in the last few years tend to exclude a strictly military function for those towers », préfère s’abstenir de généraliser : « maybe some of those sites are actually military installations while some other were not ». Dans cette perspective, il maintient, comme on l’a vu, l’hypothèse d’un fortin romain en ce qui concerne Castelo da Lousa.
170 M. Maia, « Os castella do sul de Portugal », pp. 211 et 215-217.
171 Ibid., pp. 221-222. Pour cela, il argue de la richesse minière de la région et des traces de forge qu’il est possible de constater sur le terrain. Reprenant cette idée, M. P. García-Bellido, « Las torres-recinto y la explotación militar del plomo en Extremadura », pp. 187-218, a émis l’hypothèse que ces édifices abritaient en fait des garnisons militaires utilisées pour extraire le minerai à l’issue des guerres cantabres, peut-être à l’initiative d’Agrippa. Elle estime que celui-ci avait développé de véritables districts miniers militaires dans la zone. Appuyée sur une documentation importante, cette théorie dépend cependant essentiellement du lien effectué par l’auteur entre les sites extréméniens et les lingots provenant de l’épave du canal de Comacchio en Italie. Or, la mise en relation des inscriptions portées sur ces lingots avec les légions I, IIII Macedonica et XGemina ne nous paraît pas suffisamment démontrée.
172 P. Moret, « Les maisons fortes de la Bétique et de la Lusitanie romaine », pp. 527-564. Cet article est repris et légèrement complété par Id., « Casas fuertes romanas en la Bética y la Lusitania », pp. 55-89.
173 P. Moret, « Les maisons fortes de la Bétique et de la Lusitanie romaine », p. 533 : « [ils] peuvent être expliqués d’une toute autre manière, si l’on admet que les petites pièces du rez-de-chausée servaient de magasin pour le stockage des récoltes. Les étroites fenêtres à ébrasement interne, avec leurs faux airs de meurtrières, permettaient d’assurer une bonne ventilation des greniers tout en les maintenant dans la pénombre. L’épaisseur des murs avait deux motifs on ne peut plus pacifiques : l’isolation thermique et la nécessité d’offrir une solide assise à l’étage (ou aux étages) supérieur[s], où se trouvaient les habitations. » L’auteur a montré en effet (p. 529) que l’existence d’un départ d’escalier au Castelo da Lousa ne laisse aucun doute quant à l’élévation du bâtiment. Il est clair néanmoins que les murs épais de la maison forte étaient de nature à offrir à ses occupants une protection et un refuge contre d’éventuels brigands. Voir à ce sujet les remarques d’Id., « Tours de guet, maisons à tours et petits établissements fortifiés de l’Hispanie républicaine », pp. 26-27.
174 P. Moret, « Les maisons fortes de la Bétique et de la Lusitanie romaine », p. 532, souligne de manière très convaincante que le plan de Castelo da Lousa ne fait que reproduire, adapté à un contexte rural, celui de la domus républicaine à atrium. Il explique ainsi le silence de la bibliographie sur la question : « Sans doute ont-ils été trop impressionnés par son allure de fortin pour y rechercher autre chose que des traits militaires. »
175 Ibid., p. 546. Il ne voit pas à ce sujet de contradiction avec la médiocrité agricole de la région : outre le grain, la viande et la laine répondaient aux besoins des mineurs, sans que les quantités fournies par chaque exploitation aient dû être très importantes.
176 La tendance des études consacrées à ce site est de préférer une datation haute, du second ou du troisième quart du Ier siècle. Voir C. Fabião, Sobre as ânforas do acampamento romano da Lomba do Canho, p. 49, et J. de Castro Nunez, C. Fabião et A. Guerra, « O acampamento militar romano da Lomba do Canho », p. 411. Le refus de rabaisser la chronologie réside essentiellement dans l’absence des indices fréquemment trouvés sur les sites militaires de l’extrême fin du Ier siècle (deniers de Carisius et sigillée italique). Mais cet argument présuppose à nouveau la fonction militaire du site.
177 Le lien avec les mines a été amplement souligné par les fouilleurs eux-mêmes, notamment par C. Fabião et A. Guerra, « Escavações no acampamento romano da Lomba do Canho », p. 317, et J. de Castro Nunez, C. Fabião et A. Guerra, « O acampamento militar romano da Lomba do Canho », p. 412.
178 Ce point semble admis, au moins pour l’époque républicaine, par J. R. Carrillo Díaz-Pinés, « Turres baeticae », p. 76, à propos des sites andalous, souvent comparés à ceux du sud du Portugal. Soucieux, à juste titre, d’insister sur la difficulté à dater et à interpréter l’ensemble des turres d’une manière uniforme, l’auteur met toutefois ce type d’édifices, qu’il désigne sous le terme discutable de « villa torre », en relation avec une occupation rurale d’époque romaine et notamment julio-claudienne.
179 Alors que ce dernier critère ne saurait être suffisant, c’est pourtant lui qui, très souvent, sert principalement à fonder nombre d’hypothèses, dont celles de la localisation des différents camps et fortins de la circonvallation de Numance elle-même. Or, comme le souligne à juste titre un article récent d’A. Jimeno Martínez, « Numancia. Campamentos romanos y cerco de Escipión », p. 173 : « Es necesaria una metodología que supere la convencional prospección del terreno y la fácil ecuación, pero excesivamente simple, de donde se encuentren restos cerámicos de época escipiónica, necesariamente debe situarse un campamento. »
180 Á. Alonso Sánchez, Fortificaciones romanas en Extremadura ; Ead., « Cabeza Rasa », pp. 143-153 (dont les conclusions sont plus mesurées) ; Ead., « El fortín romano del “Castillo del Puerto” », pp. 417-430. Très peu de ces sites ont été fouillés et les sondages menés sur deux d’entre eux, Castillo del Puerto et Cabeza Rasa, ne permettent pas selon nous de parvenir aux conclusions proposées. D’une manière générale, dans la petite synthèse référencée au début de cette note, A. Alonso Sánchez reconnaît (p. 40) privilégier la prospection, la toponymie et la situation (notamment la proximité de la Via de la Plata). Très dépendante des jugements émis par des érudits du début du XXe siècle, elle ne fournit pas un cadre chronologique très clair, même si elle semble (p. 106) placer la majorité de ces sites « hacia la época alto imperial ». Dans le même esprit, voir A. Alonso Sánchez et J. M. Fernández Corrales, « El proceso de romanización de la Lusitania oriental. La creación de asentamientos militares », pp. 92-93, qui attribuent désormais ces sites à un réseau de castella antérieur à la fondation d’Augusta Emerita. Un bon exemple des problèmes soulevés pour dater et interpréter ce type de vestiges est fourni par la fortification de Los Canchuelos, dans la province de Cáceres : A. González Cordero et M. de Alvarado Gonzalo, « El recinto fortificado de Salvatierra de Santiago », pp. 127-132.
181 P. Ortiz Romero et A. Rodríguez Díaz, « Problemática general en torno a los recintos-torre de la Serena », pp. 1141-1150 ; P. Ortiz Romero, « Excavaciones y sondeos en los recintos tipo torre de La Serena », pp. 301-317 ; Id., « De recintos, torres y fortines », pp. 177-193 ; P. Ortiz Romero et A. Rodríguez Díaz, « Defensa y territorio en la Beturia », pp. 219-251 ; Id., « La torre de Hijovejo », pp. 77-95.
182 Voir ainsi, pour le Portugal, les sites de Mata Filhos (Mértola), Monte da Nora (Terrugem) et Castelo das Guerras (Moura) cités par C. Fabião, « The Roman Army in Portugal », notamment pp. 119-120, qui précise qu’aucun d’entre eux n’a fait l’objet de fouilles. Néanmoins, selon lui, ces vestiges « may be related to the Roman army because they do not fit with the known native settlement pattern, have great amounts of imported ceramics, uncommon in native contexts, and they were located in places without profitable resources that might justified the investment of the settlement ». L’auteur précise en effet que, pour le Portugal, la présence de matériel importé lui semble spécialement révélatrice d’une présence militaire, étant donné que les contacts entre les indigènes et les Romains antérieurs à la conquête y sont inexistants. Non sans contradiction, le même auteur se montre toutefois moins affirmatif dans une autre publication : Id., « Arqueología militar romana da Lusitania », p. 55, dans laquelle il juge particulièrement délicate l’interprétation de ce type de matériel trouvé sur les sites indigènes (« não parecerá aceitável imaginar […] que todos os objectos importados documentam presenças romanas »).
183 M. Tarradell, « Un fortí romà a Tentellatge », pp. 245-250 : en l’absence de toute fouille et même de toute prospection, le terme de fortin est employé en raison de l’aspect des ruines, proches d’une tour quadrangulaire, et de la situation, à proximité d’une route au débouché des Pyrénées (« El monument, que suposem unfortí, té doncs una clara significació com a guàrdia d’un punt clau d’enllaç de comunicacions, i com una defensa en front dels perills que podien venir dels pobles de la muntanya. ») Aucun élément de datation sûre n’est connu, alors que l’édifice, intégré dans une ferme ruinée d’époque moderne, présente en revanche certaines difficultés évidentes. À notre connaissance, aucune fouille n’a eu lieu depuis.
184 J. Llinàs i Pol et alii, « El campament romà de Peralada », pp. 246-247, s’appuient, pour interpréter le petit tronçon de muraille retrouvé, sur la situation (contrôle d’un passage naturel), la technique de construction (double parement), ainsi qu’une datation éventuelle de la première moitié du IIe siècle (par un fragment d’amphore Dressel 1Aet de céramique campanienne A) et donc un rapprochement avec les campagnes de Caton, pour conclure à un camp romain. Mais rien de tout cela n’est convaincant : le matériel, trop rare, ne peut être en outre aussi précisément daté et la construction du mur, sans mortier et sans appareil régulier, est parfaitement compatible avec d’autres techniques, par exemple indigènes, comme le pense P. Moret, « Fortifications ibériques tardives et défense du territoire en Hispanie citérieure », p. 163. Ce scepticisme est partagé par Á. Morillo Cerdán, « Los establecimientos militares temporales », p. 65. Dans leur monographie de 1998, les responsables du site semblent d’ailleurs privilégier désormais une datation d’époque médiévale : J. Llinàs et alii, La Peralada ibèrica i medieval segons l’Arqueologia, pp. 89-94. On serait donc dans un cas de figure très semblable à celui d’Almenara (voir supra, pp. 298-300) : le premier réflexe consiste à imaginer qu’il s’agit d’un camp romain, avant qu’un examen plus approfondi du site n’en révèle la véritable nature. Malgré cela, Peralada reste toujours inclu dans le plus récent des catalogues de sites militaires d’époque républicaine : Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, p. 263.
185 G. Palmada, « La fortificació republicana d’Olèrdola », pp. 257-288 (avec bibliographie antérieure). Située le long de la uia Heraclea, cette imposante fortification est considérée comme le vestige d’un poste fortifié romain destiné à contrôler militairement la plaine du Penedès ainsi que l’accès à Tarragone. Datée du dernier tiers du IIe siècle par la céramique, la construction de la muraille est attribuée à « un destacament militar itàlic ». Fondée sur un argument essentiellement archéologique (à savoir le caractère clairement italique de la technique de construction), cette hypothèse ne repose par ailleurs que sur la conviction de « l’arribada d’un gran contingent de tropes itàliques a Tarraco entre mitjan i el darrer quart del segle II a C pertal de ferfront a les Guerres Celtibèriques, centrades a la vall de l’Ebre, i precisament quan aquestes passen per la seva etapa més cruenta ». Voir également les doutes exprimés à juste titre par P. Moret, « Fortifications ibériques tardives et défense du territoire en Hispanie citérieure », pp. 165-166.
186 J. M. Pastor Eixarch, « Sobre la identificación de Segontia con Medinaceli y la localización, junto a ella, de un posible “castra” », pp. 215-221, signale la découverte, à 1,5 km au nord-ouest de Medinaceli, d’une série de structures linéaires de pierre et de terre mêlées qu’il interprète comme les vestiges des angles nord-oriental et nord-occidental d’un camp romain dont la forme et la superficie sont inconnues, mais qu’il restitue par comparaison avec les cas d’Almazán, et de Renieblas IV et V. En l’absence de fouilles, le tracé des structures conservées est déterminé par la prospection et par la photographie aérienne de 1958. « El convencimiento de que se trata de un campamento romano » (p. 221) est fondé sur la découverte en superficie d’un fer de dolabra, de la partie sommitale d’un casque de bronze interprété comme appartenant au type Montefortino et surtout d’un denier fourré romain datable de 49 av. J. -C, trouvé dans l’angle nord-oriental du site par un éleveur de la région. Sur cette base, dont il reconnaît toutefois la faiblesse, l’auteur considère que le site pourrait correspondre à un camp romain établi dans la seconde moitié du Ier s. av. J.-C. Dans l’état actuel du dossier, et en attendant un examen plus approfondi du site, cette hypothèse nous semble tout à fait prématurée.
187 H. Bauzà et A. Ponç, « Una fortificació romana a Ses Salines », pp. 101-114. Les auteurs attribuent à l’armée de Metellus Balearicus un fossé détecté dans la partie sud-est de l’île. En forme de triangle isocèle inversé, il mesure 3,20 m de large et 3,50 m de profondeur. En raison de la densité actuelle de l’habitat, la structure n’a fait l’objet que de quelques sondages. Une seule entrée, située au nord-ouest, est mentionnée par les auteurs. Le matériel, peu abondant, est datable entre la période talayotique et le VIe siècle de notre ère. Ces critères, particulièrement vagues, nous paraissent bien minces, voire insignifiants, pour conclure, comme le font les auteurs (p. 112), à une fortification romaine temporaire transformée ensuite en établissement civil. Á. Morillo Cerdán, « Los establecimientos militares temporales », p. 66, préfère pour sa part ne pas se prononcer. Voir les mêmes réserves dans Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, p. 280.
188 J. C. Labeaga Mendiola, « Hallazgos monetarios en Sangüesa », pp. 223-224 ; M. Ramos Aguirre, « El campamento de “Los Cascajos” », pp. 426-429. Située sur une terrasse fluviale, le site se présente comme une enceinte plus ou moins rectangulaire (300 x 200 m) précédée sur son côté occidental par un fossé « de sección aparentemente triangular ». Une structure quadrangulaire, interprétée comme une tour d’angle, a été dégagée au sud-est. Le matériel, très peu abondant, est exclusivement composé de céramique celtibère et de céramique romaine commune. C’est essentiellement un denier d’argent de Turiasu, trouvé dans le fossé en 1949, qui fonde la datation proposée : le Ier siècle, avec une préférence pour l’époque de la guerre sertorienne. Devant les lacunes évidentes de ce dossier, Á. Morillo Cerdán, « Los establecimientos militares temporales », p. 63, préfère avec raison classer le site parmi les cas problématiques ; voir également Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, p. 228, plus explicite encore : « for the moment, the identification of this deposit as a Roman camp raises serious doubts ». Pour notre part, il nous semble qu’aucun des éléments publiés n’autorise l’interprétation hâtivement proposée par les inventeurs.
189 A. M. Adroher Auroux et A. López Marcos, « El impacto sobre los asentamientos ibéricos en la Alta Andalucía », pp. 27-28 ; A. M. Adroher Auroux et alii, « La fortificación romana del Cerro del Trigo », pp. 243-261 ; F. Diosono, « El castellum de época republicana del Cerro del Trigo y el impacto militar romano », pp. 263-271 ; Ead., « El castellum romano del Cerro del Trigo (Puebla de Don Fadrique, Granada) y el control del territorio en la época republicana », pp. 119-128 ; A. M. Adroher Auroux et alii, « Estructuras defensivas tardorrepublicanas en el ámbito rural de la Bastetania », notamment pp. 627-629 ; Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, pp. 238-240. Le site est connu seulement depuis 1999. Il s’agit d’une enceinte quasi-rectangulaire de 5.362 m² en grands blocs réguliers située sur une hauteur et dont la construction est datée des années 100-90 par le peu de matériel trouvé en superficie (notamment quelques fragments de Dr. 1A et de Campanienne A). À cela s’ajoutent quelques structures internes, considérées comme des baraques. Sur cette seule base, le site est interprété comme un fortin romain ayant abrité une garnison permanente durant un siècle et demi, dont la mission était d’assurer ou bien le contrôle d’une région jugée particulièrement turbulente, ou bien celui des mines d’or de Caniles de Baza. Comme souvent, ces hypothèses se fondent surtout sur des comparaisons avec l’interprétation donnée pour d’autres sites (Castelo da Lousa, La Serena, Lomba do Canho, etc…) dont la fragilité vient d’être soulignée. On peut s’étonner en outre qu’une occupation aussi longue ait laissé aussi peu de traces : l’article collectif de 2004 souligne (p. 257) « la escasez de material que puede observarse en superficie », mais l’explique aussitôt… par le caractère militaire du site (« una tropa no puede cargar sistemáticamente con un servicio de cocina y mesa afrontando, como debían, movilidades constantes que quedarían algo impedidas ante el transporte de este tipo de materiales, pesados y voluminosos »). Non seulement cet argument semble contradictoire avec la nature prêtée auparavant au site (p. 250), mais il fait aussi bon marché de la prédominance de la céramique indigène, constatée parallèlement par les inventeurs eux-mêmes (« las tropas acuarteladas en esta fortificación se abastecerían de este tipo de productos en los mercados indígenas locales o regionales »). On ne saurait mieux dire que l’identification de ces structures avec les vestiges d’un castellum romain est moins une conclusion qu’un postulat.
190 F. Brotóns Yagüe et A. J. Murcia Muñoz, « El castellum tardorrepublicano del Cerro de las Fuentes de Archivel », pp. 639-653 ; Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, pp. 234-238. Situé dans la province de Murcie, le Cerro de las Fuentes de Archivel a fait l’objet d’une fouille de sauvetage en 2000, en raison des travaux liés à la construction d’un point d’observation panoramique destiné aux touristes. Depuis 2001, des sondages annuels ont été réalisés sur les solides fortifications situées dans la partie sud de la hauteur. Celles-ci se composent d’une enceinte polygonale de 2.942 m², dotée de deux tours carrées au niveau de l’unique porte, laquelle est précédée en outre d’un double bastion. Parmi le matériel retrouvé dans le niveau de destruction de la tour occidentale, où domine de façon écrasante la céramique de l’Ibérique Final, quelques petits fragments de vaisselle importée et un morceau d’amphore Dressel 1B conduisent les inventeurs à privilégier, abusivement selon nous, une chronologie du second ou du troisième quart du Ier siècle, afin de mettre l’incendie de la tour en relation avec la guerre civile entre Césariens et Pompéiens. Outre les difficultés soulevées par un traitement aussi désinvolte du mobilier céramique, certaines observations révèlent, malgré les appels à la prudence émis par les auteurs, les forts présupposés de l’analyse comme la légèreté de la méthode (p. 645) : « obviando la técnica del emplecton, la fábrica de los zócalos está más en relación con las características de la arquitectura propiamente indígena que itálica, lo que nos hace pensar que su construcción pudo ser debida a tropas auxiliares hispanas según la castramentatio [sic] implantada o diseñada por metatores romanos ». D’autre part, un peu au nord-est, le vestige d’un autre mur, signalé par les auteurs sans autre précision (p. 641), pose le problème de la véritable configuration du site.
191 Ce site n’a pas encore donné lieu à une publication. Il est signalé par Á. Morillo Cerdán, « Los establecimientos militares temporales », p. 66 et par Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, p. 287. L’auteur doit cette information à A. Espinosa. C’est semble-t-il la simple découverte d’un fossé en V, dans lequel a été retrouvé du matériel datable du début du Ier siècle, qui fonde l’hypothèse de castra républicains, bien que le plan du site ne soit pas connu.
192 Il s’agit d’un petit site de hauteur fortifié, d’une superficie de 120 m2 et doté d’un rempart de pierre et d’adobe. Une série de compartiments adossés à la muraille a été mise au jour : chacun de ces compartiments comporte un foyer. Le matériel produit par l’ouverture d’un petit sondage se compose de céramique italique importée, de monnaies et d’armes, mais en très petites quantités. Traditionnellement, Pedrão était considéré comme une agglomération indigène en voie de romanisation. Depuis peu, il est plutôt interprété comme un poste militaire romain : C. Fabião, « Arqueología militar romana da Lusitania », pp. 63-64 ; Id., « The Roman Army in Portugal », p. 119. Cet auteur reconnaît que l’organisation du site rappelle plutôt celle des agglomérations indigènes, mais ne voit pas d’autres explications qu’une fonction militaire pour ce trop petit site « that [doesn’t] present specific military structures orartefacts but that [is] hard to underst and as settlement out of that strategy of control and domain ».
193 Voir par exemple C. Fabião, « Arqueología militar romana da Lusitania », p. 55, qui, tout en déplorant le manque de données explicites, admet selon une logique déterministe l’établissement de postes militaires plus ou moins permanents : « afinal, aquelas que garentem um efectivo domínio e contrôle dos territórios, objectivos sempre perseguidos ».
194 Tarragone en 218 (Tite-Live, XXI, 61, 4) ; Iliturgi en 214 (Tite-Live, XXIV, 41, 8) ; Carthagène en 209 (Tite-Live, XXVI, 51, 9 ; Appien, Ib., 16) et en 206 (Tite-Live, XXVIII, 36, 5) ; Castulo (Appien, Ib., 27) et Sucro (Tite-Live, XXVIII, 24, 5) en 206 ; Aebura en 181 (Tite-Live, XL, 30, 3) ; Munda en 179 (Tite-Live, XL, 47, 2) ; Cauca en 151 (Appien, Ib., 52) ; Itucca en 143 (Appien, Ib., 66) ; enfin, plusieurs sont également mentionnées (Ilerda, Carmona, Cordoue, Gades, Ategua, Ulia, Munda) pour 49 et 45 par le Bellum Ciuile et le Bellum Hispaniense.
195 Tite-Live, XXI, 61, 4.
196 Polybe, X, 20, 8 ; Tite-Live, XXVI, 51, 9 ; Appien, Ib., 16.
197 Tite-Live, XXVIII, 36, 5.
198 Contra S. Ramallo Asensio et alii, « Carthago Nova », p. 112 : selon ces auteurs, la garnison laissée par Scipion en 209 s’est rapidement convertie en un authentique praesidium permanent commandé par un praefectus. On n’en trouve pourtant nulle mention dans les sources. Récemment toutefois, on a cru pouvoir mettre en évidence une phase d’occupation ou de réutilisation de la muraille punique par cette garnison romaine, grâce notamment à des trouvailles de Campanienne A dans le quartier de La Milagrosa et dans la rue Soledad. Voir S. Ramallo Asensio et E. Ruiz Valderas, « Carthago Nova. Capital de Hispania Citerior », p. 116 ; S. Ramallo Asensio, « Carthago Nova. Arqueología y epigrafía de la muralla urbana », pp. 338-340.
199 Voir p. 369.
200 J. Serra Vilaró, « La muralla de Tarragona », pp. 221-236 ; N. Lamboglia, « Il probleme delle mure e delle origini di Tarragona », pp. 397-405.
201 T. Hauschild, « La puerta romana de la muralla de Tarragona », pp. 23-34 ;Id., « Torre de Minerva », pp. 49-73 ; L. Papiol Molnè, « La muralla romana de Tarragona », pp. 113-128 ; T. Hauschild, « La muralla romana de la ciutat de Tarragona », pp. 131-180 ; Id., « Excavaciones en la muralla romana de Tarragona », pp. 11-38 ; en dernier lieu, Id., « Traditionen römischer Stadtbefestigungen der Hispania », pp. 218-220.
202 T. Hauschild, « La muralla romana de la ciutat de Tarragona », p. 180 ; X. Aquilué et X. Dupré, Reflexions entorn de Tarraco, pp. 15-18.
203 T. Hauschild, « Torre de Minerva », p. 68 ; Id., « La muralla romana de la ciutat de Tarragona », pp. 175 et 180, n. 91. Il est suivi par Á. Morillo Cerdán, « Fortificaciones campamentales de época romana en España », p. 148.
204 X. Aquilué et X. Dupré, Reflexions entorn de Tarraco, pp. 16-17 ; X. Aquilué et alii, « La cronologia de les muralles de Tàrraco », p. 284 ; J. Ruiz de Arbulo, « Scipionum Opus and Something More », p. 38.
205 X. Aquilué etX. Dupré, Reflexions entorn de Tarraco, p. 18 : « Així mentre que la Part Alta resta com a nucli estrictament militari polític, destinat a hostatjar els contingents militars i a organitzarels aspectes de la conquesta, la Part Baixa es converteix en un nucli urbà i comercial, com a resultat d’un procés de contacte entre els habitants indígenes del poblat i les tropes romanes installades al Praesidium des definals del segle III a. C. » ; cette conclusion est partagée parG. Alföldy, Tarraco, p. 30, qui suppose que la douceur du climat permettait aux troupes de loger sous la tente, expliquant ainsi l’absence de cantonnements en dur dans la partie haute de la ville ; elle a été dernièrement reprise par M. Díaz García, « La Tarraco republicana », p. 131.
206 J. Ruiz de Arbulo, « Los inicios de la romanización en Occidente », p. 464 ; S. Keay, « Processes in the Development of the Coastal Communities of Hispania Citerior in the Republican Period », p. 127 ; A. Prieto Arciniega, « Tarraco », p. 85 ; J. M. V. Arbeloa i Rigau, Tarragona romana, pp. 6 et 12 ; J. Menchón i Bes et J. Massó Carballido, Les muralles de Tarragona, pp. 18-29 ; A. Bermúdez Medel et J. Menchón i Bes, « Tarraco : de praesidium militar a urbs », pp. 127-128 et 133-134 ; X. Dupré Raventós (éd.), Tarragona, pp. 30-33 ; Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, pp. 284-287.
207 X. Aquilué et alii, « La cronologia de les muralles de Tàrraco », p. 294.
208 Ibid., p. 295.
209 Ibid., p. 297.
210 Tite-Live, XXI, 61, 4 ; or, X. Aquilué et alii, « La cronologia de les muralles de Tàrraco », p. 294, estiment que la garnison était nombreuse seulement au tout début, avant que la construction des tours ne permît ensuite d’en réduire la taille : « La poca alçària de la primera muralla (6 m) i les nombroses poternes semblen indicar la presència d’una guarnició important. Sembla tractar-se de la defensa immediata d’un exèrcit aquarterat contra un atac persorpresa de la cavalleria. Tanmateix, l’addició de torres artilleres de flanqueig indiquen que, a més a més, la muralla va ser concebuda també per ser custodiada per una guarnició més reduïda i preparada par a la defensa davant d’un setge. » Mais, cette restitution est dépourvue de tout fondement dans la documentation et est, en outre, en contradiction avec la théorie des deux phases admise par ces auteurs eux-mêmes, car T. Hauschild, « Torre de Minerva », p. 66, précise bien que les poternes appartiennent selon lui à la seconde phase. Quant à la protection contre une attaque de la cavalerie ennemie, il nous semble que la topographie la fournit déjà : les tronçons conservés de la muraille sont en effet situés sur la partie la plus élevée de la colline.
211 Ils suivent en cela T. Hauschild, « Excavaciones en la muralla romana deTarragona », pp. 20-21, qui a reconnu des meurtrières sur la façade orientale de la Tour de Minerve. Voir aussi Id., « Traditionen römischer Stadtbefestigungen der Hispania », p. 218 : « Mit der Interpretation als Truppenlager würde man in Tarraco auch die langen Abstände der Türme verstehen, auf denen sicher weittragende Geschütze größeren Formats stationiert waren. »
212 Le hasard fait que les trois tours considérées comme les restes de la première enceinte sont conservées dans une même portion de muraille : elles sont espacées chacune de plus de cent mètres (« més de 100 metres ») par rapport à leur voisine. Voir X. Aquilué et X. Dupré, Reflexions entorn de Tarraco, p. 13. D. Hourcade, qui, dans le cadre de ses travaux sur les fortifications urbaines d’Hispanie, a repris l’ensemble des mesures, nous a confirmé que la distance est de 150 mètres entre la Tour de l’Archevêque et la Tour du Cabiscol et de 100 mètres entre cette dernière et la Tour de Minerve.
213 X. Aquilué et X. Dupré, Reflexions entorn de Tarraco, p. 14, ont en effet proposé l’existence d’une troisième phase de l’enceinte, après la découverte dans la partie basse de la ville d’une base d’une tour quadrangulaire en opus caementicium, datée stratigraphiquement après 50 après J.-C. Le rapprochement avec une inscription du premier quart du IIe siècle après J.-C. les a conduits à situer cette phase à l’époque flavienne. En outre, la description de la muraille dans le secteur sud-ouest par L. Pons d’Icart, au XVIe siècle, fait état de cinq tours séparées entre elles par une cinquantaine de mètres, ce qui semble fournir aux auteurs l’apparence de cette troisième enceinte. Mais cette fois, la présence de tours à cette période ne leur paraît pas incompatible avec une garnison réduite : « L’activitat de renovació de les estructures defensives deTarraco en època alt-imperial no s’ha de relacionar amb un perill extern sinó que més aviat s’ha d’associara un interès pel manteniment del recinte emmutallat. »
214 J. Sánchez Real, « El método en la arqueología tarraconense. I : La muralla », pp. 53-54, a mis en doute à juste titre cette hypothèse. Voir aussi le scepticisme manifesté par J. Menchón i Bes et J. Massó Carballido, Les muralles de Tarragona, p. 27, qui maintiennent néanmoins (pp. 28 et 32) que la « Part Alta » était bien « el centre politicomilitar » par opposition à la « zona residencial i comercial » dans la ville basse. Sur la question du cantonnement en ville, voir infra, pp. 367-368 et 404.
215 Pour sa part, G. Alföldy, Tarraco, p. 29, ne fait pas état du débat, se contentant d’affirmer que partie haute et partie basse de la muraille sont « de la misma época ».
216 J. Serra Vilaró, « La muralla de Tarragona », p. 226 et fig. 5.
217 Le réexamen de l’intérieur de mur en 1979 n’a pas remis en cause cette conclusion : L. Papiol Molnè, « La muralla romana de Tarragona », p. 119, tout en constatant certains contrastes dans la taille des pierres composant les différentes couches du remplissage, se contente de relever le parallèle aussi bien avec le tronçon publié parJuan Serra qu’avec celui voisin de la Tour de Minerve, deux secteurs qu’il estime toutefois appartenir, suivant en cela T. Hauschild, à « una segunda fase de construcción de la muralla, con zócalo bajo ». Sa description s’inscrit donc dans une interprétation préalable, mais ne contribue pas à la démontrer.
218 T. Hauschild, « La puerta romana de la muralla de Tarragona », p. 29 ; à noter que p. 25, il a admis les conclusions deJuan Serra : « Basándonos en estas apreciaciones, tenemos, pues, que suponerque el muro megalítico y la pared de sillares que sobre él se levanta, fueron construidos dentro de la misma etapa de trabajo. El muro megalítico no podía considerarse entonces como perteneciente a une fase anterior, sino como una especie de zócalo. » Mais il n’y voit aucune contradiction puisque ce constat lui sert seulement à démontrer que ce socle mégalithique ne peut être antérieur à 218.
219 Id., « Torre de Minerva », p. 66, oppose ainsi la première phase (zócalo alto) et la seconde (zócalo bajo).
220 J. Serra Vilaró, « La muralla de Tarragona », p. 235, voyait dans ces contrastes la main de différents architectes ; D. Neubauer, « La construcción megalítica de las murallas ibero-romanas de Tarragona », pp. 107-112, explique l’inégalité de hauteur du socle mégalithique par les contraintes liées au transport des matériaux. Peu convaincante dans son détail, sa démonstration a cependant le mérite de suggérer qu’une même muraille pouvait ne pas présenter une trop grande uniformité.
221 Ce point a été particulièrement mis en évidence par J. Sánchez Real, La muralla de Tarragona, pp. 54-68 ; voir aussi dernièrement P. Arroyo i Casals et J. Menchón i Bes, « La muralla a la Baixada del Roser », pp. 397-398 et 403-404.
222 J. Sánchez Real, « El método en la arqueología tarraconense. I : La muralla », pp. 41-42.
223 T. Hauschild, « Torre de Minerva », p. 64.
224 Id., « La muralla romana de la ciutat de Tarragona », pp. 157-170 ; voir à ce sujet les remarques critiques de J. Sánchez Real, « El método de la arqueología tarraconenses. III : El circo », p. 117 ; pour leur part, P. Arroyo i Casals et J. Menchón i Bes, « La muralla a la Baixada del Roser », p. 404, insistent sur l’importance probable des remaniements médiévaux dans cette zone.
225 Face aux contradictions du dossier, cette alternative est de plus en plus prise en compte par les travauxrécents : J. Sánchez Real, « El método en la arqueología tarraconense. I : La muralla », p. 44 : « ¿No será más aceptable el que la segunda fase se llevara a cabo sobre la marcha, replanteando y aprovechando lo hecho hasta aquel momento, ganando en altura y anchura la construcción? » ; J. Gimeno Pascual, Estudios de arquitectura y urbanismo en las ciudades romanas del nordeste de Hispania, p. 152, propose d’envisager « no tanto dos fases bien diferenciadas sino dos momentos de una misma fase con cierta continuidad y debidos en esencia a una modificación de los criterios constructivos—poliorcéticos—y urbanísticos que se produce en estos años » ; M. Díaz García, « La Tarraco republicana », p. 123 : « Esto nos lleva a plantearnos si existen dos fases diferenciadas, o hay un proyecto que se modifica y amplía, aprovechando la estructura anterior. » Tous ces travaux maintiennent cependant l’idée d’un début de la construction au cours de la seconde guerre punique ou légèrement après.
226 J. Sánchez Real, « La exploración de la muralla deTarragona en 1951 », pp. 91-117, défend une datation vers 180 ; M. Vegas, « Auswahl aus den keramikfunden der Stadtmauer von Tarragona », pp. 130-131, une datation entre 175 et 150 ; X. Aquilué et alii, « La cronologia de les muralles de Tàrraco », p. 294, une datation entre 150 et 125. Ces derniers rappellent toutefois avec raison les limites du contexte dans lequel ce matériel est trouvé et la difficulté à parvenir à « una datació precisa en base a l’estudi conjunt de totes les formes i produccions ceràmiques ».
227 A. Prieto Arciniega, « Tarraco », p. 88, pourtant partisan d’une datation haute, préfère ne pas se prononcer quant à une construction, dès l’année 218, des murailles visibles actuellement ; X. Aquilué et alii, « La cronologia de les muralles de Tàrraco », p. 295, tout en acceptant finalement l’hypothèse d’une création des Scipions, reconnaissent eux-mêmes que les données stratigraphiques disponibles ne permettent pas, en fait, de l’établir avec certitude ; les mêmes auteurs, dans Tàrraco. Guia Arqueològica, p. 41, se prononcent plus nettement en faveur d’une pétrification plus tardive (en 197 ?) du castrum originel ; voir aussi à ce sujet J. Menchón i Bes et J. Massó Carballido, Les muralles de Tarragona, p. 26, qui rappellent que « l’absència d’un recinte defensiu petri de la categoria de la “primera fase” de la muralla de Tàrraco no és pas un entrebanc per al desenvolupament d’un centre militar amb tots els equipaments propis d’un cap de pont […]. Construir una muralla d’aquestes dimensions sembla més una tasca planificada amb vista a un asentament molt més llarg i estable, amb vista ja a la conquesta de la Península ».
228 Tite-Live, XXI, 61, 2.
229 Cette activité diplomatique est explicitement renseignée par Tite-Live, XXI, 60, 3. Sur l’importance de cette stratégie d’alliance tout au long du second conflit punique, voir supra, pp. 60-63. Sa fragilité est révélée par le succès du raid d’Hasdrubal qui entraîne aussitôt la défection des Ilergètes (Tite-Live, XXI, 61, 5).
230 Tite-Live, XXI, 61, 4.
231 Tite-Live, XXI, 61, 4 : Et Scipio […] cum in paucos praefectos nauium animaduertisset, praesidio Tarracone modico relicto Emporias cum classe rediit. (« De son côté, Scipion […] prit des sanctions contre un petit nombre de capitaines de navires, laissa une garnison peu importante à Tarragone et regagna Emporion avec sa flotte », trad. P. Jal, CUF).
232 Tite-Live, XXI, 60, 5. Il faut évidemment comprendre ici l’emploi du terme de prouincia dans son sens de « commandement militaire ».
233 Tite-Live, XXI, 61, 5.
234 C’est dans le port de Tarragone qu’ont mouillé les armées de P. Scipion en 217 (Tite-Live, XXII, 22, 2) et de Nero en 211 (Tite-Live, XXVI, 17, 2). Mais ce n’est pas systématique, car P. Scipion en 210 débarqua à Emporion (Tite-Live, XXVI, 19, 11).
235 Tite-Live, XXXIV, 9, 10.
236 T. Hauschild, « Torre de Minerva », p. 67, raisonne en effet ainsi : a) Lamboglia a daté le matériel trouvé dans la muraille « algo posterior al 218 a. C. » ; b) or ce matériel provient d’un tronçon où le socle mégalithique est le plus bas ; c) comme ses observations architectoniques ont conduit T. Hauschild à estimer que cette portion du rempart était postérieure à la tour, les céramiques « datan, portanto, unafase de reforma » ; d) le reliefse trouvant selon lui in situ et représentant sans doute Minerve, la tour est donc romaine et ne peut être datée avant 218, tout en étant antérieure aux réaménagements ; e) par conséquent, la première phase de la muraille, à laquelle elle appartient, ne peut avoir été érigée qu’au tout début de la présence romaine ; f) la seconde phase est alors immédiatement postérieure (premières décennies du IIe siècle). On le voit, ce processus de datation présuppose établie la distinction des deux phases.
237 Pline, NH, III, 21 : « la colonie de Tarragone œuvre des Scipions comme Carthagène est celle des Puniques ».
238 La déduction de la colonie remonte à l’époque césarienne, peut-être dès le lendemain de la bataille de Munda, sous le nom de colonia Iulia Vrbs Triumphalis Tarraco. Auparavant, la ville était sans doute une cité libre. F. Vittinghoff, Römische Kolonisation und Bürgerrechtspolitik, p. 79 ; H. Galsterer, Untersuchungen zum römischen Städtewesen, p. 71 ; G. Alföldy, Tarraco, pp. 31et 35-36 ; Id., dans X. Dupré Raventós (éd.), Tarragona, p. 8 ; J. Ruiz de Arbulo, « Scipionum Opus and Something More », pp. 41-42.
239 Voir à ce sujet les remarques en ce sens de C. Castillo, « Hispanos y romanos en Corduba », pp. 191-192. L’archéologie a montré qu’au moment où les Scipions ont fait le choix du site comme base privilégiée, le centre indigène portuaire devait déjà être assez important, comme en témoigne la grande quantité d’amphores massaliotes trouvées dans les niveaux du IIIe siècle. Voir A. Prieto Arciniega, « Tarraco », p. 81.
240 Polybe, X, 7, 4 ; Tite-Live, XXVI, 19, 12 et XXVI, 51, 10.
241 Tite-Live, XXXIV, 17, 7. Le passage ne précise pas explicitement le lieu de convocation, mais la présence du consul à Tarragone est bien attestée lors de cette campagne (Tite-Live, XXXIV, 16, 6 et 10).
242 Les sources sont peu explicites sur la dimension militaire de la ville à partirde 195. Les rares mentions dont nous disposons suggèrent que le gouverneur de Citérieure y réglait sans doute les affaires de la province, comme le pense J. M. Martínez Gázquez, « Tarragona y los inicios de la romanización de Hispania », pp. 80-81. De sa présentation, il ne ressort pas clairement toutefois si cet auteur estime que cette fonction impliquait ou non une garnison permanente. Plus nette en ce sens est la position de G. Alföldy, Tarraco, p. 27 et J. Ruiz de Arbulo, « Los inicios de la romanización en Occidente », p. 472.
243 Tite-Live, XL, 40, 13-14 : Ita uictor exercitus renouata priore gloria Tarraconem est perductus. […] Cum summa concordia quos dimitterent quosque retinerent milites composuerunt. (« C’est ainsi que l’armée victorieuse, ayant redonné de l’éclat à sa gloire antérieure, fut conduite à Tarragone. […] En plein accord, ils décidèrent ensemble quels seraient les soldats qu’ils libéreraient et quels seraient ceux qu’ils maintiendraient en service », trad. C. Gouillart, CUF).
244 Tite-Live, XL, 39, 3-4 : In Hispaniam ulteriorem eunti L. Postumio Albino collegae Gracchus mandauerat ut Q. Fuluium certiorem faceret Tarraconem exercitum adduceret : ibi dimittere ueteranos supplementaque distribuere et ordinare omnem exercitum sese uelle. Dies quoque, et ea propinqua, edita Flacco est qua successor esset uenturus. Haec noua allata res, omissis quae agere instituerat, Flaccum raptim deducere exercitum ex Celtiberia cum coegisset. (« Gracchus avait chargé son collègue Lucius Postumius Albinus, qui allait en Espagne Ultérieure, de faire savoir à Quintus Fulvius qu’il devrait conduire l’armée à Tarragone : c’était là qu’il voulait licencier les vétérans, répartir les renforts et organiser toute l’armée. La date de l’arrivée de son successeur — et celle-ci était proche — fut également communiquée à Flaccus. L’annonce de cette nouvelle contraignit Flaccus à faire sortir en toute hâte son armée de Celtibérie, en abandonnant le plan qu’il avait commençé à exécuter », trad. C. Gouillart, CUF).
245 Sur le détail de cette affaire et l’âpreté du débat devant le sénat, voir supra, pp. 155-156.
246 Tite-Live, XL, 40, 15 : Inde Fuluius exauctoratis militibus in naues impositis Romam est profectus, Sempronius in Celtiberiam legiones duxit. (« Puis Fulvius partit pour Rome, après avoir fait embarquer les soldats démobilisés, et Sempronius conduisit les légions en Celtibérie », trad. C. Gouillart, CUF).
247 J. Ruiz de Arbulo, « Tarraco, Carthago Nova y el problema de la capitalidad de la Hispania Citerior republicana », pp. 115-130.
248 La présence d’un conuentus ciuium Romanorum n’est pas attestée, mais est fort probable. Sur ce point, voir G. Alföldy, Tarraco, p. 31.
249 L’archéologie suggère une grande activité urbanistique dès le milieu du IIe siècle, du moins dans la partie basse de la ville : M. Díaz García, « La Tarraco republicana », pp. 123-126. Notre connaissance de ce développement demeure encore très lacunaire cependant.
250 Voir les propositions en ce sens de J. Menchón i Bes et J. Massó Carballido, Les muralles de Tarragona, pp. 28-29, et d’A. Bermúdez Medel et J. Menchón i Bes, « Tarraco : de praesidium militar a urbs », pp. 133-134, qui cependant limitent cette interprétation, à tort selon nous, à ce qu’ils continuent d’appeler la « seconde phase ». Sur la nécessité, d’un point de vue méthodologique, d’extraire l’étude des murailles urbaines romaines du contexte militaire et sécuritaire où l’historiographie les enferme trop souvent, voir les réflexions stimulantes de D. Hourcade, « Fortifications urbaines et discours idéologique », pp. 135-155 ; Id., « Les murailles des villes romaines de l’Hispanie républicaine et augustéenne », pp. 295-324 ; Id., « Géographie des villes fortifiées en Lusitanie romaine », pp. 223-253.
251 On ne peut ainsi écarter la possibilité, comme on l’a déjà suggéré, que les premiers tronçons entrepris, par exemple, vers le milieu du IIe siècle, aient été adaptés ensuite, au fur et à mesure de la poursuite de la construction dans les décennies suivantes, à des conceptions architecturales révisées.
252 Les sondages réalisés en 1984 dans le secteurde la rue de Sant Llorenç, près de la cathédrale, ont livré de nombreuxfragments de formes récentes de céramique campanienneAdatables à partirde 150 et d’amphores Dressel 1A. X. Aquilué et X. Dupré, Reflexions entorn de Tarraco, pp. 5 et 16, estiment qu’il s’agit des premiers niveaux d’occupation romains dans la partie haute de la ville, contemporains de la seconde phase de la muraille. Cependant, J. Sánchez Real, « El método en la arqueología tarraconense. I : La muralla », p. 52, a bien montré que, étant donné sa position, ce sondage se situe à l’intérieur du tracé, certes hautement hypothétique, restitué par ces mêmes auteurs pour la première phase de la muraille. Il y a donc là une contradiction : si l’on admet la datation du matériel retrouvé à cet endroit, on ne saurait dater, comme ils le font, cette première phase du début du IIe siècle. Dernièrement, tout en admettant l’hypothèse traditionnelle du castrum dans la partie haute, J. M. Macias Solé et J. -A. Remolà Vallverdú, dans X. Dupré Raventós (éd.), Tarragona, p. 35, reconnaissent que « todavía existen numerosas cuestiones sin resolverreferentes a la funcionalidad de la parte alta de la ciudad, posterior sede del Concilium Prouinciae y del circo ».
253 Sur l’évolution de la ville avant l’arrivée des Romains, voir P. Rouillard, Les Grecs et la péninsule Ibérique, pp. 244-280 ; M. J. Pena Gimeno, « Emporiae », pp. 65-67.
254 Le terme de Neapolis est une désignation moderne destinée à distinguer commodément la nouvelle ville littorale de la Palaiapolis décrite par Strabon.
255 J. Ruiz de Arbulo, « Los inicios de la romanización en Occidente », pp. 466-471 ; X. Aquilué, « Empúries republicana », pp. 44-45.
256 R. Mar et J. Ruiz de Arbulo, Ampurias romana, pp. 203-244 ; X. Aquilué, « Empúries republicana », p. 45 ; J. Ruiz de Arbulo, « La evolución urbana de Emporion en época republicana », pp. 539-554 ; la dernière publication sur la naissance de la ville romaine tend à en rabaisser la chronologie à la première moitié du Ier s. : X. Aquilué et alii, « Greek Emporion and its Relationship to Roman Republican Empúries », pp. 21 et 29.
257 E. Sanmartí Grego, « Acerca del período tardorrepublicano en Emporion », p. 14 ; Id., La cerámica campaniense de Emporion y Rhode, p. 613.
258 X. Aquilué et alii, El fòrum romà d’Empúries, pp. 136-137 ; R. Mar et J. Ruiz de Arbulo, Ampurias romana, pp. 188-192 ; X. Aquilué et alii, « Greek Emporion and its Relationship to Roman Republican Empúries », pp. 24-25 ; Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, pp. 242-245 (soulignant toutefois l’imprécision du dossier).
259 J. Ruiz de Arbulo, « Los inicios de la romanización en Occidente », p. 472. Il estime toutefois que les deux praesidia n’avaient pas la même fonction.
260 La date de l’octroi du statut colonial à Ampurias ne fait pas l’unanimité : fixée dès 112 par E. Sanmartí, elle est probablement plus tardive, peut-être même césarienne, comme dans le cas de Tarragone.
261 J. Ruiz de Arbulo, « Los inicios de la romanización en Occidente », p. 471 ; R. Mar et J. Ruiz de Arbulo, Ampurias romana, pp. 199-200.
262 X. Aquilué et alii, El fòrum romà d’Empúries, p. 35.
263 M. J. Pena Gimeno, « Ampurias. Les débuts de l’implantation romaine », pp. 229-230.
264 Ibid., pp. 228-229.
265 Prudence qui n’est pas celle de X. Aquilué et alii, El fòrum romà d’Empúries, p. 47 : « La realitat d’aquest praesidium no solament ens ve demostrada per l’existència de la muralla que el protegía, sinó també perla del conjunt de las cisternes que asseguraven el proveïment d’aigua potable als seus defensors. »
266 Ibid., p. 45, mentionnent quinze silos, obstrués à différentes époques. Leur fréquence dans la région permet de penser que la majorité de ces silos est antérieure à l’occupation romaine de la colline et a cessé d’être utilisée ou bien dès l’arrivée des Romains, ou bien progressivement.
267 M. J. Pena Gimeno, « Ampurias. Les débuts de l’implantation romaine », pp. 231-234.
268 P. Moret, « Tite-Live et la topographie d’Emporion », pp. 73-74. Le mur de séparation interne à la future ville constituerait ainsi un élément en faveur d’une agglomération indigène préexistante à cet endroit.
269 Tite-Live, XXXIV, 9, 4-7.
270 Tite-Live, XXXIV, 13, 1.
271 L’obscurité du dossier est telle que J. Martínez Gázquez, La campaña de Catón en Hispania, pp. 161-162, par exemple, préfère ne pas se prononcer.
272 J. Puig i Cadalfalch, La arquitectura romana a Catalunya, p. 65 ; J. M. Nolla Brufau, « La campanya de M. P. Cató a Empúries el 195 a. de C. », pp. 193-218. D’autres ont admis également que la ville romaine s’est développée à partir d’un camp, mais privilégient celui de Gn. Scipion en 218 plutôt que celui de Caton en 195 : E. Ripoll Perelló, « Orígenes de la ciudad romana de Ampurias », pp. 190, suivi par J. M. Blázquez Martínez et R. Corzo Sánchez, « Luftbilder römischer Lager aus republikanischer Zeit in Spanien », p. 681.
273 A. Schulten, FHA, III, p. 183, proposait ainsi de le placer à La Serrilla.
274 M. Almagro Basch, Las fuentes escritas referentes a Ampurias, pp. 72-73. Comme la ligne de rivage a sensiblement reculé depuis l’Antiquité, certains pensent qu’il est aujourd’hui sous les eaux : E. Ripoll Perelló et M. Llongueras Campañá, « Embarcadero romano de Riells, en el ámbito empuritano », pp. 277-295 ; X. Nieto Prieto et J. M. Nolla Brufau, « El yacimiento arqueológico submarino de Riells-La Cota y su relación con Ampurias », pp. 143-162.
275 Un fragment de Caton, transmis par Fronton, Ad Ver., II, 1, va dans le même sens. À propos des opérations préalables à la bataille finale, il affirme (frgt. 35 M) : interea aliquot pauca castra feci (« pendant ce temps, j’ai établi quelques camps, peu nombreux »).
276 Tite-Live, XXXIV, 9.
277 Tite-Live, XXXIV, 10, 2.
278 Tite-Live, XXXIV, 11, 1.
279 Tite-Live, XXXIV, 13, 1 : Consul, ubi satis quod in speciem fuit ostentatum est, reuocari ex nauibus milites iubet : ipse, quum iam id tempus anni appeteret quo geri res possent, castra hiberna tria millia passuum ab Emporiis posuit.
280 Comme le fait abusivement E. Ripoll Perelló, « Orígenes de la ciudad romana de Ampurias », p. 188.
281 Ibid., p. 188, croit ainsi à une erreur de copiste (« cifra a la que acaso le sobra un cero por error de copista ») et propose de lire à la place « trois cents pas ». Mais l’argument est sans fondement et fait bon marché de la transmission du chiffre, donné en toute lettre par les manuscrits (tria millia passuum) ; E. Sanmartí Grego, « Acerca del período tardorrepublicano en Emporion », p. 14, pense que Caton a créé le praesidium à l’emplacement même de son camp et estime donc aussi (en note 18) que le chiffre livien est « un error, pues cuesta trabajo pensarque dejara sus naves desguarnecidas ». Ce faisant, il oublie que le flotte bénéficiait de la protection du port grec et pouvait donc compter sur la vigilance des alliés.
282 Donnant en cela plutôt raison à A. Schulten, FHA, III, p. 183.
283 P. Moret, « Tite-Live et la topographie d’Emporion », p. 73, interprète ainsi, avec beaucoup de vraisemblance, la mention d’Emporitani Hispani parmi les vaincus de la bataille d’Emporion (Tite-Live, XXXIV, 16, 4). C’est la seule façon raisonnable d’interpréter le texte de Tite-Live.
284 Pour la même raison, on ne peut accepter la suggestion de J. Ruiz de Arbulo, « Los inicios de la romanización en Occidente », pp. 468-469, qui, tout en admettant l’éloignement du camp d’hiver par rapport à la ville, estime à tort que cette prise de distance constituait une preuve de défiance du consul vis-à-vis de la loyauté d’Emporion que l’auteur croit partagée entre une faction proromaine et une faction antiromaine, sans même envisager l’existence de l’oppidum indigène.
285 Tite-Live, XXXIV, 13, 2 : inde per occasiones, nunc hac parte, nunc illa, modico praesidio castris relicto, praedatum milites in hostium agros educebat (« laissant une petite garnison dans son camp, il envoyait ses soldats piller le territoire ennemi, tantôt d’un côté, tantôt de l’autre, suivant les occasions », trad. M. Nisard modifiée). Sur l’emploi fréquent du terme praesidium en ce sens, voir infra, pp. 437-440. Sur la base arrière qu’était destiné à offrir le camp de marche pendant la campagne, voir les remarques (parfois discutables) de P. Cagniart, « Victori receptaculum, victo perfugium », pp. 217-234.
286 Tite-Live, XXXIV, 16, 6.
287 Devant la faiblesse des éléments disponibles, certains travaux se trouvent d’ailleurs contraints de nuancer la chronologie proposée pour l’installation du praesidium définitif. Ainsi, R. Mar et J. Ruiz de Arbulo, Ampurias romana, pp. 199-200, n’excluent pas qu’il ait pu être fondé seulement après le départ de Caton, et non pas par le consul lui-même. Mais, dans ce cas, on objectera qu’il n’y a aucune preuve à l’appui de cette hypothèse, en dehors des structures trouvées sous le forum, dont nous avons vu combien il était difficile de les interpréter avec certitude ou même vraisemblance.
288 Voir, dans le même sens, la prudence manifestée dernièrement à ce sujet par O. Olesti-Vila, « El control de los territorios del Nordeste Peninsular », p. 130, n. 20.
289 P. Le Roux, « Armées et promotion urbaine en Hispanie sous l’Empire », pp. 195-197.
290 Sur ce modèle du propugnaculum transformé en urbs, voir : M. Pfanner, « Modelle römischer Stadtentwiclung am Beispiel Hispaniens und der wesentlichen Provinzen », pp. 59-116 ; J. Á. Asensio Esteban, « Urbanismo romano republicano en la región de la cuenca del Ebro », p. 174.
291 R. Corzo Sánchez, « Organización del territorio y evolución urbana en Itálica », p. 309, qui en propose d’ailleurs un plan hypothétique sur sa fig. 4 ; A. Caballos Rufino, Itálica y los italicenses, p. 24 ; dernièrement, R. Corzo Sánchez, « La fundación de Italica y su desarrollo urbanístico », pp. 130-131 (et plan p. 132), a estimé que l’établissement turdétan et le praesidium ont été inclus dans une muraille commune avant le Ier s. av. J. -C. Il précise également que les structures du Cerro ne correspondent pas selon lui à un capitolium mais à un temple punique.
292 S. J. Keay, « Early Roman Italica and the Romanization of Western Baetica », pp. 28-31.
293 A. Ibáñez Castro, Córdoba hispano-romana, pp. 45-56 ; J. F. Rodríguez Neila, « Introducción a la “Corduba” romana en época republicana », p. 111 ; Id., « Corduba », p. 179.
294 A. Ibáñez Castro, Córdoba hispano-romana, p. 54, qui suit sur ce point la bibliographie antérieure, et notamment les travaux de S. de los Santos Gener. La même année, R. C. Knapp, Roman Córdoba, p. 9, a fermement rejetée cette hypothèse, faute de preuves, affirmant à juste titre en n. 31 (p. 7) : « such a Roman camp, supposedly established by L. Marcius, is a figment of the imagination ». Il a été suivi en cela par J. F. Rodríguez Neila, Historia de Córdoba, t. I, pp. 209-210. Depuis, sans aller jusqu’à reprendre l’hypothèse défendue par A. Ibáñez, les études les plus récentes ont néanmoins cherché à redonner du crédit à l’idée d’un praesidum initial, en s’appuyant sur des trouvailles de Campanienne A dans la partie nord de la ville romaine et sur la taille jugée disproportionnée de l’enceinte primitive de la ville (interprété comme l’indice d’un cantonnement de troupes) : J. F. Murillo Redondo et D. Vaquerizo Gil, « La Corduba prerromana », pp. 42-44 ; J. F. Murillo Redondo et J. L. Jiménez Salvador, « Nuevas evidencias sobre la fundación de Corduba y su primera imagen urbana », pp. 184-187 ; X. Dupré Raventós (éd.), Córdoba, pp. 39-40 ; D. Vaquerizo Gil, « Arqueología de la Corduba republicana », pp. 171-172.
295 Le raisonnement suivi par A. Ibáñez Castro, Córdoba hispano-romana, pp. 54-56, est de ce point de vue exemplaire. Après avoir souligné que, parmi les sources littéraires, « ninguna fuente en que basarse » ne permet de confirmer l’idée répandue selon laquelle L. Marcius occupa la ville en 206, l’auteur affirme néanmoins avec un luxe de détails que Marcius « establecería su campamento junto a la ciudad indígena en la que ya hemos referido […]. Este campamento situado al noroeste del recinto ibérico, por lo que no fue por completo una fundación ex novo, fue concebido para albergar a dos legiones ocuparía una extensión aproximada de unos 800 m. de N. a S. y 700 m. de O. a E., ya que no todos los autores coinciden en las mismas medidas. » Cette première phase donna naissance selon lui à ce qu’il appelle l’Urbs quadrata, une expression forgée de toute pièce pour désigner en réalité un simple camp militaire, comme le montre le plan figurant p. 291 et reproduisant le schéma théorique du camp polybien. Il conclut en disant (p. 56) que « no queda ningún resto arqueológico de esta urbs quadrata que tradicionalmente se atribuye a C. Lucio Marcio […] y únicamente nos queda aceptar la hipótesis sobre su existencia que, de sercierta, sería el núcleo de una de las ciudades más importantes de Hispania ».
296 Comme l’a bien fait valoir A. U. Stylow, « De Corduba a Colonia Patricia », p. 78.
297 R. C. Knapp, Roman Córdoba, le croit pourtant sur la base d’une comparaison avec le cas d’Ilipa. En effet, Id., Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 17, rapproche Tite-Live, XXXV, 1, 10, mentionnant une bataille près de cette ville en 194, et Strabon, III, 5, 9, attestant la présence de soldats romains à proximité de la même ville à l’époque de Posidonius. Il suggère donc que ces deux passages pourraient prouver qu’une garnison romaine demeura stationnée à cet endroit entre 194 et 100, soit « the longest recorded continuum for a garrison ». La démonstration n’est guère convaincante : le récit livien se contente en effet de faire état d’une bataille rangée aux environs de la ville (procul Ilipa urbe) et ne dit rien d’un éventuel praesidium. Même si celui-ci a existé à l’époque, ce que nous ne croyons pas, le témoignage de Strabon ne suffit pas à lui seul, de toute façon, à prouver qu’il demeura en place sans interruption jusqu’en 100. Face à ces objections, il devient donc hasardeux de tirer argument d’une garnison permanente à Ilipa pour étayer l’hypothèse de l’existence de celle de Corduba.
298 Les campagnes des années 79-78 sont précisément parmi les moins bien couvertes de la guerre de Sertorius par la documentation : P. O. Spann, Quintus Sertorius and the Legacy of Sulla, pp. 65-66 ; F. García Morá, Un episodio de la Hispania republicana, p. 86 ; S. Haba Quirós, Medellín romano, pp. 69 et 40-407.
299 F. García Morá, « Sertorio frente a Metelo », p. 389 ; S. Haba Quirós, Medellín romano, p. 407.
300 La relation de cette fondation avec Pompée, suggérée par son nom, est attestée par Strabon, III, 4, 10 ; Plutarque, Sert., XXI, 8, en évoquant un hivernage de Pompée chez les Vaccéens a conduit à supposer que ses castra hiberna se trouvaient placés à cet endroit. Voir en dernier lieu L. Amela Valverde, « Las ciudades fundadas por Pompeyo Magno en Occidente », pp. 10-20, pour qui « parece indudable que el campamento militar romano originaría la ciudad ». Nous n’en possédons cependant aucun témoignage archéologique, en dehors d’un peu de céramique campanienne B. Voir à ce sujet les travaux de M. Á. Mezquíriz : « Notas sobre la antigua Pompaelo », p. 231 ; Pompaelo I. Campaña de 1956, p. 9 ; « Excavación estratigráfica en Pamplona (campaña 1965) », pp. 165-168 ; « Algunas aportaciones al urbanismo de Pompaelo », p. 191. L’origine castrale de Pompaelo a été dernièrement rejetée par J. Armendáriz Martija, « Propuesta de identificación del campamento de invierno de Pompeyo en territorio vascón », pp. 50-54. Sur les problèmes posés par l’hivernage de 75-74, voir infra, p. 369, n. 32.
301 Des découvertes archéologiques récentes ont conduit certains auteurs à proposer que Gerunda procéderait d’un castellum établi par Pompée sur la uia Heraclea au printemps 76. Voir les travaux de J. M. Nolla i Brufau, « Gerunda. Dels orígens a la fi del món antic », pp. 91-92, et, dernièrement, « El material ceràmic dels nivells fundacionals de Gerunda », pp. 181-214, suivi par L. Amela Valverde, « Las ciudades fundadas por Pompeyo Magno en Occidente », pp. 31-34. Sur la fondation de Gerunda, voir en dernier lieu : J. Burch et alii, « La fundació de Gerunda », pp. 11-28 ; J. M. Nolla i Brufau, « The Integration of NE Iberian Communities and Consolidation of the Urban Phenomenon », pp. 45-47.
302 L’emplacement stratégique de Palma et Pollentia (surveillance du littoral) suffit ainsi pour postuler l’existence, à l’origine, de castella romains : E. García Riaza, « El carácter militar de los primeros asentamientos romanos en Baleares », p. 513. D’une manière générale, le hiatus existant entre la date de conquête des Baléares transmise par les sources littéraires (123) et la datation des premiers niveaux archéologiques romains attestés sur ces sites par l’archéologie (70-60) est considéré comme un élément en faveur de l’hypothèse privilégiant par défaut des castella refondés en tant que colonies après la guerre sertorienne : E. García Riaza et M. L. Sánchez León, Roma y la municipalización de las Baleares, pp. 51-67 ; Id., « La municipalització de les Balears », pp. 120-121 ; M. Á. Cau et alii, « Pollentia and the Cities of the Balearic Islands », p. 135 (avec bibliographie antérieure). Cependant aucun vestige pouvant être rapporté à des établissements militaires républicains n’a pour l’instant été détecté sur place : M. Orfila Pons, « Estat actual de les investigacions arqueològiques a Pollentia », pp. 162-163 ; M. Á. Cau Ontiveros, « La ciutat romana de Palma », pp. 226-227. Seul le site de Sanisera (Sa Nitja), à Minorque, est explicitement mis en relation avec un camp militaire républicain, situé sur le côté sud-est de la baie : de plan régulier, il est daté par le matériel retrouvé de la fin du IIe siècle (céramique à vernis noir, amphore Dressel I, monnaies romaines et balles de frondes en plomb, dont deux portent le nom de Cae(cilius), bien que l’initiale du prénom soit de lecture problématique) : R. Zucca, Insulae Baliares, p. 158 et n. 150 ; E. García Riaza et M. L. Sánchez León, Roma y la municipalización de las Baleares, p. 143 ; M. Orfila Pons et M. Riera Rullan, « Les ciutats romanes de Menorca », p. 256.
303 A. Ferreruela Gonzalvo et J. Mínguez Morales, « “La Cabañeta” », pp. 212-213, qui précisent : « Los resultados aportados hasta ahora porla excavación no permiten asegurarese hipotético origen castramental ni tampoco el momento de su paso a ciudad, pero este tránsito, de sercierto, tuvo porlógica histórica que producirse en la segunda mitad del siglo II a. C., al compás de ese nuevo impulso emprendido por Roma tras las Guerras Celtibéricas. » ; Id., « Dos modelos de implantación urbana romanorrepublicana en el valle medio del Ebro », pp. 258-259. Dans ce dernier travail, tout en développant eux-mêmes une telle idée en ce qui concerne La Cabañeta, les auteurs prennent soin cependant de reconnaître l’artifice que constitue de plus en plus souvent ce genre d’hypothèse : « el posible origen castramental de diversas fundaciones hispanas, y no sólo de cronología republicana, tan de moda ahora en la historiografía reciente, es algo que muchas veces debería matizarse. Creemos que se está en buena medida construyendo un nuevo “tópico” historiográfico… ». On ne peut qu’adhérer à un tel constat. Les arguments avancés néanmoins par ces auteurs pour admettre (avec plus de vraisemblance, selon eux, dans le cas qui les concerne) l’existence d’un tel camp ont été depuis synthétisés dans : A. Ferreruela Gonzalvo et J. Mínguez Morales, « Secundum oppidum quod castra Aelia vocatur », pp. 679-680 (qui soulignent toutefois le caractère très hypothétique de cette proposition, en l’absence de toute fouille des niveaux inférieurs du site), et Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, pp. 222-224. Ces arguments sont les suivants : la probabilité qu’il s’agisse de la ville portant le nom (jugé significatif) de Castra Aelia ; la forme et l’extension du site, assimilable à un rectangle de 21,4 ha ; la présence d’un puissant fossé de 30 m de large, en forme de W ; enfin, la découverte, immédiatement à l’est du site, et collée au fossé, d’une zone livrant du matériel et des structures qui est interprétée par les fouilleurs comme la trace du camp que Sertorius installa au pied de la ville durant l’hiver 77-76.
304 Ó. Arellano Hernández et alii, « Sobre el origen campamental de Augustobriga », pp. 275-281 ; Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, p. 247. L’hypothèse se fonde pour le moment essentiellement sur la découverte de quatre petites pièces d’habitation et de céramique campanienne lors d’une fouille de sauvetage.
305 M. H. Olcina Domènech, « Lucentum », pp. 260-261 ; Id., « Lucentum. Origins and Evolution of a Roman Municipium in the Sinus Ilicitanus », pp. 109-113, et notamment p. 111. L’hypothèse d’un praesidium ou d’un propugnaculum républicain se fonde essentiellement sur l’absence apparente de grands programmes édilitaires civils, à l’intérieur d’une muraille datable par la céramique et par ses caractéristiques morphologiques de la fin du IIe siècle ou du début du Ier siècle.
306 Voir à ce sujet les remarques de S. L. Dyson, The Creation of the Roman Frontier, p. 186.
307 Tite-Live, XXXIV, 12, 1 ; Frontin, Strat., IV, 7, 31. Le fragment 34 M, attribué aux Origines, n’est pas contradictoire avec cette volonté du consul : interea ad socios nostros sedulo dispertieram, alio frumentum, alio legatos, alio litteras, alio praesidium usquequaque (« pendant ce temps, j’avais pris soin d’envoyer partout à nos alliés, aux uns du blé, aux autres des légats, à d’autres encore des lettres ou du secours »). Le contexte précis du passage nous échappe, mais il est clair que l’emploi du terme praesidium correspond ici à son sens le plus général et ne désigne pas de garnison en particulier.
308 Par conséquent, on ne peut souscrire à l’interprétation d’Appien, Ib., 38, donnée par R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 17. Le fait que Manlius et Lentulus aient rassemblé leurs forces pour se porter contre Indibilis révolté semble à R. C. Knapp démontrer que les préteurs conservaient après 206 seulement de petits effectifs dispersés entre les garnisons (« This shows that Rome was relying on these garrisons as the key to the security of Hispania »). Mais les postes (φρούρια) évoqués par Appien ne peuvent être, selon nous, que les cantonnements d’hiver. Sur la relation entre hiberna et praesidia, voir infra, pp. 401-416.
309 Tite-Live, XXVII, 20, 1 : ne Mago atque alter Hasdrubal cum eo ungerent copias praesidio tantum ad insidendum Pyraeneum misso… (« pour empêcher que Magon et l’autre Hasdrubal ne se joignissent à lui, [Scipion] se contenta d’envoyer des troupes occuper le passage des Pyrénées… », trad. P. Jal, CUF, modifiée).
310 César, BC, I, 37, 1 ; Dion Cassius, XLI, 20, 2.
311 César, BC, II, 18, 2 et 5.
312 César, BC, II, 19, 1-4. Sur le rôle joué par ces villes dans ce conflit : J. F. Rodríguez Neila, « Corduba entre cesarianos y pompeianos durante la Guerra Civil », notamment pp. 327-355 ; A. R. Menéndez Argüín, « Los grandes acontecimientos bélicos en torno a Carmo », pp. 378-379.
313 Bell. Hisp., III, 1, prend la peine de justifier l’installation de la garnison (cum praesidio Cordubam tenebat) par l’importance que Sextus Pompée accordait à la ville (quod eius prouinciae caput esse existimabatur).
314 Rien ne permet ainsi d’affirmer qu’au moment où apparaissent de nouvelles garnisons dans la Meseta (par exemple, celle d’Aebura en 181 : Tite-Live, XL, 30, 5) les plus anciennes sont toujours en activité sur le littoral (par exemple, Tarragone). Dans l’historiographie, la longévité d’une garnison est toujours admise par défaut, en présupposant l’existence de nécessités stratégiques immuables. Aux yeux de R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 16, la disparition de la garnison de Sucro (attestée pour 206 par Tite-Live, XXVIII, 24, 5) n’est pas concevable avant la fondation de Valence dans le troisième quart du IIe siècle. Cette considération est pourtant bien fragile, surtout si l’on prend en compte le fait que la localisation exacte de ce praesidium est inconnue. Tout récemment, des vestiges découverts à proximité du Júcar ont certes été mis en relation avec cet établissement militaire. Voir A. Ribera i Lacomba, « El papel militar de la fundación de Valentia », pp. 363-389. Toutefois, les éléments actuellement disponibles sont trop ténus pour permettre de se prononcer.
315 Cette politique est pourtant couramment admise, par exemple par M. A. Marín Díaz, Emigración, colonización y municipalización en la Hispania republicana, p. 15, à propos des premières années de la présence romaine (« Los principios que informan la política de Escipión, es decir, el control militar a través de guarniciones […] van a estarpresentes en los años inmediatamente posteriores a su regreso a Roma en la política que ponen en práctica los magistrados enviados a las dos zonas de operaciones militares. »), ainsi que par L. A. Curchin, « From Limes to Latinitas », pp. 692-693, à propos des guerres de la seconde moitié du IIe siècle. Plus récemment, voir encore P. Jacob, Les villes de la façade méditerranéenne de la péninsule Ibérique, pp. 431-434, ou I. Arrayás, « L’ager Tarraconensis », pp. 104-106, à propos de la Catalogne actuelle.
316 R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 15 : « In almost all of the treaties of which there is record there is the stipulation that a garrison is to be admitted to the captured town » ; E. García Riaza, Celtíberos y lusitanos frente a Roma, pp. 212-213.
317 Tite-Live, XXVIII, 34, 7 : Mos uetustus erat Romans, cum quo nec foedere, nec aequis legibus iungeretur amicitia non prius imperio in eum tamquam pacatum uti quam omnia diuina humanaque dedidisset, obsides accepti, arma adempta, praesidia urbibus imposita forent. (« C’était une ancienne coutume chez les Romains, quand il s’agissait d’un adversaire auquel ne les liait aucune alliance sanctionnée par un traité ou la reconnaissance de droits égaux, que de ne pas le considérer, en exerçant leur autorité sur lui, comme soumis, avant d’avoir reçu des otages, de lui avoir enlevé ses armes et d’avoir imposé des garnisons dans ses villes », trad. P. Jal, CUF).
318 Le préteur Lucius Caesius restitue intégralement au peuple de Lusitanie concerné ses biens matériels et immatériels (l. 7-11). Il n’est fait nulle mention de garnison ou d’otages. Le magistrat romain se contente de réclamer le retour des prisonniers ainsi que les chevaux et les juments capturés (l. 6). Sans doute l’extrême modération de ces mesures s’explique-t-elle par la modestie du vaincu dont rien ne prouve qu’il ait même disposé d’un oppidum où une garnison aurait pu être installée. Mais cet exemple suffit à réfuter un lien de cause à effet direct entre deditio et praesidium.
319 Appien, Ib., 52. Vaincus en bataille rangée (Appien, Ib., 51), les habitants de Cauca demandèrent à Lucullus ce qu’ils devaient faire pour être amis (ϕίλοι). Le général romain exigea alors des otages (ὅμεϱά), une compensation financière de cent talents d’argent et des auxiliaires de cavalerie (ἱππέας). Ce fut seulement une fois ces exigences satisfaites (῾ως δὲ πάντα ἔλαβεν), c’est-à-dire une fois le traité conclu, qu’il demanda l’entrée d’une garnison de deux mille hommes, ce que les Caucaéens acceptèrent.
320 Plusieurs interprétations s’opposent au sujet de la situation de 206. Certains estiment que Gades n’a pas bénéficié d’un foedus en règle suite à sa deditio (attestée par Tite-Live, XXVIII, 37, 10), mais que son sort a fait l’objet d’un simple accord militaire prévoyant l’installation d’une garnison. Cette hypothèse est défendue par E. Badian, Foreign Clientelae, pp. 118-121 et R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, pp. 209-210, qui estiment que la mention d’un foedus en Cicéron, Pro Balb., XV, 34, ne renvoie pas à un traité formel dès 206. En revanche, J. F. Rodríguez Neila, El municipio romano de Gades, pp. 25-26, admet que la deditio a débouché sur un véritable foedus, renouvelé en 78, qui l’exemptait d’abriter ordinairement une garnison. De manière plus nuancée, on a remarqué récemment que le récit de Tite-Live fait état de deux étapes dans la reddition des Gaditains : des envoyés rencontrèrent d’abord Scipion à Carthagène afin de lui livrer la ville encore aux mains de Magon (Tite-Live, XXVIII, 23, 6). Cette première tentative fut découverte et échoua (Tite-Live, XXVIII, 31, 1), mais il y a lieu de penser que l’acte de deditio fut donc garanti par les liens de fides noués à cette occasion. Cette hypothèse est avancée par J. L. López Castro, « El Foedus de Gadir del 206 a. C. », pp. 272-277, qui estime que le foedus de Gades fut conclu par Scipion lui-même et que Marcius se contenta de régler avec les Gaditains les conditions concrètes de leur capitulation. Il distingue donc également « el acuerdo militar de ocupación hecho por Marcio del tratado propiamente dicho ». Voir aussi Id., Hispania poena, pp. 100-104.
321 Le problème du départ de cette garnison a été lié dans l’historiographie à celui du retrait du praefectus réclamé par les Gaditains devant le sénat en 199 (Tite-Live, XXXII, 2, 5). R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 210, J. F. Rodríguez Neila, El municipio romano de Gades, p. 29, et J. L. López Castro, Hispania poena, pp. 149-150, pensent que la protestation de la ville concernait la prolongation abusive d’un état de fait qu’elle avait accepté en 206 en raison des nécessités de la guerre. Ils suivent en cela l’opinion de E. Badian, « The Prefect at Gades », pp. 250-252, selon qui l’analyse philologique du texte de Tite-Live permet de soutenir que les Gaditains protestaient bien contre une violation de l’accord de 206 stipulant le retrait de la garnison une fois la guerre terminée. Or, cette hypothèse suppose d’une part d’identifier le praefectus de 199 avec le chef de la garnison de 206, ce que les critères philologiques ne prouvent pas avec certitude, si l’on en croit les objections de J. Briscoe, A Commentary on Livy, Books XXXI-XXXIII, pp. 170-171. D’autre part, il faudrait être certain que la présence d’un praefectus dans une cité alliée impliquait celle d’une garnison. Les comparaisons avancées à ce sujet par R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, p. 210, ne sont pas convaincantes, car les textes invoqués (Tite-Live, XXXIV, 56, 2 ; XLIII, 18, 6 ; et XLV, 28, 7) sont mal établis. Peut-être le conflit de 199 avait-il plutôt trait, tout simplement, à une ingérence du préteur L. Stertinius dans les affaires de la cité par le biais d’un magistrat le représentant. Dans ce cas, la garnison avait peut-être été retirée dès 201, conformément à l’accord passé avec Marcius, ce qui expliquerait pourquoi les ambassadeurs gaditains font référence à celui-ci dans leur plainte (cum L. Marcio Septimo conuenisset).
322 L’installation d’une garnison à Gades est donc à resituer dans le contexte d’une seconde guerre punique qui n’est pas encore terminée en 206 : la situation stratégique de la ville portuaire, son rôle clé dans le circuit économique du Détroit, ses liens anciens avec Carthage, tout concourait à ce que Rome ne désirât pas prendre le risque de la voir retomber prématurément aux mains de ses adversaires.
323 Appien, Ib., 44.
324 Tite-Live, XXVIII, 31, 6-7 (Ilergètes), et Tite-Live, XXXIV, 16, 10 (Bergistans). Suite au second soulèvement des Bergistans, la méthode employée par Caton pour éviter un nouvel incident fut de les vendre tous (sub corona ueniere omnes ne saepius pacem sollicitarent). Le consul entendait par là faire un exemple, mais reconnaissait aussi qu’il n’avait pas les moyens de les surveiller étroitement. Ainsi, le châtiment réservé en 205 aux Ilergètes, auxquels, selon Appien, on imposa de plus fortes garnisons (Appien, Ib., 38) ne correspond à rien chez Tite-Live et provient peut-être d’une confusion de l’historien alexandrin.
325 Appien, Ib., 58.
326 Il est ainsi permis de trouver discutable l’emploi du terme limes dans plusieurs publications récentes : L. A. Curchin., « From Limes to Latinitas », p. 692, nuancé depuis dans Id., The Romanization of Central Spain, p. 41 ; J. A. Hernández Vera, « La fundación de Graccurris », p. 179 ; F. Beltrán Lloris, « El valle medio del Ebro durante el período republicano : de limes a conventus », p. 224 (qui précise cependant qu’il entend le terme comme désignant un espace conçu à la fois comme un passage et une limite) ; T. Ñaco del Hoyo, « Rearguard Strategies of Roman Republican Warfare in the Far West », p. 150 (pour qui il s’agit d’un front militaire mobile) ; dans le même esprit : F. Pina Polo, « Introducción. El valle medio del Ebro entre el mestizaje cultural y la frontera militar », pp. 155-158. Pour une discussion plus poussée sur cette question, voir : F. Cadiou, « Les armées romaines dans la vallée du Duero. Géographie et stratégie à l’époque de la conquête », pp. 45-58 ; F. Cadiou et P. Moret, « Rome et la frontière hispanique à l’époque républicaine », à paraître.
327 Appien, BC, I, 7 : Ῥωμαῖοι τὴν Ἰταλίαν πολέμοῳ ϰατὰ μέϱη χειϱούμενοι γῆς μέρος ἐλάμβαναν ϰαὶ πόλεις ἐνῴϰιζον ἢ ἐς τὰς πϱότεϱον οὔσας ϰληϱούχους ἀπὸ σϕῶν ϰατέλεγον ϰαὶ τάδε μὲν ἀντὶ ϕϱουϱίων ἐπενόουν. (« En subjuguant partiellement l’Italie par la force des armes, les Romains étaient dans l’usage ou de s’approprier une partie du territoire du peuple vaincu pour y bâtir une ville, ou de fonder, dans les villes déjà existantes, une colonie composée de citoyens romains. Ils imaginèrent de substituer cette méthode à celle des garnisons », trad. J. -I. Combes-Dounous).
328 La bibliographie portant sur ce thème est considérable. On peut renvoyer notamment à : H. Galsterer, Untersuchungen zum römischen Städtewesen, pp. 7-30 ; R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia, pp. 108-139 ; J.-N. Bonneville et alii, « Les villes romaines de la péninsule Ibérique », pp. 11-23 ; N. Dupré, « Les villes ibéro-romaines de la vallée de l’Èbre », pp. 281-291 ; M. J. Pena Gimeno, « Apuntes y observaciones sobre las primeras fundaciones romanas en Hispania », pp. 47-85 ; J. M. Roldán Hervás, « Colonización y municipalización durante la República », pp. 11-32 ; J. J. Sayas Abengochea, « Conquista y colonización del valle del Ebro en época tardorrepublicana y principado », pp. 63-82 ; J. M. Abascal et U. Espinosa, La ciudad hispano-romana, pp. 26-31 ; M. Beltrán Lloris, « El valle medio del Ebro y su monumentalización en época republicana y augustea », pp. 179-206 ; F. Coarelli et alii (éd.), Conquista romana y modos de intervención en la organización urbana y territorial ; M. Bendala Galán, « La Ciudad en la Hispania romana », pp. 115-123 ; M. J. Pena Gimeno, « Conquête et colonisation dans la péninsule Ibérique pendant le IIe siècle av. n. è. », pp. 247-258 ; P. Le Roux, Romains d’Espagne, pp. 46-50 ; M. Bendala Galán, « Fórmulas de promoción y desarrollo urbano y urbanístico en la Hispania tardorrepublicana », pp. 307-312 ; S. J. Keay, « The Development of Towns in Early Roman Baetica », pp. 55-86 ; G. Bandelli, « La colonizzazione romana della Penisola Iberica », pp. 105-142 ; M. Bendala Galán, « Estructura urbana y modelos urbanísticos en la Hispania antigua », pp. 413-432 ; P. Jacob, Les villes de la façade méditerranéenne de la péninsule Ibérique, pp. 398-470 ; S. Ramallo Asensio, « Las ciudades de Hispania en época republicana », pp. 101-149 ; J. L. Jiménez Salvador et A. Ribera i Lacomba (coord.), Valencia y las primeras ciudades romanas de Hispania ; J. González Fernández, « Colonización y municipalización cesariana en la Ulterior », pp. 397-412 ; I. Arrayás, « La instauración del modelo imperial en Hispania », pp. 180-188 ; L. Abad Casal et alii (éd.), Early Roman Towns in Hispania Tarraconensis.
329 Sur la composition des ces fondations, voir pp. 636-653.
330 Voir en dernier lieu la très intéressante contribution de O. Olesti-Vila, « El control de los territorios del Nordeste Peninsular », notamment pp. 140-144.
331 L’initiative laissée aux élites indigènes en la matière ne doit pas être sous-estimée. En dehors des quelques fondations mentionnées précédemment, on se montrera par conséquent très prudent envers l’idée que l’État romain aurait en outre développé en Citérieure un programme officiel de fondations urbaines à partir de la fin du IIe s., comme tout un courant historiographique le défend depuis quelques années à partir d’un certain nombre de découvertes effectuées dans le Nord-Est et dans la moyenne vallée de l’Èbre : E. Sanmartí Grego, « Urbanización y configuración territorial del noreste de la Citerior durante la época romano-republicana », pp. 357-361 ; J. Guitarti Duran, « Un programa de fundacions urbanes a la Hispania Citerior del principi del segle I a. C », pp. 205-213 ; F. Pina Polo, « ¿Existió una política romana de urbanización en el nordeste de la Penísula Ibérica ? », pp. 77-94 ; J. Á. Asensio Esteban, « Primeras manifestaciones del urbanismo romano-republicano en el valle medio del Ebro », pp. 219-255 ; C. J. Caballero Casado, « Desarrollo de un patrón de poblamiento romano en el cuadrante nororiental peninsular », pp. 241-271 ; J.Á. Asensio Esteban, « Urbanismo romano republicano en la región de la cuenca del Ebro », pp. 159-178. Sur ce dossier, voir en particulier les remarques de méthode formulées par P. Moret, « Fortifications ibériques tardives et défense du territoire en Hispanie citérieure », pp. 160-183.
332 Il faut renoncer à l’idée d’une spécificité hispanique en la matière, bien que cette idée soit pourtant très présente dans l’historiographie, comme en témoignent les remarques effectuées à ce sujet dans un livre récent : rappelant qu’à l’époque républicaine, les Romains « did not use their legions as an army of occupation », N. Rosenstein, Rome at War, p. 134, considère néanmoins que cette constatation vaut sur tous les théâtres de la conquête, sauf en péninsule Ibérique : « Spain is the only exception ». Nous espérons avoir démontré qu’il n’en est rien.
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