Introduction
p. 1-19
Texte intégral
1La péninsule Ibérique occupe assurément une place singulière dans l’histoire de la Rome républicaine. Elle constitua, en effet, un terrain privilégié de la conquête et de l’expansion romaine aux deux derniers siècles avant notre ère1. À compter de la seconde guerre punique, Rome s’y trouva non seulement engagée dans des conflits successifs qui la conduisirent à étendre son hégémonie sur la quasi-totalité de la Péninsule, mais aussi, pour la première fois, elle y expérimenta un système de contrôle direct sur des territoires à la fois vastes et très éloignés de l’Italie. Cette double caractéristique marquait une inflexion notable de la politique extérieure de Rome. En effet, après la Sicile et la Sardaigne en 227, deux îles immédiatement voisines des côtes italiennes, les provinces hispaniques furent, en 197, les premières à recevoir annuellement un gouverneur2, bien avant celles qui composèrent progressivement le reste de l’Empire à partir du milieu du IIe siècle3. Le détail du processus aboutissant à la formation des provinces de Citérieure (Hispania citerior) et d’Ultérieure (Hispania ulterior) n’est pas entièrement clair et demeure discuté4. L’aspect expérimental de cette première phase de la présence romaine dans la péninsule Ibérique explique sans conteste la difficulté à en restituer précisément les contours. Il est néanmoins certain qu’à partir de 197, après la création de deux prétures supplémentaires, Rome put confier annuellement à ces magistrats, pourvus de l’imperium consulaire, une charge (prouincia) dotée, dès cette époque, d’une dimension territoriale dont la nature exacte reste toutefois discutée5. Les Hispaniae peuvent donc être considérées comme un laboratoire essentiel et précoce du développement des formules militaires, politiques et juridiques destinées à former progressivement, sous la République, le cadre de l’administration de Rome sur les territoires conquis6.
2Sans prétendre revenir sur l’ensemble de l’évolution complexe qui donna naissance à l’Hispania romaine, le présent travail entend seulement en préciser certains des aspects touchant à l’armée et à la guerre, car, sur le plan militaire, la conquête de la péninsule Ibérique marque, dans l’historiographie, une étape jugée décisive de l’évolution de l’armée romaine républicaine. En effet, la lente appropriation des espaces péninsulaires résulta d’un effort militaire constant. Rome dut maintenir de façon permanente des armées sur le sol ibérique où se déroulèrent des opérations militaires répétées, depuis la seconde guerre punique jusqu’à la fin de la République7. Une telle situation illustre l’ampleur prise, dès la fin du IIIe siècle, par les conquêtes. Celles-ci, menées désormais à l’échelle méditerranéenne, conférèrent à la guerre romaine une dimension qu’elle n’avait pas connue jusqu’alors. Pour cette raison, la capacité de la res publica à s’adapter aux contraintes d’un tel engagement, mais aussi à ses effets, constitue un problème historiographique très discuté qui, plus généralement, rejoint le débat concernant l’impérialisme romain et ses conséquences sur l’organisation de la cité-État8. Ainsi, on considère volontiers que l’infrastructure militaire de la République fut soumise à une forte pression en raison de ces guerres de conquête et que, dans ce contexte, l’envoi annuel d’armées dans la péninsule Ibérique représenta un maillon essentiel de l’affaiblissement de la militia traditionnelle. Très liées l’une à l’autre, ces deux idées ont donné naissance à un modèle historiographique dont il convient d’exposer plus en détail la formulation.
I.—L’HYPOTHÈSE D’UNE « CRISE D’EFFICACITÉ » DE L’ARMÉE RÉPUBLICAINE
3Initialement, l’armée romaine était conçue, suivant l’expression de Cl. Nicolet, comme « nationale, censitaire et non permanente »9. Composée de citoyens libres, mobilisés pour la durée d’une campagne et commandés par un magistrat élu, elle reposait sur une base censitaire qui offrait aux couches supérieures du corps civique, formées par les cinq classes d’adsidui, le privilège de servir dans les légions, en contrepartie des droits conférés par leur statut et leur position sociale. Les citoyens les plus pauvres des autres classes, proletarii et capite censi, en étaient ordinairement dispensés, tout en restant théoriquement mobilisables en cas d’urgence, en vertu du tumultus. Cette correspondance étroite entre société militaire et société civile, entre institutions étatiques et structures légionnaires faisait de cette armée l’émanation même du corps civique, du populus10. La conscription était opérée au moyen du dilectus dont le sens latin originel, celui de choix, souligne bien qu’il s’appliquait en principe à des effectifs réduits, destinés à une durée limitée des campagnes militaires11. Ainsi, la notion même de citoyen-soldat dépendait de la capacité de l’individu à remplir ses devoirs de miles sans renoncer à ses prérogatives de ciuis. Le retour périodique à la vie civile, permis par les conditions des guerres livrées en Italie jusqu’à la fin du IVe siècle, constituait un garant essentiel de cet équilibre. Mais, avec l’expansion méditerranéenne, les théâtres d’opération devenaient plus éloignés de Rome. Les campagnes militaires pouvaient alors atteindre ou dépasser une année entière sans interruption, tandis qu’augmentait le besoin en soldats pour alimenter les multiples armées. Le maintien accru et prolongé des citoyens sous les enseignes pouvait donc risquer de mettre en péril leur insertion dans la cité en les coupant de la participation à la vie politique comme de la possession de leur patrimoine.
4Pour cette raison, il est couramment admis que les conditions nouvelles imposées par les nécessités des guerres de conquête ont révélé les limites de l’armée censitaire et abouti au développement d’une « crise militaire » dont les conséquences sociales et les répercussions politiques ont été particulièrement mises en valeur et analysées par les spécialistes de cette période. On peut résumer l’essentiel de l’argumentaire de la façon suivante. Le mode de recrutement reposait sur les adsidui, c’est-à-dire la partie la plus riche mais aussi la moins nombreuse du corps civique. Par conséquent, la lourde conscription du IIe siècle aurait très vite représenté un poids insupportable pour ce groupe, déjà affaibli par la saignée de la seconde guerre punique12. Cette forte pression se serait trouvée aggravée par la paupérisation d’un grand nombre d’adsidui, incapables, à cause de leur service militaire prolongé outre-mer, de conserver leurs possessions foncières et, par conséquent, de maintenir leur qualification censitaire13. La base traditionnelle du recrutement de l’exercitus républicain aurait ainsi cessé d’être assurée14. Cette déstabilisation des mobilisables aurait alors progressivement provoqué l’impopularité de la conscription qui constitue, aux yeux de la majorité des historiens, le second aspect de la crise militaire. Plusieurs épisodes relatés par les sources sont en effet généralement interprétés comme ayant trait à des difficultés rencontrées à plusieurs reprises au cours du IIe siècle par les consuls, chargés ordinairement par le sénat du déroulement du dilectus15. Ils témoigneraient d’une désaffection des adsidui, durement éprouvés par les guerres, vis-à-vis d’un service militaire sans cesse plus contraignant et source de déchéance sociale16. Malgré la diminution continue de la qualification censitaire de la dernière classe au IIe siècle, ce blocage aurait alors rendu impérieux le recours à d’autres sources de recrutement, notamment l’appel croissant au volontariat17. Dans cette évolution, le rôle traditionnellement prêté au dilectus effectué par Marius en 107, au moment de la guerre contre Jugurtha, a été nuancé et les mesures prises à cette occasion ne sont plus de ce point de vue considérées comme une rupture majeure avec la pratique antérieure18. En revanche, on continue à estimer que les guerres d’expansion, en provoquant une transformation progressive, mais essentielle, de l’état d’esprit du soldat romain, contribuèrent à altérer radicalement la structure de la militia républicaine dont le lien organique avec la cité se serait progressivement distendu19.
5L’historiographie relative à l’exercitus républicain a eu tendance à admettre d’autant plus facilement cette notion de crise que celle-ci fournit aux historiens modernes une clé de compréhension des guerres civiles du Ier siècle et donc du pourrissement du régime républicain. L’intérêt pour les armées de la conquête est donc avant tout lié à l’histoire sociale et politique. Ceci explique que ce soient surtout les conséquences du phénomène, plus que ses causes, qui ont fait l’objet de la plupart des analyses : de fait, l’infléchissement de la position du soldat au sein de la cité a concentré l’attention de la majorité des travaux et des discussions, contrairement aux facteurs tenus, à tort ou à raison, pour responsables de la dégradation de l’armée civique. Ainsi, les notions de « prolétarisation » et de « professionnalisation », développées en particulier par E. Gabba, ont-elles dominé les débats sur l’évolution sociale de l’armée20. De même, l’hypothèse de la « privatisation » croissante des légions au profit d’imperatores ambitieux a soulevé la question de leur utilisation dans le cadre des luttes de factions ainsi que celle de l’influence accrue des militaires dans la vie politique21. Cette double dimension de la redéfinition de la place et du rôle du citoyen-soldat à la fin de la République a été plus spécifiquement étudiée par le biais du lotissement des vétérans, devenu un enjeu décisif dans la compétition aristocratique au Ier siècle22.
6Sans aucun doute, le contexte dans lequel évolue le miles tardo-républicain présente des particularités très nettes par rapport à la période précédente. Pourtant, même dans les domaines que nous venons d’évoquer, la profondeur des mutations intervenues a fait l’objet de nuances importantes. En ce qui concerne le recrutement, le maintien de la conscription traditionnelle, y compris au cours des guerres civiles, a été rappelé avec vigueur par de nombreux travaux23. P. A. Brunt a ainsi définitivement réfuté toute éventualité d’un développement d’une armée de métier à l’époque républicaine24. Par ailleurs, si les relations de l’exercitus vis-à-vis du pouvoir politique s’établirent alors sur des bases en partie renouvelées, l’essor de clientèles militaires généralisées n’apparaît pas comme un fait suffisamment établi25. On s’accorde ainsi de façon croissante à reconnaître que, si l’armée républicaine a effectivement connu au cours des deux derniers siècles avant notre ère une évolution incontestable, celle-ci ne s’est pas effectuée aux dépens de la composition civique des légions. J. W. Rich a démontré notamment que l’hypothèse d’une diminution du nombre des adsidui, couramment admise depuis E. Gabba, ne repose pas, en réalité, sur des fondements convaincants et qu’il est préférable de la rejeter26. Selon cet auteur, tout prouve que Rome continua à disposer d’un réservoir suffisant de mobilisables pour son entreprise de conquête27. Cette remise en question, dont les principales conclusions peuvent être admises, invite dès lors à envisager différemment l’éventualité d’une véritable prolétarisation du soldat au dernier siècle de la République28.
7Sans nier les changements intervenus au cours de cette période, toutes ces révisions suggèrent que l’image de l’armée républicaine renvoyée par les sources pour le Ier siècle dépend peut-être davantage des perturbations liées au contexte troublé des guerres civiles que d’une crise profonde de l’institution militaire amorcée au siècle précédent. Cependant, en dépit de la modification du regard porté parles historiens actuels sur l’ampleur de la « décadence » de l’armée civique à la fin de la République, l’idée d’une médiocrité des exercitus sénatoriaux, telle qu’elle a été énoncée par H. M. D. Parker ou J. Harmand, demeure assez largement répandue29. Pour cette raison, et non sans paradoxe, l’idée d’une inadaptation fondamentale de l’organisation traditionnelle de l’armée face aux contraintes nouvelles des guerres de conquête du IIe siècle n’a pas fait l’objet de la même réévaluation que les symptômes qu’on avait coutume de lui associer. Ainsi, on discute désormais pour savoir si l’expansion entraîna ou non une professionnalisation de facto de l’armée dans sa composition et ses méthodes. En revanche, le besoin d’une telle évolution (qu’elle ait eu effectivement lieu ou non) continue à ne faire aucun doute chez la plupart des auteurs. Prenons un exemple : les conclusions de R. E. Smith qui entendait démontrer la mise en place, après Sylla, d’un fonctionnement double du système militaire romain, fondé à la fois sur des « standing armies » cantonnées en permanence dans les provinces et sur des « emergencies armies », levées ponctuellement en fonction des besoins30, ont été unanimement rejetées31. Mais le postulat qui sous-tend l’analyse de l’historien anglais demeure, à l’inverse, largement partagé. Dans la majorité des travaux, l’instauration d’une armée permanente apparaît en effet comme une condition indispensable au maintien de l’autorité de Rome dans les territoires provinciaux passés sous son contrôle : de ce point de vue, l’incapacité de l’armée civique à remplir cette fonction ne peut dès lors que souligner les limites inhérentes aux institutions républicaines dans le cadre de la transformation de la cité-État en République impériale. Une telle conception implique que, dans l’esprit de la majorité des spécialistes modernes des questions militaires républicaines, la militia traditionnelle n’était pas véritablement apte à répondre aux défis imposés par l’ampleur de la conquête, ni en termes d’effectifs, ni en matière d’organisation et de moyens32.
II. — LE RÔLE ATTRIBUÉ AUX GUERRES IBÉRIQUES DANS LE DÉVELOPPEMENT D’UNE « CRISE MILITAIRE »
8Il est tout à fait remarquable de noter que le constat d’une « crise d’efficacité »33 de l’armée civique traditionnelle est systématiquement associé à la difficulté que l’on reconnaît aux guerres successives menées par Rome dans la péninsule Ibérique. Dans cette perspective, ces guerres sont en effet considérées à la fois comme un révélateur et comme un accélérateur de cette évolution. En raison de sa particularité, l’effort militaire romain en Hispania est réputé avoir contribué à porter le fonctionnement de l’armée républicaine à son point de rupture34. S’est ainsi diffusée la conviction, exprimée par bon nombre de travaux, que les légions auraient éprouvé avec le plus d’acuité leurs limites au cours de ces guerres, en raison des caractéristiques de la progression romaine surplace : lente et pénible, celle-ci aurait, en requérant une présence massive et constante de contingents romains, imposé aux citoyens une absence prolongée et un état de guerre endémique qui auraient contribué à affaiblir la militia. La péninsule Ibérique apparaît ainsi volontiers, selon l’expression de G. Brizzi, comme un « front difficile », à l’origine de mutations importantes dans l’armée romaine de la fin de la République35.
9Cette image est incontestablement forgée par la longueur inhabituelle de la conquête, débutée dès 218 et poursuivie jusqu’aux campagnes d’Auguste contre les Astures et les Cantabres entre 29 et 19. Elle doit beaucoup cependant aux guerres celtibères qui embrasèrent la Meseta à partir de 154 et dont l’acharnement est resté symbolisé par l’héroïque résistance de Numance, la cité des Arévaques rasée par Scipion Émilien en 133, après un siège de plusieurs mois36. L’importance accordée à cet épisode dans l’histoire de l’armée romaine, et plus largement dans celle de la conquête, résulte en grande partie de la lecture qu’en donna A. Schulten dans les premières décennies du XXe siècle. Ce savant, ayant fouillé le premier le site de l’oppidum et mis au jour les restes de la circonvallation établie par Scipion, en a synthétisé les apports dans une œuvre monumentale où il propose également une analyse de la portée des guerres celtibères37. Pour ce fondateur de toute une tradition historiographique, la chute de Numance représente un tournant essentiel, aussi important, sinon davantage, que la destruction de Carthage une décennie plus tôt38. En révélant la décadence morale et militaire de l’oligarchie au moment même où l’effort matériel et humain de Rome outre-mer atteignait son apogée, les revers humiliants éprouvés face aux barbares de l’intérieur de la Péninsule auraient ébranlé la structure politique romaine et ouvert la porte à la révolution39.
10En somme, selon A. Schulten, l’impuissance de l’armée romaine lors de la guerre numantine, tout en soulignant l’insuffisance de ses méthodes et la décadence de sa valeur militaire, ne faisait que brutalement mettre en lumière et aggraver définitivement la contradiction de principe entre le fonctionnement de l’instrument militaire et les rigueurs inédites des champs de bataille extra-italiques40. La vigoureuse reprise en main de la discipline par Scipion Émilien, à son arrivée en Espagne en 134, amplement répercutée par les sources41, illustre alors de manière éclatante, selon lui, le besoin de fermeté et de réforme rendu nécessaire par cet égarement. En ce sens, la « crise militaire » évoquée précédemment apparaît donc, dans l’historiographie, inséparable des guerres hispaniques42. L’âpreté des luttes contre les populations de la Meseta aurait contribué à renforcer l’impopularité de la conscription et à rendre définitivement insupportable la pesanteur des guerres d’expansion. L’incapacité fondamentale de l’exercitus sénatorial à surmonter une conquête de longue haleine des territoires ibériques sans altérer profondément sa composition et sa nature est si ancrée dans les consciences que la comparaison est depuis fréquemment faite, à propos des guerres celtibères, avec des tournants majeurs de l’histoire militaire du XXe siècle, comme les difficultés éprouvées par l’armée allemande sur le front russe au cours de la seconde guerre mondiale ou bien le traumatisme qu’a représenté la guerre du Vietnam pour l’armée américaine43.
11La force de cette conviction explique l’absence de véritable réflexion sur l’armée de conquête, en tant qu’élément de la mainmise de Rome sur les territoires ibériques. Certes, l’imposante bibliographie relative à l’Hispania républicaine, constamment réactualisée44, souligne systématiquement la dimension essentiellement militaire de la conquête45. Mais il n’existe aucune étude sur l’armée proprement dite concernant cette période, ce qui est paradoxal puisque la responsabilité des guerres hispaniques dans la décadence de cette institution est considérée, on l’a vu, comme un facteur décisif de l’évolution de la respublica. Malgré l’intérêt de ce questionnement, les armées républicaines combattant en Hispania ne constituent pas jusqu’à présent un objet d’étude autonome46. Dans la tradition des monographies pionnières, ce sont surtout les grandes phases militaires de la progression romaine qui ont continué à mobiliser principalement l’attention des historiens47. En revanche, les méthodes appliquées sur le terrain par l’instrument de ces opérations répétées sont relativement délaissées. En dépit de la longueur de la conquête, nous ne disposons, pour la péninsule Ibérique, d’aucune enquête comparable à celles suscitées par l’exercitus des Gaules48. Il est vrai que la personnalité et les écrits de César ainsi que la réputation de réformateur qui lui est attachée en matière militaire expliquent l’attention spécifique portée aux réalisations de la décennie antérieure au déclenchement de la guerre civile contre Pompée49. Ceci ne signifie pas que notre connaissance des réalités militaires de la conquête soit restée inchangée. Si peu de travaux s’intéressent directement aux armées romaines présentes dans la péninsule Ibérique, de nombreux renouvellements historiographiques ont néanmoins approfondi notre compréhension de la domination romaine en Hispania, précisant du même coup ce que le développement des provinces de Citérieure et d’Ultérieure devait, d’une manière ou d’une autre, à l’activité militaire. Mieux connus, le statut et les compétences des magistrats chargés de gouverner les provinces et de réaliser la conquête ont ainsi permis d’insister sur la dimension militaire fondamentale de ces commandements50. D’autre part, l’émergence du contenu administratif des prouinciae a été mise en relation avec la nécessité de conduire des guerres continues, contrainte qui contribua à façonner durablement l’infrastructure provinciale et son fonctionnement51. Enfin, le problème du rôle joué par l’armée dans la romanisation de la Péninsule est régulièrement soulevé52. Les recherches importantes de J. M. Roldán ont abouti à nuancer la force de cette influence tout en valorisant certains facteurs d’intégration des populations ibériques au monde romain, comme la participation de soldats indigènes aux opérations de conquête dans le cadre des troupes auxiliaires dont cet auteur a cherché à montrer la stabilisation progressive53. Ainsi, il est incontestable que les travaux récents, pour la plupart, se sont attachés à dégager la portée de la présence permanente des légions dans les transformations affectant les territoires ibériques à l’époque républicaine. En revanche, très peu d’entre eux se sont intéressés en détail à ce que ce stationnement prolongé de troupes et la fréquence des opérations militaires impliquaient, à l’inverse, pour les armées de conquête elles-mêmes, si bien que la conviction d’un blocage persiste54. Ces deux versants des guerres sont pourtant indissociables.
III. — LES ARMÉES ROMAINES ET LA CONQUÊTE DU MONDE MÉDITERRANÉEN : L’HISTOIRE D’UNE MISE À L’ÉPREUVE ?
12Ce livre se propose donc de discuter l’idée selon laquelle la conquête longue et difficile de la péninsule Ibérique imposa aux armées républicaines des adaptations qui contribuèrent, dans une grande mesure, à perturber durablement le fonctionnement de la militia civique et, à terme, à remettre en cause l’organisation et les pratiques militaires de Rome. En quelque sorte, il s’agit d’évaluer la contribution des guerres permanentes en Hispanie à l’évolution de l’armée romaine sous la République. Cela revient à analyser les moyens et les procédés mis en œuvre pour la conduite des opérations militaires au cours de la conquête. En effet, comme le relevait à juste titre M. Rambaud il y a plus de trente ans, c’est sur le terrain lui-même que s’écrit l’histoire de l’armée comme institution55. La guerre romaine correspondait ainsi à des considérations tactiques, stratégiques et techniques qui ont fait l’objet de nombreuses études depuis longtemps56. Mais elle recouvrait également un ensemble complexe de conceptions, de comportements et de méthodes dont la prise en compte systématique est finalement récente57.
13Malgré leur manque d’homogénéité et les difficultés d’interprétation qu’elles soulèvent, nos sources se prêtent à une telle approche pour la péninsule Ibérique. Le dossier se révèle même assez abondant dès lors que l’on s’attache à ne négliger aucune catégorie de document. La méthode choisie a consisté à rassembler autant que possible l’ensemble des témoignages, aussi bien numismatiques et épigraphiques que textuels ou archéologiques, susceptibles d’éclairer les moyens employés sur le terrain par les armées romaines pour conduire les guerres dans la Péninsule. Sans détailler ici ce corpus, dont la présentation se fera au fil de l’étude, il convient de souligner brièvement la répartition des différents apports ainsi que leur nature. Contrairement à ce que l’on connaît pour des époques postérieures, l’épigraphie militaire est inexistante. L’activité de l’armée n’est guère plus documentée que le service des soldats : ainsi, ce sont principalement les tâches des gouverneurs qu’illustrent deux tablettes de bronze retrouvées en péninsule Ibérique, attestant la double dimension militaire et administrative des responsabilités des magistrats chargés des provinces58. Toutefois, quelques inscriptions d’un très grand intérêt donnent un aperçu des réalités militaires, notamment le texte d’une deditio, datée avec certitude de l’année 104 et reçue par le gouverneur de la province d’Hispania Ulterior Lucius Caesius59, ainsi que le célèbre bronze d’Ascoli qui nous livre la liste des membres d’une turma d’auxiliaires hispaniques employée en Italie au cours de la Guerre sociale60.
14Les sources littéraires forment donc l’essentiel de notre documentation. Variées, elles abondent en mentions relatives aux opérations militaires menées dans la Péninsule. La longueur et la réputation des guerres en Hispania ont largement attiré l’attention des auteurs anciens, si bien que les principaux épisodes nous sont relatés avec un certain luxe de détails61. En effet, l’association répétée des provinces hispaniques aux grands traumatismes de la République moyenne et tardive (seconde guerre punique, guerres celtibéro-lusitaniennes, guerres civiles) ainsi qu’aux personnalités marquantes de la période (Scipion l’Africain, Caton, Sempronius Gracchus, Scipion Émilien, Sertorius, Pompée, César) place fréquemment les événements survenus dans ces régions au cœur de ce qui, selon les littéraires de l’époque, était digne d’être rapporté. Si Polybe, Salluste ou corpus césarien manifestent la préoccupation la plus grande pour les questions militaires, on a souvent trop sous-estimé la valeur, sur ce plan, de fournie par Tite-Live qui, comme Plutarque après lui, et surtout, dépend étroitement de ces sources contemporaines de la conquête62. Dans un autre registre, les compilations d’exempla, très prisées au Haut-Empire, les Faits et paroles mémorables de Valère-Maxime, contemporain de Tibère, et Stratagèmes de Frontin, haut fonctionnaire sous Domitien, comportent de anecdotes, souvent riches en détails techniques, sur les exploits militaire du passé. D’une valeur historique inégale, ces exempla nous offrent cependant une vision très concrète des conceptions et des pratiques militaires. Puisant matière dans la tradition classique, ils se réfèrent très régulièrement aux campagnes hispaniques. Ces quelques remarques ne constituent pas, loin s’en faut, inventaire exhaustif de l’information disponible. Elles entendent avant tout sur la profusion et la diversité des textes qui permettent de suivre, dans certaine continuité, l’intervention des légions au cours des guerres en Hispanie. La prédilection des auteurs anciens pour ce que l’on nomme aujourd’hui, un léger dédain, l’« histoire-bataille » et leur volonté de mettre en valeur la de l’instrument militaire romain les ont naturellement incités à multi les notations sur les aléas du commandement, la nature des terrains opération, le recrutement des troupes ou le déroulement des combats. Sus de manque de rigueur, voire de fantaisie, par l’historiographie moderne, données ont été insuffisamment exploitées, même de façon critique. Elles ont servi souvent qu’à alimenter ponctuellement en exemples, au gré des, les restitutions générales proposées pour l’exercitus républicain, alors qu’elles sont susceptibles, selon nous, d’être réinscrites dans un ensemble qui donne sens à l’expérience militaire romaine en Hispania.
15Outre l’intérêt des nombreuses mentions transmises par les sources littéraires, faut souligner la particularité de la péninsule Ibérique dans le domaine de militaire63. Rappelons en effet que c’est en Espagne qu’ont été au jour depuis le début du XXe siècle de nombreuses structures attribuées des camps légionnaires républicains. Les plus célèbres demeurent celles par A. Schulten, entre 1905 et 1912, autour de Numance et considérées comme les éléments de la circonvallation établie en 133 par Scipion au du siège de la ville64. Cependant, elles ne représentent qu’une partie d’un plus vaste. On dénombre à ce jour plus d’une vingtaine de sites répertoriés comme des établissements militaires républicains (voir carte p. 297). Ils se trouvent dispersés sur la majeure partie de la Péninsule et, selon les chronologies admises, couvrent l’intégralité de la période de conquête65. Cette caractéristique de la documentation a contribué à renforcer l’idée d’une spécificité de la présence militaire en Hispania66. Il conviendra, par conséquent, d’accorder une attention particulière à cet aspect du dossier et d’en soumettre les données à un examen critique aussi serré que peut le permettre l’état actuel de nos connaissances sur ces vestiges dont la nature est souvent moins bien établie que ne le laisse penser, de prime abord, la très large diffusion de leur mention dans la bibliographie.
16Une difficulté de la définition de cette étude réside dans l’établissement de bornes chronologiques. Le terminus post quem paraît évident. Ce ne peut être que 218, puisque Rome n’avait jamais envoyé de légions dans la Péninsule avant cette date67. En revanche, le terminus ante quem s’est révélé plus délicat à fixer. Inclure la période des guerres civiles qui s’ouvre en 82 nous semblait devoir s’imposer, dans la mesure où la conquête se poursuit alors sous d’autres formes, tandis que les armées stationnées sur place sont réputées pour avoir noué avec les provinces un lien renforcé à cette époque. L’analyse devait-elle par conséquent se prolonger jusqu’en 19, au moment où Auguste achève officiellement de soumettre les populations du Nord-Ouest, restées jusque-là hors de la domination romaine ? La date est traditionnellement considérée, depuis l’Antiquité même, comme le point final de la conquête de la Péninsule68. Ce choix pouvait donc apparaître comme un aboutissement logique. Mais, si la fin des guerres cantabres revêt une signification incontestable pour l’histoire des Hispaniae, cette dernière étape de la progression romaine échappe, selon nous, au cadre du sujet, dans la mesure où elle est menée à un moment où les structures traditionnelles de la république sénatoriale ont, en dépit des apparences, connu des altérations profondes69. En ce sens, il serait plus juste, à première vue, d’arrêter l’analyse au moment où Octave, après avoir mis un terme aux guerres civiles, procède en janvier 27 à la restitution de la res publica et reçoit en retour l’imperium dans les provinces puis le titre d’Auguste, marquant ainsi l’avènement de fait du Principat70. La réorganisation administrative des provinces de Citérieure et d’Ultérieure la même année fournit alors un équivalent séduisant, dans le domaine hispanique, de ce passage de la République à l’Empire71. Cependant, ce terme conventionnel demeure peu satisfaisant, car la substitution de l’armée de métier augustéenne à l’ancienne militia républicaine n’intervint pas de manière aussi brutale. Du point de vue de l’origine même de l’armée impériale, il est sans doute préférable de remonter plutôt aux lendemains d’Actium, lorsqu’Octave commence à réorganiser les fondements institutionnels de l’État. La conception de cette nouvelle armée permanente puisait incontestablement ses racines dans les pratiques antérieures, notamment dans les innovations radicales du Second Triumvirat qui constitue une période cruciale, mais souvent méconnue, dans le passage de l’armée républicaine à l’armée impériale72. On a pu affirmer ainsi, non sans raisons, que, de ce point de vue, la véritable rupture se produisit après Philippes73. Plus généralement, on doit admettre que la guerre civile de 49-45 et la mort de César représentent un tournant décisif dans l’effacement progressif des infrastructures et des mentalités de la militia républicaine74. Pour cette raison, il a paru préférable d’arrêter l’étude en 45, ce qui a l’avantage de correspondre à un moment charnière, autant dans l’évolution de l’armée qui a mené la conquête des provinces hispaniques que dans l’histoire de celles-ci, puisque la bataille de Munda clôt le demi-siècle de guerres civiles ayant accéléré l’intégration des Hispaniae au monde romain.
17Pas plus qu’une histoire de la conquête romaine en Espagne dans tous ses aspects, ce livre ne se veut une étude exhaustive de l’armée de la Rome républicaine, si bien que de nombreux éléments essentiels de l’organisation et du fonctionnement de cette institution, comme la cavalerie, l’artillerie ou la marine, sont évoqués au cours du développement sans faire l’objet d’une analyse spécifique, tandis que d’autres, comme la religion, ne sont pas abordés, faute de sources. La description statique de la Rangordnung excédait également le cadre fixé à ce travail. Cette étude s’intéresse aux moyens et aux méthodes mis en œuvre par les armées romaines pour mener la guerre dans la péninsule Ibérique. Elle a donc été organisée autour des trois objectifs qui semblent définir a priori les missions de ces armées au cours de l’entreprise de conquête : des peuples à combattre, des territoires à contrôler, des ressources à exploiter. En effet, contrairement à l’idée majoritairement émise dans l’historiographie, il ne nous semble pas que cette triple exigence forma, dans le cas de l’Hispanie, une source de déséquilibres dans la conception traditionnelle de la militia républicaine. La première partie examinera donc dans quelle mesure les conditions propres aux guerres ibériques ont entraîné des difficultés inédites requérant un déploiement inhabituel d’armées nombreuses et expérimentées. La seconde partie tâchera de mettre en évidence le fait que les nécessités de la conquête de régions vastes et lointaines n’ont pas donné naissance à des pratiques nouvelles de contrôle des territoires ni abouti à reformuler progressivement les fonctions stratégiques attribuées aux troupes envoyées en Hispania ; enfin, la troisième partie posera la question de savoir si l’exploitation du potentiel matériel et humain de la Péninsule contribua ou non à affaiblir la dépendance des armées stationnées dans les provinces vis-à-vis du pouvoir central.
Notes de bas de page
1 Toutes les indications chronologiques données désormais dans le texte sont avant J.-C., sauf mention contraire.
2 La Sicile est passée sous contrôle romain dès 241 et la Sardaigne dès 234, mais Rome n’a créé de préteurs pour les gouverner annuellement qu’à partir de 227 (Tite-Live, Per., XX ; Dig., I, 2, 32). Voir J.-L. Ferrary, Philhellénisme et impérialisme, pp. 18-19, qui suggère le recours à des commandants cum imperio entre 241 et 227. Le schéma est le même en Espagne, où la suprématie romaine est acquise dès 206, mais où l’envoi de magistrats réguliers n’intervient qu’à partir de 197. J. Principal-Ponce, « Els inicis del procés imperialista romà a Catalunya », pp. 203-216, a récemment proposé d’interpréter ce décalage comme une volonté délibérée de la part du milieu dirigeant romain de maintenir en Espagne une situation de non droit, propice à l’extorsion des populations locales. Ce point de vue, discutable en soi, nous semble d’autant plus contestable que T. C. Brennan, The Praetorship in the Roman Republic, p. 163, insiste bien, au contraire, sur le fait que le cadre provincial répondait au besoin d’offrir des commandements réguliers à des généraux qui ne pouvaient sans cela espérer triompher. Le retard pris dans la régularisation des affaires d’Espagne s’expliquerait plutôt pour des raisons conjoncturelles. Il faut tenir compte aussi des lenteurs liées à ce qu’impliquait la création de deux nouveaux préteurs, notamment en matière de compétition politique (ibid., pp. 168-169).
3 En Occident, la province d’Afrique est formée en 146 et celle de Gaule Transalpine en 121 (mais le premier gouverneur attesté en Gaule Narbonnaise n’est connu que pour 74-72) ; en Orient, l’interventionnisme croissant de Rome aux cours des guerres contre les monarchies hellénistiques conduisit à la mise en place de la province de Macédoine en 146, aussitôt suivie de celle d’Asie en 129. Cette expansion, poursuivie tout au long du Ier siècle culmina avec les conquêtes de Pompée en Orient et de César en Gaule. Sur les étapes de la conquête romaine, voir : Th. Mommsen, Histoire romaine ; J. Bayet et E. Pais, Histoire romaine, t. I ; G. Bloch et J. Carcopino, Histoire romaine, t. II ; J. Carcopino, Jules César ; A. Piganiol, La conquête romaine ; Cl. Nicolet, Rome et la conquête du monde méditerranéen, t. I ; Cl. Nicolet (dir.), Rome et la conquête du monde méditerranéen, t. II ; G. Clemente, F. Coarelli et E. Gabba (éd.), L’impero mediterraneo. La repubblica imperiale ; A. E. Astin, M. W. Frederiksen, R. M. Ogilvie et F. W. Walbank (éd.), The Cambridge Ancient History, t. VIII ; J. A. Crook, A. Lintott et E. Rawson (éd.), The Cambridge Ancient History, t. IX ; F. Hinard (éd.), Histoire romaine, t. I.
4 Voir notamment les remarques de G. V. Sumner, « Notes on Provinciae in Spain », pp. 129-130, repoussant la création de la Citérieure et de l’Ultérieure à l’année 133. Cette tentative n’est toutefois guère convaincante, comme l’ont montré les objections formulées par J. S. Richardson, Hispaniae, notamment p. 157.
5 Sur la création des nouveaux préteurs en 197, voir T. C. Brennan, The Praetorship in the Roman Republic, pp. 164-166 ; la dimension territoriale de la province est un objet de discussion : sur un plan général, J. -M. Bertrand, « À propos du mot provincia », pp. 191-215, estime que, dès l’origine, la provincia ne se limitait pas à une notion purement abstraite mais s’appliquait aussi, et même surtout, à un territoire dont les contours demeuraient toutefois imprécis ; récemment, P. Le Roux, « L’invention de la province d’Espagne citérieure », notamment pp. 126-130, a rappelé toutefois que cette dimension spatiale ne procédait pas d’une logique géographique, mais se fondait exclusivement sur des préoccupations politiques et administratives.
6 P. Le Roux, Romains d’Espagne, pp. 19-58 ; J. S. Richardson, The Romans in Spain, pp. 9-126.
7 Pour le récit des événements depuis la seconde guerre punique jusqu’à Auguste, on consultera J. M. Blázquez Martínez et Á. Montenegro Duque, Historia de España, t. II (1), pp. 5-192. En dernier lieu, voir J. M. Roldán Hervás et F. Wulff Alonso, Citeriory Ulterior, et M. Luik, Derschwierige Weg zur Weltmacht.
8 L’analyse de l’impérialisme romain a été renouvelée e 1979 par le livre de W. V. Harris, utilisé ici dans sa traduction espagnole : Guerra e imperialismo en la Roma republicana. L’auteur a définitivement montré que l’impérialisme républicain résultait de la place fondamentale tenue par la guerre dans la société romaine. Depuis, la discussion a essentiellement apporté un certain nombre de nuances et de compléments à cette démonstration, sans toutefois la remettre profondément en cause : A. N. Sherwin-White, « Rome the Agressor ? », pp. 177-181, pp. 177-181, pp. 177-181 ; J. A. North, « The Development of Roman Imperialism », pp. 1-9 ; W. V. Harris (éd.), The Imperialism of Mid-Republican Rome ; E. Hermon, « L’impérialisme romain républicain », pp. 407-416 ; J. W. Rich, « Fear, Greed and Glory », pp. 38-68 ; K. A. Raaflaub, « Born to be Wolves ? », pp. 273-314.
9 Cl. Nicolet, Rome et la conquête du monde méditerranéen, t. I, p. 303.
10 Souligné avec force par Polybe, VI, 52, 4 dans sa comparaison entre l’armée carthaginoise et l’armée romaine, dont il explique la supériorité, ce lien organique de l’armée à la cité a été rappelé par de très nombreux travaux : Th. Mommsen, Le droit public romain, t. VII, pp. 282-288 ; J. Marquardt, De l’organisation militaire chez les Romains ; G. Veith, « Die Römer » ; H. M. D. Parker, The Roman Legions, pp. 11-20 ; M. Marín y Peña, Instituciones militares romanas, pp. 3-6 (§ 4-11) ; Cl. Nicolet, Le métier de citoyen, pp. 122-149 ; L. Keppie, The Making of the Roman Army, pp. 14-57 ; J. Patterson, « Military Organization and Social Change in the Later Roman Republic », pp. 92-112.
11 W. Liebenam, « Dilectus », col. 591-639 ; Cl. Nicolet, Le métier de citoyen, p. 134.
12 A. J. Toynbee, Hannibal’s Legacy, p. 92 ; P. A. Brunt, Italian Manpower, p. 415.
13 H. M. D. Parker, The Roman Legions, pp. 22-23 ; E. Gabba, Esercito e società, pp. 22-28 ; R. E. Smith, Service in the Post-Marian Army, pp. 1-10 ; P. A. Brunt, Italian Manpower, pp. 75-77 et 402-408 ; P. A. Brunt, Conflits sociaux en République romaine, p. 31 ; Cl. Nicolet, Le métier de citoyen, p. 152.
14 C’est cette analyse qui a conduit à prêter un souci militaire aux réformes gracchiennes, dont le but aurait précisément été de chercher à reconstituer une réserve suffisante d’adsidui destinée à permettre de maintenirle recrutement de l’armée censitaire traditionnelle. Voir E. Gabba, Esercito e società, p. 22 ; D. C. Earl, Tiberius Gracchus, pp. 34-38 ; A. J. Toynbee, Hannibal’s Legacy, p. 96 ; Cl. Nicolet, Les Gracques, pp. 104-105 ; A. E. Astin, Scipio Aemilianus, p. 196 ; P. A. Brunt, Italian Manpower, p. 75.
15 En 171 (Tite-Live, XLII, 32-35), en 169 (Tite-Live, XLIII, 14, 2-10 et 15, 7-8), en 151 (Polybe, XXXV, 4 ; Tite-Live, Per., XLVIII, 17-18 ; Appien, Ib., 49 ; Orose, IV, 21, 1 ; Valère-Maxime, III, 2, 6), en 145 (Appien, Ib., 65), en 140 (Tite-Live, Per. Oxy., LIV), en 138 (Tite-Live, Per., LV ; Frontin, Strat., IV, 1, 20).
16 R. E. Smith, Service in the Post-Marian Army, pp. 5-8 ; A. J. Toynbee, Hannibal’s Legacy, pp. 87-100 ; A. E. Astin, Scipio Aemilianus, pp. 167-172 ; P. A. Brunt, Italian Manpower, pp. 396-405 ; W. V. Harris, Guerra e imperialismo en la Roma republicana, pp. 46-50.
17 Sur le passage à une armée de volontaires, suite aux difficultés de recrutement, voir Th. Mommsen, Histoire romaine, t. II, p. 847 ; E. Gabba, Esercito e società, p. 27 ; A. J. Toynbee, Hannibal’s Legacy, pp. 96-99 ; G. R. Watson, The Roman Soldier, p. 21 ; P. A. Brunt, Italian Manpower, p. 393 ; Cl. Nicolet, Le métier de citoyen, pp. 125 et 177.
18 E. Gabba, Esercito e società, pp. 2 et 30-34, a montré que l’initiative marienne s’inscrivait dans un processus de longue durée. Il est suivi par P. A. Brunt, Italian Manpower, p. 406 ; M. C. J. Miller, The Professionalization of the Roman Army, notamment pp. 27-28 ; L. Keppie, The Making of the Roman Army, p. 77.
19 E. Gabba, Esercito e società, pp. 61 et 27 ; Cl. Nicolet, Le métier de citoyen, pp. 127-128. Tout en insistant sur la transformation réelle de l’origine sociale et des motivations du miles proletarius du Ier siècle, les partisans de cette théorie ont néanmoins abandonné, à juste titre, l’idée classique, exprimée par J. Marquardt, De l’organisation militaire chez les Romains, p. 142, selon laquelle les légions post-mariennes étaient devenues des armées de mercenaires. J. Marquardt divisait en effet (p. 3) l’histoire militaire de Rome en trois périodes : les armées de citoyens-soldats (de la fondation de Rome jusqu’à la Guerre sociale), les armées de mercenaires (de la Guerre sociale aux guerres civiles) et l’armée permanente (à partir des guerres civiles).
20 Outre les références déjà citées dans les notes précédentes, on doit mentionner : P. A. Brunt, « The Army and the Land in the Roman Revolution », pp. 240-280 ; J. Harmand, « Le prolétariat dans la légion de Marius », pp. 61-74 ; E. Gabba, « Sull’arruolamento dei proletarii nel 107 a. C. », pp. 135-136 ; J. M. Roldán Hervás, « La organización militar romana a mitad del siglo II », pp. 17-60.
21 A. von Premerstein, Vom Werden und Wesen des Prinzipats, pp. 23-32 ; L. Ross-Taylor, La politique et les partis à Rome au temps de César, pp. 107-109 ; J. Gagé, « Les clientèles triomphales de la République romaine », pp. 1-31 ; W. Schmitthenner, « Politik und Armee in der späten römischen Republik », pp. 1-17 ; R. Syme, La révolution romaine, p. 29 ; J. Hellegouarc’h, « Armée et parti politique sous la République romaine », pp. 157-169 ; H. Aigner, Die Soldaten als Machtfaktor in der ausgehenden römischen Republik ; E. H. Erdmann, Die Rolle des Heeres in der Zeit von Marius bis Caesar ; V. Giuffrè, Aspetti costituzionali del potere dei militari nella tarda respublica, pp. 23 et 86 ; L. de Blois, The Roman Army and Politics in the First Century B. C.
22 H. -C. Schneider, Das Problem der Veteranenversorgung in der späteren römischen Republik ; J. C. Mann, Legionary Recruitment and Veteran Settlement during the Principate (le chapitre Ier traite des questions républicaines) ; L. Keppie, Colonisation and Veteran Settlement in Italy.
23 R. E. Smith, Service in the Post-Marian Army, p. 46 ; J. Harmand, L’armée et le soldat à Rome, p. 416 ; L. Keppie, The Making of the Roman Army, p. 55 ; Cl. Nicolet, Le métier de citoyen, p. 155 ; P. A. Brunt, Italian Manpower, p. 411, a bien montré les raisons pour lesquelles il n’était pas possible d’envisager un volontariat massif ; il est suivi par E. S. Gruen, The Last Generation of the Roman Republic, p. 367.
24 P. A. Brunt, « The Army and the Land in the Roman Revolution », pp. 240-280 ; la question du « professionnalisme » des armées de la fin de la République se pose en effet en d’autres termes : sur ce point, voir en dernier lieu L. de Blois, « Army and Society in the Late Roman Republic », pp. 11-31.
25 Tout en reconnaissant le rôle des liens clientélaires dans la relation entre le général et sa troupe au Ier siècle, J. Harmand, L’armée et le soldat à Rome, p. 446, invite à en nuancer leur poids ; même prudence de la part de P. A. Brunt, « The Army and the Land in the Roman Revolution », pp. 257-260, E. H. Erdmann, Die Rolle des Heeres in der Zeit von Marius bis Caesar, et E. S. Gruen, The Last Generation of the Roman Republic, p. 378. Plus radicalement, N. Rouland, « Armées personnelles et relations clientélaires au dernier siècle de la République », pp. 16-38, repris et développé dans Id., Pouvoir politique et dépendance personnelle dans l’Antiquité romaine, pp. 348-400, a remis en question l’existence même de ces clientèles militaires.
26 J. W. Rich, « The Supposed Roman Manpower Shortage of the Later Second Century BC », pp. 287-331 ; ses conclusions sont suivies en partie par la version révisée de P. A. Brunt, « The Army and the Land in the Roman Revolution », p. 253, n. 58 ; sur la critique de la théorie de E. Gabba, voir également : Y. Shochat, Recruitment and the Programme of Tiberius Gracchus, pp. 95-98. En dernier lieu, voir les importantes remarques de N. Rosenstein, « Republican Rome », pp. 207-208, et Id., Rome at War, en particulier pp. 185-188, qui pense qu’il faut renoncer à penser que les adsidui formaient moins de la moitié du corps civique à la fin du IIIe s. Il est suivi par P. Erdkamp, « Army and Society », pp. 289-290, qui admet qu’il n’y a pas eu de déclin du nombre d’adsidui au IIe s.
27 Mêmes doutes de la part de N. Rosenstein, Rome at War, notamment pp. 105-106, qui croit au contraire à une capacité constante de Rome à mobiliser une forte proportion d’hommes sur de longues durées, dans la mesure où il montre que ce niveau élevé de mobilisation était parfaitement compatible avec le modèle d’agriculture de subsistance et avec les structures familiales alors en vigueur en Italie.
28 Selon P. Erdkamp, « The Transformation of the Roman Army in the Second Century B. C. », pp. 41-51, et notamment p. 49, la prolétarisation fut bien le résultat des évolutions du IIe s., mais elle ne s’explique ni par une crise démographique, ni par une crise de la paysannerie. Au contraire, il insiste plutôt sur l’essor économique et l’urbanisation qui, en rendant le service militaire moins attractif pour les citoyens « of moderate property », auraient en fin de compte abouti à restreindre le recrutement aux seuls plus pauvres, créant par là-même un fossé croissant entre une armée de volontaires aguerris et une société que l’auteur juge de plus en plus démilitarisée. Voir aussi P. Erdkamp, « Army and Society », pp. 291-292. Cette hypothèse repose toutefois sur l’idée d’une désaffection croissante du corps civique envers le service militaire, dont la réalité ne nous paraît pas entièrement démontrée.
29 H. M. D. Parker, The Roman Legions, pp. 47-48, estimait en effet que les armées post-mariennes avaient permis l’âge d’or de la conquête seulement parce que le dilectus de 107 avait ouvert la voie à un nouveau type d’armée, différent des légions sénatoriales traditionnelles ; de même, l’intégralité de la démonstration de J. Harmand, L’armée et le soldat à Rome, est destinée à opposer la performance de l’exercitus césarien à celle des armées post-mariennes, à ses yeux inchangées. En remettant en cause l’impact de la réforme de Marius, cet auteur ne fait donc, au fond, que repousser la refonte de l’instrument militaire jusqu’à César dont il exalte la lucidité.
30 R. E. Smith, Service in the Post-Marian Army, spécialement pp. 11-43.
31 J. Harmand, L’armée et le soldat à Rome, pp. 38, 52 et 431 ; P. A. Brunt, Italian Manpower, pp. 218-220 et 227-232 ; Id., « The Army and the Land in the Roman Revolution », pp. 255-256 ; L. Keppie, The Making of the Roman Army, p. 77. La théorie de R. E. Smith a été cependant reprise récemment par F. Hinard, « La militarisation de l’Afrique sous la République », p. 37. Cet auteur suggère que la province d’Afrique possédait une véritable armée de garnison.
32 Un florilège de citations tirées de plusieurs ouvrages fondamentaux suffit à en prendre conscience : Th. Mommsen, Histoire romaine, p. 848 : « L’institution ancienne étant devenue impossible, la pression des circonstances amena la refonte de la légion » ; H. M. D. Parker, The Roman Legions, p. 25 : « The institution of a professional army was officially recognized. […] Consequently training and discipline were raised to a much higher level of efficiency, and we shall see that it is through these professional soldiers that Rome not merely acquired the further additions to her territory but administered them after their conquest » ; R. E. Smith, Service in the Post-Marian Army, p. 10 : « For it is very certain that Rome’s eastern and northern expansion during the first century would have been impossible, had she not had at her disposal the means to safeguard her newly-won territories by establishing permanent garrison forces where circumstances required it » ; A. J. Toynbee, Hannibal’s Legacy, p. 96 évoque la « increasing inadequacy of Rome’s traditional military institutions for meeting her current military requirements » ; J. Harmand, L’armée et le soldat à Rome, p. 12 : « L’inadaptation des armées contemporaines à des tâches pour lesquelles elles n’étaient point faites, l’importance relative des pertes, le dégoût consecutive des classes moyennes pour le service ont rapidement provoqué la dégradation de l’instrument militaire romain » ; L. Keppie, « The Roman Army of the Later Republic », p. 170 : « Marius’name appears regularly in any account of Roman history as a major military reformer, a man by whose efforts the machinery of war, unchanged for centuries and more suited to local conflicts in Italy than to long drawn-out struggles far from home, was brought into line with current realities » ; J. M. Roldán Hervás, « La organización militar romana a mitad del siglo II », p. 44 : « … el ejército imperialista, que la política exterior romana desde comienzos del siglo II a.C. necesitaba, requería una transformación radical del éjército cívico en cuanto a la naturaleza del mando, reclutamiento, composición de la legión y, sin duda también, estructuras y técnicas propiamente militares » ; encore dernièrement, A. K. Goldsworthy, The Complete Roman Army, p. 44 : « The acquisition of overseas provinces created a demand for large permanent garrisons […]. Eventually the Republic was forced to abandon the militia system in favour of a professional army, recruited overwhelmingly from the poorest citizens. »
33 L’expression est de J. Harmand, L’armée et le soldat à Rome, p. 13.
34 R. E. Smith, Service in the Post-Marian Army, pp. 6 et 28-29 ; E. Gabba, Esercito e società, pp. 26 et 54 ; A. J. Toynbee, Hannibal’s Legacy, p. 62 ; J. Harmand, L’armée et le soldat à Rome, p. 12 ; P. A. Brunt, Italian Manpower, p. 400 ; Y. Shochat, Recruitment and the Programme of Tiberius Gracchus, p. 60 ; J. W. Rich, « The Supposed Roman Manpower Shortage of the Later Second Century BC », p. 318 ; P. Connolly, « The Roman Army in the Age of Polybius », p. 165 ; J. M. Roldán Hervás, « La organización militar romana a mitad del siglo II », p. 47 ; Id., El ejército de la República romana, pp. 46-47. Encore dernièrement : D. Potter, « The Roman Army and the Navy », pp. 79-80.
35 G. Brizzi, « Roma e la Spagna », pp. 23-30, dont les conclusions sont reprises dans Id., Le guerrier de l’Antiquité classique, pp. 141-155.
36 Appien, Ib., 84-98.
37 A. Schulten, Numantia I, II, III et IV.
38 Dans Historia de Numancia, un livre qui entendait diffuser ses principales conclusions, A. Schulten écrit ainsi (p. 15) : « La gran Cartago resultó enemigo mucho menos peligroso que la pequeña Numancia. » En cela, il reproduit un topos antique qui, dès le Ier siècle av. J. -C., tendait à associer de façon rhétorique les deux villes dans une menace commune pour la survie de Rome. Voir Cicéron, Pro Murena, XXVIII, 58 ; De off., I, 35 ; Phil., IV, 5, 13 ; Tite-Live, Per., LIX ; Horace, Odes, II, 12, v. 1-4 ; Valère-Maxime, V, 3, 2 ; Appien, Ib., 98. Plus largement, la destruction de Numance a fini par marquer, au même titre que celles de Carthage et de Corinthe, la fin de l’âge d’or de Rome et le début des dissensions internes (Florus, I, 34 [= II, 18] ; Orose, V, 8, 2). Certains des aspects liés au traitement de la chute de Numance dans l’historiographie latine ont été abordés récemment par F. J. Tovar Paz, « En torno a las destrucciones de Sagunto y Numancia », pp. 181-190.
39 A. Schulten, Numantia I, p. 266 : « Die Annalen des keltiberischen und des gleichzeitiger lusitanischen Krieges sind ein einziges, fortlaufendes Sündenregister der römischen Feldherrn und der herrschenden Oligarchie. »
40 A. Schulten, Historia de Numancia, p. 9, citant E. Meyer : « La República romana se desangró a causa de los sacificios a que la obligaron de manera continuada las guerras hispánicas y de la necesidad de mantener allí un ejército permanente. » A. Schulten estimait que ces contraintes avaient préparé l’avènement des pouvoirs militaires du Ier siècle en systématisant la prorogation des commandements et en favorisant l’autonomie des gouverneurs. Il détectait ainsi de nettes tendances monarchiques dans l’activité d’un Scipion Émilien et de sa famille.
41 Appien, Ib., 85 ; Tite-Live, Per., LVII ; Valère-Maxime, II, 7, 1 ; Plutarque, Apopht. Scip. Aem., 16 ; Florus, I, 34 [= II, 18].
42 Un bon exemple en est donné par J. M. Blázquez Martínez, « El impacto de la conquista de Hispania en Roma (218-154 a. de C.) », pp. 1-29, et « El impacto de la conquista de Hispania en Roma (154-83 a. de C.) », pp. 168-186. Ce point de vue n’est jamais remis en cause, mais il est parfois nuancé. Voir ainsi J. M. Roldán Hervás, « Hispania republicana », p. 100 : « No se puede negar la existencia de crisis en el ejército y en el gobierno senatorial, pero Hispania y sus guerras son un eslabón más de la cadena. »
43 L. Keppie, The Making of the Roman Army, p. 44, évoque « an ancient equivalent of the Russian front » ; L. A. Curchin, The Romanization of Central Spain, p. 42, estime pour sa part que « Central Spain had the potential to be Rome’s Vietnam ».
44 Le dynamisme de la recherche sur le domaine ibérique est attesté par les dépouillements quinquennaux de la Revue des études anciennes, regroupés en un volume en 1993 : R. Étienne et F. Mayet (éd.), Histoire et archéologie de la péninsule Ibérique. Depuis, voir les chroniques suivantes toujours publiées dans même revue : J. Fontaine et alii (éd.), « Chronique V : 1988-1992 », pp. 253-453 ; Id., « Chronique VI : 1993-1997 », pp. 97-104, et Id., « Chronique VII : 1998-2002 », pp. 149-510. Voir aussi, dernièrement le bilan proposé par S. J. Keay, « Recent Archaeological Work in Roman Iberia », spécialement pp. 156-166 pour la période républicaine.
45 L’association ordinaire de la période républicaine avec une succession d’engagements est reflétée de manière exemplaire dans la construction de la synthèse de L. A. Curchin, Roman Spain. La première partie (« Conquest ») est axée sur le récit chronologique des opérations militaires tandis que la seconde (« Assimilation »), qui correspond à la période impériale, est organisée de façon thématique.
46 Les deux ouvrages essentiels sur l’armée romaine dans la péninsule Ibérique ont ainsi trait à la période impériale. L’étape républicaine y est traitée sous forme de chapitres introductifs destinés à réinsérer les évolutions intervenues sous le Principat dans une continuité historique. Néanmoins, ces pages représentent encore les contributions les plus marquantes à la compréhension des réalités militaires républicaines : J. M. Roldán Hervás, Hispania y el ejército romano, pp. 21-47 et 159-188 ; P. Le Roux, L’armée romaine et l’organisation des provinces ibériques, pp. 33-52.
47 J. Frantz, Die Kriege der Scipionen in Spanien ; M. Jumpertz, Die römische-karthagische Krieg in Spanien ; W. Brewitz, Scipio Africanus Maior in Spanien ; A. Schulten, « Viriato », pp. 126-149 et 272-281 ; A. Schulten, Sertorio ; H. Simon, Roms Kriege in Spanien ; H. G. Gundel, « Viriato », pp. 175-198 ; A. M. de Guadán, Comentario histórico-numismático sobre la campaña de Escipión en Hispania ; J. Martínez Gázquez, La campaña de Catón en Hispania ; G. Fatás Cabeza, « Hispania entre Catón y Graco », pp. 269-313 ; P. O. Spann, Quintus Sertorius and the Legacy of Sulla ; F. García Morá, Un episodio de la Hispania republicana ; M. Pastor Muñoz, Viriato ; T. Ñaco del Hoyo, « Una historia de la primera fase de la intervención romana en Hispania (218-133 a. de C.) », pp. 81-102. En revanche, J. M. Blázquez Martínez, « Las guerras en Hispania y su importancia », pp. 11-65, ne présente qu’un résumé inutile des principaux épisodes de l’histoire militaire des Hispaniae.
48 P. Groebe, « Cäsars Legionen im gallischen Kriege », pp. 452-460 ; J. Vogt, « Caesar und seine Soldaten », pp. 89-109 ; J. Harmand, Une campagne césarienne. Alésia ; M. Reddé (éd.), L’armée romaine en Gaule.
49 La démonstration la plus radicale du caractère révolutionnaire de l’armée césarienne est donnée par J. Harmand, L’armée et le soldat à Rome, spécialement p. 493. Voir aussi W. Rüstow, Heerwesen und Kriegsführung C. Julius Cäsars ; Th. Mommsen, « Das Militärsystem Caesars », pp. 1-15 ; E. Sander, « Die Reform des römischen Heerwesens durch Julius Cäsars », pp. 225-254 ; de façon curieuse, les conclusions de celui-ci sont encore suivies de près par J. M. Roldán Hervás, « El ejército de César », pp. 263-279, alors que les innovations introduites par César ont eu tendance à être entretemps considérablement nuancées, voire rejetées : M. Rambaud, « La cavalerie de César », pp. 435-445 ; L. Keppie, The Making of the Roman Army, p. 101 ; Id., « The Roman Army of the Later Republic », pp. 178 et 188. Désormais, les conceptions stratégiques césariennes sont replacées dans celles du temps : L. Loreto, « Pensare la guerra in Cesare », pp. 239-343. La synthèse récente d’Y. Le Bohec, César, chef de guerre, ne présente d’ailleurs plus César comme un réformateur, mais seulement comme un brillant stratège et tacticien. Les travaux de siège devant Alésia apparaissent ainsi moins comme le produit du seul génie césarien que comme l’application d’une ancienne tradition hellénistique et médio-républicaine, comme l’a récemment fait valoir M. Reddé dans le chapitre qu’il consacre à cette question dans M. Reddé et S. von Schnurbein (éd.), Alésia, pp. 489-506. Les conclusions de cette étude sont reprises dans M. Reddé, Alésia, pp. 58-63.
50 A. E. Astin, « The Roman Commander in Hispania Ulterior in 142 BC », pp. 245-254 ; G. V. Sumner, « Proconsuls and Provinciae in Spain (218/7-196/5 BC) », pp. 85-102 ; J. Martínez Gázquez, « La sucesión de los magistrados romanos en Hispania en el año 196 a. de C. », pp. 173-179 ; J. S. Richardson, Hispaniae.
51 J. S. Richardson, « The Spanish Mines and the Development of Provincial Taxation », pp. 139-152 ; R. C. Knapp, Aspects of the Roman Experience in Iberia ; J. Muñiz Coello, El sistema fiscal en la España romana ; M. Salinas de Frías, El gobierno de las provincias hispanas durante la República romana.
52 H. Galsterer, Untersuchungen zum römischen Städtewesen ; M. A. Marín Díaz, Emigración, colonización y municipalización en la Hispania republicana ; le collectif Aspectos de la colonización y municipalización de Hispania ; J. -M. Roddaz, « Pouvoir et provinces », pp. 13-26 et notamment pp. 17-21.
53 J. M. Roldán Hervás, « El ejército romano y la romanización de la Península Ibérica », pp. 125-145 ; Id., Ejército y sociedad en la Hispania romana, qui réunit huit contributions à différentes publications antérieures dont cinq relatives à l’armée d’époque républicaine ; Id., Los hispanos en el ejército romano de época republicana ; Id., « El papel social del ejército republicano romano en Hispania », pp. 233-241 ; Id., « El ejército romano en Hispania », pp. 65-71.
54 J. M. Roldán Hervás, Hispania y el ejército romano, p. 25 : « … la extensión cada vez mayor de las fronteras de Roma, la pluralidad de frentes y, con ello, la mayor necesidad de contingentes armados obliga a romper con este esquema primitivo ciudadano-soldado » ; Id., « El papel social del ejército republicano romano en Hispania », p. 233 : « … la presencia de un ejército que, si no funcionalmente, al menos porsu presencia continuada puede llamarse de ocupación, es consecuencia exclusiva de lo desmesuradamente prolongado de la etapa de conquista », et p. 235 : « La situación militaren la península había conducido a la creación de un auténtico ejército estable. »
55 M. Rambaud, « Légion et armée romaines », rappelait p. 410 : « Une armée n’est pas un magasin d’habillement, un stock de culottes où l’on fourre des hommes pour les faire marcher au pas. C’est une institution ; c’est la manifestation d’une volonté, volonté nationale ou politique ou individuelle, qui organise ses moyens d’actions et se manifeste par l’action. Et dans le cas de l’armée romaine, c’est le plus souvent par l’analyse des actions qu’on devrait chercher à reconnaître organisation ou institution. » L’article dont cette citation est extraite est un compte-rendu, très sévère, de l’ouvrage de J. Harmand. Publié initialement dans le nº 45 de la Revue des études latines, pp. 112-146, ce texte a été repris dans le recueil Autour de César, pp. 405-433, à la pagination duquel nous nous référons ici.
56 F. E. Adcock, The Roman Art of Warunder the Republic ; H. Delbrück, History of the Art of War ; P. Connolly, Greece and Rome at War ; J. Warry, Histoire des guerres de l’Antiquité.
57 Ce renouvellement fécond a été amorcé dans l’historiographie anglo-saxonne, à la suite des travaux de V. D. Hanson sur la guerre grecque. Voir notamment : A. K. Goldsworthy, The Roman Army at War ; Id., Roman Warfare ; P. Sabin, « The Face of Roman Battle », pp. 1-17 ; C. M. Gilliver, The Roman Art of War ; J. E. Lendon, Soldiers & Ghosts. Ce type d’approche pragmatique, fondé en partie sur le comparatisme et sur la prise en compte de la psychologie du combattant, n’est pas dépourvu de problèmes de méthode et a suscité pour cette raison de vigoureuses critiques, en particulier de la part de E. L. Wheeler, « Battles and frontiers », pp. 645-650. Il faut reconnaître, par exemple, que, si la reconstitution de la bataille romaine proposée par V. D. Hanson lui-même est assez suggestive, son analyse de la guerre et de l’armée romaines est plus contestable : V. D. Hanson, Carnage et culture, pp. 130-169.
58 Il s’agit d’un décret de L. Aemilius Paullus trouvé dans la région de Cadix et daté de 189 (CIL, I2, 614 = CIL, II, 5041 = ILLRP, 514 = ILS, 15) et du règlement d’un conflit entre deux communautés (celles des Salluienses et des Allauonenses) par C. Valerius Flaccus en 87, connu sous le nom de Tabula Contrebiensis (AE 1979, 377). Sur ces textes, voir pour le premier : L. A. García Moreno, « Sobre el decreto de Paulo Emilio y la Turris Lascutana », pp. 195-218 ; A. Valvo, « Tracce di pre-colonato nella penisola iberica ? », pp. 383-392 ; pour le second : G. Fatás Cabeza, Contrebia Belaisca ; J. S. Richardson, « The Tabula Contrebiensis », pp. 33-41 ; P. Birks, J. S. Richardson et A. Rodger, « Further Aspects of the Tabula Contrebiensis », pp. 30-44.
59 Découverte en 1982, cette tablette de bronze, connue sous le nom de « bronze d’Alcántara », est tout à fait exceptionnelle puisque qu’elle nous renseigne de première main sur un acte politico-juridique essentiel de la politique extérieure romaine, mais jusqu’ici documenté par les seules sources littéraires. En outre, elle donne à connaître le nom d’un gouverneur inconnu pour une période mal couverte par nos sources. Elle a été initialement éditée par R. López Melero et alii, « El bronce de Alcántara, una deditio del 104 a. C. », pp. 265-266.
60 CIL, I2, 709 = ILS, 8888. Sur ce texte, voir en premier lieu N. Criniti, L’Epigrafe di Asculum di Gn. Pompeio Strabone.
61 D’une manière plus générale, la péninsule Ibérique est l’une des régions de la partie occidentale de l’Empire les mieux couvertes par les sources littéraires, comme en témoigne la réalisation, entreprise dans les années 1920 à l’initiative d’A. Schulten, d’un imposant recueil en neuf volumes, les Fontes Hispaniae Antiquae (cité infra : FHA), regroupant l’ensemble des témoignages écrits relatifs à l’Espagne antique (voir la bibliographie à la fin de ce travail). Incomplète et aujourd’hui vieillie, cette tentative fait actuellement l’objet d’une ample rénovation sous la direction de J. Mangas et D. Plácido. Quatre des vingt volumes prévus de ces Testimonia Hispaniae Antiqua sont parus à ce jour, regroupant les sources relatives à l’Espagne préromaine.
62 Sur les sources de Tite-Live, Plutarque et Appien, on se reportera aux commentaires des nombreuses éditions critiques des œuvres de ces auteurs.
63 Voir sur ce point l’état de la question dressé en 2006 par F. Quesada Sanz, « Roman Republican Weapons, Camps and Battlefields in Spain », pp. 65-84.
64 A. Schulten, Numantia III et IV.
65 Á. Morillo Cerdán, « Fortificaciones campamentales de época romana en España », pp. 135-190 (et plus particulièrement pp. 135-159) ; M. Luik, « Die römischen Militäranlagen der iberischen Halbinsel », pp. 213-275 (et plus particulièrement pp. 213-246) ; V. García Marcos et Á. Morillo Cerdán, « Twenty Years of Roman Military Archeology in Spain », pp. 779-790 (et pp. 779-780 pour l’époque républicaine) ; Á. Morillo Cerdán, « Conquista y defensa del territorio en la Hispania republicana », pp. 41-80. Récemment, a été mis également au jour un ensemble de vestiges, interprétés comme ceux des camps des guerres cantabres : voir E. Peralta Labrador, « Los castros cántabros y los campamentos romanos de Toranzo y de Iguña », pp. 203-276, et Id., « El asedio romano del castro de la Espina del Gallego (Cantabria) y el problema de Aracelium », pp. 195-212. Les principales conclusions de ces nouvelles découvertes, qu’il faut pour le moment considérer avec prudence, ont été synthétisées par le même auteur dans Los cántabros antes de Roma. Depuis, voir E. Peralta Labrador, « Los castra aestiva del Bellum Cantabricum », pp. 173-182. La mise au point la plus récente sur l’ensemble des sites associés à l’armée pré-impériale a été donnée en 2006, sous la forme d’un très utile catalogue, dans Á. Morillo Cerdán et J. Aurrecoechea (éd.), The Roman Army in Hispania, pp. 211-289, sous le titre « Roman Military Sites in Hispania : an Archaeological Guide », qui remplace désormais les travaux précédemment cités. Signalons que ce guide a été réédité en 2007 dans une traduction espagnole.
66 J. M. Roldán Hervás, Hispania y el ejército romano, p. 169 ; Id., « El papel social del ejército republicano romano en Hispania », p. 234.
67 D’une manière générale, les contacts de Rome avec la péninsule Ibérique étaient restés très limités jusqu’alors : G. V. Sumner, « Roman Policy in Spain before the Hannibalic War », pp. 204-246 ; R. M. Errington, « Rome and Spain before the Second Punic War », pp. 25-57 ; les témoignages archéologiques suggèrent toutefois que des échanges économiques existaient peut-être avec la Catalogne dès le IIIe siècle : J. Principal-Ponce, Las importaciones de vajilla fina de barniz negro en la Cataluña sury occidental ; Id., « Tarraco, las cerámicas del Grupo Hercúleo y el comercio romano-itálico », pp. 233-244.
68 Dion Cassius, LIV, 11 ; Florus, I, 33 [= II, 17].
69 P. Le Roux, L’armée romaine et l’organisation des provinces ibériques, pp. 58, 65 et 77, a ainsi très nettement démontré la relation étroite entre le moment des campagnes asturo-cantabres et l’élaboration progressive de l’armée impériale.
70 Res Gestae, 34.
71 Il est couramment admis, sur la foi de Dion Cassius, LVIII, 12, 4-5 qu’à cette date la péninsule Ibérique a été réorganisée en trois provinces, une publique (Bétique) et deux impériales (Citérieure et Lusitanie) ; voir E. Albertini, Les divisions administratives de l’Espagne romaine, pp. 25-32. Toutefois, un débat existe pour savoir si l’information transmise par Dion Cassius est fiable et si l’évolution dont il parle ne serait pas en fait postérieure. On préfère par conséquent considérer parfois que la mise en place définitive de la tripartition n’intervient pas avant le second voyage d’Auguste en péninsule Ibérique entre 16 et 13. Voir F. Vittinghoff, Römische Kolonisation und Bürgerrechtspolitik, p. 77, et R. Syme, La révolution romaine, p. 373 ; P. Le Roux, L’armée romaine et l’organisation des provinces ibériques, pp. 55-56.
72 W. C. G. Schmitthenner, The Armies of the Triumviral Period ; H. Botermann, Die Soldaten und die römische Politik ; I. Hahn, « Die Legions organisation des zweitens Triumvirats », pp. 199-222 ; J. Harmand, « Les origines de l’armée impériale », pp. 263-298.
73 L. Keppie, The Making of the Roman Army, p. 190.
74 Cl. Nicolet, Le métier de citoyen, p. 186 ; L. Keppie, « The Changing Face of the Roman Legions », notamment pp. 89-90.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Les archevêques de Mayence et la présence espagnole dans le Saint-Empire
(xvie-xviie siècle)
Étienne Bourdeu
2016
Hibera in terra miles
Les armées romaines et la conquête de l'Hispanie sous la république (218-45 av. J.-C.)
François Cadiou
2008
Au nom du roi
Pratique diplomatique et pouvoir durant le règne de Jacques II d'Aragon (1291-1327)
Stéphane Péquignot
2009
Le spectre du jacobinisme
L'expérience constitutionnelle française et le premier libéralisme espagnol
Jean-Baptiste Busaall
2012
Imperator Hispaniae
Les idéologies impériales dans le royaume de León (ixe-xiie siècles)
Hélène Sirantoine
2013
Société minière et monde métis
Le centre-nord de la Nouvelle Espagne au xviiie siècle
Soizic Croguennec
2015